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Assurer la discipline dans l’entreprise Chapitre 12 * Sanctionner un salarié fautif Section 2 * Maîtriser les étapes de la procédure disciplinaire Suivre une procédure simplifiée : dans quels cas ? 180 Le prononcé d'une sanction mineure n'a pas, en principe, à être précédé d'un entretien préalable mais doit être notifié par écrit et motivé. Mais attention ! Cette règle ne s'applique pas dans le cas particulier de l'avertissement précédant un licenciement. C. trav., art. L. 1332-1 et L. 1332-2 Une sanction dite « mineure » n'est, en principe, pas soumise à entretien préalable La procédure de l'entretien préalable n'a pas à être observée en présence d'une sanction mineure, c'est-à-dire un avertissement ou une sanction de même nature qui n'a pas d'incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié. Le cas particulier de l'avertissement L'avertissement ne nécessite pas d'entretien préalable... En principe, l'employeur ne doit convoquer le salarié à un entretien préalable que pour les sanctions les plus graves (mise à pied, rétrogradation, sanction ayant une incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié sanctionné). L'avertissement n'a donc pas à être précédé d'un entretien préalable. La Cour de cassation considérait, il y a encore peu de temps, que l'avertissement ne nécessitait pas d'entretien préalable : quelle que soit la mesure disciplinaire qu'il précède dans l'échelle des sanctions (et même si celle-ci est susceptible d'avoir une incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié), l'avertissement n'ayant pas par lui-même une telle incidence ( Cass. soc., 19 janv. 1989, n° 86-45.505, n° 292 P) ; même si cet avertissement est accompagné de la menace, en cas de récidive, d'une sanction susceptible d'avoir une incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié ( Cass. soc., 13 nov. 1990, n° 87-42.812, n° 4232 P) ; même si une succession d'avertissements se trouve par la suite invoquée à l'appui d'une nouvelle sanction plus grave ; en effet, « quel qu'ait été le nombre d'avertissements invoqués, ceux-ci ne pouvaient par eux-mêmes avoir eu une incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié » ( Cass. soc., 19 janv. 1989, n° 86- 45.505, n° 292 P Cass. soc., 11 janv. 1994, n° 87-44.012). Attention ! D'une part, des dispositions conventionnelles ou du règlement intérieur peuvent prévoir une procédure distincte plus protectrice des droits du salarié et imposer la tenue d'un entretien préalable, y compris pour un avertissement. D'autre part, si, en l'absence de dispositions plus favorables au salarié, l'employeur prend l'initiative de convoquer le salarié à un entretien, il doit respecter la procédure disciplinaire, quelle que soit la sanction finalement infligée. Dans une affaire portée en cassation, un employeur estimait que s'il choisissait de convoquer le salarié à un entretien préalable alors qu'il n'y était pas tenu, il n'était pas forcé de notifier l'avertissement dans le délai maximal d'un mois suivant l'entretien. Il considérait en effet que rien ne l'obligeait à suivre dans toutes ses étapes une procédure qu'il n'était pas légalement tenu de mettre en oeuvre. Son argumentation n'a pas convaincu. Le non-respect de la procédure disciplinaire a alors pour conséquence l'annulation de la sanction ( Cass. soc., 16 avr. 2008, n° 06-41.999, n° 793 FS - P + B). ...sauf s'il peut conduire, à terme, au licenciement du salarié ! Depuis un arrêt du 3 mai 2011, l'employeur doit, avant de notifier un avertissement, convoquer le salarié à un entretien préalable lorsque, selon le règlement intérieur de l'entreprise, l'avertissement peut avoir une influence sur le maintien du salarié dans l'entreprise. C'est le cas lorsqu'il subordonne le licenciement d'un salarié à l'existence de deux sanctions antérieures (soit, par exemple, deux avertissements). Dans ce cas, un avertissement peut avoir une incidence, même non immédiate, sur la présence du salarié dans l'entreprise ( Cass. soc., 3 mai 2011, n° 10-14.104, n° 1028 FS - P + B) et rentre par conséquent dans la catégorie des sanctions soumises à entretien préalable. Les employeurs doivent ainsi scrupuleusement vérifier le contenu du règlement intérieur de l'entreprise. En effet, si ce texte subordonne la possibilité de licencier un salarié pour faute (le plus souvent hors faute grave) à l'existence d'une ou de plusieurs sanctions préalables, l'employeur ne pourra rompre le contrat de travail qu'après avoir appliqué à ces sanctions préalables la procédure disciplinaire jusqu'à lors réservée aux sanctions dites « lourdes ». Reste à savoir si le principe dégagé ici par la Cour doit également trouver application lorsque de telles garanties de fond n'émanent pas du règlement intérieur mais de la convention collective applicable à l'entreprise... Rien ne permet pour l'instant de l'affirmer, seul le règlement intérieur étant visé par l'attendu de principe de l'arrêt. Mais il serait néanmoins logique de le croire. Dans le doute, nous conseillerions d'adopter la même attitude à l'égard de dispositions conventionnelles imposant elles aussi l'existence de sanctions préalables à un licenciement disciplinaire.

