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GRAND ANGLE TABLE RONDE de l’UNÉDIC 2001 – 2011 : Regards croisés sur le chômage indemnisé Economie, sociologie, réglementa?on : quelles évolu?ons ? Temps passé au chômage : les chômeurs d’aujourd’hui ressemblent‐ ils à ceux d’hier ? Europe : quelles trajectoires sur la période ? FÉVRIER 2012 Serge BAERT, Conseiller général Réglementa6on à l’ONEM, Belgique Isabelle BOURGEOIS, chercheure au CIRAC, rédactrice en chef de la revue Regards sur l’économie allemande Pierre CAVARD, Directeur des études et analyses, Unédic Didier DEMAZIERE, sociologue, chercheur au CNRS, Sciences Po et CSO Jean‐Paul DOMERGUE, Directeur des affaires juridiques, Unédic David GRUBB, économiste, Direc6on de l’emploi, du travail et des affaires sociales, OCDE Marjoleine HENNIS, Conseillère pour les affaires sociales, Ambassade des Pays‐Bas Anna NSUBUGA, Conseillère pour les affaires sociales, Ambassade de Grande‐Bretagne Philippe SCHERRER, Sous‐directeur Emploi et Marché du travail, DARES La table ronde est animée par Jacques LENOIR

2001 – 2011 : Regards croisés sur le chômage indemnisé

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L’Unedic a organisé le vendredi 3 février 2012 une table ronde sur le thème : 2001 – 2011 : Regards croisés sur le chômage indemnisé en présence de Gaby Bonnand, Président de l’Unédic et de Vincent Destival Directeur général de l’Unédic.

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RAND

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TABLERONDEdel’UNÉDIC

2001 – 2011 : Regards croisés sur le chômage indemnisé

Economie,sociologie,réglementa?on:quellesévolu?ons?Tempspasséauchômage:leschômeursd’aujourd’huiressemblent‐ilsàceuxd’hier?Europe:quellestrajectoiressurlapériode?

FÉVRIER2012

SergeBAERT,ConseillergénéralRéglementa6onàl’ONEM,BelgiqueIsabelleBOURGEOIS,chercheureauCIRAC,rédactriceenchefdelarevueRegardssurl’économieallemandePierreCAVARD,Directeurdesétudesetanalyses,UnédicDidierDEMAZIERE,sociologue,chercheurauCNRS,SciencesPoetCSOJean‐PaulDOMERGUE,Directeurdesaffairesjuridiques,UnédicDavidGRUBB,économiste,Direc6ondel’emploi,dutravailetdesaffairessociales,OCDEMarjoleineHENNIS,Conseillèrepourlesaffairessociales,AmbassadedesPays‐BasAnnaNSUBUGA,Conseillèrepourlesaffairessociales,AmbassadedeGrande‐BretagnePhilippeSCHERRER,Sous‐directeurEmploietMarchédutravail,DARES

LatablerondeestaniméeparJacquesLENOIR

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OuvertureparGabyBonnand,Présidentdel’Unédic

Introduc?onauxthèmesparVincentDes?val,Directeurgénéraldel’Unédic

Zoomsurlesfaitsmarquantsdes10dernièresannées:développementdesinterven?onsdel’Assurancechômagesurlemarchédutravailetmodernisa?onduServicepublicdel’emploi

• PierreCavard,Directeurdesétudesetanalyses,Unédic• Jean‐PaulDomergue,Directeurdesaffairesjuridiques,Unédic

Regardscroiséssurlesdemandeursd’emploietréponsesduServicePublicdel’Emploi

• PierreCavard,Directeurdesétudesetanalyses• DidierDemazière,Sociologue,chercheurauCNRS,SciencesPoetCSO• DavidGrubb,Économiste,DirecHondel’Emploi,duTravailetdesaffairessociales,OCDE• PhilippeScherrer,Sous‐directeurEmploietMarchédutravail,DARES

Regardsdepuisl’Allemagne,laBelgique,lesPays‐basetlaGrandeBretagne:évolu?onsrécentes

• SergeBaert,Conseillergénéral–RéglementaHonàl’ONEM,Belgique• IsabelleBourgeois,ChercheureauCIRAC,rédactriceenchefdelarevueRegardssurl’économieallemande• Jean‐PaulDomergue,Directeurdesaffairesjuridiques• MarjoleineHennis,Conseillèrepourlesaffairessociales,AmbassadedesPays‐Bas• AnnaNsubuga,Conseillèrepourlesaffairessociales,AmbassadedeGrandeBretagne

Conclusion

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SergeBAERTConseillergénéralRéglementa?onàl’ONEM,Belgique

IsabelleBOURGEOISchercheureauCIRAC,rédactriceenchef

delarevueRegardssurl’économie

Jean‐PaulDOMERGUEDirecteurdesaffairesjuridiques,

Unédic

DidierDEMAZIÈRESociologue,chercheurauCNRS,

SciencesPOetCSO

AnnaNSUBUGAConseillèrepourlesaffairessociales,AmbassadedeGrande‐Bretagne

MarjoleineHENNISConseillèrepourlesaffairessociales,AmbassadedesPays‐Bas

DavidGRUBBÉconomiste,Direc?ondel’Emploi,

dutravailetdesaffairessociales,OCDE

PierreCAVARDDirecteurdesétudesetanalyses,Unédic

PhilippeSCHERRERSous‐directeurEmploietMarchédutravail,DARES

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Bonjouretbienvenueà tous. Je vous remercied’avoirrépondu à notre invita?on. Il s’agit d’une nouvelleini?a?ve de la part de l’Unédic que d’inviter despartenaires ou des ins?tu?ons qui travaillent dans ledomainedesescompétencesouquisontmobilisésparlaques?onduchômage.Nousavonssouhaitéqueceeeconfigura?onsoitàlafoisouvertepourpouvoirtraiterceee ques?on de manière transversale, mais aussi« familiale », regroupant l’ensemble des personnestravaillant en lien étroit sur ce même sujet. Noussouhaitons notamment aborder ensemble la ques?onde l’indemnisa?on du chômage, d’autant que ceeeini?a?ve se situe dans un contexte par?culièrementdifficilepourl’emploi.

Elle se situe également dans le cadre du nouveauposiHonnement de l’Unédic dans ce grand service del’emploi qui a été redéfini dans la loi de fusion. CereposiHonnement n’a pas été sansmal, car le souci deglobalisaHonlaissaitparfoisentendrequel’Unédic,Pôleemploi et l’Anpe avaient les mêmes foncHons, ce quin’estpaslecas.Dansnotrepays,lacréaHondelanormesocialeest,suruncertainnombredepoints,duressortdes partenaires sociaux. En ce sens et même sibeaucoup d’éléments doivent encore progresser pourmieux arHculer l’indemnisaHon assuranHelle avec uneindemnisaHondesolidarité,nousnepourrons travaillersur une amélioraHon de l’indemnisaHon sans nousappuyersur lanégociaHonet lespartenairessociaux.Sinous voulons faire de la négociaHon une véritabledémarche, les partenaires sociaux doivent avoir àdisposiHon des ouHls leur permeYant d’évaluer, detravailleretdeconnaîtreceYeréalité.

L’Unédicestl’insHtuHonquiconsHtuelecorpsdesrèglesd’assurance chômage, permeYant de rendre applicableunaccordpasséentrelespartenairessociaux.Cerôlenese confond pas avec la mise en œuvre opéraHonnelledesdisposiHfs.Jesoulignecetaspect,carleparitarismeestimpossiblesansuneimportanceforteetreconnuedela négociaHon. Aucun avenir de la démocraHe ne peutêtre envisagé dans notre pays sans une démocraHesocialeet ce,mêmesielledoitencoreprogresserpourintégrerdenouveauxacteursreprésentantnotreréalitésociale.L’Unédicsedoitd’ycontribuer.

Les débats et échanges que nous aurons aujourd’huipourront nourrir les travaux de l’Unédic. Elle sera ainsiplus éclairéedans son travail d’études,mais aussi danssonrôleauprèsdespartenairessociaux.CecipermeYrade faire progresser les idées, notamment sur lesquesHonsquionttraitàl’indemnisaHon.

PourtraiterdeceYequesHon,nousavonsdécidédenepasnous cantonner ànos spécialités.Nousentendronsaujourd’huidespersonnesauxcompétencesdifférentes.Nous avons également choisi d’élargir ceYe quesHon àd’autrespays.NousaccueilleronsainsidespersonnesdeBelgique ou des Pays‐Bas, du Royaume‐Uni etd’Allemagne.EllesnouspermeYrontdenousouvrirversl’extérieur, car les défis qui nous sont proposés nepeuvent être relevés uniquement au regard de notrecontextenaHonal.

Je termine mon mandat de Président de l’Unédic.Comme tous ceux qui y travaillent, je crois fermementau dialogue social. Notre table ronde se situe dans lecadre d’une convicHon majeure : aucun approfondis‐sement de la démocraHe, aucun progrès dans ledomaine du chômage et aucune négociaHon ne sontpossibles sans les partenaires sociaux. En outre, noussommes convaincus que l’Unédic ne peut travaillerseule.ElledoitentrerenrelaHon,enconfrontaHonetendiscussionavecl’ensembledespartenairestravaillantsurceYequesHon,ycomprisauniveauinternaHonal.

TelestlesensdenotreiniHaHveaujourd’hui.

GabyBONNANDPrésidentdel’Unédic

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Je?enstoutd’abordàvousremercierpourvotreprésencecema?n.Commel’aindiquéMonsieur le Président, ceee table ronde arrive à la fin de deux ans de mandatpleinementremplis.Nousdevionsorganisercetévénementl’étédernieretildevaitêtrel’abou?ssement du reposi?onnement de l’Unédic, une nouvelle configura?on duService public de l’emploi (SPE) et la remise en cause d’une tradi?on. En d’autrestermes, il devait intervenir pour redéfinir et redécouvrir ce que doivent être lesmissions fondamentalesde l’organismeges?onnairede l’assurancechômage (veilleràlaperformancedecesystèmed’assurancechômageenFrance).LanouveautérésidedanslanouvelleorganisaHonduSPE,oùl’Unédicestaucœurd’unsystème.Ellen’estplusà la têted’un réseau, commecelaapuêtre le casavant2009,maisdoittravaillerdanscenouveaumodèleaveclesautresinsHtuHons.L’Unédicestparnatureune instanceouvertequidialogueavec lesautres.Elledoit fairevivre les règlesdéfinies par les partenaires sociaux en donnant des instrucHons aux opérateurs. Sesnouvelles missions dans ceYe nouvelle configuraHon sont également de contrôler,d’évalueretdepiloter.CeYe table rondeest l’abouHssement de ce reposiHonnement. L’Unédic est claire danssonposiHonnementetleconseild’administraHonad’ailleursredéfinisesmissions.

CeYetablerondecorrespondenoutreàlaconvicHonqueledialoguedoits’inscriredansladuréeet se répéter.Nousespéronsquechacun trouvera,aucoursdeceYemaHnée,sonintérêtetquevousserezséduitsparceprojet.

Leprogrammed’étudesdel’UnédicaétéadoptéparleBureauilyaquelquesmois.Ilsedéploieratoutaulongdel’année2012.Al’imagedeceYemaHnée,noussouhaitonsaussique ce programme d’études soit conduit avec d’autres. La direcHon des études et ladirecHon juridiquede l’Unédic travailleront avec vous et vous serez vraisemblablementsollicitésdanslesprochainsmoispourpoursuivreleséchanges.

JacquesLenoirvaàprésentprésenterceYetablerondeet je leremercieparavancedel’animer.

VincentDESTIVALDirecteurgénéraldel’Unédic

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JacquesLENOIRComme vous avez pu le comprendre, notre objecHf decemaHnestdouble.

Ils’agitd’unepartdevousinformerlemieuxpossibleenvous livrant les regards croisés de nos invités qui sonttous experts sur la quesHon du chômage. Ils nouslivreront leurs regards sur l’évoluHon du chômageindemniséenFranceetcheznosgrandsvoisinsaucoursdecesdixdernièresannées.

Il s’agit d’autre part d’ouvrir le dialogue. Deux débatssont donc prévus pour ceYe maHnée et un temps dequesHonsauralieuaprèschacund’entreeux.Pour commencer, nous avons choisi de jeter un regardrétrospecHf sur l’évoluHon du chômage indemnisé enFranceaucoursdecesdixdernièresannées.NousallonspendantceYepremièreparHeparcourir lesgrandes décisions qui ont marqué l’histoire del’indemnisaHonduchômageetparlàmême,laplaceetle rôle de l’Unédic. Nous parlerons de convenHon,d’assurance chômage, d’acHvité réduite, de dévelop‐pement de nouvelles aides, mais aussi d’insHtuHon etorganisaHon (c’est‐à‐dire l’évoluHondu rôlede l’Unédicet la créaHon de Pôle emploi). Il s’agit d’un certainnombred’élémentsquevousdevezconnaître,maisqu’ilnoussembleuHlederappeler.

