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 Cannes C’ e s t p a r t y ! PA GES 2-7 Le Pe n , tou j ours tr a h i p ar l es si e n nes A v e c Fran ç ois Hollande, Cub a vib r e Fi n de la vis it e his to riq ue du pr ési de nt fr anç ais à La Ha va ne. Rh um, dis cu ss io n su r la fi n de l’emb argo , ren contr e av ec Fid el Cas tr o et bal ade au déb ott é dan s le s ru es de la ca pi ta le , 30 he ur es dans la car av ane pr éside ntie lle. REPORT AGE, PA GES 12-13 Tr ois trib unes pour déf end r e le co ll èg e un iq ue Un thi nk tan k, des ch er che urs et un pr ov ise ur exp liq uen t les r ai so ns de leur so ut ie n à la réf orme de Naj at V allau d- Bel kac em, qui vo it en cr eux s’affr onte r les tena nts de l’ég ali et ceux de l’é lit ism e. REBONDS, PA GES 22-23 La68 e édi tio n, qui s’o u vr e ce me r cr edi , pr ése nt e d e pl us en pl us de fi lm s en la ng ue an gl ai seet a v ec de s cas tin gs ho ll yw ood ie ns. Le F est i va l se tr ans fo rm e-t -il en te du cin ém a gl oba lis é ? Qu e ce so it av ec Pie rre tte, son épous e qu i l’aquit en 19 84 , ses fil les Mar ie- Car oline la mégr etist e ou Marin e, l’ex- chef duFN a to uj ou rseu des rap ports confli ctue ls avec sa famille. GRAN D ANGL E, PA GES 30-3 1       F     a     ç     a       d     e       d     u       P     a       l     a      i     s       d     e     s       F     e     s      t      i     v     a       l     s  ,       à       C     a     n     n     e     s  ,       l     u     n       d      i  .      P      H      O      T      O      P      A      S      C      A      L      L      E      S      E      G      R      E      T      A      I      N  .  .      G      E      T      T      Y      I      M      A      G      E      S 1,80 EURO. DEUXIÈME ÉDITION N O 10568  MERCREDI 13 MAI 2015 WWW .LIBERATION.FR IMPRIMÉ EN FRANCE / PRINTED IN FRANCEAllemagne  2,50 €, Andorre 2,50 €, Autriche 3,00 €, Belgiq ue  1,90 €, Canada  5,00 $, Danemark 29 Kr,  DOM 2,60 €, Espagne  2,50 €, Etats-Unis  5,00 $, Finlande  2,90 €, Grande-Bretagne  2,00 £,  Grèce 2,90 €, Irlande  2,60 €, Israël  23 ILS, Italie  2,50 €, Luxembou rg  1,90 €, Maro c  20 Dh, Norvège  30 Kr, Pays-Bas  2,50 €, Portugal (cont.)  2,70 €, Slovénie  2,90 €, Suèd e  27 Kr, Suisse  3,40 FS, TOM  450 CFP, Tunisie  3,00 DT, Zone CFA  2 300CFA.

Liberation Du Mercredi 13 Mai 2015

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  • Cannes

    Cestparty!PAGES 27

    LePen, toujours trahi par les siennes AvecFranoisHollande,CubavibreFin de la visite historique duprsident franais LaHavane.Rhum,discussion sur la fin delembargo, rencontre avec FidelCastro et balade audbott dansles rues de la capitale, 30heuresdans la caravane prsidentielle.

    REPORTAGE, PAGES 1213

    Trois tribunespourdfendrele collgeuniqueUn think tank, des chercheurset unproviseur expliquent lesraisons de leur soutien larformedeNajat Vallaud-Belkacem, qui voit en creuxsaffronter les tenants delgalit et ceuxde llitisme.

    REBONDS, PAGES 2223

    La68edition,qui souvrecemercredi,prsentedeplusenplusde filmsenlangueanglaiseetavecdescastingshollywoodiens.LeFestival setransforme-t-il en fteducinmaglobalis?

    Que ce soit avecPierrette, son pousequi la quitt en 1984,ses fillesMarie-Caroline lamgretisteouMarine, lex-chefduFNa toujours eudes rapportsconflictuels avec safamille.

    GRAND ANGLE,PAGES 3031

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  • La comptition tmoigneduneglobalisationducinmadauteur, auprofit des acteurs et films anglophones.

    Cannes:la promenadede langlais

    ParJULIEN GESTERetDIDIER PRON

    ParDAVID CARZON

    Sillage

    Cannes, cest le momentquon aime dtester.Un vrai festival de plaintes.Les critiques de cinmase plaignentde lomniprsencedu barnum cannoiset des soires dbordantesde bulles. Les ftards,allchs par les tracesdemojito laisses parle sillage dun bateaurquisitionn par uneboisson gazeuse chre Penlope Cruz, necomprennent pas quilfaille tre accrdit pourpicoler lil. Et ceuxqui nont pas la chance devivre le Festival se sententagresss par les plaintesexagres des deuxpremires catgories. Il y aune autre ralit : celle delimportance du festivalcannois dans le paysagecinmatographiquemondial. Et tous les effortsde Thierry Frmaux, sondlgu gnral, vont dansce sens: maintenir Cannes une place part. Celasuppose de faire ou dfairedes carrires, de dnicherdes talents, de se rendreincontournable. Daccord,Cannes, cest du glamouret des acteurs-actricestransforms en colonneMorris. Daccord, chaqueanne, le palmars estcontestable et contest.Et pourtant, malgr touta, les noms de XavierDolan, dAbdellatifKechiche, MichaelHaneke, des frresDardenne, NicolasWinding Refn, Mawenn,Lars von Trier ouMiaHansen-Lve pour neciter que des plus rcentsrsonneraientdiffremment sans unpassage cannois remarqu.Un Festival russi donnele tempo de lannecinma venir, et plusencore. Comme la blagueest cule, on va viterle jeu demots avecun fameux slogande campagne dObama,mais le cur y est.

