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Cours de « Droit commercial » Imen Barnat Baccouche, ENF 2012 Partie II : Les biens de l’entreprise : Le fonds de commerce Définition : C’est l’ensemble de biens meubles affectés à l’exploitation industrielle et commerciale par des personnes physiques ou morales, il regroupe un ensemble d’éléments corporels et incorporels indispensables au fonctionnement de l’entreprise. Le fonds de commerce doit être distingué de la société car il n’a pas la personnalité morale. C’est une simple masse patrimoniale mobilière .Le fonds de commerce n’a ni actif, ni passif. Mais, il faut préciser que le fonds de commerce fait partie du patrimoine de la société qui peut posséder plus qu’un fonds de commerce. Il faut noter qu’une entreprise peut posséder plusieurs fonds de commerces, chacun correspond à une branche d’activité autonome. La loi du redressement du 17 avril 1995 a prévu comme solution aux difficultés de l’entreprise la possibilité de cession partielle de l’entreprise c à d la vente d’un fonds parmi d’autres. On ne conçoit pas l’existence de l’entreprise commerciale sans l’existence d’un fonds de commerce. C’est un élément central certes insuffisant, à côté des biens meubles dont la réunion forme le fonds de commerce, d’autres éléments constituent l’entreprise tels que les biens immeubles et le personnel (dirigeant, salarié…). De point de vue comptable, il n’est pas inscrit sur le bilan dans une rubrique appelée fonds de commerce, ces divers éléments corporels sont ventilés dans l’actif sous le nom du stock alors que des éléments incorporels sont 1

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Partie II : Les biens de l’entreprise :Le fonds de commerce

Définition :C’est l’ensemble de biens meubles affectés à l’exploitation industrielle et

commerciale par des personnes physiques ou morales, il regroupe un ensemble d’éléments corporels et incorporels indispensables au fonctionnement de l’entreprise.

Le fonds de commerce doit être distingué de la société car il n’a pas la personnalité morale. C’est une simple masse patrimoniale mobilière .Le fonds de commerce n’a ni actif, ni passif. Mais, il faut préciser que le fonds de commerce fait partie du patrimoine de la société qui peut posséder plus qu’un fonds de commerce. Il faut noter qu’une entreprise peut posséder plusieurs fonds de commerces, chacun correspond à une branche d’activité autonome. La loi du redressement du 17 avril 1995 a prévu comme solution aux difficultés de l’entreprise la possibilité de cession partielle de l’entreprise c à d la vente d’un fonds parmi d’autres.

On ne conçoit pas l’existence de l’entreprise commerciale sans l’existence d’un fonds de commerce. C’est un élément central certes insuffisant, à côté des biens meubles dont la réunion forme le fonds de commerce, d’autres éléments constituent l’entreprise tels que les biens immeubles et le personnel (dirigeant, salarié…).

De point de vue comptable, il n’est pas inscrit sur le bilan dans une rubrique appelée fonds de commerce, ces divers éléments corporels sont ventilés dans l’actif sous le nom du stock alors que des éléments incorporels sont désignés par fonds commercial ou immobilisation incorporelle.

La valeur économique du fonds de commerce n’est pas stable : Au départ, le fonds de commerce est constitué par un noyau formé par le matériel, la marchandise, le nom commercial.Le fonds de commerce va s’enrichir au fur et à mesure du développement de l’exploitation et l’augmentation du nombre de clients. C’est ainsi que la valeur économique du fonds de commerce tient à l’importance des demandes et au revenu que son exploitation et sa cession permettent d’espérer.

Durant l’exploitation du fonds de commerce, la valeur économique peut augmenter comme elle peut baisser en fonction essentiellement de la clientèle. La cessation de l’activité peut entrainer la disparition du fonds s’il y a perte de clientèle.

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Chapitre I- Composition du fonds de commerce :

Section I- Les éléments exclus du fonds de commerce :§1- Les immeubles :

A- Les immeubles par natureB- Les immeubles par destination

§2- Les dettes et créances :A- Le principe d’exclusionB- Les exceptions :

Section 2- Les éléments inclus dans le fonds de commerce:§1- Les éléments corporels

A- Le matérielB- La marchandise

§2- Les éléments incorporelsA- L’élément obligatoire : La clientèle et l’achalandageB- Les éléments facultatifs

Section I- Les éléments exclus du fonds de commerce :

Sont exclus de la composition du fonds deux éléments : L’immeuble d’une part (§1) et les dettes et créances d’autre part (§2).

§1- Les immeubles :

N’entrent pas dans la composition du fonds deux catégories d’immeubles : - Le local qui constitue un immeuble par nature, - Le matériel qui fait partie du fonds peut s’en échapper et devenir immeuble

par destination si les conditions légales sont réunies.

A- Les immeubles par nature : Fondement de l’exclusion   :

Le fonds de commerce est un ensemble de biens à caractère exclusivement mobilier, l’immeuble n’en fait pas partie. C’est ainsi qu’un entrepreneur qui exploite un fonds de commerce dans un local dont il est propriétaire possède deux masses de biens distincts : un bien mobilier incorporel (fonds de commerce) et un bien immeuble (local).

Ce principe d’exclusion du local auquel est exploité le fonds est fondé sur deux arguments :

Un argument légal : L’article 189 c. commerce dispose « Font partie du fonds de commerce les biens mobiliers affectés à l’exercice d’une activité commerciale ». L’alinéa 3 du même article énumère une liste de biens pouvant composer le fonds sans citer aucun bien de nature immobilière

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Un argument jurisprudentiel : Les chambres réunies de la cour de cassation ont décidé sur la base de l’article 189 c com que le législateur a soumis les opérations portant sur le fonds de commerce aux textes qui s’appliquent aux meubles et à des textes spéciaux autres que ceux régissant les immeubles, ce qui traduit nécessairement sa volonté d’exclure l’immeuble de la composition du fonds. (Ch. Réun. Arrêt n°21626 du 18 mai 1995)

Ce principe ne supporte aucune exception : Le local n’entre jamais dans la composition du fonds, même par la convention

des parties, car un immeuble ne peut pas être l’accessoire d’un meuble.Exemple : Même si le local est construit spécialement pur un type déterminé d’exploitation, les parties ne peuvent pas par leur volonté convenir que le local est un élément du fonds. Par contre, un seul élément du fonds de commerce peut devenir immeuble. Il

s’agit du matériel qui peut se transformer en immeuble par destination sous conditions. (voir ci-dessous, immeuble par destination)

Intérêt de l’exclusion

Cette distinction engendre une double conséquence si le propriétaire du local et en même temps propriétaire du fonds:

En cas de vente de l’entreprise, il y aura deux contrats de vente : une vente du fonds de commerce et une vente du local

Les opérations de garanties : Le commerçant, propriétaire du local et du fonds, dispose deux assiettes  pour garantir le paiement de ses dettes:

le fonds qui fera l’objet d’un nantissement le local qui fera l’objet d’une hypothèque.

L’exclusion est d’ordre pratique, elle a pour avantage de faciliter l’exploitation et le transfert du fonds de commerce.

B- Les immeubles par destination :

Fondement d’application :Le matériel représente un élément corporel qui compose le fonds de commerce. Cependant, le matériel peut sortir de la composition du fonds et devenir immeuble par destination si les deux conditions cumulatives exigées par les articles 9 et 10 du code des droits réels sont réunies :1 ère condition   : L’unité de propriétaire   : Il faut que le propriétaire du matériel soit en même temps propriétaire du local.Cette condition permet de conclure que si le matériel fait l’objet d’un contrat de leasing il ne peut pas devenir immeuble par destination car il n’appartient pas au propriétaire du local.2ème condition   : L’attachement du matériel au local   : S’il existe une attache matérielle et solide entre les deux, de telle façon qu’on risque d’endommager le matériel si on le détache, il devient une partie de l’immeuble.

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La cour de cassation a décidé dans le cas d’une usine de textile que le fonds n’a aucune valeur économique sans ses machines. Bien que fixées au sol, les machines font partie du fonds puisqu’elles peuvent être détachées sans dommage quelconque. (Arrêt n° 72 979 du 25mars 1987)

Intérêt de l’immobilisation du matériel :Lorsque le matériel devient immeuble par destination il risque d’affaiblir la valeur du fonds qui perd un élément important de sa composition.

Si le commerçant a consenti des garanties pour le paiement de ses dettes sous forme d’hypothèque sur le local et de nantissement sur le fonds, il risque de créer un conflit entre le créancier hypothécaire et le créancier nanti à cause du conflit d’assiette entre ces deux sûretés.

Si le matériel répond aux deux conditions légales, il échappe de l’assiette du nantissement pour servir de garantie à l’hypothèque.

§2- Les dettes et créances :

A- Le principe de l’exclusion :

Le fonds de commerce n’est pas une unité juridique, par conséquent les créances et les dettes ne font pas partie de la composition du fonds de commerce.

Ce principe d’exclusion peut être fondé sur trois textes :

L’article 189 c com qui définit le fonds de commerce ne prévoit ni les dettes ni les créances en tant qu’éléments du fonds.

L’art 237 c com n’a pas prévu la possibilité de les inclure dans le nantissement du fonds car cette technique de garantie implique d’affecter à la garantie du créancier des valeurs exclusivement actives.

L’art 193 c com prévoit toute une procédure pour que le fonds ne soit transféré à l’acheteur que constitué de valeurs uniquement actives. Par conséquent, c’est la loi qui permet d’affirmer qu’en principe, l’acheteur ne répond pas du passif résultant de l’exploitation par le vendeur du fonds.

B- Les exceptions :La vente d’un fonds peut supporte une exception à ce principe d’exclusion. De même Il ya d’autres formes de cession de fonds qui peuvent entraîner le transfert des créances et dettes à l’acquéreur même si elles sont personnelles à la personne du cédant du fonds de commerce.

Les dettes et créances sont transmises au cessionnaire de fonds dans les cas suivants :

1- La vente de fonds de commerce : L’’acheteur du fonds peut convenir avec le vendeur que le bénéfice ou la charge de certains contrats sont transmis en même temps avec le fonds. Exemple : les contrats de bail ou de leasing peuvent être transmis.

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2- le maintien des contrats de travail : L’art 15. code de travail prévoit que le changement de l’exploitant du fonds à cause d’une vente ou toute autre cause n’est pas une excuse valable pour le nouveau employeur pour rompre les contrats de travail en cours et qui sont conclus avec le vendeur, sinon les salariés licenciés peuvent poursuivre le nouveau employeur pour licenciement abusif.

3- L’apport en société : l’art 228 c com prévoit que la société qui a accepté l’apport sera tenue solidairement, avec l’apporteur, du passif déclaré

4- La succession : Si les héritiers acceptent la succession, ils supportent les dettes du défunt

5- La donation : C’est la transmission de la propriété du fonds à titre gratuit. Elle entraine le transfert du passif

Section 2- Les éléments inclus dans le fonds de commerce :

Il convient d’abord de souligner que la notion de fonds de commerce n’a pas un caractère juridique, elle est purement intellectuelle, on dit que le fonds de commerce est une universalité de fait, cela veut dire que le fonds de commerce est composé de différents éléments autonomes mais qui ont un point commun, l’affectation à une même exploitation commerciale ou industrielle, cette affectation n’est pas juridique : c’est une situation de fait.

La constitution de fonds de commerce a été imaginée pour regrouper sous une même qualification, un certain nombre de biens commerciaux qui pourront être cédés ou nantis (donnés en gage) dans une seule opération juridique au lieu de faire la cession pour chaque élément à part.

L’article 189 du code du commerce énumère les éléments qui composent le fonds de commerce qu’on peut les classer en deux catégories : Les éléments corporels et les éléments incorporels.

§1- Les éléments corporels : Ces éléments ont un caractère facultatif c à d qu’ils ne font pas toujours partie du fonds de commerce. Ce sont le matériel et les marchandises.

