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A 1 locution d’ouvertu re de Babacar Ndiaye PrCsident de la Banque africaine de dkveloppement La Banque africaine de. developpement a la profonde conviction qu’en ces temps particulikrement difficiles pour l’Afrique, ses responsabilites vis-a-vis de ses pays membres regionaux ne sauraient se confiner au seul financement de projets et programmes de developpement. Bien au con- traire, notre vision du r6le de la Banque va bien au-dela de ces activitks traditionnelles, aussi importantes soient-elles ; elle embrasse un programme d’action, mieux adapt6 et plus audacieux, qui englobe la promotion du dialogue international sur les grandes questions de developpement du conti- nent et sur les solutions possibles a leur apporter. Nous sommes donc particulikrement heureux d’accueillir cette Table ronde sur la dette, la reprise et la dkmocratie en Afrique, thkme a plusieurs facettes, qui revet un grand interet pour le developpernent de notre conti- nent. Nous constatons avec satisfaction que l’endettement exterieur actuel de 1’Afrique ainsi que les questions de la reprise et de la democratie qui y sont Ctroitement liees suscitent des prioccupations bien au-dela des fron- tiCres du continent, Cette rencontre entre les parlementaires africains et leurs collkgues du Nord leur offre assurement l’occasion de se conceder et de s’entendre sur des plans d’action concrets, visant a resoudre rapidement et durablement la crise du service de la dette des pays africains a h que se crkent les condi- tions favorables a la reprise Cconomique et au developpernent soutenu. Nous attendons avec intCri3 la Declaration d’Abidjan, a l’issue de nos travaux. Nous nous felicitons en particulier des moyens qui seront identi- fies en vue d’influencer sur le cours des debats lors de forums interna- tionaux tels la reunion prochaine du Groupe des sept grands pays indus- triels (G-7) et les assembldes annuelles des institutions de Bretton Woods, privues’ a Bangkok vers la fin de I’annde. Je dois dire que cette Table ronde n’aurait pu se tenir a un moment plus propice. Car les heureux changements politiques survenant actuellement en Afrique ne pourront, a I’Cvidence, ni se poursuivre ni se renforcer sans un alltgement significatif du fardeau de la dette exterieure. C’est dans un tel environnement que les peuples pourront effectivement integrer leurs econo- mies et galvaniser leurs energies afin de lutter contre la pauvrete, d’elever les niveaux de vie et, d’une faGon genthale, d’amkliorer la condition de 1’Homme africain. En examinant le programme et la liste impressionnante des intervenants pour les deux prochains jours, je me rends compte qu’il serait peu judi- cieux de ma part de vouloir analyser de faqon exhaustive des questions qui, j’en suis convaicu, feront I’objet de discussions approfondies dans la qucte

Allocution d'ouverture

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A 1 locution d’ouve rtu re de Babacar Ndiaye PrCsident de la Banque africaine de dkveloppement

La Banque africaine de. developpement a la profonde conviction qu’en ces temps particulikrement difficiles pour l’Afrique, ses responsabilites vis-a-vis de ses pays membres regionaux ne sauraient se confiner au seul financement de projets et programmes de developpement. Bien au con- traire, notre vision du r6le de la Banque va bien au-dela de ces activitks traditionnelles, aussi importantes soient-elles ; elle embrasse un programme d’action, mieux adapt6 et plus audacieux, qui englobe la promotion du dialogue international sur les grandes questions de developpement du conti- nent et sur les solutions possibles a leur apporter.

Nous sommes donc particulikrement heureux d’accueillir cette Table ronde sur la dette, la reprise et la dkmocratie en Afrique, thkme a plusieurs facettes, qui revet un grand interet pour le developpernent de notre conti- nent. Nous constatons avec satisfaction que l’endettement exterieur actuel de 1’Afrique ainsi que les questions de la reprise et de la democratie qui y sont Ctroitement liees suscitent des prioccupations bien au-dela des fron- tiCres du continent,

Cette rencontre entre les parlementaires africains et leurs collkgues du Nord leur offre assurement l’occasion de se conceder et de s’entendre sur des plans d’action concrets, visant a resoudre rapidement et durablement la crise du service de la dette des pays africains a h que se crkent les condi- tions favorables a la reprise Cconomique et au developpernent soutenu. Nous attendons avec intCri3 la Declaration d’Abidjan, a l’issue de nos travaux. Nous nous felicitons en particulier des moyens qui seront identi- fies en vue d’influencer sur le cours des debats lors de forums interna- tionaux tels la reunion prochaine du Groupe des sept grands pays indus- triels (G-7) et les assembldes annuelles des institutions de Bretton Woods, privues’ a Bangkok vers la fin de I’annde.