    DITORIAL

    SalmaHayek, dans Tale of Tales, de

    REPRES

    LE JURY CANNOISLe jury est prsid par lesfrres Joel et Ethan Coen,qui avaient reu la palme doren 1991 pour Barton Fink.Les autres membres sontles actrices Rossy de Palma(Espagne), Sienna Miller(RoyaumeUni) et SophieMarceau (France), lauteure,compositeure, interprteRokia Traor (Mali), le ralisateur et producteur GuillermoDel Toro (Mexique), le jeuneralisateur, producteur etacteur Xavier Dolan (Canada)et lacteur Jake Gyllenhaal(EtatsUnis).

    S i lon ne considre que sasection reine, la plus presti-gieuse et sujette convoiti-ses, soit la comptition offi-cielle, on peut croire discerner unvif recul de la part du cinmaanglo-saxon sur le prsentoir can-nois 2015, avec tout au plus un Aus-tralien (Justin Kurzel et sa relecturede Macbeth), deux Amricains, GusVan Sant (la Fort des songes) etTodd Haynes (Carol), et pas lombredun film britannique.Pour autant, jamais sans doutedans lhistoire du Festival tantdacteurs dextraction hollywoo-dienne auront concouru pour lesprix dinterprtation et, plus en-core, jamais on naura tant parlEnglish, ou plutt globish, surlcran du Thtre Lumire du Pa-lais. En effet, prs de la moiti desprtendants la palme cette anne,quelle quen soit lorigine gogra-

    phique dsigne, se prsenterontsur la Croisette pars de ces deuxtraits similaires: une anglophonieconsomme, et un casting bard destars dont cest la langue mater-nelle bien que rarement celle duralisateur.Dans son auteurisme aigu, Cannesentretient cette tradition de statuersur la nationalit dun film laseule aune du passeport du cinaste linverse des csars, qui prf-rent considrer lorigine du finan-cement. On y verra donc une foisencore dfiler des films battant lespavillons les plus exotiques mais,pour peu que lon retranche gale-ment limposante dlgation gau-loise, seuls 5 films sur les 19 encourse devraient charrier pour lefestivalier bilingue franais-anglaisun quelconque dpaysement lin-guistique: ceux du Tawanais HouHsiao-hsien (The Assassin), du Chi-nois Jia Zhangke (Mountains MayDepart), du Japonais Hirokazu Ko-re-Eda (Notre Petite Sur), de lIta-lien Nanni Moretti (Mia madre) etdu Hongrois Laszlo Nemes (le Fils deSaul). Un peu court ?

    UNIFORMIT. Le reste de la comp-tition se compose dun cortge decosmo-auteurs dterritorialiss :ainsi du Mexicain Michel Franco(Chronic, avec Tim Roth), du Norv-gien Joachim Trier (Plus fort que lesbombes, tourn New York avecJesse Eisenberg et Isabelle Hup-pert), du Grec Yorgos Lanthimos(The Lobster, en Irlande avec ColinFarrell, Rachel Weisz et La Sey-doux), du Qubcois Denis Ville-neuve (Sicario, avec Emily Blunt,Benicio del Toro et Josh Brolin) ouencore de deux des trois Italiens :Paolo Sorrentino (Youth, avec Mi-chael Caine, Harvey Keitel, JaneFonda) et Matteo Garrone (Tale ofTales, avec Salma Hayek, JohnC. Reilly et Vincent Cassel).

    L'ESSENTIEL

    LE CONTEXTELe 68e Festival de Cannesdbute avec une slectionet un jury allchants.

    L'ENJEUComment succdeton Gilles Jacob? On attendla rponse de Pierre Lescure.

    19Cest le nombre de filmsen comptition, dont 5 sontraliss par des Franais (Jacques Audiard, Stphane Briz,Valrie Donzelli, Mawenn etGuillaume Nicloux).

    Ce mercredi, 19 heures, Lambert Wilson endosse lhabitdu matre de crmonie. Et ledirecteur de lopra de Paris,Benjamin Millepied, prsenteune chorgraphie inspire deSueurs froides de Hitchcock.

