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Entrainement - séduction au théâtre.docx

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Classe de Première [ ]

ENTRAINEMENT - SUJET TYPE BAC

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Objet d’étude : Théâtre (texte et représentation)

TEXTE A : Molière, Dom Juan, 1665TEXTE B : Marivaux, La Double inconstance, 1723TEXTE C : Alfred de Musset, On ne badine pas avec l’amour, 1834

TEXTE A - Molière – Dom Juan ou le Festin de pierre

(1665 - date de la première représentation, publication posthume)

Dom Juan, un séducteur qui collectionne les femmes et les abandonne, avoue à son valet Sganarelle, la conception qu’il a de l’amour

Acte I, scène 2

DOM JUAN.- Quoi ? tu veux qu’on se lie à demeurer au premier objet qui nous prend, qu’on renonce au monde pour lui, et qu’on n’ait plus d’yeux pour personne ? La belle chose de vouloir se piquer d’un faux honneur d’être fidèle, de s’ensevelir pour toujours dans une passion, et d’être mort dès sa jeunesse, à toutes les autres beautés qui nous peuvent frapper les yeux : non, non, la constance n’est bonne que pour des ridicules, toutes les belles ont droit de nous charmer, et l’avantage d’être rencontrée la première, ne doit point dérober aux autres les justes prétentions qu’elles ont toutes sur nos cœurs. Pour moi, la beauté me ravit partout, où je la trouve ; et je cède facilement à cette douce violence, dont elle nous entraîne ; j’ai beau être engagé, l’amour que j’ai pour une belle, n’engage point mon âme à faire injustice aux autres ; je conserve des yeux pour voir le mérite de toutes, et rends à chacune les hommages, et les tributs où la nature nous oblige. Quoi qu’il en soit, je ne puis refuser mon cœur à tout ce que je vois d’aimable, et dès qu’un beau visage me le demande, si j’en avais dix mille, je les donnerais tous. Les inclinations naissantes après tout, ont des charmes inexplicables, et tout le plaisir de l’amour est dans le changement. On goûte une douceur extrême à réduire par cent hommages le cœur d’une jeune beauté, à voir de jour en jour les petits progrès qu’on y fait ; à combattre par des transports, par des larmes, et des soupirs, l’innocente pudeur d’une âme, qui a peine à rendre les armes, à forcer pied à pied toutes les petites résistances qu’elle nous oppose, à vaincre les scrupules, dont elle se fait un honneur, et la mener doucement, où nous avons envie de la faire venir. Mais lorsqu’on en est maître une fois, il n’y a plus rien à dire, ni rien à souhaiter, tout le beau de la passion est fini, et nous nous endormons dans la tranquillité d’un tel amour ; si quelque objet nouveau ne vient réveiller nos désirs, et présenter à notre cœur les charmes attrayants d’une

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conquête à faire. Enfin, il n’est rien de si doux, que de triompher de la résistance d’une belle personne ; et j’ai sur ce sujet l’ambition des conquérants, qui volent perpétuellement de victoire en victoire, et ne peuvent se résoudre à borner leurs souhaits. Il n’est rien qui puisse arrêter l’impétuosité de mes désirs, je me sens un cœur à aimer toute la terre ; et comme Alexandre, je souhaiterais qu’il y eût d’autres mondes, pour y pouvoir étendre mes conquêtes amoureuses.

TEXTE B - MARIVAUX –

La Double inconstance (1723)

Une jeune paysanne, Silvia, a été enlevée : elle est retenue dans le palais du prince car celui-ci l’aime, bien qu’elle soit déjà éprise d’un jeune homme de son village : Arlequin. Pourtant elle s’éprend peu à peu d’un officier du palais qui lui a rendu visite plusieurs fois. Mais, elle ignore qu’il s’agissait, en fait, du prince incognito qui a utilisé ce stratagème pour la séduire.

ACTE II, scène 12

SILVIA : Vous venez ? vous allez encore me dire que vous m’aimez, pour me mettre davantage en peine.

