Cass. crim., 18 oct. 2011 Contrefaçon et abus de confiance

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  • 5/11/2018 Cass. crim., 18 oct. 2011 Contrefa on et abus de confiance

    1N K 11-81.404 F-O

    SH 18 OCTOBRE 2011REJET

    M. LOUVEL president,

    REPUBLIQUE FRANCAISE

    AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

    LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINEllE, en sonaudience publique tenue au Palais de Justice a PARIS, Ie dix-huit octobredeux mille onze, a rendu l'arret suivant :

    Sur Ie rapport de M. Ie conseiller ARNOUlD, les observationsde la societe civile professionnelle CELlCE, BlANCPAIN et SOLTNER,avocat en la Cour, et les conclusions de M. I'avocatgeneral BOCCON-GIBOD ;

    Statu ant sur Ie pourvoi forme par:- M. Olivier Bachelet, partie civile,

    contre l'arret dela chambre de I'instruction de la cour d'appel de PARIS,5e section, en date du 16 novembre 2010, qui, dans I'information suivie, sursa plainte, contre personne non denornmee du chef de contrefacon, aconfirme I'ordonnance de non-lieu rendue par Ie juge d'instruction

    Vu Ie memcire produit ;

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    Sur Iepremier moyen decassation, pris de la violation desarticles L. 111-1 et L. 112-1 du code de la propriete intellectuelle, deI'artic/e 6, 1er, de la Convention europeenne des droits de I'hommeet des articles 591 et 593 du code de procedure pena/e, defaut demotifs et manque de base legale;

    "en ce que I'arret attaque a dit mal fonde I'appel de lapartie civile et contirme I'ordonnance de non-lieu en ce qui concerneI'infraction de contreiecon ;

    "eux motifs que la partie civile mentionne dans sonmemoire les elements qui, selon elle, reteve d'une originalitestructurelle " qu'il serait ainsi du cnoix d'aborder la notion"d'application de la loi pena/e dans I'espace" avant la notion"d'application de la toi plmale dans Ie temps", alors que d'autresouvrages I'envisagent dans I'ordre inverse; qu'iI apparait cependanta la cour qu'en I'espece, un tel cholx consistant a exposer Ie domainespatial dela loi penale avant d'en delimiter Iedomaine temporel est unesimple option qui ne present aucun apport particulier pourI'enseignement de la matiere et ne constitue pas une originalitesusceptible d'etre protegee, meme si cette option ne traduit pasexactement I'agencement du code penal trenceis ; que, par ail/eurs, iIapparait a la cour que Ie fait d'aborder la notion de "compticite" au seinde I 'element materiel de I'infraction, alors que les ouvragesI'envisagent en general dans la "determination de la personneresponsable"re/eve d'une des logiques naturel/es possibles pourdeve/opper ce theme qui trouve sa traduction meterietle dans I'acte decomplicite, et que tout enseignant ou etudiant penaliste pourrait opterpour une telle demarche dans son expose ou son raisonnement, sansque ce/apuisse etre considere comme original; qu'iI en est de memepour Ie traitement de la notion de "causalite IIau sein de I'etude des"fautes non intentionnel/es", les deve/oppements et les exemples surIe lien de causalite etent plus diversifies pour les infractions parimprudence que dans d'autres domaines, une telle tscon de traiter Iesujet etant sans doute pedagogique mais parfaitement bana/e dans Iecadre des etudes de droit, qu'iI s'agisse ou non de la preparation d'unexamen ou d'un concours et ne constitue pas une originalitesusceptible d'etre protegee ; que, par ail/eurs, Ie fait de traiter desinfractions par imprudence avant les infractions intentionnelles nereprend pas Ieschema du code penal mais constitue un cnoix inverse