Pouvez‐vousnousexpliquerquelleest laspécificitédusystèmed’assurancechômagefrançaisparrapportauxautressystèmeseuropéens?

Jean‐PaulDOMERGUEEn France, l’Assurance chômage est un régimeconvenHonnel issu d’une négociaHon entre lesorganisaHons représentaHves d’employeurs et desalariés, couramment appelés « partenaires sociaux ».Cerégimeestencadréparlaloiquienfixelesprincipeset les partenaires sociaux disposent de prérogaHvesdéléguées par le législateur pour fixer eux‐mêmes lesrègles qui caractérisent le système d’indemnisaHond’assurance chômage. Il s’agit d’un système tout à faitparHculier à la France, et d’ailleurs nous ne retrouvonsceYe spécificité dans aucun autre pays d’Europe. Lespartenaires sociaux peuvent être considérés comme lelégislateurdel’assurancechômageetcréentlesnormes,sousréservequ’ellessoientcompaHblesaveclesnormessupérieures et qu’elles s’inscrivent dans une poliHqueplus générale de l’emploi. Voilà pourquoi cet accord,négocié par les partenaires sociaux, est soumis àl’agrémentministériel. Pourêtreagréé, il doit saHsfaireplusieurs condiHons : ildoitassurer l’équilibrefinancierdu disposiHf et être compaHble avec la poliHquegénérale conduite par les pouvoirs publics. Cet accordest généralement conclu pour une durée déterminée,car leshypothèseséconomiquesd’évoluHondel’emploietduchômagecorrespondentàuneduréelimitée;ilesten effet impossible d’avancer des prévisionsraisonnablesau‐delàdedeuxoutroisans.

JacquesLENOIRLorsque nous nous penchons sur les dix dernièresannées, nous pouvons constater que l’assurancechômage a considérablement accru ses interven?onssurlemarchédutravail.Elleestpasséed’unrôlelimitéd’ indemnisa?on à un accompagnement desdemandeursd’emploi.Ils’agitvéritablementd’unedesidées fortes. Mais nous pouvons nous demanderpourquoi et comment ceee interven?on s’est‐elleopérée.

PierreCAVARDDirecteurdesétudesetanalyses,Unédic

Jean‐PaulDOMERGUEDirecteurdesaffairesjuridiques,Unédic

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Jean‐PaulDOMERGUEIl est vraiquedepuisdix ans, ceYeévoluHonapuêtreremarquée.NouslepressenHonsdéjààlafindesannées90,puisquedans lecadrede lacommunicaHonfaiteauniveaueuropéen,nousnoHonscertainsencouragementspouracHverlesressourcesdel’Assurancechômagedansle but d’accompagner et d’aider les demandeursd’emploiàaccélérerleurretouràl’emploi.

LorsquelesnégociateursnégocientlafutureconvenHondu 1er juillet 2001, ils se demandent comment ilspeuvent renforcer l’adéquaHon entre l’offre et lademande d’emploi. Leur souci est donc de définircomment il est possible d’uHliser les ressources del’assurance chômage pour améliorer ceYe adéquaHontoutenaccélérantleretouràl’emploietenréduisantladurée de l’indemnisaHon. Ils décident donc de lierl’indemnisaHon à l’accompagnement et aux aides aureclassement et meYent en place le plan d’aide auretourà l’emploi (PARE),disposiHf largementdiscutéetquia suscitédenombreusespolémiques.Saviséeétaitde rappeler les engagements qui incombaient àl’Assurance chômage et à ses partenaires, ainsi que lesobligaHonsdesdemandeursd’emploiencontreparHeduversementdesallocaHonsetdesaides.

Le PARE concréHsait les droits et obligaHons des deuxparHes. Il soulignait les services qui pouvaient êtreaYendusdesAssédicetdel’Anpe.Desaidesauretouràl’emploi ont à ceYe fin été créées, sur la base definancements spécifiques pour accompagner lesallocatairesdel’assurancechômage.

LePAREaétémisenplaceen2001.LesconvenHonsquiont succédé ont apporté des aménagements audisposiHf mais sans le remeYre en cause. En 2004, lePARE a été maintenu, et ce malgré les difficultéséconomiques rencontrées. Il faut rappeler qu’aumoment où le PARE a été créé, la conjoncture étaitfavorable. Elle s’est ensuitedégradéeet leshypothèseséconomiquessurlesquelleslePAREavaitétéétablinesesontpasavérées.

JacquesLENOIRCe ralen?ssement économique a‐t‐il affecté lefinancementdesac?onsenfaveurdel’emploi?

Jean‐PaulDOMERGUEAbsolumentpas. Lespartenaires sociaux, dans le cadredes orientaHons décidées lors de la mise en place duPARE, ont corrigé certains paramètres (réducHon desdurées d’indemnisaHon, augmentaHon du taux descontribuHons),maisilsonttoutdemêmemaintenuleursengagementsenfaveurdesdemandeursd’emploi,voireles ont renforcés : depuis 2006, accompagnement etsuivi personnalisé des allocataires selon leur distance àl’emploietleursituaHonprofessionnelle,assorHsd’aidesadaptées.

JacquesLENOIRNouspouvonsdemanderàPierreCavardd’illustrer cequivientd’êtredit.

PierreCAVARDIl est important de situer l’évoluHon réglementaire etl’accompagnement sur les dépenses acHves sur unedécennieassez tourmentéesur leplande la croissanceet du chômage. Deux périodes de forte croissance duchômage peuvent être repérées : 2002‐2004 etfin2008‐2010.

Lacroissanceduchômagediminueglobalementaucoursde ladécennie,alorsqu’elleétaitassezélevée (prèsde4 %) au début des années 2000. La progression del’emploi suit de près celle de la croissance. Il estmanifestequel’emploi(dontlacroissancebaissejusqu’àdevenir négaHve en 2003 avant une repriseconjoncturelle durant jusqu’en 2006‐2007) s’est ajustéavecunefortebaisse.

Le chômage indemnisé, qui pèse sur les finances del’assurance chômage, a fortement augmenté dans lesannées 2001‐2002. Une amélioraHon peut êtreremarquée jusqu’en 2006‐2007 et à parHr de fin 2008avecun impactdifférésur l’endeYementde l’assurancechômage (qui est pris en compte dans toutes lesdécisionsprises).CetendeYement subit toutdemêmeuncertaindélaiparrapportauchômageindemnisé.

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JacquesLENOIRUne autre décision symbolique et importante aégalementétépriseaudébutdesannées2000.Ils’agitducumulentreuneindemnitéchômageetuneac?vitéréduite.Pourquoietdansquelcontexteceeenouvellepossibilité apparaît‐elle pour les demandeursd’emploi?

PierreCAVARDL’acHvité réduite est la possibilité pour un chômeurindemnisé de reprendre une acHvité qui peut êtreréduite dans sa durée ou dans le montant du revenuqu’il en reHre. Si ceYe durée ou ce montant sontsignificaHvement réduits par rapport à son emploiprécédent,uncumulentrelerevenuperçuetunrevenuaddiHonnelquivientdel’allocaHonestmisenplace.

LesintérêtssontmulHplespourledemandeurd’emploi:

• Il peut, tout d’abord, avoir un revenu intermédiaireentresonrevenuprécédentet lerevenuduchômagepourlemoisencours.

• Ils’agitd’une incitaHonàreprendreunemploi,mêmede courteduréeoude revenu inférieur à sonemploiprécédent.

• Il peut consommer moins rapidement ses droits auchômage en cours ; la date de ses fins de droit peutdoncêtrereculée.

Pour l’Assurance chômage, l’intérêt est d’avoir dans lemême mois un demandeur d’emploi qui contribuequand il est en acHvité et qui consomme moins entermesdedépenseslorsqu’ilensort.

Etre en acHvité réduite n’est pas une fin en soi. Lespartenaires sociaux ont souhaité que ce soit unepossibilité pour inciter les demandeurs d’emploi àreprendreunemploi.Elleesttoutdemêmelimitéedansletemps(18moisauparavantet15moisactuellement)pouréviterdes’installerdanscetypededisposiHf.

JacquesLENOIRNousn’allonspasdétaillertouteslesaidesauretouràl’emploiquiontétédécidéesaucoursdeceeepériode,maispouvez‐vousnousparlerdedeuxoutroisaidesayantjalonnéceeedécennie?

PierreCAVARDLe disposiHf le plus important est l’acHvité réduite. Ilconcerneaujourd’huiplusd’unmilliondepersonnes.

Nouspouvonségalementévoquerl’aideàlarepriseetàla créaHon d’entreprise (ARCE), qui est assezsignificaHve. Elle s’adresse à un chômeur indemnisésouhaitant créer ou reprendre une entreprise. Elle luipermetdedisposerd’uncapitalen foncHondureliquatde droits dont il dispose pour financer et réussir sonprojet.Lesmontantssontloind’êtrenégligeables(entre800et900millionsd’eurosparan).

Nous pouvons parler également de l’aide différenHelleau reclassement (ADR), qui permet de reprendre unemploi moins bien payé que l’emploi précédent etd’avoirundifférenHel.

Toutes ces aides posent la quesHon de leur efficacité.PermeYent‐elles véritablement de sorHr du chômage ?Troisétudessontprévuesen2012,concernant l’acHvitéréduite,l’ARCEetl’ADR.

JacquesLENOIRNous pouvons également parler de tout ce qui a étéréaliséenfaveurdeslicenciéséconomiques.

PierreCAVARDParmilesdifférentsdisposiHfs,l’aideauretouràl’emploi(ARE) consHtue l’allocaHon principale. Le disposiHf desconvenHons de conversion a pris fin début 2000. LaconvenHondereclassementpersonnaliséaquantàelleconnu une certaine importance vers 2009‐2010. Citonségalement le contrat de transiHon professionnelle, quiconcerne un effecHf assez réduit, et le contrat desécurisaHon professionnelle (CSP), mis en place enseptembre2011.JacquesLENOIRQuel typed’accompagnementaétémisenplacepourleslicenciéséconomiques?

Jean‐PaulDOMERGUEDesdisposiHfsparHculiers(CRP,CTP)ontétéouvertsauxpersonnesconcernéesparun licenciementéconomiqueà parHr de 2006. Ils garanHssent aux bénéficiaires uneindemnisaHonprochedeleursalaireavantlicenciementet prévoient un accompagnement renforcé. Ils fontappelàunfinancementsupplémentaireparl’employeur,l’Unédic et l’Etat. Ils renforcent les moyens apportéspourlesaidesetl’accompagnementdecesbénéficiaires.

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JacquesLENOIRNous pouvons aussi considérer le changementins?tu?onnel de ceee période, qui a vu uneclarifica?on du rôle des deux principaux acteursd’assurancechômage (UnédicetAnpe).Quels sont leschangements majeurs dans l’organisa?on mise enplace?

Jean‐PaulDOMERGUEPour appréhender ces aménagements, il faut toutd’abordcomprendrepourquoil’organisaHonaévoluédeceYe façon. L’assurancechômageacHve ses ressources,conformément à la volonté des partenaires sociaux demobiliser les dépenses en vue d’accélérer le retour àl’emploi.

L’Assurance chômage sort de sa seule missiond’indemnisaHonetdès lorselleélargit lechampdesesresponsabilités ; elle doit travailler davantage avec despartenaires (l’Anpe à l’époque). Elle peut ainsicoordonner de plus en plus ses acHons avec sespartenaires. A ce moment (2001), le SPE n’existe pasencoredanslestextes.Ilestévoquédansunecirculaireet a des liens foncHonnels établis, mais il n’est pasconsacré. CeYe situaHon perdurant, le besoin deformalisertoutcecisefaitressenHren2005,defaçonàpermeYre des rapprochements, ainsi qu’un meilleurencadrement, et à coordonner plus efficacement lesacHons complémentaires de l’Anpe et des Assédic/Unédic. La loi de programmaHon pour la cohésionsocialedu18janvier2005consacreleSPE.

Ce SPE est organisé selon trois niveaux. Le premier estconsHtuédeceuxquiassurent le servicepublic :Anpe,Assédic/Unédic et services extérieurs du ministère dutravail. Le deuxième correspond à ceux qui peuvent ycontribuer par leursmissions : collecHvités territorialesetmaisonsdel’emploi.Ellesjouentunrôlemajeurdansla réformede2005.EllesavaientuneposiHoncentrale,puisque chaque bassin d’emploi était chargé decoordonner lesmoyens des différents partenaires pourmieuxrépondreauxbesoinsidenHfiés.

Elles avaientdoncunevéritable légiHmitépar l’ancrageterritorial sur lequel devaient s’appuyer les différentspartenaires du SPE. Le troisième niveau du SPE, enfin,est consHtué des insHtuHons qui y parHcipent pardélégaHon.

JacquesLENOIRUne des innova?ons de 2005 est égalementl’interven?onduprivédansleplacement(OPP).

