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Des "vers échoïques" ou comment rendre une âme àÉchoAuthor(s): Perrine Galand-HallynSource: Nouvelle Revue du XVIe Siècle, Vol. 15, No. 2 (1997), pp. 253-276Published by: Librairie DrozStable URL: http://www.jstor.org/stable/25598853 .
Accessed: 15/06/2014 15:32
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Nouvelle Revue du Seizieme Siecle - 1997 - N? 15/2, pp. 253-276
DES ?VERS ECHOIQUES? OU COMMENT RENDRE UNE AME A ECHO1
ECHO, AVEC OU SANS AME
En 1582, Estienne Tabourot fait le point, au chapitre XVI de ses
Bigarrures, sorte d'encyclopedie de jeux rhetorico-poetiques, sur la forme litteraire de l'?echo?2:
Tu dois entendre qu'Echo, selon les fictions poetiques, estoit une Nymphe, amante de Narcissus, l'excellent en beaute: laquelle, nonobstant qu'elle fut
desdaignee, si est-ce qu'endurcie en son malheur, encore elle aima cet
orgueilleux, iusques au dernier soupir; & en fin, a force de crier, elle devint une voix, par la misericorde des Dieux, qui la transformerent en ceste
facon; de sorte que sa voix, accompagna iusques a la mort, ce miserable,
qui mourut de l'amour de soy-mesme; la fable est amplement descrite par Ovide, en ses Metamorphoses. Les philosophes, specialement Aristote en ses Problemes, tiennent que ce n'est qu'une repercussion d'air, qui se fait a cause de quelque rocher, concavitez, voutes ou grotes champestres, qui retiennent la voix, & la gardent d'eschapper, mais la renvoyent d'ou elle
vient; & n'estiment pas plusieurs que l'Echo puisse exceder sept syllabes. Tesmoin Lucrece, Sex etiam ac septem uidi loca reddere uoces?
[...] Or sans s'espancher plus avant, les Poetes ont trouve une gentille facon de poetiser, sur la repetition des mots, qu'ils ont surnomme Echo. Tu
1 Cet article developpe largement le texte d'une communication presentee a
l'Ecole Normale Superieure de Fontenay/Saint Cloud, lors d'une journee consacr6e aux Mythes de la vue et de Vou'ie: Argus et Echo (organisee par M. Gaily et M. Jourde, dans le cadre du seminaire de Lettres Moyen Age-Renaissance). Sur l'echo en general (theme et forme), voir les travaux de Lea Ritter Santini, ?La favola di Eco: lingue e
parole ?, Retorica e critica letteraria, a cura di L. Ritter Santini e E. Raimondi, Bologna, II Mulino, 1978, pp. 151-178; Linda Hutcheon, Narcissistic Narrative: the Metafictional Paradox, Waterloo, Canada, Wilfred Laurier Univ. Press, 1980; John Hollander, The
Figure of Echo: A Mode of Allusion in Milton and After, Berkeley-Los Angeles-Lon don, Un. of California Press, 1981 [offre plusieurs reflexions sur les effets de la figure ?echoi'que?].
2 Voir l'edition de F. Goyet, Estienne Tabourot. Les Bigarrures du seigneur des
Accords (Premier livre), fac-simile de l'edition de 1588, Geneve, Droz, 1986, 2 vol (le chap. XVI figure au vol. 1,158 et s. C'est moi qui souligne). Sur la datation des Bigar rures, voir vol. I, introduction, pp. XLVII et s.
3 Ovide, Met, III, 356 et s.; Aristote, Problemata, 889a6; Lucrece, De rerum
natura, IV, 577 (Goyet, II, p. 129). Ici s'enchainent plusieurs exemples du phenomene acoustique, tires de temoignages antiques ou modernes, y compris de l'experience per sonnelle de Tabourot.
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as en Erasme un gentil Dialogue, en ceste forme, comme encor autres infi nis qui sont imprimez [...]4 Les rimes couronnees, qu'on faisoit au temps passe, ne sont autre chose qu'un Echo sans ame, & une rime redoublee
Tabourot s'interroge ensuite brievement sur l'histoire de Vecho', son ami Pasquier lui ayant ecrit qu'a son avis le poete neo-latin flamand Jean Second etait l'inventeur du genre6, Tabourot remarque que plu sieurs poetes frangais de langue latine, comme Nicolas Barthelemy, ont publie des echos avant lui7. Quant aux echos en langue frangaise, le plus ancien aurait ete compose par Du Bellay8. Le chapitre s'acheve sur un echo de l'ami Pasquier, rapporte pour sa ?naifve grace ?9.
A Poccasion de cette breve apologie d'un genre mineur, l'auteur des Bigarrures reprend ainsi plusieurs lieux chers aux poetiques humanistes du XVIe siecle, notamment aux theories de la Pleiade dont il est grand admirateur: Vecho, fait de ?vers ingenieux?, qu'il soit
compose en latin ou en langue vulgaire, est presente comme une invention a la gloire de la France (161C); il temoigne, par comparai son avec la rime couronnee, ?Echo sans ame?, de la superiorite de l'humanisme sur l'epoque medievale; enfin, il se rattache, comme l'in
dique le debut du texte, a une double tradition erudite greco-latine, mythologique (Ovide) et naturaliste (Aristote), confirmant ainsi - a
4 Tabourot donne ici plusieurs exemples de poemes-echos, une epitaphe de son
pere Guillaume, sous forme d'un dialogue latin entre sa veuve et Echo, puis un poeme de Du Bellay (Recueil de poesie, XVII), puis deux autres echos francais cites par Sebillet dans son Art poetique.
5 Tabourot cite Marot (Chanson, III, rime couronnee: ?La blanche Colombelle
belle?), puis fournit des exemples de rime ?emperiere? (double echo en fin de vers: ? En grand remord mort mord ?) ou de ? couronne annexee ?(rime ou le redoublement ne porte pas sur la derniere syllabe: ?Les Princes sont aux grands Cours couronnez?)
qu'il emprunte a Sebillet (qui les a lui-meme empruntes a Fabri ou a Gracien du Pont;
Goyet, II, p. 131). 6
E. Pasquier, Les (Euvres, Amsterdam, Compagnie des Libraires associes, 1723, vol. 2, Lettres, II, 12,211 et s.
7 Jean Second, connu surtout pour ses fameux Baisers, est en effet l'auteur d'un
dialogue en echo: Sylvae, IV: Colloquuntur Viator et Echo, dont la l"e edition date de 1539. Nicolas Bartheiemy de Loches (1478-vers 1540), moine benedictin, appartenait au cercle de Bude; il a publie le Dialogus Ni et Echo dans ses Epigrammata; ce recueil n'est pas date, mais porte en marge mention de l'annee 1532 (Goyet, ed. des Bigar rures, t. 2, p. 131); une premiere edition etait parue en 1520, selon les etudes (fonda
mentales pour la poesie neo-latine) de D. Mururasu, La poesie neo-latine et la Renais sance des lettres antiques en France (1500-1549), Paris, Gamber, 1928 (vieilli) et de P. van Tieghem, La litterature latine de la Renaissance. Etude d'histoire litteraire euro
peenne, 1943, Slatkine Reprints, 1966 (tres precieux). 8
Voir supra, n. 4. 9
Poeme tire de La Main ou oeuvres poetiques faits sur la Main d'E. Pasquier, aux Grands Jours de Troyes 1583, ed. cit., vol. II, 1036-1037.
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DES ? VERS ECHOIQUES ? 255
l'instar de l'ensemble du recueil - la noblesse intrinseque des techno
paignia, ces ?jeux artistiques? doctes mis a la mode par les Alexan drins des le IIP siecle avant notre ere10. Laissant de cote la perspective nationaliste de Tabourot, je voudrais, dans un premier temps, esquis ser, en m'appuyant sur les travaux de Castorina, Pozzi et Liede11, une
synthese, non exhaustive, du developpement parallele des uersus
echoici et de la rime couronnee depuis l'Antiquite. Dans un second
temps, j'essaierai de definir ce qui, pour les defenseurs des technopai gnia, permet de distinguer, en matiere de poetique, technique sterile et
ingeniosite ?animee?, d'evaluer en somme de quoi se compose l'? ame ? de Vecho. La question, on le verra, rejoint finalement les pre occupations mimetiques et synesthetiques des Anciens (les liens entre
sens, intellect et poesie), et notamment l'epigramme d'Ausone intitu iee In Echo pictam, ? Sur un portrait d'Echo ?12.
HISTOIRE D'ECHO.
L'Anthologie Grecque. Contrairement a ce qu'insinue plaisam ment Tabourot, les Frangais n'ont pas invente Vechol Le premier echantillon du genre se trouve dans VAnthologie Palatine, XII, 4313; on le doit a Callimaque. II s'agit d'une epigramme a la fois erotique, sati
rique et programmatique, que je cite ici accompagnee de la spirituelle traduction de Robert Aubreton14:
' E%9a(pGL> to 7ioir|jj.a to icokXikov, o\)Se Je hais le poeme cyclique, et le chemin
Keteuecp me deplatt XOtipco tic noXkoix: c&Se tyepev qui porte ici et la les foules; Uiaeco Kai 7iepi<|)oiTOv epcojievov, ot>8' jedeteste aussi l'aime trop entourerjene
dtTio KpTivnc bois pas Kivco* aiKxaivco 7cdvTa toc 5r||x6aia. aux fontaines! J'ai horreur de tout ce qui
est public.
