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La croyance est- elle un bon calcul ? Daniel Justens HEFF/IREM de Bruxelles UER « Mathématiques Appliquées » Poitiers – 11/12 mars 2008

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La croyance est-elle un bon calcul ?

Daniel JustensHEFF/IREM de Bruxelles

UER « Mathématiques Appliquées »

Poitiers – 11/12 mars 2008

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Un peu de littérature …

Molière 1665

Dom Juan

Acte III scène 1

Déclaration d’athéisme par l’arithmétique

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Mathématiciens et croyances

Dans Pour l’honneur de l’esprit humain, Jean Dieudonné - bien nommé - constate l’éclectisme des mathématiciens:

Les opinions des mathématiciens en matière de religion sont très diverses : Cauchy était un bigot, mais Hardy un curieux athée pour qui Dieu était un ennemi personnel ; Gauss était très conservateur mais Galois un fougueux révolutionnaire.

Parallélisme entre le titre de Dieudonné – emprunté à Jacobi (1804 – 1851) – et le célèbre « pour la plus grande gloire de Dieu » … des Jésuites.

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Mathématiciens religieux I

Georg Cantor (1845 – 1918) déclarait en 1896 :

Pour la première fois, grâce à moi, la philosophie chrétienne disposera de la vraie théorie de l’infini.

La plus haute perfection de Dieu est la possibilité de créer un ensemble infini et son immense bonté conduit à le créer.

La triste fin de Cantor …

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Mathématiciens religieux II

La preuve de l’existence de dieu de Kurt Gödel (1906 – 1978)

Si l’on admet que l’intersection de toutes les propriétés positives est appelée Dieu, elle existe, c’est-à-dire est non vide; alors l’être qui fait qu’elle est non vide existe

La triste fin de Gödel …

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Mathématiciens « athées ? »

Pythagore (580 - 500 BC)

A l’âge de 56 ans il fonde une école de philosophie à Crotone (Italie du Sud). Il y fut accusé d’athéisme puis acquitté.

Omar Khayyam (1048 - 1131)

Et notre âme, qu'Allah attend pour la juger selon ses mérites, dites-vous ?

Je vous répondrai là-dessus quand j'aurai été renseigné par quelqu'un revenant de chez les morts.

(CLIII). Il fut contraint de faire le pèlerinage à la Mecque.

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Un exemple paradoxal

Godfrey Harold Hardy (1877 1947). Athée ?Lors d'une traversée agitée en bateau de Scandinavie au Royaume-Uni, Hardy, expédia une carte postale à un collègue pour lui annoncer qu'il avait démontré l'hypothèse de Riemann. Il s'imaginait que Dieu n'allait pas le laisser mourir et, ainsi, faire croire à la communauté mathématique qu'il avait démontré une importante conjecture de la théorie des nombres premiers.

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En quoi la disposition d’esprit d’un mathématicien peut-elle éclairer les faits

religieux ?

La construction de systèmes logico-axiomatiques est l’essence même des mathématiques :

elle prédispose à une réflexion dénuée de préjugés.

elle enseigne la pertinence simultanée et la cohabitation possibles de systèmes apparemment antagonistes.

Certains résultats (théorème de Gödel) incitent à la modestie.

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Puissance explicative des mathématiques

Les mathématiques rendent notre monde intelligible sans recours à l’hypothèse de l’existence d’un « grand architecte »

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Position de Laplace face à Napoléon :

en 1796, il publie L'exposition du système du monde, ouvrage expliquant la naissance du Système solaire. Il part de l’hypothèse de la naissance simultanée du Soleil et des planètes à partir d'un même nuage de gaz et de poussières en rotation.

Napoléon fit remarquer à Laplace :

«Votre travail est excellent, mais il n'y a pas de trace de Dieu dans votre ouvrage»

Laplace lui répondit :

«Sire, je n'ai pas eu besoin de cette hypothèse.»

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Le contenu probabiliste des théories évolutionistes

La théorie neutraliste de Motoo Kimura

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L’explication statistico-probabiliste de notre existence

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La position de Pie IXLe 8 décembre 1854, Pie IX définit le dogme de l'immaculée conception de la Vierge Marie, sans réunir un concile comme il était d'usage pour les questions concernant le dogme.