Jean‐PaulDOMERGUECeYe innovaHon est intervenue car, en 2006, laconvenHon d’Assurance chômage a créé de nouvellesaidessurlabasedesprérogaHvesnouvellesquedonnaitla loi de 2005 aux partenaires sociaux. Les aidesfinancéesparl’Assurancechômagesesontdiversifiéesetdéveloppées.

Danscecadre,lesresponsablesdel’Assurancechômageont considéré qu’ils pouvaient faire des expéri‐mentaHons en s’adressant aux opérateurs privés deplacement.L’idéeétaitdecréerunecertaineémulaHonavec l’opérateurpublicpouraméliorer lesrésultats.CesexpérimentaHons se sont développées, mais elles sontdevenues compliquées. Entre les démarches dupartenairepublic,cellesdel’UnédicetdesAssédicavecses opérateurs privés, la coordinaHon était devenuecomplexe et confuse. Il était devenu nécessaire d’ymeYredel’ordre.

Dans le cadre de la campagne présidenHelle, le futurPrésident avait pris des engagements à ce sujet pourréformerleSPEenprocédantàunefusionduréseaudesAssédicavecceluidel’Anpe.CeYeunificaHonaétéfaitefin2008.

JacquesLENOIRIl s’agit de la créa?on de Pôle emploi, mais nous nenous étendrons pas sur ce point. La modifica?onengendréeparceeefusiona‐t‐ellechangélerôleetlesmissionsdel’Unédic?

Jean‐PaulDOMERGUEL’Unédicnefédèreplus lesAssédic. Ils’agitduprincipalchangement de ceYe fusion. Elle reste gesHonnaire del’assurance chômage, ses missions sont consacrées etson existence est prévue par la loi. Les partenairessociaux conHnuent à assurer la gesHon en termes decréaHondenormesde l’assurance chômage.A ceHtre,toutes les responsabilités de l’Unédic sont maintenueset sont même renforcées, puisque les partenairessociauxveulentvéritablementassurerlepilotage.

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L’Unédic est désormais avec l’Etat un prescripteur derègles et un financeur puisqu’elle subvenHonne lesacHons dans le domaine de l’accompagnement et desaidesquisontmisesenœuvreparPôleemploi. Elleestle principal financeur de Pôle emploi (3 milliardsd’euros).

Pour s’assurer que ses ressources sont uHliséesconformément aux orientaHons des responsables del’assurance chômage ou aux objecHfs qu’elle se donne,une convenHon triparHte entre l’Etat, Pôle emploi etl’Unédicestsignée.Unepremièreaétésignéeen2008etestarrivéeàéchéancefin2011.

Différence notable, les ressources de l’assurancechômage ne sont plus consacrées uniquement auxallocataires de l’assurance chômage, elles serventégalement à accompagner et à aider l’ensemble desdemandeurs d’emploi. Il s’agit d’une réponse auxcriHques faites sur ledisposiHfantérieur,auquel il étaitreprochédemeYreenplaceunsystèmeàdeuxvitesses.CeYe première convenHon triparHte ne correspondaitcependantpastoutàfaitàcequiavaitétésouhaité.Lanouvelle vient d’être conclue et fixe des objecHfsbeaucoup plus clairs à l’opérateur Pôle emploi. Elleprévoit un accompagnement beaucoup p luspersonnalisédeschômeursetdesmoyensplusadaptés.Cet élément essenHel doit donc être souligné. DansceYe nouvelle configuraHon et en liaison avec l’Etat,l’Unédic peut procéder, grâce à des indicateurs derésultats, au suivi desmesures prescrites, à des auditssurl’acHvitédéveloppéeparPôleemploi.

JacquesLENOIRVousavezprononcélemot«résultat»etils’agitd’unenouvelle logique dans ce système. Pôle emploi doit,d’une certaine manière, rendre des comptesaujourd’hui à l’Unédic. Sommes‐nous réellementdansunelogiquederésultat?

PierreCAVARDNousyentronseffecHvement.Nousvenonsd’évoquerlaconvenHon triparHte post‐fusion, et les principalesfinalités étaient de vérifier que le projet de fusion(premierpalier)étaitbienréalisé. IlétaitdoncessenHeldemeYreenplacedes référentsuniques,unentreHeniniHal unique, et l’acHvité devait être bien exécutéependantceprojet.

Ce changement est intervenu début 2009, donc enpleinecriseéconomique.LesuividesobjecHfsàtroisansa été délaissé rapidement et les instances degouvernancedeceYeconvenHonnesesontquasimentpasréuniesdurantlesdeuxpremièresannées.

SurlaconvenHonquivientd’êtresignée(2012‐2014),lesdonnées sont très différentes. Dans la négociaHon,l’Unédic a pris la place qui lui revenait et ceYeconvenHonprévoitunpilotageparlerésultat.Lerésultatdel’acHondePôleemploidoitêtreunretouràl’emploi,la limitaHonduchômagedelonguedurée,unecertainetransparence du marché du travail, une qualité deservice et des redéploiements d’effecHfs versl’accompagnement.

Tous ces aspects sont contrôlés par une quinzained’indicateurs et par des objecHfs annuels et unegouvernancequial’ambiHondeseréunirunpeuplus.

JacquesLENOIRNousvoyonsclairementqu’aucoursdeceeedécennie,lecadreins?tu?onnelaévolué,engrandepar?edufaitdu poli?que. Avez‐vous néanmoins le sen?ment quelespartenaires sociauxont toujours gardé lamain surle pilotage de l’ac?on sur le terrain de l’Assurancechômage?

Jean‐PaulDOMERGUELes partenaires sociaux conservent toutes leursresponsabilités dans le domaine de l’assurancechômage. Ce point est même confirmé par lelégislateur ; la volonté est de leur permeYre deconHnuerànégocierdefaçonàconcluredesaccordsquidéfinissent des condiHons dans lesquelles l’assurancechômage doit intervenir en faveur des demandeursd’emploi.

PierreCAVARDJe pense que l’Unédic d’aujourd’hui est l’instrumentnécessaireauxpartenairessociauxpourfaireévoluer larègle.Ellepermetégalementdefairepreuvederéalismedanslecontextefinancierdanslequelelles’inscrit,avecdesprévisionsd’équilibrefinancieràunoudeuxansetdes retours très concrets de résultats d’auditopéraHonnel,ainsiquedesremontéesd’informaHonsdelapartdesinstancesparitairesrégionales.Maiselledoitégalement chiffrer les nouvellesmesures et évaluer lesdisposiHfs.

L’Unédic est donc l’ouHl idéal pour que les partenairessociauxgardentlamain,avectoutcequecela impliqueentermesderéalismefinancier,d’endeYement,etc.surl’évoluHondesrèglesdel’Assurancechômage

ZOOMSURLESFAITSMARQUANTSDESDIXDERNIERESANNEES

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JacquesLENOIRAvant de parler des demandeurs d’emploi, il convientde considérer l’évolu?on du chômage en France aucoursde ladécennie,etnotammentsur cequia–oun’a pas – changé. Je laisse le soin à Pierre Cavard denousprésentercepoint.

PierreCAVARDComme indiquéprécédemment, ladernièredécennieavudeuxpériodesdehausseduchômage(2002‐2004etfin2008‐2010).

IlconvientdedisHnguerlepotenHelindemnisable,c’est‐à‐dire l’ensembledesdemandeursd’emploi,qu’ilsaientounontravailléaucoursdumois,ainsiquelesdispensésd’emploi du chiffre du chômage communiqué chaquemois et les bénéficiaires de l’ARE. Le potenHelindemnisable représente près de 4,3 millions depersonnes.

Si l’on rapporte lenombred’indemnisésà cepotenHel,letauxdecouvertureestd’environ50%sur l’ensemblede lapériode.En2001, ilaugmenteavec l’ouverturedefilières à quatremois : quatremois de travail suffisantpour être indemnisé, le nombre de demandeursd’emploi est alors plus élevé. En 2003‐2004, le taux decouverturebaisseavantunenouvelleouvertureàquatremoisen2009etunenouvellediminuHonassezrapidedufaitdelacrise.

Une pyramide des âges des chômeurs sur toute ladécennie2001‐2010,avecunedisHncHonenfoncHondusexe, fait apparaître que le chômage des hommes aconsidérablementaugmenté,notammentautraversdeslicenciements économiques. 2003 correspond à lapremière période de crise économique : toutes lesclasses d’âge sont autant touchées par le chômage,hormis les hommes de plus de 56 ans qui le sontdavantage. CeYe année est assez similaire à 2010. En2004‐2007, le taux de chômage baisse avant de laisserplacefin2008àunenouvellecriseéconomique.

Les chômeurs indemnisés le sont essenHellement àl’issue de CDD ou de missions d’intérim (60 %) et delicenciements (28 %). Par ailleurs, les rupturesconvenHonnellesontfaitleurappariHonen2008.

JacquesLENOIRNous pouvons constater un certain nombre defluctua?ons au travers de ceee période. Avons‐noustoutdemêmeuninvariantquimarquel’ensembledelapériodeenma?èredechômage?

PierreCAVARDNoussommeshabituésàcroirequetoutchangeaveclescrises.Cen’estpourtantpaslecas.Ellessecaractérisentpardesentréesplusnombreusesdanslechômage,maisceYedonnéen’estpasaussisimplepourlesindividus.

PierreCAVARDDirecteurdesétudesetanalyses,Unédic

DidierDEMAZIÈRESociologue,chercheurauCNRS,SciencesPOetCSO

DavidGRUBBÉconomiste,Direc?ondel’Emploi,dutravailetdesaffairessociales,OCDE

PhilippeSCHERRERSous‐directeurEmploietMarchédutravail,DARES

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Pourconnaîtreletauxdepersistanceauchômage,nousrelevonslenombrededemandeursd’emploiaumomentde leur inscripHon, puis nous examinons combien il enreste sur les listes de demandeurs d’emploi trois, six,douze ou vingt‐quatre mois plus tard en gommant leseffets administraHfs (par exemple, un demandeurd’emploi est considéré comme étant sorH des listesuniquementaprèsquatremoisconsécuHfsderadiaHon).Nous relevons que 45 % des inscrits sont toujoursprésentsunanplustardet27%deuxansplustard.Lacourbe du taux de persistance au chômage sur lesannées2001,2005et2010estquasiment lamême.En2008‐2009, le taux de persistance est légèrement plusfort,maiscelarésultedelacrise.Entoutétatdecause,qu’ilsoitenpériodedefortecriseounon, l’individuneconnaîtpasnécessairementdechangement.

JacquesLENOIRQuel est le facteur déterminant, si ce n’est pas laconjoncture?

PierreCAVARDL’âgeest le facteurdéterminant.EffecHvement,auboutde deux ans, il ne reste que 19 % des demandeursd’emploi de moins de 30 ans. En revanche, undemandeurd’emploideplusde50ansseradansuncassurdeuxtoujoursdansleslistesdeuxansplustard.

JacquesLENOIRCes données proviennent d’une étude que l’Unédic aréaliséeetquiconfirmedemanièreéclatantequel’âgeest véritablement déterminant, au‐delà des criseséconomiques.

PierreCAVARDL’âge est effecHvement décisif, mais ces indicateurs depersistance n’ont pas été trouvés par hasard. Ilsrésultent de la négociaHon de la convenHon triparHteévoquée précédemment. Ce sont des indicateursd’objecHfpourPôleemploi sur les troisansàvenir,quirendent valides la noHon de public cible pourl’accompagnement. Nous voyons, en effet, que lesdifficultés des demandeurs d’emploi de plus de 50 ansoudemoinsde30sontpérennes.Lacrisenechangepastout. Les poliHques d’emploi et de l’accompagnementdoiventdoncgarderceYevisionpérennedepubliccible.

JacquesLENOIRNous venons de découvrir des chiffres et dessta?s?ques;nousallonsàprésentnousintéresserauxindividus,àleursvécusetleurscomportements.DidierDemazière, pouvez‐vous nous indiquer si le chômeurde 2012 ressemble au chômeur de 2000 ? Avez‐vousconstatédansl’évolu?ondesdemandeursd’emploidestendancesetdeschangements?

DidierDEMAZIEREJ’évoquerai tout d’abord ce qui ne change pas. Laconclusion massive que nous retrouvons dans lesenquêtes les plus récentes, mais aussi dans celles de2000 ou encore d’autres beaucoup plus anciennes(enquêtesfaitesparentreHenauprèsdeschômeurspourcomprendrecommentlesindividusviventceYesituaHonde chômage) est que le chômage consHtue ce que lessociologuesappellentuneépreuve.

Il s’agit d’une situaHon difficile, d’infériorité sociale. Enoutre, être chômeur implique de s’inscrire dans touteune série d’acHvités nouvelles et urgentes pourretrouver un emploi. D’ailleurs, le fait de se mobiliserpour tenterde se sorHrde ceYe situaHon indiquebienqueceYeposiHonn’estpasenviable.L’épreuveestdoncunphénomèneconstant.