    Jesse Eisenberg dansPlus fort que

    LIBRATION MERCREDI 13MAI 20152 EVENEMENT

  • On ne fera certes pas mine de d-couvrir que Hollywood a de touteternit aimant les talents dumonde entier (de Murnau, FritzLang et Greta Garbo AlejandroGonzlez Irritu, Jean-Pierre Jeu-net et Mlanie Laurent) ou que

    lAmrique et ses mythes consti-tuent de merveilleux objets de fas-cination pour les cinastes (dAnto-nioni Wong Kar-wai). Restetoutefois quen de telles propor-tions, et au regard de luniformitdes castings, cette slection pr-

    sente quelque chose de symptma-tique dune volution brutale, soitdune certaine tendance de la pro-duction de cinma dauteur ds lorsquelle se confronte un devis unpeu ambitieux, soit du cahier descharges exig pour prtendre aux

    plus hautes cimes cannoises, peut-tre les deux. Et sans y voir nces-sairement un mal, on peut tout demme trouver cela un peu spcial.En attendant de dcouvrir les films,le cas a priori le plus curieux sem-ble celui de Matteo Garrone: entre

    les Pouilles, la Toscane et la Sicile,lauteur (romain) de Gomorra etReality y transpose lcran le Pen-tamerone de Giambattista Basile,recueil de contes (napolitains) duXVIIe sicle, en compagnie ducasting amricano- Suite page 4

    Cate Blanchett dans les bras deKyleChandler pourCarol, de ToddHaynes. PHOTOWILSONWEBBles bombes, de JoachimTrier. PHOTOMEMENTOFILMS

    lItalienMatteoGarrone, en comptition dans la slection officielle. PHOTOLEPACTE

    LIBRATION MERCREDI 13MAI 2015 3

  • tte de la mini-major Wild Bunchqui vient dannoncer louverturedun bureau Los Angeles, restedubitatif. Il lui semble en ralitquil ny a pas de rgle : Nousnavons pas mieux vendu Jimmy P.dArnaud Desplechin en anglais avecla star Benicio del Toro que nous nelavions fait sur Rois et Reine. QuandTigre et Dragon dAng Lee, film enmandarin, fait 80 millions de recettesaux Etats-Unis et que Harvey Weins-tein essaie daugmenter les gains enfaisant une version double, cest unchec. Il ny a pas de tendance de fondqui organiserait la production desfilms afin quelle saligne sur uneventuelle tyrannie de langlais. Sim-plement, les gens voyagent, souvrent,font des rencontres loin de chez eux etparfois dans une langue qui nest pasla leur. Michel Franco avait un scna-rio sur une infirmire mexicaine, maislorsquil rencontre Tim Roth Can-nes, qui lui dit quil voudrait travailleravec lui, le projet change de nature etde langue. Selon lui, le type defilms prsents Cannes nest pascalibrable pour atteindre les multi-plexes du monde entier et le choixde lidiome dominant ne modifiepas substantiellement la donne.

    HYBRIDATION. Christian Jeune,bras droit de Thierry Frmaux, nousassure quil ny a pas une tendance

    massive langlicisation des fic-tions sil doit juger de lampleventail des films considrs pourlensemble de la slection officielle,mais reconnat que les slection-neurs ont t surpris de dcouvrirque les auteurs quils attendaientstaient en quelque sorte pass lemot. Olivier Pre, patron dArteFrance Cinma, qui coproduit unevingtaine de films franais et tran-gers par an, estime quon traverseune priode de plus grande hybrida-tion des coproductions, et donc desprojets. Ce que lon constate ces der-nires annes est tout de mme loin deleuro-pudding, ces productions

    des annes 80 et 90 o lon imposaitlanglais comme vecteur dexportsans aucun respect du sujet. Des filmsqui navaient toutefois pas vocation se retrouver en comptition Cannes.Aujourdhui, il faut bien distinguerdeux choses. Evidemment, il nous ar-rive de recevoir des projets un peu bi-zarres, dont langlophonie traduit unetentative de faire du cinma dont legenre serait europen ou une ab-

    sence de respect pour le fond du film.Et il se trouve qu Arte, on tudieavant tout les qualits artistiques duprojet, mais aussi son intgrit, ce quipasse videmment par la langue.

    BOUGEOTTE. Mais dautre part,poursuit Olivier Pre, il y a de plusen plus de projets o langlais prendtout son sens de par le contexte nar-ratif et le dsir initial du ralisateur,comme Sils Maria, dAssayas (qui abeaucoup mieux march linterna-tional quen France) ou le film de Joa-chim Trier cette anne. Des films quitraduisent un effacement des fronti-res du cinma dauteur, avec une vo-

    lont des cinastes desaffranchir des limitesde leur propre pays pouraller vers un ailleurs,des codes diffrents, destournages lointains, desrencontres avec des ac-teurs dhorizons plus

    varis. Cela part dune curiosit intel-lectuelle et, mon niveau, jy voisplus des possibilits supplmentairesquun diktat dexportation. Une r-ception favorable dans les festivals,et en particulier Cannes, sert sou-vent de catalyseur cette bou-geotte des cinastes, dans le sillagedexemples diversement ancienscomme Lars von Trier, Emir Kustu-rica ou Laurent Cantet, et au diapa-

    son dune acclration des flux deprgrinations plus vastement aucur de lpoque. Mais on noteratoutefois, avec un soupon de mau-vais esprit, quil demeure pluttrare de voir un Argentin ou un Su-dois partir tourner loin de chez luiun film turcophone.Si lon se gardera, ce stade, deprjuger de la capacit des cinas-tes concerns prserver la singu-larit de leur regard ainsi dracin,reste que lun des charmes indnia-bles dun festival de cinma tel queCannes rside dans la confrontation laquelle il nous convie avec unplanisphre composite, ramifidaccents, de gestes et de visagesinconnus de nos radars. Et, quilfaille deviner dans luniformit defaade de la comptition et de sesttes daffiche un geste de slec-tionneurs ou un symptme inci-dent, il sagira pour quter notredose daltrits minoritaires cetteanne daller fureter ailleurs, toutesboussoles droutes. Soit dans lesramifications en slection officielle(notamment Un certain regard),soit dans les sections parallles (laQuinzaine des ralisateurs, la Se-maine de la critique), dont le menutranche avec lambiance de duty-free globalis de la vitrine compti-tive par la pluralit de ses couleursautrement locales.

