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Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (Véronique Nichèle) © 2012 Société française de nutrition. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Cahiers de nutrition et diététique (2012) 47, S23-S31 cahiers nutrition de et de diététique Société Française de Nutrition Septembre 2012 Volume 47 Hors série 1 Cah. Nutr.Diét, 2012, 47, S1-S58 70306 – ISSN 0007 – 9960 Céréales, petit déjeuner et santé Véronique Nichèle INRA, UR1303 ALISS, 65, boulevard de Brandebourg, F-94205 Ivry-sur-Seine, France Résumé Cet article est consacré à l’étude de l’évolution récente de la composition nutritionnelle dans le secteur des céréales pour le petit déjeuner (CPPD). On y décrit le dispositif français des chartes d’engagements volontaires de progrès nutritionnel. On détaille ensuite les améliorations nutritionnelles existant dans le secteur des CPPD avant la mise en place des chartes d’engagements volontaires de progrès nutritionnel et consécutives aux signatures des chartes par les sociétés Kellogg’s France et CPF-Nestlé (les données n’étant pas disponibles en l’état pour les entreprises Scamark et Casino). Finalement, les résultats des études sur le secteur des CPPD réalisées dans le cadre de l’Observatoire de la qualité de l’alimentation (Oqali) sont présentés. Cet article montre que des progrès nutritionnels importants ont été réalisés dans le secteur des CPPD en France. Ceux-ci ont des effets incontestables sur la qualité des céréales. En effet, les CPPD mises actuellement sur le marché ont des teneurs plus faibles en sodium et sucres simples et des teneurs plus élevées en Àbres. Les consommateurs de CPPD ont donc désormais la possibilité de consommer des céréales au proÀl nutritionnel optimisé. © 2012 Société française de nutrition. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Summary This paper is devoted to the study of the recent evolution of ready-to-eat breakfast cereals’ (RTEBC) nutritional composition. First, the French system of charters of volunteering commitment on nutritional progress is described. Then, the nutritional improvements existing in the RTEBC sector before the charters setting up and after the charters signature by Kellogg’s France and CPF-Nestlé companies are detailed (data are unfortunately unavailable in the Scamark and Casino companies’ charters). Finally, the studies’ results of the French Observatory of food quality (Oqali) on the RTEBC sector are presented. This KEYWORDS Ready-to eat breakfast cereals; Nutritional composition; Quality improvement; MOTS CLÉS Céréales pour le petit déjeuner (CPPD) ; Composition nutritionnelle ; Amélioration de la qualité ; Innovations ; Publicité Évolution récente de la composition nutritionnelle des céréales pour le petit déjeuner : quels impacts sur la qualité des produits ? Recent evolution of breakfast cereals’ nutritional composition: which impacts on products’ quality?

Évolution récente de la composition nutritionnelle des céréales pour le petit déjeuner: quels impacts sur la qualité des produits ?

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Correspondance.Adresse e-mail : [email protected] (Véronique Nichèle)

© 2012 Société française de nutrition. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Cahiers de nutrition et diététique (2012) 47, S23-S31

cahiersnutritionde

et de

diététique

Société Française de Nutrition

Septembre 2012Volume 47Hors série 1

Cah. Nutr.Diét, 2012, 47, S1-S58

7030

6 – I

SSN

0007

– 99

60

Céréales, petit déjeuner et santé

Indexés dans, indexed in Chemical Abstract, EMbase (Excerpta medica), Pascal (INIST/CNRS) et Scopus®

Disponible en ligne sur www.em-consulte.com

Véronique Nichèle

INRA, UR1303 ALISS, 65, boulevard de Brandebourg, F-94205 Ivry-sur-Seine, France

RésuméCet article est consacré à l’étude de l’évolution récente de la composition nutritionnelle dans le secteur des céréales pour le petit déjeuner (CPPD). On y décrit le dispositif français des chartes d’engagements volontaires de progrès nutritionnel. On détaille ensuite les améliorations nutritionnelles existant dans le secteur des CPPD avant la mise en place des chartes d’engagements volontaires de progrès nutritionnel et consécutives aux signatures des chartes par les sociétés Kellogg’s France et CPF-Nestlé (les données n’étant pas disponibles en l’état pour les entreprises Scamark et Casino). Finalement, les résultats des études sur le secteur des CPPD réalisées dans le cadre de l’Observatoire de la qualité de l’alimentation (Oqali) sont présentés. Cet article montre que des progrès nutritionnels importants ont été réalisés dans le secteur des CPPD en France. Ceux-ci ont des effets incontestables sur la qualité des céréales. En effet, les CPPD mises actuellement sur le marché ont des teneurs plus faibles en sodium et sucres simples et des teneurs plus élevées en bres. Les consommateurs de CPPD ont donc désormais la possibilité de consommer des céréales au pro l nutritionnel optimisé.© 2012 Société française de nutrition. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

SummaryThis paper is devoted to the study of the recent evolution of ready-to-eat breakfast cereals’ (RTEBC) nutritional composition. First, the French system of charters of volunteering commitment on nutritional progress is described. Then, the nutritional improvements existing in the RTEBC sector before the charters setting up and after the charters signature by Kellogg’s France and CPF-Nestlé companies are detailed (data are unfortunately unavailable in the Scamark and Casino companies’ charters). Finally, the studies’ results of the French Observatory of food quality (Oqali) on the RTEBC sector are presented. This

KEYWORDSReady-to eat breakfast cereals;Nutritional composition;Quality improvement;

MOTS CLÉSCéréales pour le petit déjeuner (CPPD) ;Composition nutritionnelle ;Amélioration de la qualité ;Innovations ;Publicité

Évolution récente de la composition nutritionnelle des céréales pour le petit déjeuner : quels impacts sur la qualité des produits ?

Recent evolution of breakfast cereals’ nutritional composition: which impacts on products’ quality?