Derrière ceYeconstance, laquesHonde labanalisaHondu chômage est tout demême récurrente ; toute uneséried’argumentsvontencesens.

Mais ceYequesHonn’estpas simple. Le chômagen’estpas seulement un vécu personnel ; l’expérience duchômage est l’assignaHon à un statut social qui restedévaloriséetdévalorisantdansnotresociété.

Nous pouvons donc considérer que la thèse de labanalisaHon est très fragile. Je pense que ceYe thèsevautsinouscomparonslefaitd’êtrechômeurenIle‐de‐France à celui de l’être à São Paulo ou à Tokyo parexemple. Mais si nous comparons la situaHond’aujourd’hui à celle de 2000, nous ne pouvons pasparlerdebanalisaHon.

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JacquesLENOIRAl’inverse,pouvez‐vousnousdirecequiachangé?

DidierDEMAZIERECommejel’aiindiqué,lechômageestuneépreuveetlafaçondes’yconfronterpeutêtredifférente.

Dans les enquêtes sociologiques, nous avons mis enévidence, de manière tradiHonnelle, trois grandesformes de chômage. Ce sont ces formes qui onttendanceàchanger.

• lechômagedifféréLe chômeur ne se considère pas comme tel. Il sedéfinit plutôt comme un chercheur d’emploi et estcomplètementmobilisépourprospecterlemarchédel’emploi.Ils’agitgénéralementdescadres,technicienset hauts diplômés pour qui le chômage est unehorreurqu’ilsessayentd’effacerparleurhyperacHvité.

• lechômageinverséLechômeurjugequ’iln’ajamaisétéaussibiendepuiscenouveaustatut.Iladutempslibrepourfairecequilui plaît, il s’épanouit, voit des amis, développe sesréseauxsociaux,etc.CeYecatégoriedechômeursvoitlechômagecommel’occasionde«faireunbreak»,des’engager dans des hobbies, etc. CeYe formed’inversion où le chômage devient posiHf pourl’individu est plus concentrée du côté de jeunesintellectuels, diplômésmélangeant parfois leur statutd’étudiantàceluidechômeur.

• lechômagetotalIls’agitdelaformelaplusmassiveetlaplusrépanduedans les enquêtes sociologiques. Dans ce cas, lechômeur vit ceYe situaHon comme un dramepersonne l e t une ép reuve psycho log iquetraumaHsante. Il s’agit généralement des travailleurslesmoinsqualifiés,maisceYeformedechômagen’estpasréservéeàcetypedepopulaHon.

Il estdifficilededéfinir lesévoluHons car,dans ce typed’enquêtesqualitaHvesparentreHen,lebutn’estpasdese caler sur les résultats d’enquêtes passées pourconstater ce qui a pu changer. Il faut relire etréinterpréterlesrésultatsd’enquêtes.

La première évoluHon est la diffusion du chômagedifféré. Le faitdesemobiliser fortementpoursorHrduchômage et de s’invesHr est beaucoup plus répanduqu’auparavant.CeYemobilisaHonpeutêtrevuecommele résultat des poliHques d’acHvaHon en direcHon deschômeurs.

LadeuxièmeévoluHon,quipeutdeprimeabordsemblercontradictoire, est la diffusion du chômage total, aumoinsdanslesformesaYénuées(diffusiond’uneformededécouragement).UnecaractérisHquedel’expériencedu chômage d’aujourd’hui est donc la combinaison deces deux formes de chômage qui, selon les individus,sera d’une proporHon variable pour l’une ou l’autreforme.

La troisième évoluHon concerne le chômage inversé.Comme indiquéprécédemment, le chômeur se réfugie,par ceYe forme de chômage, dans des situaHons plusposiHvesetdanslesquellesilestpossibledeseréaliser.Nous observons cependant dans les enquêtes les plusactuellesuneformedesorHesymbolique,subjecHveduchômage,nonplusens’invesHssantdansdeshobbiesetd’autres acHvitésmais plutôt commeune formeulHmede découragement et de retrait explicite et officiel dumarché du travail. Il s’agit donc d’une formed’accentuaHon du caractère douloureux et dramaHqueduchômage.

JacquesLENOIRNous pouvons remarquer que le chômage a toujoursété vécu de manière individuelle. De plus, aucuneac?on collec?ve n’est mise en place. Commentpouvons‐nous expliquer ceee incapacité pour lesdemandeursd’emploià se regrouperdansdesac?onsetmouvementscollec?fs?

DidierDEMAZIERECeYeincapacitéestassezpérenne.En1981, lesyndicatdes chômeurs a tout demêmeété créé pour l’élecHonprésidenHelle. Pendant l’hiver 1997‐1998, nous avonsconstaté quelquesmois demobilisaHon d’organisaHonssyndicalesetd’associaHonsdechômeursquiontoccupédes agences pour l’emploi et des locaux d’Assédic. CesmobilisaHons sont cependant très sporadiques. Leschômeurs sont silencieux et collecHvement peuorganisés.

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CeYe incapacité à se mobiliser peut tout d’abords’expliquerpar le faitque leschômeurssontmoinsunepopulaHonqu’unecatégorieexcessivementhétérogène.Nous y trouvons tous les milieux culturels, tous lesniveauxsociauxet toutes lescatégoriesd’âge.Une trèsgrandediversitéestdoncobservée.

Nous pouvons également constater une très grandediversitédanslerapportauchômage.Certainsypassenttrèsrapidement,d’autress’yenfoncentetdecepointdevue, l’expérience du chômage est vraiment différented’unindividuàunautreetellenepeutêtrefédératrice.

Poursemobiliser,ilestnécessaired’avoirunadversaire.Les chômeurs peuvent avoir une réelle difficulté àconstruireunadversairedanslamesureoùaucunacteurne peut être tenu pour responsable du chômage etaucunacteurn’estpourlechômage;aucontrairetoutlemonde luYe contre. La difficulté liée à ceYe absenced’adversité amène des difficultés pour construire desrevendicaHons.

Enfin, pour la plupart des individus au chômage,l’urgencedelasituaHonestdesorHrdecestatut.Decefait, quand un individu semobilise, il le fait avant toutpour la gesHonde son sort personnel, plutôt quedansuneapprochecollecHve,puisqu’ilestimpossibledevoircomment transformer la situaHon du chômagecollecHvement, concrètement et dans une temporalitéassezcourte.

JacquesLENOIRPar rapport à ceee situa?on individuelle etcomportementale des chômeurs, le rôle des pouvoirspublics a été d’agir contre le chômage. PhilippeScherrer, vous allez nous indiquer comment lespoli?ques de l’emploi se sont adaptées à ceeeévolu?on.Aucoursdecesdernièresannées,commentla poli?que de renforcement dans l’accompagnementdesdemandeursd’emplois’est‐elletraduiteenFrance?Quellesontétélesprincipalesdécisionsdel’Etat?

PhilippeSCHERRERConcernant les poliHques d’emploi en direcHon desdemandeurs d’emploi, nous avons pu relever une plusgrande acHvaHon, c'est‐à‐dire une mobilisaHon desdépensesdeluYecontrelechômageenfaveurd’acHonsde réinserHon sur le marché du travail plutôt qu’unesimpleindemnisaHonpassive.

L’orientaHon des poliHques d’emploi en France ces dixdernièresannéesaégalementrecherchéuncompromisentreunmodèleanglo‐saxonetunmodèlescandinave.En France, ce modèle est appelé « sécurisaHon desparcours professionnels ». Il s’agit d’un rapprochementvers unmodèle scandinave qui est plus naturel que lemodèleanglo‐saxon.

Les poliHques d’emploi d’acHvaHon se sont orientéesversdeuxgrandsaxes.

Le premier est l’accompagnement renforcé. C’estl’accompagnementleplusimportant,puisquelarupturea été la plus forte en la maHère par rapport auxdécennies antérieures. Nous pouvons citer différentesmesures:en2001lePAREPAP,en2006l’instauraHonduSMP (suivi mensuel personnalisé) qui prévoit un suivitous les mois à parHr du quatrième mois lors de ladéfiniHon du PPAE (projet personnalisé d’accès àl’emploi),lafindumonopoledel’Anpeetl’ouverturedumarchéauxorganismespublicsdeplacement.En2008,nous pouvons citer un renforcement des droits etdevoirs des demandeurs d’emploi. Plus récemment etdanslecadredelaconvenHontriparHteprécédemmentévoquée, le renforcement des ressources humainesaffectéesàPôleemploietàl’accompagnementpeutêtresouligné.

Les incitaHons financières pour l’emploi consHtuent ledeuxième axe. Différentes évoluHons des règles del’indemnisaHonpeuventégalementêtrecitées.Ellesonteu à concilier des objecHfs un peu contradictoires, desobjecHfs de contrainte d’équilibre financier à moyenterme pour l’Unédic, mais aussi une adaptaHon auxtrajectoires professionnelles et conjoncturelles plusmarquéespourlesdemandeursd’emploi.

Nous pouvons ici également relever des évoluHonsdepuis une décennie, une modificaHon concernant lasuppression de la dégressivité des allocaHons en 2001,uneréducHondesduréesmaximalesd’indemnisaHonen2003et2009,uneextensionprogressivedespériodesderéférence sur ceYe décennie et la suppression et laréintroducHondesfilièrescourtesàparHrduquatrième

mois d’affiliaHon en 2003, puis 2009, et enfin lerenforcement de l’offre d’acHvaHon (réforme de laformaHonprofessionnelle en 2009et la redéfiniHonduSPE).

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JacquesLENOIRAu‐delà de ceee longue liste de mesures, pouvons‐nous aujourd’hui évaluer l’impact, les résultats et leseffets de ces différentes décisions ? Prenons parexemple le cas du PARE ou de l’arrivée des OPP surl’ARE.Avons‐nousdesélémentsdemesure?

PhilippeSCHERRERNous avons effecHvement des éléments permeYantd’évaluer leseffetsdecesdécisions.Pour lesdisposiHfsgénéraux d’accompagnement renforcé des demandeursd’emploi,nousdisposonsdesévaluaHonsquiportentsurlePAREPAPet leSMP.NousavonségalementquelquesexpérimentaHons pour les disposiHfs d’accompagne‐mentrenforcéetlerecoursauxOPP.

Dans l’ensemble, ces mesures d’accompagnementrenforcéonteuuneffetposiHfetsignificaHfsur letauxderetouràl’emploidesdemandeursd’emploietuneffetnégaHf sur le taux de récurrence sur les listes de Pôleemploi.Ladifficultéconsistecependantàdéterminercequi relève de l’accompagnement lui‐même et ce quirelève du renforcement des contrôles dans le cadre deces mesures. Nous pouvons également signalerqu’aucune analyse coût/bénéfice n’a été réalisée. Il estdoncdifficiledejugerdelaqualitédecesmesures.

Concernantl’évaluaHonPAREPAP,ilaétédémontréqueles efforts étaient assez ténus pour saHsfaire l’objecHfprincipal qui était l’accéléraHon du taux de retour àl’emploi.L’effetestdoncquelquepeumiHgé,mais ilestrelevétoutdemêmeunequalitédesemploisretrouvésunpeuplusimportante.

Pour le SMP, quelques évaluaHons sont menées, avecnotammentunepublicaHonprochainede laDARESquireviendrasur leseffetsduSMP. Ilm’est impossibled’enparleraujourd’hui.

Enfin, une autre évaluaHon concerne le rôle des OPP.Nous pouvons revenir sur une expérimentaHon desprestaHons d ’accompagnement renforcé desdemandeursd’emploiquiontétéaccompagnéspardesopérateursprivésdeplacementpar l’UnédicouparundisposiHf de l’entreprise par Pôle emploi. Il ressort decesévaluaHonsquecesaccompagnementsrenforcésontun effet posiHf, avec un accroissement des sorHes deslistesdel’Anpeversl’emploidel’ordrede6ou7points.

JacquesLenoirAvons‐nous aujourd’hui des réponses objec?ves surl’efficacitécomparéedupublicetduprivé?

PhilippeSCHERRERJe ne poserais pas la quesHon dans ces termes. Il estessenHeld’avoiraujourd’huidesobjecHfsdeplacementquicomplètentl’accompagnementdePôleemploi.Ilestdonc important que les demandeurs d’emploi soientégalement pris en charge par les opérateurs privés deplacementquicomplètentlesprestaHonsproposéesparPôleemploi.UneévaluaHonrécente(destravauxmenésparPôleemploietlaDARESconcernantlerecoursàdesopérateursprivésdeplacementpourl’accompagnementpersonnalisé) comparait l’impact des opérateurs privésdeplacementoudePôleemploisurleretouràl’emploides demandeurs d’emploi. Elle a démontré que PôleemploiaundifférenHelposiHfensafaveurdanslecadredesesaccompagnementsrenforcés.

Maisentenantcomptedesdifférencesobservées,l’écartdiminue entre Pôle emploi et les opérateurs privés deplacement.Ilpersistemaispeutégalementêtreliéàdeseffetsnonobservables.