Je dois dire que cette Table ronde n’aurait pu se tenir a un moment plus propice. Car les heureux changements politiques survenant actuellement en Afrique ne pourront, a I’Cvidence, ni se poursuivre ni se renforcer sans un alltgement significatif du fardeau de la dette exterieure. C’est dans un tel environnement que les peuples pourront effectivement integrer leurs econo- mies et galvaniser leurs energies afin de lutter contre la pauvrete, d’elever les niveaux de vie et, d’une faGon genthale, d’amkliorer la condition de 1’Homme africain.

En examinant le programme et la liste impressionnante des intervenants pour les deux prochains jours, je me rends compte qu’il serait peu judi- cieux de ma part de vouloir analyser de faqon exhaustive des questions qui, j’en suis convaicu, feront I’objet de discussions approfondies dans la qucte

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d‘un consensus sur la marche a suvire a l’avenir. Je me contenterai donc a titre introductif, de faire quelques commentaires sur certains points precis.

Permettez-moi tout d’abord de dire quelques mots sur la question de la dette africaine ainsi que sur l’impact et l’eficacitk de quelques-unes des initiatives rkcemment lanckes en vue de rksoudre ce problkme.

La gravitk de l’endettement extkrieur de 1’Afrique est dksormais bien connue. Pour les pays a faible revenu de la rkgion, les ratios de la dette aux exportations et au revenu national sont les plus klevks du monde en deve- loppement. Du fait de la faiblesse persistante de leur performance Ccono- mique, de leur ktroite base de production et de leurs mkdiocres recettes d’exportation, les Etats africains ont vu skrieusement flCchir leur aptitude a assurer le service de la dette.

Hormis ses aspects purement Cconomiques et financiers, le problkme du service de la dette s’est Cgalement traduit par la dktkrioration des kquipe- ments collectifs et sociaux sur une grande partie du continent. Bien qu’ani- mks des meilleures intentions, bon nombre de gouvernements se trouvent de plus en plus dans l’impossibilitk de fournir les services les plus essentiels dans le domaine de la santk et de l’education, car les impkratifs du service de la dette priment toutes autres considkrations budgktaires. Quel que soit le critbre de comparaison retenu, il apparait que l’kcart n’a cessk de se creuser entre le niveau de dkveloppement kconomique et social de 1’Afri- que et celui du reste du monde.

S’il est vrai que plus de 60 pour cent de l’encours de la dette africaine est due a des crkanciers publics, la dette commerciale, en particulier les obliga- tions au titre de son service, est tout aussi accablante et contraignante. C’est notamment le cas pour les pays a faible revenu. par ailleurs, la situation est tout aussi prkoccupante, s’agissant des pays qui se sont surtout endettks auprbs de crkanciers privCs, tels le NigCria et la CGte d’ivoire.

Nous avons kgalement constatk une hausse progressive de la part de la dette due aux institutions multilatkrales - atteignant 50 pour cent pour 19 de nos pays - ce qui indique que ceux-ci voient se limiter leur aptitude A se procurer de nouveaux fonds auprks d’autres sources. Ce type de dette pose des probl6mes particuliers, en raison des conditions trks rigoureuses likes aux kventuels rkkchelonnements et aux paiements des arrikrks.

De meme, a l’heure actuelle, les rktchelonnements auprks des Clubs de Paris et de Londres se sont multipliks; les crkdits a l’exportation, tout comme les prets commerciaux, se sont rarkfiks ou sont devenus trop one- reux ; les ressources concessionnelles demeurent insufisantes ; les flux d’in- vestissement privk sont, dans le meilleur des cas, nkgligeables. Dans l’en- semble donc, les pressions exerckes par le niveau insoutenable des obliga- tions du service de la dette et l’accb limitk des pays a de nouveaux finan- cements restent des obstacles majeurs a l’investissement. Ainsi, il apparait a 1’Cvidence que la crise du service de la dette fait peser sur plusieurs pays africains la menace d‘une paralysie kconomique et sociale.

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Faire face a la crise du service de la dette africaine: les recents efforts d’allegement.

Tous ces faits sont bien connus. Mais il est utile de voir comment la communautC internationale que nous formons a tente de faire face a ces dificultCs. Quels ont CtC les rksultats de ces efforts? Tout d’abord, exami- nons brikvement, a titre d‘illustration, les initiatives rCcentes d’allkgement de la dette, dans le cadre du Plan Brady et du Sommet de Toronto.

