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Revue Tourisme Mai 2006 Pour une histoire du tourisme au Maghreb (XIX ème - XX ème siècles) LE TOURISME EN ALGERIE (DE 1880 AUX ANNEES 1940) : UNE HISTOIRE A ECRIRE Arnaud BERTHONNET Université de Paris IV Sorbonne "Alger, c'est la plus belle ville du monde" Henry de Montherlant "Alger qui sent la chèvre et la fleur de jasmin" Jean Cocteau "L'Algérie, terre d'élection du tourisme" Jean Mélia "La mise en valeur des sites, monuments, curiosités d'un pays, l'exploitation du "capital beauté" sont des ressources infiniment appréciables, sans cesse renouvelées, non prescrites par le temps et qui constituent, surtout dans un pays comme l'Algérie, une véritable industrie, peut-être la plus profitable de toutes" 1 . "49 e notion - Le voyageur ne peut rester insensible au spectacle qu'offre l'Algérie. Son patrimoine touristique est caractérisé par l'infinie variété des sites, un ciel d'un bleu intense, une lumière éclatante, une mer aux flots généralement tièdes et caressants. Ruines romaines, monuments de l'art musulman, rivage présentant tour à tour des criques, des falaises et des plages de sable fin, hautes cimes permettant de décembre à mai la pratique des sports d'hiver, gorges et défilés célèbres par leur grandeur sauvage, oasis luxuriantes ou milieu des sables, désert du Sahara dont la France a fait un pays des miracles, réalisations françaises qui la modernisent chaque jour davantage, tout contribue à faire de l'Algérie une terre qui attire, qui charme et qui attache" 2 . Ces phrases ou extraits de texte, souvent sortis de leur contexte, sont une porte d'entrée dans un champ d'étude encore en friche : l'histoire du tourisme en Algérie 3 . Un tel sujet peut être traité au travers de ses aspects sociaux, culturels, économiques ou politiques. Avant d'aborder l'écriture de cette histoire, il convient de répertorier et d'analyser l'ensemble des sources : manuscrites, imprimées, 1 Allain M., Encyclopédie pratique illustrée des colonies françaises, Paris, Quillet, tome 1, 1931, p. 225 (préface de Paul Doumer). 2 50 notions essentielles sur l'Algérie, édité par le service d'information et de documentation du gouvernement général de l'Algérie, Alger, Baconnier, Vers 1953-54. 3 Nous retiendrons la définition du tourisme du Petit Robert : n. m. (1841) anglicisme tourism (1811). Le fait de voyager, de parcourir pour son plaisir un lieu autre que celui où l'on vit habituellement (même s'il s'agit d'un petit déplacement ou si le but principal du voyage est autre).

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Revue Tourisme Mai 2006

Pour une histoire du tourisme au Maghreb (XIXème - XXème siècles)

LE TOURISME EN ALGERIE (DE 1880 AUX ANNEES 1940) :

UNE HISTOIRE A ECRIRE

Arnaud BERTHONNET Université de Paris IV Sorbonne

"Alger, c'est la plus belle ville du monde"

Henry de Montherlant

"Alger qui sent la chèvre et la fleur de jasmin" Jean Cocteau

"L'Algérie, terre d'élection du tourisme"

Jean Mélia

"La mise en valeur des sites, monuments, curiosités d'un pays, l'exploitation du "capital beauté" sont des ressources infiniment appréciables, sans cesse

renouvelées, non prescrites par le temps et qui constituent, surtout dans un pays comme l'Algérie, une véritable industrie, peut-être la plus profitable de toutes"1.

"49e notion - Le voyageur ne peut rester insensible au spectacle qu'offre l'Algérie.

Son patrimoine touristique est caractérisé par l'infinie variété des sites, un ciel d'un bleu intense, une lumière éclatante, une mer aux flots généralement tièdes et

caressants. Ruines romaines, monuments de l'art musulman, rivage présentant tour à tour des criques, des falaises et des plages de sable fin, hautes cimes permettant

de décembre à mai la pratique des sports d'hiver, gorges et défilés célèbres par leur grandeur sauvage, oasis luxuriantes ou milieu des sables, désert du Sahara dont la

France a fait un pays des miracles, réalisations françaises qui la modernisent chaque jour davantage, tout contribue à faire de l'Algérie une terre qui attire, qui

charme et qui attache"2.

Ces phrases ou extraits de texte, souvent sortis de leur contexte, sont une porte d'entrée dans un champ d'étude encore en friche : l'histoire du tourisme en Algérie3. Un tel sujet peut être traité au travers de ses aspects sociaux, culturels, économiques ou politiques. Avant d'aborder l'écriture de cette histoire, il convient de répertorier et d'analyser l'ensemble des sources : manuscrites, imprimées,

1 Allain M., Encyclopédie pratique illustrée des colonies françaises, Paris, Quillet, tome 1, 1931, p. 225 (préface de Paul Doumer). 2 50 notions essentielles sur l'Algérie, édité par le service d'information et de documentation du gouvernement général de l'Algérie, Alger, Baconnier, Vers 1953-54. 3 Nous retiendrons la définition du tourisme du Petit Robert : n. m. (1841) anglicisme tourism (1811). Le fait de voyager, de parcourir pour son plaisir un lieu autre que celui où l'on vit habituellement (même s'il s'agit d'un petit déplacement ou si le but principal du voyage est autre).

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Le tourisme en Algérie (de 1880 aux années 1940) : une histoire à écrire

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iconographiques et audiovisuelles. La bibliographie générale sera évoquée, mais nous ne rentrerons pas dans les détails4. En effet, les récits de voyages, les guides, les études géographiques, etc. sont nombreux dès le début de la colonisation5. Les premiers véritables ouvrages sur le tourisme en Algérie et au Sahara datent respectivement de 1906 et de 19366.

La première interrogation qui se pose à nous est de connaître le rôle tenu par les voyageurs artistes dans la naissance du tourisme en Algérie ? Ensuite, quel a été l'impact du guide touristique dans le développement de voyage ? (Joanne, puis Bleu Hachette, Touring-Club, Conty, Michelin, Dunlop, Doré, etc.). En se formalisant très tôt, il permet de rassurer le voyageur, en le prenant si l'on peut dire par la main pour lui faire découvrir des contrées parfois hostiles. Autre question fondamentale, le développement du tourisme est-il le corollaire de l'essor et de la modernisation des moyens de transports : route, chemins de fer, transports maritimes et aériens ? Cette vaste interrogation mériterait un article à elle seule. Dans ce cadre des transports, l'automobile en Algérie n'a-t-elle pas été le fondement de cet essor rapide dans les années 1920 ?

