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Sociologie du travail 50 (2008) 169–183 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Assistant parlementaire au Parlement européen : un tremplin pour une carrière européenne Assistants in the European Parliament, a springboard for a European career Sébastien Michon Cultures et sociétés en Europe (CNRS UMR 7043), Prisme–GSPE (CNRS UMR 7012), Misha, 5, allée du Général-Rouvillois, 67083 Strasbourg cedex, France Résumé Cet article vise à mieux connaître les entourages politiques et les auxiliaires de l’Europe politique en s’intéressant aux assistants parlementaires au Parlement européen, plus précisément aux voies d’accès à cette fonction, aux tâches qu’elle implique et aux poursuites de carrière qu’elle favorise. Diplômés à bac + 5, fortement sélectionnés et parfois bien rémunérés, ce sont tout à la fois des travailleurs de l’ombre en position précaire et subordonnée, des conseillers politiques, des acteurs de la construction européenne et de futurs agents des institutions et des groupes d’intérêt au niveau européen. Ce type de poste constitue en fait une étape d’un rite d’institution à une carrière dans l’action publique européenne. © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Abstract To better understand the politicians involved in EU politics and their staffs, attention is turned toward access to a position as assistant in the European Parliament and to the tasks and career opportunities related thereto. These graduates with five years of postsecondary education are tightly selected and, sometimes, well paid. They work in the background while holding subordinate, precarious positions as political advisors. They are helping to build the EU, and will hold future positions in European-level institutions and interest groups. A position as assistant is a step in a “rite of institution” that opens the way to a career in EU public offices. © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Assistant parlementaire ; Parlement européen ; Métiers de l’Europe ; Auxiliaires politiques ; Rite d’institution Keywords: Parliamentary assistants; MEP’s staff; European Parliament; European careers; EU public offices; “Rite of institution” Adresse e-mail : [email protected]. 0038-0296/$ – see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.soctra.2008.03.002

Assistant parlementaire au Parlement européen : un tremplin pour une carrière européenne

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Sociologie du travail 50 (2008) 169–183

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

Assistant parlementaire au Parlement européen :un tremplin pour une carrière européenne

Assistants in the European Parliament,a springboard for a European career

Sébastien MichonCultures et sociétés en Europe (CNRS UMR 7043), Prisme–GSPE (CNRS UMR 7012), Misha,

5, allée du Général-Rouvillois, 67083 Strasbourg cedex, France

Résumé

Cet article vise à mieux connaître les entourages politiques et les auxiliaires de l’Europe politique ens’intéressant aux assistants parlementaires au Parlement européen, plus précisément aux voies d’accès àcette fonction, aux tâches qu’elle implique et aux poursuites de carrière qu’elle favorise. Diplômés à bac + 5,fortement sélectionnés et parfois bien rémunérés, ce sont tout à la fois des travailleurs de l’ombre en positionprécaire et subordonnée, des conseillers politiques, des acteurs de la construction européenne et de futursagents des institutions et des groupes d’intérêt au niveau européen. Ce type de poste constitue en fait uneétape d’un rite d’institution à une carrière dans l’action publique européenne.© 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Abstract

To better understand the politicians involved in EU politics and their staffs, attention is turned towardaccess to a position as assistant in the European Parliament and to the tasks and career opportunities relatedthereto. These graduates with five years of postsecondary education are tightly selected and, sometimes, wellpaid. They work in the background while holding subordinate, precarious positions as political advisors. Theyare helping to build the EU, and will hold future positions in European-level institutions and interest groups.A position as assistant is a step in a “rite of institution” that opens the way to a career in EU public offices.© 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Assistant parlementaire ; Parlement européen ; Métiers de l’Europe ; Auxiliaires politiques ; Rite d’institution

Keywords: Parliamentary assistants; MEP’s staff; European Parliament; European careers; EU public offices; “Rite ofinstitution”

Adresse e-mail : [email protected].

0038-0296/$ – see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.soctra.2008.03.002

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Corrélativement à l’accroissement des domaines d’action des eurodéputés au sein du processusde décision européen (Costa, 2001), la fonction d’assistant parlementaire au Parlement européen(PE) s’est peu à peu développée et normalisée. Depuis la fin des années 1980, pour surmonterl’investissement impliqué par leur mandat et continuer à exister sur le plan national, les députéseuropéens se sont progressivement entourés d’un personnel plus qualifié et plus conséquent —ce qu’a facilité l’augmentation progressive du budget « Frais d’assistance parlementaire » (9765euros par mois en 2000, 12 200 en 2003, 15 222 en 2007)1. Ce sont les députés eux-mêmes quichoisissent leurs collaborateurs, fixent les tâches qu’ils effectuent, et mettent un terme à la col-laboration s’il y a « rupture de confiance », pour reprendre les termes utilisés dans les contratsde travail. La sociologie des professions, qui s’est surtout attachée à étudier des professions etdes carrières établies et institutionnalisées (Dubar et Tripier, 1998), a peu investi les métiers liésà l’action publique, à commencer par ceux de collaborateurs politiques2, plus encore au niveaueuropéen. La sociologie des arènes parlementaires, désertée en France (Nay, 2003), n’est pas de cepoint de vue d’un plus grand apport. Les travaux sur les pratiques d’assemblée, qui renouvellentet approfondissent la connaissance des logiques de fonctionnement et d’institutionnalisation duPE (Hix et Lord, 1997 ; Bell et Lord, 1998 ; Costa, 2001), évoquent effectivement peu les colla-borateurs. Méconnus des chercheurs, les postes d’assistants au PE sont pourtant parmi les pluscourus par les diplômés en études européennes, toujours plus nombreux à s’orienter vers le mar-ché du travail fortement concurrentiel des métiers de l’Europe (Georgakakis, 2002), et à souhaiterdevenir agent des institutions ou des groupes d’intérêt qui interviennent auprès de celles-ci. Uneapproche par les processus et les parcours qui y mènent et qu’ils offrent permet de rendre comptede certaines caractéristiques non seulement des entourages politiques, mais aussi plus largementdes emplois dans l’action publique européenne et des futures élites européennes. On souhaiteainsi montrer que, auxiliaires politiques, les assistants au PE sont aussi et surtout des auxiliairesde l’Europe politique.