Appliquer une sanction à un salarié fautif

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Page 1: Appliquer une sanction à un salarié fautif

Assurer la discipline dans l’entreprise

Chapitre 12 * Sanctionner un salarié fautif Section 2 * Maîtriser les étapes de la procédure disciplinaire

Suivre une procédure simplifiée :dans quels cas ?

180

Le prononcé d'une sanction mineure n'a pas, en principe, àêtre précédé d'un entretien préalable mais doit être notifiépar écrit et motivé.Mais attention ! Cette règle ne s'applique pas dans le casparticulier de l'avertissement précédant un licenciement.

C. trav., art. L. 1332-1 et L. 1332-2 Une sanction dite « mineure » n'est, en principe, pas soumise à entretien préalable

La procédure de l'entretien préalable n'a pas à être observée en présence d'une sanction mineure, c'est-à-dire un avertissement ou une sanction de mêmenature qui n'a pas d'incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié.

Le cas particulier de l'avertissement L'avertissement ne nécessite pas d'entretien préalable...

En principe, l'employeur ne doit convoquer le salarié à un entretien préalable que pour les sanctions les plus graves (mise à pied, rétrogradation, sanctionayant une incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié sanctionné). L'avertissementn'a donc pas à être précédé d'un entretien préalable.

La Cour de cassation considérait, il y a encore peu de temps, que l'avertissement ne nécessitait pas d'entretien préalable :quelle que soit la mesure disciplinaire qu'il précède dans l'échelle des sanctions (et même si celle-ci est susceptible d'avoir uneincidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié),l'avertissement n'ayant pas par lui-même une telle incidence ( Cass. soc., 19 janv. 1989, n° 86-45.505, n° 292 P) ;même si cet avertissement est accompagné de la menace, en cas de récidive, d'une sanction susceptible d'avoir une incidence,immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié ( Cass. soc., 13 nov.1990, n° 87-42.812, n° 4232 P) ;même si une succession d'avertissements se trouve par la suite invoquée à l'appui d'une nouvelle sanction plus grave ; en effet,« quel qu'ait été le nombre d'avertissements invoqués, ceux-ci ne pouvaient par eux-mêmes avoir eu une incidence, immédiate ounon, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié » ( Cass. soc., 19 janv. 1989, n° 86-45.505, n° 292 P Cass. soc., 11 janv. 1994, n° 87-44.012).

Attention ! D'une part, des dispositions conventionnelles ou du règlement intérieur peuvent prévoir une procédure distincte plus protectrice des droits dusalarié et imposer la tenue d'un entretien préalable, y compris pour un avertissement.

D'autre part, si, en l'absence de dispositions plus favorables au salarié, l'employeur prend l'initiative de convoquer le salarié à un entretien, il doit respecter laprocédure disciplinaire, quelle que soit la sanction finalement infligée.

Dans une affaire portée en cassation, un employeur estimait que s'il choisissait de convoquer le salarié à un entretien préalable alors qu'iln'y était pas tenu, il n'était pas forcé de notifier l'avertissement dans le délai maximal d'un mois suivant l'entretien. Il considérait en effet querien ne l'obligeait à suivre dans toutes ses étapes une procédure qu'il n'était pas légalement tenu de mettre en oeuvre. Son argumentationn'a pas convaincu. Le non-respect de la procédure disciplinaire a alors pour conséquence l'annulation de la sanction ( Cass. soc.,16 avr. 2008, n° 06-41.999, n° 793 FS - P + B).

