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International Orthopaedics (SICOT) 2,265-272 (1978) International Orthopaedics © Springer-Verlag 1978 Les pi~ges de l'op6ration de Grice J. J. Gabard, G. Taussig et P. Masse Institut National de R6adaptation, 14, rue du Val d'Osne, F-94410 Saint-Maurice, France Pitfalls of the Grice Arthrodesis Summary. The paralytic valgus foot can be corrected by extra-articular sub talar arthrodesis. The concept is simple and the operation is stereotyped. The calca- neum is repositioned beneath the talus and held by a graft. An analysis of our failures has indicated certain pitfalls that can be avoided. Valgus of the ankle joint influences the final posi- tion because the hind foot can only be aligned with the axis of the leg at the expense of varus angulation be- tween talus and calcaneum, lfthis is not done, valgus of the foot will recur. The estimation of position at the time of operation is difficult and critical Mobilization of the talo-calcaneal ]oint is often necessary to achieve the correct position and it may then be unstable. Two valuable landmarks are the bicondylar axis in the fron- tal plane and the obliquity of the grafts in the sagittal plane with the foot reduced and held at a right angle to the axis of the leg. A badly positioned bone graft can be unseated during the moulding of the plaster and lose the effect of its fixation. X-rays are required before and after the application of plaster to check position. The Grice operation is not adequate in the presence of muscle imbalance either in the antero-posterior or lateral planes. This should be corrected by tendon transplantation and if possible, activity in the tendo Achilles should be restored as this is indispensible if recurrent deformity is to be avoided. R6sum6. L'arthrodOse extra-articulaire sous-astraga- lienne permet la correction de nombreux pieds valgus paralytiques. De conception simple, son protocole opdratoire est stdrdotypd. L' analyse de nos dchecs nous a rdvdld certains pikges qu'il convient d'dviter. Cette intervention agit uniquement sur l'arrikre- pied en r~axant le bloc calcando-pddieux sous l'astra- gale et en l'y maintenant. Un valgus tibio-astragalien initial influe ndcessairement sur le rdsultat final: l'ar- rikre-pied est bien axd par rapport ?t l'axe jambier, au prix d'un varus astragalo-calcanden. Dans le cas con- traire, la rdcidive en valgus de l' arrikre-pied est inevita- ble. Sur le plan technique, l'apprdciation de la rdduc- tion est ddlicate; l'arthrolyse sous-astragalienne large est souvent ndcessaire; l'arrikre-pied devient particuliO- rement instable dans la main de l'opdrateur. L'axe bicondylien dans le plan frontal et l' obliquitd des gref- fons dans le plan sagittal sur un pied rdduit et ~ angle droit sur l'axe jambier sont les deux seuls repkres valables. Toute erreur de positionnement des greffons facilite les ddmontages lors des manipulations, annu- lant ainsi leur effet de cale externe. Des clichds avant et aprks le plfitre permettent de vdrifier la rdduction et la stabilitd de l' arrikre-pied sur l'axe jambier. Enfin l'arthrodOse extra-articulaire de Grice ne sau- rait pallier un mauvais dquilibre musculaire aussi bien clans le plan antdro-postdrieur que latdral. Les forces valgisantes doivent ~tre corrigdes, si cela est possible par transplantation croisde des extenseurs; la rdanima- tion du triceps est dans tous les cas absolument indis- pensable devant le risque de rdcidive en talus valgus. Key words: Foot, Arthrodesis L'histoire de la jeune D. N. devrait illustrer les r6sultats de l'arthrodbse sous astragalienne extra-articulaire de Grice. Atteinte d'une parapl6gie poliomy61itique presque sym6trique l'fige de 4 mois, elle est op6r6e de son pied droit ~ 2 ans. Celui-ci se d6forme plus vite que le gauche. Les p6roniers y sont puissants, alors qu'ils ne persistent qu'~t l'6tat de traces de l'autre c6t6. D6s eet fige le talus valgus droit impose une arthrod6se extra-articulaire selon la technique de Grice. Dix ans apr6s, le pied droit est 6quilibr6 cliniquement et radiologiquement. La mall6ole externe et l'angle tibio-astragalien sont rest6s stables. Le pied gauche a 6volu6 vers un important valgus de l'arri6re- pied et est devenu douloureux. Une arthrod6se compl6te sous- astragalienne et m6dio-tarsienne est n6cessaire. 0341-2695/78/0002/0265/$ 01.60