« Petites mains » et « courroies de transmission » devenues essentielles et indispensables àl’activité des élus, les assistants sont en même temps dans une situation de subordination et derelative précarité. D’un côté, dans les coulisses d’une institution prestigieuse, ces jeunes diplô-més prennent part au jeu politique, concourent à l’élaboration de décisions et d’un espace depratiques spécifiques. Ils sont les acteurs de « l’entreprise politique » que l’eurodéputé forme avecl’ensemble de son équipe, au sens de « tentative rationnelle de conquête et d’exercice du pouvoirpolitique » (Gaxie, 1973, p. 27). D’un autre côté, ils n’existent qu’à travers leur « chef ». N’étantjamais complètement à la place des élus, ils sont astreints à rester dans leur ombre3 d’où uneperte ou, au moins, un transfert d’identité. Susceptibles d’être licenciés à tout moment, ils sontégalement confrontés à une incertitude due aux résultats des élections et à l’absence d’un statutqui crée tout à la fois une disparité des salaires pour des tâches sensiblement équivalentes (entre1200 et 4000 euros avec une moyenne proche de 2000 euros), des situations d’illégalité pour ceuxqui détiennent un contrat dans le droit de leur pays d’origine alors qu’ils résident en Belgique

1 Outre les assistants au PE, les eurodéputés recrutent, grâce à ce budget, des secrétaires et/ou des assistants en charge desactivités en circonscription du député. Politiquement « sûrs », pour reprendre des termes d’acteurs, ceux-ci appartiennenttrès souvent au parti du député. Précisons également que sur la cinquième législature (1999–2004), la configuration laplus classique des équipes était la suivante : une personne au PE et une en circonscription. Depuis 2004, il est fréquentque les équipes comprennent un collaborateur de plus à mi-temps ou à temps plein, auxquels s’ajoute le plus souvent unstagiaire à Bruxelles.

2 Voir néanmoins Pierre Mathiot et Frédéric Sawicki (Mathiot et Sawicki, 1999) et Guillaune Courty (Courty, 2005).3 Pour quelques éléments sur « les hommes de confiance » et les « fonctionnaires de parti » comme « déclassés », voir

Max Weber (Weber, 2003).

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et des difficultés concernant la protection sociale. L’association des assistants du PE se mobilisedepuis la fin des années 1990 pour informer les responsables de l’institution et de la Commissioneuropéenne sur les problèmes des assistants, et dénoncer l’absence d’un statut et les résistancesdes eurodéputés quant à leurs revendications. La mobilisation des assistants demeure cependanttrès limitée. Il est vrai que la relation particulière avec leur chef, les horaires conséquents, et leturn-over important –– les assistants restant en fonction, le plus fréquemment, entre une législa-ture complète et une demie –– ne semblent pas propices. Mais là ne sont pas les seuls élémentsexplicatifs. En fait, pour des jeunes gens dotés de propriétés favorables qui ont été soumis à plu-sieurs sélections scolaires et professionnelles, la fonction d’assistant au PE représente une étaped’un « rite d’institution » (Bourdieu, 1982) à une carrière dans l’action publique européenne.

Comme d’autres auxiliaires politiques, les assistants épousent certains traits d’une « misèrede position », à l’image du contrebassiste au sein de l’orchestre, décrit par Patrick Süskind, dans« une position inférieure et obscure à l’intérieur d’un univers prestigieux et privilégié » (Bourdieu,1993, p. 11). Cette position qui implique une « remise de soi » (Courty, 2005, p. 17) est en faitd’autant plus acceptée que, outre un salaire, elle offre la possibilité d’entrer dans l’espace politiqueeuropéen, de compléter ses connaissances, ses compétences et son capital social, puis de postulerà des positions plus intéressantes au niveau européen que celles auxquelles ils pouvaient accéderprécédemment ; la spécialisation des profils et des pratiques rend effectivement moins évidente unerentabilisation de cette expérience au niveau national4. Une hypothèse ici étayée par l’étude despropriétés pertinentes pour accéder à cette fonction (1), ainsi que des pratiques, des apprentissageset des poursuites de carrière des assistants (2).

Depuis 2002, une centaine d’entretiens ont été menés auprès de collaborateursd’eurodéputés actuellement ou précédemment en poste au PE. Outre les pra-tiques, les apprentissages et les représentations relatives à leur fonction, lesentretiens abordaient systématiquement leurs parcours scolaire et profession-nel, ce qui a permis de quantifier plusieurs indicateurs (niveau de diplôme, typede diplôme, année d’étude à l’étranger, stages, etc.). L’interrogation d’anciensassistants, la présence régulière sur le terrain pendant cinq ans et l’entretiende contacts avec plusieurs enquêtés, a permis d’obtenir des informations surles poursuites de carrière. Au cours de l’enquête, le souci a été de disposerd’un échantillon aussi varié que possible au niveau des groupes politiquesd’origine et de l’ancienneté dans l’assemblée. Si la méthode de proche enproche a été privilégiée avec l’usage de recommandations d’assistants pré-cédemment interrogés, plusieurs enquêtés ont été approchés spontanément(par téléphone, courriel ou directement au PE). Certains ont été vus plusieursfois. Parmi les enquêtés (90 individus), on compte 53 % d’hommes et 47 %de femmes. Leur moyenne d’âge se situe entre 29 et 30 ans ; seul un assis-tant sur sept a plus de 35 ans. De nationalités francaise (61), allemande (8),belge (3), bulgare (1), espagnole (2), finlandaise (4), italienne (3), hongroise(1), luxembourgeoise (1) polonaise (1), portugaise (1), roumaine (1), slovène

4 Sur l’expérience européenne difficile à convertir au niveau national pour les membres des cabinets de commissaireseuropéens (Voir Joana et Smith, 2002).

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(1) et suédoise (2), ils sont (ou ont été) en poste auprès de députés des groupesAlliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (ADLE) (4), Europedes démocraties et des différences (EDD) devenu Indépendance et démocra-tie (ID) (3), Gauche unitaire européenne/gauche verte nordique (GUE-NGL)(4), Parti populaire européen (PPE) (26), Parti socialiste européen (PSE) (44)et Verts/Alliance libre européenne (Verts-ALE) (9). Aucun assistant des parle-mentaires inscrits dans les groupes Union pour l’Europe des nations (UEN),Identité, Tradition, Souveraineté (ITS) et des non inscrits n’a pu être rencontré.Au niveau francais, alors que tous les assistants ont été contactés, une par-tie n’a pas donné suite aux demandes d’entretiens. Au final, sur la cinquièmelégislature (1999–2004) plus de la moitié des assistants européens des dépu-tés de la LCR (GUE), du PS (PSE), de l’UDF (PPE, puis ADLE), de l’UMP (PPE)et des Verts (Verts-ALE) a été interrogée. Obtenir des informations sur ceuxen poste auprès de parlementaires des autres formations (CPNT [EDD], LO[GUE] et surtout FN [ITS], MPF (EDD), PCF [GUE] et RPF [UEN]) a été plus diffi-cile. L’échantillon constitué comporte donc certains biais, à commencer par laprésence majoritaire de membres du Parti socialiste européen et de Francais,ce qui s’explique par le déroulement de l’enquête et la méthode adoptée deconstitution de l’échantillon : principalement par « effet boule de neige ». Enconséquence, les résultats présentés doivent être appréhendés au prisme decette composition. La forte présence de Francais permet néanmoins de situer,sur l’un ou l’autre point, les assistants du PE par rapport à ceux de l’Assembléenationale.