...sauf s'il peut conduire, à terme, au licenciement du salarié ! Depuis un arrêt du 3 mai 2011, l'employeur doit, avant de notifier un avertissement, convoquer le salarié à un entretien préalable lorsque, selon le règlement

intérieur de l'entreprise, l'avertissement peut avoir une influence sur le maintien du salarié dans l'entreprise. C'est le cas lorsqu'il subordonne le licenciementd'un salarié à l'existence de deux sanctions antérieures (soit, par exemple, deux avertissements).

Dans ce cas, un avertissement peut avoir une incidence, même non immédiate, sur la présence du salarié dans l'entreprise ( Cass. soc., 3 mai 2011, n°10-14.104, n° 1028 FS - P + B) et rentre par conséquent dans la catégorie des sanctions soumises à entretien préalable.

Les employeurs doivent ainsi scrupuleusement vérifier le contenu du règlement intérieur de l'entreprise. En effet, si ce texte subordonne la possibilité delicencier un salarié pour faute (le plus souvent hors faute grave) à l'existence d'une ou de plusieurs sanctions préalables, l'employeur ne pourra rompre lecontrat de travail qu'après avoir appliqué à ces sanctions préalables la procédure disciplinaire jusqu'à lors réservée aux sanctions dites « lourdes ».

Reste à savoir si le principe dégagé ici par la Cour doit également trouver application lorsque de telles garanties de fond n'émanent pas durèglement intérieur mais de la convention collective applicable à l'entreprise... Rien ne permet pour l'instant de l'affirmer, seul le règlementintérieur étant visé par l'attendu de principe de l'arrêt. Mais il serait néanmoins logique de le croire. Dans le doute, nous conseillerionsd'adopter la même attitude à l'égard de dispositions conventionnelles imposant elles aussi l'existence de sanctions préalables à unlicenciement disciplinaire.

b.lherbette
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Chapitre 12 * Sanctionner un salarié fautif Section 1 * Cerner la notion de faute du salarié

Connaître les sanctions applicables177

Choisir la sanction la plus adaptée à la faute commise par lesalarié n'est pas aisé. Le juge, s'il est saisi, pourrad'ailleurs contrôler la matérialité de la faute et apprécier lalicéité de la sanction infligée. Nous listons ici les principalessanctions, tout en attirant l'attention du lecteur sur lescaractéristiques ou points de procédure à ne surtout pasnégliger.

Les sanctions les plus couramment utilisées Selon la gravité de la faute commise, l'employeur a, en principe, le choix de la sanction, sous certaines réserves. Outre le licenciement disciplinaire, les

sanctions les plus courantes sont l'avertissement, la mise à pied disciplinaire et la rétrogradation.

L'avertissement Sous quelle forme peut-on donner un avertissement à un salarié ?

L'avertissement peut prendre la forme d'une lettre reprochant diverses erreurs au salarié et le mettant en demeure de faire un effort pour redresser lasituation sous peine de déclassement ou de licenciement ( Cass. soc., 13 nov. 2001, n° 99-42.709, n° 4641 FS - P). Il peut aussi s'agir d'un courriel danslequel l'employeur lui adresse divers reproches et l'invite de façon impérative à un changement radical, avec mise au point le mois suivant ( Cass. soc.,26 mai 2010, n° 08-42.893).

En revanche, ne sont pas des sanctions : une réprimande orale, même accompagnée de mises en garde et d'injonctions, une lettred'observation, une admonestation, un rappel à l'ordre ( Circ. DRT n° 5-83, 15 mars 1983 : BO Trav., n° 83/16), une lettre se bornant àdemander au salarié de modifier son comportement ( Cass. soc., 14 sept. 2010, n° 09-66.180), une lettre de mise en garde ( Cass.soc., 5 juill. 2011, n° 10-19.561) ou encore une lettre constatant des prestations « nettement inférieures à la moyenne » et exprimant l'espoirque le salarié prendrait « en compte ces dernières remarques afin de fournir une prestation plus conforme à celle que la compagnie est endroit d'attendre » ( Cass. soc., 22 janv. 1991, n° 87-42.844, n° 246 P).