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SS24 Véronique Nichèle

Introduction

L’évolution de la composition nutritionnelle des céréales pour le petit déjeuner (CPPD) ainsi que ses améliorations nutri-tionnelles sont relativement bien documentées au niveau mondial. En France, nous assistons depuis quelques années à une intensi cation de ces améliorations, notamment du fait de la mise en place des différents Plans Nationaux Nutrition Santé (PNNS) depuis 2001 [1] et des chartes d’engagements volontaires de progrès nutritionnel en 2007 [2]. En parallèle, la création de l’Observatoire de la qualité de l’alimentation (Oqali) en 2008 incite les industriels de l’agro-alimentaire à fournir les données sur la composition nutritionnelle de leurs produits [3] permettant ainsi de suivre l’impact réel de ces évolutions sur les consommateurs.Hormis des travaux dans le domaine du marketing alimentaire (cf. par exemple Muratore et Guichard (2010) [4]) et les travaux de l’Oqali, il existe peu, ou pas, en France, de travaux sur la qualité nutritionnelle des CPPD. L’objectif de cet article est de pallier à ce problème.

Le dispositif français des chartes d’engagements volontaires de progrès nutritionnel

En France, le second Programme National Nutrition Santé (PNNS 2, 2006-2010) a proposé aux organisations profession-nelles et interprofessionnelles, ainsi qu’aux entreprises de l’industrie agro-alimentaire, de la distribution et de la res-tauration collective, de prendre des engagements volontaires de progrès nutritionnel sous la forme de chartes soumises à l’approbation des pouvoirs publics [5]. Depuis avril 2007, les différents acteurs économiques peuvent s’impliquer en faisant des propositions d’engagements examinées par un comité d’experts dé ni dans le document [6]. Les propositions d’engagements faites par les exploitants du secteur alimentaire doivent être établies selon un référentiel type en vue de leur approbation et s’inscrire dans un ou plusieurs des domaines suivants (d’autres domaines dits complémentaires peuvent également être éligibles) : l’intervention sur la composition nutritionnelle des produits existants, la création de produits de substitution et l’intervention sur la consommation des produits (fréquence, quantité, population cible). Ainsi, les deux premiers domaines se placent dans le cadre de l’amélioration des caractéristiques nutritionnelles des produits existants ou à développer. Le troisième vise quant à lui la promotion d’une amélioration de la consommation avec notamment un enca-drement du marketing et de la publicité relatifs aux produits alimentaires. Ces domaines d’intervention sont assortis de 11 principes généraux pour l’élaboration des chartes d’en-gagements de progrès nutritionnel. Bien qu’ils ne soient pas

hiérarchisés, deux principes méritent d’être soulignés pour la bonne compréhension de la suite de cet article :• le principe de rétroactivité : « le demandeur (…) peut aussi

proposer des améliorations déjà réalisées, postérieurement au lancement du PNNS 2, si elles donnent au demandeur un avantage nutritionnel qui le distingue nettement sur le marché… » ;

• le principe de véri cation des engagements par une tierce partie, chaque année.

En n, il est nécessaire d’insister sur une condition de rece-vabilité des chartes stipulant que « Lorsque le demandeur est une entreprise, les deux tiers au moins, en volume, en chiffre d’affaires ou en dépenses publi-promotionnelles, des produits qu’elle élabore, transforme ou distribue, doivent être pris en considération (…) » [7].

Les trois grands domaines d’intervention du référentiel type

Intervention sur la composition nutritionnelle des produits existants

• La composition et les caractéristiques nutritionnelles des produits, en particulier les modi cations de la formulation visant à réduire dans les produits composés les teneurs en sel et glucides simples ajoutés, lipides totaux, acides gras saturés, et à augmenter les teneurs en glucides complexes et en bres.

• Les reformulations autres que celles visées ci-dessus qui prendraient appui soit sur des rapports ou avis d’autorités scienti ques repris dans des orientations données par les pouvoirs publics, soit sur les objectifs nutritionnels annexés à la loi de santé publique (par exemple sur l’iode).

• La confection de menus permettant le respect des repères de consommation du PNNS 2 dans la restauration à carac-tère social comme commercial.

Création de produits de substitution

Le développement de produits pouvant venir en substitution de produits alimentaires pour lesquels une modération de la consommation est préconisée, en particulier lorsqu’une intervention sur la composition nutritionnelle des produits existants semble trop dif cile.

Intervention sur la consommation (fréquence, quantité, population cible) des produits

• La réduction de la taille des portions et/ou des unités de vente de produits contenant un ou des nutriments dont l’apport doit être limité.

paper shows that signi cant nutritional progress have been made in the French RTEBC sector. These progresses have undeniable impacts on RTEBC quality. Indeed, the RTEBC currently marketed have low sodium and sugars contents and high bres content. Therefore, RTEBC consumers can consume RTEBC with a better nutritional pro le.© 2012 Société française de nutrition. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Innovations;Advertising

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Évolution récente de la composition nutritionnelle des céréales pour le petit déjeuner SS25

• L’augmentation de la consommation de fruits et légumes en améliorant leur accessibilité et en diversi ant leurs formes d’utilisation.

• L’organisation des lieux de vente : mise en place de signalétiques spéci ques dans les rayons ; amélioration de l’organisation des rayons fruits et légumes ; baisse du nombre de produits sucrés présentés devant les caisses ; adaptation des mètres linéaires mis à disposition des caté-gories de produits en fonction de leur intérêt nutritionnel ; mise en valeur des fruits et légumes les moins onéreux.

• Le développement de la communication et de l’information sur les lieux de vente et hors lieux de vente, y compris pour la vente à domicile : organisation d’animations produits en présence de diététiciennes ; diffusion de messages radio ; distribution de supports papiers porteurs du logo PNNS développant des informations nutritionnelles.

• Le marketing, la publicité et la promotion des ventes : marketing tenant compte de la nécessité d’une consom-mation raisonnable de certains aliments ; réduction de la publicité et de la promotion pour les produits dont une modération de la consommation est préconisée, suppression dans les écrans destinés aux enfants ; informations sur les conditions d’utilisation les plus adéquates des produits et sur des combinaisons pertinentes en fonction des repas (petit déjeuner, goûter) ; informations encourageant la consommation de produits quand son accroissement est préconisé ; etc.

Les instances d’évaluation

Les propositions de chartes sont évaluées par un comité d’experts compétents en nutrition, technologie alimentaire, économie et marketing et économie des lières alimentaires. Un représentant de la Direction Générale de la Santé (DGS), de la Direction Générale de l’Alimentation (DGAL) et de la Direction Générale de la Consommation, de la Concurrence et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) assistent également aux séances du comité, sans droit de vote.Depuis janvier 2008, 30 chartes d’engagements volontaires de progrès nutritionnel ont été signées dont deux concernent des entreprises industrielles du secteur des céréales pour le petit déjeuner (CPPD) (Kellogg’s France et CPF-Cereals Partners France), ainsi que deux pouvant également concer-ner ce secteur car signées par des entreprises de grande distribution (Scamark et Casino). Pour accéder à la version publique de ces chartes d’engagements [2].