1. Des spécialistes de l’Europe plusieurs fois sélectionnés

Si la quasi-totalité des assistants parlementaires au PE partagent les idées politiques de leurchef, si une partie d’entre eux adhèrent au parti du député, et si quelques-uns sont venus au PEsuite à une précédente activité partisane, il n’empêche que pratiquement tous présentent un cursusen études européennes, des compétences linguistiques et une expérience professionnelle en lienavec l’espace politique européen. Devenir assistant d’un eurodéputé implique généralement unespécialisation sur les questions européennes.

1.1. Des ressources scolaires européanisées

En commencant l’enquête, on pouvait s’attendre à rencontrer des militants de partis politiquespour lesquels la collaboration rémunérée avec un élu est une voie d’entrée en politique et uneforme de rétribution du militantisme accompli au sein du parti du député (Gaxie, 2005). C’esteffectivement le cas pour certains. Au moment de leur recrutement, 48 % des assistants interrogésétaient membres du parti de leur chef5. Toutefois, tous n’y ont pas une activité intense. D’après lesinformations recueillies, ce serait à peu près quatre assistants sur dix pour lesquels l’appartenanceau parti politique de l’élu aurait été capitale, notamment pour ceux en poste auprès des eurodéputés

5 C’est-à-dire dans des proportions sensiblement équivalentes à celles observées à l’Assemblée nationale (Fretel etMeimon, 2005).

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les plus éloignés du centre du jeu parlementaire, membres des groupes GUE/NGL, EDD et apriori ITS. L’importance de la ressource partisane varie également selon les délégations, avecdes assistants plus fréquemment militants, par exemple, auprès de députés du Parti socialisteespagnol, du Labour et de Forza Italia. Au niveau francais, c’est généralement le cas avec lesparlementaires FN, PCF — tout comme, avant 2004, de ceux de la LCR et LO —, et d’une partiede ceux du PS, UDF, UMP et Verts. Les ressources politiques ne sont donc pas à négliger, et ceen dépit des discours, fréquents, qui présentent l’espace européen comme différent des espacespolitiques nationaux, au-dessus des clivages partisans, ne serait-ce qu’au regard des compromisentre les groupes politiques, voire les coalitions (Kreppel, 2000). De nombreux assistants ont,comme d’autres acteurs de l’espace politique européen, appris à faire de la politique sans ledire et sans le savoir, c’est-à-dire qu’ils ont intégré, au cours de leur formation et de leur pratiqueprofessionnelle « une capacité à “taire” ou évacuer la dimension politique de leur action » (Baisnéeet Smith, 2006, p. 342). Si la politisation des collaborateurs ne doit pas être occultée, les entretiensont très rapidement montré que l’adhésion partisane n’était de loin pas la seule ressource favorableà l’entrée en fonction, mais une ressource parmi d’autres, susceptible de jouer. De facto, pour unelarge majorité de ces jeunes gens, les postes d’assistants au PE représentent une voie possible defaire carrière à Bruxelles au sein de l’action publique. Leur investissement européen concordeavec leurs ressources européennes efficientes ; l’européanisation est d’ailleurs l’élément qui lesdifférencie le plus des assistants parlementaires à l’Assemblée nationale.

L’Europe est un thème développé au sein de diverses institutions scolaires comme le collèged’Europe à Bruges et Natolin, institution spécifique de socialisation européenne proposant despratiques pédagogiques ad hoc (Schnabel, 1998), mais aussi les facultés de droit et de science poli-tique — à commencer par celles qui proposent des masters qui forment aux métiers de l’Europe etmettent en avant la fonction d’assistant parlementaire parmi les débouchés possibles6. Cette caté-gorie de formations supérieures, spécifiquement consacrées aux questions européennes, permetà des étudiants d’exploiter pleinement de véritables dispositions à travers un cursus universitairebrillant, susceptible d’ouvrir la voie à une carrière dans laquelle ils pourront s’épanouir. Effecti-vement, pour les assistants du PE, une carrière européenne est généralement liée à la possibilitéde rentabiliser leurs acquis scolaires et linguistiques. Si leur recrutement s’effectue principale-ment sur des diplômes d’un niveau bac + 5 (un peu plus de trois quarts des enquêtés) spécialiséssur les questions européennes en science politique ou en droit (respectivement la moitié et unquart de l’échantillon), c’est notamment en raison des compétences qu’ils mettent en avant : unbagage juridique en droit communautaire, la maîtrise du fonctionnement du triangle institutionneleuropéen et une connaissance des questions politiques européennes. Le caractère marginal desautres cursus (langues [10 %] ou économie [11 %]), la généralisation du recrutement à bac + 5 etla croissance des diplômés en science politique, confirment la spécialisation des recrutements.

Outre les connaissances européennes, cette spécialisation des profils réside dans la maîtrise delangues étrangères, à commencer par celle de l’anglais, dont la maîtrise est jugée indispensable.Les compétences linguistiques ont certes pu être acquises au cours de l’enfance en raison de labinationalité de leurs parents (9 % de l’échantillon). Elles l’ont surtout été par des investissementsscolaires avec des séjours à l’étranger dans le cadre des études. En ce sens, un peu plus de la moitiédes enquêtés (54 %) présentent au moins une année d’études à l’étranger, essentiellement dans le

6 On peut citer entre autres les masters d’études spécialisées en politique européenne ou métiers de l’Europe à l’universitélibre de Bruxelles, à l’institut supérieur de management public et politique de Bruxelles, à l’université catholique deLouvain, à l’université de Lille-2, dans les IEP de Paris et de Strasbourg.

