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FLASH INFO Fruits et légumes : la santé des enfants § Pourquoi les garçons mangent-ils moins de fruits et légumes que les filles ? Traduction du texte original d’E. Bere (universite´ d’Agder, faculte´ de la sante´ et du sport, Norve`ge). Actuellement, dans les pays occidentaux, les hommes meurent plus jeunes que les femmes. C’est peut-être parce qu’ils mangent de façon moins saine : tout comme les jeunes garçons, ils consomment moins de fruits et légumes. Et on ne peut pas facilement changer de sexe ! Pour développer des campagnes d’intervention efficaces, il paraît donc important d’identifier les facteurs modifiables liés aux différences de sexe. Dans un article récent, nous avons tenté d’analyser les raisons de cette moindre consom- mation de fruits et légumes chez les garçons [1]. Il existe des facteurs personnels modifiables de consommation des fruits et légumes Chez les adultes, peu d’études ont exploré ce thème. Les raisons probables de cette différence sont sans doute les suivantes : les hommes possèderaient de moins bonnes notions nutritionnelles, porteraient moins d’intérêt à la santé et suivraient moins de régimes que les femmes. Chez les adolescents norvégiens, diverses études ont identifié un certain nombre de facteurs personnels modifia- bles de consommation de fruits et légumes. On peut citer : l’accessibilité des fruits et légumes à la maison, leur iden- tification, l’intention d’en manger « cinq par jour », les préférences pour les fruits et légumes, l’assurance de pou- voir consommer cinq fruits et légumes par jour et la connais- sance des recommandations nutritionnelles. Dans notre étude, nous avons utilisé les données du projet fruits and vegetables make the marks (FVMM) pour tenter d’analyser si ces facteurs influent réellement sur la consom- mation de fruits et légumes parmi les adolescents et les adolescentes. Les garçons ont des scores plus faibles que les filles... Dans l’échantillon étudié, les garçons consommaient signifi- cativement moins de fruits et légumes que les filles : res- pectivement, 11,9 versus 14,5 fois par semaine. Pour tous les déterminants potentiels de consommation, ils avaient un score plus faible. Ainsi, les garçons connaissaient moins bien les recommandations nationales pour les fruits et légumes que les filles. La différence entre les sexes pour les déter- minants potentiels expliquerait 91 % des différences de la consommation de fruits et légumes. Un facteur, en particu- lier, serait déterminant : les préférences. La perception de l’accessibilité expliquerait également une partie de cette différence. En clair, cette étude indique que si les garçons norvégiens mangent moins de fruits et légumes que les filles, c’est parce qu’ils les apprécient moins et les trouvent moins accessibles à la maison que les filles. En revanche, cette différence de consommation de fruits et légumes entre les sexes ne s’expliquerait pas par une meilleure connaissance nutritionnelle dans l’entourage, de plus fermes intentions ou une meilleure efficacité personnelle. L’héritage physiologique des chasseurs et des cueilleuses ? Précédemment, il a été rapporté que, déjà dès l’âge de quatre ans, les filles apprécient plus les fruits et légumes que les garçons. Les raisons de cette différence restent mal identifiées. Il a été suggéré que la pression sociale pourrait avoir un plus grand impact sur les réponses des filles car elles attache- raient plus d’importance à la nutrition. Une deuxième raison serait la préférence des garçons pour les aliments à forte teneur calorique (ce n’est pas le cas des fruits et légumes !) qui leur permettraient de s’adapter à leurs plus grands besoins énergétiques... Hypothèse qui supposerait des dif- férences physiologiques entre les sexes. Est-il possible que les garçons apprécient moins les fruits et légumes que les filles à cause de telles différences ? On sait que, dans les sociétés primitives de chasseurscueilleurs, les hommes chassaient et les femmes cueillaient. Même si la nourriture était partagée, il est probable que les hommes Journal de pédiatrie et de puériculture (2008) 21, 317319 § Extraits de la lettre Équation nutrition, édité par Aprifel (Agence fruits et légumes frais) avril à mai 2008 ; n os 76 et 77. Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com journal homepage: http://france.elsevier.com/direct/PEDPUE/ 0987-7983/$ see front matter doi:10.1016/j.jpp.2008.07.005

Fruits et légumes : la santé des enfants

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FLASH INFO

Fruits et légumes : la santé des enfants§

Journal de pédiatrie et de puériculture (2008) 21, 317—319

Disponib le en l igne sur www.sc ienced i rect .com

journa l homepage: http://france.e l sev ier.com/di rect/PEDPUE/

Pourquoi les garçons mangent-ils moins defruits et légumes que les filles ?