A- Le matériel :

Il s’agit des machines, de l’équipement et des outils nécessaires à l’exploitation du fonds. Dans l’entreprise industrielle le matériel présente une valeur considérable car il représente un moyen de production.Mais il est secondaire dans d’autres entreprises à capital intellectuel tel que l’agence immobilière.Le matériel présente trois caractères distinctifs :

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1- En cours du fonctionnement de l’entreprise, le matériel n’est pas destiné à la transformation et la revente.

2- Il peut se transformer en immeuble par destination s’il répond aux conditions légales.

3- Il est un élément facultatif du fonds, une stipulation expresse est nécessaire pour l’inclure dans le nantissement (art 237§3 code com) ou dans la vente du fonds (art 205 alinéa 2, 3. C COM). Mais il devient un élément important dans les entreprises industrielles.

B- La marchandise :

Il ne faut pas confondre la marchandise avec le matériel, le critère de distinction réside dans le fait que le matériel représente une valeur stable alors que la marchandise est une valeur flottante et précaire qui n’est pas destinée à demeurer dans l’entreprise. La vitrine par exemple constitue une marchandise dans l’entreprise de fabrication de vitrine alors qu’elle représente un matériel dans une entreprise de commerce alimentaire.

Le caractère précaire de la marchandise a des conséquences en cas de nantissement du fonds de commerce. En effet, la marchandise ne fait pas partie de l’assiette du nantissement du fonds de commerce.

§2- Les éléments incorporels :Selon l’article 189, le fonds de commerce regroupe l’enseigne, le nom commercial, le droit de bail, la clientèle et l’achalandage (clients), les brevets, manque de fabrique dessin et modèle. Ces éléments peuvent être classés en deux grandes catégories :L’élément obligatoire qui est la clientèle, et le reste des éléments qui constituent des éléments facultatifs.

A- L’élément obligatoire : La clientèle et l’achalandage : ( المحل سمعة و ( الحرفاء

1- La distinction entre la clientèle et l’achalandage :

Contrairement aux éléments corporels qui peuvent ne pas exister, on ne conçoit pas un fonds de commerce sans l’existence de clientèle.

Selon l’article 189 alinéa 2 du code de commerce « le fonds de commerce comprend obligatoirement la clientèle et l’achalandage ».

La clientèle désigne les personnes qui s’approvisionnement habituellement auprès d’un fonds de commerce en raison des qualités personnelles et du savoir faire du commerçant.

L’achalandage désigne la clientèle de passage qui est attirée par la commodité et la proximité de l’emplacement du fonds de commerce.

Le législateur a distingué entre deux notions alors qu’en pratique il n’y a pas lieu de les distinguer. La clientèle compose le fonds de commerce par l’ensemble de personnes qui entrent en relation avec l’entreprise peu importe qu’elles soient fidèles ou occasionnelles.

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L’évaluation de cet élément se traduit par les recettes et le chiffre d’affaire réalisé par le fonds pendant une période donnée.

2- Les conditions d’existence de la clientèle :

Pour exister, la clientèle doit obéir à certaines conditions :

la clientèle doit être réelle et certaine   : Pour un commerce qui ne s’appuie pas sur un nom commercial bien réputé, la clientèle ne devient réelle que lorsque le fonds a déjà fonctionné pendant une certaine période lui permettant de constituer une clientèle.

La clientèle liée à un fonds de commerce futur en voie de formation et qui n’est pas achevé est potentielle ou virtuelle.

Par contre, lorsque le fonds se compose d’un nom commercial ou d’une marque de fabrique réputée, la clientèle peut être considérée comme existante dès l’installation du projet.

Dans un arrêt du 27 février 1973, la cour de cassation française a qualifié de réelle, la clientèle d’une station service n’ayant pas encore fonctionné car la clientèle est attirée par la marque de la société pétrolière qui a assez de réputation.

La clientèle doit être personnelle  :

Pour être considéré comme propriétaire d’un fonds de commerce, il ne suffit pas d’avoir une clientèle, il faut encore que cette clientèle soit autonome c à d qu’elle appartienne à l’exploitant du fonds concerné.

Un problème s’est posé en pratique pour les commerces dépendants d’une autre exploitation parce qu’ils sont matériellement inclus dans une autre installation commerciale (par exemple : l’exploitation du café ou du restaurant situé dans une garde, le salon de coiffure situé dans un hôtel, le bar situé dans un club de golf).

Dans tout ces cas, la Jurisprudence a refusé à ces exploitants la propriété d’un fonds de commerce faute de clientèle personnelle, ce qui a justifié le refus du renouvellement de leur bail.

Cette solution doit cependant être nuancé lorsque l’exploitant du fonds inclus dans un autre fonds a une réputation qui attire une clientèle personnelle indifférente du lieu où il est situé (exemple : restaurant qui a une renommée).

La clientèle doit être licite   :

Cela veut dire qu’elle doit être attirée à l’occasion d’une exploitation conforme à la loi, à l’ordre public et aux bonnes mœurs.

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B- Les éléments facultatifs :

La clientèle est un élément nécessaire et indispensable au fonds de commerce, cette affirmation tient aux termes même de l’article 189 du code de commerce qui prévoit « que le fonds de commerce comprend obligatoirement la clientèle et l’achalandage ». C’est un élément essentiel voire dominant, mais le fonds de commerce ne peut pas être réduit à la seule clientèle car le fonds de commerce devient inexploitable sans des éléments permettant de maintenir et de supporter la clientèle.

La clientèle repose en fait sur des supports qui servent de moyen pour l’attirer et la maintenir tel que l’enseigne, le nom commercial, la marque, l’emplacement mais tout cela n’empêche de dire que la cessation d’exploitation qui fait disparaître la clientèle entraîne automatiquement la disparition du fonds de commerce.

Les éléments facultatifs sont essentiellement: Le droit au bail : Le droit au bail est reconnu par la loi du 25 mai 1977afin

d’assurer une certaine stabilité matérielle et juridique à l’exploitant du fonds du commerce dans un local loué.Cette stabilité lui permettra d’attirer ou de maintenir la clientèle ce qui rend souvent le droit au bail un élément primordial du fonds de commerce.

Le nom commercial : C’est l’appellation sous laquelle un commerçant exerce son commerce (un nom de fantaisie, une raison sociale de société, le nom du créateur du fonds), ce nom sert pour identifier l’entreprise.

L’enseigne : C’est un signe visible apposé sur le local qui permet de l’identifier et de le distinguer (exemple un dessin, un signe figuratif, un signal, des bandes sur un magasin).

Les droits de propriété industrielle, littéraire et artistique: brevets d’invention, marque de fabrique, les dessins et modèles industriels.

Les autorisations administratives : Elles sont nécessaires pour ouvrir ou exploiter diverses sortes de fonds. Certaines d’entre elles sont impersonnelles et peuvent donc être transmises (ex : autorisation de transport routier).

Le droit au bail :

Définition :C’est un droit règlementé par la loi n°77-37 du 25mai 1977 réglant les rapports

entre bailleurs et locataires en ce qui concerne le renouvellement des baux d’immeuble ou de locaux à usage commercial, industriel ou artisanal.1

Ce droit appelé aussi propriété commerciale résulte du contrat de bail (location) d’un local à usage commercial. Il permet au locataire :

Le droit au renouvellement de son bail à son expiration normale. Le droit d’obtenir une « indemnité d’éviction » en cas de refus de

renouvellement ( الحرمان représentant le préjudice causé par la rupture (غرامةde l’exploitation et la perte de clientèle.

1 Cette loi a remplacé le décret du 9octobre 1936  et le décret du 27 décembre 1954.

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Le droit au bail limite l’autorité du propriétaire du local loué sur son immeuble. C’est pourquoi le propriétaire (bailleur du local) exige souvent en contre partie et dès la conclusion du contrat de location « un pas de porte » qui est une somme d’argent versée par le locataire pour compenser la perte de valeur subie par l’immeuble du fait de son occupation par un locataire commercial.Cette pratique est légale, elle est considérée soit comme un supplément de loyer, soit comme une indemnité représentant la valeur économique du droit de renouvellement.

Importance du droit au bail :

La présence de ce droit dans le fonds de commerce n’est pas obligatoire lorsque le fonds de commerce appartient à un commerçant ambulant ou lorsque le propriétaire du fonds est en même temps propriétaire du local. Mais lorsqu’il existe, il donne une valeur au fonds car il équivaut au droit de toucher une indemnité pouvant atteindre cinq ans de loyer ou plus.

1) Caractères du droit au bail :

Le droit au renouvellement du bail est un droit d’ordre public protégé par la loi. Toute clause qui met ce droit en échec est nulle mais n’annule pas le bail c à d qu’elle n’affecte pas la validité du contrat de location car le but de la loi de 1977 est de protéger la locataire.

Sont nulles, mais sans annuler le contrat de bail, les clauses suivantes : Les clauses portant renonciation du locataire à son droit de renouvellement

ou à son droit à l’indemnité d’éviction en cas de refus de renouvellement. la clause qui soumet ce droit à une condition restrictive. Exemple : exiger une

exploitation personnelle.

Cependant, la Jurisprudence est partagée pour : Les clauses imposant au locataire la révision du loyer comme condition de

renouvellement.

Les clauses qui limitent l’objet du bail à une seule activité dite clause résolutoire pour changement de destination.

2) Conditions du droit au bail :

L’acquisition du droit au bail nécessite la réunion de trois conditions cumulatives : Il faut qu’il s’agisse d’un contrat de location, d’un local, à usage commercial.

1) L’existence d’un contrat de location :2) L’objet du bail : un local3) La destination du local : l’usage commercial

a- L’existence d’un contrat de location :

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Pour bénéficier du droit au bail, le locataire doit justifier d’un contrat de location et d’une exploitation du fonds pendant une durée minimale de deux années consécutives dans le local loué (les deux dernières années).

Par conséquent, la personne qui occupe le local en qualité de copropriétaire ou en vertu d’une convention d’occupation précaire (suite à une décision de démolition ou d’expropriation) ne peut pas réclamer le droit au bail.

Si la durée de l’exploitation dans les lieux est inférieure à deux ans, ou si la durée a connu une rupture, le droit de bail est écarté.

Il faut préciser que la loi n’exige pas l’exploitation personnelle du fonds par son propriétaire. Ainsi, il peut bénéficier du droit au bail même s’il exploite le fonds par l’intermédiaire d’un préposé.Il n y a pas rupture d’exploitation dans les cas suivants :

Si le propriétaire du fonds cède l’exploitation du fonds à un locataire-gérant. Si le fonds est vendu à un cessionnaire. Dans ce cas, l’acheteur du fonds peut

joindre à sa durée d’exploitation personnelle celle du cédant pour arriver à totaliser deux années d’exploitation. Cette possibilité de jonction des durées d’exploitation est prévue par l’art 3 alinéa3 de la loi 1977.

Si le locataire justifie d’un motif légitime de non exploitation personnelle. exemple : cause de maladie.

b- L’objet du bail : un local ou immeublePour bénéficier du droit au bail, il faut qu’il s’agisse d’une location d’un local ou immeuble.Par conséquent, le droit au bail ne peut pas être réclamé par le locataire-gérant car l’objet de cette location est un fonds de commerce et non pas un local.Ainsi, l’application de la loi de 1977 est exclue dans les rapports entre le bailleur de fonds de commerce et le locataire-gérant.

Il faut préciser que le droit bail s’exerce non seulement sur le local lieu d’exploitation principale du fonds, mais aussi sur les immeubles qui constituent une dépendance du local.

Les locaux accessoires sont « ceux où ne sont pas effectués d’actes de commerce et où la clientèle n’a pas d’accès » (hangar, garage, atelier,..)