10 Sur les technopaignia hellenistiques et leur succes, voir, e.a., E. Castorina, ?I
poetae neoterici del IV secolo?, Giornale Italiano di Filologia, II, 1949, pp. 117-146 et 206-228.
11 Giovanni Pozzi, La parola dipinta, Milano, Adelphi Edizioni, 1981; Alfred Liede, Dichtung als Spiel. Studien zur Unsinnspoesie an den Grenzen der Sprache, Ber
lin, De Gruyter, 1963, tome 2. 12
Ep. X. J'utiliserai ici l'edition d'Agostino Pastorino, Torino, Unione Tipogra fico-Editrice Torinese, 1971.
13 II semble cependant qu'Euripide ait fait dialoguer, dans une tragedie perdue:
Andromede, PheroTne et Echo (voir la parodie d'Aristophane, dans Les Thesmopho ries, 1056 et s.).
14 Anthologie Grecque. Premiere partie. Anthologie Palatine, tome XI, livre XII,
Paris, Les Belles Lettres, 1994, p. 15.
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256 PERRINE GALAND-HALLYN
Avcavir], ox> 5e vai^i KaXAc KdXoc Lysanias, tu es vraiment joli, joli! Mais dAAoc 7ipiv ?i7cetv avant que j'aie pu le dire
xouxo o~a<t>(&c, r\%(& (Jrnal xic ?l|AXAoc clairement, un 6cho repond: ?Au lit, au
*?%ei?. lit... d'un autre amant?.
On connait encore, dans une autre tonalite, les epigrammes fune raires de Leonidas d'Alexandrie (Ier s. ap. JC) et de Gregoire de Nazianze (IVe s. p. JC), dont je me borne a donner ici la traduction:
Leonidas (VII, 548): Quel est done ce Damon l'Argien, inscrit sur ce tombeau? Est-ce done le frere de Dicaioteles? - Le frere de Dicaioteles. l'echo a-t-il prononce ces derniers mots ou est-ce vrai, c'est bien lui cet homme? - C'est bien lui, cet homme15.
Gregoire (VIII, 206): Tombeaux, tours elevees, montagnes et vous passants, pleurez sur ma sepulture, pleurez sur le destructeur de tombes; et que l'echo qui reproduit nos dernieres paroles reponde du haut de ces
rochers environnants: ? Pleurez sur le destructeur de tombes !?16
Enfin, un auteur, sans doute byzantin, dont nous ne connaissons que le
nom, Gauradas, a laisse, dans YAnthologie de Planude, l'epigramme descriptive CLII, ou un jeune homme amoureux s'adresse a une statue
d'Echo pour la prier d'interceder en sa faveur; c'est cette epigramme qui relancera, a la Renaissance, la mode de Vecho11:
A%(0 c|)iXa, jxoi ovyKaxaiveaov xi. "
Ti. Echo cherie, fais-moi plaisir - ... plaisir. '
Epti> KOpioKac d 6e |i' 6\) c|)iX?ir Oitet. J'aime une jeune fille, sans qu'elle aime -
elle aime.
npd^ai 5" 6 Katpoc Kaipov ox> (|)epei. Une occasion d'agir la chance ne l'ac "
Oepei. corde - l'accorde.
Tv Toivw a\)Td Xe^ov cbc ep(5. " '
Epd>. Toi, dis-lui done mon amour, qu'il est sur - eh! sur.
Koi Ttiaxiv am& KEp^dxcov xi) 56c " To Et les petits cadeaux, dis-lui que j'en
56c. donne - donne! ' A%(6, xi tanrcov, ,'r| 7io9o\) x\)xew; Echo, que manque-t-il, sinon ses
" Toxeiv. faveurs ? - mes faveurs!
On retiendra de ces quelques monuments de Vecho hellenistique la
variete des tons et des motifs; les poetes, selon une habitude alexan
drine dont les Metamorphoses ovidiennes donnent de multiples
15 Anthologie Grecque, premiere partie, Anthologie Palatine, tome V, livre VII,
Paris, Les Belles Lettres, 1960, p. 88 (trad. Waltz). 16
Anthologie Grecque, premiere partie, Anthologie Palatine, tome VI, livre VIII,
Paris, Les Belles Lettres, 1960, pp. 93-94 (trad. Waltz). 17
Anthologie Grecque, deuxieme partie, Anthologie de Planude, tome XIII, trad. R. Aubreton, Paris, Les Belles Lettres, 1980, p. 139.
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exemples, jouent aussi bien sur le phenomene naturel de l'echo que sur son incarnation mythologique. L'evocation thematique du prodige acoustique, situe dans un decor ad hoc stylise (stele, tombe eievee,
montagnes rocheuses), renforcee par l'imitation phonique, introduit, dans le contexte funeraire des poemes de Leonidas et Gregoire, mys tere ou pathetique; au contraire, la mise en scene de la Nymphe, sym bole de la poursuite amoureuse infructueuse18, intervient naturelle ment dans un contexte erotique, tandis que la tonalite des pieces de
Callimaque et Gauradas demeure ici ironique ou ludique. L'originalite des epigrammes alexandrines, quel que soit le registre
employe, consiste a dramatiser sous forme de dialogue la thematique de l'echo; le theme a pu ainsi generer les figures de mots, a des fins
mimetiques, a moins que la pratique rhetorique du redoublement
phonique, repandue chez les anciens19, n'ait trouve dans le mythe d'Echo une coincidence qui la legitime et meme l'? anime ?, au sens ou l'entend Tabourot20.
Les Latins. L'echo ovidien. La tradition latine fournit, quant a elle,
plusieurs exemples d'assonances ponctuelles, qui instaurent, par iconi cite et pseudo-etymologie, des liens entre certains concepts. Lhumaniste
Scaliger reieve ainsi, a propos de Vecho, certains jeux verbaux situes sur tout en fin de vers, plus proches en verite du principe de la rime redou ble que des uersus echoici helienistiques. II cite Horace (Sat, 1,3,121):
... cum dicas esse pares res ... puisque tu dis que ce sont choses semblables21,
18 Sur les differentes versions du mythe, voir le commentaire de F. Bomer aux
Metamorphoses d'Ovide, I-III, Heidelberg, Carl Winter Universitatverlag, 1969, p. 537
(comm. a III, 356 et s.): il s'agit d'une legende beotienne dont nous avons trace dans les
epigrammes grecques, mais aussi chez Pindare, Sophocle, Aristophane, Euripide. Ovide s'est certainement inspire de modeles hellenistiques aujourd'hui disparus. Les
legendes les plus anciennes evoquent l'amour (heureux ou plus souvent malheureux selon les variantes) de Pan pour Echo. Chez Longus (Daphnis et Chloe, III, 23), Pan, dedaigne par Echo, la fait mettre en pieces par des bergers, ne laissant d'elle qu'une voix. Le theme de l'amour desespere d'Echo pour Narcisse apparait pour la premiere fois chez Ovide, mais il est sans doute d'origine plus ancienne.
19 Sur les figures rhetoriques de la repetition voir H. Lausberg, Handbuch der
literarischen Rhetorik, Stuttgart, F. Steiner Verlag, 1990 (3*me ed.), ?? 608-664, notam ment la geminatio, ? 617 et Yannominatio ou paronomase (? 637), jeu pseudo-etymo logique.
20 La litterature hellenistique est aussi a l'origine d'une tradition de Vecho pasto
ral, initiee par le passage de Longus deja evoque, dont il ne sera pas question ici. Je renvoie a l'etude de Daniela Dalla Valle, ?Le theme et la structure de T'echo' dans la
pastorale dramatique francaise au XVIP siecle ?, Le genre pastoral en Europe du XVe au XVIF siecle, ed. CI. Longeon, Saint-Etienne, Presses de l'Universite, 1980.
21 Ed. L. Deitz, vol. I, Livres I et II, Stuttgart-Bad Cannstatt, 1994, p. 582.
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un vers que Murmelius22 attribue a Ausone:
Exercet mentes fraternas grata malis lis Elle ?prouve leurs &mes fraternelles, elle qui plait aux mechants, la que relle,
un vers anonyme a la terminaison semblable:
Femina dira uiri nex est et terribilis lis La femme est pour l'homme affreux tr?pas et redoutable querelle23,
et mentionne encore le premier vers d'une epigramme obscene, dont il affirme taire la fin par pudeur:
Quisnam clamor ? Amor. Quisnam furor ? Uror...
Quelles sont ces clameurs? Amour. Quelle est cette fureur? Mon ardeur24.