Les pièges de l'opération de Grice

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International Orthopaedics (SICOT) 2,265-272 (1978) International Orthopaedics

© Springer-Verlag 1978

Les pi~ges de l'op6ration de Grice

J. J. G a b a r d , G. Taus s ig e t P. M a s s e

Institut National de R6adaptation, 14, rue du Val d'Osne, F-94410 Saint-Maurice, France

Pitfalls of the Grice Arthrodesis

Summary. The paralytic valgus foot can be corrected by extra-articular sub talar arthrodesis. The concept is simple and the operation is stereotyped. The calca- neum is repositioned beneath the talus and held by a graft. A n analysis of our failures has indicated certain pitfalls that can be avoided.

Valgus of the ankle joint influences the final posi- tion because the hind foot can only be aligned with the axis of the leg at the expense of varus angulation be- tween talus and calcaneum, lfthis is not done, valgus of the foot will recur. The estimation of position at the time of operation is difficult and critical Mobilization of the talo-calcaneal ]oint is often necessary to achieve the correct position and it may then be unstable. Two valuable landmarks are the bicondylar axis in the fron- tal plane and the obliquity o f the grafts in the sagittal plane with the foot reduced and held at a right angle to the axis of the leg. A badly positioned bone graft can be unseated during the moulding of the plaster and lose the effect of its fixation. X-rays are required before and after the application of plaster to check position.

The Grice operation is not adequate in the presence of muscle imbalance either in the antero-posterior or lateral planes. This should be corrected by tendon transplantation and if possible, activity in the tendo Achilles should be restored as this is indispensible if recurrent deformity is to be avoided.

R 6 s u m 6 . L'arthrodOse extra-articulaire sous-astraga- lienne permet la correction de nombreux pieds valgus paralytiques. De conception simple, son protocole opdratoire est stdrdotypd. L ' analyse de nos dchecs nous a rdvdld certains pikges qu'il convient d'dviter.

Cette intervention agit uniquement sur l'arrikre- pied en r~axant le bloc calcando-pddieux sous l'astra- gale et en l'y maintenant. Un valgus tibio-astragalien

initial influe ndcessairement sur le rdsultat final: l'ar- rikre-pied est bien axd par rapport ?t l'axe jambier, au prix d'un varus astragalo-calcanden. Dans le cas con- traire, la rdcidive en valgus de l' arrikre-pied est inevita- ble. Sur le plan technique, l'apprdciation de la rdduc- tion est ddlicate; l'arthrolyse sous-astragalienne large est souvent ndcessaire; l'arrikre-pied devient particuliO- rement instable dans la main de l'opdrateur. L'axe bicondylien dans le plan frontal et l' obliquitd des gref- fons dans le plan sagittal sur un pied rdduit et ~ angle droit sur l'axe jambier sont les deux seuls repkres valables. Toute erreur de positionnement des greffons facilite les ddmontages lors des manipulations, annu- lant ainsi leur effet de cale externe. Des clichds avant et aprks le plfitre permettent de vdrifier la rdduction et la stabilitd de l' arrikre-pied sur l'axe jambier.

Enfin l'arthrodOse extra-articulaire de Grice ne sau- rait pallier un mauvais dquilibre musculaire aussi bien clans le plan antdro-postdrieur que latdral. Les forces valgisantes doivent ~tre corrigdes, si cela est possible par transplantation croisde des extenseurs; la rdanima- tion du triceps est dans tous les cas absolument indis- pensable devant le risque de rdcidive en talus valgus.

Key words: Foot, Arthrodesis

L'histoire de la jeune D. N. devrait illustrer les r6sultats de l'arthrodbse sous astragalienne extra-articulaire de Grice.

Atteinte d'une parapl6gie poliomy61itique presque sym6trique l'fige de 4 mois, elle est op6r6e de son pied droit ~ 2 ans.

Celui-ci se d6forme plus vite que le gauche. Les p6roniers y sont puissants, alors qu'ils ne persistent qu'~t l'6tat de traces de l'autre c6t6. D6s eet fige le talus valgus droit impose une arthrod6se extra-articulaire selon la technique de Grice. Dix ans apr6s, le pied d roit est 6quilibr6 cliniquement et radiologiquement. La mall6ole externe et l'angle tibio-astragalien sont rest6s stables.