JacquesLENOIRLe chômage des seniors est également un point àaborder.Uncertainnombredemesuresontétéprises,mais pouvons‐nous parler de rupture par rapport auxpra?ques antérieures ? Dans l’affirma?ve, quelles enontétélesmesuresspécifiques?

PhilippeSCHERRERDepuis le début de la décennie, les pouvoirs publics etles partenaires sociaux ont pris de très nombreusesmesures pour maintenir les seniors en acHvité. Nouspouvons donc effecHvement parler de rupture parrapportàladécennieprécédente.

Le cadre réglementaire a été modifié ces dernièresannées pour favoriser une parHcipaHon accrue desseniors au marché du travail. Différentes mesures ontétémisesenplace:

• en 2003, des mesures sur la loi portant réforme dusystèmederetraite;

• en2005,desnégociaHonsnaHonalesentrepartenairessociaux pour élaborer un plan naHonal d’acHonsconcertées;

• en 2008, des mesures dans le cadre de la loi definancement de la sécurité sociale, qui ont étéreconduitesen2009.

Ces mesures ont été mises en œuvre et ont effec‐Hvementpuavoiruneffetfavorableàl’augmentaHondutauxd’emploides seniors sur lapériode.Anoterqu’endépit de la crise de 2008‐2009, le taux d’emploi desseniorsaprogressédequelque4points.

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JacquesLENOIRLeworkfare (travail en contrepar?e d’une alloca?on)est un thème que nous devons également aborder. Ils’agit d’unprincipe ayant inspiré un grandnombredepays européens ainsi que les Etats‐Unis et la Francen’est pas exempte. Quelles ont été les mesuresessen?elles dans ce sens au cours de ces dernièresannéesenFrance?

PhilippeSCHERRERLeworkfareestuntermeanglo‐saxonquicorrespondàla noHon d’acHvaHon de la protecHon sociale. Cesréformesd’acHvaHonont introduit,réacHvéourenforcélesliensexplicitesentreledroitàlaprotecHonsocialeetl’acHvité professionnelle. En France, l’objecHf a été degaranHrdemeilleuresincitaHonsfinancièresàlareprisede l’emploi,mais sans contrainte réelle. Nous pouvonsciter comme mesures la prime pour l’emploi dans lecadre de revenu limité, les mesures concernantl’intéressement, les mesures de type RMI, API et RSAdepuis2008oul’aidedifférenHelleaureclassementpourles emplois moins bien rémunérés par rapport à unemploiantérieur.

S’agissant des effets du workfare, le débat n’est pastranché. Certaines études montrent des effets posiHfs,maispastoujours.ConcernantleRSA,lecomiténaHonalduRSAapubliétrèsrécemmentlesprincipauxrésultats.Nous ne notons pas d’effet majeur sur le retour àl’emploi mais nous devons tenir compte du contexteconjonctureltrèsparHculier.

JacquesLENOIRCeeecriseéconomiquea‐t‐ellemodifiél’approcheetlanaturedesinterven?onspubliques?

PhilippeSCHERRERLa crise mondiale a marqué le débat sur la poliHqueéconomique. Elle a eu des impacts sur les poliHquesmacro‐économiques, mais aussi sur celles de l’emploi.Nouspouvonsévoquerlatrèsfortehausseduchômage,quiestprincipalementconjonctureletquinepeutêtrecombaYupardesmesuresstructurelles.LanécessitédemeYre en place des mesures d’urgence et s’adressantaux personnes qui subissent un licenciementéconomique est donc fondamentale. La formaHon destravailleurs en chômage parHel et des demandeursd’emploidoitaussiêtredéveloppée.

La crise a montré également la capacité des pouvoirspublics et des partenaires sociaux à s’adapter à lasituaHonconjoncturelleenfaisantévoluerl’ensembledeces disposiHfs. Des poliHques d’emploi en faveur desdemandeurs d’emploi sont mises en place. Il faut lesaccompagner,lesrenforceretlesprendreenchargesansoublier de travailler également sur l’offre. Je vousrenvoie à unepublicaHon à paraître de laDARES et duTrésor sur ce sujet et toutes les mesures récentesannoncées.

JacquesLENOIRAprès ce regard franco‐français, nous allons avoir unevisionplusglobalegrâceàDavidGrubb.Pouvons‐nousdiredemanièregénéralequedanslespaysdel’OCDE,l’évolu?ondeceeepoli?qued’ac?va?onestsemblableàcequisepasseenFrance?Pourquoiceeepoli?qued’ac?va?ona‐t‐elle étémise en route et quelle formea‐t‐elleprise?

DavidGRUBBDe manière générale, la poliHque d’acHvaHon estmoHvéepar leversementd’uneallocaHon.AumomentdelaséparaHon,lesalariéetl’employeurnesupportentpas le coût total du chômage pour la collecHvité, et lechômeur ne subit pas la totalité du manque à gagnerqueconnaissentlefiscetlescaissessociales.

L’acHvaHoninciteetaugmenteainsiletauxdereprisedel’emploi. Il s’agit d’allier protecHon sociale et l’efficacitééconomique.

D’un point de vue empirique, l’indemnisaHon duchômage a deux types d’impact : d’une part, lesubvenHonnementdesCDD,danslamesureoùlesCDDouvrentlesdroits,et,d’autrepart,lesallocaHonslonguedurée.

JacquesLENOIRQuelles sont les mesures d’ac?va?on qui ont dominédanslespaysdel’OCDE?

DavidGRUBBLesprincipalesmesuressontassezconnues.Ils’agitdescontrats entre les services publics de l’emploi et lechômeur(convenHonderetouràl’emploi)etlecontrôledelarecherched’emploi.

JacquesLENOIRLe contrôle peut‐il déboucher sur une éventuellesanc?on?

DavidGRUBBEn effet. Dans le cadre du contrôle, le chômeur doitdémontrer qu’il fait des démarches pour retrouver unemploi.Siteln’estpaslecasousi l’effortn’estpasjugésuffisant,unesancHonpeutintervenir.

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JacquesLENOIRPouvons‐nous considérer que les pays de l’OCDE fontpreuved’un certaindurcissementdans les contraintesimposéesaudemandeurd’emploi?

DavidGRUBBEnEurope,leprocessusdeLuxembourgde1997aétéunfaitmarquant.Danslesannées90,uncertainnombredepays ont demanière générale trouvé des poliHques oudes stratégies d’acHvaHon qui ont bien foncHonné. LesstratégieslesplusfacilesàmeYreenœuvreavaientdéjàété mises en place, et les années 2000 ont été pluscompliquées, même si les tendances restent variéesselon lespays.Danscertainspays,nouspouvonsparlerdedurcissement,maiscen’estpaslecaspartout.

JacquesLENOIRPouvons‐nousconsidérerqu’unemesureouunpayssedémarqueparl’efficacitédesesrésultats?

DavidGRUBBCertains pays avaient des dysfoncHonnements quiétaientconnusdetous.PourleDanemarkparexemple,unrenouvellementdesdroitspar laparHcipaHonàunemesureacHveétaitpossible. Ilpouvaitainsisefairesurunedurée indéterminée (deux ans et demid’allocaHonchômage, sixmois dans unemesure, de nouveaudeuxet demi d’allocaHon chômage, etc.). L’acHvaHon auDanemarkapermisdemeYreuntermeàcesystèmeenposant des condiHons ([pour tous les chômeurs delongueduréede2000à2002,]l'obligaHondeparHciperàhauteurde75%du tempsàunemesureacHvepourpouvoir conserver l’allocaHon). Demanière générale etmême si la stratégie a démarré dans un domainespécifique, au fil du temps, plusieurs domaines depoliHqued’acHvaHonontététouchés.

JacquesLENOIRQuel regard portez‐vous sur l’efficacité des mesuresprisesenFrance?

DavidGRUBBIl me semble, tout d’abord, que l’indemnisaHon enFrance est assez généreuse. Il faudrait donc uneacHvaHonassezpousséepourtenirletauxdechômage.En ce qui concerne l’efficacité, nous avons toujoursl’impression que la réforme insHtuHonnelle est ce quimanque. Ilest faciledeparlerd’acHvaHonenévoquantle chômeur, mais une acHvaHon réussie est avant toutl’acHvaHonduSPE,del’administraHonleplussouvent.

REGARDSCROISÉSSURLESDEMANDEURSD’EMPLOIETRÉPONSESDUSERVICEPUBLICDEL’EMPLOI

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PatrickBOULTE,Vice‐PrésidentdeSolidaritésnouvellesfaceauchômageMa première ques?on concerne les sta?s?ques depersonnes indemnisées par rapport aux demandeursd’emploi. S’agit‐il des demandeurs d’emploi inscrits àPôle emploi ? Les demandeurs d’emploi en ques?onindemnisés sont‐ils uniquement ceux qui le sont parl’Unédic et non par les administra?ons publiques nonliées à l’Unédic ? Comment intégrer ce facteur pouravoir une vision plus précise de l’indemnisa?on dechômage?

Ma deuxième ques?on concerne l’accès desdemandeurs d’emploi à la forma?on professionnelle.Quel dialogue y a‐t‐il entre les administrateurs del’Unédicet lespartenaires sociaux,administrateursdufonds de sécurisa?on des parcours professionnel. Jecroissavoirqu’aucunesommedecefondsnevaàPôleemploipourfinancerlesforma?ons.

PierreCAVARDLorsque nous avons parlé de chômeurs indemnisés, ils’agissait des chômeurs indemnisés par l’assurancechômage. Mais il y a des chômeurs indemnisés ensolidarité et dont les staHsHques sont généralementdiffusées par les mêmes canaux. En parallèle, lapopulaHon des bénéficiaires du RSA n’est souvent pasconsolidée dans les mêmes staHsHques. La vision del’ensemble des populaHons au chômage de manièreadministraHve et formelle est parfois difficile à obtenir.CesstaHsHquesexistentnéanmoins,mêmesilessourcessontdifférentes.

GabyBONNANDLa deuxième quesHon est intéressante et nous avonsdéjàeul’occasiondel’aborderavecSolidaritésnouvellesfaceauchômage.Elleaégalementfaitl’objetd’undébatdanslecadred’unnouveaudisposiHfdeformaHonquiaremplacé l’ARFF.Jenepeuxprésentementrépondresurle plan insHtuHonnel, mais il me semble que ceYequesHon est essenHelle : comment les partenairessociaux permeYront‐ils un décloisonnement entre leslieuxdetraitementduchômageetlelieudetraitementde la formaHon ? Ce qui est dit ce maHn montreclairement qu’un défi majeur pour les partenairessociauxet l’Etatexiste.EnFrance,chacuna tendanceàgérersonsegment–ilfaudraitquecelachange.

MireilleELBAUM,professeurauCNAMJereprendslaques?ondePatrickBoulte.Leproblèmen’estpasuniquementsta?s?que.Surlalonguepériode,les fron?ères ins?tu?onnelles entre assurance,assistance et RMI, RSA ont évolué. La ques?on estdésormais de savoir comment indemniser le chômageenFrance,enpar?culierpendant la crise. La situa?onestd’autantplusinquiétantequenousvoyonslestauxde couverture de l’assurance diminuer, malgré unélargissement récent. La ques?on requiert donc uneanalyse shi+ and share : il s’agit d’évaluer la partrespec?vedesévolu?onsdumarchédutravailetdelaconjoncture.

Par ailleurs, faut‐il se féliciter de la part prise par lesac?vités réduites ? Nous cul?vons tous une certaineambiguïté par rapport à ceee ques?on, y compris lespartenaires sociaux. Ainsi, il est dit qu’il s’agit d’unemesure d’incita?on,mais aussi qu’il faut la limiter. Laques?ondesondevenirestposée.Demême,commentpouvons‐nouslaréguler?

Nouspouvons remarquerque les régimesenques?onsont totalement disjoints pour les chômeursindemnisés, s’agissant de l’alloca?on de solidaritéspécifique et du RSA. Toutes ces popula?ons sont enpar?e lesmêmesouévolu?vesaucoursdutemps.Cesontdespersonnesquibasculentd’unsystèmeàl’autreaugrédes changements ins?tu?onnels.Cecin’estpasressor?desdébats,etje?ensàlesouligner.

DavidGRUBBUne des tendances assez fréquentes en Europe a étél’élargissement des poliHques d’acHvaHon pourcomprendre l’aidesocialeou lesdisposiHfsd’assistance.Elle a été trèsmarquée au Danemark et au Royaume‐Uni.CeYetendanceestextrêmementimportante.

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Jean‐PierreRevoilAvec l’allongement de la crise économique, nousconstatons que le pourcentage de personnes auchômage depuis plus de deux ans s’accroîtsérieusement (de 20 à 30 %). Le véritable problèmen’est pas de connaître une période de chômage,maisqu’il s’agisse d’un chômage de longue durée. Savons‐nouscequ’iladvientdespersonnesquipassentlecapdes24moisd’indemnisa?on?