Au contraire, Ovide, en bon heritier des Alexandrins, file avec une
pertinence plus immediatement perceptible, tout au long des vers qu'il consacre a Echo, les figures de la repercussion: le nom de la nymphe apparait toujours en fin de vers25; assonances, alliterations, gemina tions, paronomases, polyptotes se multiplient: les vers 361 et 362, ter
mines tous deux par posset, offrent une sorte de rime; mais c'est le recit du dialogue entre Echo et Narcisse qui rappelle de plus pres les
epigrammes de Leonidas et de Gauradas: ... puer...
Dixerat:? Ecquis adest?? et?adest? responderat Echo.
Voce ? Veni? magna clamat; uocat ilia vocantem.
? Hue coeamus ? ait nullique libentius umquam Responsura sono ? coeamus ? rettulit Echo;
Ille fugit fugiensque ?manus complexibus aufer; Ante, ait, emoriar quam sit tibi copia nostri.? Rettulit ilia nihil nisi ?sit tibi copia nostri.?
... l'enfant... Avait dit: ?Qui done est pres de moi??, ?Moi? avait repondu Echo.
A grande voix ?Viens!? s'ecrie-t-il; elle, a son tour, appelle celui qui l'ap pelle.
22 Tabulae in artis componendorum versuum rudimenta, XII, 27 (ed. L. Deitz, ibi
dem). Vers attribue a Servius, De centum metris, IX, 23 (Grammatici Latini, ed. H.
Keil, Leipzig, 1856-1879,467) par Liede (ac, p. 133). 23
Ed. Deitz, p. 580. 24
Ibidem. On trouve ce vers (dans un ordre different) dans l'un des echos que s'attribue Pasquier (Recherches de la France, 737D: vers 2: Quis furor? UROR, ait:
Quis tibi clamor? AMOR). 25
Sauf au vers 359: Bbmer, p. 537.
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DES ? VERS ECHOIQUES ? 259
?Ici! r?unissons-nous!?, dit-il; a nul son elle ne pouvait Repondre plus volontiers: ?unissons-nous!? r6p6ta Echo;
Lui s'enfuit et s'enfuyant: ?Enleve tes mains qui m'enserrent; Plutot mourir, dit-il, que de m'abandonner a toi.? Elle ne repeta rien d'autre que ? m'abandonner a toi?26.
Comme dans VAnthologie, la virtuosite rhetorique se confond pleine ment ici avec l'exigence mimetique qui la justifie; en outre, le jeu rhe
torique, vu la coloration tragique du contexte mythique, debouche ici sur le pathetique: la similitude sonore des paroles de Narcisse et Echo, assortie, selon le principe meme de Vecho, d'un ecart de sens, repro duit avec exactitude la tension, tres baroque, entre attirance et repul sion, qui anime la scene. Le genre echoi'que se trouve ici entierement
legitime, plus encore que dans VAnthologie, puisque tout le passage ovidien fonctionne, dans la meilleure tradition callimacheenne, sur le mode etiologique, comme une ? revelation ? plaisante des origines du
phenomene acoustique. Une harmonie s'instaure entre le niveau micro-textuel ou Vecho, figure etymologique, devoile des relations
ontologiques ponctuelles, et la structure d'ensemble du texte qui affirme, en feignant de presenter comme authentique le tout premier echo, la validite du dialogue echoi'que; cependant, cette validite appa rait, du meme coup, meme chez un auteur alexandrin comme Ovide, nettement assujettie aux lois ?classiques? de la vraisemblance et de
Vaptum, de l'adequation de la forme au contenu. Ce sont les memes
regies du jeu que mentionnera, quelques siecles plus tard, le Seigneur des Accords.
Du Moyen Age a la Renaissance: de la rime couronnee a Vecho. II semble bien que le Moyen Age n'ait pas connu Vecho proprement dit, c'est-a-dire la combinaison du redoublement des sons avec la forme
dialogique. En revanche, les poetes latins pratiquent abondamment divers types d'annominatio21: utilisation de mots qui ne different que par une ou deux lettres (parit ?elle enfante?, perit ?elle perit?), ou
par la longueur d'une voyelle (par exemple, a propos du peche origi nel: malum ?la pomme ?, malum ?le malheur ?), polyptote, ou encore
rapprochement de termes semblables mais de sens different:
Semper amare uelim, si quid nihil insit amari.
26 Vv. 379-392. Je suis de pres la traduction de G. Lafaye (Paris, Les Belles
Lettres, 1980,6*me ed.), pp. 81-82. 27
Sur 1'importance de cette figure au moyen age, voir Les arts poetiques du XIV et du XHT siecle, par E. Faral, Paris, Champion, reed. 1971, pp. 94 et s., auquel je reprends ces quelques exemples.
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260 PERRINE GALAND-HALLYN
Les poetes francais s'adonnent, eux, a la rime couronnee, au moins des la fin du XIIP siecle28; les Grands Rhetoriqueurs en cultiveront diverses especes; Marot la pratique encore et on en trouve un exemple dans la Delie de Sceve29. Dans le Recueil d'arts de seconde rhetorique edite par Langlois, le traite de Molinet (1493) decrit la rime couronnee
?de base? sous l'appellation ?rhetorique a double queue?, oil ?la
penultime et la derreniere sillabes ont pareille termination ?, comme
par exemple:
Guerre, la pulente lente, Qui tout en sa tasse tasse.. .30
Le traite anonyme intitule Art et science de rhetorique (vers 1524
1525), qui reproduit en partie celui de Molinet, reprend la meme defi nition de la ?double queue? (? 28, p. 283), mais ajoute trois para
graphes ou il distingue des variations possibles: la rime ? couronnee
par double unisonance?, qui releve de Pequivoque (? 72, p. 318): Par guerre n'ont les pupilles plus piles, Vefves ont perte aux longz desroys des roys...
la ?ryme double couronnee a double unisonance? (? 73, p. 319): Par discors cors ja pris en recordz corps Creux garniz nidz ou as mes amys mys En consors sortz tant qu[e] en ressors sors
Hors joliz lictz non sentans delictz lis...
et la ?ryme couronnee par equivocques femelles en triple uniso
nance?(?74,p. 320): Quand du gay bruyt d'Amours souvent vent vente, Et l'amant, qui son cueur servant vend, vante
S'amour, lors font telz cas, venuz nudz, nue
Trouble, doncq en plaisir Venus n'euz nue, Car elle trop ceulx telz goustans temps tempte...
Pierre Fabri, en 1521, repete a son tour Molinet et complete ainsi la
definition de la rime couronnee:
Rythme couronnee se faict, quant les deux derniers termes de fin de ligne sont equivoques, ou que la penultime syllabe, ou plusieurs du plus, se
reprennent pour composer ung aultre terme et d'aultre signification en fin
28 Liede, o.c, p. 133, cite un poeme de Giles Le Vignier: ?Amors ki le me
comande Mande...?. 29
231. Voir F. Goyet, ?L'heritage des Grands Rhetoriqueurs dans Delie?, Dix
etudes sur la 'Delie' de Maurice Sceve, ed. F. Charpentier, 1987, Collection de
l'E.N.S.J.F, pp. 11-38. 30
?16, dans Recueils d'arts de seconde rhetorique, ed. Langlois, Slatkine Reprints, 1974, p. 225.
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DES ? VERS ECHOIQUES ? 261
de ligne que il n'estoit au terme precedent [...] exemple. Moulinet31: ? Guerre a faict maint chatelet let...?[...] Apres il est une aultre plus basse
couronnee, qui ne se faict pas sur les dernieres syllabes couronnees de leurs semblables syllabes, mais apres les syllabes couronnees ilz adioustent une
syllabe ou plusieurs qui portent aultre fleur en ladicte couronne. L'lnfor tune: ? Ces vers icy sont es cours couronnez.. .?.32
II faut attendre Gracien Du Pont (1539)33 pour voir apparaitre une
description de Vecho, qui figure parmi les diverses sortes de rimes cou ronnees. A sa suite, Thomas Sebillet (1548)34 le definit ainsi:
Echo est aussi une espece de couronnee: mais en cette-ci la couronne est hors de la mesure et composition du vers: autrement repetant ou une ou
plusieurs syllabes memes de son, en ou sans equivoque: comme en cet epi gramme :
Reponds, Echo, et bien que tu sois femme, \
Dis verite. Qui fit mordre la fame ? I Qui est la chose au monde plus infame ? [
^emme
Qui plus engendre a l'homme de diffame?J [...]
UArt poetique de Sebillet oppose, comme on sait, les visees ? anciennes ? de l'ecole marotique aux theories ?modernistes? de la
Pleiade35; c'est pourquoi Tabourot, qui lui emprunte Vecho cite ci-des sus (auquel il confectionne une reponse moins misogyne), ainsi que la chanson III de Marot (rimes couronnees), le designe par cette peri phrase: ?la fontaine ennemie de l'Olive sacree ?36. Surtout, l'auteur des Bigarrures prend nettement parti en faveur de la Pleiade et de Du
Bellay, auteur selon lui du premier echo fran?ais, lorsqu'il inverse la classification donnee par Sebillet37, faisant, lui, de Vecho le genre dont la rime couronnee, la rime ? emperiere ? (triple couronnee) et la ? cou ronne annexee ?38 deviennent les especes. II est manifeste que, pour Tabourot, la superiorite de Vecho lui vient de sa coloration humaniste et savante, qui lui semble se rattacher, avant meme Du Bellay, aux pra
31 Temple de Mars, 1475.
32 Le grand et vrai art depleine rhetorique, 1521, ed. A. Heron, Rouen, 1889-1990
(Slatkine Reprints, 1972), Second livre: Poetique: pp. 45 et s. 33
Art et science de rhetorique metrifiee, Toulouse, 1539 (Slatkine Reprints, 1972: il est aussi le premier a nommer ?emperiere? la triple couronnee).