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    re fois e fois e fois e fois e fois e fois e fois e fois e fois e fois e fois e fois

    FEMMES

    HOMMES

    AUTRES

    PREMIERSFILMS

    ENENENEN

    DEPUIS PALMED'OR

    SLECTIONOFFICIELLEENCOMPTITION

    FRANCE|

    TATS-UNIS|

    ITALIE||

    ROY-UNI|

    ALLEMAGNE| JAPON

    |

    ESPAGNE|

    BELGIQUE|

    MEXIQUE|

    HONGRIE|

    SUDE|

    BRSIL|

    ARGENTINE

    CANADA

    POLOGNE|

    SUISSE|

    DANEMARK||

    INDE|

    AUSTRALIE|

    GRCE|| TAIWAN

    PAYS-BAS|

    NORVGE

    CHINE

    AUTRES|

    Les films par nombrede participationsdu ralisateur

    Les filmspar pays de production

    franco-mexi-cain qui baragouine en anglais ettrne en tte dune affiche promo-tionnelle qui nous renvoie aux heu-res les plus sombres de la filmogra-phie de Rob Marshall (Chicago,Mmoires dune geisha, Pirates desCarabes 4, ce genre).Le distributeur et coproducteurfranais du film, Jean Labadie(Le Pacte), sen tire par une pi-rouette: Ce ne sont pas les Franaisqui poussent langlais pour les filmsvenant de pays dont ce nest pas lalangue. La langue universelle, cest lecinma! A priori, rien de trs neufpour qui se rappelle que, ds 1958,Jacques Rivette crivait de luvrede Kenji Mizoguchi, dans les Cahiersdu cinma : Ces films qui, en unelangue inconnue, nous content deshistoires totalement trangres nosmurs ou habitudes nous parlent unlangage familier. Le seul auquel doivesomme toute prtendre un cinaste :celui de la mise en scne. [] Cestcelui-ci, et non le japonais, quil fautapprendre pour comprendre le Mizo-guchi. Mais il semble quen biendes cas, le seul idiome du cinma nesuffise plus.

    PACKAGE. Muriel Sauzay, res-ponsable des acquisitions et ventesinternationales pour Path, con-firme le fort pouvoir dattractionpour les financeurs des castingsanglo-saxons, ainsi que du choix delanglais comme idiome porteurds lors que lon ambitionne din-filtrer limposant march nord-amricain, o les films ne sont ja-mais doubls, et rticent exploiterdes uvres en langue indigne.Tout cela se fonde principalementsur un ensemble que nous appelons lepackage : un ralisateur, plus uncasting, plus un budget, plus unscript Ainsi, aprs loscar pour LaGrande Bellezza, lide dun film deSorrentino en langue anglaise avecCaine, Keitel et Weisz se rvle beau-coup plus facile vendre quun nou-veau film du mme avec un acteuritalien en langue italienneDans un ensemble paru le 1er mai,la publication professionnelle leFilm franais souligne que la renais-sance du cinma transalpin passepar des coproductions europennesen langue anglaise: Il y a une ac-clration vers linternationalisation,y explique ainsi Riccardo Tozzi,producteur et prsident de lAsso-ciation nationale des industries ci-nmatographiques et audiovisuellesitaliennes. Plus le cinma italien estidentifi dans le monde travers desauteurs clbres, plus se cre uneimage de marque qui va aider etouvrir les portes aux autres ralisa-teurs. Jean Labadie: A partir dunhaut niveau de budget ce niveaudiffre selon les pays, la langue an-glaise facilite le financement. Pour leMatteo Garrone cependant, le finan-cement aurait t runi mme si lefilm tait rest en italien. Mais peut-tre pas sans son casting de starstrangres quil aurait fallu doublercomme au temps o les vedettesamricaines ou franaises dfilaientdevant la camra des Leone, Vis-conti, Ferreri ou Bertolucci.Vincent Maraval, lagitateur la

    Suite de la page 3

    Apartir dunhaut niveaudebudget ceniveaudiffre selonles pays, la langue anglaisefacilite le financement.Jean Labadieproducteur franais (LePacte)

    LIBRATION MERCREDI 13MAI 20154 EVENEMENT

  • Le groupeKering rejoint cette anne LOral, Chopard et consorts au rangdespartenaires de choixduFestival. Une sorte de donnant-donnant juteux qui vampirise lvnement.