Il publie en 1864 le Syllabus, texte officiel dans lequel il condamne entre autres le modernisme et la « liberté de la Foi et de la conscience ».

Le 1er concile œcuménique du Vatican se tient du 8 décembre 1869 au 20 octobre 1870. Il y introduit la notion de l'infaillibilité pontificale

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La position de Jean-Paul II

Le 10 novembre 1979 (centième anniversaire de la naissance d'Albert Einstein), il souhaite approfondir le cas de Galilée.

Le 3 juillet 1981, il nomme une commission d'étude composée de théologiens, de savants, et d'historiens, afin de

« faire disparaître la défiance que cette affaire oppose encore, dans beaucoup d'esprits, à une concorde fructueuse entre science et foi. »

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Le 31 octobre 1992, la commission remet les conclusions de son rapport et Jean-Paul II fait un discours devant l'Académie pontificale des sciences :

« Ainsi la science nouvelle, avec ses méthodes et la liberté de recherche qu'elle suppose, oblige les théologiens à s'interroger sur leurs propres critères d'interprétation de l'Écriture.

La plupart n'ont pas su le faire.

Paradoxalement, Galilée, croyant sincère, s'est montré plus perspicace sur ce point que ses adversaires théologiens ».

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22 octobre 1996, nouveau discours :

« Aujourd'hui, de nouvelles connaissances conduisent à reconnaître dans la théorie de l'évolution plus qu'une hypothèse. Il est en effet remarquable que cette théorie se soit progressivement imposée à l'esprit des chercheurs, à la suite d'une série de découvertes faites dans diverses disciplines du savoir. La convergence, nullement recherchée ou provoquée, des résultats de travaux menés indépendamment les uns des autres, constitue par elle-même un argument significatif en faveur de cette théorie. »

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La position de certains musulmans et des chrétiens créationistes

Harun Yahya (Adnan Oktar) : Atlas de la création

« Je tiens à attirer l’attention des chefs d’établissement et des enseignants sur l’ouvrage intitulé « Atlas de la création », de l’auteur Harun YAHYA (Adnan OKTAR, de son vrai nom), qu’ils pourraient recevoir sous peu. Cet ouvrage vise à réfuter la théorie de l’évolution et tente de prouver que l’homme est resté inchangé au fil du temps, contrairement aux apports des travaux scientifiques en la matière. Je mets en garde l’ensemble des équipes éducatives contre les valeurs véhiculées dans ce document ; elles sont contraires aux valeurs qui sous-tendent (…) les programmes d’enseignement. »

Marie Arena

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Bouddhisme

Position du Dalaï-Lama (2005) :

« Si la science prouve que certaines croyances du bouddhisme sont fausses, alors le bouddhisme les changera ».

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Alors, que sont les mathématiques ?

Quelle est donc cette science curieuse, simultanément abstraite (divine ?) et néanmoins terriblement efficace (matérialiste ?), et qui permet une description du monde sans avoir à faire l’hypothèse de l’existence d’un dieu ?

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Mathématiques divines

La question fondamentale établissant un parallélisme entre mathématiques et religions n’est pas triviale.

Lorsque les mathématiciens élaborent leurs théories, découvrent-ils progressivement des Vérités pré-existantes (et éventuellement d’origine divine) ou participent-ils à la construction et à la création ex nihilo d’un édifice profondément lié à nos structures cérébrales humaines et par conséquent totalement dépendant de notre matérialité ?

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Deux grandes questions … liées ?

Les mathématiques existent-elles indépendamment de l'être humain, auquel cas, on se contente de les découvrir, ou n'existent-elles que par l'être humain, auquel cas on les invente ?

L’univers suit-il un « dessein intelligent » ou se construit-il aléatoirement et progressivement ?

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Le sujet fait les gros

titresdes

magazines scientifiques

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Les prises de position

Le platonisme mathématique de Godfrey Harold Hardy:

La réalité mathématique existe indépendamment de nous, notre fonction est de la découvrir ou de l'observer, et les théorèmes que nous prouvons, que nous décrivons de manière grandiloquente comme nos ``créations'' sont simplement nos relevés d'observations.