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cadre du programme d’échanges Erasmus (un sur trois). Ce programme constitue une ressourcedécisive pour entrer dans l’espace politique européen même si elle est extrêmement rare dans lesespaces nationaux. Pour la France, un peu moins de 1 % de l’ensemble des inscrits de nationalitéfrancaise dans l’enseignement supérieur au cours d’une année scolaire7 sont ainsi concernés. Lascolarisation à l’étranger s’inscrit également pour un quart environ dans d’autres formations rarescomme les masters au sein des institutions les plus reconnues en Europe, notamment l’institut desétudes européennes de l’université libre de Bruxelles (ULB) (11 %), le collège d’Europe (9 %) oula London School of Economics (3 %), qui offrent un approfondissement de leurs connaissancessur les questions européennes. Toutes ces expériences permettent certes de maîtriser l’anglais ––voire l’allemand, l’espagnol ou le francais ––, de découvrir un pays, son histoire et ses coutumes,mais surtout d’acquérir une proximité et une facilité de contact avec les nationaux, d’évoluer dansun milieu international en côtoyant des jeunes d’autres nationalités aux propriétés relativementproches. Les individus ainsi socialisés apprennent à franchir les limites mentales du territoirenational et adoptent, tout en les forgeant, les principes structurants d’un habitus international(Wagner, 1998)8.

Entre les assistants au PE, on ne saurait négliger les écarts de ressources scolaires. Les parcoursau sein des institutions scolaires les plus reconnues et le nombre de langues parlées sont lespropriétés les plus légitimes au sein du microcosme parlementaire, et de plus en plus clivantes. Onnote que, pour ceux qui détiennent des caractéristiques scolaires moins légitimes, des ressourcespolitiques peuvent faciliter l’accès au PE, particulièrement auprès des députés les plus liés à leurorganisation politique. Il est malgré tout de plus en plus rare que les assistants ne présententpas un cursus européanisé, même lorsqu’ils sont militants. Les ressources scolaires européennes,essentielles, ne suffisent cependant pas à permettre de décrocher un emploi d’assistant, commesi les qualités requises ne pouvaient pas s’acquérir en dehors de situations professionnelles oud’expériences préprofessionnalisalisantes. Le premier emploi ou le premier stage, qui fait figurede rite d’institution, s’avère décisif dans cette optique. En effet, la faiblesse ou l’inexistenced’expérience professionnelle au niveau européen empêche leur accès à la plupart des postes — àcommencer par ceux d’assistants parlementaires. Une assistante ayant précédemment accompliun stage à la Commission et dans une confédération patronale commente ainsi son arrivée àBruxelles sans expérience professionnelle :

« J’ai cherché du boulot, mais bon. . . Chercher du boulot c’était un petit peu ambitieux,parce que tout ce qu’on me proposait c’était des stages. [. . .] Quand j’ai commencé àchercher du boulot, je n’avais même pas 23 ans. Donc forcément, dans ce milieu là, tout lemonde m’a bien ri au nez. Et tout ce qu’on me proposait, c’était des stages. » (Entretien,décembre 2002).

Ses seuls diplômes ne lui permettant pas de trouver un emploi à Bruxelles : elle a multipliéles stages pour compléter ses ressources. Ce type d’expérience, relativement représentative, a étédécisif quant à la poursuite de sa carrière professionnelle au niveau européen, et plus précisémentde son entrée au PE. Un emploi d’assistant s’inscrit souvent après de précédentes expériencesprofessionnalisantes dans l’espace politique européen.

7 Source : agence Europe-Éducation-Formation France, 2006.8 Un indicateur de l’importance des ressources internationales et de l’européanisation des postes d’assistant réside dans

la proportion non négligeable (15 % des enquêtés) et croissante de ceux qui postulent auprès d’un député d’une autrenationalité ; la maîtrise de la langue de l’élu est alors souvent nécessaire.

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1.2. De précédentes expériences professionnalisantes dans l’espace politique européen

Les assistants parlementaires du PE sont souvent entrés dans l’espace politique européen (deuxenquêtés sur trois) par des stages ou des missions à durée déterminée au sein d’une institutionou d’un groupe d’intérêt à Bruxelles (bureaux de représentation d’une collectivité locale,fédérations d’entreprises, cabinets de consulting ou ONG). Plus précisément, 37 % sont passéspar le Parlement, 27 % par un groupe d’intérêt, 17 % par la Commission, 1 % par le Conseil,2 % par une représentation de leur gouvernement à Bruxelles ; certains ont cumulé plusieursexpériences. Pour les candidats potentiels à un poste de collaborateur avec un eurodéputé, cemoment s’apparente à une position d’attente d’une place, soit libérée par le départ d’un assistant,soit créée par l’arrivée de nouveaux élus au PE à l’issue d’élections européennes ou nationales.Ces expériences qui ne sont pas d’égal accès sont décisives pour devenir assistant –– mais aussiplus largement pour embrasser une carrière européenne –– parce qu’elles permettent d’acquérirun capital technique européen et un capital social efficient au sein de l’espace politique européen.

1.2.1. Une hiérarchie entre les stages et les missionsIl convient d’opérer avant tout une distinction entre les stages ou missions au sein d’une

institution et ceux qui revêtent un caractère plus politique, auprès d’un député. Pour un jeunediplômé, la concurrence encore plus forte depuis l’arrivée de postulants issus des pays entrantsavec l’élargissement, voire des pays candidats, rend de plus en plus difficile l’obtention d’unstage ou d’une vacation dans une institution européenne, particulièrement à la Commissionet au sein des services administratifs du PE. En effet, la nationalité des prétendants intervientdans le recrutement des institutions européennes, y compris au niveau des stages. Les demandesétant de plus en plus importantes, le choix des stagiaires traduit bien souvent la valorisation depropriétés distinctives (par exemple, le nombre de langues parlées ou un précédent stage dansl’espace politique européen). Le recrutement, en tant que stagiaire dans une institution, nécessiteégalement la connaissance de points d’entrée. Par conséquent, en fréquentant les personnes quitravaillent à Bruxelles au sein ou au contact des institutions européennes, il s’agit non seulementde détenir des informations sur les opportunités de recrutement, mais aussi de bien maîtriser lefonctionnement du « microcosme bruxellois », pour reprendre un terme d’acteur.