    UneCroisette limage demarquesflopes dacteurs-actrices mis en beaut.La marque a un agenda, o chaque vedettemaison est programme pour quelquesjours: Julianne Moore et Fan Bingbing mer-credi et jeudi, suivies par Ins de la Fres-sange et Heike Makatsch, Jane Fonda, LumaGrothe, Aishwarya Rai Cette quarantainede femmes (actrices ou mannequins), origi-naires de partout dans le monde (avec uneforte prsence asiatique) ont pour but din-ternationaliser limage de LOral Paris Cannes. Mais ceci nest que la partie la plustlvisuelle, la plus Canal + si lon veut, delopration.La marque utilise aussi cette dition pouraffirmer sa stratgie numrique. Cyril Cha-puy: Le Festival de Cannes sera emblmatiquede lacclration de la digitalisation de lamarque et de son avant-gardisme sur les r-seaux sociaux. Lan dernier avait t lance

    Makeup Genius, une applimiroir tlcharge plusde 10 millions de fois. Cetteanne encore se multiplie-ront les vidos des coulisseset de la monte des marches,le hashtag #InsideCannes,des vidos Periscope, la nou-

    velle fonction de Twitter. Il y aura aussi la fi-nale dun concours de maquillage internatio-nal online, The Brush Contest Mme uneapplication iPhone a t cre (lire page sui-vante). Tout ceci est bien loign du cinmamais peu importe, puisque Cannes simposeau gant des cosmtiques comme le momentidal pour crer du contenu destination deses 20 millions de fans sur Facebook. Et, lhtel Martinez, LOral profite de la venuede toutes ses gries pour tourner des publi-cits et tutoriels de maquillage (dont le nom-bre de vues sur YouTube atteint parfois lescentaines de milliers) qui seront utiliss etdiffuss toute lanne.Cannes est aussi une foire, o chaque parte-naire fait de sa prsence une attraction. Ainside MasterCard, autre nouvelle recrue de laprsidence Lescure, qui assure ses invitsprestigieux des avantages (des places auPalais). Ou encore le joaillier Chopard, fabri-cant de la palme dor et remettant duntrophe qui rcompense deux espoirs ducinma devant une assistance de starletteset dinvits (journalistes, clients ou amis). Ledferlement des marques frise le ridicule,comme cette inauguration, jeudi, de laplage Magnum avec lactrice australienneMiranda Kerr, nouvelle ambassadrice desbtons glacsEnfin, il y a tous les autres, non inscrits dansla liste des partenaires, qui sagglutinentdans les couloirs du Carlton ou du Martinez.La quasi-intgralit des marques de luxeouvrent des show-rooms phmres, o lesclbrits (ou similis) ont tout le loisir de ve-nir piocher dans les collections. Parfois,lacteur ou actrice a une relation privil-gie avec une marque, cest--dire claire-ment publicitaire, comme Marion Cotillard,qui ne devrait pas porter autre chose que duDior. Mais il est de plus en plus frquent queles comdien(ne)s soient rmunr(e)s.Les sommes peuvent se compter en dizaines

    de milliers deuros. Le retour se traduit,ds le soir mme de la monte des marches,en images envoyes aux journalistes modeou people prcisant quuntel a porttel costard ou telle robe. Linformationsera relaye dans les mois venir dansles rubriques shopping des magazinesfminins.Enchres. La brandisation de la faunecannoise atteindra son summum le 21 mai lhtel du Cap-Eden-Roc, Antibes, avec

    le gala de lAmfar, lassociation de finance-ment pour la lutte contre le sida fonde parLiz Taylor. Devant un parterre aux airs duGlamorama de Bret Easton Ellis aura lieu lefashion show annuel coordonn par la r-dactrice de mode Carine Roitfeld. Dinnom-brables griffes ont cr des tenues, venduesaux enchres des fins caritatives. La der-nire dition du dfil avait rcolt la baga-telle de 31 millions deuros.

    CLMENT GHYS

    D s le 16 avril, lors de la confrence depresse du 68e Festival de Cannes, leton tait donn. Au lieu de dresser,comme son prdcesseur Gilles Jacob, levaste tat des perspectives du cinma mon-dial, Pierre Lescure, nouveau prsident, vo-quait en un prambule bonhomme le poidsdes partenaires privs, essentiels dans lco-nomie et le rayonnement conomique de Can-nes, premier festival du monde. A Cannes, onne parle pas de mcnes, mais donc de parte-naires, avec qui les relations se jouent don-nant-donnant. Et altrent fatalement lco-systme de lvnement.Dans les annes 80, le cousinage avec Canal+a radicalement modifi limage et lambiancedu Festival, faisant des plateaux de feu Nullepart ailleurs, ou aujourdhui du Grand Jour-nal, des passages ncessaires pour les filmsen slection ou non. Un partenariat cannois