Les progrès nutritionnels existant dans le secteur des céréales pour le petit déjeuner avant les signatures de chartes d’engagements volontaires

Les cas des entreprises Kellogg’s et CPF-Nestlé implantées en France sont ici décrits.La société Kellogg’s, dont le siège est aux États-Unis, est implantée en France depuis 1968. Dès 1923, aux États-Unis, l’entreprise Kellogg’s a mis en place un service consommateurs pour répondre à leurs questions sur le sujet. Kellogg’s France a signé sa charte d’engagements [8] le 1er décembre 2010.

Cereal Partners France (CPF) est la liale française de Cereal Partners Worldwide (CPW) résultant d’un partenariat commercial créé en 1990 entre Nestlé et General Mills. Pour simpli er, on utilisera dans la suite de cet article CPF-Nestlé pour désigner Cereal Partners France, entité du groupe Nestlé fabriquant les CPPD de la marque Nestlé. Les CPPD représentent 96 % du volume de ventes de CPF-Nestlé, qui a signé sa charte d’engagements [9] le 17 décembre 2010.Le cas des entreprises de grande distribution Casino et Scamark n’est pas traité ici. En effet, l’analyse de leurs engagements sur les CPPD est dif cile du fait du manque d’informations (con dentialité des chartes, pas de mention spéci que des CPPD vs les autres secteurs alimentaires). Pour plus d’informations, le lecteur pourra se référer à la version publique des deux chartes [10,11].

Les progrès nutritionnels consécutifs aux signatures des chartes d’engagements volontaires de progrès nutritionnel par les sociétés Kellogg’s et CPF-Nestlé

Ces engagements se situent dans le domaine d’intervention sur la composition nutritionnelle des produits existants, premier domaine d’intervention du référentiel type [7]. Ils concernent les modi cations de formulation visant à réduire les teneurs en sucres simples et en sodium, et à augmenter les teneurs en bres ou en céréales complètes. Cette des-cription est basée sur les chartes publiques signées par les deux sociétés en décembre 2010 [8,9].Concernant la société Kellogg’s, les améliorations nutrition-nelles consécutives à la signature de la charte portent sur les CPPD commercialisées en France. Elles s’appliquent à 20 des 29 références de marques mises sur le marché français. Par exemple, la marque Miel Pops® compte deux références Miel Pops® et Miel Pops® Cracks alors que la marque Special K® en compte 8 dont Special K® (nature), Special K® Feuilles de chocolat noir, Special K® Feuilles de chocolat au lait, etc. Selon les données de vente de 2009, les 20 références représentent 82,4 % des volumes des ventes de CPPD. Plus précisément, Kellogg’s France s’est engagé à améliorer ses CPPD de trois façons :• engagement 1 : réduction de la teneur en sucres simples de

3,8 % à 15 % d’ici début 2014, soit une réduction moyenne de 9 % sur les 4 marques concernées ;

• engagement 2 : réduction de la teneur en sodium de 11 % à 43 % d’ici début 2014, ce qui représente une réduction moyenne de 15,8 % sur les 9 marques concernées ;

• engagement 3 : augmentation de la teneur en bres de 20 % à 200 % d’ici début 2014, soit une augmentation moyenne de 25,6 % sur les 4 marques concernées.

Finalement 10 marques regroupant 20 références seront impactées par au moins un engagement de progrès nutritionnel.En ce qui concerne la société CPF-Nestlé, les progrès nutrition-nels consécutifs à la signature de la charte portent également sur les CPPD commercialisées en France et sont les suivants :• engagement 1 : réduction de la teneur en sucres simples

dans les CPPD pour les enfants et les adolescents de 12 % en moyenne entre 2009 et 2012, sans compensation par un ajout de matières grasses. Cet engagement porte sur

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toute la gamme des CPPD enfants et adolescents, soit 73 % des volumes des ventes ;

• engagement 2 : augmentation de la teneur en céréales complètes de 16 % en moyenne dans les CPPD pour les adultes associée à une augmentation de la teneur nale en bres de 14 %. Cet engagement couvre la période 2008-2009. Il concerne 96 % des CPPD adultes, soit 21 % du volume de ventes total ;

augmentation de la teneur en céréales complètes de 5 % en moyenne dans les CPPD pour les enfants et les adolescents associée à une augmentation de la teneur en bres nale. Cet engagement porte sur la période 2009-2012. Il concerne 79 % des CPPD enfants et adolescents représentant 62 % du volume de ventes total. Au total, cet engagement touche donc 83 % des produits en volume de ventes 2008 ;

• engagement 3 : réduction de la teneur en sodium dans les CPPD de 17 % en moyenne entre 2006 et 2009. Cet engagement concerne les produits pour les enfants et les adolescents et pour les adultes et permet d’améliorer 60 % du portefeuille en volume de ventes 2008.

Ces trois engagements permettent donc d’améliorer plus de deux tiers des produits en volume des ventes.Le tableau 1 ci-après présente un résumé et une comparaison des engagements de progrès nutritionnels pris par les sociétés Kellogg’s et CPF-Nestlé.L’examen du tableau 1 permet de commenter les similitudes et les différences existant entre les engagements de progrès nutritionnels pris par les deux sociétés. Les comparaisons ne sont pas toujours fondées sur le même référentiel, puisque Nestlé différencie les CPPD enfants et adultes. Cependant, on peut considérer que les marques Chocos®, Miel Pops®, Coco Pops® et Trésor® s’adressent plutôt aux enfants et aux adolescents alors que les autres marques s’adresseraient plutôt aux adultes. On peut remarquer que la condition de recevabilité des chartes, ici les deux tiers en volumes de vente, est respectée. Concernant les engagements en tant que tels, on peut noter qu’ils portent sur les mêmes composants nutritionnels : sucres simples, sodium et bres/céréales complètes. Ceux-ci vont dans le même sens, à savoir une diminution des teneurs en sucres simples et en sodium et une augmentation de la teneur en bres/céréales complètes.