Le pied gauche a 6volu6 vers un important valgus de l'arri6re- pied et est devenu douloureux. Une arthrod6se compl6te sous- astragalienne et m6dio-tarsienne est n6cessaire.

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Les rdsultats de cette intervention ne sont ndanmoins pas toujours aussi satisfaisants, t~n reprenant notre sdrie de 80 pieds avec un recul moyen de 5 ans, nous avons trouv6:

-2/3 de bons r6sultats: les arriSre-pieds sont bien ax6s sur l 'axe jam- bier; -1/3 de mauvais r6sultats: les arri6re-pieds sont d6formds en valgus ou en varus par rapport fi l 'axe jambier.

Grice [6, 7] pr6senta ses premiers r6sultats en 1952 et 1955. Son intervention, disait-il, devait r6gler de fa~on d6finitive le probl6me des arri6re-pieds valgus paralytiques. De nombreux auteurs, tels Smith et Westin [151, Westin et Hall [19], Chigot et Sanan6s [2], Chigot et Gu6riot [3], Lacheretz et Debeugny [1% ont repris cette technique, en la modifiant parfois. S'ils consid~rent que la moiti6 au moins des arri~re-pieds ont 6t6 corrig6s et stabilis6s, ils recon- naissent aussi de nombreux 6checs. Cette intervention de concep- tion simple et au protocole op6ratoire trSs stdrdotyp6 cache en r6alit6 certains pi6ges qui expliquent les 6checs.

Nous allons essayer de les situer, tant sur le plan technique que sur celui des indications.

Les pi6ges de la technique

Plusieurs points de technique mdritent une attention particuli6re.

Le greffon

Le lieu du prdl~vement. Nous avons pris la greffe presque syst6matiquement sur la face interne du tibia h0molat6ral au niveau du 1/3 inf6rieur. Nous d6plo- rons deux fractures h ce niveau. Dans quatre cas, nous l 'avons pr61ev6 au 1/a inf6rieur du p6ron6. Nous n'avons jamais constat6 d'abaissement de la mall6ole externe [2, 3], m~me lorsque nous avons bourr6 la cavit6 m6dullaire du p6ron6 avec des greffons fi la mani6re de Trueta dans le m6me temps opdratoire.

Par contre, certains auteurs ont montr6 que les prdl6vements de greffe et les pseudarthroses du p6ron6 entrainaient parfois une ascension de la map 16ole et un valgus de l 'arri6re-pied chez des enfants en cours de croissance [8, 9, 20].

Pour ces raisons nous restons fid61es 7t la prise de greffe sur le tibia homolat6ral, plfitr6 durant la p6riode de consolidation de l 'arthrod6se.

La position du greffon. Le greffon est impact6 ~ force au centre du sinus du tarse, une fois la luxation astra- galo-calcandenne r6duite. Sa direction iddale doit 8tre perpendiculaire ~ l 'axe de l 'articulation sous- astragalienne, c'est-~t-dire oblique de haut en bas et d'arri6re en avant (fig. 1).

Des greffons trop obliques voire horizontaux, ou trop externes, qnelquefois insuffisamment introduits dans le sinus du tarse ne r6alisent pas la cale externe souhaitde (fig. 2). Certains 6checs, avec r6cidive du valgus, s 'expliquent ainsi.

Le rdglage de la position du greffon est d61icate en cours d'intervention.

Le membre inf6rieur est en rotation interne lorsque l 'on aborde le sinus du tarse; la rotule n'est plus au z6nith. I1 est souvent n6cessaire d'ouvrir plus ou moins largement en avant, en arri6re et 6ventuel- lement en dedans l'articulation astragalo-calcan6enne pour r6duire le bloc calcan6o-p6dieux sous l'astra- gale. C'est seulement apr6s ce geste qu'il faut tailler les gorges astragaliennes et calcan6ennes.

L'arri6re-pied rendu instable est simplement maintenu par l 'aide ou la main de l 'op6rateur.

L'appr6ciation dans ces conditions de la position optimale des gorges osseuses et de l'installation des greffons est d61icate.

Le plan bicondylien est le seul rep6re valable dans le plan frontal et l'obliquit6 dans le plan ant6ro-postd- rieur doit 6tre mesur6e par rapport au tibia en main- tenant l 'arri6re-pied r6duit et h l'angle droit sur l 'axe jambier.

