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Thegra, le 29 Juin 2015 A Mesdames et Messieurs les Sénateurs Palais du Luxembourg - Paris Madame la Sénatrice, Monsieur le Sénateur, La loi de modernisation du système de Santé proposée par Me Marisol Touraine va prochainement être présentée au Sénat. Nous avons déjà, avant l'ouverture des débats à l'Assemblée Nationale, fait part de nos réserves et de nos craintes à chaque député siégeant dans l'hémicycle. Nous regrettons amèrement leur abstentionnisme, et l'adoption du texte en première lecture suite à un vote auquel n'ont pris part que 45 d'entre eux. Comme vous le savez, Mme Marisol Touraine a demandé que le texte soit examiné en procédure accélérée. C'est donc désormais entre vos mains que repose l'avenir de notre système de soins, l'avenir de ce modèle de protection sociale français créé par le Conseil National de la Résistance, basé sur la solidarité, et permettant l'accès aux soins pour tous. Et il est de notre devoir de médecins, de professionnels de santé, mais aussi de citoyens, de vous exposer les dangers de cette loi. Derrière la mesure emblématique d'un tiers payant généralisé, c'est la privatisation de notre Sécurité Sociale qui se profile, par le transfert progressif de ses compétences vers des assurances complémentaires privées, qui, échappant à tout contrôle, seront seules à décider qui, quoi, et comment elles rembourseront. Cette loi n'est pas une réforme sociale : le tiers payant existe déjà. Les médecins généralistes effectuent 34,5 % de leurs actes en tiers payant : de façon systématique pour les bénéficiaires d'une CMUc ou d'une Aide Médicale d'Etat et pour la plupart des patients pris en charge au titre d'une Affection Longue Durée.

Lettre Aux Sénateurs à propos du projet de loi santé

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L'interpellation de leur sénateur par les généralistes du 46.A récupérer pour vos élus

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Thegra, le 29 Juin 2015A Mesdames et Messieurs les Snateurs

Palais du Luxembourg - Paris

Madame la Snatrice, Monsieur le Snateur,La loi de modernisation du systme de Sant propose par Me Marisol Touraine va prochainement tre prsente au Snat.

Nous avons dj, avant l'ouverture des dbats l'Assemble Nationale, fait part de nos rserves et de nos craintes chaque dput sigeant dans l'hmicycle.

Nous regrettons amrement leur abstentionnisme, et l'adoption du texte en premire lecture suite un vote auquel n'ont pris part que 45 d'entre eux.

Comme vous le savez, Mme Marisol Touraine a demand que le texte soit examin en procdure acclre. C'est donc dsormais entre vos mains que repose l'avenir de notre systme de soins, l'avenir de ce modle de protection sociale franais cr par le Conseil National de la Rsistance, bas sur la solidarit, et permettant l'accs aux soins pour tous.

Et il est de notre devoir de mdecins, de professionnels de sant, mais aussi de citoyens, de vous exposer les dangers de cette loi.

Derrire la mesure emblmatique d'un tiers payant gnralis, c'est la privatisation de notre Scurit Sociale qui se profile, par le transfert progressif de ses comptences vers des assurances complmentaires prives, qui, chappant tout contrle, seront seules dcider qui, quoi, et comment elles rembourseront.

Cette loi n'est pas une rforme sociale: le tiers payant existe dj.

Les mdecins gnralistes effectuent 34,5 % de leurs actes en tiers payant: de faon systmatique pour les bnficiaires d'une CMUc ou d'une Aide Mdicale d'Etat et pour la plupart des patients pris en charge au titre d'une Affection Longue Dure. Les gnralistes ont galement la possibilit de proposer aux personnes en difficult un tiers payant social sur la part obligatoire, ramenant le tarif de la consultation 6,90 .

Les tudes rvlent que les sujets rels de renoncement aux soins concernent les quipements optiques et auditifs, les soins dentaires, et les dlais de rendez-vous chez les spcialistes.