Les stages auprès des eurodéputés sont a priori un peu plus accessibles. Depuis le début de lasixième législature, il est rare que leur équipe ne comprenne pas un stagiaire à Bruxelles. De fait,pour les parlementaires, le recrutement de stagiaires offre l’avantage de disposer de collaborateursrelativement qualifiés, tout en ne dépassant pas le quota de trois personnes accréditées auprès duPE, ni le budget « frais d’assistance parlementaire », compte tenu de leur moindre rémunération(au plus 1000 euros par mois). Toutefois, ces stages sont, d’après les personnes interrogées, deplus en plus demandés par les étudiants en fin de parcours scolaires (dernière année de master)9

mais aussi par les jeunes diplômés –– toujours plus nombreux –– en recherche d’emploi dans lesaffaires européennes ; les assistants interrogés le plus récemment évoquent entre une demandehebdomadaire et deux quotidiennes. De plus, différemment des stages à la Commission ou dansl’administration du PE, le choix des stagiaires n’est pas uniquement déterminé par les seulespropriétés scolaires et européennes mais aussi par les ressources politiques souvent relationnelles.L’appartenance au parti de l’élu, voire à son courant ou à sa tendance en son sein, favorise lerecrutement d’une fraction d’entre eux. Le capital social représente une autre ressource décisive.

9 Pour un traitement plus complet de cette question (Voir Michon, 2004).

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Concernant les militants, la recommandation vient habituellement de soutiens issus du champpolitique. Pour les autres, la connaissance de personnes évoluant au PE (d’autres stagiaires le plussouvent) permet d’accéder à des informations sur les places disponibles.

Les postulants à l’espace politique européen qui ne sont pas bien introduits au niveau desinstitutions européennes et ne détiennent pas d’appuis politiques, ni des ressources financièresleur permettant d’attendre une offre intéressante, se tournent vers les groupes d’intérêt (Michon,2006). Avec des propriétés dites minimales, c’est-à-dire des compétences linguistiques (l’anglaisde manière quasiment obligatoire à l’oral et à l’écrit) et des connaissances sur le mode de négo-ciation au niveau européen certifiées par des propriétés scolaires européanisées — certes avecune rentabilité différente selon les diplômes —, l’obtention d’un stage y paraît plus aisée qu’ausein d’une institution, ne serait-ce qu’en raison du développement des représentations d’intérêt auniveau européen qui génèrent un véritable réservoir d’emplois. Constituant une première expé-rience professionnelle pour ceux qui n’en ont pas au niveau européen, il s’agit le plus souvent demissions aux postes les plus bas et les moins valorisés dans la hiérarchie des lobbyistes, au seind’organisations peu prestigieuses, peu dotées en moyens financiers qui sont en train de s’installer àBruxelles (ONG, associations diverses, fédérations d’industriels ou regroupements d’entreprisesd’un même secteur d’activité). Ces fonctions d’auxiliaires sont souvent qualifiées de « prenantesen temps » et de « peu intéressantes ». Une assistante résume ainsi sa précédente expérience dansl’association professionnelle des producteurs européens de spiritueux : « On est un peu corvéableà merci dans tout ca, tu ne comptes pas tes heures. J’étais un peu la dernière roue du carrosse. »(Entretien, mars 2004). Ce type de contrat, moins légitime que les stages ou autres missions auprèsd’une institution ou d’un député, demeure malgré tout une voie d’entrée dans l’espace européenpour de jeunes diplômés, prêts à s’investir dans le but d’y faire carrière.

1.2.2. L’acquisition d’un capital technique européen et d’un capital social efficientEn dehors d’un accès à cet espace, ces expériences professionnalisantes de quelques mois,

un an, voire deux ans, représentent un moyen pour les impétrants d’acquérir des ressourcesprofessionnelles pertinentes sur le marché bruxellois. Du fait de l’institutionnalisation des modesde recrutement, un capital technique européen et un capital social efficient dans le microcosmebruxellois sont, en effet, toujours plus nécessaires.

Un stage à Bruxelles offre ainsi l’opportunité de développer un capital technique européen,la maîtrise du fonctionnement des institutions, du processus de décision et de négociation auniveau européen. Pour de jeunes diplômés qui n’ont que des connaissances théoriques sur letriangle institutionnel et une maîtrise tout aussi abstraite des procédures de codécision étudiéesà l’université, il s’agit d’un moment de familiarisation avec l’espace politique européen. Plusprécisément, ils acquièrent non seulement une connaissance pratique du PE et de certains dossiers,mais aussi des processus de négociation et de décision au niveau européen. Autant de propriétésrecherchées par les députés qui souhaitent avant tout gagner du temps et s’entourer d’auxiliairesdirectement opérationnels.

Par ailleurs, ces expériences donnent l’occasion de compléter les réseaux relationnels précé-demment construits lors de la scolarité10 ou d’activités militantes11, et de développer ainsi un

10 Quasiment tous les masters en études européennes présentent des associations d’anciens élèves plutôt dynamiquescomme par exemple, celle du collège de Bruges (Schnabel, 2002) ou du master politiques européennes de l’IEP deStrasbourg dont l’annuaire de 2007 recense près de 400 anciens, pour la plupart dans les affaires européennes.11 Au sein des sections bruxelloises des partis politiques par exemple, des mouvements de jeunesse au niveau

européen du PPE (Young European People’s Party [YEPP]), du PSE (European Community Organisation of

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capital relationnel encore plus efficace au niveau européen, tant du point de vue d’un savoir-être que de personnes–ressources. L’insertion dans le milieu bruxellois permet tout d’abord àl’entrant de se conformer aux règles de vie en son sein, aux principes du multiculturalisme, de lanégociation et du compromis, et donc de s’adapter à l’espace. Ensuite, compte tenu du turn-overrelativement élevé des postes de l’action publique au niveau européen — à commencer par ceuxd’assistants comme nous l’avons déjà souligné —, avoir des relations bien placées au momentde l’entrée dans l’espace européen et connaître certaines règles en son sein s’avèrent décisifs.« Il faut savoir où se trouvent les bureaux, les institutions, où postuler, à qui parler », ne cessentde répéter les personnes interrogées. Or un stage au sein d’un groupe d’intérêt œuvrant auprèsdes institutions européennes, à la Commission, ou mieux encore au Parlement que ce soit dansl’administration, un secrétariat d’une commission parlementaire ou auprès d’un eurodéputé faci-lite habituellement les contacts avec des acteurs du PE, qu’il s’agisse des assistants, des députés,des administrateurs, des agents temporaires ou des stagiaires. « Être dans les murs », ou en toutcas à proximité, constitue une position préférentielle pour obtenir des informations concernantdes embauches éventuelles ou le départ d’untel. Une assistante travaillant précédemment pourune antenne bruxelloise d’une grande entreprise francaise évoque de la sorte son recrutement :

« Je viens du lobby, moi j’ai travaillé un an pour une société francaise qui avait une repré-sentation à Bruxelles, et puis y a eu une fusion dans cette société, et comme j’avais un CDDje n’ai pas été reprise. Donc je cherchais à Bruxelles, et j’avais entendu parler, parce que lebouche-à-oreille marche énormément à Bruxelles, c’est assez sympa, c’est un microcosmeBruxelles. On m’avait dit que quelqu’un cherchait une assistante ou un assistant. J’ai envoyéma candidature, j’ai été recue et j’ai été prise. » (Entretien, juin 2003).