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La position opposée

Réponse du neurologue Jean-Pierre Changeux au mathématicien Alain Connes :

J'aimerais bien connaître le support de ces objets mathématiques dont tu prétends qu'ils existent indépendamment du cerveau de l'homme, tout en te déclarant matérialiste. J'imagine difficilement que les nombres entiers existent dans la nature. Pourquoi ne pas voir 3.1416 écrit en lettres d'or dans le ciel ou 6.02 x 1023 apparaître dans les reflets d'une boule ce cristal ?

Les mathématiques me paraissent plutôt constituer un langage formel, simplifié au maximum et propre à l’espèce humaine.

(Matière à penser, de Jean-Pierre Changeux et Alain Connes)

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La religiosité mathématique

Alain Connes s’engage. A Jean-Pierre Changeux qui l’interroge

Mais peut-être t’es-tu lancé dans le débat avec des idées un peu arrêtées ?

Il n’hésite pas à répondre :

J’y crois.

(Matière à penser, de Jean-Pierre Changeux et Alain Connes)

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On peut mettre ce credo en parallèle avec les propos de Calder :

Croire en l’existence d’une vérité mathématique en dehors de l’esprit humain exige du mathématicien un acte de foi dont la plupart ne sont pas conscients.

Les mathématiques aujourd’hui, Pour la Science, 1986, pages 203-211.

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Une position personnelle

Les mathématiques peuvent être considérées comme une interface mentale construite par notre cerveau, entre le réel qui n'est jamais que partiellement accessible, et sa propre structure.

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Parmi le contenu des activités mathématiques : l’étude des invariants et des classes d’équivalence

Application aux révélations et aux différentes « tables de la loi »

Le code d’Hammourabi

Le décalogue

Le coran

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Quand Anu le Sublime, Roi des Anounaki, et Enlil, Seigneur du Ciel et de la terre, qui a décidé du sort du monde, ont assigné à Mardouk, le régnant fils d'Ea, Dieu du droit, la domination sur l'humanité terrestre, et l'a fait grand parmi les Igigi, ils ont donné à Babylone son nom illustre, l'ont rendue grande sur la terre, et fondé sur elle un royaume éternel, dont les fondations sont établies aussi solidement que celles du ciel sur la terre; ensuite Anou et Enlil m'ont appelé par mon nom, moi, Hammourabi, le prince exalté, craignant Dieu, afin d'apporter les règles du droit dans le pays, pour soumettre les méchants et les malfaiteurs; de sorte que le puissant ne puisse nuire au faible; afin que je puisse régner comme Shamash sur les peuples à tête noire, et illuminer la terre, pour le bien-être futur de l'humanité.

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Le décalogue : ces instructions sont données deux fois dans le Pentateuque, dans le livre de l'Exode (20:2-17), et dans le Deutéronome (5:6-21).

Moïse convoqua tout Israël, et leur dit : Écoute, Israël, les lois et les ordonnances que je vous fais entendre aujourd'hui. Apprenez-les, et mettez-les soigneusement en pratique. L'Éternel, notre Dieu, a traité avec nous une alliance à Horeb. (…)

L'Éternel vous parla face à face sur la montagne, du milieu du feu.

Je me tins alors entre l'Éternel et vous, pour vous annoncer la parole de l'Éternel; car vous aviez peur du feu, et vous ne montâtes point sur la montagne. Il dit: …

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Le Coran Sourate 2 (La Vache) versets 51 et suivants :

51. Et rappelez- vous, lorsque Nous donnâmes rendez- vous à Moïse pendant quarante nuits ! .. Puis en son absence vous avez pris le Veau pour idole alors que vous étiez injustes à l'égard de vous mêmes en adorant autre qu'Allah.