34 Art poetique francais, ed. Goyet, Traites de poetique et de rhetorique de la
Renaissance, Livre de Poche, 1990, pp. 152 et s. et notes pp. 182-183. 35
A ce sujet, voir l'introduction synthetique de F. Goyet, Traites... 36
UArt poetique frangais, paru sans nom d'auteur, etait couramment attribue a un certain Charles Fontaine ou La Fontaine: Goyet, ed. des Bigarrures, t. 2, p. 130.
37 Goyet, Ibid., p. 131. et introd., 1.1, p. XXIX.
38 Voir ci-dessus: il s'agit de la derniere sorte de rime couronnee definie par
Fabri, ou le redoublement syllabique ne porte pas sur la derniere syllabe du vers.
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262 PERRINE GALAND-HALLYN
tiques des neo-latins frangais. En fait, il faut remonter encore de
quelques decennies en arriere, jusqu'au Quattrocento florentin, pour situer la resurgence de Vecho.
Redecouverte de Vecho par Ange Politien. Avant 1460, VAnthologie Grecque etait restee fort peu connue en Italie, meme si, depuis Boccace au moins, certains textes circulaient39. Apres l'afflux des refugies byzantins, VAnthologie de Planude, au complet, fut importee en Italie, ou elle fut editee pour la premiere fois par Jean Lascaris (Florence, 1494)40. L'humaniste florentin Ange Politien eut successivement pour
maitres, a partir de 1471, au Studio, deux de ces erudits byzantins, Andronic Calliste et Demetrios Chalcondylas qui etaient en possession de ce texte. Calliste preta vraisemblablement un manuscrit a Politien
qui transcrivit un choix d'epigrammes dans le Ms. Vat. gr.. 1373 (appar tenant a sa bibliotheque), que nous avons conserve41. Chalcondylas, a
partir de 1475, aida sans doute l'humaniste a approfondir ses recherches. Dans la Premiere Centurie de ses Miscellanea, recueil paru en 148942, divise en cent notules ou Politien elucide des legons obscures relevees chez les auteurs anciens, le Florentin commente, au chapitre
XXII, un vers de Martial (II, 86,3), qui critique les uersus echoici:
Nusquam Graecula quod recantat Echo
Jamais un miserable echo imit6 du grec ne redit mes syllabes.43
Politien montre que ce vers a ete mal compris par le philologue Domi zio Calderini44, qui Pinterprete comme un refus du poete latin d'utili
39 Voir J. Hutton, The Greek Anthology in Italy to the Year 1800, Ithaca-New
York, Cornell Studies in English XXIII, 1935; S. Prete, ?L'Epigramma nel Quattro cento. Osservazioni?, Ecumenismo della Cultura, vol. Ill, L'umanesimo e I'ecume nismo della cultura, a cura di G. Tarugi, Firenze, Olschki, 1981, pp. 223 et s. et Ida
Maier, Ange Politien. La formation d'un humaniste, Geneve, Droz, 1966, ?T.H.R. ?
n? LXXXI, pp. 113 et 114, n. 61. 40
Reeditee en France pour la premiere fois par Josse Bade, Paris, 1531. LAn
thologie Palatine ne fut connue qu'au tout d6but du XVIF s. Sur l'histoire de YAntho
logie Grecque, voir l'introduction de P. Waltz, Anthologie Grecque, Premiere partie, Anthologie Palatine, tome I (livres I-IV), Paris, Les Belles Lettres, 1929.
41 Ff. 16r-63v. Voir I. Maier, Les manuscrits d'A. Politien, Geneve, Droz, 1965,
?T.H.R.? n? LXX, pp. 286 et s. 42
Opera omnia, Lyon, Gryphe, 1536, vol. I, pp. 551-552. On trouve aussi plu sieurs references a des auteurs de VAnthologie dans la Seconde Centurie des Miscella
nea, plus tardive (restee inedite jusqu'a l'6dition de V. Branca et M. Pastore Stocchi, Firenze, Olschki, 1978).
43 Trad. H. J. Izaac, Paris, Les Belles Lettres, 1969 (3*me ed.), p. 80.
44 1447-1478. Calderini fut secretaire pontifical de Sixte IV. II est l'auteur de tres
nombreux commentaires sur des auteurs latins et grecs. Politien, qui lui doit pourtant beaucoup en matiere de philologie, le critique fr6quemment dans ses Miscellanea.
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DES ? VERS ECHOIQUES ? 263
ser des termes grecs dans ses poemes45. L'auteur des Miscellanea,
apres avoir remarque que Martial use bien, en realite, d'hellenismes dans ses poemes, s'appuie sur sa connaissance de VAnthologie de Pla
nude, pour suggerer qu'il est plutot question ici du genre des vers
echoi'ques: Aut nos igitur coniecturafallit, aut innuuntur uersiculi quidam, sicfacti, utin extremis responsitationes ex persona ponantur Echus, sententiam explentes, & morem tuentes illius ultima regerendi. Quales etiam uernaculos ipsi quos
piamfecimus, qui nunc a musicis celebrantur, Henrici modulaminibus com
mendati, quosque etiam ab hinc annos ferme decern Petro Contareno Veneto
patricio non inelegantis ingenii uiro, mire turn desideranti, nonnullisque aliis literarum studiosis dedimus.
Ou bien done notre intuition nous trompe, ou bien il est fait ici allusion a
certains petits vers ainsi formes qu'en leur finale sont placees des
reponses4* provenant du personnage d'Echo, qui donnent la clef du pro bleme47 et preservent son habitude de renvoyer les derniers mots. De tels
vers, nous en avons aussi fait nous-meme certains en vernaculaire, qui sont a present frequemment pratiques par les musiciens, ayant ete confies aux
melodies d'Henri48; ces vers, il y a dix ans environ, nous les avons offerts aussi a Pietro Contarini, patricien de Venise, homme d'un esprit non
depourvu d'elegance, qui les desirait alors prodigieusement, ainsi qu'a quelques autres personnes eprises des belles lettres.
Politien cite alors l'epigramme de Gauradas, dont il procure la traduc tion latine que voici:
Echo chara mihi assona49 aliquid. -
Quid? Amo puellam, ilia uero me non amat. - Amat. Faciendi uero tempus occasionem non patitur.
- Patitur. Tu igitur ipsi die quod amo. - Amo. Et fidem ipsi pecuniarium tu da. - Tu da. Echo quid reliquum ? an voto potiri ? - Potiri.
Quant a Vecho vernaculaire diffuse par Politien vers 147950, il figure en
45 Domitius autem graeculam accipit Echo uocem graecam insertam, quasi se
neget Martialis graecis uspiam uerbis uti, in suis epigrammatis, quod contra deprehendi tur.
46 Neologisme humaniste. Hoven {Lexique de la prose latine de la Renaissance,
Leiden, Brill, 1994, p. 313) le trouve chez Bude au sens de ? consultation juridique?. 47
Litteralement? qui complement la phrase ou la pens6e ?: c'est Echo qui, consul tee comme un oracle, apporte la solution.
48 Enrico Isaac, maitre tres repute de la Cappella di san Giovanni, compositeur
qui travailla pour Laurent de Medicis et mit en musique plusieurs poemes de Politien
(A. Bonaventura, ?I1 Poliziano e la musica ?, La Bibliofilia, X. XLIV, 1941, pp. 114-131; F. D'Accone,?Heinrich Isaac in Florence?, Musical Quarterly, X. XLIX, 1963).
49 On notera l'aisance et la fidelite de la traduction, en relevant la coquetterie de
l'emploi du verbe assonare, justement applique a Echo par Ovide, Met., Ill, 507(sur la mort de Narcisse): plangentibus adsonat Echo.
50 Et peut-etre compose anterieurement: voir I. Maier, La formation..., pp. 243 et
s., qui cite l'epigramme de Gauradas et sa traduction latine.
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264 PERRINE GALAND-HALLYN
tete des Rispetti spicciolati, dont il constitue l'une des pieces les plus raffinees51:
Che fai tu, Ecco, mentr'io ti chiamo? - Amo. Ami tu dua o pur un solo ? - Un solo. E io te sola e non altri amo. - Altri amo.
Dunque non ami tu un solo ? - Un solo.
Questo e un dirmi: io non t'amo. - Io non t'amo.
Quel che tu ami amil tu solo? - Solo. Chi t'ha levata dal mio amore? - Amore. Che fa quello a chi porti amore? - Ah more52!