LE PRINCE : […] Belle Silvia, quand mon amour vous fatiguera, quand je vous déplairai moi-même, vous n’avez qu’à m’ordonner de me taire et de me retirer ; je me tairai, j’irai où vous voudrez, et je souffrirai sans me plaindre, résolu de vous obéir en tout.

[…]

SILVIA : Je pourrais bien vous aimer, cela ne serait pas difficile, si je voulais.

LE PRINCE : Souffrez donc que je m’afflige, et ne m’empêchez pas de vous regretter toujours.

SILVIA, comme impatiente. : Je vous en avertis, je ne saurais supporter de vous voir si tendre ; il semble que vous le fassiez exprès. Y a-t-il de la raison à cela ? Pardi, j’aurai moins de mal à vous aimer tout à fait qu’à être comme je suis ; pour moi, je laisserai tout là ; voilà ce que vous gagnerez.

LE PRINCE : Je ne veux donc plus vous être à charge ; vous souhaitez que je vous quitte et je ne dois pas résister aux volontés d’une personne si chère. Adieu, Silvia.

SILVIA, vivement. : Adieu, Silvia ! je vous querellerais volontiers ; où allez-vous ? Restez-là, c’est ma volonté ; je la sais mieux que vous, peut-être.

LE PRINCE : J’ai cru vous obliger.

SILVIA : Quel train que tout cela ! Que faire d’Arlequin ? Encore si c’était vous qui fût le Prince !

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LE PRINCE, d’un air ému. : Et quand je le serais ?

SILVIA : Cela serait différent, parce que je dirais à Arlequin que vous prétendriez être le maître ; ce serait mon excuse : mais il n’y a que pour vous que je voudrais prendre cette excuse-là.

LE PRINCE, à part les premiers mots. : Qu’elle est aimable ! il est temps de dire qui je suis. […]

TEXTE C – Alfred de Musset –

On ne badine pas avec l’amour (1834)

Perdican et Camille s'aiment depuis toujours, mais cette dernière cache ses sentiments pour Perdican, par pur orgueil.

PERDICAN : Sais-tu que cela n’a rien de beau, Camille, de m’avoir refusé un baiser ?

CAMILLE : Je suis comme cela ; c’est ma manière.

PERDICAN : Veux-tu mon bras pour faire un tour dans le village ?

CAMILLE : Non, je suis lasse.

PERDICAN : Cela ne te ferait pas plaisir de revoir la prairie ? Te souviens-tu de nos parties sur

le bateau ? Viens, nous descendrons jusqu’aux moulins ; je tiendrai les rames, et toi le

gouvernail.

CAMILLE : Je n’en ai nulle envie.

PERDICAN : Tu me fends l’âme. Quoi ! pas un souvenir, Camille ? pas un battement de cœur

pour notre enfance, pour tout ce pauvre temps passé, si bon, si doux, si plein de niaiseries

délicieuses ? Tu ne veux pas venir voir le sentier par où nous allions à la ferme ?

CAMILLE : Non, pas ce soir.

PERDICAN : Pas ce soir ! et quand donc ? Toute notre vie est là.

CAMILLE : Je ne suis pas assez jeune pour m’amuser de mes poupées, ni assez vieille pour

aimer le passé.

PERDICAN : Comment dis-tu cela ?

CAMILLE : Je dis que les souvenirs d’enfance ne sont pas de mon goût.

PERDICAN : Cela t’ennuie ?

CAMILLE : Oui, cela m’ennuie.

PERDICAN : Pauvre enfant ! je te plains sincèrement.

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1) Question de corpus

a. En comparant les personnages de Dom Juan, de Perdican et du Prince, mettez en évidence quels procédés de séduction ils utilisent.

b. En quoi le théâtre se prête-t-il à une réflexion sur la séduction ? Appuyez-vous sur le corpus pour répondre.

