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Revue de chirurgie orthopédique © Masson, Paris, 2005 2005, 91, 385-388 SÉLECTION DES ANALYSES DU CENTRE DE DOCUMENTATION DE LA SOFCOT La rubrique « Sélection des analyses du centre de documentation de la SOFCOT » propose le résumé analytique des articles jugés particulièrement importants, regroupés par thèmes et répertoriés. L’ensemble des fiches d’analyse bibliographiques du Centre de Documentation de la SOFCOT est diffusé sous forme numérique et peut facilement être consulté sur le CD-ROM archivant le contenu de la RCO, dont il est prévu une mise à jour annuelle, ainsi que sur Internet (Site SOFCOT) avec mise à jour mensuelle. Les membres du Centre de Documentation sont : J. Alain, J. Bedouelle, N. Biga, D. Chauveaux, L. de Leobardy, T. Defives, J. Dunoyer, J. Fenollosa, F. Fiorenza, C. Glorion, M. Guillaumat, P. Henky, A. Languepin, D. Moulies, J.-P. Padovani, J.-M. Postel, L. Rillardon, G. Taussig, R.Vialle, P. Wicart. GÉNÉRALITÉS Les bases méthodologiques de la recherche clinique pour le praticien : pour bien lire ou pour bien écrire Cette mise au point expose de façon relativement simple les élé- ments d’épidémiologie clinique et de biostatistiques que tout chirurgien orthopédiste devrait connaître lorsqu’il décide de faire une publication ou même seulement d’évaluer la qualité scienti- fique d’un article. Ce long current concept review comprend plusieurs chapitres : 1) Les différents modèles et types d’études Étude d’observations ou études expérimentales (essai clinique), rétrospectives ou prospectives, transversales ou longitudinales. Ces études sont susceptible de voir leurs conclusions invalidées par les biais, les confusions et le hasard. Ces 3 sources d’erreurs sont définies et décrites en détail dans leur diversité, leur origine et leur phase de survenue. L’auteur peut alors préciser la valeur scientifique de chaque type d’étude et développe ainsi le tableau de niveau de preuve scientifique qui est rappelé dans les instruc- tions aux auteurs et qui figure maintenant à la fin du résumé de chaque article publié dans le JBJS. 2) Hypothesis testing hypothèse nulle ou alternative Ce chapitre revient en détail sur le rôle du hasard avec les erreurs de type I et de type II et la signification de la valeur p, les faux positifs et les faux négatifs. Suit une critique de la valeur p au profit de l’intervalle de confiance qui a la préférence des bio- statiticiens et les raisons de cette préférence. Tout cela débouche sur la notion de puissance (par convention > 80 %) avec les explications sur le calcul de la puissance et de la taille des échan- tillons en fonction des résultats escomptés. 3) La performance d’un test Avec les 4 scénarios (++,+-,--,-+), la sensibilité, la spécificité, leur combinaison par le likelihood ratio (taux de vraisemblance ou de probabilité ?), la valeur prédictive positive et négative. Il y a échange naturel entre sensibilité et spécificité avec sa traduc- tion graphique par la courbe ROC (Receiver Operating Charac- teristic) (fig. 3). 4) Mesures de l’effet (measures of effect) Les mesures de la vraisemblance incluent la probabilité (nombre compris entre 0 et 1) et les odds (pourcentage entre probabilité + et probabilité -), ce qui conduit à la notion des différents facteurs de risque, en particulier du risque relatif (RR) (tableau III). 5) Évaluation des résultats Incluent les mesures génériques (ex. : S-F 36), les mesures spécifiques (ex. : Knee score ou score de Constant) et les mesures de satisfaction des patients (ex. : évaluation de la qualité des soins). Le développement d’un outil d’évaluation de résultats aboutit aux définitions bien connues de : fiabilité (répétitivité de l’outil, intra et inter-observateur) exprimée par le kappa ou le coefficient de corrélation intra-classe ; validité (l’outil mesure bien ce qu’il est destiné à mesurer) avec les différents types content validity, criterion validity et construct validity ; sensibilité au change- ment (comment l’outil évolue et répond aux changements). 6) La médecine basée sur les preuves (evidence-based medecine) EBM L’EBM suppose l’utilisation consciencieuse des meilleures preuves actuelles de décisions de soins pour chaque patient. Toutes les notions précédentes y concourent. On arrive ainsi aux méta-analyses et aux guides de pratiques médicales avec algo- rithmes de décision et bien sûr aux études de coût (analyses coût- bénéfice). Les biostatistiques Définition des données ou variables qui peuvent être nominales (exprimées par un nombre) ou continues (échelles numériques), des moyennes, des médianes, des déviations standard et percen- tiles, enfin des distributions normale (gaussienne) ou bimodale. On entre alors dans le monde des biostatistiques avec : — 1- Les analyses uni ou bivariées, pour comparer les moy- ennes de 2 variables : le student t test, le paired test, en cas de dis- tribution normale ; le Mann-Whitney U test ou Wilcoxon ranksum test en cas de distribution non normale. — 2- L’analyse de variance (ANOVA) pour comparer les moy- ennes de 3 ou plus : groupes de variables à distribution normale et de multiples autres tests si la distribution n’est pas normale. — 3- Les tests pour comparer les proportions : pour 2 ou plus groupes de variables indépendants, le Pearson chi-square test et le Fischer exact test quand les échantillons sont petits ; pour des échantillons appariés, le McNemar test pour 2 variables et le Co- chran Q test pour 3 ou plus variables.