Résultats des études sur les céréales pour le petit déjeuner réalisées dans le cadre de l’Observatoire de la qualité de l’alimentation (Oqali)

L’Oqali, prévu par le PNNS 2, a été créé en février 2008 par les ministères chargés de l’agriculture, de la santé et de la consommation [3]. Cet observatoire a pour missions de cen-traliser et traiter les données nutritionnelles, économiques et socio-économiques de l’alimentation, a n d’assurer un suivi de l’offre alimentaire des produits transformés. La mise en œuvre de l’Oqali a été con ée à l’INRA (Institut National de la Recherche Agronomique) et à l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail).Quatre rapports d’études ont été publiés depuis 2009, dont deux sont spéci ques aux CPPD et deux autres traitent en partie du secteur des CPPD.

Premier rapport

Dans le premier rapport, l’Oqali a effectué un suivi des données rétrospectives disponibles dans la base de données entre 2001 et 2008, en étudiant l’évolution des teneurs en différents nutriments pour les références présentes sur ces années. Ce traitement a soulevé le problème de pouvoir dif-férencier une réelle évolution de la teneur en nutriment d’un produit, d’une incertitude de mesure. En effet, les données nutritionnelles d’un aliment peuvent être le résultat d’ana-lyses en laboratoire ou issues de calculs (à partir de la recette ou des tables de composition). Ces résultats possèdent une part d’incertitude suivant la méthode utilisée (validée ou non, récente ou ancienne), le laboratoire (laboratoire accrédité ou inconnu) et l’échantillonnage. Pour pallier à ce problème, le concept de limite de reproductibilité utilisé dans la norme ISO5725 a été appliqué. La limite de reproductibilité permet d’évaluer la plus grande différence que l’on peut admettre statistiquement (delta max acceptable) entre deux résultats dans deux laboratoires différents, soit la différence maximale entre deux mesures pour un risque d’erreur de 5 %. Pour plus de détails concernant le calcul de la limite de reproductibilité et le modèle statistique utilisé [12].Les données rétrospectives disponibles portent sur 153 réfé-rences, qui représentent 55 % des volumes du marché en 2008. Les conclusions de ce premier rapport ne peuvent donc pas être appliquées à l’ensemble du secteur. Ceci étant, la méthode utilisée montre que des évolutions signi catives ont été relevées pour :• le sodium : 41 références présentent une diminution de

teneur (soit 25,5 % des volumes du marché en 2008) et 4 références présentent une augmentation (soit 0,7 % des volumes du marché en 2008) ;

• les sucres : 27 références présentent une diminution de teneur (soit 25,1 % du marché des volumes du marché en 2008) et 5 références présentent une augmentation (soit 0,8 % des volumes du marché en 2008).

Par ailleurs, pour les quatre familles de céréales les plus vendues, les résultats d’évolution observés en nombre de références sont résumés dans le tableau 2 ci-après.

Second rapport

Le second rapport porte également sur l’étude de données rétrospectives [13]. La période étudiée est celle de 2008-2009. De ce fait, ce travail peut être considéré comme un test d’ordre méthodologique. En ce qui concerne les CPPD, 114 références (soit 991 teneurs en nutriments) ont été étudiées ; elles repré-sentent 49 % des volumes du marché en 2009. Les résultats obtenus montrent que 103 évolutions signi catives de teneurs en nutriments ont été relevées sur les 991 teneurs suivies. En particulier, des efforts sont notés allant dans le sens des recommandations du PNNS 2 pour les teneurs en AGS (7 dimi-nutions vs 4 augmentations) et en bres (11 augmentations vs 5 diminutions). Par ailleurs, 5 augmentations de teneurs en sucres ont été relevées vs 5 diminutions. En quanti ant les évolutions de teneurs, en valeur absolue, il est montré que, pour les sucres, les diminutions de teneurs sont comprises entre 5 et 16 g/100 g et les augmentations entre 2 et 8 g/100 g ; pour les bres, les augmentations de teneurs vont de 0,5 à 3,9 g/100 g et les diminutions sont comprises entre 0,5 et 1,8 g/100g.

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SS27 Tableau 1. Tableau comparatif des types d’engagements de progrès nutritionnel pris par les sociétés Kellogg’s et CPF- Nestlé selon les marques concernées

et les volumes de vente couverts.Types d’engagements

Kellogg’s(charte signée le 1er décembre 2010)

CPF- Nestlé(charte signée le 17 décembre 2010)

Détail des engagements Marques concernées Volumes de vente

Détail des engagements Marques concernées

Volumes de vente

Réduction de la teneur en sucres simples

Réduction de 3,8 % à 15 % d’ici début 2014 (soit une réduction moyenne de 9 % sur les marques concernées)

Special K®

Chocos®

Miel Pops®

Coco Pops®

Réduction de 12 % en moyenne entre 2009 et 2012, sans compensation par un ajout de matières grasses

CPPD enfants et adolescents

73 %

Réduction de la teneur en sodium

Réduction de 11 % à 43 % d’ici début 2014 (soit une réduction moyenne de 15,8 % sur les marques concernées)

Special K®

Kellogg’s Corn Flakes®

All- Bran®

Extra®

Trésor®

Miel Pops®

Coco Pops®

Frosties®

Rice Krispies®

82,4 % Réduction de la teneur en sodium de 17 % en moyenne entre 2006 et 2009

CPPD enfants et adolescents

60 %

Augmentation de la teneur en bres ou céréales complètes

Augmentation de la teneur en bres bres de 20 % à 200 % d’ici début 2014 (soit une augmentation moyenne de 25,6 % sur les marques concernées)

Special K®

Chocos®

Miel Pops®

Coco Pops®

Augmentation de la teneur en céréalescéréales complètescomplètes de 16 % en moyenne sur la période 2008- 2009 associée à une augmentation de la teneur nale en bres bres de 14 %.