2) Travail d’écriture

Sujet d’invention 1

Perdican écrit une lettre à Camille suite à leur entrevue, il se plaint de la froideur dont elle a fait preuve et tente de la séduire en employant divers procédés que vous choisirez. Rédigez la réponse dans laquelle Camille oppose un refus à Perdican.

Sujet d’invention 2

Imaginez la scène de séduction entre Dom Juan et Done Elvire une jeune religieuse.

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CorrectionQuestion de corpus a) En comparant les personnages de Dom Juan, de

Perdican et du Prince, mettez en évidence quels procédés de séduction ils utilisent.

Remarques liminaires : comparer ne signifie pas traiter les personnages les uns après les autres, JAMAIS dans les questions de corpus, il ne faut faire cela. Il faut CROISER LES ANALYSES, CONFRONTER les textes.

S’interroger sur les procédés de séduction que les personnages utilisent revient à se demander comment ils s’y prennent pour charmer les femmes qu’ils convoitent.

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L’art de la séduction fascine, en tant qu’art il peut requérir du raffinement et des techniques, et il peut conférer un sentiment de puissance à celui qui le maîtrise. Les trois textes extraits de comédies nous invitent à réfléchir sur cet art. La tirade de Dom Juan, de Molière présente la philosophie de vie du séducteur devenu mythique. Dans les extraits de La Double inconstance de Marivaux et d’On ne badine pas avec l’amour de Musset, deux hommes (le Prince et Perdican) tentent de séduire avec une réussite inégale la jeune femme qu’ils aiment. Nous examinerons les procédés de séduction que les personnages masculins mettent en œuvre. Pour cela nous verrons comment ils utilisent l’art de la parole, avant de voir les stratagèmes qu’ils mettent en œuvre.

Tout d’abord, les trois personnages utilisent les ressources de la parole. Perdican et le Prince sont montrés en train d’essayer de séduire celle qu’ils aiment, alors que Dom Juan expose ses méthodes à son valet, mais ne les applique pas dans cet extrait, même s’il veut indirectement séduire le spectateur et le rallier à ses idées. Le principal procédé rhétorique que Perdican utilise est le questionnement, il emploie presque exclusivement des phrases interrogatives, pour obtenir de Camille des réponses faute d’obtenir un contact qu’elle lui refuse. Perdican la force à lui parler grâce à ces questions, malheureusement, ses invitations sont un peu brutales, et il ne réussit pas à la séduire. Le Prince s’y prend autrement, il manifeste une politesse, une douceur, une obéissance beaucoup plus grande que Perdican, se plaçant dans la position du chevalier-servant, de l’homme-lige qui veut être agréable à celle qu’il aime en acceptant même de disparaitre si elle le souhaite. Le Prince affirme ainsi « J’ai cru vous obliger. » dans le sens j’ai cru être obligeant à votre égard, il ne veut rien imposer à Silvia (du moins en apparence, car il la séquestre quand même). Dom Juan

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affirme quant à lui sa toute-puissance sans détour. Il maîtrise l’art de faire des discours, comme le prouve cette tirade. La parole est son arme de séduction. Le public pourrait se laisser séduire par cette argumentation efficace et bien menée, mais assez fausse, car reposant sur la mauvaise foi de Dom Juan qui se fait passer pour une victime, il est séduit par les femmes, prétend-il, alors que c’est plutôt l’inverse.

Les stratagèmes mis en œuvre par les séducteurs sont de nature différente. Dom Juan est un véritable stratège militaire : « On goûte une douceur extrême à réduire par cent hommages le cœur d’une jeune beauté, à voir de jour en jour les petits progrès qu’on y fait ; à combattre par des transports, par des larmes, et des soupirs, l’innocente pudeur d’une âme, qui a peine à rendre les armes, à forcer pied à pied toutes les petites résistances qu’elle nous oppose, à vaincre les scrupules ». La séduction est un combat, il utilise le champ lexical de la guerre : « combattre », « victoire », « résistance », « Alexandre ». Les femmes sont des territoires qu’il veut conquérir pour pouvoir affirmer sa volonté de puissance. Parmi ses manœuvres, on note les « soupirs », les « larmes », les « transports », les compliments (« cent hommages »). La Prince utilise certaines de ces méthodes, il se montre obligeant, et poli mais c’est un masque, il se fait passer pour ce qu’il n’est pas, c’est une stratégie, même s’il affiche une sincérité. Perdican maîtrise moins l’art de la séduction, il se contente d’une invitation à aller faire une promenade et du rappel d’un passé heureux, mais ces stratégies ne fonctionnent pas, pas plus de tenter d’embrasser Camille sans sa permission. On voit donc que les trois séducteurs utilisent des stratégies différentes.