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Revue de chirurgie orthopédique © Masson, Paris, 20052005, 91, 385-388

SÉLECTION DES ANALYSES DU CENTRE DE DOCUMENTATION DE LA SOFCOTLa rubrique « Sélection des analyses du centre de documentation de la SOFCOT » propose le résumé analytique des articles jugésparticulièrement importants, regroupés par thèmes et répertoriés. L’ensemble des fiches d’analyse bibliographiques du Centre deDocumentation de la SOFCOT est diffusé sous forme numérique et peut facilement être consulté sur le CD-ROM archivant le contenu de laRCO, dont il est prévu une mise à jour annuelle, ainsi que sur Internet (Site SOFCOT) avec mise à jour mensuelle. Les membres du Centrede Documentation sont : J. Alain, J. Bedouelle, N. Biga, D. Chauveaux, L. de Leobardy, T. Defives, J. Dunoyer, J. Fenollosa, F. Fiorenza,C. Glorion, M. Guillaumat, P. Henky, A. Languepin, D. Moulies, J.-P. Padovani, J.-M. Postel, L. Rillardon, G. Taussig, R. Vialle, P. Wicart.

GÉNÉRALITÉS

Les bases méthodologiques de la recherche clinique pour lepraticien : pour bien lire ou pour bien écrire

Cette mise au point expose de façon relativement simple les élé-ments d’épidémiologie clinique et de biostatistiques que toutchirurgien orthopédiste devrait connaître lorsqu’il décide de faireune publication ou même seulement d’évaluer la qualité scienti-fique d’un article.Ce long current concept review comprend plusieurs chapitres :1) Les différents modèles et types d’étudesÉtude d’observations ou études expérimentales (essai clinique),rétrospectives ou prospectives, transversales ou longitudinales.Ces études sont susceptible de voir leurs conclusions invalidéespar les biais, les confusions et le hasard. Ces 3 sources d’erreurssont définies et décrites en détail dans leur diversité, leur origineet leur phase de survenue. L’auteur peut alors préciser la valeurscientifique de chaque type d’étude et développe ainsi le tableaude niveau de preuve scientifique qui est rappelé dans les instruc-tions aux auteurs et qui figure maintenant à la fin du résumé dechaque article publié dans le JBJS.2) Hypothesis testing hypothèse nulle ou alternativeCe chapitre revient en détail sur le rôle du hasard avec les erreursde type I et de type II et la signification de la valeur p, les fauxpositifs et les faux négatifs. Suit une critique de la valeur p auprofit de l’intervalle de confiance qui a la préférence des bio-statiticiens et les raisons de cette préférence. Tout cela débouchesur la notion de puissance (par convention > 80 %) avec lesexplications sur le calcul de la puissance et de la taille des échan-tillons en fonction des résultats escomptés.3) La performance d’un testAvec les 4 scénarios (++,+-,--,-+), la sensibilité, la spécificité,leur combinaison par le likelihood ratio (taux de vraisemblanceou de probabilité ?), la valeur prédictive positive et négative. Il ya échange naturel entre sensibilité et spécificité avec sa traduc-tion graphique par la courbe ROC (Receiver Operating Charac-teristic) (fig. 3).4) Mesures de l’effet (measures of effect)Les mesures de la vraisemblance incluent la probabilité (nombrecompris entre 0 et 1) et les odds (pourcentage entre probabilité +