52. Mais en dépit de cela Nous vous pardonnâmes, afin que vous reconnaissiez nos bienfaits à votre égard.

53. Et rappelez- vous, lorsque Nous avons donné à Moïse le Livre et le discernement afin que vous soyez guidés.

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Mathématisation de l’implication

Besoin d’imposer un statu quo social, économique et politique

Nécessité d’imposer un code de conduite

Recours à un être supérieur qui empêche toute forme de contestation

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Le problème de la

« conviction »

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Avantages biologique de la croyance

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Statistiques et Religions

Selon un récent sondage de l’Institut Harris (2006) :

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Le pari de Pascal Pensées III fragment 233

« infini – rien »

Examinons donc ce point, et disons :

Dieu est, ou il n'est pas.

Mais de quel côté pencherons-nous ? La raison n'y peut rien déterminer : il y a un chaos infini qui nous sépare. Il se joue un jeu, à l'extrémité de cette distance infinie, où il arrivera croix ou pile.

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- Que gagerez –vous? Par raison, vous ne pouvez faire ni l'un ni l'autre ; par raison, vous ne pouvez défaire nul des deux. Ne blamez pas de fausseté ceux qui ont pris un choix car vous n’en savez rien.

- Non, mais je les blamerai d’avoir fait, non ce choix, mais un choix. Car celui qui prend croix et l’autre sont en pareille faute. Le juste est de ne point parier

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Oui ; mais il faut parier ; cela n'est pas volontaire, vous êtes embarqué. Lequel prendrez-vous donc ? Voyons ...

Pesons le gain et la perte, en prenant croix que Dieu est. Estimons ces deux cas : si vous gagnez, vous gagnez tout ; si vous perdez, vous ne perdez rien.

Gagez donc qu'il est, sans hésiter.'

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Mathématisation du pari de Pascal

Univers très simplifié à deux options :

Non-existence d’un dieu :

• événement 1, de probabilité p1

Existence d’un dieu :

• événement 2 de probabilité p2 = (1-p1)

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Stratégie 1 : tabler sur la non-existence d’un dieu

Construction de la variable aléatoire X1 « quantité de satisfaction en cas de mode de vie ne tenant pas compte des exigences de la religion »

• À 1 on associe une quantité x1 = a bornée

• À 2 on associe une quantité x2 = - L

On calcule alors :

E[X1] = p1 a - p2 L

a et L dépendent évidemment de nos choix moraux.

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Construction de la variable aléatoire X2 :

« quantité de satisfaction en cas de vie tenant compte des exigences de la religion »

• À 1 on associe une quantité x1 = b < a .

• À 2 on associe une quantité x2 = M aussi grande que l’on veut.

On calcule alors :

E[X2] = p1 b + p2 M

Stratégie 2 : tabler sur l’existence d’un dieu

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Discussion de la condition b<a

Acceptation de règles arbitraires non dictées par la raison : interdits alimentaires - obligations vestimentaires - participations rituelles obligatoires – obligations morales – mutilations ...

Mais

Facilité en matière de morale. Adhésion à un système établi et donc économie de pensée. Suppression du doute. Définition normée du bien et du mal. Confort.

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Conclusions

Si p1 = 1 :

E[X1] = p1 a - (1-p1) L > E[X2] = p1 b + (1-p1) M

indétermination ? limite ?

Si p1 < 1 :

E[X1] < E[X2]

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Généralisation du pari de PascalUnivers plus complexe avec 3 options principales et une nuée de sous-options :

Non existence de toute forme d’être suprême :

• événement 1 de probabilité p1

Existence d’un dieu ou de plusieurs dieux n’intervenant pas dans la vie des hommes (Epicure) :

• événement 2, de probabilité p2

Existence d’un dieu ou de plusieurs dieux intervenant dans la vie des hommes et exigeant un rituel :

• événements k , k = 3,…, N, de probabilités pk

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Différentes stratégies

Athéisme ou agnosticisme, épicurisme religieux (à expliquer)

Mener sa vie sans tenir compte des exigences particulières à chaque religion

Liberté de conscience

Choix d’une religion particulière parmi les (N-2) existantes

Mener sa vie en se conformant aux exigences d’une religion en particulier

A chaque stratégie correspond une variable aléatoire particulière

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Stratégies particulières

Humanisme agnostico-athée ou de type épicurien

On définit la v.a.

X1 = satisfaction en cas de vie basée sur des concepts essentiellement humanistes.