Autre question ouverte : peut-on mesurer l'impact du tourisme sur l'ouverture économique et sociale de l'arrière pays et des populations indigènes ? Enfin, un autre point important peut être soulevé : peut-on discerner, pour ce qui concerne le tourisme, des rythmes d’évolution semblables entre la France et les colonies ? Pour l'Algérie, il est possible de comparer l'essor du tourisme avec celui qui se développe en Métropole, tant il est précoce dans la colonie française7. Le Comité d'hivernage algérien fondé dès 1887 est l'ancêtre du premier syndicat d'initiative ouvert à Alger

4 Les Éditions PubliSud viennent de rééditer une œuvre parue en 1932 chez Baconnier sous le titre Au cœur du pays Kabyle de Martial Rémond, préface d'Augustin Bernard. Le nouveau livre porte le titre de : Au coeur du pays kabyle : La Kabylie touristique illustrée des années trente, Paris, 2001, 197 p., 210 gravures et 10 cartes itinéraires. 5 Pignel A., Conducteur, ou Guide du voyageur et du colon de Paris à Alger et dans l'Algérie, avec carte itinéraire, Paris, Debécourt, Librairie-Editeur, Alger Chez Bastide et Brachet, 1836, 248 p. L'auteur est ancien fonctionnaire dans l'ex-régence d'Alger. Le premier véritable Guide : Quétin, Guide du voyageur en Algérie. Itinéraire du savant, de l'artiste, de l'homme du monde et du colon, Paris-Alger, 1848 (2e édition). 6 Batail P., Le Tourisme en Algérie, Alger, Imprimerie algérienne, Gouvernement général de l'Algérie 1906, 30 p. ; Grevin E., Voyage au Hoggar. Tourisme au Sahara, Lagny, Impr. de Lagny, 1936, 216 p. 7 La première administration du tourisme apparaît en 1910 avec la création d’un Office national du tourisme (ONT) à l’initiative d’Alexandre Millerand, ministre des Travaux publics. Simultanément est créé le Conseil supérieur du tourisme, organe consultatif. La loi du 24 septembre 1919 élargit les compétences de l'ONT et fixe ses moyens financiers. En 1920, un Bureau d’information touristique "Maison de la France" est installé aux Champs Elysées. Dans l’entre-deux-guerres, l’Etat prend conscience de l’intérêt de développer l’activité touristique. Plusieurs initiatives vont être lancées. On peut citer à titre d’exemple le Crédit hôtelier qui permet le développement des hébergements touristiques. La France devient alors la première destination touristique au monde. Le Commissariat général au tourisme et le Comité national d’expansion du tourisme et du thermalisme succèdent à l’Office national du Tourisme en 1935.

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Pour une histoire du tourisme au Maghreb (XIXème - XXème siècles)

en 1897. La première partie présentera succinctement les principales sources à notre disposition tandis que la seconde exposera les premiers résultats du développement touristique de l'Algérie des années 1880 aux années 1940.

1/ Sources : pluralités et richesse des informations

Les lieux de recherches sur le sujet sont éparpillés et les sources ne sont pas encore bien répertoriées dans les centres d'archives. Néanmoins, il est possible d'établir un premier bilan de la situation.

1.1 – Les sources manuscrites

Dans celles conservées au Centre des archives d'outre-mer à Aix-rn-Provence, on ne trouve que peu de sources sur la question. Par exemple, les archives de l'Office Algérien d'Action Economique et Touristique (Ofalac) n'ont toujours pas été retrouvées, en sachant que cet organisme a joué un rôle fondamental dans le développement économique et touristique de l'Algérie dès sa création en 1931. Les archives des Chambres de commerce et d'industrie – Marseille, Le Havre, Paris, etc. – sont une entrée à ne pas négliger. Par exemple, celles de Marseille conservent les fonds de la Compagnie de navigation mixte (1858-1911)8 et des Chargeurs réunis et filiales (1852-1980)9. Les compagnies maritimes qui ont eu une activité en Algérie sont nombreuses10 ; la plus importante a été certainement la Compagnie Générale Transatlantique, créé en 1854, dont une partie des archives est conservée aux Archives nationales11.

Située à Paris, l'Académie des Sciences d'Outre-mer est d'abord un lieu de recherche12, qui met à la disposition de tous les chercheurs une bibliothèque riche d'un fonds exceptionnel sur les pays d'outre-mer. Elle a récupéré des petits fonds épars comme celui de Jean Mélia13, qui répertorie de nombreux documents sur le

8 CCI de Marseille - L19/16 + Albums photos. 9 CCI de Marseille - L19/60 + Albums photos. 10 Les compagnies maritimes par ordre de création : Compagnie de navigation mixte Compagnie Touache (1847 lié à l'Algérie), Compagnie des Messageries maritimes (1851), Compagnie Générale Transatlantique (1854), Compagnie de navigation Paquet (1863), Chargeurs Réunis (1872), Société maritime nationale (1916), Société navale de l'Ouest, Société anonyme "Les Affréteurs réunis", Chargeurs algériens réunis (anciens services Prosper Durand), Navigation côtière algérienne Schiaffino et Jouvet. Voir également les compagnies italiennes. 11 Série AQ 9 - Cie Générale Transatlantique. Inventaire S. Vitte. Le premier dépôt de ces archives date de 1937 ; un certain nombre d'articles n'existent que sous forme de microfilm. 12 www.academiedoutremer.fr/ 13 Ecrivain engagé et passionné par l'Algérie, il a publié un certain nombre de livres et d'articles sur ce pays, en particulier : La France et l'Algérie, Librairie Plon, 1919, Paris, 266 p. ; "Les multiples visages de l'Algérie ou l'Algérie terre du tourisme par excellence", extrait du volume : Laghouat ou les Maisons entourées de Jardins, s.d. Paris, Plon, s. d. ca 1920, 42 p. ; La ville blanche d'Alger et son département, Paris, Plon, 1921, 324 p. ; Pour La Représentation parlementaire des indigènes musulmans d'Algérie, Circa, Paris, 1927 ; Au Siège de la Ligue française en faveur des Indigènes musulmans d'Algérie, Circa, Paris, 1927. Il a publié également des monographies comme La vie amoureuse de Stendhal, Paris, Mercure

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Le tourisme en Algérie (de 1880 aux années 1940) : une histoire à écrire

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tourisme en Algérie (brochures, documentation, etc.). Les centres d'archives et de documentation des Guides Hachette et Michelin doivent également être visités14.

1.2 - Sources imprimées : un premier choix

Les brochures et monographies publiées par les syndicats d'initiatives sont une source de premier ordre et précieuse pour mesurer le développement du tourisme dans le temps et l'espace. Sur l'Algérie, une collection peut être consultée à l'Académie des Sciences d'Outre-mer15. D'une grande richesse en informations en tous genres, ces plaquettes ne sont malheureusement pas toujours datées avec précision.