    nest pas la simple apposition dun logo aubas de laffiche. Cest la mise en place deprojets ou plateformes communes. Ainsi dugroupe de luxe et dhabillement Kering, quifait son entre en fanfare dans les partenai-res de choix du Festival, lequel navait passign de telles associations depuis quinzeans. Le conglomrat (ex-PPR) fond parFranois Pinault et dirig par son fils Fran-ois-Henri Pinault a, selon Louise Beveridge,directrice de la communication du groupe,le souhait dinvestir de manire plus visiblelunivers du cinma.Chaque jour se tiendra lhtel Majestic leWomen in Motion, une srie de dbats surla thmatique des femmes dans le cinma.Parmi les confrencires, les actrices IsabellaRossellini, Isabelle Huppert, Salma Hayek-Pinault (pouse de Franois-Henri), la pro-ductrice Sylvie Pialat, les ralisatrices ClaireDenis ou Rebecca Zlotowski Les sommesengages pour ce partenariat de cinq ans nesont pas communiques mais, chez Kering,on prcise quil sagit dun montant cons-quent et significatif, sans quivalent. Ce qui,au regard de la dizaine de milliards deurosde chiffre daffaires annuel affich par Ke-ring, prend une certaine dimension. Cannesentre donc dans la logique de communicationdun groupe qui sy met en avant plutt queses griffes (entre autres Gucci, Saint LaurentParis ou Balenciaga). Louise Beveridge y en-visage une vitrine et un tremplin formidablespour nos marques.Attraction. Mme ide chez LOral Paris,qui voit dans le Festival une vitrine uniquepour la marque et pour [son] expertise ma-quillage, estime Cyril Chapuy, son prsi-dent. Le montant de ce partenariat nest pasnon plus divulgu, mais il serait l encoretrs important, et ce relativement la forcede frappe du numro 1 mondial. Linvestisse-ment de LOral Cannes se traduit par ledferlement dgries sur les marches et des

    Ledferlement desmarques frise leridicule, commecette inauguration, jeudi,de laplageMagnumavec lactriceaustralienneMirandaKerr, nouvelleambassadricedes btons glacs.

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    Drle, froce, captivant. L O B S

    Une ppite.E L L E

    Un chef duvre. Drle et cocasse.L E M O N D E

    Une perle de drlerie.L A C R O I X

    Absolument exceptionnel. A voir durgence.

    L E S C H O S

    Du grand cinma. PA R I S M AT C H

    Une merveille. T L R A M A

    L E J D DUn bijou.Bouleversant.

    V E R S I O N F M I N A

    Une merveille.C H A R L I E H E B D O

    dj 500.000 spectateurs

    UN FILM DE JAFAR PANAHI

    LIBRATION MERCREDI 13MAI 2015 EVENEMENT 5

  • 6 EVENEMENT

    De la premire dition avec Pierre Lescure prsidentaux coupes de cheveuxdeXavierDolan, tour dhorizon

    de ce que peut attendre fbrilement le festivalier.

    Nuages et clairciesdans le ciel cannois

    P ar-del les films, lesstars, les braquages(Cartier dvalis, a,cest fait), les overdoses decoke et de Nespresso, Cannesest aussi un festival enjeux.Petite revue des points sensi-bles de cette dition.

    BossLa touche Lescure, je penseque cest la curiosit et le dsirque je porte en sautoir depuissoixante-neuf ans. Lundi lAFP, cest avec posie que leprsident du Festival a vo-qu quelle serait sa patte

    pour cette dition, sa pre-mire en tant que patron. Il aajout tre dans un mlangedhumilit et dambition,respectueux lgard de sonprdcesseur Gilles Jacob,qui a fait de ce festival le plusgrand du monde. Il a ajoutpenser avoir une relative l-gitimit pour bien connatre leFestival, le cinma, son cono-mie, les paramtres qui font sacration, lextraordinaire rvo-lution technologique qui faitque des conomies fragilespeuvent prsenter leurs pre-miers films.

    Lundi etmardi Cannes. Pendant toute la quinzaine, retrouvez les clichs du photographe Frdric Stucin sur Liberation.fr. PHOTOS@FREDSTUCIN. INSTACANNES

    LIBRATION MERCREDI 13MAI 2015

  • EVENEMENT 7

    Quelle sera la stratgie Les-cure long terme ? Malgrun style dbonnaire, il ne setrane pas moins une rputa-tion de stratge redoutable.Nul doute que son arrivebouscule une maison quistait habitue vivre dansun buddy-movie goguenard,o Jacob jouait les prolonga-tions en jetant, avec son ini-mitable style lettr, quelquespeaux de banane aux piedsde Frmaux, dont le sang-froid certifi ceinture noirede judo (sport quil pratiquedepuis longtemps) na jamais(publiquement) vacill. Reste mesurer lvolution dugenre du film et de son tauxde scnes daction plus oumoins gores.

    TurfLa survie de linfluence et delattractivit du Festival restetributaire de la nature plus oumoins bankable, mme surune chelle auteur, desambassadeurs que consti-tuent sa slection et, plusforte raison, le vainqueur dela palme. On peut imaginer,sans saventurer trop loindans la spculation sous aci-de, que Frmaux avait peut-tre dautres rves en la ma-tire lan dernier, la veilledun changement de prsi-dence, que les 3h16 du dso-pilant Ceylan 360000 en-tres en France, lun des troisplus faibles scores dunepalme en quinze ans, loindu 1,2 million de Mommy, deXavier Dolan. Do, sansdoute, le resserrement duprofil moyen du slectionnsur des titres fdrateurs etpour la plupart bards decastings scintillants, que lonpeut difficilement suspecter, une ou deux exceptionsprs, de se rvler dune ra-dicalit chevele en t-moigne un contingent fran-ais surtout peupl dechampions du box-office.Nombre de propositionsattendues mais plus minori-taires (le Thalandais palmApichatpong Weerasethakul,le Roumain Corneliu Porum-boiu, le Portugais Miguel Go-mes, le Franais PhilippeGarrel) devront ainsi secontenter dune place au seindUn certain regard ou de laQuinzaine des ralisateurs.Et nous ne comprenons pas,et nous insurgeons vive-ment, de labsence de WillFerrell et Jean-Marie Straubde toutes slections.