L'avertissement ne nécessite pas, en principe, un entretien préalable En principe, l'avertissement est considéré comme une sanction mineure ne nécessitant qu'une notification écrite et motivée. Mais attention ! Lorsqu'il peut

conduire à une sanction plus lourde (ex. : le règlement intérieur ou la convention collective prévoit que deux avertissements peuvent conduire à une mise àpied), l'entretien préalable est nécessaire.

Il faut donc vérifier les dispositions du règlement intérieur et de la convention collective pour savoir si la phase de l'entretien préalable peut,ou non, être écartée.

Le blâme Le blâme a la même valeur que l'avertissement dans l'échelle des sanctions applicables. Il ne nécessite pas, en principe, la tenue d'un entretien préalable, sauf si

l'employeur décide de l'inscrire au dossier du salarié.

La mise à pied disciplinaire Elle fait partie des sanctions lourdes nécessitant un entretien préalable

La mise à pied disciplinaire est, comme son nom l'indique, une sanction disciplinaire qui suspend le contrat de travail. Elle fait partie des sanctions « lourdes »affectant la rémunération du salarié. Elle doit être précédée d'un entretien préalable.

Elle ne doit pas être confondue avec la mise à pied conservatoire La mise à pied disciplinaire ne doit pas être confondue avec la mise à pied conservatoire qui, elle, est une mesure d'attente, préalable à une sanction.

La mise à pied doit être prévue et encadrée par le règlement intérieur La mise à pied disciplinaire est à durée déterminée. Puisqu'elle entraîne une perte de salaire, elle doit être limitée dans le temps et proportionnée à la faute

commise. Sa durée doit être fixée et notifiée par écrit au salarié au moment où elle est décidée. Elle ne peut être prononcée par l'employeur que si elle est prévue par le règlement intérieur et si le règlement en précise sa durée maximale ( Cass. soc.,

26 oct. 2010, n° 09-42.740, n° 2078 FS - P + B + R + I).

b.lherbette
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Chapitre 12 * Sanctionner un salarié fautif Section 2 * Maîtriser les étapes de la procédure disciplinaire

Mettre à pied à titre conservatoire181

Si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité telle queson maintien dans l'entreprise s'avère risqué voiredangereux, l'employeur peut prononcer une mise à piedconservatoire permettant de l'écarter de l'entreprise letemps de la procédure disciplinaire.

C. trav., art. L. 1332-3 La mise à pied conservatoire n'est pas une sanction

Contrairement à la mise à pied disciplinaire, la mise à pied conservatoire n'est pas une sanction. Elle permet à l'employeur de suspendre provisoirement l'activitéd'un salarié dont la présence pourrait nuire à l'entreprise, le temps de décider du sort de son contrat de travail.

La mise à pied doit être concomitante à la procédure disciplinaire Pour avoir un caractère conservatoire, la mise à pied doit en principe être concomitante à l'engagement de la procédure disciplinaire prévue pour les sanctions

dites lourdes, qui doit ainsi être ouverte dans un très bref délai. C'est par exemple le cas :lorsque le salarié reçoit une mise à pied le jour même de sa convocation à un entretien préalable ( Cass. soc., 1er juin 2004, n° 02-44.929) ;de la lettre notifiant à la salariée sa mise à pied et lui indiquant : « vous serez convoquée dans les plus brefs délais à un entretien préalable », la salariéeayant été convoquée à cet entretien dès le lendemain ( Cass. soc., 3 mars 2004, n° 02-41.802).

En pratique, la mise à pied est le plus souvent notifiée dans la convocation à l'entretien préalable.

Attention ! A ce principe, une exception : si le salarié est poursuivi pénalement pour des faits préjudiciables à l'entreprise, l'employeur peut, sans engagerimmédiatement une procédure de licenciement, prendre une mesure de mise à pied conservatoire si les faits le justifient ( Cass. soc., 4 déc. 2012, n° 11-27.508, n° 2598 FS - P + B). Il peut attendre de prononcer immédiatement une mise à pied conservatoire pour la durée de la procédure pénale et attendre l'issuedu procès pénal pour convoquer le salarié à l'entretien préalable à son licenciement.