Traduction du texte original d’E. Bere (universite d’Agder,faculte de la sante et du sport, Norvege).

Actuellement, dans les pays occidentaux, les hommesmeurent plus jeunes que les femmes. C’est peut-être parcequ’ils mangent de façon moins saine : tout comme les jeunesgarçons, ils consomment moins de fruits et légumes. Et on nepeut pas facilement changer de sexe !

Pour développer des campagnes d’intervention efficaces,il paraît donc important d’identifier les facteurs modifiablesliés aux différences de sexe. Dans un article récent, nousavons tenté d’analyser les raisons de cette moindre consom-mation de fruits et légumes chez les garçons [1].

Il existe des facteurs personnels modifiables deconsommation des fruits et légumes

Chez les adultes, peu d’études ont exploré ce thème.Les raisons probables de cette différence sont sans doute

les suivantes : les hommes possèderaient de moins bonnesnotions nutritionnelles, porteraient moins d’intérêt à lasanté et suivraient moins de régimes que les femmes.

Chez les adolescents norvégiens, diverses études ontidentifié un certain nombre de facteurs personnels modifia-bles de consommation de fruits et légumes. On peut citer :l’accessibilité des fruits et légumes à la maison, leur iden-tification, l’intention d’en manger « cinq par jour », lespréférences pour les fruits et légumes, l’assurance de pou-voir consommer cinq fruits et légumes par jour et la connais-sance des recommandations nutritionnelles.

Dans notre étude, nous avons utilisé les données du projetfruits and vegetables make the marks (FVMM) pour tenterd’analyser si ces facteurs influent réellement sur la consom-mation de fruits et légumes parmi les adolescents et lesadolescentes.

§ Extraits de la lettre Équation nutrition, édité par Aprifel (Agencefruits et légumes frais) avril à mai 2008 ; nos 76 et 77.

0987-7983/$ — see front matterdoi:10.1016/j.jpp.2008.07.005

Les garçons ont des scores plus faibles que lesfilles. . .

Dans l’échantillon étudié, les garçons consommaient signifi-cativement moins de fruits et légumes que les filles : res-pectivement, 11,9 versus 14,5 fois par semaine. Pour tous lesdéterminants potentiels de consommation, ils avaient unscore plus faible. Ainsi, les garçons connaissaient moins bienles recommandations nationales pour les fruits et légumesque les filles. La différence entre les sexes pour les déter-minants potentiels expliquerait 91 % des différences de laconsommation de fruits et légumes. Un facteur, en particu-lier, serait déterminant : les préférences. La perception del’accessibilité expliquerait également une partie de cettedifférence. En clair, cette étude indique que si les garçonsnorvégiens mangent moins de fruits et légumes que les filles,c’est parce qu’ils les apprécient moins et les trouvent moinsaccessibles à la maison que les filles. En revanche, cettedifférence de consommation de fruits et légumes entre lessexes ne s’expliquerait pas par une meilleure connaissancenutritionnelle dans l’entourage, de plus fermes intentions ouune meilleure efficacité personnelle.

L’héritage physiologique des chasseurs et descueilleuses ?

Précédemment, il a été rapporté que, déjà dès l’âge dequatre ans, les filles apprécient plus les fruits et légumes queles garçons.

Les raisons de cette différence restent mal identifiées. Il aété suggéré que la pression sociale pourrait avoir un plusgrand impact sur les réponses des filles car elles attache-raient plus d’importance à la nutrition. Une deuxième raisonserait la préférence des garçons pour les aliments à forteteneur calorique (ce n’est pas le cas des fruits et légumes !)qui leur permettraient de s’adapter à leurs plus grandsbesoins énergétiques. . . Hypothèse qui supposerait des dif-férences physiologiques entre les sexes.