Ces locaux ne sont protégés par l’article 2-1 de la loi 1977 qu’à une double condition :

Le caractère indispensable des locaux pour l’exploitation du fonds. L’unité de propriétaire du local principal et accessoire. Si leurs propriétaires

sont différents, le propriétaire des locaux accessoires doit être en connaissance que ses locaux serviront pour l’exploitation du local principal.

La location de terrain nu sans destination spécifique ne donne pas droit au bail, sauf si le terrain est accessoire à un local principal à usage commercial.

c- La destination du local: exploitation commerciale

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Le droit au bail est accordé au locataire d’un local à usage commercial. L’article 189 alinéa 1er loi 1977 exige la nature commerciale de l’activité pour accorder le droit au renouvellement. Il dispose : « Font partie du fonds de commerce, les biens mobiliers affectés à l’exercice d’une activité commerciale ».

Cette exigence signifie que le locataire doit exercer un acte de commerce par nature. Mais la question est de savoir s’il faut encore que ce soit à titre professionnel ?

La loi n’exige pas clairement la condition d’immatriculation au registre de commerce qui constitue l’élément légal de l’exercice professionnel. Mais cette condition peut être déduite de l’article 3 c com et de l’article 61 alinéa 1 er

de la loi du 2 mai 1995 relative au registre de commerce. En l’absence d’immatriculation, le commerçant personne physique est soumis au régime du commerçant de fait ou habituel prévu par l’article 3 c com : Il est soumis aux inconvénients du droit commercial sans bénéficier des avantages.De même, l’art 61al 1 loi 1995 dispose que « le commerçant non immatriculé ne peut se prévaloir de sa qualité de commerçant à l’égard des tiers  que des administrations». Il ne pourra par exemple invoquer le bénéfice de la loi sur les baux commerciaux. Par conséquent, en cas de litige avec le propriétaire du local, il risque de se voir refuser ce bénéfice par le tribunal.

Par conséquent, le commerçant qui veut réclamer le droit au bail –qui constitue un avantage du droit commercial- doit respecter son obligation légale d’immatriculation au registre de commerce.

Cette exigence permet d’exclure le cas d’exploitation du local pour exercer une activité civile non commerciale.

Il s’agit d’exclure du bénéfice de droit au bail celui qui exerce une activité agricole, artisanale, ou une profession libérale.

1- L’activité agricole   : Le droit au bail ne peut pas être reconnu aux sociétés anonymes et les SARL qui exploitent des terrains agricoles. Malgré leur forme commerciale, l’article 7 de la loi du 6 août 1982 leur dénie l’existence d’un fonds de commerce.Cependant, un agriculteur locataire d’un local pour commercialiser ses produits agricoles peut réclamer le droit au bail s’il obéit aux conditions d’assimilation au commerçant (voir critères d’assimilation dans la première partie du cours : critères de proportionnalité, d’utilité, d’utilisation des procédés commerciaux et industriels).

La jurisprudence fiscale a assimilé un apiculteur à un commerçant parce qu’il utilise des procédés commerciaux, afin de le soumettre aux droits de patente.

2- L’activité artisanale  :

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L’article 1erde la loi de 1977 accorde expressément le droit au bail aux artisans. La loi n°77-37 du 25mai 1977 règle les rapports entre bailleurs et locataires en ce qui concerne le renouvellement des baux d’immeuble ou de locaux à usage commercial, industriel ou artisanal »

Mais, la question s’est posée de savoir si l’artisan doit exercer une activité commerciale pour pouvoir prétendre au droit au bail.La jurisprudence tunisienne a tendance de considérer que seul l’artisan qui accomplit en même temps des actes de commerce peut bénéficier du droit au renouvellement. Cependant, il n’est pas exigé qu’il soit immatriculé au registre de commerce.

En effet, pour pouvoir bénéficier du droit au renouvellement du bail, il faut prouver l’existence d’un fonds de commerce, ce qui nécessite de prouver la nature commerciale de l’activité.

C’est l’article 189 alinéa 1er c com qui considère la nature commerciale de l’activité comme critère important pour l’existence d’un fonds de commerce.La jurisprudence est constante pour accorder le droit au renouvellement pour certaines activités comme la coiffure : Pour accorder le droit au bail au coiffeur, il faut vérifier l’existence d’un fonds de commerce. (Arrêt des chambres réunies de la cour de cassation n°42233 du 13 mars 1995, RTD 1997, p85)Or, cette condition suppose l’exercice d’une activité commerciale (Art 189 al 1 c com).

3- Les professions libérales   :

La profession libérale est une activité non commerciale. La location d’un local auquel est exercée une profession libérale est soumise à la loi du 18 février 1976 modifiée par la loi du 27 décembre 1993 relative aux rapports entre propriétaires et locataires de locaux à usage d’habitation, professionnel, ou administration publique.

Exceptionnellement, certaines professions libérales bénéficient du droit au bail.Il s’agit de l’activité des pharmaciens, ainsi que l’activité des établissements de l’enseignement privé (art 2 loi 1977).La cour de cassation s’est fondée sur les termes généraux de l’art 2 alinéa 3 loi 1977 qui ne font pas de distinction entre l’éducation et l’enseignement pour assimiler les garderies aux établissements d’enseignements privé. Elle leur reconnait le droit au renouvellement. (Arrêt de la cour de cassation du 26 janvier 2001, BCC 2001, p133).

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3) Les modes d’exercice du droit au bail :

a- L’offre de renouvellement par le bailleur :

Aux termes de l’art 4 loi 1977, pour manifester sa volonté de renouveler le contrat, le bailleur (propriétaire du local) doit adresser au locataire un « congé » par exploit d’huissier notaire 6 mois avant l’expiration du contrat.

Contenu du congé   : - Il doit préciser les motifs : offre de renouvellement, indication du nouveau loyer.- Le congé doit à peine de nullité rappeler au locataire les termes de l’art 27 loi 1977 qui accorde au locataire un délai de 3mois, à peine de forclusion ( الحق s’il (سقوطentend contester le congé ou demander une indemnité d’éviction.

Effet du congé   : Le congé met fin au bail mais n’emporte pas par lui-même renouvellement. C’est une simple offre de renouvellement du bail sous de nouvelles conditions qui attend une réponse du locataire.

Le locataire doit réagir à cette offre dans un délai ne dépassant pas trois mois : Soit accepter le nouveau loyer et donc il y a renouvellement. Soit contester le nouveau loyer et donc il doit saisir le tribunal pour fixer le

loyer dans une décision judiciaire. Soit refuser le nouveau loyer et donc il doit saisir le tribunal pour demander

une indemnité d’éviction.

Passé ce délai sans aucune réaction du locataire, ce dernier est « forclos » c à d qu’il sera réputé :- soit avoir accepté les nouvelles conditions exigées, et donc il y a renouvellement avec le nouveau loyer.- soit avoir renoncé au renouvellement ou à l’indemnité d’éviction.

Toute action faite par le locataire après le délai de trois mois est nulle (Arrêt de la cour de cassation n°71070 du 9 décembre 1999).

b- La demande de renouvellement par le locataire :

Selon l’article 5 de la loi de 1977, le locataire commerçant qui veut obtenir le renouvellement de son bail doit le demander au propriétaire par exploit d’huissier notaire :- soit dans les 6 mois avant l’expiration du bail- soit à tout moment après sa reconduction (renouvellement pour la même durée).

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L’emploi d’une autre forme inadéquate, par exemple une lettre recommandée, rend la demande nulle. Le locataire adresse cette demande à « défaut de congé » par le bailleur.(art5 alinéa 1er

loi1977)Contenu de la demande   : Pour être valable, la demande doit reproduire les termes de l’article 5 alinéa 5 qui dispose : « Dans le délai de 3mois de la signification de la demande, le bailleur doit, dans les mêmes formes, faire connaître au demandeur :- le refus du renouvellement, ou - l’acceptation pure et simple du renouvellement, ou- l’acceptation sous de nouvelles conditions,En précisant les motifs du refus ou les nouvelles conditions.

Si le bailleur ne répond pas à l’expiration de ce délai, il est réputé avoir accepté le renouvellement aux même conditions pour la même durée de l’ancien contrat de bail ».

Ainsi, le bailleur a trois possibilités de réponse :

1 ère possibilité  : il peut accepter le renouvellement, pour la même période et avec le même loyer, de deux manières :-acceptation expresse de renouveler -acceptation tacite si le bailleur garde le silence pendant les trois mois qui suivent la demande du locataire.

2 ème possibilité  : Le bailleur accepte avec un nouveau loyer, cette acceptation reste provisoire tant que les parties ne sont pas mis d’accord sur ce loyer. En cas de désaccord, le montant sera fixé par le juge.

3 ème possibilité  : Le bailleur refuse le renouvellement. L’art 5 alinéa 4 soumet ce refus à des conditions :

- Délai : 3mois à partir de la demande de renouvellement.- Forme : le refus doit être notifié au locataire par exploit d’huissier notaire- Contenu : Le refus doit :

Indiquer les motifs du refus Reproduire, à peine de nullité, les termes de l’art 27 qui accorde au

locataire un délai de 3mois, à peine de forclusion ( الحق s’il (سقوطentend contester le congé ou demander une indemnité d’éviction.

4) Le refus de renouvellement:

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a- Procédure du refus :

L’art 7 alinéa 1er loi 1977 pose un principe selon lequel le bailleur n’est pas obligé de consentir au renouvellement, il a toujours la faculté de le refuser même après l’avoir accepté, mais en contre partie, il doit respecter les formalités exigées par la loi :

- Forme : Congé par exploit d’huissier notaire- Délai : le congé est adressé au locataire :

dans un délai de 6 mois avant l’expiration de la durée du contrat ou, dans trois mois après la réception d’une demande de renouvellement

faite par le locataire ou, A tout moment après une acceptation du principe de renouvellement

(expresse ou tacite) en exerçant le droit d’option avec offre d’indemnité d’éviction (art29 al 2 loi 1977)

- Contenu :Le congé doit contenir :

les motifs du refus (c’est important pour évaluer l’indemnité) les termes de l’art 27 loi 1977, la mention du délai de 3mois accordé au

locataire est une condition de validité du congé

b- Modalités du refus de renouvellement :

Le bailleur qui refuse le renouvellement peut être obligé de réparer le préjudice causé à son locataire lorsqu’il ne justifie pas d’un motif grave et légitime de refus (art8 al 1 er

loi 1977), et lorsqu’il n’exerce pas l’un des droits de reprise sans indemnité prévus par la loi (art8 al 2 loi 1977).

* Le refus sans offre d’indemnité d’éviction :

Le bailleur qui refuse le renouvellement peut être exonéré de la réparation du préjudice causé au locataire dans deux cas lorsque le refus est justifié par un motif grave et légitime et lorsque le bailleur reprend un local insalubre un dangereux.

1 cas de refus pour motif grave et légitime :

Ce cas a été prévu par l’article 8 comme une sanction d’agissement fautif du locataire constitué par :

1) Un motif lié au manquement du locataire à ses obligations relatives au bail :- Non paiement des loyers.- Retard répété dans le paiement de loyer.- Défaut d’entretien du local.- Réalisation de travaux non autorisés.- Défaut d’exploitation du local. - Sous location du local, location gérance, cession de bail dans des conditions irrégulières.- Changement de destination ou l’exercice d’une activité non autorisé.-Utilisation abusive du local sans respecter les règles d’hygiène et de sécurité.

2) Un motif extérieur à l’exécution du bail :

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Ce sont des agissements émanant du locataire et qui rendent intolérable le maintien du contrat de bail :-Violence exercée sur le bailleur.- Occupation de locaux non compris dans les biens loués.- Paiement de loyers par chèques sans provision.- Vol des biens du bailleur.