CPPD adultes 21 %

Augmentation de la teneur en céréalescéréales complètescomplètes de 5 % en moyenne sur la période 2009- 2012

CPPD enfants et adolescents

62 %

Tableau 2. Évolution 2001- 2008 des teneurs en différents nutriments selon les familles de céréales.Nutriments Familles de céréales

Céréales ligne et forme Céréales chocolatées Céréales miel/caramel Mueslis croustillantsAugmentations

de la teneurDiminutions de la teneur

Augmentations de la teneur

Diminutions de la teneur

Augmentations de la teneur

Diminutions de la teneur

Augmentations de la teneur

Diminutions de la teneur

Glucides 0 0 0 0 0 0 0 3Sucres 0 0 0 10 1 4 0 0Lipides 5 2 8 5 0 0 0 0AGS 5 2 0 0 2 6 7 0Fibres 1 8 9 5 0 0 0 0Sodium 1 10 0 0 2 8 1 4Dans le cas des céréales ligne et forme, les teneurs en lipides et en acides gras saturés (AGS) restent parmi les moins élevées au sein du secteur.Elles sont en moyenne inférieures à 5 g/100 g pour les lipides et à 2 g/100 g pour les AGS.

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Troisième rapport

Le troisième rapport constitue un complément du premier bilan sectoriel réalisé en 2008 [14]. Pour le suivi 2008, les données étiquetées sont la principale source de données de l’Observatoire pour les valeurs nutritionnelles. Ainsi, 36 réfé-rences (majoritairement des produits d’entrée de gamme), sans étiquetage nutritionnel ou avec un étiquetage incomplet (du groupe 1), n’ont pas pu être prises en compte dans la totalité des traitements réalisés sur les valeurs nutritionnelles. Dans ce complément d’étude, la composition nutritionnelle de 34 de ces 36 références a été analysée. De plus, la base de données a été mise à jour pour l’année 2009. Cette mise à jour a permis de comparer la composition nutritionnelle des nou-velles références de CPPD à celle des références existantes. En particulier, 7 nouvelles références de céréales chocolatées ont été identi ées. Les tests statistiques appliqués ne montrent pas de différence signi cative de composition nutritionnelle entre les nouvelles références de céréales chocolatées mises sur le marché en 2009 et les références existantes.

Quatrième rapport

Finalement, le quatrième rapport a pour objectif de simuler l’impact potentiel d’une amélioration de la composition nutritionnelle des produits sur les volumes de nutriments mis sur le marché et sur les apports nutritionnels individuels, à comportements de consommateurs inchangés, en essayant de se placer dans le domaine de l’existant : l’optimisation nutritionnelle simulée reste a priori technologiquement faisable et acceptable du point de vue organoleptique. La variabilité de composition nutritionnelle intra-famille observée dans les études sectorielles de l’Oqali montre qu’il est possible d’améliorer la qualité nutritionnelle des produits existants sur le marché. Ainsi, trois scenarii de modi cation de la qualité nutritionnelle des produits ont été élaborés, en considérant chaque fois qu’une proportion croissante de produits est améliorée au sein de la même famille : 25 %, 50 % et 75 % des produits sont impactés pour les scenarii 1, 2 et 3. Il s’agit des produits de moins bonne qualité nutritionnelle au regard de leurs teneurs en sucres, lipides, bres et sodium. Ces scenarii s’appliquent à chaque nutriment considéré séparément.

L’étude a été réalisée sur trois secteurs tests pour lesquels l’Oqali dispose de données suf santes dont celui des CPPD. Dans ce cas, les données disponibles concernent 355 références regroupées en 29 familles représentant 75 % des volumes du marché en 2008. Au total 17 familles ont été améliorées. Il a été montré qu’après mise en œuvre des trois scénarii d’amélio-ration, les quantités de nutriments mis sur le marché seraient diminuées respectivement de 3 %, 6 %, 11 % pour les sucres, 4 %, 8 %, 13 % pour les lipides, 4 %, 9 %, 20 % pour le sodium et augmentées de 2 %, 7 %, 18 % pour les bres. En valeur absolue, cela représente annuellement une baisse de 993 à 3830 tonnes de sucres, 358 à 1149 tonnes de lipides, 15 à 78 tonnes de sodium et une hausse de 146 à 1105 tonnes de bres.

Impact sur les consommations individuelles

En termes d’apports nutritionnels, il est montré qu’après mise en œuvre des scénarii d’amélioration, pour les adultes, la consommation journalière de nutriments peut varier jusqu’à 1,8 % pour le premier scénario, jusqu’à 4 % pour le 2e scénario et jusqu’à 13,5 % pour le 3e scénario, en fonction du nutriment considéré. Pour les enfants, la consommation journalière de nutriments peut évoluer jusqu’à 4,2 % pour le premier scéna-rio, jusqu’à 8,4 % pour le 2e et jusqu’à 16,6 % pour le 3e, en fonction du nutriment considéré. En valeur absolue, on note une baisse de la consommation journalière de sucres apportés par les CPPD allant de 0,13 g/j (-1,8 %) à 0,55 g/j (-7,9 %) pour les adultes et de 0,18 g/j (-2,6 %) à 0,65 g/j (-9,1 %) pour les enfants. On observe également une augmentation de la consommation de bres apportées par les céréales : de 0,03 g/j (+1,5 %) à 0,21 g/j (+10,9 %) pour les adultes et de 0,02 g/j (+1,8 %) à 0,17 g/j (+16,6 %) pour les enfants. Pour les enfants forts consommateurs de céréales pour le petit déjeuner, les apports journaliers en sucres via les CPPD diminuent de 0,4 g à 1,4 g selon le scénario et les apports journaliers en bres augmentent de 0,04 g à 0,37 g. Ces résultats sont résumés dans le tableau 3 ci-dessous.Concernant le lien avec les recommandations du PNNS 2, pour les consommateurs moyens de CPPD, la diminution de la consommation moyenne de sucres, observée pour le 3e scéna-rio, représente 2,3 % des efforts à réaliser pour atteindre les objectifs du PNNS pour les adultes et 2,6 % pour les enfants. De la même manière, l’augmentation de la consommation

Tableau 3. Impact des scenarii envisagés sur les consommations individuelles moyennes de nutriments apportés par les CPPD chez les consommateurs de ces produits.