La stabilit6 du greffon est due h son introduction force dans les gorges, l 'arri6re-pied 6tant r6duit. Une manipulation en varus lors de l'ablation du garrot ou de la confection du plfitre ouvre l'articulation sous- astragalienne et risque de redonner au greffon sa libert6 (fig. 3).

Un clich6 perop6ratoire avant la confection du plfitre nous semble souhaitable, notamment si l 'op6- rateur n'a pas la certitude clinique absolue d'nn arri6re-pied rdduit et stable. Nous verrons qu'il per- met aussi de juger de la rdduction du bloc calcan6o- p6dieux sous l'astragale et de la bonne position de l 'ensemble sous l'axe jambier; un 6quinisme persis- tant exigerait un allongement du tendon d'Achille.

La consolidation du greffon. Elle s'appr6cie difficile- ment: la fusion v6ritable avec passages des trav6es osseuses de chaque os dans le greffon est de constata- tion rare, m~me si on lit les radiographies h la loupe. C'est la seule preuve formelle.

A distance le greffon perd son individualit6 et terme on ne voit plus qu'un pont, quelquefois extr~- mement petit, unissant l'astragale au calcan6um (fig. 4).

La difficult6 d'appr6cier la consolidation se refl6te d'ailleurs dans les diff6rentes statistiques: les taux de pseudarthrose varient de 0% [17] ~ 25% [21].

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Fig. 1. Position satisfaisante du greffon dans le sinus du tarse

Fig. 2. Greffons insuffisamment introduits dans le sinus du tarse

Fig. 3. Expulsion des greffons

Fig. 4. Pont osseux entre astragale et calcan6um plusieurs ann6es apr6s l'intervention

Nous avons recens6 6 cas de p s e u d a r t h r o s e s r ad io log iques sur 80 pieds , don t 4 ont abou t i ~ un mauva i s r6sul ta t c l in ique (fig. 5). Sur 6 aut res cas l i t igieux, 5 ont abou t i ~ un r6sul ta t sat isfaisant .

Enf in , 1 lyse r ap ide e n que lques semaines du gref- fon, 1 lyse t a rd ive sans image de pon t osseux et 1 cas de f rac tu re du gref fon p e r m e t t e n t d ' e x p l i q u e r des r6sul ta ts m6diocres .

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Fig. 5. Pseudarthrose de l'extr6mit6 sup6- rieure du greffon

Fig. 6. Arthrod6se fixant l'6quin et la chute en dedans de l'astragale

Lors des reprises par arthrod6se (16 cas) nous avons d'ailleurs trouv6: - 9 cas de fusion astragalo-calcandenne solide, - 5 cas de fusion fibreuse,

- i pseudarthrose 6vidente, - 1 disparition complete du greffon.

Le rdtablissement des rapports astragalo-calcangens

La bonne position du bloc calcando-p6dieux sous l'astragale conditionne aussi le r6sultat.

Westin et Hall [19], estiment que l ' impaction des greffons dans le sinus du tarse r6duit la luxation astra- galo-calcan6enne. Nous ne le pensons pas, sauf c h e z les tr6s jeunes enfants off les ddformations ne sont pas fixdes.

La r6duction du bloc calcando-pddieux n6cessite souvent une capsulotomie tr6s large de la sous-astra- galienne et quelquefois des faces sup6rieure et exter- ne de l'articulation astragalo-scaphoidienne [3, 5, 18].

Si l 'on fixe la chute en dedans de la rate astraga- lienne, on s'expose fi la r6cidive en valgus; c'est alors l 'ensemble de l'arri~re-pied qui roule en dehors (fig. 6).

Or, le maintien de la r6duction est n6cessaire au calcul de la hauteur des greffons. S'ils ne sont pas de taille parfaite, ils modifient la r6duction et les rap- ports astragalo-calcan6ens et exposent ainsi:

- ~ l 'hypocorrection et h la r6cidive en valgus que nous avons observ6es dans 19 cas;

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Fig. 7. Le cartilage de croissance de la mall6ole p6roni6re est au niveau ou au-dessous de l'interligne tibio-astragalien: position 1 Fig. 8. Le cartilage de croissance de la mall6ole p6roni~re est au niveau du cartilage de croissance tibial: position 2 Fig. 9. Le cartilage de croissance de la mall6ole pdroni6re est au-dessus du cartilage de croissance tibial: position 3

Fig. 10. Calcul de l'angle tibio-astragalien

- et sur tout , s ' ils sont t rop grands , ~ l ' h y p e r c o r r e c t i o n et ~ l a d d f o r m a t i o n seconda i r e en varus ,ddj f i s ignal6es pa r Gr ice et de n o m b r e u x auteurs . Nous avons observ6 cet te compl i ca t i on dans 10 cas.