2 Cas de reprise d’un immeuble insalubre ou dangereux :

Selon l’article 8 alinéa 2 de la loi de 1977, le bailleur a le droit de reprise sans indemnité dans deux hypothèses:- s’il est établi que l’immeuble doit être démoli à cause de son état d’insalubrité reconnu par une décision administrative- s’il est établi qu’il ne peut être occupé sans danger en raison de son état. La reprise du local n’exonère pas le bailleur du paiement de l’indemnité dans les cas suivants : * lorsque la démolition peut être évitée par la réalisation de travaux pouvant mettre fin à l’état d’insalubrité.* lorsque l’état de danger résulte des propres agissements du bailleur tel que la négligence dans l’entretien de l’immeuble.

Le bailleur qui récupère le local sans indemnité n’est pas tenu de reconstruire un local à usage commercial. Mais s’il reconstruit ce genre de locaux, le locataire a un « droit de priorité qu’il doit exercer dans un délai de 3mois après son départ en adressant un exploit d’huissier notaire.

* Le refus avec offre d’indemnité d’éviction :

L’indemnité d’éviction a été définie par l’article 7 alinéa 2.loi 1977 comme étant la réparation du préjudice causé au locataire à qui le renouvellement du bail est refusé. Son évaluation est appréciée par le juge suivant les critères fixés par l’article 7 alinéa 3 qui prévoit que « cette indemnité comprend notamment :- la valeur marchande du fonds de commerce déterminé selon les usages de la profession, - les frais normaux de déménagement et réinstallation - les frais normaux d’enregistrement à payer pour un fonds de même valeur ».

Ainsi, le législateur présume que le refus de renouvellement entraîne la disparition du fonds du commerce, c’est pourquoi l’indemnité au sens de l’article 7 correspond à la valeur de remplacement du fonds et contient :- une valeur principale : le prix normal de cession du fonds.- une valeur accessoire (frais de déménagement, indemnité de licenciement pour les salariés, frais d’acquisition d’un nouveau fonds, réparation du trouble qui résulte de la cessation de l’exploitation).

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Le tribunal désigne un expert pour évaluer l’ensemble de ces éléments. L’expert se base souvent sur un critère objectif : il évalue les bénéfices réalisés au cours des trois dernières années par le locataire.

Le bailleur peut demander la réduction de cette indemnité en prouvant que le préjudice subi est moins important que la disparition du fonds. Dans ce cas, l’indemnité ne correspond plus à la valeur de remplacement, elle est réduite à la valeur de déplacement.Exemple : lorsque le locataire a une réputation qui lui permet de changer de local sans perdre sa clientèle.

Dans l’attente du règlement de l’indemnité d’éviction, l’article 19 donne au locataire un droit de maintien dans les lieux à moins qu’une indemnité provisoire ne lui soit versée. Durant cette période, le locataire paie au bailleur une indemnité d’occupation.

Généralement, l’évaluation de l’indemnité est laissée à l’appréciation du juge. Cependant, le législateur est intervenu pour déterminer le plafond de cette indemnité lorsque le refus est justifié par des circonstances particulières qui permettent au propriétaire de reprendre son local. Il s’agit du droit de reprise avec indemnité prévu dans 3 cas :

1 La reprise pour habiter : 5ans de loyer

L’article 13 loi 1977 permet au bailleur de reprendre le local pour y habiter lui-même ou pour faire habiter l’un de ses descendants ou ascendants. La loi exige plusieurs conditions pour l’exercer :

Les conditions relatives aux personnes   : -Le droit doit être exercé par une personne physique. Une personne morale ne peut pas reprendre le local au profit de son dirigeant ou personnel.- Le propriétaire du local doit être propriétaire depuis plus de 6 ans.- le bénéficiaire ne dispose pas d’habitation qui correspond pour ses besoins normaux et à ceux des membres de sa famille. -Le bénéficiaire doit occuper le local dans 6 mois du départ du locataire et pendant au moins 6 ans.

Les conditions relatives au local   : -Le local doit être habitable par la réalisation de simples aménagements (travaux)- La reprise ne peut pas être exercée sur des locaux affectés à usage d’hôtel ou de location meublée

Les effets   : - L’indemnité à payer correspond à 5 ans de loyer, - Si le bénéficiaire ne respecte pas ces obligations, il est tenu d’une amende entre 100D et 1000D et le locataire a le droit de priorité de reprendre le local.

2 La reprise pour reconstruire : 4ans de loyer

Le propriétaire peut selon l’article 9 loi 1977 refuser le renouvellement, démolir le local même s’il n’était pas en mauvais état afin de le reconstruire.

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Le locataire a le droit de rester dans les lieux jusqu’au commencement effectif des travaux, tout en payant ses loyers. Le propriétaire qui reçoit les loyers pendant cette période n’est pas une renonciation au droit de reprise.L’indemnité à payer correspond au montant de 4 ans de loyer.Le locataire a un droit de priorité sur le local reconstruit (art10 loi 1977).

3 La reprise temporaire pour surélever : 3ans de loyer

Selon l’article 12 loi 1977, le bailleur peut tarder le renouvellement pour une durée maximum de 3 ans pour procéder à la surélévation de l’immeuble, dans ce cas, l’indemnité ne doit pas dépasser 3 ans de loyer, valeur qui correspond à son éviction temporaire.

* Le droit de repentir :

Le bailleur qui estime l’indemnité trop élevée a le droit de repentir c à d de revenir sur sa décision de refus. Ce droit est admis par l’article 30 loi 1977 qui permet au propriétaire d’échapper au paiement de l’indemnité à condition de l’exercer en respectant trois conditions cumulatives :-Il faut que le locataire soit encore présent dans les lieux.-Il faut que le locataire n’ait pas déjà loué ou acheté un autre immeuble pour se réinstaller.-Le bailleur doit exercer ce droit dans un délai qui ne dépasse pas 15 jours de la décision judiciaire fixant l’indemnité.

La loi n’exige pas une forme particulière, une simple lettre suffisamment précise adressée au locataire peut suffire pour constater sa volonté de repentir.

Le régime du bail commercial

Section 1   : Les obligations des parties

§1- Les obligations du locataire :A- Le paiement de loyer :

1- Fixation du montant de loyer   :

Le montant du loyer initial, la périodicité, la date, le lieu et le mode de règlement sont librement fixés par les parties lors de la conclusion du contrat.L’art 22 loi 1977 énonce le principe que le montant de loyer doit correspondre à la « valeur équitable ».

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Le contrat peut contenir une clause d’indexation du loyer appelée « clause d’échelles mobiles » (art26 loi1977) qui permet d’augmenter le montant du loyer de façon automatique.

Si le montant du loyer devient excessif ou remarquablement bas, la partie intéressée (propriétaire ou locataire) peut demander au tribunal la révision du loyer. Les articles 24 et 25 loi1977 ont prévu une « révision triennale » lorsqu’il ya une variation de 25% entre la valeur locative du local et le loyer. L’évaluation s’effectue par un expert désigné par le tribunal.

En absence de stipulation expresse dans le contrat, on se réfère aux usages. Généralement, le taux d’augmentation du loyer est entre 5et 8%, la révision peut être annuelle ou biennale. Le paiement du loyer est « quérable » par le créancier qui doit le chercher au lieu où se trouve la chose louée (art 770COC).

2- Sanction du non paiement  :Aux termes de l’article 23 loi 1977, « le bail est résilié à défaut de paiement de loyer aux échéances, passé le délai de 3mois à partir de la date d’émission par voie d’huissier- notaire, d’un avis de paiement resté sans effet » ; ces dispositions sont d’ordre public. Elles s’appliquent en matière commerciale au lieu d’appliquer l’art 796 COC.Ainsi, en cas de non paiement de loyer, le propriétaire doit :

1- Adresser au locataire un avis de paiement par exploit d’huissier notaire, l’avis doit mentionner le délai de 3  mois accordé au locataire, à peine de nullité.

2- Attendre pendant une durée de 3mois. Ce délai ne peut pas être renouvelé.3- A défaut de paiement, le contrat est résilié.

B- La conservation de la chose louée :

Le locataire doit rendre le local en fin de bail dans le même état qu’en début du bail, sauf force majeure ou défaut de réparation due par le bailleur.

En matière civile, l’obligation résulte de l’art 767COC qui oblige le locataire à conserver la chose louée et à l’utiliser sans excès ni abus suivant sa destination naturelle ou celle donnée par le contrat. L’art 796 COC sanctionne cette obligation par la résiliation judiciaire du contrat.L’art 274COC prévoit même la résolution de plein droit si l’une des parties n’accomplit pas ses engagements.En matière commerciale, cette rigueur risque de bloquer l’évolution de l’activité commerciale.Si le contrat contient une clause « tout commerce », le locataire est libre de changer le librement le type d’activité. C’est une clause de déspécialisation.

Si le contrat contient une clause qui interdit au locataire de changer la destination, cette clause est elle valable ?

La cour de cassation a statué sur une affaire dans laquelle le contrat oblige le locataire à exploiter le local dans l’activité de couture. Le même contrat contient une clause qui

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considère le contrat comme résilié de plein droit en cas de violation des stipulations contractuelles.La cour de cassation a considéré cette clause comme nulle car elle est assimilée aux clauses interdites par l’art 32loi 1977 à savoir toute clause qui a pour effet de faire échec au droit de renouvellement.

C- L’autorisation du bailleur pour certaines opérations :

1- La sous location du local :L’art 20 loi 1977 pose le principe que «  sauf stipulation contraire au bail ou accord du bailleur, toute sous location totale ou partielle est interdite ».La validité de la sous location est soumise à deux conditions cumulatives:

- L’autorisation préalable du bailleur : le bailleur est libre d’accepter ou de refuser

- L’intervention du bailleur à la sous location pour vérifier sa régularitéPour éviter la sous location à caractère spéculatif, le propriétaire peut réclamer au locataire principal une majoration de loyer ci le loyer du bail principal est inférieur à la sous location.Le propriétaire a pleinement le pouvoir de refuser la sous location, à peine de résiliation du bail.

2- La cession du bail L’art 33 loi 1977 a maintenu le principe de droit civil énoncé dans l’art 772 COC selon lequel le locataire est libre de céder sn bail sauf stipulation contraire.Ainsi, le locataire peut céder le bénéfice de son contrat à un tiers à titre gratuit ou onéreux pour l’exécuter à sa place. Le locataire principal est remplacé par le cessionnaire.En matière de bail commercial, la cession de bail est d’une importance capitale. L’art 33 l’a assorti d’une limite :« Sont nulles, quelle qu’en soit la forme, les conventions tendant à interdire au locataire de céder son bail à l’acquéreur de son fonds de commerce ou de son entreprise »En effet, le locataire est libre de vendre son fonds de commerce, et le bail constitue un élément indispensable pour son exploitation immédiate.La nullité concerne les clauses qui interdisent de manière générale et absolue toute cession. La clause est nulle sans annuler tout le contrat.Par contre, les clauses simplement restrictives qui exigent l’accord préalable du propriétaire, sont valables. Elles permettent au propriétaire de contrôler la moralité du Contrat, sa régularité et la solvabilité du cessionnaire.

§2- Les obligations du bailleur :

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Aux termes de l’art 739 COC le bailleur est tenu de deux principales obligations :L’obligation de livrer la chose louéeL’obligation de garantie : il doit garantir la jouissance paisible de la chose louée et l’éviction et les défauts de la chose.L’obligation de garantie contre l’éviction ne signifie pas qu’il ya une obligation légale de non concurrence. En effet, pour empêcher le bailleur d’exercer dans le même immeuble ou à proximité une activité similaire ou bien l’interdire de conclure un bail avec un colocataire exerçant la même activité, il faut insérer dans le contrat une clause de non concurrence ou une clause d’exclusivité.Le non respect de ce genre de clauses contractuelles permet au locataire lésé de demander en justice une réparation du préjudice causé par le trouble de jouissance, et il peut même demander la résiliation du contrat de location du colocataire. Mais en l’absence de clause de non concurrence, la jurisprudence admet le principe de la liberté de commerce et d’industrie et n’affirme pas l’existence d’une obligation légale de non concurrence.