Sous- échantillon

Nutriment Consommateurs moyens de CPPD

S0 (g/j) S1 (g/j) S1 (%) S2 (g/j) S2(%) S3(g/j) S3 (%)

Adultes Sucres 6,95 6,82 - 1,8 % 6,67 - 4,0 % 6,40 - 7,9 %

Lipides 2,29 2,26 - 1,4 % 2,21 - 3,7 % 2,12 - 7,5 %

Fibres 1,90 1,93 +1,5 % 1,97 +3,5 % 2,11 +10,9 %

Sodium 0,093 0,092 - 1,4 % 0,090 - 3,7 % 0,080 - 13,5 %

Enfants Sucres 7,07 6,89 - 2,6 % 6,67 - 5,6 % 6,42 - 9,1 %

Lipides 1,32 1,27 - 4,2 % 1,21 - 8,2 % 1,17 - 11,6 %

Fibres 1,01 1,03 +1,8 % 1,07 +6,5 % 1,18 +16,6 %

Sodium 0,071 0,068 - 3,6 % 0,065 - 8,4 % 0,060 - 15,8 %

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Évolution récente de la composition nutritionnelle des céréales pour le petit déjeuner SS29

moyenne de bres, observée pour le 3e scénario, représente 2,4 % des efforts à réaliser pour atteindre les objectifs du PNNS pour les adultes et 2,7 % pour les enfants.Pour de plus amples détails sur la méthodologie de simulation utilisée, la constitution des familles de CPPD et les données mobilisées en ce qui concerne l’impact des scenarii sur les consommations individuelles moyennes (données écono-miques du panel TNS Kantar Worldpanel et les données de consommation de l’enquête INCA2) [15].

Discussion

Dans le tableau 4, sont récapitulés les progrès nutritionnels réalisés et proposés par les sociétés Kellogg’s et CPF-Nestlé avant et après la signature des chartes d’engagements volon-taires. Les progrès nutritionnels réalisés avant la signature des chartes portent principalement sur le sodium avec une réduction de la teneur de 37 % en moyenne dans le cas de la société Kellogg’s entre 1999 et 2009. Pour l’entreprise CPF-Nestlé, la réduction de la teneur est de 28 % en moyenne

(non pondérée) entre 2004 et 2006 sur les produits pour les enfants et les adolescents, ainsi qu’une baisse de 6 % sur les produits pour les adultes. On peut donc noter que la société Kellogg’s France s’est impliquée plus tôt en réalisant des pro-grès nutritionnels plus importants (en pourcentage) que ceux réalisés par l’entreprise CPF-Nestlé. Ceci étant, CPF-Nestlé a également entamé des améliorations sur la teneur en sucres simples dans les CPPD pour les enfants et les adolescents entre 2003 et 2009, ainsi que sur la teneur en céréales complètes entre 2005 et 2008.Concernant les engagements volontaires pris dans le cadre des chartes, on peut remarquer que les deux sociétés pour-suivent leurs actions de diminution des teneurs en sodium. En prenant en compte les actions réalisées avant la signature de la charte, ceux-ci atteindraient -52,8 % en moyenne d’ici 2014 pour la société Kellogg’s et ont déjà atteint -45 % en moyenne en 2009 pour la société CPF-Nestlé. Il est à noter que les améliorations réalisées par l’entreprise CPF-Nestlé portent uniquement sur les CPPD pour les enfants et les adolescents alors que celles proposées par l’entreprise Kellogg’s portent sur toutes ses marques.

Tableau 4. Tableau comparatif des progrès nutritionnels réalisés par les sociétés Kellogg’s et CPF- Nestlé avant et après la signature des chartes d’engagements volontaires selon les nutriments, le pourcentage d’amélioration en moyenne, la période, les marques concernées et les volumes de vente couverts.

Nutriments Chartes avant/après

Sociétés Pourcentages d’amélioration en moyenne pondérée

ou non

Périodes couvertes

Marques concernées

Volumes de ventes

Sodium Avant Kellogg’s - 37 % 1999- 2009 - -

Après - 15,8 % d’ici 2014 10 soit toutes les marques

- -

Total - 52,8 % 1999- 2014 - - -

Avant CPF- Nestlé - 28 %(moyenne non pondérée)

2004- 2006 CPPD enfants et adolescents

Après - 17 % 2006- 2009 60 %

Total - 45 % 2004- 2009 - -

Sucres simples

Avant Kellogg’s - - - - - - - -

Après - 9 % d’ici 2014 4 marques - -

Total - 9 % 2014 - -

Avant CPF- Nestlé - 10 %(moyenne non pondérée)

2003- 2009 CPPD enfants et adolescents

Après - 12 % 2009- 2012 73 %

Total - 22 % 2003- 2012

Fibres/Céréales complètes

Avant Kellogg’s - - - - - - - -

Après +25,6 % d’ici 2014 4 marques

Total +25,6 % 2014

Avant CPF- Nestlé +26 % (céréales complètes et moyenne non pondérée)

2005- 2008 Toutes CPPD - -

Après +14 % 2008- 2009 CPPD adultes 21 %

Après +5 % 2009- 2012 CPPD enfants et adolescents

62 %

Total - - 2005- 2012 Toutes CPPD - -

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SS30 Véronique Nichèle

Pour ce qui est des améliorations proposées sur les sucres simples, on a noté ci-dessus que la société CPF-Nestlé a déjà fait des progrès de diminution des teneurs dans les CPPD pour les enfants et les adolescents depuis 2003. CPF-Nestlé con rme sa démarche d’amélioration nutritionnelle sur les sucres simples et prévoit une baisse totale de 22 % d’ici la n 2012. L’entreprise Kellogg’s propose quant à elle d’entamer des diminutions qui atteindront -9 % d’ici 2014 et porteront sur quatre de ses marques, dont trois s’adressent aux enfants et adolescents et une aux personnes désirant limiter les apports en sucres.

Le cas des bres/céréales complètes est plus compliqué à analyser. Ceci est dû principalement à un défaut d’infor-mation. Cependant, il est clair que les deux sociétés sont engagées dans une démarche de progrès nutritionnel en ce qui concerne les bres. C’est appréciable sachant que ce nutriment constitue un composant important des CPPD en termes de santé. L’entreprise Kellogg’s propose d’augmenter les teneurs en bres de ses CPPD de 25,6 % en moyenne d’ici 2014 sur les mêmes marques que celles touchées par la diminution des sucres simples. La société CPF-Nestlé a, quant à elle, déjà entamé des efforts sur la période 2005-2008 sur toutes ses CPPD, efforts qu’elle a poursuivis sur ses CPPD adultes entre 2008 et 2009 et qu’elle s’engage à prolonger sur ses CPPD enfants et adolescents d’ici n 2012 (Tableau 4).