La definition donnee par Politien dans les Miscellanea et illustree par ses epigrammes latine et italienne revele une conception de Vecho
proche de celle qu'exprimera Tabourot. II s'agit bien d'un divertisse
ment53, uersiculi, mais d'un divertissement relativement difficile et erudit - un technopaignion pourvu de regies: l'humaniste s'interesse
moins, dans son analyse, aux jeux formels de reduplication (en fait, il n'en dit mot), qu'a la forme dialogique (enigmatique) et a la thema
tique obligatoirement liee au mythe d'Echo, qui assurent au genre
esprit (sententiam explentes) et pertinence (morem tuentes illius). II insiste egalement sur le rapport de cette forme avec la musique et sur
le succes obtenu par ses propres tentatives aupres d'un public docte et raffine: patricio non inelegantis ingenii uiro... nonnullisque aliis litera rum studiosis. Saverio Orlando remarque que Politien confere a son echo en langue vulgaire une tonalite plus simple et plus spontanee, avec des rimes attendues, qui estompe les traits erudits du poeme54; l'humaniste, comme a son habitude, cherche sans doute ainsi a rehaus ser la tradition italienne et populaire par la contamination de modeles
antiques, dans un esprit qui n'est pas etranger a celui qui animera la Pleiade.
Echo en France. II est probable que Vecho fut importe en France
par le biais des Miscellanea, oeuvre a grand succes publiee a Paris par
51 Voir l'edition des Poesie italiane, introduzione di M. Luzi, testo e note a cura di
S. Orlando, Milano, Biblioteca Universale Rizzoli, 1976, p. 193 et n. Sur cette epi gramme italienne, voir aussi S. Orlando, ?Alcuni componimenti 'non impegnati' di
Angelo Poliziano?, Giornale Storico della Letteratura Italiana, 144,1967, pp. 318-323 et V Branca, Poliziano e I'umanesimo dellaparola, Torino, Einaudi, pp. 60 et 69 n. 14; cf. egalement Olga Pugliese, ?Eco e la poetica delle Stanze?, Validitd perenne delTUmanesimo, a cura di G. Tarugi, Firenze, Olschki, 1986, pp. 349-357 [l'echo comme methode de composition du poeme des Stanze, plus que comme theme].
52 Allusion a la mort de Narcisse.
53 Politien choisit de composer des echos sur le mode ludique uniquement, mais
il y est incite, ne disposant apparemment que de Gauradas pour modele. 54 Art. cit., p. 319.
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DES ? VERS ECHOIQUES ? 265
Josse Bade et Jean Petit des 1511, largement diffusee ensuite dans les nombreuses renditions des Opera omnia55. Erasme a constitue un
maillon important de cette chaine de resonance. Le colloque Iuuenis et Echo (mentionne par Tabourot) parut en 1526; il est probablement anterieur a celui de Nicolas Bartheiemy, malgre ce qu'en dit Tabou rot56. Bien qu'il s'agisse d'un texte en prose, le dialogue erasmien cor
respond bien a la definition de Vecho donnee par Politien, puisqu'il met en scene la nymphe qui, interrogee par un jeune homme sur ce
que doit ?tre son but dans l'existence, repond en reprenant les deux dernieres syllabes de chaque question. Ces reponses, en outre, sont formulees tantot en latin, tantot en grec; dans ce dernier cas, Erasme
met en application les regies de prononciation du grec qu'il fixera dans son Dialogus de recta latini graecique sermonis pronunciatione
(1528)57. Malgre la presence d'Echo, le theme central du dialogue n'est pas l'amour, mais les belles lettres et le lien entre humanisme et
morale; la fin du dialogue annonce, par son persiflage, le Ciceronia nus. En voici un court extrait58:
I. Fuerone beatus, si perseueraro in bonis Uteris ? E. Eris. I. Sed quae res dabit, ut ads it pietas ? E. Aetas. I. Decern iam annos aetatem triui in Cicerone.
E. ^Ove. I. Vnde tibi subit me asinum dicere ? E. E re.
[...] I. Non placet igitur is, qui se per omnem uitam tantum in hoc torqueat, ut
fiat Ciceronianus ? E. "Avo-uc.
J.H. Serai-je heureux, si je persevere dans les belles lettres ? E. Tu vas l'Stre. J.H. Mais qu'est-ce qui fera qu'en sus je sois pieux ? E. D'dtre vieux. J.H. Voila dix ans deja que je passe ma vie sur Ciceron. E. Anon! J.H. D'ou vient que d'&ne tu me traites ? E. Des faits!
55 Paris, 1512,1519; Lyon, 1528-1550, etc.
56 Le dialogue de Barthelemy figure dans l'edition augmentee de 1532, non dans celle de 1520: voir supra, note 7. On sait du reste que Barthelemy etait un grand admi rateur d'Erasme (Mururasu, o.c, p. 82).
57 Prononciation caracterisee par l'iotacisme.
58 Colloque luuenis et Echo (1526), dans Opera omnia, vol. Ill, Colloquia, ed.
Halkin, Bierlaire, Hoven, Amsterdam, North Holland, 1972, p. 558.
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266 PERRINE GALAND-HALLYN
J.H. Done il ne te plait pas, celui qui se torture toute sa vie pour devenir ciceronien ?
E. Cretin/59
Politien a exerce sur l'oeuvre erasmienne une influence considerable, qui n'est peut-etre pas toujours assez reconnue; les Adages, par exemple, doivent beaucoup aux Miscellanea, ainsi qu'a la lettre de dedicace du recueil d'epitres de l'humaniste florentin60. Jeu aux serieux enjeux, a l'evidence, le colloque entre Iuuenis et Echoest pro bablement redevable de son theme comme de sa forme a l'humaniste florentin61. C'est Politien qui a dedenche, dans ses echanges episto laires avec le Romain Paolo Cortesi, la fameuse querelle du ciceronia
nisme, en rejetant l'imitation exclusive du grand orateur romain; Erasme lui a, par la suite, emboite le pas, comme en temoigne, avant meme le fameux Ciceronien, le present dialogue. L'usage conjoint ici du latin et du grec peut apparaitre comme un hommage rendu a l'? inventeur ? du genre de Vecho, ou encore comme un desir de rivali ser avec celui que ses contemporains, meme byzantins, consideraient comme le meilleur helieniste de son temps. Politien etait egalement renomme pour sa verve satirique, et affectionnait un burlesque savant, rabelaisien avant la lettre62. II n'aurait sans doute pas desavoue
l'esprit de repartie de ce colloque, qui va justement, contamine avec une facetie du Pogge, suggerer a Rabelais la fameuse scene en echo du Tiers Livre ou Panurge demande a Pantagruel s'il doit ou non se
marier63.
L'AME D'ECHO
II est temps, apres ce resume (bien lacunaire) des aventures
cVEcho, de reconsiderer les elements susceptibles, selon Politien et
Tabourot, de conferer a cette forme une ?ame? ou en tout cas la
59 Vecho est evidemment un genre pratiquement intraduisible. Je propose done
sans scrupule une traduction tres libre, plus proche de l'esprit que de la lettre! 60
Je tache de preciser certains aspects de cette influence dans une etude, actuel lement en cours de redaction, sur la reception de Politien en France.
61 L'edition de reference se borne a proposer comme modele certaines ?amu
santes chansons polyphoniques de l'epoque ?, renvoyant a J.C. Margolin, Erasme et la
musique, Paris, 1965, p. 69. 62
Voir I. Maier, La formation..., pp. 180 et s. 63
Ch. IX. La scene semble avoir pour point de depart cette replique du colloque erasmien: I. Erit auspicatum, si uxorem duxero ? E. Sew, etc. Rabelais s'est aussi sou venu de la Facetie de Poggio Bracciolini (il ne s'agit pas d'un echo) intitulee De duobus in re pecunaria litigantibus, ou un juge-girouette, alternativement influence par les
repliques de deux plaideurs, change constamment d'avis.
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DES ? VERS ECHOIQUES ? 267
seduction d'une elegante pensee, et qui l'opposent a la virtuosite de la rime couronnee.
Uapologie du Technopaignion chez Ausone. Je recourrai, pour commencer, a l'un des premiers defenseurs des jeux poetiques helie
nistiques, le poete Ausone, bien connu des humanistes64. Ausone est lui-meme l'auteur d'un recueil intitule Technopaignion*5, fonde sur
des combinaisons de monosyllabes ou de lettres de l'alphabet66; il jus tifie sa pratique dans deux textes liminaires. Dans sa Preface au pro consul Pacatus, le poete insiste d'abord, selon l'usage, sur la modestie de son oeuvre, qui repose seulement, selon lui, sur des concatenations, et ne comporte ?ni eloquence, ni conception d'ensemble, ni projet, ni
reprise de parole, ni conclusion ou autre procede rhetorique ?67; mais il cite ensuite un aphorisme de Virgile {Georgiques, IV, 6): ?En mince
sujet, labeur mais gloire non mince ?, qui situe son recueil dans la tra
dition alexandrine de l'humilite sublime68. II fait appel au jugement de son lecteur, suggerant que c'est a lui de percevoir comme il le faut l'in teret reel de son labeur. Puis il conclut en ces termes:
In quibus ego, quod ad usum pertinet, lusi; quod ad molestiam, laboraui. Libello Technopaignii nomen dedi, ne aut ludum laboranti aut artem cre
deres defuisse ludenti.