Il est conseillé de mentionner le caractère conservatoire de la mise à pied Le caractère conservatoire de la mise à pied est reconnu lorsque l'employeur qualifie expressément la mise à pied de « mise à pied à titre conservatoire ». La

simple mention d'une mise à pied à titre conservatoire dans la lettre de convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement suffit. Il importe peu dansce cas, que le terme de la mise à pied soit fixé ( Cass. soc., 18 mars 2009, n° 07-44.185, n° 558 F - P + B). Il est donc vivement conseillé de mentionnerexpressément dans la lettre le caractère conservatoire de la mise à pied, afin de ne laisser aucune ambiguïté sur la nature de la mesure.

En l'absence d'indication sur le caractère conservatoire de la mise à pied, cette dernière ne sera pas automatiquement requalifiée en sanctiondisciplinaire. Tout dépendra des circonstances de l'espèce.

Sa durée est en principe calquée sur celle de la procédure disciplinaire La durée de la mise à pied conservatoire est normalement calquée sur celle de la durée de la procédure disciplinaire, légale ou conventionnelle, puisqu'elle est

destinée à en faciliter le déroulement. Cette mesure provisoire est généralement courte mais infligée au salarié pour une durée en principe indéterminée,correspondant au temps de la procédure disciplinaire. Elle prend fin avec le prononcé de la sanction définitive.

Pendant longtemps, le principe du caractère nécessairement indéterminé de la mise à pied était intangible. Mais, désormais, la mise à pied ne perd pasautomatiquement son caractère conservatoire du seul fait qu'elle a été prononcée pour une durée déterminée. Elle a bien un caractère conservatoire si elle estprononcée par l'employeur dans l'attente de sa décision dans la procédure engagée dans le même temps ( Cass. soc., 18 mars 2009, n° 07-44.185, n° 558 F- P + B).

Cette décision a été rendue dans une affaire où le salarié avait été convoqué à un entretien préalable avec une mise à pied à titreconservatoire de 3 jours, soit jusqu'au jour de l'entretien.

La mise à pied peut donc être prononcée pour une durée déterminée mais son caractère conservatoire ne doit faire aucun doute. Elle doit absolument être

b.lherbette
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Chapitre 12 * Sanctionner un salarié fautif Section 2 * Maîtriser les étapes de la procédure disciplinaire

Notifier la sanction184

Que la sanction envisagée par l'employeur ait ou non faitl'objet d'un entretien préalable, elle doit impérativementêtre prononcée par écrit et motivée. Pour les sanctionsdites « lourdes », cette notification ne peut avoir lieu moinsde deux jours ouvrables après la tenue de l'entretien etplus d'un mois après celui-ci, sauf en présence d'uneprocédure disciplinaire conventionnelle.

C. trav., art. L. 1332-1, L. 1332-2 et R. 1332-1 à R. 1332-3 Circ. DRT n° 5-83, 15 mars 1983 : BO Trav., n° 83/16 La notification de la sanction doit être écrite et motivée

La sanction prononcée doit faire l'objet d'une notification motivée au salarié. Aucune sanction, même mineure, ne peut en effet être infligée à un salarié sans quecelui-ci soit informé dans le même temps et par écrit des griefs retenus contre lui. Le défaut de motivation prive la sanction de justification ( Cass. soc.,7 nov. 2007, n° 06-42.988, n° 2330 F - P + B).

Mais quelle est réellement la portée de cette obligation ? La motivation doit être suffisante pour permettre au salarié de connaître la nature des faits qui lui sont reprochés et sont sanctionnés ( Cass. soc., 5 mars

1987, n° 85-41.607). L'employeur doit donc lui notifier la sanction en y indiquant le plus précisément possible les faits qui l'ont motivée. En cas de litige, les jugesvérifient tout particulièrement que la lettre de notification de la sanction énonce les griefs retenus contre le salarié ( Cass. soc., 25 mai 2004, n° 02-41.900, n°1040 F - P).

Attention : la lettre de notification de la sanction fixe les limites du litige. C'est donc uniquement sur l'incrimination retenue par l'employeur ques'exercera ultérieurement le contrôle judiciaire ; d'où l'intérêt d'une motivation précise.