À ce stade d’analyse, il est nécessaire d’insister sur le fait que les pourcentages d’amélioration en moyenne ont un sens limité. En effet, les chartes publiques ne révèlent pas, par souci de con dentialité, les valeurs nutritionnelles initiales en sodium, sucres simples et bres/céréales complètes. Ce manque d’information rend donc la comparaison des progrès nutritionnels réalisés ou engagés par les deux sociétés dif cile. Cependant, il est évident que l’ensemble des efforts accomplis implique des améliorations en termes de qualité nutrition-nelle qui se répercuteront sur la santé des consommateurs de CPPD. Ces répercussions seront tangibles sous l’hypothèse d’acceptabilité des aliments améliorés et de choix rationnels de la part des consommateurs. On peut douter de ce dernier point. En effet, Binkley et Golub (2011) abordent la question des arbitrages des ménages en matière de goût et de nutrition, en particulier dans le cas des dépenses de CPPD [16]. Par des méthodes de régression, ils montrent que les ménages qui font les choix les plus sains sont ceux disposant des revenus les plus importants et dans lesquels la personne de référence est d’un niveau d’éducation élevé. En revanche, la présence d’enfants est associée à des choix moins sains. Les résultats obtenus sont d’autant plus déconcertants que les auteurs précisent que, dans leur étude, les consommateurs sont informés des différences de contenu nutritionnel entre produits et qu’il n’y a pas de différence de coût ou de commodité de consommation. De plus, Thunstrom (2010) [17] montre, à partir de données suédoises, qu’il existe une persistance ou un état de dépendance dans les habitudes de consommation de CPPD. Le degré de persistance est toutefois hétérogène selon les ménages et ne semble pas dépendre des niveaux de revenu ou d’éducation, certains ménages étant caractérisés par une recherche de variété de CPPD. En n l’intensité de la persistance des habitudes serait plus faible dans les familles avec enfants.

Comme on l’a déjà noté, les travaux de l’Oqali constituent une source précieuse pour le cas français.

L’étude sur les données rétrospectives entre 2001 et 2008 ne couvrant que 55 % du marché des CPPD en volume, on discute ici l’étude d’impact potentiel de l’amélioration de la qualité nutritionnelle de l’offre alimentaire réalisée en 2010, plus fournie [15]. L’in uence de l’amélioration nutritionnelle des produits d’un secteur pris individuellement, comme celui des CPPD sur les apports nutritionnels par exemple, est inférieure à 1 g/j pour chaque nutriment. Toutefois, cette étude permet d’anticiper qu’un effort cumulé sur plusieurs secteurs alimen-taires aboutirait à une évolution importante des apports en nutriments sans modi er le comportement des consommateurs. Cette approche peut être très intéressante pour les pouvoirs publics, pour les consommateurs (en supposant que les produits seraient acceptables d’un point de vue organoleptique) et pour les industriels (en supposant que les produits resteraient dans le domaine du technologiquement faisable). De plus, elle peut constituer un outil d’appui méthodologique pour alimenter les négociations entre les pouvoirs publics et les acteurs de la lière alimentaire pour la mise en place des chartes collectives d’engagements volontaires de progrès nutritionnel.

Il faut insister sur le fait que les travaux de l’Oqali sont presque les seuls au niveau mondial. En effet, dans la littérature, seuls William et McMahon (2003) décrivent une approche similaire dans le cas australien. Ils présentent une étude sur les impacts du programme « the Pick the Tick food informa-tion program » [18]. Dans ce cas, une des plus importantes entreprises de l’agro-alimentaire a entrepris un programme de reformulation des recettes de douze CPPD avec pour objectif de réduire les teneurs en sodium. Ainsi des réductions des teneurs, allant de 85 à 479 mg/100 g, ont résulté en une baisse de 235 tonnes de sel mises sur le marché.

Conclusion

Comme on l’a vu dans cet article, la France constitue un cas particulier car elle est munie de deux dispositifs précurseurs : les chartes d’engagements volontaires de progrès nutritionnel et l’Observatoire de la qualité de l’alimentation, tous deux mis au point dans le cadre du PNNS 2. Le premier dispositif a été créé pour encourager les industriels de l’agro-alimentaire à améliorer la qualité nutritionnelle et/ou à poursuivre leurs efforts de reformulation et de diversi cation des produits. Le second dispositif a été prévu pour centraliser et traiter les données nutritionnelles, économiques et socio-économiques de l’alimentation, a n d’assurer un suivi de l’offre alimentaire des produits transformés. De ce fait, la création de l’Oqali devrait inciter les industriels de l’agro-alimentaire à fournir les données sur la composition nutritionnelle de leurs produits.Dans le secteur des CPPD, les sociétés Kellogg’s France et CPF-Nestlé ont toutes deux signé une charte d’engagements volontaires de progrès nutritionnel en décembre 2010. Il apparaît que la société Kelloggs’s a entamé depuis 1999, donc bien avant la signature de la charte, une démarche de progrès nutritionnel sur les teneurs en sodium de ses céréales, alors que la société CPF-Nestlé s’est engagée dans ce sens à partir de 2004. Inversement, CPF-Nestlé a diminué les teneurs en

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Évolution récente de la composition nutritionnelle des céréales pour le petit déjeuner SS31

