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L’ACCORD DU PARTICIPE MARIA LAURA MACIEL ALVES Pelotas – RS - Brésil Personnages : Jacques Participe Présent Participe Passé Verbe Être Verbe Avoir Jacques – Participe, venez ici! Participe Présent – Oui, Monsieur, je suis là . Je m’appelle bien Participe, moi. Jacques – Présent ou Passé? Participe Présent – Présent. Je suis toujours là où on m’appelle. Jacques – Alors je vous demande des excuses. C’est le Participe Passé que je veux. Participe Passé! Participe Passé! Zut alors, il ne vient pas. Participe Passé! Participe Passé – Enchanté de faire votre connaissance, Monsieur. Jacques – Mais vous venez tout seul, comme ça? Participe Passé – Mes auxiliaires m’ont quitté. Me voilà tout seul. Un roi détrôné, quoi! Jacques – Vous avez l’air d’un adjectif. C’est bizarre, vous ressemblez à un adjectif, ma foi! J’en ai connu pas mal quand je fréquentais des auteurs romantiques. Participe Passé – L’impression que vous avez ne me semble pas fausse. Tel que vous me voyez, je suis un adjectif. Vous savez, je ne peux pas vivre sans le substantif. Je suis toujours à côté de lui.

L_accord Du Participe - Pièce de Théâtre-1

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L’ACCORD DU PARTICIPE MARIA LAURA MACIEL ALVES Pelotas – RS - BrésilPersonnages :

JacquesParticipe PrésentParticipe PasséVerbe ÊtreVerbe Avoir

Jacques – Participe, venez ici!Participe Présent – Oui, Monsieur, je suis là . Je m’appelle bien Participe, moi.Jacques – Présent ou Passé?Participe Présent – Présent. Je suis toujours là où on m’appelle.Jacques – Alors je vous demande des excuses. C’est le Participe Passé que je veux. Participe Passé! Participe Passé! Zut alors, il ne vient pas. Participe Passé!Participe Passé – Enchanté de faire votre connaissance, Monsieur.Jacques – Mais vous venez tout seul, comme ça?Participe Passé – Mes auxiliaires m’ont quitté. Me voilà tout seul. Un roi détrôné, quoi!Jacques – Vous avez l’air d’un adjectif. C’est bizarre, vous ressemblez à un adjectif, ma foi! J’en ai connu pas mal quand je fréquentais des auteurs romantiques.Participe Passé – L’impression que vous avez ne me semble pas fausse. Tel que vous me voyez, je suis un adjectif. Vous savez, je ne peux pas vivre sans le substantif. Je suis toujours à côté de lui. C’est à moi qu’il doit ses qualités, si j’ose ainsi dire.Jacques – Et vous vous entendez bien tous les deux, vous et le substantif?Participe Passé – Ah ça je peux vous dire. Nous sommes toujours d’accord.Jacques – Ah bon? Vous ne vous disputez jamais?Participe Passé – Pensez-vous! Je me plie à ses moindres désirs. S’il le veut, je me transforme en femme, je me multiplie, je m’accorde avec lui, quoi.Jacques – Vous êtes bien docile. Mais voilà une figure majestueuse qui s’avance.Participe Passé – Il n’est pas si majestueux. C’est un de mes auxiliaires. Et il est en retard. Je lui ai téléphoné il y a une demi-heure.Jacques – Il s’appelle comment?Participe Passé – Demandez-le-lui. Il sait parler. C’est un verbe.Jacques – Vous vous appelez comment?Le Verbe Être – Je suis.

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Jacques – Vous êtes qui?Le Verbe Être – Je suis.Jacques – C’est tout ce qu’il sait dire? Il n’est guère causant, celui-là.Participe Passé – C’est que vous ne le comprenez pas, Monsieur. Il ne veut pas être pléonastique.Jacques – Vous me semblez très érudit.Participe Passé – C’est le Verbe Être. Quand je l’accompagne, c’est avec son sujet que je m’accorde. Tenez, je vais vous donner un exemple. Ouvrez la télé. Vous voyez cette phrase qui est là? « Mme. Froufrou et sa fille sont allées à la Comédie Française hier soir. » Vous me reconnaissez? Je suis bien, non? Là je m’accorde avec Mme. Froufrou et sa fille. D’ailleurs, si je n’avais pas été d’accord avec elles, elles ne seraient pas allées au théâtre. Elles se sont disputées tout l’après-midi. C’est moi qui les ai mises d’accord.Jacques – Vous ne finirez pas de m’étonner. Je connais Mme. Froufrou et sa fille : elles sont invivables. Si vous avez réussi à les mettre d’accord, chapeau.Participe Passé – Rien de bien extraordinaire. Mais pourquoi donc vous intéressez-vous tellement à ma vie privée? Surtout n’allez rien publier dans les journaux.Jacques – N’ayez aucune crainte. Je fais des recherches linguistiques. J’ai un exposé la semaine prochaine.Participe Passé – Il faut se méfier des recherches linguistiques. En tout cas, puisque vous êtes tellement curieux, sachez que j’ai un autre auxiliaire.Jacques – Ça me paraît fascinant. Où est-il?Participe Passé – Là, sous vos yeux.Jacques – C’est le Verbe Avoir! Mais je ne vois pas son objet.Participe Passé – Parfois il n’en a pas. Et quand il n’en a pas, je suis invariable, vous comprenez, invariable!Jacques – Vous qui êtes si changeant, ça m’étonne de votre part.Participe Passé – C’est comme ça. Et puis si l’objet vient après moi, je ne le regarde même pas. Je suis un peu snob, je dois l’avouer. Bien qu’il essaie de me séduire, je ne succombe pas à la tentation. Je suis toujours le même, invariable, inflexible.Jacques – C’est-à-dire que nous ne changez jamais quand vous accompagnez le Verbe Avoir?Participe Passé – Mais si! Si son objet me précède, je succombe! Je ne puis résister à ses attraits et pour mieux attirer ses regards, je m’accorde avec lui!Jacques – C’est bien romantique. Vous me racontez là une histoire d’amour.Participe Passé – Je n’en avais jamais parlé à personne. Je suis amoureux de l’objet qui me précède, amoureux fou! Je fais tout ce qu’il veut, tantôt

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au masculin, tantôt au féminin, tantôt au singulier, tantôt au pluriel, rien que pour lui faire plaisir.Jacques – Et si vous accompagnez un verbe pronominal?Participe Passé – Là c’est un peu long à expliquer. Si vous voulez, vous pouvez demander ça à ma grand-mère. Elle aime beaucoup cette histoire des verbes pronominaux. Elle sera ravie que vous lui rendiez visite.Jacques- D’accord. J’ai lu quelque part que vous ne vous entendez pas avec les verbes impersonnels.Participe Passé – C’est vrai. Leur impersonnalité m’agace. Je les accompagne à contrecoeur. Ils m’en veulent parce que je garde mon indépendance. Pas question de me mettre d’accord avec eux. Ils sont, comment dirais-je, trop froids, trop impersonnels.Jacques – Je suis désolé de vous quitter mais je vois qu’on vous appelle tout le temps.Participe Passé – Je suis très occupé. Je n’ai plus de temps à moi. C’est pas une vie, ça! Que serait le système verbal sans moi? Vous vous rendez compte que des millions de gens se sont arrêtés de parler? Ils ne peuvent pas se passer de moi. Je me sauve. Allez, au revoir. Et bonne chance pour votre exposé.

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