Si l’information issue du microcosme bruxellois est réellement déterminante pour son entréeau PE, son témoignage donne à voir combien celle-ci n’avait rien d’évident. Dans les situationsles plus favorables, le renseignement se double d’une recommandation d’un assistant du groupepolitique, du précédent assistant en poste voire, mais de manière beaucoup plus ponctuelle, d’undéputé rencontré lors du stage soit directement en ayant travaillé pour lui, soit lors de consultationsou d’activités politiques communes.

En conséquence, les postes d’assistant parlementaire ne sont pas facile d’accès. Ils concernentprincipalement de jeunes spécialistes des questions européennes qui ont surmonté plusieurs étapesde sélection plus ou moins formalisées. Le circuit privilégié étant de plus en plus d’être diplôméen études européennes d’une institution prestigieuse, de parler plusieurs langues, d’avoir fait unou plusieurs stages au sein des institutions européennes ou à défaut de groupes d’intérêt, et d’avoiracquis un capital technique européen et un capital social pertinent à Bruxelles. Si le droit d’entréedans cette fonction est élevé, le rite d’institution à une carrière dans l’action publique européennese poursuit au cours de l’expérience parlementaire.

2. Se conformer au marché du travail de l’action publique européenne

Assez fortement sélectionnés, spécialistes des questions européennes, les assistants au PEdes eurodéputés sont aussi des travailleurs de l’ombre dans une position de subordination et de

Socialist Youth [ECOSY]) ou d’autres associations paneuropéennes (mouvement européen, jeunes européensfédéralistes).

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relative précarité. Une position qu’ils acceptent d’autant mieux qu’elle favorise un « accélérateurde carrière » européenne.

2.1. Rester dans l’ombre pour être initié à l’espace politique européen

Évoluant sur deux sites à intervalles réguliers — une semaine sur quatre à Strasbourg etle reste du temps à Bruxelles — les assistants du PE s’occupent du bureau du député dansces deux villes et, partant de nombreuses tâches administratives et de secrétariat considéréescomme rébarbatives : téléphone, dactylographie, gestion de l’agenda, des visiteurs et du courrier,organisation de mailings, photocopies, classement de documents et du courrier, réservations dechauffeurs, restaurants et chambres d’hôtel, recherche de billets d’avions ou de trains du député aucomptoir de l’agence de voyage du PE. Parmi celles-ci, les plus prenantes en temps et en énergieet les moins appréciées sont d’une part, la réception et le tri de l’information et des multiplessollicitations recues quotidiennement par les eurodéputés (entre 50 et 400 courriers et courrielspar jour de groupes d’intérêt, journalistes, citoyens ou électeurs potentiels, étudiants en recherchede stage ou d’interviews, etc.), et d’autre part, l’organisation des visites de groupes invités parles parlementaires à Bruxelles ou à Strasbourg (collégiens, lycéens, militants locaux ou collèguespolitiques). Beaucoup d’assistants préféreraient se consacrer à des activités « plus intéressantes »,« moins basiques » et « moins chronophages », pour reprendre leurs termes.

Ces tâches plaisent d’autant moins aux assistants que les députés leur demandent une flexibi-lité horaire et une disponibilité importante, sans pouvoir leur promettre une sécurité de l’emploi.Dépendants de l’actualité, les députés doivent réagir promptement à un événement ou à uncommuniqué de presse. Par extension, ils exigent cette même réactivité de leurs collaborateurs enles sollicitant pour certains à tout moment, même le week-end, voire les vacances, par exemplepour la rédaction d’une note importante ou d’un communiqué de presse. En général, leur tempsde travail hebdomadaire dépasse nettement les 35 heures. La disponibilité demandée, les horaireslourds et malléables, la flexibilité, les déplacements à Strasbourg tous les mois, suscitent du stress,de la fatigue et ne leur laissent que peu de temps à consacrer à leur vie privée, rendant une viede famille peu évidente. Ce que ne favorise pas non plus leur avenir incertain, qui dépend ducalendrier politique, de la suite de la relation de travail avec le député et de son propre avenir (s’ilest réélu, s’il démissionne). Cette précarité, source d’anxiété, ne permet pas aux collaborateursd’élus de faire des projets à long terme. De facto, « c’est un travail sur lequel pèse toujours l’épéede Damoclès » commente une assistante.

La faible codification des tâches, la nécessaire polyvalence, voire la servitude, ne sont pastoujours bien vécues par ces jeunes diplômés à bac + 5, polyglottes. Cette forme de misère deposition est accentuée par le confinement dans les coulisses, « dans l’ombre du député » qui estseul sur le devant de la scène. Toute la difficulté pour les assistants est de rester à leur place etde ne pas se prendre pour l’élu. Car même s’ils peuvent se laisser griser par le travail dans uneinstitution prestigieuse, aux côtés d’un personnage public, et finalement se dire qu’ils sont un peudes députés, ils restent des subordonnés. Des assistants expliquent en ce sens :

« On tire les ficelles, les politiques n’existeraient pas sans nous, seulement on n’existeraitpas sans eux. Et donc, c’est très, très difficile de se dire : je dois rester à ma place. Être dansl’ombre de quelqu’un, ce n’est pas toujours simple. [. . .] Ca crée parfois des frustrationsdéfinitives, qui ne sont pas toujours simples à gérer. » (Entretien, avril 2003).

« Même dans des cas où on existe, vis-à-vis des autres députés on existe parce que notredéputé existe, faut pas se leurrer. » (Entretien, juin 2003).

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Placés dans l’ombre, ils existent à travers leur chef — « vous êtes l’assistant(e) de »pour reprendre une expression fréquemment recueillie — d’où une forme de perte ou detransfert d’identité. Cependant, si cette position est malgré tout fortement recherchée, c’estqu’elle permet de se familiariser avec l’espace institutionnel, d’acquérir toujours plus de res-sources décisives pour poursuivre une carrière dans l’action publique européenne, et d’y êtrereconnu.