Est-il possible que les garçons apprécient moins les fruitset légumes que les filles à cause de telles différences ? On saitque, dans les sociétés primitives de chasseurs—cueilleurs, leshommes chassaient et les femmes cueillaient. Même si lanourriture était partagée, il est probable que les hommes

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mangeaient plus de produits de la chasse (viande) et lesfemmes plus les plantes de la cueillette et, de ces différen-ces, seraient nées les préférences hommes—femmes. Cepen-dant, cette hypothèse doit être testée (reste à savoircomment. . .).

Tout est peut-être « dans la tête »

Dans notre étude, nous avons observé une différence entreles sexes portant sur l’accessibilité perçue des fruits etlégumes à la maison : les filles avaient des scores plus élevésque les garçons. Cependant, aucune différence d’accessibi-lité aux fruits et légumes à domicile n’a été notée par lesparents de la cohorte FVMM. . .

Cette différence serait donc plutôt liée à la perception del’accessibilité qu’à l’accessibilité elle-même. Ainsi, les fillespensent qu’à la maison l’accessibilité est plus grande, mêmesi ce n’est peut-être pas vrai.

En conclusion, si les garçons consomment moins de fruits etlégumes que les filles, c’est surtout parce qu’ils les apprécientmoins. Il est donc à présent important d’étudier pourquoi lesfilles aiment mieux les fruits et légumes que les garçons. . .

Dur d’être un enfant obèse. . .

Traduction du texte original de D. Molnar et E. Kovacs(departement de pediatrie, universite de Pecs, Hongrie).

L’épidémie croissante d’obésité infantile a attiré l’atten-tion sur les facteurs de risques et les comorbidités associées.Selon les données les plus récentes, il y aurait, en Europe,22 millions d’enfants en surpoids et cinq millions d’obèses,chiffre qui augmente de 300 000 enfants chaque année.Ainsi, l’obésité infantile représente un fardeau importantet continuellement croissant pour la santé publique et lasociété en général.

Augmentation des risques cardiovasculaires

Les facteurs de risques cardiovasculaires classiques associésà l’obésité sont fréquemment retrouvés chez les enfants, enparticulier, chez les adolescents.

Les odds-ratios pour les facteurs de risque suivants sont :

� h

ypertension diastolique : 2,4 ; � a ugmentation du LDL : 3,0 ; � f aible taux de HDL : 3,4 ; � h ypertension systolique : 4,5 ; � t riglycérides élevés : 7,1 ; � in suline élevée à jeun : 12,6.

Dans une autre étude européenne, les enfants obèsesavaient 19,35 fois plus de risque de développer au moinsl’un des facteurs de risques suivants :

� u

ne hypertension artérielle ; � u ne hyperinsulinémie/insulinorésistance ; � u ne intolérance au glucose/diabète de type 2 (DT2) ; � u ne augmentation de cholestérol LDL ;

� u

ne diminution de cholestérol HDL ou une hypertrigly-céridémie.Dans cette étude, ils avaient également 6,29 fois plus de

risque d’avoir plus d’un facteur de risque que le groupetémoin de poids normal.

De plus en plus de diabète chez les enfants

Le surpoids et l’obésité infantiles jouent également un rôlemajeur dans le développement du syndrome métabolique(SM) qu’on définit comme le regroupement des facteurs derisque listés ci-dessus [2].

Une publication récente a estimé la prévalence du SM enEurope à partir d’une revue de la littérature et l’a extrapoléepour les25paysmembres. Elle seraitde23,9%chez les enfantset les adolescents européens (1,21 millions d’enfants) [3].

Les études de population suggèrent que, chez les adultes,l’épidémie d’obésité a été suivie de celle du DT2. Cesdernières années, le DT2 a été rapporté de plus en plussouvent chez les enfants et adolescents en surpoids ouobèses. À présent, le diagnostic de DT2 est habituellementporté chez des enfants de plus de dix ans, au milieu ou à la finde la puberté. Comme le surpoids augmente dans la popula-tion enfantine, le DT2 devrait ainsi toucher des enfants plusjeunes, prépubères.