PierreCAVARDPour lapremière fois,nousavonsvuréapparaître,dansla convenHon triparHte qui vient d’être signée, uneaYenHonsurcechômagedetrèslonguedurée.Eneffet,nous nous intéressons aux personnes qui ont étéécartées plus de 20 mois sur les 24 derniers mois dumarchédutravail.

Cela représente 300 000 personnes en France. DesobjecHfsderéducHondeceYepopulaHonexistentpourla première fois depuis longtemps, puisqu’auparavant ilétait davantage quesHon de l’évoluHon du chiffre duchômagemensuel.

Nousavonspuremarquer,autraversdupeHtexercicedepersistance au chômage réalisé précédemment, que lacourbedevientpresqueplateàparHrde24mois. Ilestdoncmanifestequesiletraitementn’estpasfaitautourde neuf à douze mois, il est extrêmement difficiled’empêcher l’enlisement dans un chômage de trèslonguedurée.

DidierDEMAZIERELe chômage longue durée (24, 36 mois) n’est pas unphénomènerécent.IlétaitdéjàidenHfiédanslesannées90 et des poliHques spécifiquement ciblées sur leschômeursdeplusde36moisavaientétémisesenplace.Nousobservonsaujourd’huiunphénomèneassezmassifdedécouragement. Il secaractériseparuneflexiondescomportements de recherche d’emploi , unepaupérisaHon, ainsi que des mécanismes sociorelaHonnelsetpsychologiquesd’éloignementdumarchédu travail et de l’emploi. Nous n’avons pour l’instantaucuneréponseefficaceàcesphénomènes.

Noussavonsquelevécuduchômagerépondàunesortede cycle (un moment de prise de conscience de lasituaHon,puisunefortemobilisaHonpourensorHretundécouragement profond en cas d’échec). Pour prévenirle découragement et favoriser les sorHes avant ceYephase, nous consacrons des moyens importants audébutducycle.Iln’endemeurepasmoinsquelamassed’individus enfermésdans la nassedu chômage tend àgrossir, même si ce n’est pas toujours visible dans lesstaHsHques.Ledevenird’uneparHedeceYepopulaHonestdesorHrduchômage,pourdesraisonsdestratégieindividuelleouparsancHonadministraHve.Mêmesicesindividusdeviennent inacHfs sousdes statuts divers, ilsconsHtuent une forme de chômage caché et ilconviendraitd’unemanièreoud’uneautredeleprendreencompte.

Dèsl’instantoùilssortentdesinstancesofficielles,ilsnesont plus considérés comme des chômeurs, alors quepour une très large part il s’agit encore de chômeurs,c’est‐à‐dired’individusprivésd’emploietqui aspirentàl’emploi.

JacquesFREYSSINETLes problèmes d’évalua?on des poli?ques publiquessont méthodologiquement très délicats. En ce quiconcerne la comparaisondesopérateurs privés et desopérateurs publics de placement, les évalua?onscompara?ves ont été confiées à des équipespar?culièrement pres?gieuses sous le contrôle decomités scien?fiques éminents. Toutes ces études ontmontréquelesopérateurspublicsavaientdemeilleursrésultatsquelesopérateursprivés.Jesuisdoncétonnéque ce résultat ait été gommé, alors qu’ilme sembleque les garan?es méthodologiques ont été bien plusgrandesquecellesdenombreusesautresévalua?ons.

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SergeBAERTConseillergénéralRéglementa?onàl’ONEM,Belgique

IsabelleBOURGEOISchercheureauCIRAC,rédactriceenchefdelarevueRegardssurl’économie

Jean‐PaulDOMERGUEDirecteurdesaffairesjuridiques,Unédic

MarjoleineHENNISConseillèrepourlesaffairessociales,AmbassadedesPays‐Bas

AnnaNSUBUGAConseillèrepourlesaffairessociales,AmbassadedeGrande‐Bretagne

REGARDSDEPUISL’ALLEMAGNELABELGIQUE,LESPAYS‐BASETLAGRANDEBRETAGNE:

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JacquesLENOIREnma?èred’assurancechômage,nousn’avonspasdemodèleuniqueeuropéen ; lessystèmes, lespoli?quesd’ac?va?onvarientd’unpaysàunautre.Deuxgrandescatégoriesdeprotec?onsocialepeuventtoutdemêmeêtre repérées. De ce fait, l’un ou l’autre des payseuropéensserapprocheplusoumoinsdumodèle1oudu modèle 2. Quelles sont ces deux grandesphilosophiesquiprévalent,Jean‐PaulDomergue?

Jean‐PaulDOMERGUELes deux logiques sur lesquelles reposent les différentssystèmes de protecHon sociale sont les concepHonsbeveridgienneetbismarckienne.

En1911,uneassurancechômageaétépourlapremièrefois insHtuée en Grande Bretagne. 30 ans plus tard,WilliamBeveridgeaétenduledisposiHfdeprotecHoneta posé les principes fondateurs de la sécurité socialebritannique, qui est la généralisaHon d’une protecHonidenHque à l’ensemble de la populaHon. L’assurancenaHonaleest ainsi crééeetfinancéeparune coHsaHonuniforme. Elle a vocaHon à accorder un subsHtut desalaire uniforme à tous les membres de la collecHviténaHonale.

A ce système est classiquement opposé le systèmeallemandd’assurance sociale crééparBismarck à la findu XIXème siècle et complété en 1927 par l’assurancechômage. Dans ce cadre, le disposiHf d’assurancechômage est obligatoire pour toutes les catégoriesprofessionnelles qui sont assurées et ce disposiHf estfinancépardescoHsaHonsproporHonnellesauxsalairesdes affiliés. Il garanHt aux affiliés en cas de privaHond’emploiunrevenuquiestfoncHondusalaire.

LaconcepHondeBeveridgeestrelaHvementéloignéedelatechniquede l’assurance,alorsquecelledeBismarcks’eninspiretrèsfortement.Dans lepremiercas, ils’agitd’accorder un revenu minimal à un individu pourmaintenir son intégraHon dans la collecHvité naHonale.Le financement est principalement d’origine fiscale etl’administraHonrelèvedesautoritéspubliques.

Dans le deuxième cas, il s’agit de fournir un revenuderemplacementdusalairepourlespériodesdechômage.Le financement est assuré par des coHsaHons et lespartenairessociauxsontlargementassociésàlagesHondesinsHtuHonsetàl’élaboraHondesdisposiHfs.

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Ces logiques de protecHon, même si elles se sontmêlées, conHnuent à caractériser les systèmes. Mêmes’ils sont fondés sur un modèle dominant, les sujetsauxquelsestconfrontéel’assurancechômagesontassezcommuns.Commeindiquéprécédemment,nousfaisonsfaceauchômagedelonguedurée,àdenouvellesformesd’emploi et à l’émergence de nouveau statut. Nousallonsdoncvoir comment toutes cesquesHonsontétéabordéesparlesdifférentssystèmes.

Le système français, quant à lui, correspond plutôt aumodèledeBismarck.

JacquesLENOIRNous évoquerons tout d’abord le système d’indemni‐sa?on qui prévaut dans les différents pays. Sur quelsprincipes reposent laprotec?onsociale, lescondi?onset le niveau d’indemnisa?on des alloca?ons auxdemandeursd’emploi?

SergeBAERTEn Belgique, lemontant de l’indemnisaHon dépend dedeux facteurs : la catégorie familiale à laquelle lechômeur apparHent et la durée de son chômage.L’indemnisaHonestillimitéedansletemps.

Le travailleur qui est admis au bénéfice des allocaHonschômageliéesàdesprestaHonsdetravailantérieuresadroitàuneallocaHonquiestégaleàunpourcentagedesa dernière rémunéraHon limitée à un plafond quiévolueenfoncHondeladuréedechômage.

J’évoquais à l’instant les catégories familiales. EnBelgique,pendant lapremièreannéedechômage,tousles chômeurs bénéficient du même pourcentage, àsavoir 60 % de leur dernière rémunéraHon. Pour lestravailleursquiontunefamilleàcharge,cemontantestgaranH pendant toute la durée du chômage. Enrevanche,ilévoluedemanièredégressivepourlesdeuxautrescatégories–travailleurs isolésetcohabitantsanscharge de famille. Pour les cohabitant sans charge defamille, on abouHt finalement à une allocaHonforfaitaire,aprèsuneduréedechômagequivarieselonlepasséprofessionnel.

Pourlesjeunesquiontterminéleurparcoursscolaire,lerégime d’assurance prévoit l’octroi d’une allocaHonforfaitaire (payée sans coHsaHon sociale préalable),aprèsunepérioded’aYentependantlaquelleilsdoiventêtreinscritscommedemandeurd’emploi.

MarjoleineHENNISLemodèlenéerlandaisest inspirédeceluideBismarck.L’assurance chômage est considérée comme uneindemnisaHon qui aide le demandeur d’emploi entredeux postes. L’assurance chômage couvre les employéscontre les conséquences financières du chômage. Lapremière condiHon pour bénéficier des indemnités estquel’intéresséaitétémisauchômagecontresavolonté(licenciement). Pour bénéficier des indemnités, il fautpouvoir jusHfier d’au moins 26 semaines d’acHvitésalariéedansunepériodede36semainesavantlamiseau chômage. Toute personne ne jusHfiant que de26 semaines de travail a droit à une indemnisaHon debase,c’est‐à‐dire troismoisd’indemnisaHonsur labasede 75 % du dernier salaire. Le maximum est de 199euros par jour. Pour avoir droit à des indemnitéschômage après les trois mois, il faut en plus pouvoirjusHfierd’aumoins52joursd’acHvitésalariéependant4des 5 années calendaires qui précèdent la période demiseauchômage.SiunepersonnepeutjusHfierlesdeuxcritères(lecritèrede26semainesetceluide4ans, iladroit à une période de versement de l’indemnitéproporHonnelle au salaire (de 70%) dont la durée estbaséesurlesannéestravaillées.

La situaHon actuelle est le résultat d’une réforme en2006. Alors, le taux proporHonnel d’indemnisaHon aaugmenté : l’indemnisaHon pendant les trois premiersmois,quiétaitaupréalablede70%,estpasséeà75%.CeYeadaptaHonétaitassezfavorableauxchômeurs.Lescritèresdonnantdroitàl’indemnisaHonontenoutreétéassouplis:maintenantilestpossibledebénéficierd’uneindemnisaHon aussi en cas de rupture à l’amiable ducontrat de travail. Le licenciement n’est plus la seulecondiHon.Enrevanche,laduréedel’assurancechômagea été réduite de cinq ans à 38 mois. CeYe disposiHonétaitmoinsfavorableauxchômeurs.

IsabelleBOURGEOISLe modèle bismarckien repose sur le facteur travail ;c’est ce facteurquifinance laprotecHon.A l’origine, cesystèmeétaitréservéàquelquespersonnesavantd’êtreétendu à l’ensemble de la populaHon. Après l’Unité, laquesHondesonfinancementetcelledesacompaHbilitéavec les impéraHfsde croissanceetd’emploi s’est alorsposéeprogressivement.

Au début des années 2000, l’Allemagne compte4,5millionsdechômeurs,dont2à3millionsdelonguedurée.Dans lemêmetemps, ledéficitdupayss’accroîtet représente 4 % du PIB ; le poids des prélèvementsobligatoiresestde42%duPIBetladeYedépasse60%.Lepaysprendconscienceàcemomentdu lienexistantentrelacroissanceetl’emploi.Silenombredechômeursaugmente, le volume des coHsaHons verséess’amoindrit, mais les dépenses augmentent dans lemêmetemps.Lepayscomblecedéficitparunrecoursàl’endeYement. Mais le budget social menace de segonfler indéfiniment ; or les intérêts doivent êtreremboursés,cequipose laquesHonde lasoutenabilitédes finances publiques. Parallèlement, l’exclusion d’unnombrecroissantd’acHfsrisquedemenacerlacohésionsociale.

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Entre2003et2005,plusieursréformes(ditesHartz)sontdoncentréesenvigueur.Lapremièreamodifiélerégimedes allocaHons versées aux nouveaux chômeurs. Ladurée a été réduite à douze mois, contre trois ansauparavant (sauf pour les seniors). Le montant desindemnités est réduit, mais elles restent proporHon‐nellesausalaireprécédent(60%),avecdessupplémentsencasdefamilleàcharge.LescondiHonsouvrantdroitàl’indemnitéontétédurcies. Il fautacceptertoutemploidit«acceptable»,mêmes’ilimpliquedesqualificaHonsou rémunéraHons inférieuresauposteprécédent. Il estpossiblederefuserdeuxoffres,maisautroisièmerefus(cas rare dans la praHque), le demandeur d’emploi nebénéficieplusdecesindemnités.

AnnaNSUBUGAEnGrande‐Bretagne,lesystèmedeprotecHonsocialeestbasésurlesprincipesdeLordBeveridgeetsurl’idéedeprotéger les individus. Il accorde des allocaHonsmoinsgénéreuses,carl’objecHfestd’éviterlapauvreté,etnonderemplacerlessalaires.Ils’agitd’unsystèmed’urgencepouraider lespersonnesquisetrouventdansdevraiesdifficultés.