Au terme de cette réflexion, on peut souligner que ces trois personnages donnent à voir des stratégies de séduction fort différentes mais assez réalistes qui peuvent inviter le lecteur à méditer sur son propre rapport à la séduction.

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Question de corpus b. En quoi le théâtre se prête-t-il à une réflexion sur la séduction ? Appuyez-vous sur le corpus pour répondre.

Remarque liminaire : Pour répondre à la deuxième question de corpus, il n’est pas nécessaire de présenter de nouveau les documents, l’introduction en est donc beaucoup plus courte.

L’art théâtral mêle étroitement la parole et les actes, les répliques s’incarnent dans des comédiens qui prêtent leur corps pour faire vivre le texte. Or la séduction est un art du geste et de la parole. Il est donc naturel que l’on se demande en quoi le théâtre se prête-t-il à une réflexion sur la séduction. Dans un premier temps, nous verrons que ces extraits proposent un art de la parole varié,

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avant de voir que les gestes occupent une place importante. Enfin nous verrons que la séduction et le théâtre ont en commun d’être des arts du masque et que tout ceci implique que le théâtre est le genre privilégié pour réfléchir au thème de la séduction.

Le théâtre est le genre qui se prête le mieux à une réflexion sur l’art de la parole. Ainsi ces extraits explorent les différentes formes que la parole peut prendre au théâtre : le monologue et le dialogue. Le monologue de Dom Juan est un exemple d’une parole toute puissante, qui envahit tout l’espace (Sganarelle est muet, il ne peut pas prononcer la moindre contradiction). Dom Juan est emporté dans son délire, il termine d’ailleurs sa tirade en apothéose en se comparant à Alexandre le Grand. Il réussit à séduire ceux qui l’écoutent par la force de son discours ou du moins en embrouillant l’esprit du spectateur. Le monologue est un type de discours séduisant et efficace au théâtre. Le dialogue est le second mode de communication que ces extraits présentent. Il est le mode selon lequel la séduction peut s’opérer le plus naturellement. Le théâtre est le genre privilégié pour rendre sensible l’art de la séduction. Dans les deux dialogues on perçoit que c’est le séducteur qui est à la manœuvre qui dirige les échanges, la femme ne fait que subir en résistant les manœuvres de séduction.

Le geste est présent au théâtre. Ces textes le rendent visible. Perdican évoque un baiser qui lui a été refusé, tandis que la Prince avec ses mouvements pour s’éloigner et faire semblant de partir manifeste son obéissance face à Silvia. D’un côté, l’on a un séducteur qui veut forcer les choses et de l’autre un séducteur qui se montre doux et poli, c’est ce dernier qui réussira son entreprise. Le théâtre, plus que le roman est le genre qui permet de montrer les gestes de la séduction. La mise en espace, le jeu de l’acteur doit permettre de montrer cela.

Enfin le théâtre est le genre où l’acteur porte un masque dans la tradition classique, or le séducteur aussi s’avance masqué (Le Prince se fait passer pour un garde pour mieux séduire Silvia, Dom Juan mime les larmes et le désespoir pour mieux séduire ses proies). Ce point commun entre le comédien et le séducteur met bien en évidence que le théâtre est le lieu approprié pour mener une réflexion sur la séduction.