Avec ces vers, si l'on considere l'utilit6, je me suis amuse: mais si l'on envi
sage les efforts accomplis, je me suis donne du mal. J'ai octroye" a ce petit livre le titre de Technopaegnion pour que tu ne croies pas que, me donnant du mal, j'aie manque d'amusement, ni que, m'amusant, j'aie manque d'ha bilete.
La lettre qui suit, adressee a son ami Paulin de Nole69, confirme que la
preface citee ne se reduit pas a un pur eioge de la gratuite, de l'art pour l'art, comme pourrait le laisser croire l'expression quod ad usum per tinet. Ausone y qualifie bien a nouveau, au debut, son Technopaignion d'? inutile opuscule d'un loisir desceuvre ?, inertis otii [...] inutile opus cuum, mais il cultive ensuite le paradoxe et la devinette:
64 Voir S. Prete, ? Ausonio nella testimonianza dei primi umanisti?, Interrogativi
dell'Umanesimo, vol. II, Etica, Estetica, Teatro, onoranze a Niccolo Copernico, a cura di G. Tarugi, Firenze, Olschki, 1976, pp. 53 et s.
65 Ed. Pastorino, pp. 630 et s. Voir aussi l'etude de Castorina.
66 Le recueil ne comporte pas &echo proprement dit.
67 ... Nullus facundiae locus est, sensuum nulla conceptio, propositio, redditio, conclusio aliaque sophistica, p. 630.
68 Sur cette conception du sublime dans la petitesse, voir le chapitre que je
consacre a Ausone dans Le reflet des fleurs... Ce meme vers de Virgile sert a Tabourot a justifier sa traduction latine du Fourmy de Ronsard (1565, vv. 15-17: Goyet, t. I, p. XXXII).
69 Pp. 632-633.
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268 PERRINE GALAND-HALLYN
Rem uanam quippe curaui: exigua est et fastiditur: inconexa est et implica tur: cum sit aliquid, uel nihil deprehenditur. Laboraui tamen, ut haberet aut historicon quippiam aut dialecticon: nam poeticam uel sophisticam leuita tem necessitas obseruationis exclusit. Ad summam non est quod mireris, sed
pauci litteris additis, est cuius miserearis neque aemulari uelis.
A une tache vaine, assurement, j'ai porte" mes soins: elle est maigre, et pour tant elle parvient a vous d6gouter; elle est d6cousue, et pourtant elle vous
entortille; bien qu'il y ait la quelque chose, rien pourtant ne s'y trouve. J'ai oeuvre cependant, pour y mettre quelque notion d'histoire ou de philosophic; quant a la 16gerete poetique ou rhetorique, les contraintes a observer l'ont exclue. En somme, il n'y a rien la qui puisse susciter l'admiration, mais, si l'on
ajoute quelques lettres, plutot la commiseration et le refus de l'imitation.
Ausone ironise, on le voit, meme ici, et son discours entend le contraire de ce qu'il enonce. Si ses propres jeux d'esprit l'ont absorbe a ce point, ce n'est pas a cause de leur virtuosite contraignante (neces sitas obseruationis); le poete joue sur le terme leuitas, qui peut etre
pris dans un sens positif: ?legerete gracieuse?, mais aussi negatif: ?frivolite?, et insinue que, justement, le formalisme labprieux de ses vers va de pair avec un certain poids historico-philosophique (labo raui... ut haberet aut historicon quippiam aut dialecticon). La clef de lecture delivree a Paulin est contenue dans Vannominatio finale: mire r is/miser ear is, emblematique de l'ecriture du recueil. Au lecteur de decider si l'oeuvre sera ou non substantifique. Les defenseurs des tech
nopaignia, quels que soient leurs topoi de modestie, ne font jamais Papologie d'une technique sans ame; le culte de la forme doit generer a sa maniere un contenu edifiant ou emouvant.
Variations etprofondeurs de Vecho. Si Vecho, aux yeux de Tabourot des Accords et d'autres, est superieur a la rime couronnee, c'est qu'il leur semble preserver le poete du risque d'inanite. Non que les ?cou ronnes ? des rhetoriqueurs soient, en realite, depourvues de sens ou
d'effets profonds. Au contraire, Francois Cornilliat a montre, par
exemple, dans une analyse d'un poeme de Molinet: ?Guerre a fait maint chastellet let?, toute la ?fonction emotive ? de ces rimes, leur
pathetique, qui constitue ?une reponse [...] du style a l'irruption du
desordre, a la destruction d'une norme ?70. Cornilliat insiste en outre sur le fait que l'usage de la rime couronnee ? ne suit aucun schema pre determine sur le plan du sens [...], n'implique pas de rapport signifiant stable entre les parties du discours qu'elle rapproche?71. Les Rhetori
70 Celui que cite Fabri, precisement. Voir la belle these de F. Cornilliat, ? Or ne
mens ?. Couleurs de Veioge et du blame chez les ? Grands Rhetoriqueurs ?, Paris, Cham
pion, 1994, pp. 668. 71
Ibidem.
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DES ? VERS ECHOIQUES ? 269
queurs ne cedent pas mecaniquement a la tentation d'etablir des equi valences grace aux figures pseudo-etymologiques, ils cherchent au
contraire, en preservant l'? homogeneite du procede sonore ?, mais en variant ?la structure syntactico-semantique ?, a ? eviter la monotonie et maintenir l'expressivite de la figure ?72.
II est indeniable, cependant, que le caractere ponctuel, microcos
mique, de figures de reduplication telles que les rimes couronnees,
engendre un risque plus grand de gratuite, de vacuite. Les assonances de la ? colombelle belle ? de Marot soulignent la grace intrinseque de l'oiseau auquel est compare la dame, mais nulle isotopie ne cimente la rime couronnee a l'ensemble de la chanson. La pratique d'un echo
systematiquement relie au mythe du meme nom, telle que la congoi vent, a la suite des Alexandrins, Politien et Tabourot, legitime d'em
blee, comme on l'a vu, tous les jeux sonores du poeme, puisqu'ils sont censes mimer fidelement l'eiocution de la nymphe maudite. En outre, la structure dialogique, ou alternent questions/reponses, impose, pour que Vecho soit reussi, la recherche d'un sens coherent qui sous-tende non seulement chaque vers (ou echange), mais meme l'ensemble du texte. II en va done de Vecho comme des differents types d'epi grammes; les poemes sont construits selon un schema de base (Echo dialogue avec un jeune homme), a partir duquel chaque poete s'essaye a varier. Le theme dominant est celui de l'amour, conformement au
mythe originel, mais on trouve quelques derivations. Voici une
esquisse de typologie fondee sur les textes deja evoques et sur
quelques autres73:
Thematique erotique
CALLIMAQUE (A.P., XII, 43): l'amant s'adresse a l'aime, Lysanias, pour le compli menter, mais c'est Echo qui lui repond.
GAURADAS (AP/., CLII): l'amant d'une autre jeune fille dialogue avec Echo, la
priant d'interceder pour lui aupres d'elle.
[OVIDE (Met., Ill, 356 et s.): Narcisse, qui n'aime pas Echo, dialogue avec elle.] POLITIEN {Rispetti, I): l'amant d'Echo dialogue avec la nymphe qui lui oppose son
amour pour Narcisse.
SECOND, Jean (Sylua IV: Viator et Echo): l'amant d'une autre jeune fille se promene dans les bois et consulte Echo (experte en la matiere) sur les souffrances amou reuses ; il conclut que mieux vaut 6tre sage.
DU BELLAY (? Dialogue d'un amoureux et d'Echo ?, Recueil de Poesie, XVII): idem: Du Bellay imite manifestement Second.
PASQUIER, Ep., II, 8, Fabulla: imitation avouee de Second dans Recherches..., 131 C: l'amant (infidele) d'une autre jeune fille se promene dans les bois et consulte
72 Ibid. 73
II ne s'agit bien sur que d'un sondage tout approximatif.
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270 PERRINE GALAND-HALLYN
Echo sur la raison (justifiee) de ses souffrances amoureuses. II conclut que mieux vaut etre fidele.
Autre ep. latine cit?e dans les Recherches..., 737: le/'e po6tique dialogue avec Echo amoureuse de Narcisse et lui propose de seconder ses amours.
TABOUROT (Bigarrures, XVI): epitaphe de son pere Guillaume: la veuve de Guillaume Tabourot se promene dans les bois et consulte Echo sur ses souffrances. Elles chantent ensemble les louanges de Guillaume.
MARBEUF, Pierre de, ?Silvandre se promenant dans les forets, s'entretient avec
l'Echo, de ses Amours ?, Recueil de vers, 162874: l'amant d'une autre jeune fille se
promene dans les bois et consulte Echo (experte en la matiere) sur les souffrances
amoureuses; elle lui represente les dangers qu'encourt son Sme.
Autres thematiques
* echos metatextuels
CALLIMAQUE (A.P., XII, 43): Vecho erotique cite ci-dessus sert en realite de meta
phore a la poetique callimacheenne, qui fuit le tout-venant.