    Deuxime sexeTarte la crme, la visibilitdes femmes Cannes em-barrasse lorganisation duFestival, menaant denta-cher durablement son ambi-tion internationale. Devoyants faux pas, commelabsence de femmes encomptition (2012), ont mis

    au jour un retard considra-ble en matire de diversit.Mme sil trompette ne pasen faire un enjeu, le Festivalne lsine pas sur la com pourredorer son blason. Cette an-ne, cest donc une cinaste,Emmanuelle Bercot, qui faitlouverture avec la Tte hauteune premire depuis 1987et pas moins de deux rali-satrices, Mawenn et ValrieDonzelli, qui se disputent lacomptition.Ce choix entirement dvolu des comdiennes-cinas-tes-gries (tout commeNatalie Portman, hors com-ptition) minemment pho-tographiables sur tapis rougeinvite se poser des ques-tions sur la place rserveaux artistes dpourvues decaution glamour. Sans allerjusqu suivre Jane Campion(seule rcipiendaire de laprcieuse palme), qui rvaitlan dernier, dans Lib, dunjury 100% fminin, citonsple-mle des annoncesdonnes en pture la pressehistoire de calmer les ar-deurs : une palme dordhonneur dcerne AgnsVarda et un programme devalorisation de la contribu-tion des femmes au septimeart, Women in Motion, or-ganis par le groupe Kering(lire page 5) pour clbrer lestalents fminins (sic). Sur ladernire dcennie, les rali-satrices ont sign seulement9% des films en comptitiondans la slection officielle,symptme paroxystique dunretard accus par toute lin-dustrie.

    SelfiesDevant la recrudescence desselfie-sticks dans tous leslieux vaguement touristi-ques, que va-t-il se passerces prochains jours ? Le16 avril, Thierry Frmaux te-nait des propos ( la lisire dudiffamatoire!) contre lauto-portrait tlphon, qualifiantla pratique de ridicule etgrotesque. Finalement, lesselfies seront autoriss pen-dant la monte des marches,mais pas encourags. Cettediatribe na pas empchLOral Paris, lun des plusimportants partenaires duFestival, de surfer sur unetendance inconnue, le sel-fie over et de lancer Twicer,une application iPhone quidiffusera des vidos des g-ries ou des maquilleurs starspermettant chacun de vi-vre lexprience du Festivalcomme sils y taient. Quenpense Thierry Frmaux ?

    NetflixTed Sarandos, directeurcharg des acquisitions deprogramme du service am-ricain de vidos en ligneNetflix, vient pour la pre-mire fois prendre la parole

    Cannes, au March du film etsera accueilli par ThierryFrmaux lui-mme. Avecses 62 millions dabonnsdans 50 pays, Netflix se veutaux avant-postes des recon-figurations de la plante ci-nma dans ses modes de fi-nancement et de diffusion.Nul doute que le gant am-ricain regarde de trs prslvolution du dossier dumarch unique numri-que ouvert par la Commis-sion europenne le 6 mai etqui entend mettre fin augobloquage qui empcheNetflix de proposer le mmecatalogue partout en Europe.Voil donc qui peut plaire Sarandos, mais les majorsamricaines et les ayantsdroit nationaux y sont fer-mement opposs.

    Point DolanQuelles extravagances capil-laires osera le ralisateur-ac-teur-gourou multitche Xa-vier Dolan, membre du jury?Crte iroquoise, Pompadour,ou frange crante ? La r-ponse devrait se donner voir tous les soirs, lors de lamonte des marches, au mi-lieu dun dchanement degels, bigoudis et robes pr-tes par de grands crateurs.En attendant, les sceptiquesseront confondus, comme ille faisait dire Anne Dorvaldans son Mommy.Cet automne, le mme Xa-vier Dolan avait confi auxInrocks : Je fais des filmsquand a me brle, quand ame consume trop de rester chezmoi me branler devant une

    photo de Jake Gyllenhaal.Etant donn quils sont tousdeux membres du jury, queva-t-il se passer ? On exigeun selfie (au lit, sous la dou-che, sur la plage, dans unpalmier, au fond de la baie).

    Vie LGBTCe Festival est aussi un mo-ment pour tablir un bilan dela vie LGBT en Paca. A priori,pas douvertures affriolantesde nouveaux bars ou sex-club pour la prochaine quin-zaine. Le guide SpartacusWorld recommande quandmme le sauna Le 9, sur leshauteurs, un endroit propreet discret o les femmes sontadmises. Caf et lubrifiantofferts. On reste loin de lasavante alchimie de convi-vialit et de proximit du Pa-

    lais du Zanzibar, remplacpar un glacier de merde.

    Et la mto, alors?Pour ce mercredi soir, MtoFrance prvoit 18 degrs etun ciel voil. Jeudi, quelquesclaircies, et 21 degrs. Plusgnralement, il devrait fairebeau et ensoleill en cettequinzaine : en voil un vraichangement.

    CLMENTINE GALLOT,JULIEN GESTER, CLMENT

    GHYS et DIDIER PRON

    RADIO

    www.quinzaine-realisateurs.com

    @quinzaine Quinzaine

    LibreIndpendante

    Non comptitiveOuverte au public

    Du 14 au 24 mai

    LIBRATION MERCREDI 13MAI 2015

  • Katmandoupliemaisneromptpas

    Les immeubles rcents de lacapitale npalaise ontmieuxrsist que prvu au sismedu 25 avril.Mais lapparitiondefissures inquite les habitants etles promoteurs immobiliers.