Chapitre II- Les opérations portant sur le fonds de commerce

I- La vente du fond de commerce   :

Section 1: Les conditions de validité :Pour être valable, l’acte de vente doit répondre à des conditions de fond et de forme.

§1 : Les conditions de fond :Les conditions de fond sont celles reprises par l’article 2 COC à savoir le consentement, la capacité, l’objet et la cause.

A- La capacité   : La vente du fonds de commerce est un acte de commerce (sauf pour les héritiers non commerçants) qui nécessite la capacité commerciale pour sa validité :

Etre un mineur émancipé (émancipation judiciaire absolue à l’âge de 18 ans2, ou émancipation par le mariage à l’âge de 17ans3)

Etre un majeur capable (non touché d’une cause d’incapacité comme la démence, la faiblesse d’esprit 4et la prodigalité5)

Le mineur non émancipé ou l’incapable majeur doivent agir par l’intermédiaire de leur représentant légal dans les conditions prévues par la loi.

B- Le consentement   : L’acheteur peut demander au tribunal d’annuler le contrat de vente s’il prouve qu’il était victime d’un vice de consentement ( الرضى عيوب من .(عيب

2 Voir articles 5 et 6 c com ; art 158 CSP ; art 12 COC.3 Loi n° 93-74 du 12 juillet 1993.4 Art 162 et 163 CSP5 Art 166 CSP

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Si l’acheteur prouve l’existence d’une erreur déterminante ( حاسم il peut ,(غلطannuler le contrat.

Exemple : Il prouve qu’il s’est trompé sur l’existence de clientèle, ou sur la valeur incorporelle du fonds, ou sur la nature du commerce exercé, ou sur le renouvellement du bail.

Si l’acheteur prouve qu’il était victime d’un dol (تغرير)il peut annuler la vente.Exemple : Il y a un dol lorsque le vendeur dissimule que l’exploitation n’est pas fondée sur une autorisation administrative, ou bien exagère la valeur de la clientèle.

C- L’objet   : Le contrat de vente doit porter sur un objet licite c à d conforme à l’ordre public et aux bonnes mœurs. L’objet pour le vendeur est le prix, alors que l’objet pour l’acheteur est le fonds de commerce.

1- Le fonds de commerce :Parmi les éléments du fonds, la clientèle est un élément obligatoire que les parties ne peuvent pas exclure (art 189 c com).En cas de silence des parties, les éléments compris dans le fonds sont énumérés dans l’art 189 alinéa dernier. Ce sont :

- Les éléments corporels (matériel et marchandise).- Les éléments incorporels ordinaires (clientèle, droit au bail, nom commercial,

enseigne)- Les éléments incorporels extraordinaires (droit de propriété industrielle, littéraire

et artistique).

2- Le prix :Il est librement fixé par les parties au moment de la formation du contrat. Il ne doit pas dépendre d’un accord ultérieur des parties ni de la volonté de l’une d’elles.Les parties ont généralement tendance à dissimuler une partie du prix pour échapper aux créanciers et au fisc. Deux mesures ont été prévues pour prévenir cette dissimulation :

1- La surenchère des créanciers du vendeur   : Lorsque le prix de vente est très bas et ne suffit pas pour payer les créanciers du vendeur, ces derniers ne peuvent pas recourir contre l’acheteur (car le FC n’a pas u passif propre). Mais s’ils sont inscrits ou opposants, ils peuvent acheter le FC par la surenchère :

La surenchère du 1/6 : L’un des créanciers offre d’acheter le fonds pour un prix augmenté du 1/6

La surenchère du 1/10 : L’acheteur d’un FC grevé de privilèges et de nantissement peut procéder à une procédure de purge ( من التجاري األصل تطهير

الرهون و Suite à cette purge, la loi réserve aux créanciers inscrits la .(اإلمتيازاتpossibilité d’établir la surenchère du 1/10.

2- La ventilation du prix du fonds en trois chiffres distincts  : Si le prix n’est pas payé au comptant, il doit être ventilé en 3 prix: Le prix des éléments incorporels Le prix du matériel

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Le prix de marchandiseA défaut de ventilation, le privilège du vendeur ne porte que sur les éléments incorporels du fonds.

§ 2 : Les conditions de forme :

Les conditions de forme se rapportent à l’exigence de l’écrit et de la publicité.

A- l’écrit   :

1- La rédaction de l’écrit : L’article 190 du code de commerce exige pour la validité de l’acte de vente qu’il

soit constaté par écrit. L’absence d’écrit est sanctionnée par la nullité. Principe : Acte sous seing privé : Après la modification de l’art 189 bis c

com 6, l’acte doit être sous seing privé, rédigé par un avocat en exercice non stagiaire. La rédaction par un autre rédacteur implique la nullité absolue de l’acte.

Exception : Acte authentique : Dans la vente conclue avec l’Etat, les collectivités locales et les établissements publics administratifs.

Sanction de l’écrit : Le défaut d’écrit ou bien l’omission de l’une de ces mentions peut entraîner l’annulation du contrat de vente : c’est une nullité relative, seul l’acheteur peut la demander sur la base d’un vice de consentement.Elle est aussi une nullité facultative pour le tribunal qui n’est pas obligé de la soulever ni la prononcer.Pour annuler l’acte de vente ou réduire le prix, l’acheteur doit le demander dans un délai d’un an de la prise de possession du fond. C e délai ne supporte ni interruption ni suspension.

2-Les mentions obligatoires :La présence d’écrit ne suffit pas pour la validité de la vente, il faut encore qu’il contienne certaines mentions obligatoires destinées pour informer l’acheteur sur la consistance et la valeur du fonds afin de lui faciliter son évaluation. Ces mentions concernent :

* Le précédent acte d’acquisition : il faut indiquer le nom du précédent cédant, la date et la nature de l’acquisition (vente, succession, donation) et le prix ventilé c à d que le chiffre global ne suffit pas, il faut indiquer trois chiffres distincts à savoir le prix des éléments incorporels, le prix du matériel et le prix de la marchandise.

* L’état des privilèges et de nantissement inscrits sur le fond. (art 190 c com)

* Le chiffre d’affaire et les bénéfices commerciaux nets (non bruts) réalisés durant chacun des 3 derniers exercices ou depuis son acquisition si la durée d’exploitation est inférieure à 3 ans.

* Le bail : la date, la durée, le montant du loyer actuel et le nom et l’adresse du bailleur.

6 Modification de l’art 189 par la loi n°2003-31 du 28 avril 2003.

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* L’identité des parties à la vente concernée * Le prix ventilé : L’indication du prix global ne suffit pas.

B- La publicité :

Alors que l’écrit est destiné pour protéger l’acheteur et qu’il est sanctionné par la nullité, la publicité est destinée pour protéger les créanciers du vendeur du fond de commerce. Sa sanction n’est pas nullité de la vente mais la nullité de la publication c à d l’inopposabilité du paiement du prix par l’acheteur à l’égard des créanciers du vendeur.Aux termes de l’art 204 c com, l’acheteur qui n’a pas accompli la publication légale ou qui a payé le vendeur avant l’expiration du délai de 20jours n’est pas libéré à l’égard des tiers. S’il a déjà versé le prix, il risque de payer de nouveau.

La publicité valable suppose que l’acheteur respecte 4 étapes :

1er étape : l’enregistrement de l’acte de vente à la recette des actes civils. Sanction : nullité de la publicité (et non de la vente)

2ième étape : la publication d’un extrait de l’acte de vente dans un journal quotidien et au JORT.Art 191 c com : cette publication doit être faite dans un délai de 15 jours de la date de cession.

D’autre part, l’extrait de vente doit contenir certaines mentions obligatoires dont l’omission de l’une entraîne la nullité de la publicité. Ces mentions sont :

- la nature et la date de l’acte de cession.- La date, le volume et le numéro d’enregistrement.- Identité et domicile de l’ancien et du nouveau propriétaire.- Nature et siège du fond de commerce.- Indiquer le délai d’opposition (20 jours à partir de la publication au

JORT.- Le domicile élu de l’acheteur : dans le ressort du tribunal où est situé

le FC.

3ième étape : le dépôt d’un exemplaire de l’acte de vente au domicile élu de l’acheteur pour être consulté par les créanciers. Ce dépôt doit se faire dans un délai ne dépassant pas 20 jours de la publication au JORT.

4ième étape : L’inscription : la mention au registre de commerce :Le défaut d’inscription n’annule pas le contrat de vente mais rend le paiement du prix de vente inopposable ceux créanciers du vendeur.

Section 2 : Les effets de la vente du fond de commerce :

§1- la protection des créanciers du vendeur :

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Les créanciers qui ont été informés par la publicité pourront exercer deux moyens d’action : l’opposition et la surenchère.

A- L’opposition   :

Tout créancier du vendeur peut empêcher l’acheteur de payer le prix au vendeur en signifiant une opposition au domicile élu de l’acheteur dans un délai de 20 jours suivant l’insertion au JORT, l’opposition tardive est nulle.

L’opposition est faite soit par acte d’huissier notaire ou bien par lettre recommandée avec avis de réception (art193 al 1er c com), elle doit indiquer le nom et domicile de l’opposant ainsi que le montant et la nature de la créance. La sanction du contenu de l’opposition est la nullité de l’opposition.

Cette mesure met obstacle au versement du prix au vendeur, si l’acheteur ne respecte pas cette interdiction, il ne sera pas libéré à l’égard des créanciers, il risque de payer une deuxième fois. De plus, l’opposition ouvre aux créanciers le droit de former une surenchère du 1/6 (art194 c com).

Après avoir bloqué le prix entre les mains de l’acheteur, deux possibilités sont offertes aux parties :

* La distribution du prix de vente entre tous les créanciers dans un délai de 3 mois à partir de la date de la cession.Si les créanciers n’ont pas pu s’entendre sur la répartition, l’acheteur peut demander en référé la consignation judiciaire du prix (dépôt à la caisse des dépôts et des consignations) pour être libéré, ou bien demander la désignation d’un séquestre répartiteur.Etant donné que les oppositions sont parfois nulles ou biens non fondés, le vendeur dispose de deux procédures qui lui permettent de toucher le prix de vente :

* Le cautionnement et la mainlevée de l’opposition : Lorsque le montant des créances est sensiblement moindre que le prix de vente, le vendeur peut demander au juge de référé de consigner une somme suffisante pour désintéresser ces créanciers opposants. Ce cautionnement ne peut être demandé qu’après l’expiration du délai d’opposition (20j). Il a pour effet de donner aux créanciers opposants un privilège sur la somme consignée. Si l’opposition est nulle (en la forme) ou non fondée, le vendeur peut demander au président du tribunal du lieu de situation du fonds qui statue en référé, d’annuler l’effet de l’opposition pour pouvoir toucher la totalité du prix. C’est la mainlevée des oppositions qui autorise le paiement total du vendeur.

B- Le droit de surenchère  :

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Lorsqu’il s’avère que le prix de vente est très bas et qu’il est insuffisant pour désintéresser tous les créanciers, les créanciers inscrits ou opposants peuvent, dans les 10 jours suivant l’expiration du délai d’opposition, former une surenchère du 1/6 et demander au tribunal de mettre le fonds aux enchères publiques.

Si on n’arrive pas à un prix meilleur, l’un des créanciers doit acquérir le fond du prix initial majoré de 1/6. Le surenchérisseur est déclaré adjudicataire.

La surenchère n’est pas possible lorsque le prix ne prête pas à contestation c à d lorsque la vente du fond de commerce est une vente judiciaire et le juste prix est atteint.L’art 198 c com n’admet pas la surenchère si la vente est judiciaire ou faite à la requête d’un syndic de faillite, d’une liquidation judiciaire ou d’une administration judiciaire ou de copropriétaires indivis du fonds, car dans ces cas le prix ne peut pas prêter à contestation.