Jusqu’ici, 18 pays africains ont bCnCficiC, par le biais du Club de Paris, d’un allkgement de la dette aux conditions fixCes a Toronto, a concurrence d’un montant total de l’ordre de 5 milliards de dollars, soit 2 pour cent environ de l’encours de la dette. I1 est Cgalement interessant de noter que certains pays ont dO se presenter une seconde et une troisikme fois devant le Club de Paris pour obtenir de nouveaux rCCchelonnements aux mtmes conditions. De surcroit, 1’ClCment de 1ibCralitC s’Clkve actuellement a 20 pour cent environ, ce qui est infkrieur au seuil de 25 pour cent dont sont convenus les pays du CAD, qui se trouvent aussi Ctre membres du Club de Paris. Aussi louable wit-elle, l’initiative de Toronto n’a donc contribuC que de faqon trks modeste a rCwudre les problkmes de service de la dette des pays auxquels elle est destinCe.

Et qu’en est-il du Plan Brady ?

Comme le Plan Baker qui l’a prdckdt, le Plan Brady est uniquement applicable a la dette commerciale, ce qui implique donc qu’il n’a qu’une valeur limit& pour les pays africains dont l’essentiel de la dette est de source publique. Et, fait peut-etre plus nivilateur, aucun des cinq pays afri- cains kligibles n’a encore pu binificier des conditions offertes par le Plan Brady. Par ailleurs, les ressources allouies dans le cadre de ce programme au profit des opkrations d’ajustement structure1 semblent trop modiques pour contribuer att6nuer sensiblement les diEcult6s de service de la dette des binificiaires potentiels.

Dans le mtme ordre d’idks, il y a lieu de relever la rkcente initiative de la Banque mondiaie visant la cniation d’un fonds utilisC pour financer des opirations de kduction de la dette commerciale des pays bCnCficiant uni- quement de crkdits de I’IDA, dont ceux d’Afrique. Mais le volume des res- sources de ce fonds est vraiment faible par rapport aux besoins.

Nous nous fklicitons donc de ce que plusieurs donateurs bilatCraux aient pris, ou se proposent de prendre, des mesures suppltmentaires dont: l’an- nulation de la dette consentie au titre de I’APD, l’octroi de taux d’intCrCt concessionnels aux pays a revenu intermtdiaire ; la possibilitk de renforcer et d’approfondir la concessionnalit6 des conditions fixCes a Toronto et 1’Cla- boration de strattgies qui combineraient l’allkgement de la dette a des poli- tiques commerciales et d’investissement.

A notre analyse de l’incidence et de I’eficacitC des initiatives actuelles, j’ajouterai simplement ceci : la multiplicitk des options disponibles en

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matiere d’allegement de la dette, ainsi que la frkquence avec laquelle ap- paraissent de nouveaux programmes, traduisent a l’evidence les carences des mesures existantes, le fait qu’elles n’ont pas reussi a apporter des rkponses eficaces au probleme de la dette et donc, la necessite d’aller plus loin, bien plus loin, que les pratiques et options actuelles.

Cependant, il faut reconnaitre que les recentes propositions faites par le Royaume-Uni et les Pays-Bas representent d’importantes avancees par rap- port a celles qui les ont prdcedkes. Elles etablissent un rapport entre les paiements au titre du service de la dette et les recettes d’exportations et portent sur la totalite du stock de la dette, et non pas simplement sur le service de la dette durant la pkriode de consolidation, comme c’est le cas de I’approche de Toronto. Cette methode est tres similaire a celle preconisee dans la proposition de refinancement de la dette, elaboree par la BAD, il y a trois ans. Le fait de traiter l’ensemble du stock de la dette en une seule opkration permettrait d’tviter les redchelonnements repetitifs de type Toronto auprks du Club de Paris ; de rdduire le montant total de la dette grice a la possibilite de passer par pertes et profits une bonne partie des crCances ; et d’offrir des incitations de performance au pays debiteur.

Comme cette honorable assemblte le reconnait, la dette est loin d’etre un simple probleme financier, ayant uniquement trait aux paiements au titre de son service, aux rkechelonnements etc. L’endettement exterieur de 1’Afrique est avant tout un probleme de developpement, un probleme humain, qui a des repercussions sur la capacite de nos socidtes a se dkve- lopper de faCon soutenue. I1 influe sensiblement sur les perspectives futures et, tout particulierement, sur le developpement socio-economique des peuples de ce continent. Bref, il a une incidence sur la reprise Cconomique. Tout cela signifie clairement que toute solution utile et viable de la crise de la ,dette doit, a tout le moins, Ztre perCue comme faisant partie integrante d’une question beaucoup plus vaste : celle de la relance de la croissance et de l’amelioration du sort de l’homme africain.