X1(1) = X1(2) = a

X1(k) = - Lk k = 3, …, N

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Stratégies religieuses

On définit les v.a.

Xk = satisfaction en cas de vie basée sur des concepts conformes à la révélation k, (k = 3,…, N).

Xk(1) = Xk(2) = b < a

Xk(i) = - ik i = 3, … k-1, k+1, …, N

Xk(k) = Mk aussi grand que l’on veut

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Les choses se compliquent

Le calcul des espérances demande une information énorme concernant tous les cultes et les relations entre ceux-ci (détermination du vecteur Lk et de la matrice (non nécessairement symétrique) ik.

Les textes sacrés fourmillent de propos concernant les « incroyants » et les fidèles d’autres courants, tantôt œcuméniques (rares), souvent très agressifs.

Recherche d’information objective ?

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Quant au statut de

l’athée …

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La recherche d’une information

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… objective et recoupée.

Crédibilité historique des différentes révélations

De quelles sources fiables disposons-nous ?

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Pour les 3 religions du livre

Judaïsme : Thora (Pentateuque des chrétiens)

Le consensus classique établi au XIXe siècle par Julius Wellhausen, concernant le Pentateuque

(J = source yahviste) daté au Xe siècle,

(E= source Elohiste) IX/VIIIe siècle

(D = source deutéronomiste) VIIe siècle

(P= source sacerdotale) VIe siècle

Ce consensus a été ébranlé par la parution des études de Van Seters, Schmid, Rendtorff, Finkelstein, Silberman.

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Les contributions récentes sur la formation du Pentateuque tendent à considérer les 6e – 5e siècles avant notre ère comme étant l'époque principale de la fixation littéraire de l'ensemble des livres de la Genèse au Deutéronome.

On a recensé au total environ 15 000 variantes dans les manuscrits de l'Ancien Testament.

Manuscrits de la Mer Morte et la comparaison avec les sources tardives.

Les emprunts aux légendes babyloniennes : Noé et Moïse.

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Christianisme : Nouveau Testament

50 000 manuscrits, des centaines de copies des traductions anciennes, 8 000 copies de la Vulgate (traduction latine). Pas deux manuscrits identiques.

Détaillons : des papyrus (85), des parchemins anciens «majuscules» (268) des parchemins plus récents «minuscules» (2800) ainsi que 2 193 lectionnaires. La plupart de ces manuscrits ne contiennent que des fragments ; c'est le cas de tous les papyrus. Quelques-uns datent du 2e siècle apr. J.-C., le plus ancien est daté de 120.

Parmi les manuscrits, plus de 50 contiennent la totalité du Nouveau Testament. Quatre parchemins majuscules des 4e et 5e siècles contenaient à l'origine toute la Bible grecque. Le plus célèbre est le Vaticanus, à partir duquel la plupart des traductions sont établies.

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Islam : Coran

Rassemblé par Abu Bakr qui meurt 2 ans plus tard, puis par Omar (assassiné). Puis par Uthman (644-656). Nombreuses versions concurrentes (notamment celle de Ubayy, secrétaire de Mahomet, celle d’Ibn Massud, un de ses compagnons).

Corpus constitué au début du 8e siècle.

La version originale trouvée dans les manuscrits de Uthman ne contient aucun signe diacritique, ces points utilisés en Arabe classique afin de distinguer les différentes voyelles des autres lettres de l'alphabet. Les points diacritiques ont commencé à apparaître en arabe au tournant du 8e siècle sur l'ordre de Al-Hajjaj ben Yousef, gouverneur de l'Irak (694-714).

Le cas Christoph Luxenberg.

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Les témoignages historiques

Le cas particulier du Christ. Aucune source historique en dehors des évangiles.

« A s’en tenir donc aux documents romains seuls, il n’est pas rigoureusement démontrable que le Christ a bien existé »

Daniel Rops

Jésus en son temps.

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La nécessité d’une saine logique

Selon Quoidbach, auteur de « Le Christ cet inconnu » (1947) :

On sait que Titus détruisit la capitale du monde juif en l’an 70, très peu d’années après la mort des deux apôtres (Marc et Mathieu). On comprend très bien que les synoptiques n’aient pu parler de la ruine de Jérusalem que sous la forme d’une prophétie.