ERASME (Iuuenis et Echo): le jeune homme dialogue avec Echo et lui demande des conseils existentiels et culturels.
PASQUIER, Echo frangais tire de La Main: leye poetique dialogue avec Echo au sujet de la gloire litteraire.
* la mort
LEONIDAS (A.P. VII, 548): le passant, desireux de connattre l'identite du defunt, s'adresse a un interlocuteur inconnu (lui-meme ou le lecteur), mais c'est Echo qui lui repond.
GREGOIRE DE NAZIANZE (A.P., VIII, 206): le mort, desireux de venger la pro fanation de sa sepulture, s'adresse a Echo et lui suggere sa reponse.
TABOUROT (Bigarrures, XVI): voir ci-dessus, dans les echos erotiques.
* la satire
SEBILLET, echo satirique: leye poetique dialogue avec Echo au sujet des defauts des
femmes.
TABOUROT (Bigarrures, XVI, r6ponse a Sebillet): leye poetique dialogue avec Echo au sujet des qualites des femmes.
On constate sans surprise que la thematique amoureuse domine
jusqu'a l'age baroque, sous l'influence de la legende d'Echo, selon un
schema esquisse par Politien (apres Gauradas) et developpe par Jean
Second. A l'interieur de cette thematique, les tonalites varient, du
badinage adopte par Gauradas, Politien et Pasquier, a l'aimable epi taphe composee par Tabourot pour son pere, en passant par les reve
ries melancoliques de Jean Second et Du Bellay. La tendance satirique peut aussi l'emporter, comme chez Sebillet ou Tabourot, tandis que le theme erotique disparait; ou bien encore l'echo, voix venue d'ailleurs, se trouve seulement associee a la celebration funeraire. Que ce genre
74 Anthologie de la poesie amoureuse de l'age baroque, 66. G. Mathieu-Castellani,
Livre de Poche, 1990, pp. 315-316.
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DES ?VERS ECHOIQUES ? 271
? manieriste ? (au sens ou il exhibe sa maniere) soit egalement, parfois, le suppport d'une reflexion metatextuelle comme chez Callimaque,
Erasme ou Pasquier, rien d'etonnant non plus. En outre Vecho, narcis
sique par excellence, incite, plus que toute autre forme litteraire, a une
pratique de l'imitatio-emulation, de l'intertextualite, dont le pheno mene acoustique, chez maint poete bucolique, apparait souvent comme l'embieme75. Dans tous les cas, l'instance principale d'enon ciation est leje poetique; la persona du poete ou de l'amant se trouve confrontee a une interlocutrice fictive, qui lui renvoie essentiellement une sorte de sagesse oraculaire incluse dans l'essence meme du lan
gage ; le dialogue avec Echo, personnage-miroir, remplit finalement la meme fonction que l'apostrophe au tribunal ou au theatre: il permet au poete d'adresser indirectement a son lecteur une meditation plus ou moins grave sur les mots, l'amour et la mort.
Pingere sonum. L'echo n'est done pas un bavardage creux. Mieux
encore, ce genre semble concentrer en lui les principales qualites que les theoriciens antiques et humanistes exigent du langage poetique.
II est notable que l'epigramme de Gauradas figure, au sein de VAn
thologie de Planude, dans le corpus des ?Epigrammes descriptives?, ou elle introduit quatre autres poemes consacres a Echo (CLIII, CLIV, CLV, CLVI). Deux de ces pieces, composees l'une (CLV) d'un seul vers, l'autre (CLIII) d'un distique, se bornent a evoquer la voix de la Nymphe. Les deux autres epigrammes decrivent, elles, des statues
d'Echo, dont l'une est placee en pleine nature, dans un site rocheux
qui produit le phenomene acoustique76, l'autre dans le vestibule d'un
temple de Dionysos dont les parois aussi repercutent les sons77. Dans la premiere de ces pieces, le descripteur s'adresse au passant et com
mente a la fois l'oeuvre d'art et le phenomene acoustique qu'elle incarne aliegoriquement, en rappelant la legende de la nymphe; il conclut ainsi: ? v. 4:... Toutes tes paroles, ecoute-les puis va-t-en!?,...
"Oggoc ^yeic, TrxOxa kAaScdv ^anxQx. Le poete, qui passe rapidement du theme de la vue (v. 1: ? C'est Echo la rocheuse78 que tu vois ici...?
'Hxco mxpr\eaaav bpac) a celui de l'oui'e (v. 2: ?qui renvoyant les
sons, en chantant les repete,? dvxiTimov (j)6oyYTyv He\inaXiv
75 Sur cette symbolique de l'echo chez Politien, voir Le reflet des fleurs..., chap.
VII, pp. 544-545 et l'article cite d'O. Pugliese. 76
CLIV. 77
CLVI. 78
L'adjectif 7i?Tpiieaaav est ici employe a triple sens: il designe a la fois le mate riau de la statue (seule indication sur elle), le site ou elle est erigee, et les habitudes de la nymphe, eprise des solitudes rocheuses.
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272 PERRINE GALAND-HALLYN
d8o|Li8vr|v, etc.), puis congedie le passant-lecteur, sans plus decrire la
statue, suggere ainsi le peu de valeur de celle-ci79. De meme, dans
l'epigramme CLVI, le poete, qui fait cette fois parler la statue, fait excusivement allusion a la particularity elocutoire de la nymphe (et, a travers elle, a l'acoustique du lieu), sans rien mentionner d'autre, a
propos de l'oeuvre d'art, que l'endroit oil elle est placee: ?je demeure dans le vestibule de Bacchus ?80. Une sorte de hierarchie semble ainsi s'instaurer entre trois niveaux de representation de l'[echo]: l'enon ciateur (le je poetique ou la nymphe) recourt a l'intertexte legendaire et c'est son actualisation personnelle du mythe d'Echo qui constitue finalement l'essentiel de l'epigramme; ce bref recit mythologique occulte done partiellement ici 1'evocation du phenomene acoustique qui environne la statue et se profile derriere la personnification legen daire. \Jekphrasis de la representation plastique d'Echo est, comme on l'a dit, tout a fait negligee. La recherche d'une creation litteraire
originale parait done l'emporter sur les preoccupations etiologiques ou artistiques, le chant du poete domine a la fois la voix de l'echo et la vision du sculpteur.
On reconnait, dans cette hierarchisation ludique, le debat hellenis
tique de l'emulation mimetique entre les arts, resume par la formule Vt pictura poesis, qui interessera tant les humanistes81. Le theme forme de Vecho favorise ce debat comme le montre deja l'epigramme
X d'Ausone82:
IN ECHO PICTAM
Vane, quid affectas faciem mihiponere, pictor, Ignotamque oculis sollicitare deam ?
Aeris et linguae sum filia, mater inanis
Indicii, uocem quae sine mente gero. Extremos pereunte modos a fine reducens
Ludificata sequor uerba aliena meis. Auribus in uestris habitopenetrabilis Echo:
Et si uis similem pingere, pinge sonum.
SUR UN PORTRAIT D'ECHO
Vanite! Pourquoi tenter de me donner un visage, peintre, Et tourmenter une d6esse dont nul ne connait l'apparence?
D'Air et de Parole je suis la fille, mere d'un vain
79 Cf. la remarque d'Aubreton, p. 273, n. 8 de la p. 139.
80 Cf. encore Aubreton, ibid., n. 5 de la page 140.
81 Sur ce debat, voir F. Hallyn, ?Illusions referentielles?, Le sens des formes.
Etudes sur la Renaissance, Geneve Droz, 1994, ?Romanica Gandensia? n? XXIII, pp. 97 et s.
82 Ed. cit., pp. 772-773.
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DES ? VERS ECHOIQUES ? 273
Indice, moi qui possede une voix sans posseder l'esprit. Les dernier es mesures sur lesquelles meurt la phrase, je les rappelle
Et me jouant, je poursuis les paroles d'autrui de mes paroles. C'est dans vos oreilles que j'habite, insinuante Echo:
Et si tu veux faire une peinture ressemblante, peins un son!
L'epigramme d'Ausone affirme, une fois de plus, la suprematie de la
poesie, ?peinture parlante?, sur la peinture, ?poesie muette ?83. Le cas d'Echo est extreme, cependant, et la victoire parait ais6e: quoi de
plus facile, pour un poete, que de mimer une voix ? Le genre de Vecho,
pourtant, semble permettre d'aller plus loin. Ce n'est sans doute pas un hasard si l'on retrouve chez Pasquier Vecho associe a une epi gramme d'inspiration ausonienne, qui pose, comme dans VAntholo
gie, le probleme de la mimesis poetique des sons:
De Echo Stephani Paschasii, Echus Ausonianae aemula u
Vox ego ? Non; saltern uocis sum nata ? Nee istud: At soleo uocem, corpus ut umbra, sequi.
Vmbra igitur uocis? Minime: sed uocis imago Quam manus artificis fingere nulla potest.
De me hoc iudicium facio, lex istaperennis Naturae, penitus me nihil esse iubet.