Dans cette perspective, il devient indispensable de disposer de ressources supplementaires, pour l’investissement et la croissance. Toutefois, les lourdes obligations du service de la dette, que doivent honorer prati- quement tous les Etats africains, reduisent considerablement les apports financiers destinks a l’investissement et, partant, limitent les chances de developpement. En fait, le volume total de la dette a erode a tel point la solvabilite de la grande mojoritk de nos pays, qu’il leur est particulikrement dificile - pour ne pas dire impossible - de mobiliser le complement de capitaux extirieurs dont ils ont besoin.

Tel est donc le paradoxe de la dette exterieure : I’endettement excessif retarde la croissance, ce qui, a son tour, alourdit le fardeau de la dette et retarde davantage la croissance Cconomique, en un cercle vicieux sans fin. La situation s’aggrave lorsque s’y ajoute une tres forte deterioration des termes de l’echange telle celle que 1’Afrique a subie durant les annees 80 ; lorsque les efforts visant a elargir et consolider la base des exportations se heurtent a diverses barrieres protectionnistes a l’etranger ; ou lorsque les

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apports de fonds publics qui auraient pu pallier temporairement a ces difi- cultes stagnent en valeur reelle, comme c’est le cas depuis le milieu des annees 80.

Les gouvernements africains sont tres conscients des defis poses par la dette et par les dificultks connexes de la region. Et, mtme s’il reste encore beaucoup a faire, des progres ont deja ete realises dans les domaines-cles de la gestion et la politique economique. Ainsi, a l’heure actuelle, la majoritk de nos pays membres regionaux ont entrepris des reformes structurelles et de politique de grande envergure, visant essentiellement 21 asseoir des bases solides pour un investissement accru et une croissance economique plus vigoureuse ; a restaurer leur solvabilite erodee ; a retablir leur capacitd a honorer non seulement les obligations au titre du stock actuel de la dette mais aussi celles de la dette supplementaire qu’il faudra contracter pour financer le ddveloppement dans les anndes a venir.

Toutefois, Monsieur le President, dans les circonstances presentes, a moins d’un allegement considerable de la dette et d’un environnement extk- rieur beaucoup plus favorable, on voit dificilement comment les pays afri- cains pourraient, tous seuls, se sortir de la crise Cconomique actuelle. Quoique necessaire, il ne sera sfirement pas sufisant de poursuivre ferme- ment les reformes de politique. Le succes et la durabilite des programmes nationaux d’ajustement et de reforme seront essentiellement fonction du volume des flux financiers exterieurs nets qui seront achemines vers la region. La meilleure mkthode de financement serait de combiner des mesures d’allegement de la dette a des apports d’argent frais.

Pour accroitre le volume des apports financiers, nous pourrions, par exemple,

elargir et approfondir les options d’allegement offertes actuellement dans

multiplier les operations d’annulation de la dette bilaterale ;

dans le cas des pays les plus touch& par le probleme de la dette, envi- sager la possibilite d’octroyer des credits concessionnels afin d’assurer le service des prets contract& a des conditions non concessionnelles ;

elargir les cr6dits.a l’appui de I’ajustement, en particulier pour les pays a faible revenu, en privilegiant le transfert des ressources concessionnelles ;

0 fair preuve de la volonte politique necessaire pour s’attaquer aux pro- blemes particuliers des pays a revenu intermediaire et, meme, a faible revenu (les exemples recents de la Pologne et de 1’Egypte montrent de faqon probante que cela est possible). Les pays africains peuvent accroitre l’impact de ces flux financiers et

ameliorer leurs perspectives de reprise et de croissance en entreprenant les reformes de politique et les mesures connexes qui permettraient de ren- forcer sensiblement leur capacite de retention des ressources. De meme, l’assouplissement des conditions liees par l’aide et l’assistance technique des

le cadre des Clubs de Paris et de Londres ;

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donateurs a l’acquisition des biens et services, contribuerait grandement A accroitre l’effet multiplicateur de ces apports de ressources dans les pays bknkficiaires.

I1 existe donc un lien direct entre l’allkgement de la dette, les apports de ressources et la reprise tconomique du continent. Ce qui est beaucoup plus subtil, mais de plus en plus manifeste, c’est le rapport entre la dette, la reprise et le processus dkmocratique. Ce lien, ignore ou largement ecartt dans le passe, me semble jouer un r6le central dans le dkveloppement Cconomique et humain vers lequel tendent tous nos efforts.

I1 nous suffit de rkflkchir aux raisons profondes de l’action que nous menons, en tant que thdoriciens et praticiens du dkveloppement.