Chaque soir, les comédiens doivent séduire leur public, et souvent les pièces de théâtre traitent de la question de la séduction, ce n’est pas un hasard. La séduction suppose une maîtrise de la parole et le port d’un masque. Là encore cela fait sens que Roméo séduise Juliette lors d’un bal masqué dans la tragédie de Shakespeare.

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Sujet d’invention 1

Perdican écrit une lettre à Camille suite à leur entrevue, il se plaint de la froideur dont elle a fait preuve et tente de la séduire en employant divers procédés que vous choisirez. Rédigez la réponse dans laquelle Camille oppose un refus à Perdican.

Le 17 octobre

Domaine de Villeparisis

Ma si chère Camille,

Me voilà au désespoir. Je te sens inaccessible. La froideur que tu manifestes à mon égard me transperce le cœur comme la plus aiguë des lames. Tu exerces une tyrannie sur mon âme mais tu ne t’en rends pas compte. J’ai souffert terriblement tout à l’heure quand tu t’es mis à me torturer par ton indifférence. Tu refuses le dialogue, tu refuses que nous passions un moment agréable, tu me refuses.

Chère Camille, comment peux-tu rester indifférente devant ma souffrance et mon amour. Tu brûles notre complicité passée sur le bûcher de mon bonheur futur. Tu hypothèques les chances que nous soyons heureux en devenant mari et femme en refusant mes avances par orgueil. Tu es une froide Galatée dont la beauté me transporte mais dont le marbre ne parvient pas à prendre vie. Tu es glacée comme une statue et mon sang se fige quand tu me tournes le dos.

Je ne suis pas un Dom Juan cynique qui veut te séduire et t’abandonner, je ne connais pas l’art de séduire, je n’ai que mes sentiments et ma sincérité. Je ne suis pas un stratège capable de verser des larmes pour t’émouvoir. Je ne suis que ton âme-sœur depuis toujours. La complicité qui nous unit est si ancienne qu’il fait mal l’entendre bafouée comme tu le fais. Enfants déjà nous étions inséparables, pourquoi en serait-il autrement aujourd’hui ? Nos sentiments se sont renforcés. Tu ne dois pas les refuser. Ne gâche pas ton bonheur et tes jeunes années.

Ma douce Camille, ouvre ton cœur et laisse parler tes sentiments.

Je t’embrasse

Perdican

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Le 18 octobre

Domaine de Vauvenargues

Perdican,

Je suis touchée par tes démarches mais dois t’opposer un refus définitif. Nous ne nous marierons pas, cher Perdican, je refuse ton amour et tes projets. Ma décision est ferme et définitive.

Ta sincérité t’honore et tes sentiments te grandissent, mais qu’en sera-t-il dans deux ans, dans dix ans, dans trente ans. Peux-tu me garantir la même passion et la même franchise ?

Je connais les hommes et les sais capable de s’abaisser à bien des choses pour obtenir ce qu’ils désirent. Dom Juan est capable de mimer la passion la plus totale pour séduire une jeune femme avant de l’abandonner après une première nuit passer avec elle. Le cynisme des séducteurs est sans limite. La fidélité n’est qu’un mirage présenté aux femmes ridicules et naïves. Je ne suis pas de celles-ci. Je me méfie des hommes et ne veut pas m’engager de peur d’avoir à m’en repentir dans quelques années.

Combien d’hommes qui sont charmants deviennent des tyrans domestiques une fois le mariage célébré. Ils se sont montrés des cavaliers doux et attentionnés tant qu’on leur refusait ce qu’ils convoitaient, ils se métamorphosent en bourreau, humiliant, n’accordant plus aucun respect à celle qui est devenu leur femme.

Je refuse de finir ainsi avec un homme qui m’aura promis mille félicités et ne sera la source que de mon malheur.

Excuse-moi, Perdican, je t’aimais bien.

Camille.

Sujet d’invention 2

Imaginez la scène de séduction entre Dom Juan et Done Elvire une jeune religieuse.