sucres simples de ses céréales dès 2004 tandis que Kellogg’s a proposé une baisse des teneurs en sucres simples de ses CPPD à l’occasion de la signature de la charte. De même, la société CPF-Nestlé a pris de l’avance sur la société Kellogg’s en ce qui concerne les teneurs en bres de ses CPPD, puisque les premières améliorations ont été réalisées en 2005. Ceci étant, compte tenu de l’information disponible, il est dif cile de dire laquelle des deux sociétés est la plus avancée dans sa démarche d’amélioration nutritionnelle. Cependant, on peut souligner que la société Kellogg’s étant apparue plus tôt sur le marché des CPPD est, de fait, à l’avant-garde dans le domaine des progrès nutritionnels. Ceci étant, le tableau 3 permet également de conclure que, dans le cadre des chartes, la société CPF-Nestlé prévoit des améliorations nutritionnelles plus rapides que celles sur lesquelles s’est engagée la société Kellogg’s. Quoiqu’il en soit, on peut comprendre que les deux entreprises agissent en parallèle dans leurs démarches de progrès nutritionnel. En effet, ces sociétés étant en concurrence sur le marché des CPPD, les enjeux économiques sont importants.En matière d’amélioration de la qualité nutritionnelle, le résultat des signatures des chartes est concluant. En effet, les CPPD mises actuellement sur le marché sont moins salées, moins sucrées et plus riches en céréales complètes. Les consommateurs de CPPD ont donc le choix entre consom-mer des céréales « classiques » ou consommer des céréales réputées meilleures pour leur santé. De plus, les chartes d’engagements volontaires de progrès nutritionnel proposent aux industriels de l’agro-alimentaire de s’engager sur la promotion d’une amélioration de la consommation, avec notamment un encadrement du marketing et de la publicité relatifs aux produits alimentaires.En ce qui concerne l’Oqali, les deux sociétés fournissent par le biais du Syndicat des céréales les données sur la compo-sition nutritionnelle de leurs produits. De ce fait, le champ couvert par l’ensemble des résultats publiés dans le cadre de l’Oqali comprend les données des sociétés Kellogg’s et CPF-Nestlé, prédominantes sur le marché des CPPD. Selon le quatrième rapport d’étude publié par l’Oqali [15], l’in uence de l’amélioration nutritionnelle des produits d’un secteur pris individuellement, comme celui des CPPD par exemple, sur les apports nutritionnels est inférieure à 1 g/j pour chaque nutriment. Toutefois, cette étude permet d’anticiper qu’un effort cumulé sur plusieurs secteurs alimentaires aboutirait à une évolution importante des apports en nutriments sans modi er le comportement des consommateurs. Cette approche peut être très intéressante pour les pouvoirs publics, pour les consommateurs et pour les industriels. De plus, elle peut constituer un outil d’appui méthodologique pour alimenter les négociations entre les pouvoirs publics et les acteurs de la lière alimentaire pour la mise en place des chartes collectives d’engagements volontaires de progrès nutritionnel.

Remerciements

L’auteure souhaite spécialement remercier Pierre Combris, José Dalmas et Clementina Sébillotte pour leurs remarques pertinentes, l’équipe Oqali de l’INRA-ALISS pour son aide, Armelle Champenois pour son ef cacité dans l’élaboration de la bibliographie et David Delobel pour son assistance technique.

Déclaration d’intérêt

L’auteure est membre expert en économie du comité des chartes d’engagements volontaires de progrès nutritionnel. Elle a été normalement rétribuée pour la rédaction de cet article.

Références[1] Plan National Nutrition Santé. 2001. (Consulté le 28 février,

2012, http://www.mangerbouger.fr/pnns/).[2] Les chartes d’engagements de progrès nutritionnel. (Consulté

le 27 février 2012, http://www.sante.gouv.fr/les-chartes-d-engagements-de-progres-nutritionnels.html).

[3] Observatoire de la qualité de l’alimentation (Oqali). 2008. (Consulté le 28 février 2012, http://www.oqali.fr/oqali/).

[4] Muratore I, Guichard N. Ce produit est-il bon pour la santé ? La représentation des packagings de céréales du petit déjeuner chez les enfants, Management & Avenir 2010:159-79.

[5] Programme National Nutrition Santé 2 (2006-2010). 2006. (Consulté le 27 février 2012, http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/plan.pdf).

[6] Comité de validation des chartes d’engagements de progrès nutritionnels. 2007. (Consulté le 27 fév rier 2012, http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/comite_chartes.pdf).

[7] Référentiel type pour les chartes d’engage ments volontaires de progrès nutritionnel proposées par les exploitants du secteur alimentaire dans le cadre du programme national nutrition santé 2. (Consulté le 27 fé vrier 2012, http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/referentiel_chartes.pdf).

[8] Charte d’engagements volontaires de progrès nutritionne l proposée par Kellogg’s France pour ses céréales pour le petit déjeuner, 2010. (Consulté le 27 février 2012, http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/Charte_kellogg_s.pdf).

[9] Charte d’engagem ents volontaires de progrès nutritionnels proposée par Cereal Partners France pour les Céréales Petit déjeuner Nestlé - Version Publiqu e. 2010. (Consulté le 27 février 2012, http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/CPF.pdf).

[10] Charte d’engagements volontaires de progrès nutritionnel dans le cadre du PNNS 2. 2008. (Consulté le 27 février, 2012, http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/casino.pdf).

[11] Charte d’engagements volontaires de progrès nutritionnels Scamark. 2009. (Consulté le 27 février, 2012, http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/scamark_charte_publique.pdf).

[12] Combris P, Goglia R, Henini M, Soler LG, Spite ri M, Stevenin F. Étude du secteur des céréales pour le petit déjeuner 2008. Résultats. OQALI ; INRA ; AFSSA ; 2009. (http://www.oqali.fr/oqali/publications_oqali/etudes_sectorielles).

[13] Combris P, Goglia R, Henini M, Soler LG, Spiteri M, Stevenin F. Étude d es données rétrospectives. OQALI ; 2010. (http://www.oqali.fr/oqali/publications_oqali/autres_etudes).

[14] Combris P, Goglia R, Henini M, Soler LG, Spiteri M, Stevenin F. Complément d’étude du secteur des céréales pour le petit déjeuner. OQALI ; 2010. (http://www.oqali.fr/ oqali/publications_oqali/etudes_sectorielles).

[15] Combris P, Goglia R, Henini M, Soler LG, Spiteri M, Stevenin F. Étude d’impact potentiel de l’amélioration de la qualité nutritionnelle de l’offre a limentaire. OQALI ; 2010. (http://www.oqali.fr/oqali/publications_oqali/autres_etudes).

[16] Binkley JK, Golub A. Consumer demand for nutrition versus taste in four major food categories. Agric Econ 201Thunstrom L. Preference heterogeneity and habit persistence: The case of breakfast cereal consumption. J Agric Econ 2010;61:76-96.

[17] Williams P, M cMahon A, Boustead R. A case study of sodium reduction in breakfast cereals and the impact of the Pick the Tick food information program in Australia. Health Promotion International 2003;18:51-6.