La Jobseeker ’s Allowance est l ’équivalent del’indemnisaHon chômage. Selon les critères (âge,situaHon,etc.)d’undemandeurd’emploi,il luiestverséentre50et120livresparsemaine,etàceYeindemnitépeutêtreajoutédesallocaHonsdiverses.Ilpeutsemblerdeprimeabordquelemontantdel’indemnitéestfaible,mais une fois les allocaHons connexes intégrées, il nel’estpastant.

JacquesLENOIRLes deux grands principes sont donc de prioriser lesplus défavorisés et de fournir selon les besoins. Cesystèmeesttrèspersonnalisé.

AnnaNSUBUGAEffecHvement.Ils’agitd’aiderlesdemandeursd’emploiàretrouver un poste, y compris par la formaHonprofessionnelle.

JacquesLENOIRUnepersonneseretrouvantauchômagemaisn’entrantpas dans la catégorie des plus démunis peut‐elle nerecevoiraucuneindemnisa?on?

AnnaNSUBUGANousavonsdesplafonds.Dèsqu’un individuperçoituncertainsalaire,ilnepeutrecevoiraucuneallocaHon.

Jean‐PaulDOMERGUEL’Assurancechômages’adressetoutd’abordauxsalariésdu secteur privé. Ce système est financé par descontribuHons de l’employeur et du salarié. Lorsque lerisque se réalise, la personne concernée a droit, si ellejusHfie d’une certaine durée d’affiliaHon, à uneindemnisaHon. Sa durée est foncHon de sa duréed’affiliaHon, le principe étant qu’un jour d’affiliaHonéquivautàunjourd’indemnisaHon.Cependant,cedroitn’intervientquesi lapersonnecumule4moisdetravaildans les 28 derniers mois. Le niveau de garanHecorrespondà57,4%del’anciensalaire dit«salairederéférence », sachant qu’une majoraHon est possiblepourceuxquiontdesrémunéraHonsavoisinantleSMIC.Un allongement de la durée d’indemnisaHon peutégalement intervenir pour les salariés âgés de plus de50ans.

JacquesLENOIRNous allons à présent nous intéresser à l’aide fournieaux demandeurs d’emploi pour retrouver un travail.Quels sont les grands principes de la poli?qued’ac?va?on et d’accompagnement dans les différentspays?

AnnaNSUBUGALaGrande‐Bretagneestentrainderéformerlesystème.Après les élecHons, le gouvernement de coaliHon adécidé de simplifier le système de protecHon sociale,ainsi que le système d’indemnisaHon, et de renforcerl’accompagnementdesdemandeursdetravail.

Commeunpremierpas leWorkProgrammeaainsiétécréé.Ceprogrammecible lesdemandesdetravailpourlespersonneslesplusvulnérables.Noustravaillonsavecles prestataires privés, y compris les prestataires dessecteurs caritaHfs. Lebut est de transférer le risquedel’Etat à ces prestataires. Des contrats existent pour lesgrands prestataires travai l lant avec d’autresorganisaHonsetilssontpayésenfoncHondesrésultats.

Si ces prestataires arrivent, par exemple, à aider unepersonneen chômage longuedurée, ils perçoiventuneprime. Nous évitons ainsi une situaHon où le secteurprivé et les entreprises choisissent les cas les plus«faciles».Deplus,plusieursdecesprestatairesontdesprogrammesàl’étranger.Nouspouvonsainsiprofiterdeleur expérience et échanger les bonnes praHques. Ils’agit d’un programme très innovant et il consHtue leplus important changement depuis la créaHon duWelfareState.Ilaétélancéenjuin2011;uneévaluaHonestdoncprématurée.Lebutaffichéestd’essayerd’êtrele plus novateur possible, de proposer des soluHonsmieuxcibléespourlesbesoinsdesindividus.

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JacquesLENOIRQuelleestlaplaceduWorkfareenGrande‐Bretagne?

AnnaNSUBUGASi un individu est au chômage depuis plus de douzemois, des iniHaHves existent pour lui permeYre detravaillerautraversdubénévolatoudestages.

JacquesLENOIRVousfaisiezallusionauxOPP.Parrapportaupublic,cesentreprises sont‐ellesmajoritaires ? Quelle place ont‐ellessurlemarché?

AnnaNSUBUGALeurplaceestbeaucoupplusimportantequ’enFrance.Ils’agit d’un vrai partenariat, mais je ne connais pas laproporHon.

JacquesLENOIRSerge Baert, qu’en est‐il en Belgique ? Votre nouveaugouvernementaprisuncertainnombredemesures,enma?èrenotammentd’ac?va?on.

SergeBAERTCommedanslaplupartdespayseuropéens,nousavonsun système d’accompagnement et de suivi acHf desdemandeurs d’emploi. Longtemps, le suivi desdemandeurs d’emploi s’est limité à sancHonner lescomportements inadéquats. En 2004, une rupture estintervenue;unaccorddecoopéraHonaétéconcluentrel’EtatfédéraletlesrégionspourmeYreenplaceunsuivisystémaHqueetuniformedesdemandeursd’emploi.Unvéritable accompagnement et souHen du demandeurd’emploidanssarechercheestdésormaismisenplace,Cet accompagnement est assorH d’un contrôle de lamanière dont le demandeur d’emploi recherche lui‐même acHvement un emploi. Des sancHons sontappliquées si les démarches ne sont pas jugéessuffisantes ou saHsfaisantes. Depuis 2006, ce suivi estappliquéàtouslesdemandeursd’emploiindemnisésdemoinsde50ans.

Nous avons relevé quatre effets posiHfs liés à ce pland’accompagnementpersonnalisé:

• untauxdesorHeplusimportantpourlesdemandeursd’emploiquiétaientsuivis;

• unechutedutauxdesorHeàparHrdel’âgede50ans,l’âgeàparHrduquellesuivines’appliqueplus;

• uneaugmentaHonsensibleetconstantedunombredepersonnes accompagnées par les services régionaux,ainsi qu’une augmentaHon du nombre de personnesen formaHon ou reprenant les études pour acquérirunequalificaHonprofessionnellesupplémentaire;

• unediminuHonsensibleduchômagedelonguedurée.Le nombre de demandeurs d’emploi de moins de50 ans et indemnisés depuis plus de deux ans n’ajamaisétéaussibasdepuis1981.

Enfin, le taux de chômage en Belgique est de 7,2 %,c’est‐à‐direuntauxplusbasqu’avantlacriseen2007.Cetauxestdûnotammentàl’effetconjuguéd’unesériedemesures (mesures d’acHvaHon, régime des Htresservices,chômagetemporairedesemployés,etc.).

JacquesLENOIRIsabelle Bourgeois, vous nous avez indiqué que deschangements étaient intervenus en Allemagne entermes de couverture sociale. Qu’en est‐il del’accompagnementetdusou?enauretouràl’emploi?

IsabelleBOURGEOISJe n’ai évoqué pour le moment que le régimed’assurance chômage ramené à douze mois (ou pluspour les plus de 58 ans). Le but de ceYe réformeétaitd’accroîtrelafluidité.D’aprèslesstaHsHquesde2010,ladurée de chômage est de sixmois enmoyenne, et lesemplois en quesHon sont très souvent des emploisqualifiés.

Pour mieux appréhender ces réformes, il faut savoirqu’un régimed’assistance, financé par le fisc, existe enAllemagneetpermetàtousdedisposerd’unminimumvital.Depuis lesannées60,unsystèmed’aidesocialeaétédéveloppépourlesplusdémunis.Seulement,àceYeépoque,lenombredebénéficiairesétaitassezfaible.Aufil du temps, ce système s’est généralisé jusqu’àconcerner 3 millions de personnes à la veille desréformes.Cesaidesétaientcumulablesaveclesaidesauchômage en fin de droit et elles sont rapidementdevenues des trappes à inacHvité, conduisant à unecertaine forme de destrucHon du lien social et à unmanque de ressources pour les systèmes de coHsaHonsociale.

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Pourramenercespersonnesvers l’emploi, ila falluagirsurleseuilderéférencedusalaire.Ils’agitdelabasedela réforme Hartz IV qui est une sorte de RMI àl’allemande.Ellereposesurdesdroitsetdesdevoirs.

• Les personnes concernées ont droit à un «minimumsocioculturel vital ». Il est forfaitaire, calculé enfoncHon du budget moyen d’un ménage à faiblesrevenus,etrecalculétouslescinqans.

• Les bénéficiaires doivent rechercher acHvement unemploi. CeYe recherche est accompagnée etl’essenHel repose sur des mesures visant à larequalificaHon,àlaformaHon,àlaréinserHon,etc.,lebutétantderestructurerlapersonne.

L’Allemagne compteactuellementprèsde7millionsdepersonnesindemniséesauHtredeHartzIV.Cechiffrenecorrespondcependantpasuniquementauxchômeurs,ilincluttoutepersonnevivantsousleurtoitetconsHtuantune«communautédebesoin»,doncaussi lesenfants.L’aidede la collecHvitéest soumiseàdescondiHonsderevenus : le chômeur doit prouver qu’il est dans lebesoin.

S’agissant de l’Allemagne, où les standards de vie sontélevés, les normes sont toutefois relaHvementgénéreuses.

JacquesLENOIRL’image des réformes Hartz peut sembler idyllique,mais certains éléments peuvent choquer. Je faisréférenceautravailpayé2eurosdel’heure.Quelleestlaphilosophiedeceeedémarche?

IsabelleBOURGEOISIlnes’agitpasd’unsalairemaisd’undédommagement,car il ne s’agit pas d’un emploi au sens classique. Ladifférenceestimportante.Lapossibilitéestdoncofferteau chômeur d’avoir une acHvité d’uHlité publique touten conservant ses aides forfaitaires et en augmentantlégèrement ses revenus. En plus des aides, il perçoitdonccedédommagementquipeutallerjusqu’à2eurospar heure. Il s’agit donc avant tout d’une mesure deréinserHonetderestructuraHonsociale.

JacquesLENOIRQuellessontlesprincipalesmesuresauxPays‐Bas?

MarjoleineHENNISLe système est en plein bouleversement. Pour lemoment,jen’aiévoquéquel’assurancechômage,etnonl’assistance desHnée à ceux qui n’ont pas droit auxallocaHonschômage.Lespersonneséloignéesdutravailne sont pas forcément incluses dans l’assurancechômage.

Plusieurs réformes insHtuHonnelles ont été mises enœuvre depuis les années 90. La plus récente a vu leséquivalents néerlandais de l’Unédic et du Pôle emploifusionnerdansun«InsHtutdesassurancessocialespourles salariés (UWV). » Il travaille avec les municipalitéspours’approcherdesdemandeursd’emploi.

Une de ses missions devrait être de s’occuper del’accompagnement des demandeurs d’emploi quireçoivent une allocaHon de chômage , mais depuis ledébut de l’année 2012, le budget dédié à cetaccompagnement a été supprimé. CeYe suppressionintervient à cause des coupes budgétaires, mais aussiparcequel’assurancechômageestconsidéréeauxPays‐Bascommeuneaidetemporaireentredeuxemplois.

De même, il est esHmé que pour un chômeur il estrelaHvementfaciledetrouverunemploiparsespropresmoyens par rapport à ceux qui sont plus éloignés dumarchédutravail.Lerôlede l’UWVencequiconcernel’accompagnement des demandeurs d’emploi estramené à la décision de dispenser le demandeurd’emploi qui souhaite suivre une formaHon, del’obligaHondepostuler.LechômeurenquesHondoitlui‐même financier ceYe formaHon. CeYe réforme a pourbut de réserver autant de moyens que possible auxdisposiHfs d’accompagnement des plus éloignés dumarchédutravail.CesdisposiHfsrestentenplace.

JacquesLENOIRQuelestlerôledespartenairessociauxdanslepilotagedel’Assurancechômage?

MarjoleineHENNISLespartenairessociauxontunrôledirectetindirect.

Leur rôle direct se situe au niveau des coHsaHons. LespartenairessociauxdécidentensembledequellesserontlescoHsaHonsàmeYreenplacepour les intégrerdanslescaissesd’allocaHon.

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Une parHe des allocaHons est versée au fondsd’allocaHondessecteurs.EllesertàpayerlesallocaHonsde courte durée (moins de six mois). Le taux decoHsaHon dépend des accords entre les partenairessociauxetvariedesecteuràsecteur.Quand lenombrede chômeurs augmente, ils doivent couvrir lesallocaHons avec leur fonds. La deuxième parHe desallocaHons concerne les allocaHons de durées desixmoisetplus.Ellessontpayéesparlefondsgénéralduchômage.LesemployeurscoHsenttousauxmêmestaux(0,5%).

Par ailleurs, la loi établit les normes de l’assurancechômage. Mais lorsque de grandes décisions doiventêtre prises, le gouvernement consulte les partenairessociaux et prend en compte leur avis : c’est leur rôleindirect.