et probabilité -), ce qui conduit à la notion des différents facteursde risque, en particulier du risque relatif (RR) (tableau III).5) Évaluation des résultatsIncluent les mesures génériques (ex. : S-F 36), les mesuresspécifiques (ex. : Knee score ou score de Constant) et lesmesures de satisfaction des patients (ex. : évaluation de la qualitédes soins).Le développement d’un outil d’évaluation de résultats aboutitaux définitions bien connues de : fiabilité (répétitivité de l’outil,intra et inter-observateur) exprimée par le kappa ou le coefficientde corrélation intra-classe ; validité (l’outil mesure bien ce qu’ilest destiné à mesurer) avec les différents types content validity,criterion validity et construct validity ; sensibilité au change-ment (comment l’outil évolue et répond aux changements).6) La médecine basée sur les preuves (evidence-based medecine)EBML’EBM suppose l’utilisation consciencieuse des meilleurespreuves actuelles de décisions de soins pour chaque patient.Toutes les notions précédentes y concourent. On arrive ainsi auxméta-analyses et aux guides de pratiques médicales avec algo-rithmes de décision et bien sûr aux études de coût (analyses coût-bénéfice).Les biostatistiquesDéfinition des données ou variables qui peuvent être nominales(exprimées par un nombre) ou continues (échelles numériques),des moyennes, des médianes, des déviations standard et percen-tiles, enfin des distributions normale (gaussienne) ou bimodale.On entre alors dans le monde des biostatistiques avec :

— 1- Les analyses uni ou bivariées, pour comparer les moy-ennes de 2 variables : le student t test, le paired test, en cas de dis-tribution normale ; le Mann-Whitney U test ou Wilcoxonranksum test en cas de distribution non normale.

— 2- L’analyse de variance (ANOVA) pour comparer les moy-ennes de 3 ou plus : groupes de variables à distribution normaleet de multiples autres tests si la distribution n’est pas normale.

— 3- Les tests pour comparer les proportions : pour 2 ou plusgroupes de variables indépendants, le Pearson chi-square test etle Fischer exact test quand les échantillons sont petits ; pour deséchantillons appariés, le McNemar test pour 2 variables et le Co-chran Q test pour 3 ou plus variables.

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386 SÉLECTION DES ANALYSES DU CENTRE DE DOCUMENTATION DE LA SOFCOT

— 4- Les tests pour déterminer les relations : le Pearson prod-uct moment correlation (r), pour les variables continues à distri-bution directe ; le Spearman rank-order correlation (rho) pour lesvariables non paramétriques ; le Kendall rank correlation pour lesvariables ordinales.

— 5- Les analyses de survie qui sont utilisées quand le princi-pal élément est le temps jusqu’à ce que survienne un événementchoisi en référence point final (end point). Le mode d’expressiontypique est la courbe de Kaplan Meier. Les intervalles de confi-ance à 95 % peuvent être construits sur la courbe. Les courbes desurvie de différents groupes peuvent être comparées par le Log-rank test.

— 6- Les analyses multivariées qui explorent les relations en-tre variables multiples : la régression linéaire pour 2 variables, larégression multivariée pour plus de 2 variables et quelques autresméthodes pour des cas particuliers. Le but principal des analysesmultivariées est d’identifier, parmi les nombreux patients et lesmultiples variables, celles qui sont corrélées au résultat. leur in-terprétation est souvent difficile. On a avantage à avoir un col-lègue expérimenté dans la méthodologie statistique.A signaler à la fin de l’article (p 617 à 620) un glossaire de tousles termes utilisés dans ce domaine avec leur définition, c’est undocument très utile.

Clinical epidemiology and biostatistics: a primer for orthopaedicsurgeons

M.S. KOCHER, D. ZURAKOWSKIJ Bone Joint Surg (Am), 2004, 86, 607-620.

Pertes de substance cartilagineuse : perforations et transplan-tations chondrocytaires au coude à coude

Étude randomisée anglo-norvégienne pour comparer deux traite-ments des atteintes cartilagineuses du genou : implantation dechondrocytes versus perforations (microfractures).L’étude porte sur 80 sujets atteints de lésions cartilagineuses surles condyles fémoraux en l’absence de tout signe d’arthrose oud’instabilité. Quarante sujets dans chaque groupe pour chacunedes deux méthodes :

— l’implantation de chondrocytes qui nécessite plusieurstemps : prélèvement de cartilage, culture des chondrocytes enlaboratoire spécialisé, puis seconde arthroscopie pour émondagede la brèche cartilagineuse, couverture par un lambeau de péri-oste et remplissage par les chondrocytes ;