Comme dans d’autres assemblées, les assistants parlementaires du PE peuvent participeraux opérations de communication (préparation de plans de communication, organisationd’événements, entretien des relations, gestion de son site Internet et rédaction d’articles pour salettre d’informations) et à la production parlementaire (rédaction de rapports, questions écrites,discours du député et autres amendements). Du fait notamment des spécificités de la délibérationeuropéenne (Costa, 2001), plus grande semble leur implication dans la réception des lobbyisteset les négociations avec d’autres députés, les fonctionnaires des groupes politiques ou descommissions parlementaires pour obtenir un rapport, un amendement ou un compromis, commel’explique cette assistante :

« Quand ma députée est en charge d’un rapport, mon activité consiste à prendre des contactset à conserver les contacts avec, à la fois, les responsables du dossier à la Commission, etles collègues socialistes à la commission parlementaire, pour être sûr que tout le mondeest d’accord sur ce sujet, et aussi les contacts avec les autres députés socialistes d’autresnationalités, d’autres commissions, d’autres partis, pour coordonner tout ca, avec le PPEaussi parfois pour rédiger des amendements de compromis. Donc, il y a toute cette partielà au niveau des contacts, des négociations, qui est importante. » (Entretien, juillet 2003).

Compte tenu de leurs compétences spécifiques, qu’elles soient techniques ou linguistiqueset de leur position à l’interface de divers flux d’informations internes et externes au PE,nombreux sont ceux qui jouent le rôle non seulement de passeur d’informations — en réali-sant pour leur chef diverses traductions (amendements, rapports parlementaires, discussions)et en le renseignant sur l’activité institutionnelle (ordre du jour, actualité, explications devote, développement des dossiers) —, mais aussi de conseiller sur les décisions à prendrequant aux rapports à saisir, les amendements à déposer et les lieux à investir. L’activitéauprès d’un eurodéputé permet donc d’observer le fonctionnement de l’espace politique euro-péen de l’intérieur, d’entrer en contact avec ceux qui préparent, prennent ou appliquent lesdécisions au niveau européen (chef d’État, ministres, commissaires européens, eurodéputés,fonctionnaires européens), de prendre part au jeu institutionnel, de recevoir une forme de délé-gation de son chef, et parfois de parler en son nom, bref d’être initié au travail politiqueeuropéen.

2.2. Un accélérateur de carrière européenne

L’avenir des assistants dépend certes de leur background universitaire et de leurs précédentesexpériences sous forme de stages ou d’activités militantes à leur arrivée au PE, mais aussi etsurtout de leur expérience d’assistant. Centrale dans le processus de décision européen — en lienavec la place croissante que les traités successifs ont donné au PE — cette fonction permet dedévelopper un ensemble de ressources pertinentes sur le marché des emplois dans l’action publiqueeuropéenne : des connaissances théoriques des institutions européennes (les règles, les procédures,les possibilités d’action, la production parlementaire) mais aussi pratiques (les manières de faire

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et d’être, la culture du compromis, la méfiance à l’égard de toute posture ethnocentrique12, lesroutines, les interprétations des règles, les hiérarchies non écrites), et surtout un carnet d’adressesdes personnes clés aux différents niveaux de la décision, notamment au PE. En outre, elle donneune légitimité sur les dossiers traités, et plus largement sur les questions institutionnelles. Lepassage par le PE agit comme un signe de reconnaissance auprès de différents acteurs situés aucentre ou à la périphérie de l’espace politique européen.

Si quelques assistants font fructifier leur expérience en restant auprès d’un ou plusieurs éluspendant plusieurs législatures, ce n’est là qu’une minorité (19 % des enquêtés présentent uneancienneté dans la fonction de plus de cinq ans, 7 % de plus de dix ans). Dans l’ensemble, ceuxqui quittent un poste d’assistant ne sont quasiment jamais au chômage, bien au contraire. Enfait, en postulant et en accédant, après l’expérience auprès d’un eurodéputé, à des positions supé-rieures à celles qu’ils occupaient avant, la fonction d’assistant au PE représente un accélérateur decarrière13 ; ce dont ont conscience les assistants en poste : « C’est un bon tremplin. Il y a beaucoupde monde qui peut frapper à la porte », résume tel enquêté (Entretien, mai 2003). Les ressourcesaccumulées au PE, avant tout rentables au niveau européen, incitent les assistants à envisager lapoursuite de leur carrière principalement à Bruxelles. Parmi les 45 assistants interrogés qui nesont plus en poste auprès d’un eurodéputé, des informations sur la poursuite de la carrière de 35ont pu être collectées : neuf ont réussi un concours pour entrer dans la fonction publique euro-péenne, dix ont intégré un groupe politique au PE, neuf, un groupe d’intérêt auprès des institutionseuropéennes, sept sont retournés au niveau national. Les orientations professionnelles à ce dernierniveau restent essentiellement celles des assistants les plus investis dans un parti, ils rejoignentdes postes politiques (cabinet d’un maire d’une grande ville, d’un président de région ou d’unministre) au sein desquels ils valorisent leurs compétences européennes en étant généralement encharge des dossiers européens et plus largement internationaux.

Plus précisemment, les concours de la Commission européenne forment la voie la plus presti-gieuse. La maîtrise de plusieurs langues, la socialisation européenne et « l’ouverture sur le monde »que les postulants mettent en avant, en font effectivement des candidats de premier ordre aux plushautes fonctions administratives européennes (Schnabel, 1998). En participant à l’activité législa-tive, ils se spécialisent sur certains thèmes et témoignent d’un niveau de connaissances plus élevéque les profanes des institutions européennes et même supérieure à tout généraliste de l’actionpublique. Qui plus est, par rapport aux jeunes diplômés en études européennes, ils sont familiarisésavec les « allants de soi » de l’institution. Un assistant, récent lauréat d’un concours de la Commis-sion, confie ainsi : « On a fait la preuve qu’on peut travailler dans une ambiance multiculturelle, etles gens savent ca » (Entretien, avril 2004). Par leurs connaissances techniques, leur habitude duprocessus institutionnel européen et leur socialisation européenne, beaucoup d’assistants semblentcorrespondre à l’image de l’eurofonctionnaire que se font les membres du jury. Régulièrement,des assistants réussissent donc un concours de la Commission et quittent leur député pour cettenouvelle affectation qui leur assure l’accès à la prestigieuse fonction publique européenne que lasécurité de l’emploi et le salaire rendent attractifs. Cependant, avec l’élargissement de l’Unioneuropéenne et la volonté de respecter un certain équilibre entre les nationalités parmi les fonc-tionnaires européens, cette offre paraît beaucoup plus favorable aux ressortissants des pays entrésrécemment dans l’Union qu’à ceux des « Quinze ».