Les revues concernant l'Algérie sont nombreuses. Elles abordent tous les sujets économiques et sociaux. Sur le tourisme proprement dit, il convient de consulter en priorité : L'Algérie illustrée touristique et pittoresque16, la Revue de l'Ofalac et L'AOF Touristique, revue mensuelle du Syndicat d'initiative et de tourisme (1938 - mensuelle). D'autres revues thématiques comportent des articles sur le tourisme comme Algéria Revue illustrée (années 1930 mensuelle, puis trimestrielle) ou L'Afrique du Nord illustré17. Sur les questions économiques, elles abondent et parfois sont très riches en informations : Marchés coloniaux, Perspectives d'Outre-mer, Marchés tropicaux et Méditerranéens, Le Monde Economique (hebdomadaire Nord-Africain). On peut également ouvrir cette liste et consulter les revues suivantes : Revue Air France, Revue Compagnie Générale Transatlantique, Revue du Touring Club de France, etc. Les numéros spéciaux sont parfois des joyaux pour le chercheur en mal de sources18.

de France, 1909, 418 p. et Mustapha Kemal ou la rénovation de la Turquie, éd. Fasquelle, 1929. 14 Respectivement au 43, quai de Grenelle, 75015 Paris (Archives) et Editions du Voyage 46, avenue de Breteuil (Communication/Patrimoine). 15 Fonds Jean Mélia. Quelques exemples : Le tourisme dans l'annexe de Beni Ounif, Gouvernement général d'Algérie, 1911 ; Syndicat d'initiative de Constantine et ses environs, 1913-1914, 110 p. ; Bougie, La petite Kabylie, Livret-Guide, Syndicat d'initiative de Bougie, 1914, 68 p. + annexes ; Le tourisme dans l'Aurès, Gouverneur général de l'Algérie, direction de l'Agriculture, du commerce et du tourisme, 1917 ; L'Oran pittoresque, publié par le Syndicat d'initiative de l'Oran, date années 1930 ?, Le tourisme dans la région de Colomb-Béchar, 1935 ; Le tourisme dans la région de Colomb-Béchar, 1935, 34 p. ; Le tourisme à Constantine, Jean Arrime, 64 p. sans date ; Tlemcen et ses environs, guide illustré du touriste... 2e édition, Alfred Bel, sans date. 16 Edité à Alger, cette revue, dont le premier numéro trimestriel a été publié en 1909 ou 1910, fait suite à l'Algérie hivernale et Terre d'Algérie. Un article à consulter : "Le tourisme algérien", Juillet-Août-Septembre 1928 et Janvier-Mars 1929 " 17 Hebdomadaire. Un sondage a été réalisé pour les années 1927 à 1928 : "les plages de la banlieue de Tunis (22/09/1928)", "Le Touring Club Algérois" (11/08/1928), "Le nouveau Musée d'Alger" (5/05/1928) ; "La France thermale et pittoresque", (26/5/1928). 18 Deux exemples de numéros spéciaux : Le Monde Illustré, E. Berlureau, "Le tourisme algérien", décembre 1929 ; L'Illustration économique et financière, "le tourisme en Algérie", 1930.

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Pour une histoire du tourisme au Maghreb (XIXème - XXème siècles)

L'histoire et l'évolution des guides touristiques sur l'Algérie mériteraient à elles seules une recherche et un article de fonds. Les premiers guides de voyages sur l'Algérie datent de 1836 et 184819. Rapidement, le livre de chevet du voyageur en Algérie est devenu le Guide Joanne, dont la première édition date de 1862. Adolphe Joanne (1813-1881)20 a été embauché en 1852 par Louis Hachette pour créer la première collection de guide touristique en France en s'inspirant des guides du libraire Karl Baedecker installé à Cologne à partir de 182721. Il suit l'édition en 1853 du premier guide sur l'Algérie. Ecrit par Louis Piesse22, qui signera les quatorze premières éditions23, ce guide est un succès de librairie, puisqu'il sera réédité à dix-sept reprises de 1862 à 1916.

L. Piesse a séjourné dix ans en Algérie pendant lesquels il a suppléé à plusieurs reprises le bibliothécaire d'Alger ; il a fait également partie du bureau arabe civil de la préfecture. En 1923, le Guide Joanne laisse la place au Guide Bleu. Treize autres éditions seront publiées entre 1923 et 1990. À partir de 1897, un Guide Joanne d'Alger et ses environs est publié – extrait du Guide Algérie – qui devient le Guide Diamant en 1920, puis le Guide Bleu illustré d'Alger en 1938. Ces guides de 200 pages environ, plus publicitaires que touristiques, comprennent 120 à 150 pages de publicité. Il est publié également sur Oran-Tlemcen et Constantine et sa région (1923).

En 1911, la librairie Hachette édite un autre guide à la couverture rouge, qui s'intéresse à un nouvel aspect du tourisme en croissance : L'Algérie et la Tunisie en automobile - 4.306 kilomètres de profils. Hachette est suivi dans cette niche éditoriale par Dunlop qui sortira en 1923 un guide presque identique24, réédité en

19 Voir supra. 20 A. Joanne est né à Dijon en 1813. Avocat, journaliste, fondateur de l'Illustration avec Paulin et Charton, il traduit de nombreux ouvrages anglais. Sa passion de la montagne et de la Suisse le pousse à rédiger un guide sur ce pays qu'il publie en 1841 chez Paulin. Il accorde une part importante à l'histoire et à la géographie. Une seconde édition voit le jour chez Louis Maison en 1853 et une troisième chez Louis Hachette en 1859. Lui succède à la direction éditoriale des guides de voyages Hachette son fils Paul, lequel laisse la place en 1911 Marcel Monmarché qui devient responsable de la collection "Guide Bleu" remplace en 1916 celle du Guide Joanne. Ce passage fait suite à un accord passé entre le Touring Club italien et l'éditeur anglais Muirhead. 21 Cette collection comptera 120 titres dès 1860 et 2.000 ouvrages à la veille de la Première Guerre mondiale. 22 Piesse L., Itinéraires de l'Algérie, L. Hachette et Cie, 1862, 511 p. + 5 cartes. Ce guide ne contient aucune page de publicité tandis que la seconde édition de 1879 en comporte 88 pages. Piesse L., Itinéraires de l'Algérie, de Tunis et de Tanger, 1879, 515 p + 7 cartes. 23 1862 (format 11,5 X 18 couverture bleue), 1879, 1881, 1882, 1885, 1887, 1888, 1891, 1893, 1896 (format 10 x 16), 1898, 1901, 1903, 1905. 24 Taillis du J., Le Tourisme automobile en Algérie-Tunisie, Guide Dunlop, Paris, 1923, 389 p. Ouvrage publié sous le haut patronage de M. le gouverneur général de l'Algérie et de M. le résident général de France, à Tunis. Il fait suite à un premier volume publié en 1922 sous le titre de Le tourisme automobile au Maroc, dont le succès a été considérable puisque les 5.000 exemplaires de la première édition se sont enlevés en quelques mois.

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1927. En 1926, Hachette publie un guide illustré en anglais : Algeria and Tunisia25. D'autres types de guides sont publiés en France : Guide du Touring Club de France (1902) qui fait appel à des spécialistes26, Guide pratique Conty (1904), Guide Michelin Tunisie, Algérie Maroc (1923), Guide Doré27, etc. Un autre guide d'un genre nouveau est édité en 1951 : Le Guide du touriste lettré à la découverte de l'Afrique du Nord ce qu'il faut voir, savoir et lire.