La notification doit être remise en main propre contre décharge, ou envoyée par lettre recommandée. Dans ce cas, un délai peut s'écouler entre le moment oùl'employeur envoie la notification au salarié et le moment où il la reçoit et en prend donc connaissance. Que se passe-t-il s'il commet une nouvelle faute dans cetintervalle ? L'employeur peut-il prononcer une nouvelle sanction, plus lourde que la première, au motif que le salarié récidive ou doit-on considérer que, celui-cin'ayant pas reçu la notification de la première sanction, n'a pas réitéré un comportement fautif déjà sanctionné ? Pour la Cour de cassation, la première options'applique : c'est la date à laquelle l'employeur envoie la notification qui compte, pas celle à laquelle le salarié la reçoit. Si celui-ci commet une nouvelle faute dansce délai, l'employeur peut prononcer une sanction plus sévère ( Cass. soc., 12 févr. 2013, n° 12-15.330, n° 268 FS - P + B).

Si la sanction a fait l'objet d'un entretien préalable, sa notification doit respecter certains délais Un délai minimal de 2 jours ouvrables entre l'entretien et la notification

La notification de la sanction doit être envoyée au salarié après un délai de réflexion. Pour les sanctions lourdes et en cas de licenciement, ce délai est au minimum de 2 jours ouvrables après le jour fixé pour l'entretien (sans tenir compte du

jour de point de départ et du jour d'échéance). Ainsi, la notification ne peut être faite avant le surlendemain de l'entretien.

L'employeur a un mois à compter de l'entretien pour notifier la sanction La lettre de notification de la sanction doit être adressée dans un délai maximum d'un mois après le jour fixé pour l'entretien :

même si la sanction est un licenciement ( Cass. soc., 16 mars 1995, n° 90-41.213, n° 1247 P + F),et même si le salarié ne s'est pas présenté à l'entretien, à une exception près : en cas de report de l'entretien préalable par l'employeur en raison del'impossibilité pour le salarié de s'y présenter (en l'occurrence, en raison d'un arrêt maladie), le point de départ de ce délai d'un mois est la date à laquellel'entretien s'est réellement tenu ( Cass. soc., 7 juin 2006, n° 04-43.819, n° 1461 FS - P + B Cass. soc., 12 juin 2007, n° 05-43.957).

L'administration estime que si le contrat est suspendu dans des conditions telles que la procédure ne peut être engagée, il faut attendre lafin de la suspension du contrat. A notre avis, cela doit s'appliquer en cas d'arrêt maladie du salarié.

Précisions sur le terme du délai d'un mois Le délai d'un mois pour notifier la sanction disciplinaire expire à 24 heures le jour du mois suivant qui porte le même quantième que le jour fixé pour l'entretien.

Ainsi, si un salarié est convoqué à un entretien préalable prévu le 25 février, la sanction ne pourra plus lui être notifiée après le 25 mars à

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Chapitre 12 * Sanctionner un salarié fautif Section 2 * Maîtriser les étapes de la procédure disciplinaire

Organiser un entretien préalable182

Si la sanction envisagée par l'employeur est susceptibled'avoir une incidence, immédiate ou non, sur la présencedans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunérationdu salarié, la loi impose à l'employeur de faire un entretienavant de prononcer la sanction disciplinaire.

C. trav., art. L. 1332-2 et s. et R. 1332-1 La notification d'une sanction lourde doit être précédée d'un entretien préalable, sous peine de nullité

Les sanctions lourdes : le licenciement, la mise à pied et la rétrogradation L'employeur envisageant de licencier, mettre à pied, rétrograder, ou plus généralement prononcer une sanction ayant une incidence (immédiate ou non) sur la

présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié, doit, avant toute chose, le convoquer à un entretien préalable.

Pour qu'une sanction affecte la fonction du salarié, il n'est pas nécessaire qu'elle touche à son titre dans l'entreprise ; elle peut aussi neporter que sur la nature de ses activités. Il suffit qu'elle touche l'un des éléments de sa position dans l'entreprise, par exemple son« classement hiérarchique » ou sa « classification », suivant les termes utilisés par les conventions collectives.