Les pi~ges du d6s6quilibre musculaire L ' i n t e r v e n t i o n de Gr i ce ne s tabi l ise que l ' a r r i 6 r e - p i e d dans le p lan frontal . Les r6gles suivantes c o m m u n e s t o u s i e s p ieds pa ra ly t iques nous s emblen t essent ie l les , car elles cond i t i onnen t le succ6s de l ' a r t h rod6se ex t ra -a r t i cu la i r e . Les r6sul ta ts ne sont f avorab les que si les 6qui l ibres muscula i res , a n t 6 r o - p o s t 6 r i e u r et lat6ral , sont respec t6s ou res taur6s . O n dolt donc 6viter p lus ieurs 6cueils: - la r6cidive en valgus. Les inverseurs nuls ou fa ibles ne p e u v e n t s ' o p p o s e r aux p6ron ie r s et gi l ' ex t enseu r c o m m u n souven t conserv6s. I1 faut t r ansp l an t e r ces de rn ie r s p o u r s u p p r i m e r les forces valgisantes . L o r s - que l ' 6qu i l ib re an t6 ro -pos t6 r i eu r est sat isfaisant , no t r e p r6 f6rence va se lon les cas ~ la t r an sp l an t a t i on crois6e des ex tenseurs ( ex tenseur c o m m u n sur te ler m6 ta t a r s i en - ex tenseur p r o p r e du gros or te i l sur le 5~me m6ta ta r s i en ) et p lus r a r e m e n t ~ la t r ansp l an t a - t ion des p6ron ie rs sur le dos du pied, plus ou moins m6dia l i s6e se lon les co ta t ions p r~op6ra to i r e s des dif- f6rents muscles . - la r6cidive en valgus a n6cessi t6 12 doubles a r th ro - d6ses sous -as t r aga l i ennes et m6d io - t a r s i ennes . Cinq d ' e n t r e elles ont 6t6 p ra t iqu6es p o u r r6cidive d ' un ta lus i m p o r t a n t p r 6 d o m i n a n t sur le valgus. L e d6s6-

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11 Angle Tibio-Astr. = 0

I

!

I Varus ca canee ~ " --1

sur I'axe lamb~er t I

13 Angle Tibio-Astr. >>0

Hypercorrection ~ °

12 Angle Tibio-Astr. = 0

Fig. 11. L'articulation tibio-astragalienne est indemne. Le valgus sous-astragalien est corrig6 par le Grice

Fig. 12. L'articulation tibio-astragalienne est indemne: hypercorrection et varus secondaire

Fig. 13. Le valgus tibio-astragalien est important. Le Grice qui n'intervient qu'au niveau sous-astragalien ne saurait suffire

Fig. 14. Arri6re-pied d6form6 en baionnette avec valgus tibio-astragalien et varus calcan6en

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quilibre musculaire ant6ro-post6rieur par insuffisance ou absence de triceps aurait dfi &re corrig6 darts toute la mesure du possible.

Nous veillons tout sp6cialement actuellement transplanter le maximum de muscles encore actifs sur les triceps d6faillants.

Les dates optimales de ces transplantations ont fait l 'objet de nombreuses controverses.

Certains estiment prudent de les pratiquer secon- dairement sur un arrihre-pied 6quilibr6 transversale- ment par l 'arthrod6se extra-articulaire. Nous n'avons pas trouv6 de diff6rences significatives entre les r6sul- tats des transplantations pratiqu6es en m4me temps que l 'arthrod6se ou darts un temps ult6rieur.

L e s p i ~ g e s d e l a m o r t a i s e t i b i o - t a r s i e n n e

L'intervention de Grice n'agit qu'au niveau sous- astragalien. Elle ignore les anomalies de la tibio-tar- sienne, elle est donc licite lorsque celle-ci est indemne. Dans le cas contraire, elle ne peut r6axer parfaitement l 'arri6re-pied sur l'axe jambier. Ces anomalies nous semblent directement li6es aux d6sor- dres anatomiques qu'entraine le valgus de l'arri6re- pied au niveau de l'articulation tibio-tarsienne.