Dans ce rapide inventaire des sources, les Bulletins, revues et notices scientifiques28 comme les publications du Gouvernement Général de l'Algérie ou encore les catalogues des expositions coloniales nationales et internationales29 s'avèrent des sources manuscrites à ne pas négliger. Dernier point, le Centenaire de l'Algérie a produit une riche bibliographie sur la question touristique30. Divers autres sources peut être évoquées pour compléter ce premier inventaire : les guides pratiques des chemins de fer (indicateur Chaix, édité par Baconnier), des routes, des liaisons maritimes et aérienne, les cahiers des musées, les livrets des compagnies maritimes offerts aux passagers, les documents des Chemins de fer Algérien, etc.

1.3 - Sources iconographiques : un exemple, les affiches31.

Les affiches produites par l'imprimerie Baconnier32 constituent une source essentielle sur le tourisme. Elles font découvrir des lieux historiques, villes

25 The Illustrated Guides, edited by Marcel Monmarché, Paris-London, 1926, 336 p. 26 Préface de Reclus Onésime, Sites. Monuments, Algérie (Alger, Constantine, Oran), Paris, Touring-Club de France, 1902, 207 p. Pour anecdote, Hachette fait appel à son frère Elysée Reclus. 27 Doré Ogrizek, L'Afrique du Nord, Algérie, Tunisie, Maroc français et espagnol, Sahara, Libye, Edition Odé, Paris, 1952. Avant-propos de Pierre Mac Orlan, textes de J. Andrésy, Gabriel Audisio, Michel Bataille, Raoul Celly, Hubert Deschamps, Philippe Marçais, Jean Pernoud, Joseph Peyré, Janine Ribes, Marcel Sauvage, illustrations de : Beuville, Brenet, Paulo Ferreira, Edy Legrand, Jacques Liozu, Mondzain, Pierre Noël, Pierre-Luc Rousseau. 28 Par exemple : le Bulletin de la Société de géographie d'Alger et de l'Afrique du Nord (1903-1940) ; Bulletin de la Société de Géographie d'Oran ; Revue Africaine, publié par la Société historique d'Alger, etc. 29 Exposition nationale coloniale de Marseille d'avril à novembre 1906 ; Exposition Coloniale Nationale de Marseille de 1922 ; Exposition Coloniale Internationale de Paris du 6 mai au 15 novembre 1931. 30 Rozet G., Algérie, Horizons de France, 1929, 7 volumes [1.] Alger, Blida et la vallée du Cheliff ; [2.] La Route de Constantine et la côte Est ; [3.] La Côte Ouest, Oran et Tlemcen ; [4.] Les Kabylies, l'Aurès ; [5.] Les Ruines romaines et les hauts-plateaux ; [6.] Les Premières oasis et le M'zab ; [7.] Le Grand désert et la route du Niger. Chacun des sept volumes porte au dos de la couverture une des lettres qui forment le mot de titre : "ALGÉRIE" ; Bonneval de G., L'Algérie touristique, Tome VII, Publications du Comité national métropolitain du centenaire de l'Algérie, 1930. 31 Baconnier B., Algérie en affiches, 1900-1960, Copagic-Editions Baconnier, 2004, 211 p. 32 Fondée par Henri Baconnier (1875-1950) en 1895, cette imprimerie est la plus importante d'Afrique du Nord – Henri Baconnier, Livre d'Or de l'Algérie, 1937 – donne un grand essor à l'imprimerie en Algérie en adaptant les procédés les plus modernes des arts graphiques. Les Presses Baconnier impriment pour des entreprises mais aussi pour le gouvernement Français et l'Ofalac qui lui passent de nombreuses commandes de livres et d'affiches pour l'Algérie et

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anciennes, sites archéologiques ou paysages superbes, de la côte méditerranéenne jusqu'aux confins du Sahara. La période 1900 à 1960 constitue l'âge d'or de l'affiche publicitaire, avec une production abondante et variée. En Algérie, les plus belles affiches sont l'œuvre de peintres célèbres – Paul-Elie Dubois, Roger Broders, Jacques Majorelle –, d'artistes reconnus – Cauvy, Carré –, ou inconnus, influencés par l'école orientaliste, le cubisme, le fauvisme.

Quatre grands thèmes se dégagent dans ces oeuvres : le tourisme et le transport dont les principaux commanditaires sont les compagnies maritimes et aériennes, le commerce (publicité pour des entreprises privées ou des offices gouvernementaux de développement) et la politique (Gouvernement général de l'Algérie). Les affiches touristiques, qui présentent une qualité artistique incontestable, témoignent de l'histoire de la France et de l'Algérie. Les célébrations du centenaire constituent le point d'orgue de cette création tout autant artistique que commerciale. Les sources audiovisuelles (propagande et film) seraient également des sources à recenser et à étudier précisément. Elles présentent le plus souvent des films aux aspects culturels ou de propagande. Pour cela, une recherche exhaustive pourrait être lancée au Centre national de la cinématographie, à Bois d'Arcy33. Les collections de cartes postales devront être également consultés, c'est une autre piste de recherche à creuser sur la question34.

Cet exposé chronologique de quelques pages n'a pour vocation que de passer au crible certains thèmes présentant l'essor du tourisme en Algérie des artistes voyageurs à la démocratisation du tourisme à partir des années 1930.

2/ Premiers résultats

2.1 - Les prémices d'un développement touristique : des artistes voyageurs aux premiers guides touristiques

"L'Orient des poètes, des rêves, des désirs" prend au XIXème siècle, une place privilégiée dans le monde des lettres et des arts. Des événements politiques successifs comme l'Expédition d'Egypte, la Guerre d'Indépendance grecque et la Conquête de l'Algérie contribuent à faire connaître les paysages, les types et les moeurs de pays, qui hantent l'imaginaire des Occidentaux. Cet engouement donne

la métropole. Spécialisée dans les ouvrages d'arts et les affiches, entièrement exécutés sur pierre lithographique, elle fait collaborer écrivains, peintres et illustrateurs de talents. Dans les années 1930, deux cents personnes environ travaillent pour elles. 33 Pour 1946-1947, nous avons inventorié les courts métrages (CM) et moyens métrages (MM) suivants : J.-K. Raymond Millet, Minarets dans le soleil (Tlemcen) CM ; Tlemcen, J. et J. Tharaud CM ; Le port d'Alger MM ; Sur les routes de Kabylie. Les actualités françaises de 1946, CM ; Alger et ses contrastes (architecture hispano-mauresque et urbanisme français), Les Actualités françaises, 1947, CM ; El Oued, la ville aux mille coupoles, PR, Equipe, 1947, CM ; Le M'Zab, pays mystérieux, Georges et Reginald Coutable, 1947, MM ; La source du sourire (scène de la ville rurale), J.-K. Raymond Millet, 1947, CM ; Jardins d'Alger, Francot Film, CM. 34 Centre des archives d'outre-mer (CAOM) Voir la cote Fi 8, notamment FR CAOM 8 Fi 42. Pour la Tunisie, il existe aux archives diplomatiques à Nantes une collection d'environ 3.000 cartes postales. Collection Gandini (1 AE 108) - Non inventorié.