D'autre part, plusieurs tudes, ralises entre 2008 et 2011, confirment que de plus en plus de personnes renoncent se soigner sans avoir recours aux dispositifs de solidarit mis en place au cours des dernires annes, comme la CMU ou l'Aide la Complmentaire Sant.L'observatoire d'accs aux soins en France,cr par Mdecins du Monde, conclut que 22 % des bnficiaires d'une CMUc et 25 % des bnficiaires d'une AME renoncent recourir au systme de soins en raison des relles difficults administratives rencontres dans leur parcours de sant.Par ailleurs, si de nombreux franais ne connaissent par les aides dont ils pourraient bnficier, d'autres y renoncent sciemment par refus d'entrer dans une catgorie considre comme disqualifiante, ou par impossibilit de complter le financement de l'ACS laquelle ils pourraient pourtant prtendre.

Madame la Snatrice, Monsieur le Snateur, la mise en place d'un tiers payant gnralis ne garantira pas un meilleur accs la Sant.C'est un meilleur accompagnement dans les dmarches sociales et une simplification des dmarches administratives, qu'il faut mettre en place.

L'article 12 du texte de loi nous parat galement dangereux.

La cration de projets rgionaux de sant ports par des collectivits territoriales de sant nous semble une mesure dconnecte des besoins rels. L'tablissement d'un ratio entre professionnels de sant et usagers, sans tenir compte des disparits gographiques et de l'loignement des spcialits et des plateaux techniques risque de gnrer des ingalits de traitement des citoyens selon les territoires.Nous craignons que les contraintes administratives en termes d'organisation, d'accessibilit, de permanence des soins ne forcent les mdecins au regroupement dans des structures sous tutelle des ARS, qui demain pourraient tre brades aux financiers, et que la mdecine de l'individu soit dtruite au profit d'une industrie de Sant.

Les tches chronophages ddies la coordination impose aux acteurs de premier et second recours ne peuvent que rduire le temps mdical consacr aux soins.Nous pressentons l'orchestration programme de ces projets rgionaux de sant par les Agences Rgionales de Sant, qui ont dj privilgi une politique conomique une logique mdicale au sein des hpitaux, conduisant la fermeture de petits tablissements de proximit jugs non rentables, mais pourtant prcieux, particulirement en milieu rural.

Madame la Snatrice, Monsieur le Snateur, alourdir les contraintes administratives, alors que les gnralistes assument dj les missions d'ducation thrapeutique et de sant publique qui leur sont confies, tout en supplant les comptences des spcialistes en nombre insuffisant ne pourra que dissuader les jeunes mdecins de s'installer, inciter les autres au salariat ou l'expatriation, et aggraver les dserts mdicaux.Madame la Snatrice, Monsieur le Snateur, les mdecins gnralistes savent, mieux que quiconque, que si la Sant n'a pas de prix, elle a nanmoins un cot!

C'est pourquoi ils doivent tre le maillon central du systme de Sant.

Quand ils affirment que cette loi ne garantira pas un meilleur accs la Sant, il faut les entendre.

Quand ils soutiennent que cette mesure lgislative les obligera dgager du temps mdical au profit du temps administratif, au seul prjudice de leurs patients, il faut les entendre!

Quand ils prdisent que cette mesure ne pourra qu'aboutir une ingalit des chances en terme de sant, il faut les entendre!

Les mdecins ne doivent pas devenir des administrateurs de la Sant missionns pour vrifier les droits des patients, mais demeurer des soignants, autour desquels doivent s'articuler les rseaux de soins.

Le rle du mdecin gnraliste, qui connat les rels besoins de son bassin de sant et de ses patients, doit tre renforc.

Des mesures lgislatives existent dj pour permettre chaque franais d'accder au systme de soins. Il faut les appliquer, les dvelopper, en partenariat avec les services sociaux et les professionnels de sant.

Nous savons votre attachement aux valeurs dmocratiques et aux principes d'galit et de justice sociale chers au Peuple Franais, et plaons en vous notre confiance pour examiner avec une extrme vigilance ce texte de loi.Soyez assur, Madame la Snatrice, Monsieur le Snateur, de notre dvouement et de notre profond respect.Docteur Lydie Lymer Docteur Olivier Darreye

Mdecin Gnraliste Mdecin Gnraliste

Prsident de MG France Lot

46500 Thegra 46110 Vayrac

[email protected]