— les perforations qui nécessitent un seul temps avec émond-age du cartilage pathologique et perforations multiples de la zonede défect.Les résultats ont été évalués à l’aide de l’International CartilageRepair Society, le score Lysholm, le SF-36 et le score de Tegner.Un observateur indépendant a fait un examen à 12 et 24 mois derecul. A 2 ans postopératoire, une arthroscopie avec biopsie a étéeffectuée pour prélèvement histologique lu en aveugle par unanatomo-pathologiste et un chercheur.L’analyse des résultats montre peu de différence entre les deuxgroupes. A deux ans, l’amélioration clinique est significative.Sur le SF-36, il y a un léger avantage pour les perforations. Dansles deux groupes les sujets jeunes et actifs ont de meilleurs résul-tats. Sont à déplorer deux échecs dans le groupe« chondrocytes » et un échec dans le groupe « perforations ».Mais il faut signaler 10 débridements arthoscopiques (20 %)dans le groupe « chondrocyte » (hypertrophie périostée) contre 4(10 %) dans le groupe « perforations ».

L’analyse histologique a pu être obtenue dans 84 % des cas, sansdifférence significative entre les deux groupes (mais les auteursprécisent qu’il aurait fallu 120 biopsies pour obtenir des échan-tillons valables). 39 % présentait du cartilage hyalin, mais jamaisen totalité ; 43 % du fibrocartilage seulement (fig. 4, 5, 6).Enfin, il n’y a pas de corrélation entre l’état histologique et lerésultat clinique évalué à l’aide du Lysholm et du SF-36.Conclusion : à 2 ans de recul les résultats sont assez compara-bles. Mais qu’adviendra-t-il dans l’avenir à plus long terme ?

Autologous chondrocyte implantation compared with microfrac-ture in the kneeG. KNUTSEN, L. ENGEBRETSEN, T.C. LUDVIGSENJ Bone Joint Surg (Am), 2004, 86, 455-464.

TUMEURS

Histyocytome fibreux malin des parties molles : bilan de79 cas opérés

Étude rétrospective d’une série de 79 patients opérés en dix ans,45 femmes et 34 hommes d’âge moyen de 65 ans (20-85), avecun recul de 60 mois (12-119). Deux ont été perdus de vue et neufsont décédés. D’après leur localisation, 50 % se situent à la cui-sse, 19 % à la jambe et le pied, 14 % au membre supérieur, 6 % àla fesse. D’après le degré de malignité histologique 92 % étaientde haut degré et 8 % de bas degré. Selon Enneking, 8 % étaientIA, 54 % IIA et 38 % IIB.Tous les malades ont été opérés 13 % avec résection marginalelarge 55 %, compartimentale 12 %, amputation 11 % et désartic-ulation 9 %. Neuf ont eu une chirurgie isolée, 7 avec radio-thérapie, le reste a eu de la chimiothérapie pré ou post ou pré etpostopératoire plus radiothérapie,Il y a eût 9 récidives locales, 4 récidives à distance et 4 récidiveslocales et à distance, 7 cas de métastases pulmonaires et 1 cas demétastases cérébrales, et 9 décès. La survie a été de 92 % et86 % a deux et cinq ans respectivement. La survie sans signe dela maladie 71 et 67 %. La survie a été plus longue pour lesmalades âgés de plus de 60 ans. Le pire pronostic concerne lestumeurs de la fesse. Le critère déterminant dans ces tumeurs aété le stade de Enneking et les auteurs préconisent la résectionlarge dans les IIA et l’amputation dans les IIB.

Histiocitoma fibroso maligno de partes blandasD. ROCA, I. ESCRIBA, I. GRACIA, A. DONCEL, J. MAJORev Ortop Traumatol, 2004, 48, 205-209.

MEMBRE INFÉRIEUR

Un effet inhabituel de l’usure dans les PTHLes auteurs rapportent trois cas de sciatique survenus dans lessuites lointaines d’une prothèse totale de hanche (PTH) :Dans les trois cas, une réintervention décidée sur le vu d’usure etde migration du cotyle, a trouvé une masse kystique postérieureou postéro-latérale, comprimant le nerf sciatique. Au cours duchangement de prothèse, cette masse a été excisée.La disparition des douleurs sciatiques est notée dès le réveil.L’histologie des masses kystiques excisées a montré un infiltratdense d’histiocytes et des cellules géantes multi nuclées asso-ciées à des corps étrangers réfractiles.