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Le tourisme en Algérie (de 1880 aux années 1940) : une histoire à écrire

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naissance à une nouvelle tendance picturale : l'Orientalisme. Dès lors, l'Afrique du Nord devient la destination privilégiée des artistes, bien que certains reconstituent les décors dans leurs ateliers. Les thèmes historiques laissent peu à peu la place à des sujets anecdotiques mettant en valeur les costumes, l'architecture, les oasis ou paysages désertiques, traités avec des couleurs et lumières éclatantes.

Le premier circuit officiel en Algérie date de 1839. Il s'agit du voyage du Duc d'Orléans (1810-1842), premier fils de Louis-Philippe 1er et frère aîné du Duc d'Aumale, dans la province de Constantine. Mais ce sont les artistes qui lancent cette mode "exotique". Le peintre écrivain Eugène Fromentin (1820-1876) fait trois séjours en Algérie entre 1846 et 1853. De retour en métropole, il se marie et consacre une partie de son temps à la rédaction de ses souvenirs de voyage. C'est la seconde de ces visites, de septembre 1847 à mai 1848, qui le mène à la chasse sur les bords du lac Halloulah et lui inspire Une année dans le Sahel qu'il rédige en 1859. Ses voyages lui ont également inspiré Un été dans le Sahara (1857). Auguste Renoir fait un séjour en 1879 tandis qu'Albert Lebourg y séjourne au début de la décennie. Delacroix s'extasie : "il y a là, pour un peintre, un moment fascinant et d'étrange bonheur… C'est beau ! C'est comme au temps d'Homère".

Guy de Maupassant se rend en Algérie, en juillet-août 1881, comme envoyé spécial du Gaulois. Sur les traces de son maître Gustave Flaubert35, il est présent lors des soulèvements indigènes dans le Sud Oranais. D’Oran, il décide de se rendre à Saïda et rapporte plus tard ses souvenirs dans des nouvelles parues sous le titre Au Soleil (1884). Il critique le fait colonial et dresse le portrait du colonisé. On sent bien à travers la description qu’il fait de son voyage qu'il est accompagné d’un guide touristique. Louis Piesse évoque longuement le barrage de Perrégaux dans le Guide Joanne, Itinéraire de l’Algérie de 1879. Guy Maupassant le reproduit quelque peu...

L'Ecole des Beaux-Arts d'Alger est fondée en 1881 avec les annexes d'Oran et de Constantine. Le voyage en Algérie s'est imposé aux artistes de métropole qui forment en 1897 la "Société des peintres algériens et orientalistes" et des salons sont régulièrement organisés à Alger. En 1907, une villa est fondée pour artistes métropolitains accueillant peintres, sculpteurs, architectes et graveurs dans la villa Ab-Del-Tif (villa Médicis algéroise). Désignés par un jury, ils obtiennent une bourse pour deux ans. Un certain nombre de ces artistes s'installeront après leur premier séjour : Léon Cauvy, Léon Carré, Charles Brouty, Christian de Gastyne, etc.

Ce mouvement donne naissance à l'"Ecole d'Alger" qui reste néanmoins, dans un premier temps, influencée par les peintres métropolitains comme Albert Marquet et Henri Matisse. À la création des artistes extérieurs à l'Algérie, il faut opposer une littérature, puis une peinture produite par l'Algérie, c'est-à-dire par des artistes qui en sont natifs ou qui y habitent à partir de la fin du XIXéme siècle. Louis Bertrand, Robert Randau (1873-1950), Jean Mélia, Gabriel Audisio, et bien d'autres font entrer

35 De 1857 à 1862, Flaubert rédige Salammbô avec des interruptions ; il fait un voyage en 1858 en Algérie et Tunisie.

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le "peuple algérien" dans la littérature36. C'est dans ce contexte que se développe le roman colonial qui connaît un véritable succès37.

Au tournant du siècle et dans les années 1900-1910, les guides touristiques et les brochures des syndicats d'initiatives connaissent un grand succès. On l'a vu pour le Guide Joanne sur l'Algérie qui est réédité à neuf reprises entre 1896 et 1916. D'autres guides sont mis sur le marché : Guide du Touring Club de France (1902), Guide pratique Conty (1904), Guide Dunlop sur le tourisme automobile en Algérie et Tunisie (1923) – Collection Rubis –, etc. Les brochures des syndicats d'initiatives et les itinéraires se multiplient à partir des années 1910, alors que les premiers guides automobiles sont publiés avec succès. Néanmoins, ce tourisme est réservé à une population de nantis et d'aristocrates.

2.2 - Première organisation du tourisme avant la Première Guerre mondiale

Dès la fin du XIXème siècle, le Touring-Club de France et l'Office national du tourisme perçoivent l'intérêt d'un essor du tourisme dans la colonie, qui devient progressivement un pays précurseur dans un certain nombre de domaine. Le Comité d'hivernage d'Algérie est créé en 1887 pour organiser le tourisme dans la "Nouvelle-France", assisté progressivement des syndicats locaux constitués dans les principales villes de la colonie. Il se transforme en 1897 en Syndicat d'initiative, qui prend ses quartiers à l'Hôtel de Ville d'Alger. Il met gratuitement à la disposition des touristes et hiverneurs son organisation, son bureau de renseignements et son salon de correspondance. Il organise même des excursions en automobiles particulières permettant de visiter à prix forfaitaires – autos, guides, hôtels, etc. – toutes les régions pittoresques de la colonie. D'avril à mai, il organise des caravanes de propagande. Parallèlement se constitue la Fédération des syndicats d'initiative d'Algérie, qui s'installe au 7, rue des Consuls à Alger, à laquelle s'associent les moyens de transport qui permettent d'accompagner les voyageurs vers tous les points du territoire.

Auguste Jonnart (1857-1927)38 est le premier gouverneur d'Algérie (1903-1911) à s'intéresser de près à la question du tourisme dans la colonie. Il est suivi

36 Guernier E. (sous la direction de), Encyclopédie coloniale et maritime. Algérie-Sahara, Encyclopédie de l'Empire français, 1948. Gabriel Audisio, L'Algérie littéraire, p. 235-247. ; Tailliart, Ch-E., L'Algérie dans la littérature française. Essai de bibliographie méthodique et raisonnée jusqu'à l'année 1924, Paris, E. Champion, 1925 ; "La littérature algérien", dans Histoire et historiens de l'Algérie, Paris, 1932. 37 Marius-Ary Leblond sont prix Goncourt en 1909. Pseudonyme de George Athénas (1877-1953) et Aimé Merlo (1880-1958). 38 Né à Fléchin-en-Artois, le 27 décembre 1857. Issu d’une famille bourgeoise du Nord, Charles Jonnart fait ses études à Saint-Omer, puis à la faculté de droit de Paris. Séduit par l’Algérie qu’il a visité jeune homme, il est nommé en 1881, par Gambetta, au cabinet du gouverneur général de l’Algérie. Il entame une carrière politique : il est élu en 1886 conseiller général de Saint-Omer, puis en 1889, député du Pas-de-Calais. Il se distingue à la Chambre par ses fréquentes interventions sur les questions coloniales touchant notamment à l’organisation de l’Algérie. Choisi en 1893 par Casimir Périer pour occuper le poste de ministre des Travaux publics, il est élu en 1894 sénateur du Pas-de-Calais. En 1903, il retrouve l’Algérie, où il est nommé gouverneur général. Il contribue à accélérer la carrière du

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dans cette voie par son successeur, Charles Lutaud (1853-1921). Ce diplomate éclairé encourage comme son prédécesseur le développement de la colonie : lignes de chemin de fer, routes, etc. Jusqu'à la Première Guerre mondiale, le voyage en Algérie reste encore difficile en raison notamment de l'absence de moyens de transport. Néanmoins, la voiture pénètre le pays et prend sa place à côté du chemin de fer.