Acte I, scène 4 : Dom Juan, Done Elvire, Sganarelle, paroissiens

La scène se déroule sur le parvis d’une église. Done Elvire sort au milieu des paroissiens, Dom Juan l’observe puis l’aborde tandis que la foule des paroissiens se disperse. Sganarelle attend à distance

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Dom Juan : Mademoiselle, permettez-moi de vous arrêter un instant.

Done Elvire : Monsieur. Que puis-je pour vous ?

Dom Juan : Je vous ai observé, malgré moi pendant l’office. Oserai-je vous dire ce que j’ai vu ? Je ne peux. Votre visage m’a frappé. Pendant les prières, votre teint s’animait, vos yeux s’illuminaient d’une intelligence si profonde que j’en fus frappé. Votre âme rayonnait, vous sembliez animée par une compréhension sincère des rites sacrés de notre église. Quel modèle de grâce et de beauté vous faite pour les paroissiens, vous devez forcer l’admiration de tous. Le prêtre a bien de la chance de compter parmi ses ouailles une si pieuse et resplendissante personne. Excusez-moi je vous fais rougir, là n’était pas mo intention. Je ne veux pas vous troubler, mais je suis parfois trop sincère et lorsqu’une personne frappe mon admiration, je ne sens obligé de l’en informer en tout bien, tout honneur.

Done Elvire : Vos compliments me touchent mais il est inconvenant qu’une femme soit arrêtée sur le parvis de l’église, son livre de messe sous le bras par un homme qu’elle ne connait pas. Je vous salue, monsieur.

Dom Juan : Un instant, reine de beauté, rien de plus. Je m’excuse de vous troubler. Il n’y a rien d’inconvenant dans ma démarche. Bien au contraire. Je suis un homme, je suis pécheur, mais ma conduite ne demande qu’à s’amender. Avec un exemple tel que vous sous les yeux, les choses seraient plus aisées pour moi. Je voulais simplement et humblement vous signaler l’effet que vous avez produit sur mon âme. Je renouvelle mes excuses et m’étonne que vous trouviez inconvenant ma démarche sincère et modeste.

Done Elvire : Pardonnez ma méfiance, les hommes ont parfois des intentions peu honnêtes et une jeune femme doit apprendre à se méfier des séducteurs qui peuvent se cacher derrière les inconnus qui les abordent en pleine rue.

Dom Juan : Je comprends, vous m’avez jugé trop vite, je vous pardonne, mais je souffre un peu du jugement parfois hâtif sur moi. J’ai mené une vie déréglée et m’en suis maintenant repenti. Pourtant les gens continuent à me condamner sans connaitre les changements qui se sont produits dans mon âme. Vous savez pourtant que l’habit ne fait pas le moine, mon air avenant, ma jeunesse, ne doit pas vous faire croire que je suis un séducteur malveillant, ne vous laissez pas abuser par des apparences, votre charité chrétienne doit vous empêcher de porter ce genre hâtif. Comment changerais-je, si je ne sens pas que je change dans les yeux des autres ? Je vous laisse, madame.

Done Elvire : Comment me faire pardonner ? Je sens que je vous ai troublé.

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Dom Juan : Je vous ai abordé pour saluer la lumière céleste qui se dégage de vous et vous me méprisez. Je suis infiniment déçu mais c’est ainsi. Peut-être est-ce de ma faute.

Done Elvire : Je suis sincèrement désolée, je veux dissiper ce malentendu, marchons un peu, donnez-moi le bras et raccompagnez-moi chez moi.

Dom Juan (lançant un clin d’œil à Sganarelle et prenant le bras de Done Elvire) : Avec un ministre tel que vous pour me guider, je suis sûr que je ferai des progrès fantastiques sur le chemin de la vraie foi, accepteriez-vous de me donner des conseils et de m’aider régulièrement à m’amender ? Vous feriez une bonne action en acceptant de me voir souvent, vous aideriez un pécheur à gagner le paradis.

Done Elvire lui sourit. Ils s’éloignent.

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