§2- la protection de l’acheteur :

L’acheteur a en vertu du contrat de vente le droit d’être garanti :

A-La garantie d’éviction : C’est la garantie contre tout fait personnel du vendeur qui puisse causer un trouble d’exploitation.Exemple : Le vendeur du FC manque à cette obligation s’il exerce une activité concurrente qui entraine le détournement de la clientèle du fonds vendu. Cette garantie se matérialise par la clause de non rétablissement insérée dans le contrat de vente. Cette clause interdit au vendeur de se rétablir dans un commerce similaire ou de même nature que le commerce cédé.

B-La garantie des vices cachés Le vendeur garantit aussi contre les vices cachés du fond : les vices affectant l’un des éléments du fond tel que le matériel ne peut être évoqué que s’il est de nature à diminuer la clientèle. (art 217 c com).

-Il est aussi garanti contre les inexactitudes des mentions portées sur le contrat et qui sont de nature à fausser la valeur réelle du fond.

§3- la protection du vendeur du fond de commerce :

Le vendeur a le droit de toucher le prix de vente du fond de commerce mais il ne peut le percevoir qu’à l’expiration du délai d’opposition donné à ses créanciers.Après l’expiration de ce délai, le vendeur possède deux garanties : le privilège et l’action résolutoire ( الفسخ (دعوى

A- le privilège du vendeur  : Art 205 c com(Il permet au vendeur une restitution du FC en valeur)Ce privilège permet du vendeur en cas de non paiement de demander la revente de fond entre les mains de l’acheteur et d’être payer par préférence aux créanciers de l’acheteur.

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Pour se prévaloir de ce privilège, le vendeur doit inscrire son privilège au registre public tenu au greffe du tribunal dans le ressort duquel le fonds est exploité. Cette inscription conserve le privilège pendant 10 ans de sa date, il garantit le paiement du prix ainsi que 2 ans d’intérêt.

Cette inscription doit être radiée lorsque le vendeur est payé.

B-L’action en résolution   : Art220 c com(Il permet au vendeur une restitution du FC en nature)Le vendeur impayé part demander la résolution du contrat de vente parce que l’acheteur n’a pas honoré son obligation de payer le prix, cette action répond aux mêmes conditions de publicité que la vente. Pour pouvoir exercer cette action, certaines conditions sont exigées :-Le vendeur doit avoir déjà inscrit son privilège 15j de la vente, sinon l’action est rejetée par le tribunal. L’action existe tant que le privilège n’est pas éteint.-Les créanciers inscrits sur le fond doivent être informés de cette action par exploit d’huissier notaire à leur domicile élu. La résolution permet au vendeur de reprendre le fonds mais il doit restituer les acomptes reçus. Elle ne devient définitive qu’un mois après la notification aux créanciers inscrits. La valeur du fonds et de ces éléments doit être évaluée au moment de la résolution par un expert.Les créanciers inscrits peuvent éviter la résolution en désintéressant le vendeur. Ils ont un mois pour agir.

(Ces développements sont extraits de l’ouvrage du Professeur Nébila Mezghani, Droit commercial, CPU, Tunis,2ème édition 2006. Tous droits réservés.)

II   : Le nantissement du fonds de commerce   :

Le fonds de commerce peut être utilisé comme support de crédit par son propriétaire, étant donné la valeur marchande qu’il peut constituer.

Si commerçant, propriétaire d’un fonds de commerce, emprunte de l’argent, c’est généralement pour continuer à exploiter son fonds de commerce. Par conséquent, il ne doit pas être dessaisi de son fonds. C’est pourquoi, le législateur a organisé une prise de sûreté, librement contractée par le propriétaire du fonds avec un créditeur, qu’il a appelé nantissement.

Section1- Les conditions de constitution du nantissement :

§1- Les conditions de fond :

Le nantissement conventionnel du fons de commerce est un contrat par lequel un débiteur consent à son créancier une garantie réelle accessoire à sa dette, dont l’assiette porte sur son fonds de commerce.

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S’agissant d’une convention, la première condition de fond à examiner touche à la situation juridique des parties. Nous examinerons, ensuite, la condition relative à la créance garantie.

A- Les conditions relatives aux parties à la convention de garantie :

Il s’agit de savoir dans quelles conditions les parties ont la capacité de passer la convention de nantissement. En pratique, la difficulté ne peut surgir que du débiteur. Mais, s’agissant d’un contrat, le bénéficiaire doit émettre, également, un consentement valable.

Pour lui, le contrat est un acte d’administration, donc un représentant pourrait le passer à sa place, de même qu’un mandataire conventionnel.

Mais, pour le débiteur, c’est plutôt un acte de disposition car la prise de nantissement peut conduire à la vente forcée du fonds, si le débiteur ne paie pas la dette garantie.

Par conséquent, aucun incapable ne peut donner un fonds de commerce en nantissement.

B-Les conditions relatives créances garanties :

Le nantissement conventionnel suppose une créance valable. Si la créance est fictive frappée de nullité ou si elle est éteinte pour une cause quelconque, le nantissement est lui-même nul.

Mais, peu importe que la créance soit antérieure ou postérieure à la sûreté ou qu’elle soit éventuelle ou conditionnelle.

Ainsi, la prise de nantissement par un banquier pour garantir le solde négatif du compte courant de son client peut garantir la sûreté et peut également garantir une ouverture de crédit postérieure ou concomitante.

Dans le cas d’une créance conditionnelle, si la créance défaille, le nantissement disparaîtra avec la créance.

§2- Les conditions de forme et de publicité :

A- Les conditions de forme :

L’article 238 du Code de Commerce prévoit que le contrat de nantissement doit être constaté par un acte authentique ou un acte sous seing privé. Cette option n’est plus permise depuis la promulgation de la loi n°2003-31 du 28 avril 2003 qui a ajouté l’article 189 bis au Code du Commerce. En effet, en s’exprimant en des termes généraux « tous les actes relatifs au fond de commerce », l’article 189 bis du

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Code de Commerce impose le recours à peine de nullité à l’acte sous seing privé établi par une catégorie unique de rédacteurs, à savoir les avocats en exercice non stagiaire. L’article 189 bis du Code de Commerce a donc, implicitement abrogé l’alinéa premier de l’article 238 du Code de Commerce relatif à la possibilité de recourir à la forme authentique.

B- Les conditions de publicité :

Le nantissement conventionnel d’un fonds de commerce doit être inscrit sur un registre public tenu au greffe du tribunal dans le ressort duquel le fonds est exploité.

Au cas où le fond de commerce nanti comporte des succursales, la même formalité doit, également, être accomplie au greffe du tribunal dans le ressort duquel est situé chacune des succursales du fonds comprises dans le nantissement.

L’inscription doit être prise, à peine de nullité du nantissement, dans le délai d’un mois à partir de la date de l’acte constitutif.

Donc, ce n’est pas une simple condition d’opposabilité aux tiers du privilège résultant du nantissement dont le non respect laisserait le contrat valable entre les parties, mais c’est une condition de validité du contrat dont le défaut est sanctionné par la nullité du contrat.

Section 2- L’assiette du nantissement :

§1- Les éléments du fonds pouvant entrer dans l’assiette du nantissement :

A- L’énumération légale des éléments susceptibles d’être compris dans le nantissement :

Ce n’est pas la totalité du fonds de commerce qui peut faire l’objet du nantissement.

L’article 237 du Code de Commerce contient une énumération des éléments qui sont « seuls susceptibles d’être compris dans le nantissement ».

Cette liste limitative comprend :

a) les éléments incorporels- l’enseigne, le nom commercial, le droit au bail, la clientèle et

l’achalandage.- les droits de propriété industrielle, littéraire et artistique.

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b) les éléments corporels« Le mobilier commercial, le matériel et l’outillage ».

B- Les éléments du fonds exclus de l’assiette du nantissement :

a) les marchandises

Elles ne sont pas citées dans l’énumération de l’article 237 du Code de Commerce. Cette omission est volontaire. Les marchandises ont été exclues de l’assiette du nantissement pour maintenir un actif libre au débiteur et lui laisser une possibilité de crédit auprès de ses fournisseurs.

Ces derniers sont, ainsi, sûrs que leurs fournitures ne tomberont pas sous le coup d’une sûreté prises par un autre créancier.

Les marchandises constituent un capital qui est appelé à circuler et qui est réservé au crédit à court terme.

Cette explication permet de comprendre la différence entre l’assiette du privilège du vendeur qui inclut les marchandises, et l’assiette du nantissement qui les exclut.

Le vendeur d’un fonds de commerce comportant des marchandises est assimilable à un fournisseur du stock et doit pouvoir bénéficier d’une garantie pour le crédit qu’il consent sur le stock.

b) les autorisations administratives :

Le caractère limitatif de la liste de l’article 237 du Code de Commerce a, également, pour conséquent d’exclure de l’assiette du nantissement tous les éléments nouvellement apparus tels que les autorisations administratives (licences de transport ou de débit de boissons par ex.).

§2- Les éléments nécessairement compris dans le nantissement :

A- Les éléments nécessairement compris dans le nantissement :

Selon l’article 237 al.3 du Code de Commerce, à « défaut de désignation expresse et précise » c’est-à-dire dans le silence de l’acte, le nantissement ne comprend que l’enseigne, le nom commercial, le droit au bail et la clientèle.

Ces éléments incorporels essentiels ordinaires sont, donc, nantis de plein droit sans qu’il soit nécessaire de le préciser dans l’acte.

Cette règle de l’article 237 al.3 est-elle simplement supplétive de la volonté des parties ou impérative ?

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Cette inclusion de plein droit des éléments énumérés est-elle obligatoire si ces éléments existent dans le fonds ?

Les textes, à notre avis, autorise les deux interprétations.

En droit français, devant la même règle, la doctrine est partagée.

- certains auteurs estiment que ces éléments incorporels sont nécessairement compris dans le nantissement.

- d’autres auteurs optent pour une position plus souple.

En tout cas, nous pouvons valablement affirmer que le nantissement qui exclut la clientèle de l’assiette, ne porterait plus sur un fonds de commerce et serai nul.

B- Les éléments librement inclus dans le nantissement :

De la combinaison de l’alinéa 1er et de l’alinéa 3ème de l’article 237 du Code de Commerce, il résulte nécessairement que les parties doivent désigner, expressément, dans la convention de nantissement les éléments qu’elles veulent voir figurer dans l’assiette autres que les éléments incorporels essentiels déjà énumérés par l’alinéa 3 de l’article 237 et qui sont inclus de plein droit dans l’assiette.

Elles ne peuvent choisir, cependant, que ceux qui sont susceptibles d’entrer dans le nantissement.

Cela vise, en pratique, le matériel et les droits de propriété intellectuelle.

§3 - L’indivisibilité de l’assiette du nantissement :

Une caractéristique très importante distingue le régime de l’assiette du nantissement par rapport à celui du privilège du vendeur : c’est son indivisibilité.

La totalité de la créance privilégiée va être garantie par la totalité du prix de vente des éléments grevés par le nantissement sans discrimination entre les différents éléments grevés.

Dans le régime du privilège du vendeur, la loi, nous l’avons vu, impose un sectionnement distinguant le prix des éléments incorporels, celui du matériel et celui des marchandises.

Le privilège du vendeur s’exerce, séparément, sur le prix obtenu lors de la revente forcée pour chaque partie, et le supplément obtenu sur la revente de l’une des parties ne peut servir à combler une insuffisance de la garantie pour une autre.

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Dans le cas du nantissement, la sûreté grève indivisiblement le matériel et les éléments incorporels, ce qui est plus intéressant.

C’est pourquoi, souvent, le vendeur se fait consentir un nantissement.

Section3- Les effets du nantissement :

Les effets du nantissement sont analogues à ceux du privilège du vendeur du fonds de commerce en ce qu’ils entraînent, au bénéfice du créancier nanti, un droit de préférence et un droit de suite (§1).