Dans ces années, de véritables infrastructures touristiques comme des gîtes d'étapes et des hôtels de luxe sont construits ou aménagés dans un grand nombre de villes et sur les sites les plus visités. La grande richesse de l'Algérie en eaux thermo-minérales connue depuis longtemps contribue beaucoup au développement du tourisme au début du 20ème siècle : eaux sulfureuses, ferrugineuses, alcalines, sulfatées. Ce thermalisme renoue avec l'époque romaine. La chasse est également une activité touristique courue, mais des réglementations sont prises progressivement comme l'interdiction en 1927 de la chasse à la gazelle pour trois ans.

Une véritable section du tourisme est mise en place rattachée à la direction du Commerce. Créée avant 1914, elle centralise toutes les questions concernant le tourisme et les industries s'y rapportant. Elle laisse une grande liberté d'action et toute leur responsabilité aux associations ou syndicats d'initiative concernés. C'est autant un organe d'étude que distributeur, répartissant entre les parties prenantes les fonds que la colonie met à la disposition des organismes de tourisme39. Parallèlement, des associations officielles se mettent en place dans chaque ville, à la mission strictement désintéressée et non commerciale.

Chaque syndicat d'initiative recrute ses adhérents sur place. Les membres du conseil d'administration sont élus par les membres du syndicat, sans l'intervention de l'Autorité administrative. Leur rôle est de promouvoir le tourisme. Au début des années 1910, les brochures sur le tourisme se multiplient commanditées par le Gouvernement général de l'Algérie : "le tourisme dans l'annexe de Beni Ounif", 1911, "le tourisme dans le cercle de Bou-Saada", en 1912, "le tourisme dans l'Aurès", 1917, etc. À la suite de la création du Syndicat d'initiative d'Alger en 1897, ceux de Bougie en 190940, d'Oran41 et de Constantine en 1914 ainsi que Tlemcen et sa région en 1919 voient le jour.

futur maréchal Lyautey. Celui-ci, qui n’est encore que colonel, est promu général et se voit confier par Ch. Jonnart l’exécution de la politique algéro-marocaine. 39 Cahiers du centenaire de l'Algérie, L'Algérie touristique, par Gérard de Bonneval, VII, Publications du Comité national métropolitain du centenaire de l'Algérie, 1930. 40 Fondé en 1909, ses deux missions sont d'une part faciliter aux étrangers la visite de la région et le séjour des visiteurs et, d'autre part, activer le développement des voies de communication permettant l'accès aux sites les plus pittoresques de Bougie et de la Kabylie. Son œuvre est désintéressée et met à la disposition de toutes les personnes des renseignements gratuits par courrier ou sur place. Les bureaux sont ouverts tous les jours de 8 h à 11 et de 14 h à 17 h, sauf les dimanches et les jours de fêtes. Le premier conseil d'administration est constitué de Jules Bouillié, industriel ; Félix Borg, Négociant, membre de la Chambre de commerce ; Prosper Ferrouillat, directeur du Lyon-Républicain, propriétaire à Sidi-Rehanne ; Hippolyte Gérard, docteur en médecine ; Gabriel Lellouch, négociant, Paul Malbos,

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Avec la Côte d'Azur, la Côte Basque, les plages normandes, l'Egypte et les Canaries, l'Algérie devient avant 1914 une destination recherchée aussi bien été qu'hiver pour les Français de métropole mais aussi pour de nombreux anglais (Biskra), Belges, Suisses, Allemands et Nord-Américains notamment. Si la Première Guerre mondiale porte un coup d'arrêt à ce premier essor, celui-ci reprend l'Armistice signé. Au début des années 1920, le premier "village de toile" ou camping, inspiré de réalisations américaines, apparaît à Ténès. C'est le déclin du tourisme aristocratique, dont le glas sonnera définitivement avec le Krach boursier de 1929 et la crise qui s'en suivra.

2.3 - Organisation et équipement du tourisme algérien de 1920 aux années 1940

Pendant cette période, le tourisme connaît une sorte d'apogée. En 1917, le Gouverneur général Lutaud inaugure le circuit de l'Aurès. C'est une première dans l'organisation touristique de la colonie (L'Aurès en sept étapes).42 En 1919, est créée la Fédération des Syndicats d'Initiative d'Algérie, à Alger (ou fédération des Essi43).

Les raids et croisières automobiles dans les années 1920 : voies touristiques

La traversée du désert a posé des problèmes jusqu'au début du vingtième siècle. Elle est tentée par de hardis explorateurs qui ne laissent rien au hasard. La révolution de l'automobile change profondément la donne. Le raid des autochenilles Citroën de la mission de Haardt-Audoin-Dubrueil, de Touggourt à Bourem sur le Niger, est effectué en 1922-1923 en 22 jours sans aucun incident. Il pousse jusqu'à Tombouctou et revient en Algérie par le même itinéraire. Le raid des six roues jumelées Renault, ou mission Gaston Gradis44 de 2.000 km, réalise le parcours en janvier 1924 en six jours et en novembre 192445. Après ces exploits dans le Sahara,

pharmacien ; Bruno Philip, industriel ; François Tourneux, propriétaire ; Ismaïl Tamzali, négociant. 41 Membre du Comité du Syndicat d'initiative d'Oran : Frette, industriel ; Laporte, Conservateur des Eaux et Forêts, Déchaud, secrétaire de la Chambre de Commerce ; Fronty, directeur de l'agence du Crédit Lyonnais, docteur Glatard, médecin de l'hôpital civil ; Coeffard, avocat ; Prat, négociant ; pousseur, directeur de la Cie du Gaz ; Nessler, négociant ; Docteur Blanc, médecin ; Dupuy, négociant ; Engel, Ingénieur ; Massoni, avocat ; Kiéner, ancien magistrat. 42 Extrait du discours du gouverneur Lutaud le 10 juin 1917 lors de l'inauguration du fondouk-hôtel de Menaâ. : " (…) deux routes maintenant pénètrent au cœur de l'Aurès avec le télégraphe et le téléphone. Demain, un service automobile atteindra des régions qu'on ignorait hier, et voici cinq fondouks, cinq refuges confortables qui attendent le voyageur". Berlureau Ed., Itinéraires en Algérie. L'Aurès, Editions de "Terre d'Afrique illustrée", 1925. 43 A côté de cette organisation des Essi en Union Fédérale se trouve un organisme qui porte le nom de "Office National du Tourisme (ONT) créé par la loi du 8 avril 1911, puis réorganisé en 1917 et 1919, dont le siège est à Paris. Il fonctionne avec la taxe additionnelle à la taxe de séjour. 44 En 1924, Gaston Gradis, officier de réserve et polytechnicien, tente l'aventure par une autre route : celle de l'ouest en partant de Colomb-Béchar, elle traverse le désert et pousse jusqu'au Golfe du Bénin. 45 Kerillis de H., De l'Algérie au Dahomey en automobile. Voyage effectué par la seconde mission Gradis du 13 novembre au 11 décembre 1924, Paris, Plon. 1925, 245 p.