La croissance kconomique, dont les possibilitks de realisation seront manifestement renforckes par l’allkgement de la dette, n’est qu’une approxi- mation grossikre de notre objectif ultime, a savoir, le dkveloppement humain. Ainsi, lutter contre la pauvretk, fournir au moins les services de base dans le domaine de la sante et de l’kducation, crker des opportunitks pour les dipl6mts au ch6mage ou sous-employks, s’attaquer aux problkmes particuliers des femmes, favoriser l’dpanouissement de ia crtativitt et de l’esprit d’entreprise, promouvoir le dkveloppement humain sous tous ses aspects, tel est notre but. J’ajouterai qu’au nombre des conditions qui, en dehors de l’allkgement de la dette, faciliteraient la rkalisation de cet objec- tif, il faut nkcessairement inclure les dispositifs politiques et sociaux qui faconnent l’action humaine.

A cet tgard, la rkcente Declaration d‘Arusha sur la participation des peuples est tres instructive, en ce qu’elle dtmontre clairement l’interaction et l’interdkpendance du progres politique, social et kconomique. En termes nets, la participation des populations n’est ni un luxe, ni le rksultat du pro- grks tconomique ou du dkveloppement ; c’est la condition‘ sine qua non du dkveloppement humain et de la prospkrite Cconomique.

Ainsi donc, les chances d‘atteindre nos objectifs seraient bien meilleures dks lors que, outre la si ntcessaire croissance kconomique que l’allkgement de la dette pourrait favoriser, la transparence, la responsabilitk, la partici- pation populaire A la prise de dkcision sont assurees. En d‘autres termes, la responsabilisation, la transparence, l’ouverture - lorsqu’elles s’inscrivent dans le cadre d’un systkme accessible, valable et objectif d’arrangements PO- litique et autres - sont les elkments garantissant le mieux que la poursuite du progrks Cconomique ira de pair avec celle du dkveloppement humain.

Ceci ktant, Monsieur le Prksident, je crains que, compte tenu du fardeau de la dette exterieure et des dificultks de la crise Cconomique actuelle, les changements politiques positifs, amorces sur le continent, ne soient grave- ment compromis. Assurkment, la faiblesse de la croissance kconomique, la baisse des revenus par habitant et la pauvretk persistante qui en dkcoulent reprksentent la plus grande menace pour le dkveloppement de nos dkmo- craties naissan tes.

En un mot, refuser le dkveloppement, c’est refuser la dkmocratie et vice- versa. Ainsi, les efforts que nous dkployons en vue de lever les obstacles au

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developpement du continent, dont le probleme de la dette, restent notre meilleur gage pour la preservation et le renforcement du processus demo- cratique.

En resume, j’ai tente de souligner trois points principaux. Premikrement, la crise de la dette est une realitt en Afrique ; elle a eu de graves incidences sur les perspectives de developpement de I’ensemble de nos pays, a faible revenu ou a revenu intermediaire. Deuxikmement, nous devons trouver des solutions pratiques et durables a cette crise afin d’inverser le ddclin dcono- mique actuel et ses problkmes sociaux connexes. Troisiemement, ces efforts auront les plus grandes chances de succes et d’eficacite s’ils sont menes dans un environnement favorable aux processus democratiques et a une large participation des populations dans tous les domaines de l’action humaine.

En jetant un regard sur l’avenir, il apparait clairement que la question fondamentale pour I’Afrique, confrontee a la crise actuelle, reste celle de savoir comment redynamiser la croissance et comment I’appuyer au plan politique et economique. C’est en partie pour cette raison que, contraire- ment a I’idee selon laquelle 1’Afrique est deja trop lourdement endettee, le continent, surtout a ce stade de son developpernent, doit disposer d’un volume accru de ressources, mime s’il lui faut contracter de nouvelles dettes. Les conclusions tirkes lors de la recente evaluation du Programme d’action des Nations Unies pour la reprise economique et le develop- pement de 1’Afrique vont manifestement dans ce sens.

Formons donc le souhait que cette Table ronde et la Declaration d’Abid- Jan donnent une profonde resonance a l’appel lance par 1’Afrique en faveur d’un allkgement de sa dette et d’une augmentation significative des apports nets de ressources. (Euvrons de concert afin d’aider 1’Afrique a retrouver veritablement le chemin de la reprise et de la croissance soutenue, afin de consolider les changements politiques survenant sur le continent. Alors seulement, nous pourrons avoir la certitude de progresser dans la quite du bien-itre, de la paix et de la stabilite pour les peuples du continent.