Une sanction disciplinaire prononcée sans qu'il y ait eu d'entretien préalable peut être refusée par le salarié fautif, même si elle ne constitue pas unemodification du contrat de travail ( Cass. soc., 11 oct. 2006, n° 05-41.388). L'absence d'entretien préalable à la notification d'une mise à pied disciplinairerend la sanction nulle ( Cass. soc., 4 mai 2011, n° 10-10.400).

Le blâme et l'avertissement peuvent aussi nécessiter un entretien préalable Le blâme avec inscription au dossier étant susceptible d'avoir une incidence sur la carrière du salarié, il doit faire l'objet d'un entretien préalable ( Cass.

soc., 7 déc. 1999, n° 97-43.059, n° 4729 P). Il en va de même pour l'avertissement lorsqu'il peut avoir une influence sur le maintien du salarié dans l'entreprise.

Se conformer aux dispositions conventionnelles applicables En matière de procédure disciplinaire, il se peut que des dispositions conventionnelles soient plus protectrices des intérêts du salarié que la loi. Dans ce cas,

l'employeur doit les respecter, au risque de voir la procédure remise en cause et la sanction annulée si la disposition qu'il n'a pas respectée porte sur unerègle de fond. Ainsi, si la convention collective l'oblige à indiquer, dans la lettre de convocation à entretien préalable, les motifs de la sanction envisagée,l'employeur devra s'y conformer. Dans le cas contraire, le licenciement pourra être jugé sans cause réelle et sérieuse, même si l'employeur a, en revanche,parfaitement respecté la procédure légale ( Cass. soc., 9 janv. 2013, n° 11-25.646, n° 17 FS - P + B).

L'employeur doit convoquer le salarié dans les 2 mois La convocation doit être adressée dans les 2 mois suivant la date à laquelle l'employeur a eu connaissance des faits

fautifs Lorsque l'employeur envisage de prendre une sanction pour laquelle la procédure disciplinaire est requise, il doit convoquer le salarié à un entretien en lui

indiquant l'objet de la convocation. Il doit le faire dans les deux mois suivant la date à laquelle il a eu connaissance de la nature et de l'ampleur des faitsreprochés au salarié.

Ni la convocation ni la comparution devant un conseil de discipline (imposée par la convention collective, telle la convention des banques)ne dispensent l'employeur de convoquer le salarié à l'entretien préalable prévu par le code du travail ( Cass. soc., 20 oct. 1988, n° 85-44.501).

La convocation doit être remise en main propre contre décharge ou adressée par lettre recommandée au salarié.

La convocation interrompt le délai de prescription des fautes La convocation interrompt le délai (de 2 mois) de prescription des fautes ( C. trav., art. L. 1332-4). Un nouveau délai de 2 mois commence à courir à

compter de la date de la convocation.

Le nouvel entretien doit se tenir dans les 2 mois suivant la date de cette convocation ( Cass. soc., 9 déc. 2003, n° 01-44.501). Si lereport de l'entretien est demandé par le salarié, l'employeur n'est pas obligé de lui adresser une nouvelle convocation ( Cass. soc.,29 janv. 2014, n° 12-19.872, n° 211 FS - P + B).

b.lherbette
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Chapitre 12 * Sanctionner un salarié fautif Section 2 * Maîtriser les étapes de la procédure disciplinaire

Réagir au refus de la sanction par lesalarié

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Une fois notifiée, la sanction peut être exécutée. Si elle nemodifie pas le contrat de travail, le salarié ne peut larefuser, sous peine d'être licencié. A l'inverse, si elle lemodifie, le salarié doit être informé de la possibilité de larefuser. S'il la refuse, l'employeur peut lui notifier unenouvelle sanction pouvant aller jusqu'au licenciement ; ildoit alors recommencer l'intégralité de la procédure.

Une fois la sanction notifiée, elle doit être exécutée La loi n'a fixé aucun délai pour l'exécution de la sanction. Le règlement intérieur ou la convention collective peuvent en revanche en prévoir un. Dans ce cas,

l'employeur sera tenu de la respecter. Sauf abus, l'employeur apprécie le moment où l'organisation du service permet l'exécution de la sanction. Toutefois, si le délai d'exécution est trop long, sans

que l'employeur ne puisse justifier un tel délai, il est réputé avoir renoncé à la sanction. Tel est le cas d'une sanction non appliquée au bout de 20 mois ( Cass. soc., 10 juill. 2002, n° 00-40.917).