AnnaNSUBUGALe système britannique est différent. Les partenairessociauxne jouentpasderôlepareilencequiconcernelepilotageoulefinancementdusystème.

Encequiconcerne ledéveloppementet l’évoluHondespoliHques, le gouvernement mène régulièrement desconcertaHons incluant le grand public, les syndicats, lepatronat, les associaHons, etc. Les partenaires sociauxontdans ces concertaHonsun rôle très importantpourpartager leursanalysesetcriHquers’ilenestbesoin lesproposiHonsdugouvernement.Leursidéespeuventêtreintégrées. En plus, ils peuvent être engagés dans lesétudesd’impactselonlesujetetlesanalysesrequises.

Un travail est par ailleursmené au niveau régional. Letauxderetouràl’emploiétantassezhaut,ilnoussembleimportant de travailler rapidement avec les salariés etles entreprises, dès que nous apprenons qu’unlicenciement à grande échelle va intervenir ou si desproblèmes relaHfs à la crise économique surviennent.Lespartenaires sociaux sont invitésà travailler avec lesJobcentrePlus, lesentrepriseset lescollecHvitéslocalespour développer des projets de formaHon/conseil pouraiderlesindividusàtrouverouconserverunemploi.

IsabelleBOURGEOISEncequiconcernelesalaire,leshorairesetladuréedutravail,seulslespartenairessociauxsontcompétentsenAllemagne.Legouvernementn’aaucunecompétenceenlamaHère:laConsHtuHonréservecelle‐ciauxsyndicatset aux fédéraHons patronales des diverses branches.L’Etat se contente de fixer les normes générales(limitaHon de la durée hebdomadaire du travail à 48heures, par exemple). Et comme le système deprotecHon sociale est financé par les coHsaHons, doncqu’il repose sur le facteur travail, c’est aux partenairessociaux qu’il revient de cogérer le régime d’assistancechômage.

Un organisme central triparHte, l’Agence fédérale pourl’emploi de Nuremberg, exécute en pleine autonomiel’ensemble des mesures que nous pouvons rassemblersous le termede«mesures acHvespour l’emploi ». Samission va même au‐delà de ces mesures : sonposiHonnement peut correspondre à celui de l’Unédic,des Assédic, de Pôle emploi, de la CAF et dans unecertainemesureàceluidesinsHtuHonsdeformaHon.

SergeBAERTLe rôle des partenaires sociaux a toujours été trèsimportant en Belgique. Ils sont largement impliquésdanslespoliHquesetlaréglementaHon,danslepilotageet l’évaluaHon des poliHques menées, notamment parleur parHcipaHondans tous les Comités de gesHondesorganismes de sécurité sociale. Tous les organismes desécuritésociale,dontl’ONEM,sontgérésparuncomitédegesHoncomposéparitairementpardesreprésentantsdes employeurs et des travailleurs. A ce Htre, ilsparHcipent acHvement à la gesHon de l’assurancechômageet sontassociésà ladéfiniHonetà lafixaHondes objecHfs stratégiques de l’ONEM. En Belgique,chaqueprojet réglementaire relaHfà la sécurité socialeestsoumispouravisaucomitédegesHondel’organismeconcerné.

Les partenaires sociaux ont également un rôled’iniHaHve,danslamesureoùilsconcluenttouslesdeuxans un accord interprofessionnel (applicable à tous lessecteurs d’acHvité) qui fixe notamment la normesalariale, l’adaptaHon des allocaHons sociales au bien‐êtreetd’autresélémentsqui, lorsqu’ils sontapprouvéspar le gouvernement, entraînent la mise enœuvre denouvelles poliHques et de nouvelles réglementaHonsdansdesdomainesvariéscommeledroitdutravailoulasécuritésociale.

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MireilleELBAUMLa criseactuelle, trèsprofonde, vavraisemblablementse prolonger. Plusieurs dilemmes apparaissentconcernant l’indemnisa?on du chômage. Faut‐ilétendre l’indemnisa?on ? Comment faire face auximpéra?fsbudgétaires?Quiddelaperted’efficacité?Quellessontlesréac?onsspécifiquesauxtroispays?

SergeBAERTLa Belgique connaît un tel déficit que ses marges demanœuvre budgétaires pour financer de nouvellesmesuressonttrès limitées.LegouvernementréfléchitàdesdisposiHfsquipermeYraientdegérerlasituaHon.LaBelgiqueestundespaysd’Europequialemieuxrésistéà la crise, mais l’avenir reste incertain. Les mesuresenvisagées vont dans le sens d’une plus granderestricHon,avecnotammentunedégressivitéaccruedesallocaHonsdansletempspourtousleschômeurs,quellequesoitleursituaHonfamiliale.

MarjoleineHENNISMalgréuntauxdechômagerelaHvementbas(4,9%),lesPays‐Bas font face à des problèmes de budget. Lescaisses sont en déficit : celui‐ci devrait aYeindre 2,4milliards d’euros fin 2012. Ceci pousse à envisager uneréforme sur le long terme. Le pays connaît par ailleursune diminuHonde sa populaHon acHve et une pénuriede main‐d’œuvre. Le résultat est que, d’un coté nosacHvités sont axées sur l’acHvaHon de toutes lespersonnes pouvant travailler. Et, d’un autre coté, descoupesbudgétairesportentàunesituaHonoùonessaiederendreplusefficacesnos instrumentsde l’acHvaHon.Par exemple, par une réforme qui vise à réduire lenombre d’entreHens en face à face auprès de l’UWVjusqu’à seulement 10% des enregistrements desdemandeurs d’emploi. Les autres enregistrementsdoiventêtrefaitsparinternet.

AnnaNSUBUGALaGrande‐Bretagneadéjàprisdesmesures.Nousavonsréduit les budgets de tous lesministères. DesmesuresdetypeWorkProgrammeontégalementétéintroduites,etnousessayonsde réduire lecoûtdesallocaHons.UnprojetdeWelfareReformBillestactuellementexaminéau Parlement. Il vise à introduire le Universal Credit(paiementuniquepour les foyers).DesplafondsrelaHfsaux allocaHons seront également mis en place et lesallocaHonslogementserontaussidiminuées.

JacquesLENOIRCompte tenu de sa situa?on économique, bienmeilleure que celle des autres pays d’Europe,l’Allemagne poursuit‐elle malgré tout un programmed’économies aux dépens des mesures d’accompa‐gnementdelarecherched’emploi?

IsabelleBOURGEOISL’Allemagne doit elle aussi consolider ses budgetspublics : des réducHons sont effecHvement mises enplace.Maisils’agitsurtoutdeporterunregardnouveausur le disposiHf existant et de l’évaluer selon sonefficience.L’Allemagneenvisagedonclasuppressiondesmesures les plus inefficaces et la modificaHon de ladurée commedumontant de certains versements. Ellecherche également à réorganiser le disposiHf dans sonensemblepourmieuxtenircomptedeshandicaps.LaclédeceYeréorientaHonestladifférenciaHondesmesuresou leur individualisaHon en foncHon des besoinsparHculiers.

Jean‐MichelPASQUIER,KoeoPouvez‐vous nous dire un peu plus sur les Jobcentresbritanniques,etnotammentsurl’envoidedemandeursd’emploi auprès des ONG ? Ceee démarche est‐elleaccompagnée?Commentpeut‐elleêtredupliquée?

AnnaNSUBUGAEn ce qui concerne l’acHvité et l’accompagnement parlesassociaHons,toutcecifaitparHedupartenariatavecles prestataires privés. CeYe démarche fait parHe ducontrat et intervient selon les circonstances et besoinsdes individus. En termes de résultats, elle foncHonnetrèsbien.

DelasalleLa ques?on des fonds structurels n’a pas du tout étéabordée. Je m’étonne par ailleurs d’entendreMarjoleine Hennis évoquer la réduc?on du tempsconsacréàl’accompagnementdupublic.Eneffet,dansles poli?ques européennes et FSE, les poli?quesd’inclusion sont extrêmement importantes etl’orienta?on 2014‐2020 est par?culièrement mise àl’ordre du jour, notamment en ma?ère d’accompa‐gnementindividualisédupublic.

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Nous évoquons tous l’accompagnement, mais dans laréalité professionnelle, nous en avons une visiondifférente. Le retour à l’emploi passe par un vraiaccompagnementdeproximité,commenousavonspule développer dans des plans locaux d’inser?on etd’emploi qui sont cofinancés par les collec?vitésterritorialesenFranceetparleFSE.

AnnaNSUBUGAJe suis d’accord avec vous, l’accompagnement deproximité et personnalisé est très important. CeYenoHon fait véritablement parHe du système et de lapoliHque britanniques. Les intervenants font un vraitravail de proximité avec les individus et essaient detrouverlessoluHonspourunemploidurable,maisaussipour résoudre d’éventuels problèmes personnels, ycomprislamaladie.

Nous uHlisons le FSE en Grande Bretagne, mais lescritères sont assez complexes et longs. En ce quiconcerne les réponsesà lacrisenousessayons,pour letravailréaliséauniveaurégional,detrouverlesmoyensd’inclurecetypedefonds.

IsabelleBOURGEOISLeFSEaétéemployéenAllemagnesurtoutaumomentde la transiHon des nouveaux Länder après laréunificaHon.Maisendehorsdececas,leproblèmequiseposeaveccetypedefinancementcommunautaireestque50%desfondsuHlisésdoiventêtreabondésparlespouvoirspublicsdesEtatsmembres.Parailleurs, il fautsavoir qu’en Allemagne, une mulHtude d’acteursinterviennentdans le secteurdesœuvres sociales– lesEglises par exemple, mais aussi des fondaHons ou desentreprises. Ce sont des acteurs très importants et ilscontribuentàleurmanièreaudisposiHfpublicd’aideauxpersonnesendifficulté.

DelasalleL’Assurancechômagedoitêtremiseenperspec?veaveclesautressystèmesdesécuritésociale.Lasitua?onesttrèsdifférented’unpaysàl’autre.Danscertainspays,lebudget de l’assurance chômage est élevé, mais lebudget de l’assurance maladie peut être neeementplusfaible(enBelgiqueparexemple).Ilfautdoncavoirunevisionpluslarge.

Les poli?ques d’incita?on, d’accompagnement et desuivi semblent moins efficaces en période de crise.L’exemple belge montre cependant que, même enpériode de crise, le chômage de longue durée peutdiminuer, et le taux de réinser?on des publics suivisaugmenter. La principale difficulté réside dans lesmoyensàmeereenœuvre.

IsabelleBOURGEOISIl faut se demander comment faire pour que lesindividusretrouventunemploi.CeYequesHonrevientàse demander comment créer des emplois. Un systèmed’indemnisaHon et d’allocaHon chômage, le plusgénéreux soit‐il, en est incapable car ce n’est qu’unélémentquiinterfèreavecbeaucoupd’autrespoliHques.Pourramenerunmaximumdechômeursversl’emploi,ilfaut agir sur l’ensemble des facteurs qui permeYront àl’économied’êtrecompéHHve,etdonccréerd’unepartdesemplois,d’autrepartlesressourcesnécessairespouraiderceuxquisontdanslebesoin.

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JevousremercietouspourvotreparHcipaHon.CeYemaHnéesesituedans une démarche d’ouverture et je souhaite que ceYe iniHaHves’inscrivedansladurée.

Si je devais retenir un point fort, ce serait l’interacHon que nousretrouvonsentrelespoliHquesd’indemnisaHon,d’accompagnementetlespoliHquespubliquesde l’emploi. Jesuisconvaincuque lasituaHonéconomiquequenoustraversonsmetenévidencelesliensquiunissentles poliHques publiques de l’emploi, la créaHon de l’emploi, lespoliHques d’indemnisaHon et les poliHques d’accompagnement et deformaHon.

En dix ans, dans notre pays, le nombre de recrutements en CDD demoinsd’unmoisadoublé.En2000,nousencompHons5,6millions.En2010, nous en avons enregistré 12 millions. Nos poliHquesd’accompagnement peuvent êtremises àmal sans une économiequicrée de l’emploi. Les poliHques d’accompagnement peuvent aussidonnerlieuàdesimpassespourdesindividusquipassentdecontratencontratsanssedirigerversuneinserHondurable.IlmesemblequelesinteracHonsquejeviensd’évoquersontdesélémentssurlesquelsnousdevons intervenir. Tous les pays évoqués aujourd’hui essaientégalementdetravaillerdanscedomaine,mêmesilesrésultatsnesontpas nécessairement les mêmes selon le pays ou selon l’élément surlequell’acHonestportée.

Pour conclure, j’ajouterai que j’aimerais que ceYe iniHaHve fasse del’Unédic une instance de rencontres et de dialogue au service del’emploi.

Abientôtpourunenouvelletableronde.

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GabyBONNANDPrésidentdel’Unédic

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GRA

ND A

NGLE

Unédic4rueTraversière

75012Paris

www.unedic.orgtwieer.com/unedic

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