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des services réguliers s'organisent et permettent de parcourir le désert dans un temps très court. Des cars couchettes parcourent désormais la route du Niger bi-mensuellement. Une soixantaine de véhicules de série soigneusement équipés réaliseront sans incident le rallye saharien du centenaire Reggan-Gao par la "Route Gradis".

En 1923, G. Gradis crée la Compagnie générale transsaharienne. Après de nombreuses reconnaissances exécutées de 1924 à 1926, cette compagnie réussit à déterminer la route directe de Reggan à Gao évitant la traversée de toute région accidentée ou d'ergs de sable mou. En 1926, la route reconnue est équipée. L'année suivante, elle organise le premier service régulier transsaharien pour automobiles sur le parcours Colomb-Béchar-Reggan-Gao. En 1931, une croisière de propagande est organisée par le Touring-Club de France entre Alger et Tombouctou dans un car Renault neuf passagers (15 CV, 6 cylindres, 4 roues). À l'été 1926, une entente est conclue entre la Cie Générale Transatlantique46 et la Cie du PLM, représentée par la maison Catelan, sous les auspices du Gouvernement général de l'Algérie, pour organiser le tourisme dans le Sahara. L'épopée des chemins de fer du Transsaharien47 et du Transafrique constitue également une grande aventure qui marque les esprits48.

Le patrimoine naturel est mis en valeur avec la création de stations de tourisme (Constantine et Bougie), de stations climatiques (Alger, Saint-Eugène, Biskra), de stations d'estivage, de stations thermales et de stations de sports d'hiver (stations de montagne de Chréa Tenniet-el-Haad). En 1925 est lancé le premier concours entre artistes d'Algérie pour l'édition d'affiches de tourisme intéressant les réseaux des chemins de fer algériens de l'État. Propagande touristique et publicité commerciale sont de plus en associées. Ce travail de fond connaît son apogée lors des célébrations du centenaire de l'Algérie français. Il s'agit "de créer partout l'obsession de l'Algérie" (Pierre Bordes).

Le centenaire de l'Algérie et la propagande en matière de tourisme

A partir de 1928, le gouverneur général de l'Algérie, Pierre Bordes, qui a succédé à Maurice Viollette, a comme préoccupation principale d'encourager toutes les initiatives propres à accroître la vogue du tourisme en Algérie. Ce pays doit devenir le prolongement de la France au sud de la Méditerranée. Il exprime cette volonté dans plusieurs de ses discours : "Terre d'héroïsme, terre de labeur fécondateur, l'Algérie est aussi la terre de prédilection pour le tourisme. Depuis la corniche merveilleuse du littoral jusqu'aux étendues illimitées du Sahara tout ici n'est qu'éblouissement et magnificence. Partout, de la mer au désert, en traversant nos plaines et nos hauts-plateaux, le touriste admire les beautés de la nature, mais

46 La Compagnie Transatlantique dont le siège est au 6, rue Auber à Paris, édite une brochure très intéressante de la Société des voyages et hôtels nord-africains. 47 Chemin de fer transsaharien. Papiers Berthelot. Centre des Archives d'outre-mer, Cote : FR CAOM 10 AQ 1 à 10 1899/1923. 48 Commandant de Bayser, TransAfrique, Société d'Editions géographiques maritimes et coloniales à Paris, Paris, 1933, 192 p.

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surtout l'œuvre de civilisation réalisée par la France généreuse en harmonieux accord avec les populations indigènes, affectueusement attachés à la mère patrie"49.

Ce sentiment se traduit par un appui important accordé aux œuvres et aux organisations touristiques. La propagande donne lieu en 1929 à l'imputation sur le budget de la colonie d'une somme de 418.700 francs, répartie sous forme de subventions à la presse, à des personnalités, conférenciers, groupements, etc. Quant aux dépenses de caractère proprement touristique, elles sont les suivantes, par ordre d'importance, en 1928 et 1929. Elles montent en puissance avec l'organisation des célébrations du Centenaire.

Tableau 1 - Dépenses touristiques en Algérie de 1928 à 1929 (en francs)

1928 1929

Embellissements et travaux divers

346.000

Aménagements de circuits 574.000 769.000

Services photographiques 173.000 260.000

Encouragements aux syndicats

151.000 135.000

Encouragements à l'industrie hôtelière

101.850 164.000

Totaux 999.850 1.674.000 Source : Allain M., Encyclopédie pratique illustrée des colonies françaises, Paris,

Quillet, tome 1, 1931, p. 228.

En 1929, les syndicats d'initiatives au nombre de 23 en Algérie50 et regroupés, on l'a vu, en une fédération secondent l'Administration générale dans sa tâche de propagande et de diffusion. De 1922 à 1929, les dépenses se sont élevées à plus de quinze millions de francs. Cette somme importante contribue aussi au développement et au progrès de la navigation, de l'hôtellerie, des transports, spécialement de l'automobile et des industries annexes. On évalue qu'au cours des années qui ont précédé à la commémoration du centenaire de l'Algérie que le nombre de touristes ayant visité l'Algérie s'établit à 45.000 en moyenne annuelle.

Parallèlement, la Fédération des Essi a fondé avec la collaboration des compagnies de transport et le Gouvernement Général (puis l'Ofalac à partir de 1931) un comité dit des Voyages universitaires. Cette institution organise des circuits

49 Allain M., Encyclopédie pratique illustrée des colonies françaises, Paris, Quillet, tome 1, 1931, p. 227. 50 Fédération des Syndicats d'Initiative (SI) d'Algérie 7, rue des Consuls à Alger, SI D'Aïn-N'Sour (Alger), SI d'Alger, SI de Biskra, SI de Blida, SI de Bougie, SI de Bou-Saâda, SI de Bigeaud, SI de la Calle, SI de Cherchell, SI de Constantine, SI de Djidjelli, SI d'El Biar, SI de Laghouat, SI d'Oran. Liste non complète. En 1948, on recense 34 syndicats d'initiatives en Algérie.

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gratuits ou demi-gratuits, qui sont destinés à l'élite de la jeunesse française qui, en raison de 30 à 60 boursiers ou demi-boursiers par an – il y en aura 125 l'année du centenaire visitent la colonie51. Enfin, il existe en Algérie une section particulièrement active du Club Alpin Français qui s'occupe notamment des sports d'hiver sur les pentes de la station de Kef Chréa (1.497 m.) à 60 km au sud d'Alger et, plus tard, sur celles du Djurdjura en Kabylie.