Le fait que le salarié soit en arrêt-maladie le jour où doit commencer une mise à pied disciplinaire décidée antérieurement par l'employeur ne permet pas à cedernier d'en différer l'exécution, sauf fraude du salarié ( Cass. soc., 21 oct. 2003, n° 01-44.169, n° 2222 F - P + B).

En l'espèce, à la date de prise d'effet de sa mise à pied disciplinaire, le salarié était en congé pour rechute des suites d'un accident du travail.A sa reprise de travail, l'employeur lui demande de quitter l'entreprise pour une durée correspondant à la mise à pied. A tort, selon les juges.L'employeur devra donc verser au salarié un rappel de salaire correspondant à la période non travaillée postérieure à l'arrêt de travail. La Courde cassation fait prévaloir la première cause de suspension du contrat de travail, à savoir la mise à pied disciplinaire. Il en résulte, à notreavis, que lorsque la mise à pied est notifiée avant un arrêt de travail pour maladie, l'employeur n'est pas tenu de verser l'indemnitécomplémentaire de maladie pendant les jours couvrant la période de la mise à pied.

Le salarié ne peut pas refuser une sanction qui ne modifie pas son contrat Si la sanction ne modifie pas son contrat de travail, le salarié ne peut pas refuser de l'exécuter. Par exemple, si la sanction consiste en une mutation du salarié

et que le contrat de travail de ce dernier contient une clause de mobilité, la mutation s'impose au salarié en l'absence de modification de son contrat de travail ( Cass. soc., 11 juill. 2001, n° 99-41.574, n° 3532 F - P).

Le salarié peut refuser une sanction qui modifie son contrat La modification du contrat de travail ne peut être imposée

Une modification du contrat de travail prononcée à titre de sanction disciplinaire à l'encontre d'un salarié (mutation sans clause de mobilité dans le contrat detravail, rétrogradation) ne peut lui être imposée ( Cass. soc., 16 juin 1998, n° 95-45.033, n° 3414 P + B + R Cass. soc., 17 juin 2009, n° 07-44.570, n°1288 FS - P + B).

Le salarié doit être informé de la possibilité de refuser une telle sanction L'employeur doit informer le salarié à qui il notifie une sanction modifiant son contrat de travail qu'il peut accepter ou refuser la sanction ( Cass. soc.,

28 avr. 2011, n° 09-70.619, n° 965 FS - P + B). La seule poursuite du travail par le salarié aux nouvelles conditions ne suffit pas à établir qu'il a tacitement accepté la modification de son contrat. Il est donc préconisé de faire un avenant au contrat de travail pour formaliser l'accord du salarié. En effet, lorsque le salarié ne donne pas son accord à une

sanction qui modifie son contrat de travail (rétrogradation, par exemple), il peut considérer que la sanction notifiée par son employeur lui est inopposable ( Cass. soc., 15 juin 2000, n° 98-43.400, n° 2841 P).

L'employeur doit laisser au salarié un délai de réflexion suffisant L'employeur doit laisser à l'intéressé un délai suffisant pour faire connaître son acceptation ou son refus. L'administration préconise un délai de 15 jours. En

tout état de cause, l'employeur qui laisse un peu plus de 24 heures à un salarié pour accepter un nouveau poste, alors que ce dernier avait demandé un délaide réflexion de 10 jours, agit avec une précipitation fautive ( Cass. soc., 21 juill. 1986, n° 84-41.577).

Si le salarié refuse, l'employeur peut prononcer une autre sanction L'employeur peut prononcer une autre sanction pouvant aller jusqu'au licenciement

En cas de refus du salarié, l'employeur peut prononcer une autre sanction, à la place de la sanction refusée ( Cass. soc., 11 févr. 2009, n° 06-45.897, n°268 FS - P + B + R).

Cette sanction peut être soit plus légère, soit plus lourde et aller jusqu'au licenciement pour faute grave ( Cass. soc., 11 févr. 2009, n° 06-45.897, n° 268FS - P + B + R).

Mais attention ! Le licenciement doit être fondé sur les faits fautifs à l'origine de la sanction initiale et non sur le refus de la sanction.

b.lherbette
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