Cependant, la prévalence de DT2 reste inférieure à 2 %chez les enfants européens obèses [4].

Poids des conséquences psychosociales

Des conséquences psychosociales défavorables résultant desmodifications de l’apparence physique et des handicapsphysiques sont fréquentes [5]. Dès l’âge de six ans, lesenfants obèses peuvent être perçus de façon négative,souffrir de rejet, avoir des relations sociales pauvres, êtreisolés ou acquérir une mauvaise image de leur corps. Ilsprésentent souvent des signes de dépression. Ces problèmespeuvent persister à l’âge adulte.

Le fardeau social de l’obésité peut également retentir surles résultats scolaires : les difficultés d’apprentissage [6]sont dues à une hypoventilation nocturne ou une apnée dusommeil et à une malnutrition par la consommation d’ali-ments riches en énergie et pauvres en nutriments. Ellespeuvent réduire la durée de la scolarité et être à l’origined’un moindre niveau socioéconomique à l’âge adulte.

Les modifications hormonales et pubertaires peuvent êtreles plus préoccupantes pour les enfants obèses : pseudo-gynécomastie et pseudohypogénitalisme chez les garçons,hirsutisme et formation accrue d’acné chez les filles, pou-vant être aggravés par une puberté précoce, des cyclesirréguliers ou un syndrome des ovaires polykystiques.

Chez les enfants obèses, on retrouve également descomplications orthopédiques, des pseudotumeurs cérébra-les, des modifications cutanées et des troubles du métabo-lisme antioxydatif [7].

Petit obèse deviendra grand. . . et gras

Les données épidémiologiques du monde entier montrentl’augmentation rapide de l’obésité infantile. Elles soulignentl’importance de se concentrer sur l’évaluation correcte des

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facteurs de risque et le développement de critères de dépis-tage. Cependant, l’évolution de cette pathologie montrequ’une sévérité croissante et/ou une durée prolongée del’obésité entraînerait une augmentation du nombre deconséquences défavorables. Ainsi, des signes pathologiquesmineurs décelés durant l’enfance seraient associés à unrisque encore plus élevé de développer des pathologiesassociées à l’obésité au début de l’âge adulte.

De plus, une obésité chez l’enfant a tendance à persisterplus tard dans la vie. Le risque d’obésité à l’âge adulte estdeux fois plus élevé chez les enfants en surpoids par rapportaux enfants de poids normal. Une revue de la littérature surla persistance de l’obésité au cours de la vie a montré que 26à 41 % des enfants obèses d’âge préscolaire et 42 à 63 % desécoliers obèses devenaient des adultes obèses.

Au vu de ces données, un ensemble de preuves suggèredonc qu’il faut consacrer les efforts de santé publique audépistage et à la prévention précoce de l’obésité chez lesenfants. La responsabilité en incombe aussi bien aux parents,qu’aux paramédicaux et aux médecins.

Références

[1] Bere E, Brug J, Klepp KI. Why do boys eat less fruits andvegetables than girls? Public Health Nutrition. Disponible surhttp://journals.cambridge.org depuis le 1er août 2007.

[2] Lobstein T, Jackson-Leach R. Estimated burden of paediatricobesity and co-morbidities in Europe. Part 2. Numbers of chil-dren with indicators of obesity-related disease. 2006;1:33—41.

[3] Molnar D. Prevalence of the metabolic syndrome and type 2diabetes mellitus in obese children and adolescents.2004;28(suppl. 3):S70—4.

[4] Malecka-Tendera E, Erhardt E, Molnar D. Type 2 diabetesmellitas in European children and adolescents. 2005;94:543—6.

[5] Torok K, Szelenyi Z, Prosas J, Molnar D. Low physical performancein obese boys with multimetabolic síndrome. 2001;25:966—70.

[6] Cserjesi R, Molnar D, Luminet O, Lenard L. Is there any rela-tionship between obesity and mental flexibility in children?2007;49:675—8.

[7] Molnar D, Decsi T, Koletzko B. Reduced antioxidant status in obesechildren with multimetabolic syndrome. 2004;28:1197—202.