Création de l'Ofalac : promouvoir le développement économique et touristique

L'Office Algérien d'Action Economique et Touristique (OFALAC) est créé en 1931. Il s'agit d'une émanation du Gouvernement Général. Le siège social est situé avenue de l’Opéra, à Paris et occupe un immeuble à Alger. Il joue dès sa création un rôle considérable dans l'organisation économique algérienne. Victor Prouteau en est le premier Directeur. Cette création est une des premières conséquences des opérations du Centenaire. Le domaine d'action et d'intervention de l'Ofalac est très large. Une question se pose immédiatement à ses dirigeants : le tourisme. Si c'est à l'agriculture et à ses industries connexes (80 % de l'activité du pays) que revient la place prépondérante dans l'organisation de l'Ofalac, le tourisme n'est pas mis à l'index, bien au contraire.

Cette activité constitue de plus en plus, au titre des exportations invisibles, une source d'amélioration de la balance des comptes. De ce fait, l’organisation touristique rentre directement dans les prérogatives de l'Ofalac: des itinéraires sont étudiés, des hôtels contrôlés et homologués, des services de transports coordonnés, des renseignements touristiques largement diffusés dans le monde, etc.

Dès sa création en 1931, l'Ofalac envoie une mission algérienne d'études aux Etats-Unis et plus particulièrement en Californie. L'objectif est d'observer les méthodes modernes d'action économique et touristique et de rechercher les moyens les plus aptes à leur application en Algérie. La colonie sera la première, parmi tous les territoires français, à envisager et à encourager les méthodes de standardisation. Dans un premier temps, les exportateurs qui se sont soumis aux standards facultatifs se prévalent de la marque "Algéria" en faveur de laquelle l'Ofalac entreprendra une propagande générale. Plus encore, l'Office a mis en place les moyens indispensables à une action d'ensemble. En 1937, l'Office institue la standardisation obligatoire des produits algériens et leur contrôle. Elle concerne prioritairement les produits agricoles, notamment les produits maraîchers et fruitiers. Il s'agit d'une méthode et d'un moyen efficaces de conquête des grands marchés. Cette action contribue à faire connaître l'Algérie dans le monde.

À partir des années 1930, les premières lignes aériennes régulières sont exploitées entre la métropole et la colonie à partir des aérodromes d'Alger (Maison-Carrée) et d'Oran (La Sénia) et des bases d'hydravions sont implantées à Alger, Oran et Bône. Une Confédération générale du tourisme nord-africain est créée regroupant les trois pays de l'Afrique du Nord. Un Comité Algérie-AOF est fondé le 12 mars 1937 à l'initiative des chambres de commerce d'Algérie. Il se propose, en liaison 51 Guernier E., (sous la direction de), Encyclopédie coloniale et maritime. Algérie-Sahara, Encyclopédie de l'Empire français, 1948. Georges Rozet, "Le tourisme", p. 117-212.

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avec le Gouvernement métropolitain et les autorités coloniales, de prêter son concours à toutes les institutions et entreprises d'ordre commercial, agricole, industriel, culturel et touristique. Les actions concernent prioritairement les équipements des voies de communication et la coordination des transports ; des services communs sont créés aux actions multiples : renforcement de la publicité et de la propagande, rédaction d'indicateurs généraux des transports africains, de guides officiels, etc. Cette promotion porte ses fruits et favorise le développement du tourisme. Avant le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, c'est près de 100.000 touristes qui font le voyage en Algérie52.

Cartographie 1 – Carte touristique - Algérie 1948 (document joint)

* *

*

Le développement de l'industrie touristique se poursuit en dépit des événements. La Seconde Guerre mondiale désorganise l'Ofalac ; la reprise n'est pas facile. Néanmoins, avec le développement des moyens de transports, le tourisme retrouve sa place et s'ouvre à des voyageurs du monde entier. Il se démocratise de plus en plus après 1945. Pour les responsables économiques, il doit redevenir une source de profit importante que la guerre a tarie et contribuer au plus haut point à la prospérité de la colonie. En octobre 1947, se tient à Alger le deuxième congrès international du tourisme africain, présidé par Henri Saurin, président du Comité du tourisme d'outre-mer du Touring Club53.

L'Algérie est représentée par Gabriel Audisio54, chef des Services de l'information et de Presse de l'Office du Gouvernement général de l'Algérie et M. Moreuil, Directeur de l'Office du Gouvernement général de l'Algérie Paris. Le Comité d'organisation comprend également un certain Georges Pompidou, Délégué

52 C'est le chiffre cité à plusieurs reprises dans les sources de l'époque. 53 Le premier congrès s'est réuni en 1938 à Costermansville sur les bords du Kivu à l'invitation du Congo-Belge. 54 Avec Victor Prouteau, Jean Mélia, Emile Garcin (directeur de l'Ofalac à partir de 1948), Gabriel Audisio est l'un des hommes qui ont contribué le plus au développement du tourisme en Algérie. Né le 27 juillet 1900, à Marseille, d'un père piémontais, d'abord ténor, puis directeur des opéras et des théâtres de Marseille et d'Alger, et d’une mère savoyarde, il passe son enfance à Alger où il commence ses études qu'il poursuit à Paris. Il travaille principalement pour l'Ofalac en tant que chef des services. Parallèlement, il cherche par la poésie à célébrer la beauté et la nature, notamment méditerranéenne. Romancier, poète et essayiste français, il fait partie de l'Ecole d'Alger, puis de celle de Rochefort. C'est un proche de Albert Camus et d'Emmanuel Roblès. Durant la guerre, il est arrêté en 1943 pour résistance. Conduit à Fresnes, il récite pour ses compagnons de cellule des poèmes. De la Libération à 1962, il est conseiller culturel auprès du Secrétariat d'État chargé des affaires algériennes comme chef de service de la presse et de l'information toujours à l'Ofalac.

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du commissaire général au Tourisme55. Quatre grands thèmes sont abordés par des rapporteurs : 1/ Grandes routes transafricaines ; 2/ questions douanières intéressant le tourisme en Afrique ; 3/ Questions hôtelières ; 4/ Transports en Afrique. Un grand voyage est organisé avec le concours de la Société Air-France : circuit des oasis d'Algérie, circuit de Tunisie et circuit du Maroc. C'est lors de cette manifestation importante que le tourisme est relancé en Algérie. Son développement se poursuivra dans la colonie jusqu'en 1962, nonobstant les événements de la Guerre d'Algérie. Mais il s'agit là d'une autre histoire…

55 Ayant définitivement abandonné l'enseignement, il est nommé, en 1946, maître des requêtes au Conseil d'état, fonction qu'il cumule jusqu'en 1948 avec celle de commissaire général au Tourisme. Il devient en 1956 directeur général de la banque Rothschild, poste qu'il conserve jusqu'en 1962, à l'exception d'une brève période, entre juin 1958 et janvier 1959, où il est directeur du cabinet du général de Gaulle. Il entre en 1959 au Conseil constitutionnel après l'installation de la Ve République et, en 1961, est mandaté par le président de la République pour rencontrer secrètement le chef du FLN en Suisse, afin de préparer les négociations de paix en Algérie. Il est nommé Premier ministre le 16 avril 1962.