Par ce raisonnement, nous rejoignons les déclarations de la tradition écrite : Luc paraît bien avoir été composé entre 67 et 64, le Mathieu grec entre 64 et et 60, Marc vers 60, le Mathieu Araméen vers 50.

Chercher l’erreur …

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Les faussaires

L’étonnant ossuaire de « Jacques, frère de Jésus ».

Révélé en octobre 2002 par la revue Biblical Archaelogy Review. Article signé par l’épigraphiste français André Lemaire.

Intervention de Amir Gamor de l’Israeli Antiquities Authority.

Perquisition chez le propriétaire Oded Golan.

L’ossuaire est un faux !

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L’importance relative de la punition consécutive à la faute

La naissance du purgatoire

de Jacques Le Goff

Et donc la difficulté de paramétrer rationnellement

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Le « témoignage » de Flavius Josèphe

Yossef ben Matityahou HaCohen, (Joseph fils de Matthias le prêtre) : historien juif de langue grecque, né en 37 et mort vers l'an 100 AD.

En 71, il s'établit à Rome, où il acquiert la citoyenneté romaine sous le nom de Titus Flavius.

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Le texte de Josèphe (Antiquité Juives, livre XVIII)

[63] Vers le même temps vint Jésus, homme sage, si toutefois il faut l'appeler un homme. Car il était un faiseur de miracles et le maître des hommes qui reçoivent avec joie la vérité. Et il attira à lui beaucoup de Juifs et beaucoup de Grecs. [64] C'était le Christ. Et lorsque sur la dénonciation de nos premiers citoyens, Pilate l'eut condamné à la crucifixion, ceux qui l'avaient d'abord chéri ne cessèrent pas de le faire, car il leur apparut trois jours après ressuscité, alors que les prophètes divins avaient annoncé cela et mille autres merveilles à son sujet. Et le groupe appelé d'après lui celui des Chrétiens n'a pas encore disparu.

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La position de Voltaire

« Les chrétiens, par une de ces fraudes pieuses, falsifièrent grossièrement un passage de Flavius Josèphe. Ils supposent à ce juif, si entêté de sa religion, quatre lignes ridiculeusement interpolées ; et au bout de ce passage ils ajoutent : Il était le Christ. Quoi ! Si Josèphe avait entendu parler de tant d'événements qui étonnent la nature, Josèphe n'en aurait dit que la valeur de quatre lignes dans l'histoire de son pays! Quoi! ce Juif obstiné aurait dit : Jésus était le Christ. »

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Suite …

Eh ! si tu l'avais cru Christ, tu aurais donc été chrétien. Quelle absurdité de faire parler Josèphe en chrétien! Comment se trouve-t-il encore des théologiens assez imbéciles ou assez insolents pour essayer de justifier cette imposture des premiers chrétiens, reconnus pour fabricateurs d'impostures cent fois plus fortes ! ».

(Voltaire : Dictionnaire philosophique, rubrique Christianisme)

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Le problème de Josèphe

Face au pouvoir de Rome, il prêcha la modération mais finit par participer aux révoltes. Il fut assiégé avec 40 de ses compatriotes dans la forteresse de Jotapata en 67.

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Un curieux problème de position

Les extrémistes du groupe persuadèrent l’ensemble de se suicider pour ne pas tomber aux mains des Romains.

Ne partageant pas ce point de vue mais n’osant s’opposer au groupe, Josèphe proposa que l’on se mette en cercle et que chaque troisième personne soit tuée, la dernière devant se suicider.

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La solution selon Josèphe

A la fin, soit que le hasard, soit que la Providence divine l'ait ainsi voulu, Josèphe resta seul avec un autre : alors, également peu soucieux de soumettre sa vie au verdict du sort et, s'il restait le dernier, de souiller sa main du sang d'un compatriote, il sut persuader à cet homme d'accepter lui aussi la vie sauve sous la foi du serment

Guerre des Juifs III, VIII, 7

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La mathématisation du problème

Soit un ensemble de n personnes placées en cercle.