Tu tamen adscribis nobis uitamque genusque, Id tu cum facias, cur ego uelle negem ?
Mi pater est aer, mater sine corpore, uita Tarn breuis, ut simul et nascar et inteream.
Sur YEcho d'Estienne Pasquier, une Echo 6mule de celle d'Ausone
Moi, une voix? Non; suis-je du moins nee d'une voix? Pas davantage: Mais j'ai pour habitude, ayant pour corps une ombre, de poursuivre la voix.
Suis-je done l'ombre d'une voix? Pas du tout: mais l'image d'une voix
Que la main de nul artiste ne peut representer. Voici comment je me juge, cette loi eternelle
De Nature m'impose ne n'6tre rien du tout.
Toi, pourtant, tu m'assignes une vie et une origine, Et puisque tu le fais, pourquoi le refuserais-je?
J'ai pour pere l'air, une mere sans corps, ma vie Est si breve qu'au meme instant je nais et je meurs85.
Cette epigramme qui suit immediatement Vecho en fran?ais deja signale (?Pendant que seul dans ces bois...?), se presente plaisam
ment, comme l'indique le titre, comme son commentaire. Echo s'y adresse au poete et, alors qu'elle constate l'impuissance du peintre a
83 Cf. Politien, Oratio in expositione Homeri, Opera omnia, Lyon, Gryphe, 1546,
t. Ill, p. 90. 84
Ed. cit., t. II, La Main..., 1037. 85 Le topos est issu du De rosis nascentibus, longtemps attribue" a Ausone: una
dies aperit, conficit una dies, et fut largement imite au Moyen Age et apres.
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274 PERRINE GALAND-HALLYN
lui donner une forme (fingere), remercie l'auteur de l'epigramme fran
gaise de lui donner ?une vie et une origine?. Comment Echo retrouve-t-elle son ame dans Vechol
Les vers echoi'ques reposent sur une expression synesthetique qui les rend particulierement aptes a produire l'effet cVenargeia, c'est-a dire l'illusion de la presence tant vantee par les rheteurs et les poetes antiques et humanistes86. En premier lieu, comme dans tout poeme, Passemblage des mots genere un sens litteral qui se transmet a la
phantasia du lecteur, double de signaux intertextuels qui renvoient le meme lecteur a toute une tradition legendaire anterieure, susceptible de completer l'epigramme et de restituer en effet a Echo une ? ori
gine? (genus), un cadre, une psychologie et meme un corps87; ensuite, la ? vie ? est rendue a la nymphe grace a cette mimesis toute specifique de sa voix que produisent les redoublement en fin de vers et qui explique les liens privileges que le genre entretient avec la musique88.
Mais Vecho releve aussi des carminafigurata89, et en ce sens les auteurs de vers echoiques apparaissent litteralement capables de peindre le
phenomene de la repercussion. Les editions humanistes attachent un
soin tout particulier a la typographic des echos: les reponses de la
nymphe, qu'elles soient placees en fin ou, plus rarement, en debut de vers, sont nettement distinguees du reste du texte, soit (banalement, comme pour tout dialogue) par un alinea precede du nom du locuteur, soit par un espacement qui les repousse en colonne dans la marge, soit enfin par des capitales qui les font ressortir. Dans l'exemple cVecho
satirique donne par Sebillet et complete par Tabourot, la reponse d'Echo: ?femme?, valable pour toutes les questions posees, ne figure qu'une fois, isolee a droite, mise en facteur commun de tous les vers
grace a une accolade (?la couronne est hors de la mesure et composi tion du vers ?)90. Dans ce technopaignion particulierement accompli, le lecteur est ainsi a meme d'imaginer, d'entendre et de voir l'?echo?, tandis que le poete se flatte de prouver, une fois de plus, sa superiorite sur les autres arts.
86 Sur ce concept, voir mon livre Les yeux de l'eioquence. Poetiques humanistes de
Vevidence, Orleans-Caen, Paradigme, 1995, ?L'Atelier de la Renaissance?. 87
Ovide, intertexte essentiel auquel se referent tous les echos tardifs et huma
nistes, raconte: Corpus adhuc Echo, non uox erat... et decrit l'amaigrissement pro
gressif de ce corps (vv. 396 et s.). 88
Politien rappelle que ses echos sont frequemment chantes; Vecho de Du Bellay fut lui aussi mis en musique par Clement Janequin en 1557 (ed. Joukovsky-Aris, p. 353). Vecho reieve du chant polyphonique, tres pratique a la Renaissance.
89 Cf. l'etude de Pozzi, La parola dipinta.
90 Voir supra, p. 261.
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DES ? VERS ECHOIQUES ? 275
Le genre de Vecho, divertissement non depourvu, comme dit
Tabourot, ? d'une naive91 grace ?, est a prendre au serieux, comme du reste les autres technopaignia adoptes par les humanistes, car il reieve d'une poetique un peu particuliere de Vingenium, dont rend bien
compte le paratexte composite des Bigarrures92. L'oeuvre se situe dans la tradition des Miscellanea ou des Silves antiques et de leurs imita tions humanistes; on reconnait par exemple trace de la preface du livre I des Silves de Stace, dans Padresse d'Andre Pasquet (alias
Tabourot lui-meme?93) au lecteur: insistance sur la legerete et l'inge niosite du propos, sur son caractere plaisant; enumeration des grands auteurs qui se sont amuses eux aussi a ?traicter des frivoles & legeres matieres?94; dans la ? Preface du Seigneur des Accords ?, on retrouve
plusieurs topoi paratextuels du meme ordre; en affirmant que le titre de Bigarrures a ete choisi pour sa simplicite95, Tabourot imite les pre faces de Pline PAncien et d'Aulu-Gelle; en suggerant, non sans desin
volture, que l'oeuvre est adaptee a tous les gouts96, il retrouve l'imper tinence dont fait preuve Politien, dans la lettre dedicatoire de son recueil epistolaire97; en affirmant qu'il a ecrit cette oeuvre a ses
moments perdus, aux heures que les jeunes gens consacrent d'ordi naire aux loisirs futiles98, il se souvient sans doute de Du Bellay, qui imitait lui-meme, dans l'Avertissement des Jeux Rustiques, le Pro
Archia de Ciceron (13). Cette spontanea plus apparente que reelle, est fondee sur une erudition qui affleure en maints endroits et fournit une sorte de furor rhetoricus; cette nouvelle forme d'inspiration, liee a
l'impregnation (hexis), a l'exercice et a l'art d'improviser dans la
variation, avait ete definie jadis par Quintilien et Stace, puis revendi
quee par les poetes de tradition alexandrine, avant d'etre redecou verte par Politien99; tout en s'eioignant de la mystique ambigue du
91 Latinisme: ?innee ?. Le terme est recurrent dans la Defense et illustration...,
lorsque Du Bellay veut evoquer le ? genie ?
linguistique ou poetique. 92
Les poemes liminaires, l'avant-propos, l'adresse au lecteur, la preface sont tous
places sous ce signe. Voir Goyet, I, pp. 11,14,16: cf. les ?vers ingenieux? de Vecho (ch. XVI).
93 Goyet, II, p. 3.
94 Id., I, p. 16 E.
95 /d.,I,p.25C-D.
96 Id.,l,p.24.
97 Opera omnia, ed. aldine de 1498, p. 3.
98 Goyet, ibid.
99 Sur ce type d'ecriture, voir mon livre Le reflet des fleurs. Description et meta
langage poetique d'Homere a la Renaissance, Geneve, Droz, 1994, ?T.H.R.? n? 283,
chap. IV, V et VII.
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276 PERRINE GALAND-HALLYN
furor platonicien, elle fait part egale a la virtuosite et aux forces crea
trices du subconscient. C'est bien ainsi que Tabourot souhaite voir
comprendre son art. Un poeme liminaire de son parent, Theodecte
Tabourot100, celebre joliment la variete melee de son ecriture, qu'il compare, metaphore macrobienne reprise par Politien et Ronsard101, a un paysage chatoyant, l'un de ces arriere-plans miniaturises des
peintres flamands; ce monde bigarre en trompe-l'ceil, qui semble vu
d'en-haut par un artiste a la fois savant et inspire102, offre au spectateur un plaisir qui est aussi meditation, et dont Theodecte souligne la gra vite:
Ton livre est du tout semblable, De tous endroits aggrSable, Descrivant folastrement Un si bizarre argument,
Sans toutesfois te distraire Des actes plus seneux
Qui passent devant tes yeux, T'accordant a la nature De chasque temperature Qui remarque en ton labeur Le profit & la douceur.
Universite de Valenciennes. Perrine Galand-Hallyn. Institut universitaire de France.
ioo prere cadet ou second fils de l'auteur: Goyet, I. p. 2.
101 Les yeux de l'eioquence, ch. 7.
102 Le topos du regard poetique qui survole le monde est ici ravivS par une com
paraison avec l'art de la perspective, inspiration et science s'allient: ?Le tout par
Mathematique, Bien reduit selon l'Optique, Au subject d'un petit poinct, Qui les fait paroistre loing; Se monstrant a nostre veue, Comme si dans une nue, Nous regardions des la haut...?.
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