Ces droits sont empruntés au régime de l’hypothèque.

Mais, cette analogie qui existe entre le régime de l’hypothèque et des sûretés sur le fonds de commerce ne doit pas faire illusion.

Le fonds de commerce ne représente pas en soi une valeur aussi stable et sûre que celle de l’immeuble.

En effet, la valeur du fonds est étroitement liée à la qualité de l’exploitation, à l’évolution du marché, etc…

C’est pourquoi, le débiteur, toujours en possession du fonds, peut par ses agissements compromettre les droits des créanciers inscrits.

Le législateur a, donc, prévu des dispositions spéciales tendant à protéger les créanciers nantis contre les risques de dépréciation du gage (§2).

§1- Les droits des créanciers nantis :

1) Le droit de préférence :

Il confère au créancier nanti le droit de se faire payer en priorité sur le prix de vente du fonds, par préférence aux créanciers chirographaires.

Ainsi, si le créancier nanti n’est pas payé à l’échéance, il adresse une sommation de payer au débiteur.

Si huit jours après, cette sommation est demeurée infructueuse, le créancier inscrit forme une demande pour faire ordonner la vente du fonds, devant le tribunal dans le ressort duquel le fonds est exploité.

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Le tribunal examine l’affaire et peut alors ordonner la vente du fonds de commerce aux enchères publiques. Il commet à cet effet, l’officier public qui dresse le cahier des charges.

Le tribunal peut confier, entre temps, la gestion du fonds à un administrateur provisoire.

- le tribunal peut autoriser le poursuivant, s’il n’y a pas d’autres créanciers inscrits ou opposants, à toucher le prix directement et sur sa simple quittance, soit de l’adjudicataire, soit de l’officier public vendeur jusqu’à concurrence de sa créance.

- Si plusieurs privilèges s’exercent sur le prix de vente du fonds, la priorité s’établit entre les créanciers inscrits selon l’ordre des dates d’inscription.

- dans le cas où certaines créances ont été inscrites le même jour, elles viennent en concurrence.

2) Le droit de suite :

Le créancier nanti, impayé, peut saisir et faire vendre le fonds de commerce, en quelques mains qu’il se trouve, que ce soit celles du débiteur ou d’un acquéreur ou même d’un sous-acquéreur.

La publicité légale par inscription au greffe, que l’on a étudié précédemment, a, précisément, pour but de protéger les sous-acquéreurs contre le risque d’acheter un fonds grevé sans qu’ils le sachent.

Un certain nombre de conséquences surgit de l’institution du droit de suite sur le fonds :

- Tout d’abord, la protection du créancier inscrit est imparfaite, car elle ne le prémunit pas contre la cession d’éléments isolés du fonds. Ce dernier risque d’être démantelé de certains de ses éléments sans que le créancier nanti puisse agir, car le droit de suite s’exerce sur l’universalité incorporelle constituée par le fonds.

Mais, la jurisprudence qualifie parfois la cession d’éléments du fonds de cession (de fonds de commerce) dissimulée afin de maintenir le droit de suite des créanciers inscrits.

Ainsi, il a été décidé que la cession du bail n’emporte pas droit de suite sauf si cette cession simule une véritable cession de fonds.

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- En second lieu, la loi a dû aménager un mécanisme de purge en faveur de l’acquéreur du fonds grevé consistant pour celui-ci, à offrir, de remettre le prix entre les mains des créanciers inscrits pour libérer le fonds.

En contrepartie, les créanciers inscrits ont été prémunis contre une sous-évaluation du prix consenti à l’acquéreur et offert en paiement de leur créance par la possibilité de requérir la mise en vente publique du fonds avec surenchère du 10 ème

calculée sur la valeur des éléments incorporels.

§2- La garantie contre la dépréciation du fonds grevé :

Des mesures sont prévues afin de protéger les créanciers nantis et privilégiés contre la dépréciation de la valeur du fonds.

1) La garantie contre la résiliation du bail:

Le droit au bail représente un élément très important du fonds de commerce. C’est pourquoi, l’article 242 du Code de Commerce édicte une règle de protection des créanciers inscrits qui a pour but d’informer les créanciers inscrits du risque de disposition que court cet élément primordiale du fonds de commerce.

C’est ainsi que le propriétaire (le vendeur dans le texte arabe) qui agit en résiliation du bail, doit présenter un certificat mentionnant qu’il n’existe aucune inscription ou un état des inscriptions existantes dans les formes prescrites à l’article 216 du Code de Commerce. Lorsque des inscriptions grèvent le fonds de commerce, le propriétaire qui intente une action en résiliation du bail doit la notifier à peine de nullité à tous les créanciers inscrits à leurs domiciles élus par huissier notaire.

Le tribunal saisi de l’action en résiliation ne peut rendre son jugement qu’après l’expiration d’un délai d’un mois à partir de la date de la notification.

Il impose la notification par huissier de justice de la résiliation qui ne devient définitive qu’après qu’un délai d’un mois de la date de la notification se soit écoulé.

L’article 242 mentionne distinctement deux cas de résiliation du bail.

a) Les différents cas de résiliation du bail :

- La résiliation en justice (que « poursuit » le bailleur).

- La résiliation entre bailleur et locataire au détriment des créanciers des créanciers inscrits de celui-ci.

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Mais ces deux hypothèses sont trop restrictives ; et la jurisprudence française a étendu l’exigence de notification à d’autres situations.

- la plus fréquente, c’est le cas de l’existence d’une clause résolutoire opérant de plein droit : les juges ont étendu l’exigence de notification au cas de résiliation de plein droit, résultant d’une clause du bail.

Ils ont considéré que la clause vaut résiliation amiable sous condition déterminée.

Peu importe l’événement ou la violation du bail qui a entraîné la clause résolutoire.

- La règle de l’article 242 (notification de la demande de résiliation du bail aux créanciers inscrits) ne joue pas, cependant, dans le cas où il y a rupture du contrat de bail (et non résiliation) suite à un refus de renouvellement de la part du bailleur (avec ou sans indemnité d’éviction), ceci, en application du statut des baux commerciaux.

Mais, dans ce cas, la jurisprudence française « dominante » admet que les créanciers inscrits pourront exercer leurs droits sur l’indemnité d’éviction à la place du droit au bail disparu.

Il y a subrogation de l’indemnité d’éviction au droit au bail.

b) Les formalités de la notification :

Le bailleur doit notifier sa demande de résiliation du bail de l’immeuble où est exploité le fonds grevé de nantissement au domicile élu des créanciers antérieurement inscrits.

Chaque créancier inscrit doit recevoir sa notification un mois avant le jugement.

En cas de résiliation amiable, celle-ci ne devient définitive qu’un mois après la notification.

Sanction de l’obligation de notifier la résiliation :

La sanction de la notification tardive ou de l’absence de toute notification est l’inopposabilité de la résiliation intervenue.

Les créanciers inscrits peuvent donc attaquer la décision judiciaire prononçant la résiliation par la voie de la tierce opposition.

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Une autre conséquence de l’inopposabilité de la résiliation est que les créanciers inscrits peuvent obtenir la mise en vente forcée du fonds y compris le droit au bail litigieux.

A défaut de maintien ou de remise dans les lieux du locataire dont le bail été irrégulièrement résilié, les créanciers inscrits peuvent agir en responsabilité délictuelle contre le bailleur en prouvant leur préjudice.

c) Les prérogatives des créanciers inscrits ayant reçu notification :

L’article 242 du Code de commerce accorde aux créanciers inscrits un délai d’un mois pour intervenir. En quoi consiste cette intervention ?

L’article 242 in fine prévoie que les créanciers inscrits pourront demander la vente du fonds aux enchères publiques.

Ce qui a pour effet de paralyser la résiliation et de sauvegarder ainsi le bail.

Mais, les créanciers peuvent, également si leur intérêt l’exige, exécuter les obligations auxquelles le locataire a manqué ; par exemple : en payant à sa place les loyers échus et éviter ainsi la résiliation du bail.

Le créancier qui a payé est, alors, subrogé aux droits du bailleur.

2) La garantie contre la saisie d’éléments du fonds de commerce :

L’article 248 du Code de Commerce contient une autre disposition de protection des créanciers inscrits contre le démembrement du fonds provenant cette fois, de la disparition d’éléments du fonds à la suite d’une saisie-exécution.

L’article 248 du Code de Commerce alinéa 1er impose de notifier, aux créanciers inscrits depuis plus de 15 jours, la saisie avant qu’elle n’ait lieu. Le saisissant devra, en outre, attendre l’expiration du délai de 10 jours suivant la notification pour vendre l’élément du fonds qu’ils a saisi par se faire payer.

Pendant ce délai, tout créancier inscrit, que sa créance soit ou non échus, peut assigner tous les intéressés devant le tribunal pour que soit ordonnée la vente de tous les éléments du fonds.

Ainsi, le fond tout entier est mis en vente forcée et non pas seulement certains de ses éléments, ce qui risquerait de ruiner la valeur de ce qui subsisterait du fonds.

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Il faut remarquer, cependant, que le domaine de cette protection est doublement limité :

- Il ne porte que sur le risque de vente sur saisie-exécution et non sur le cas de vente amiable.

On a, déjà, mentionné que le droit de suite des créanciers inscrits ne peut s’exercer sur les éléments isolés du fonds.

- En outre, l’article 248 in fine écarte l’application de la règle de la notification « en cas de poursuites intentées en application des lois relatives… au nantissement de l’outillage et du matériel d’équipement ». Le bénéficiaire de ce nantissement n’a pas l’obligation de se conformer aux prescriptions de l’article 248 al. 1er. La solution est différente du droit français (article 14 de la loi du 18 janvier 1951 qui renvoie à l’article 20 de la loi du 17 Mars 1909). Il faut, cependant, relever que la loi française de 1951 a été reprise en Tunisie par le décret du 28 juillet 1955.

3) La garantie contre le déplacement du fonds :

Le code de commerce prévoit des règles visant à garantir les créanciers inscrits contre un changement dans les conditions d’exploitation du fonds grevé.

Elles consistent en formalités devant accompagner le déplacement du fonds, réglementées par l’article 241 du Code de Commerce.

Certes, le nantissement n’a pas pour effet d’empêcher le déplacement du fonds, assiette de la sûreté.

Le propriétaire du fonds grevé doit pouvoir gérer ses affaires selon ses intérêts.

Mais, le déplacement du fonds de commerce risque de se traduire par une diminution substantielle de sa valeur lorsqu’il entraîne perte de tout ou partie de la clientèle.

A ce sujet, il faudrait, tout d’abord, faire remarquer que le code de commerce n’a pas précisé que l’on doit entendre par « déplacement du fonds ».

Mais, puisque le fonds est essentiellement un droit de clientèle (élément obligatoire), on doit admettre que si le déplacement n’emporte pas un changement de clientèle, il s’agit d’un transfert du fonds. Mais, la création d’une nouvelle clientèle du fait du déplacement entraînera création d’un fonds nouveau.

Le législateur a, donc, institué des garanties contre les déplacements du fonds :

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Il appartient au propriétaire du fonds de prévenir chacun des créanciers inscrits 15 jours au moins à l’avance de son intention de déplacer le fonds, et du nouveau siège qu’il entend lui donner.

Un tel avis devra être notifié par lettre recommandée avec avis de réception.

Faute pour le propriétaire du fonds de s’être soumis à une telle procédure, les créances inscrites deviendront de plein droit exigibles.

A compter de la notification faite par le propriétaire du fonds, les créanciers inscrits disposent d’une option.

- S’ils souhaitent conserver leur nantissement (s’ils consentent à ce déplacement), ils devront faire mentionner, en marge de l’inscription existante, le nouveau siège du fonds. Mais, si le fonds a été transféré à un autre ressort, ils devront prendre une nouvelle inscription, en se référant à l’inscription primitive, avec indication du nouveau siège sur le registre du tribunal de ce ressort.