Le temps pendant lequel les d6formations ont 6t6 tol6r6es avant l ' intervention a certainement Une grande influence, car les anomalies osseuses et articu- laires en d6coulent. Ce param6tre est difficile ~ ap- pr6cier par l'anamn~se. Par contre, l'fige au moment de l 'arthrod6se ne para~t gu6re influencer le r6sultat.

L'6tat de la mortaise tibio-tarsienne peut &re appr6ci6 par: - le valgus tibio-astragalien, - l 'ascension de la mall6ole p6roni6re.

La malldole p&oni&e

Normalement le cartilage p6ronier est situ6 au niveau de l'interligne tibio-astragalien (position 1) (fig. 7).

Lorsque les d6formations en valgus ont persist6 suffisamment longtemps, on constate une ascension progressive de la mall6ole p6roni6re. Le cartilage de conjugaison atteint le niveau du cartilage tibial (posi- tion 2) ou le d6passe en hauteur (position 3) (figs. 8 et 9).

Une mall6ole qui s'abaisse ou se stabilise en posi- tion basse correspond g6n6ralement ~ un meilleur r6sultat clinique final. Si elle ascenscionne ou se stabi- lise en position haute, le risque de r6cidive est grand.

Outre la clinique quelquefois impr6cise, on pos- s6de donc un excellent argument radiologique pour juger de l'6volution.

L'angle tibio-astragalien

I1 se caicule ~ partir d'un clich6 de face stricte de la tibio-tarsienne, pied en charge (fig. 10). Nous tragons sur ce clich6' trois lignes: - une dans I'axe du tibia, - u n e deuxi6me tangente ~ la surface sup6rieure de l'astragale, - une troisi6me perpendiculair e ~ ee~te derni6re.

Nous appelons angle tibio-astragalien l'angle form6 entre cette troisi~me ligne et l 'axe du tibia. Cet angle refl6te le valgus tibio-astragalien: nous l'avons consid6r6 comme normal s'il est inf6rieur ou 6gal ~ 6 °.

La confrontation radio-clinique nous indique que: - u n bon r6sultat clinique est d 'autant plus probable que cet angle est faible au moment de l ' intervention; - l e s hypercorrections en varus sont aussi fr6quentes pour des angles tibio-astragaliens faibles que pour des angles importants au moment de l 'intervention.

Deux 6ventualit6s sont possibles: - l ' a r t icula t ion tibio-astragalienne est normale, il n'existe aucun valgus tibio-astragalien. Le valgus de l 'arrihre-pied se situe donc uniquement dans l'articu- lation sous-astragalienne. L'arthrodhse selon Grice rdaxe le calcan6um par rapport ~ l 'axe jambier et fixe cette position. Le bon r6sultat est pr6visible et durable (fig. 11). Une hypercorrection aboutit ~ un varus calcanden (fig. 12). - i l existe un valgus tibio-astragalien. Pour que l'axe global clinique de l 'arri6re-pied soit bon, il faut n6ces- sairement hypercorriger le calcan6um en varus (fig. 13).

On obtient certes un bon r6sultat clinique dans l'immEdiat, les radiographies nous montrent par contre une d6formation de l 'arri~re-pied en baion- nette (fig: 14) avec: - un valgus tibio-astragalien, - un varus sous-astragalien [15].

La face sup6rieure de l'astragale reste oblique et elle est maintenue dans cette position par l 'arthro- d~se. Elle exerce une pression continue sur le carti- lage tibial externe qui se d6veloppe real en regard de cette zone.

L'obliquit6 de la mortaise s'accentue, la r6cidive en valgus est probable malgr6 l 'hypercorrection ini- tiale du calcan6um en varus.

Dans ces conditions, l 'arri~re-pied ne peut &re r6ax6 et stabilis6 par une intervention isol6e sur l 'arti- culation sous-astragalienne. Une correction des d6formations de la tibio-astragalienne est n6cessaire, soit par 6piphysiod~se tibiale interne, soit par ost6o- tomie supra~mall6olaire de varisation.

Notre exp6rience est encore trop courte pour que nous puissions en appor, ter les r6sultats.

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