12 Sur les contours d’une culture européenne, faite d’expériences communes, d’un style de vie, d’un langage commun :voir les perspectives anthropologiques (Abélès, 1998).13 Voir Pierre Mathiot et Frédéric Sawicki pour un parallèle avec les membres des cabinets ministériels (Mathiot et

Sawicki, 1999).

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Une autre poursuite de carrière un peu moins prestigieuse, mais tout de même matériellementet symboliquement recherchée par nombre d’assistants consiste dans l’accès à un poste de colla-borateur du groupe politique de leur député au PE, pour être le plus souvent en charge de questionsqu’ils ont précédemment traitées en tant qu’assistant. Ces agents temporaires exercent des activitésplus intéressantes (management et négociations) tout en bénéficiant d’une plus grande indépen-dance et d’un salaire accru. Néanmoins, ces postes étant plutôt rares, très convoités et politisés,l’accès y est donc peu probable sans une expérience parlementaire de plusieurs années, et surtoutsans appui politique et sans le soutien d’un ou plusieurs députés reconnus par l’assemblée.

Les divers groupes d’intérêt présents dans l’espace politique européen demeurent pour lesassistants le type de débouché le plus accessible. En rapport avec le système des intérêts plura-listes au sein de l’UE, l’accroissement des compétences du PE accordées par les traités successifset l’instauration des procédures de coopération et de codécision qui ont accru les potentialitésd’influence de l’assemblée de Strasbourg sur le système politique communautaire (Shackleton,2000), le lobbying auprès des eurodéputés est devenu plus diversifié. Toujours plus de repré-sentants de groupes d’intérêt aussi différents que des entreprises, des ONG, des associations,des syndicats, des cabinets de consultants mandatés par des groupes, des collectivités locales,contactent les eurodéputés afin de leur communiquer leurs positions et leurs argumentaires ettenter ainsi d’influencer leur décision ou encore d’accéder à des forums dans le but de publici-ser leur cause, d’articuler les intérêts et de se coaliser avec d’autres groupes (Shephard, 1999).Dans cette configuration, nombreux sont les groupes d’intérêt à souhaiter recruter des assis-tants, en raison de leur maîtrise de l’espace parlementaire, leur expertise et leur capital socialnon négligeable au sein des institutions européennes, notamment sur leurs sujets de spécialisa-tion au PE. En ce sens, tous les assistants recoivent régulièrement des propositions d’emploi degroupes d’intérêt. S’il ne s’agit pas du débouché le plus recherché, le lobbyisme à Bruxellespermet néanmoins de poursuivre une carrière européenne et de convertir l’expérience du PE,pour des assistants peu dotés en propriétés politiques, et dont les chances d’entrer dans la fonc-tion publique européenne se sont amoindries avec l’augmentation de la concurrence au niveaudes concours communautaires. Ce sont le plus fréquemment des assistants au profil « techno »qui n’ont pas (encore) réussi les concours communautaires ou qui ne pensent pas les réussir.Mais cette voie concerne également des assistants au profil « techno militant » — c’est-à-dire,recrutés par la voie militante tout en étant détenteurs de propriétés européanisées — dont lesressources politiques ne sont pas assez élevées pour entamer ou poursuivre une carrière poli-tique ou politico-administrative au niveau national, et qui, de ce fait, changent d’orientation. Lafonction d’assistant a d’ailleurs pu amener certains à la prise de conscience de leurs chancesobjectives insuffisantes pour percer en politique. La poursuite de la carrière au niveau euro-péen des militants technos s’effectue avec plus de chances auprès d’organisations proches deleurs députés et en concordance avec leur engagement militant : regroupements d’associations ouONG. Elle permet ainsi la conversion de leurs propriétés politiques dans des emplois de l’actionpublique.

3. Conclusion

L’étude des caractéristiques favorables à l’accès à des postes d’assistant parlementaire au PEainsi que de leurs pratiques, apprentissages et poursuites de carrière participe d’une sociologiedes auxiliaires de l’Europe politique. Le recrutement des assistants permet de mieux connaître lemarché des emplois de l’action publique européenne. Spécialisation sur les questions européenneset ressources linguistiques forment des compétences indispensables. L’enquête souligne égale-

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ment l’importance des stages et des missions dans les institutions ou les groupes d’intérêt afin des’inscrire plus durablement sur ce marché et pouvoir ambitionner d’avoir des positions plus inté-ressantes, tant du point de vue du travail que du salaire. Elle renseigne ensuite sur une spécificitédes postes de collaborateurs politiques : conseillers politiques et acteurs du jeu politique — au seind’un espace de pratiques parmi les plus prestigieux —, ils sont en même temps des travailleurs del’ombre dans une position de subordination marquée. L’adoption d’une perspective relationnellepermet d’évoquer une misère de position, un concept qui ne doit pas seulement être appréhendésous l’angle des facteurs économiques et culturels. Données incontournables dans la qualificationdes emplois, le salaire et le niveau de diplôme ne sont donc pas à eux seuls suffisants pour qualifierun emploi et l’identité au travail : à l’instar des assistants au PE, on peut être plutôt bien payéet diplômé tout en souffrant d’une misère de position. La plus ou moins grande acceptation decette situation ne doit pas faire l’économie d’une analyse en termes de rétributions de la positionprofessionnelle. L’enquête informe effectivement des effets de la socialisation professionnelledes assistants parlementaires du PE. Cet emploi, qui permet d’acquérir des ressources spécifiqueset de se spécialiser sur divers sujets, constitue une étape du rite d’institution à une carrière dansl’action publique européenne. L’européanisation liée au temps passé dans l’espace est d’autantplus prégnante que le processus d’institutionnalisation du PE suscite une institutionnalisationde la fonction d’assistant et leur spécialisation sur les questions parlementaires. Sur un marchédes métiers de l’Europe politique fortement concurrentiel, il s’agit véritablement d’une positionpréférentielle pour poursuivre une carrière européenne. Si l’accès aux métiers de l’Europe est,pour les assistants parlementaires au PE, une succession de sélections et de rites d’institution— au cours de la formation, puis lors de l’insertion professionnelle (stages et premiers emplois)—, il conviendrait de développer une sociologie des carrières européennes en train de se faire,en s’intéressant plus systématiquement à la formation à celles-ci, aux débuts de carrière, auxdifférents modes de socialisation scolaire et professionnelle, et à la circulation des savoirs et desacteurs dans un contexte d’internationalisation des élites. C’est là investir un terrain de rechercheencore en friche, mais non sans intérêt d’un point de vue sociologique.

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