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    des plus courants pour un enseignant, resultant de la seule logiqueconsistent a traiter en premier lieu des infractions les moins gravespour ensuite aborder les plus graves ou, du moins, celles ou Iecerectere intentionnel est Ie plus marque, que cette demarche neconstitue enaucun cas lamarqued'une oeuvre nouvelle ou originale ;conskierent en realite, sans pour autantque les merites de sonenseignement en soient dimlnuee, que la cour constate qu'aucunelementnepermet de retenir que Iecours deM. Bachelet presente unestructure marquant un effort creatif portant I'empreinte de lapersonnalite de leur auteur mais que, bien au contraire, iI adopte unplan classique qui correspond a sa mission depreparer aumieux lesetudiants a I'examend'entree auCRFPA; que, deplus, que les erreurstypographiques, Ie rappel d'ariicles de lois et leur libelle et lesreferences jurisprudentielles ne presentent pas un cerectered'originalite propre a assurer la protection du cours ; que, ainsi que Iecours oral de droit penal deM. Bachelet, qui s'est inspire d'ouvragessnterieurs de droit penal, qui reprend des textes de tot et desreferences de jurisprudence et reprend un cheminement classiqueainsi que des expressions couramment utiltsees pour permettre auxetuaients d'integrer les notions de droit penal necesseires dans Iecadrede leur preparation aux examens et concours, ne constitue pasen t'espece une oeuvre originale ; qu'en consequence, Ie delit decontretecon ne peut etre constitue en t'espec a /'egard deM. , ou de quiconque, la pariie civile ne pouvant seprevelotr de similitudes entre son cours et les deux ouvrages deM. qui ont e te publiees et ce,alors memeque lecours dontse prevaut lapariie civile a e te c re e enterieurement a la publication deI'ouvrage deM. ,ce qui n'est pas conteste ; qu'il y a lieu enconsequence de confirmer I'ordonnance de non-lieu en ce quiconcerne I'infraction de contreiecon ;

    "1) alors que la protection legale du.droit d'auteur estaccordee a toute creation originale, quels que soient son merite ou sadestination de sorte que la cour d'appel qui s'est tonaee sur ladestination pedagogique et sur I'absencedenouveaute et d'inventivitedu cours deM. Bacheletpour lui refuser la quaJited'soeuvre de t'esprita viole I'artic/e L. 112-1du codede lapropriete intellectuelle et prive debase legale sa decision ;

    "2) alors que I'originalite d'une creation lui contereautomatiquementla protection legale du droit d'auteur de sorte que la

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    cour d'appel qui a constate que la structure du plan du cours de droitpenal deM. Bache/et resultait d'options qui se demarquaient d'autresouvrages relatifs a /a matiere et du code penal ne pouvait, sans secontredire, lui denier la qualite d' oeuvre de l'espri: ;

    H3) alors que l'oriqinelite ti'une creation lui coniereautomatiquement laprotection de la loi de sotte que lacour d'appel quia fonde son refus de conterer la protection legale au cours deM. Bachelet en conskiemnt que sa demarche, qui ne se retrouve pasdans les autres ouvrages re/atifs a /a matiere, pourrsit etre adopteepar d'autres enseignants et etudiants a use ti'un motif purementnyootnetiou et prive de base /egale sa decision;

    "4) a/ors que tout jugement ou arret doit contenir /esmotifs propres a justifier la decision de sorle que la cour d'appel qui,pour refuser au cours de droit penal deM. Bachelet /a qualite d'-oeuvrede t'esprtt , a affirme que les references jurisprudentielles nepresentent pas un cerectered'originalite propre a assurer /a protectiondu cours JJ sans indiquer en quoi cette selection dejurisprudence nepouvait etre qualifiee d'originale, a meconnu son obligation demotivation ;

    H5) alors que laprotection legaledu droit d'auteur resuttde la seule originalite de I'oeuvre de sorle que la cour d'appel qui, pourrefuser cette protection legale au cours deM. Bachelet, a affirme quecetui-ci ne constitue pas une oeuvre nouvelle ou originale a use demotifs insuffisants et prtv de base legale sa decision" ;

    Attendu qu'il resulte de t'arret attaque et de pieces de laprocedure que M. Bachelet, enseignant et chercheur au sein de l'Universitede Paris-1, charge de travaux diriges de droit penal general et de procedurepenals, a porte plainte avec constitution de partie civile contreM. I pour contrefacon de ses droits d'auteurs relativement a uncours oral de droit penal destine aux etudiants de l'etablissernent priveCapavocat qui assurait la preparation a I'examen d'entree aux centresregionaux de formation professionnelle des avocats ; que, selon Ie plaignant,M. avait repris Ie plan, de larges extraits, des idees et desconcepts originaux dans la redaction d'un ouvrage intitule "CRFPAlENM,l'epreuve de droit-penal" et seta it attribue la paternite de I'oeuvre illicitementreproduite ; que, M. ayant ete entendu en qualite de temoin