A partir de l’une quelconque, ces personnes énoncent dans l’ordre les naturels de 1 à k puis reprennent à 1 et ainsi de suite. Toutes les personnes qui énoncent « k » sortent du cercle.

On veut connaître le rang de la ie personne qui sort du cercle et en particulier le rang de la dernière.

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Problèmes similairesUn problème identique est dû au mathématicien Nicolo Fontana, dit Tartaglia (le bègue), né à Brescia en 1499 et décédé à Venise en 1557.

Lors de la prise de Brescia par les français (1512), il se réfugia dans la cathédrale. Les soldats de Louis XII y pénétrèrent et massacrèrent son père. Niccolo fut laissé pour mort avec un coup de sabre à travers la mâchoire et le palais.

Sa blessure au palais lui laissa un défaut de parole, d’où son surnom « Tartaglia », tartagliare signifiant bégayer en italien.

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Le problème de Tartaglia et le retour aux religions

Un bateau qui transporte 15 chrétiens et 15 Turcs est assailli par une tempête. Afin d'alléger le bateau, le capitaine propose de jeter 15 personnes à la mer. Pour choisir les victimes, les passagers sont placés de façon circulaire et, à partir d'un certain point, chaque neuvième homme doit être sacrifié et cela toujours de neuf en neuf. De quelle façon les 15 chrétiens doivent-ils être disposés pour être sauvés ?

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Un problème issu de l’Islam

Le problème des prières oubliées

Si un musulman (de rite makélite) oublie certaines prières quotidiennes, une le premier jour, une autre le deuxième jour et une autre le troisième jour, et qu'il ne se souvient pas dans quel ordre il les a oubliées, quel est le nombre minimal de prières qu'il doit faire pour qu'il soit sûr que, dans le lot, il aura fait les prières oubliées, dans l'ordre chronologique de leur oubli (mais pas forcément à la suite) ?

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La (ré)solution

Considérons une suite de k prières oubliées. Notons N(k) le nombre cherché et S(k) une suite comportant N(k) prières et satisfaisant notre exigence.

Notons pour simplifier ces k prières a, b, c, d, … suivant l’ordre alphabétique.

Précédons par récurrence.

Quand k= 1, le problème est évident, il suffit d’une prière. On a donc S(1) =a et N(1) = 1

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Pour deux prières, le problème est aussi simple : la suite prend la forme S(2) = aba

On a donc N(2) = 3

Considérons à présent 3 prières a, b et c

On sait que 6 combinaisons sont possibles :

abc, acb, bac, bca, cab, cba

Le premier et le dernier groupes imposent abcba, ce qui inclut acb et bca mais pas bac et cab. Il faut donc inclure la prière a entre b et c et la même prière a entre c et b. L’ordre est donc :

S(3) = abacaba et N(3) = 7

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Raisonnement par récurrence

Supposons que l’on connaisse N(k) et S(k). Que se passe-t-il si on a oublié une (k+1)e prière ?

Celle-ci peut-être la première comme la dernière. Dans chacun des cas, toutes les combinaisons des k premières sont possibles « avant » et « après ». On propose donc la suite :

S(k+1) = S(k) - (k+1) - S(k)

Lorsque la (k+1)e est « au milieu », tous les schémas antérieurs et postérieurs existent par construction dans la suite S(k) qui a été placée avant et après le nouvelle prière.

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Arrivons à la solution

On a donc N(1) = 1 et :

N(k+1) = 2 N(k) + 1

On en tire facilement :

N(k) = 2k - 1

Étant donné la forme particulière de notre suite S(k), le religieux a intérêt à classer ses prières de la plus courte à la plus longue …

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Médiane statistique et biblique

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Remarque pour terminer :petite différence analytique entre

religions du livre

Catholicisme continu et Islam discret

La différence entre une révélation progressive, émanant d’une succession de personnes inspirées et une révélation unique, instantanée.

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Humanisme

Aurions-nous les mêmes religions si nous avions eu d’autres prophètes ?

Aurions-nous les mêmes mathématiques si nous avions eu d’autres mathématiciens ?

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Merci de votre attention