La régularisation de l’inscription devra être effectuée par le créancier inscrit dans les 15 jours qui suivent la notification qui lui a été adressée, ou la date à laquelle il aura eu connaissance du déplacement.

Le défaut de régularisation peut entraîner la déchéance du privilège ou du nantissement du créancier s’il est établi que par sa négligence, le créancier inscrit a causé un préjudice aux tiers induits en erreur sur la condition juridique du fonds.

- La seconde option : les créanciers inscrits refusent de donner leur consentement au déplacement du fonds. Dans le cas où ce déplacement, effectué malgré leur refus, entraîne une dépréciation de la valeur du fonds de commerce, les créanciers inscrits peuvent obtenir le prononcé de la déchéance du terme de leurs créances.

Ces dernières peuvent être, donc, déclarées immédiatement exigibles.

III- La location-gérance du fonds de commerce :

Le contrat de location-gérance est soumis aux articles 229 et s. du Code de Commerce. Ces dispositions sont impératives ; elles ne peuvent être écartées par une clause contraire.

La location-gérance doit être distingué de la gérance-salariée ainsi que de la gérance-mandat.

Dans le cas de la gérance-salariée, le propriétaire met à la tête de son fonds une personne chargée d’en diriger l’exploitation ; mais, il conserve des pouvoirs très stricts d’instruction préalable et de contrôle. Le propriétaire demeure commerçant. Le gérant ne le devient pas.

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Dans le cas de la location-gérance, le locataire aura la qualité de commerçant tandis que le propriétaire du fond cesse d’avoir cette qualité.

Dans le cas de la gérance-mandat, le gérant-mandataire se voit reconnaître des pouvoirs étendus (il engager du personnel, acheter des marchandises…).

Mais, il est tenu de rendre compte au propriétaire du fonds. Le propriétaire conserve un pouvoir de contrôle a posteriori.

Le gérant mandataire agit pour le compte du propriétaire. Il n’est pas lui-même commerçant. Seul le propriétaire est commerçant.

A l’origine, la pratique de la location-gérance du fonds de commerce était destinée à résoudre des situations particulières ou temporaires où le propriétaire du fonds se trouvait dans l’impossibilité de l’exploiter :

- soit pour des raisons d’incapacité (minorité par ex.).

- soit pour des raisons d’incompatibilité.

Puis plus tard (après la 2ème guerre mondiale), cette pratique s’est développée en prenant un a aspect différent : au lieu d’investir dans l’immobilier, beaucoup d’épargnants ont trouvé intérêt à placer leurs capitaux dans l’achat de fonds de commerce qu’ils donnent ensuite en location-gérance moyennant une redevance non taxée.

Ce phénomène a été critiqué par certains auteurs qui y ont vu une nouvelle forme de capitalisme, un facteur d’inflation et de hausse du coût de la vie.

Et outre, cette pratique peut être dangereuse pour les tiers.

Ces derniers, dans le cas où ils ignorent l’existence du contrat, se fient à la valeur du fonds comme éléments de solvabilité ou de crédit de l’exploitant.

C’est pourquoi, le législateur a soumis ce contrat à certaines conditions.

Mais, auparavant, il faudrait rechercher la nature juridique du contrat de location-gérance. Le législateur ayant lui-même opté pour la terminologie de « location », il ne peut y avoir aucun doute sur cette nature juridique. Il s’agit d’un contrat de bail, plus précisément d’un contrat de louage d’un meuble incorporel : le « loueur », propriétaire du fonds, en concède simplement l’exploitation, il transfère la jouissance du fonds, moyennant paiement d’un qualification de location de meubles incorporels.

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Mais, c’est un contrat de bail qui a sa propre spécificité et qui obéit à des règles particulières.

Section 1- Les conditions de fonds et de forme de la location-gérance :

§1- Les conditions de fonds:

Elles correspondent à celles applicables au droit commun des contrats avec quelques particularités.

1) La capacité :

Le gérant (exploitant le fonds à se risques) est indiscutablement un commerçant (article 231 du Code de Commerce). Il devra n’encourir aucune incapacité, incompatibilité ou déchéance de faire le commerce.

2) L’objet du contrat :

Il doit porter sur un fonds de commerce. Ce dernier, aux termes de l’article 229 du Code de Commerce, peut être loué (concédé) totalement ou partiellement. Mais, la clientèle doit figurer parmi les éléments donnés en location-gérance.

L’objet du contrat de location-gérance doit être distingué de l’objet du contrat de bail commercial.

Le bail commercial concerne les locaux utilisés pour le fonds de commerce (l’immeuble).

La location-gérance porte sur le fonds.

Les deux contrats peuvent coexister : c’est le cas lorsque le propriétaire du fonds est aussi propriétaire du local commercial.

Ces conditions, capacité et objet, ne sont cependant pas suffisantes pour éviter certains abus qui ont donné lieu à des locations-gérances correspondant à des placements spéculatifs de capitaux.

C’est pourquoi, le législateur français, par la loi du 20 mars 1956, a réservé la location-gérance aux personnes qui, pendant 7 ans au moins, ont été commerçant.

Cette loi a, cependant, prévu une exception à cette règle des 7 ans. Cette règle est écartée au profit d’une certaine catégorie de personnes, tels que les héritiers du commerçant, l’Etat, les collectivités publiques…

De plus, la loi permet au Président du Tribunal de Grande Instance de supprimer ou réduire ce délai de 7 ans en cas de maladie du commerçant ou dans le cas de la veuve du commerçant.

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Par ailleurs, pour pouvoir donner un fonds en location-gérance, il faut avoir exploité ce fonds pendant deux ans au moins. Ce délai peut, également faire l’objet de dispense et de réduction.

§2- Les conditions de forme et publicité :

En exigeant que « tous les contrats relatifs au fonds de commerce » doivent être rédigés par une catégorie unique de rédacteurs à peine de nullité absolue, l’article 189 bis du Code de Commerce fait de l’acte de la location gérance du fonds de commerce un acte solennel.

Avant la loi du 28 avril 2003 qui a ajouté l’article 189 bis sus-visé, aucune condition de forme n’était exigée pour la validité de l’acte. La location-gérance était un contrat consensuel.

Cependant, il est, en pratique, indispensable de rédiger un écrit pour effectuer la publicité exigée par la loi.

Quelles sont ces formalités de publicité,

Le code de commerce a institué des règles de publicité pour informer les tiers des conditions juridiques dans lesquelles le fonds est exploité afin que les créanciers du gérant ne puissent pas compter sur la valeur du fonds pour être payés.

Cette publicité est organisée selon les modalités suivantes :

1) L’inscription au registre de commerce :

Selon l’article 231 al. 1er du Code de Commerce, le locataire-gérant a la qualité de commerçant et doit, en conséquence, être inscrit au registre de commerce.

Quant au loueur, il doit, lui aussi, se faire inscrire au registre de commerce même s’il n’est pas ou s’il n’est plus commerçant.

S’il est déjà inscrit au registre de commerce, il est tenu de faire modifier son inscription.

Il doit, dans tous les cas, faire mention expressément au registre de commerce, de la mise en location du fonds.

2) La publication du contrat dans un journal quotidien et au JORT :

Aux termes de l’article 231 alinéa 2 modifié par la loi n°2000-61 du 20 juin 2000, le contrat de location-gérant doit faire l’objet d’une publication sous forme d’extraits, dans la quinzaine de sa date, dans un journal quotidien dont un en langue

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arabe et dans le JORT avec l’indication des nantissements et des créanciers inscris s’il y en a.

La fin de la location-gérance donne lieu aux mêmes mesures de publicité.

Un problème s’est posé en pratique en ce qui concerne la nécessité des formalités de publicité au cas où le contrat est expressément renouvelé.

La jurisprudence française a estimé qu’il y a un nouveau contrat indépendant du précédent qui doit, incontestablement, être publié.

Mais, en cas de reconduction tacite du contrat, après des décisions en sens contraire, rendues par les juges du fond, la cour de cassation a estimé que la publicité n’est pas nécessaire, puisqu’aucune modification n’est intervenue.

3) La mention par le locataire-gérant de sa qualité sur les papiers commerciaux :

L’article 232 al. 1er prescrit au locataire gérant d’indiquer sur tous les documents relatifs à ses activités commerciales (lettres, factures…) sa qualité de locataire gérant.

La sanction est une peine d’amende de 5 à 10 D.

Cette mesure est très efficace pour la protection des tiers. Elle a été supprimée en droit français (décret 14 mars 1986) avec l’immatriculation du loueur.

Section2- Les effets de la location-gérance :

Il faut distinguer les effets entre les parties (§1) et les effets à l’égard des tiers (§2).

§1- Les effets entre les parties :

Le contrat de location-gérance, comme tout contrat, est une source d’obligations réciproques à la charge des parties : le loueur et le locataire.

A- Les obligations du loueur :

- L’obligation du loueur :

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Elle consiste à fournir au locataire-gérant le jouissance paisible du fonds. Comme tout bailleur, il doit délivrer et entretenir la chose louée.

La délivrance peut être une remise de fait du fonds entre les mains du locataire (avec éventuellement une présentation à la clientèle), et également une remise de droit lorsqu’il y a des formalités de transmission administrative d’une autorisation nécessaire à l’exploitation, ou de transfert des droits d’exploitation relatifs aux propriétés industrielles.

L’entretien peut être un entretien matériel ou juridique (bien incorporel) pour maintenir les droits qui entrent dans la composition du fonds bail, propriété industrielle).

- Les garanties dues par le loueur :

Ces garanties sont la conséquence de l’obligation de fournir la jouissance paisible de la chose louée.

Elles sont de deux sortes :- garantie des vices cachés, d’ordre juridique ; par exemple : défaut d’une

autorisation administrative indispensable.- garantie d’éviction : elle joue selon les règles du droit commun ;* par exemple s’il y a un trouble de droit de la part des tiers.* la garantie du fait personnel peut jouer : il s’agit pour le loueur de

s’abstenir de toute atteinte aux éléments du fonds confiés en gérance résultant d’un rétablissement du loueur. Ce dernier ne doit pas faire concurrence à son locataire.

C- Les obligations du locataire-gérant :

a) Pendant l’exécution du contrat :

Comme dans le droit commun, le locataire a l’obligation de payer le loyer « de conserver la chose louée d’en user sans excès ni abus suivant sa destination naturelle, ou celle qui lui a été donnée par le contrat » (article 767 C.O.C.). Ainsi donc :

- Il doit payer les redevances aux échéances et selon les modalités convenues au contrat.

- Le locataire gérant a le devoir d’exploiter le fonds pour ne pas le laisser péricliter. Il ne peut ni le céder ni le grever puisqu’il ne lui appartient pas.

Peut-il céder ou sous-louer sa propre location ?

Le caractère personnel de la gérance interdit, normalement, une substitution de gérant sans l’approbation du loueur.

C’et ce qu’a décidé la jurisprudence française.

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- Il a l’obligation d’user de la chose « sans excès ni abus » : c’est-à-dire d’en user « en bon père de famille ».

Il doit respecter la réglementation de la profession. Il ne doit pas mettre en péril l droit de jouissance du local en transformant irrégulièrement les locaux par exemple.

Il ne doit pas, non plus, porter atteinte à la clientèle en la détournant au profit d’un fonds qui lui appartiendrait.

- Enfin, il a l’obligation d’user de la chose « suivant sa destination naturelle ».

Il ne doit pas changer l’objet de l’exploitation ou lui adjoindre une activité nouvelle.

Vu les obligations qui sont à la charge du locataire gérant et dont l’inexécution peut causer un préjudice important au loueur, ce dernier exige, souvent, du locataire-gérant le versement d’un cautionnement pour garantir le respect de ces obligations.

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