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    assists, I'information a ete clotures par une ordonnance de non-lieu dont ila ete interjete appel par la partie civile;

    Attendu que, pour confirmer cette decision et dire que Ie delitde contrefacon n'est pas constitue, l'arret attaque retient que Ie cours oralde M. Bachelet, qui s'est inspire d'ouvrages anterieurs de droit penal et quireprend, outre des textes de loi et des references de jurisprudence, uncheminement classique ainsi que des expressions couramment utiliseespour permettre aux etudiants d'inteqrer des notions de droit penalnecessaires dans Ie cadre de leurs preparation aux examens et concours,ne constitue pas, en t'espece, une oeuvre originale ;

    Attendu qu'en I'etat de ces motifs, exempts d'insuffisancecomme de contradiction et relevant de son pouvoir souverain d'apprecier Iecaractere d'oriqinalite d'une oeuvre de I'esprit, la chambre de I'instruction ajustifie sa decision;

    D'ou il suit que Ie moyen doit etre ecarte ;Sur Ie second moyen de cassation, pris de la violation de

    I'article 314-1 du code penal et des articles 591 et 593 du code deprocedure penale, defaut de motifs et manque de base legale;

    "en ce que l'erret attaque a dit mal fonde I'appel de lapartie civile et contirme I'ordonnance de non-lieu en ce qui concerneI'infraction d'abus de confiance ;

    "eux motifs qu'en l'espece, Ie support de ce cours oral aete remis sur un support CD ROM a titre gracieux par M. Bachelet aM. , en dehors de toute relation contractuelle entre lesinteresses, et sans que la preuve ait ete rapportee qu'un usagedetermine et sans meme qu'une restitution a son proprietaire avaientete convenue ; qu'il apparait en effet que I'intention de M. Bacheletetait de faciliter /e fait pour M. de dispenser ses coursoraux durant la session estivale de Capavocat de 2003, compte tenudes relations amicales que ceux-ci entretenaient a I'epoqu ; qu'il n'ya des lors pas de charges contre M. , ni contre quiconqued'avoircommis les infractions denonces par la partie civile et qu'iI y alieu de confirmer I'ordonnance rendue Ie 3 novembre 2008 par /e juged'instruction du tribunal de grande instance de Paris disant n'y avoirlieu a suivre dans la procedure susvisee ;

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    1f1)alors que la contradiction de motifs equiveut a leurabsence, de sorte que la cour d'appel qui, pour ecerter la qualificationd'abus de confiance, a affirme qu'iI n'e pas ete etabli que la remise ducours de droit penal deM. Bachelet ait eu lieu pour satisfaire un usagedetermine, tout en relevant que I'intention de la partie civile etait defaciliter Ie fait pour M. de dispenser ses cours oraux en2003,a meconnu son obligation demotivation;

    1 & 2 ) alors que la condition prealable de I'abus de confianceest constituee par laseule remise d'un bien que/conque a charge deIe rendre ou d'en faire un usage determine de sorte que la courd'appel qui, pour ecarier I'existence de ce delit, a retenu que la remisede son cours de droit penal par M. Bachelet a M. a eu lieua titre gracieux, en dehors de toute relation contractuelle entre lesinteresses et sans qu'ait ete etablie une obligation de restitution, aajoute ala toi des conditions ignorees parelle et viole I'article 314-1 ducode penal" ;

    Attendu que, pour ecarter la qualification d'abus de confiance,l'arret attaque retient que Ie support materiel du cours de M. Bachelet a eteremis par celui-ci a M. en dehors de toute relation contractuelleentre les interesses et sans que la preuve ait ete rapportse qu'un usagedetermine ou une restitution a son proprietaire ait ete convenus ;

    Attendu qu'en prononcant ainsi, la chambre de I'instruction ajustifie sa decision;

    D'ou il suit que Ie moyen doit etre ecarte ;

    Et attendu que l'arret est requlier en la forme;REJETTE Ie pourvoi ;Ainsi juge et prononce par la Cour de cassation, chambre

    criminelle, en son audience publique, les jour, rnois et an que dessus ;Etaient presents aux debats et au delibere, dans la formation

    prevue a I'article 567-1-1 du code de procedure penale : M. Louvelpresident, M. Arnauld conseiller rapporteur, M. Le Corroller conseiller de lachambre;