    ParSBASTIEN FARCISEnvoy spcial Katmandou

    L e btiment est dun blanc impecca-ble. Seules les grandes lettres rougescontrastent, avec ces mots crits ennpalais: Logistique de larme n-palaise. Cette usine de fabrication dqui-pement militaire, une structure de trois ta-ges en forme de U, apparat en bon tat aprsle catastrophique sisme du 25 avril. Maislingnieur interne, Sangaya Shrestha, in-quiet, a prfr faire venir deux experts pourvrifier certaines fissures. Dans laile dedroite, il leur indique une marque au pla-fond: de fines lignes traversent une poutre.Une autre passe dans une colonne. NashilaShraditha, une ingnieure spcialise dansles structures, demande un ouvrier decreuser pour enlever le pltre,afin de savoir si le ciment a ttouch. Cette information seracruciale: les poutres, colonnes etsols soutiennent toute la struc-ture. Elle fait ensuite humidifierle ciment. Il est de mauvaisequalit, sinquite lingnieure. Avec un ar-chitecte des btiments, elle suivra ces lignessur les trois tages pour savoir commentldifice, construit il y a vingt et un ans, a r-sist au plus violent tremblement de terre quiait frapp le Npal depuis 81 ans, dune ma-gnitude de 7,8 . A lpoque de sa construc-

    tion, nous navions pas de moyen de vrifier laqualit du ciment, dplore Sangaya Shrestha.

    BTON. Au bout dune heure creuser le pl-tre, les deux spcialistes rassurent lingnieurinterne en dclarant le btiment non-dange-reux. Les dommages sont mineurs et le trem-blement de terre na pas affect la structure,conclut larchitecte, Prajwal Hada. A longterme, ils devront la renforcer, mais pour lins-tant ils peuvent relancer les machines. Unsoulagement, surtout que cette usine fabri-que les couvertures que larme distribue auxsinistrs.La crainte sest installe dans le cur des ha-bitants de Katmandou, qui ont vu ces fissureslzarder des centaines de btiments aprs lesisme, dont beaucoup de nouvelles tours r-sidentielles et de centres commerciaux. Le

    bton et la brique, qui ont tu plus de millepersonnes dans la ville, sont devenus les en-nemis de ces citadins qui ont prfr vivrependant prs dune semaine en extrieur. Lapratique locale de construction na rien pourles rassurer : Il y a des normes prcises deconstruction, mais il est rare quelles soient ap-

    Un secouriste dans une rue deKatmandou,mardi, quelques heures aprs une nouvelle secousse sismique . PHOTONAVESHCHITRAKAR. REUTERS

    Je pense que plus personnene voudraacheter des appartements enhauteuravant un certain temps.Une architectede la socitdimmobilierCivilHomes

    LIBRATION MERCREDI 13MAI 20158 MONDE

  • fin avril. Jtais en runionau cinquime tage, dans unbtiment en partie effondr parle tremblement de terre du25 avril, quand a a com-menc. Jai pouss mon bosssous la table, des dbris sonttombs du plafond. Je hurlaisO est mon fils?, je suis de-venue folle pendant vingtminutes, jusqu ce que monmari menvoie un SMS pourme dire que tout allait bien. Ona bien flipp. Cest comme sion nous narguait : Tu com-menais reprendre une vienormale, travailler? Eh bien,tiens, prend a. On avait re-commenc dormir dans lamaison, mais au rez-de-chausse, leau courante taitrtablie. On est un peu dses-prs. Heureusement, les co-les navaient pas encore rou-vert. Une consigne a tpasse entre expatris pourrecommencer dormir de-hors pendant soixante-douzeheures.Refuge. Contacte parLibration, lambassade deFrance, qui na pas subi de

    nouveaux dgts, rappelleque ses ressortissants qui ontbesoin daide seront biensr accueillis, en attendantles instructions officielles deParis. Mise en cause lors duprcdent sisme pournavoir pas t en mesuredouvrir ses portes auxcentaines de Franais venuschercher refuge dans le jar-din, faute de conditions descurit suffisantes (mursdenceinte crouls, arbresfragiliss, quatre personnesseulement sur place), lapetite ambassade avaitensuite rod son systmedaccueil, notamment pourles rescaps de la montagne.Dix Franais ont laiss la viedans le premier sisme.La semaine dernire, le gou-vernement npalais dclaraitque les expditions pour-raient reprendre sur lEverestjusqu la fin de la saison. Lesprofessionnels assuraient,eux, que ctait trop risqu,car le sol ntait toujours passtable.

    LAURENCE DEFRANOUX

    pliques Katmandou, affirme une jeune ar-chitecte du grand cabinet de promotion im-mobilire Civil Homes, qui ne souhaite pastre nomme. Il ny a que dans la municipalitde Lalitpur [mitoyenne de Katmandou], queles autorits obligent les respecter.Les piliers sont en gnral renforcs de barresde fer depuis plus dune dizaine dannes auNpal, selon les normes sismiques, grce laformation dingnieurs de btiment. Maiscest la qualit du ciment qui est souventdouteuse. Dans ce contexte, la capitale npa-laise offre un visage tonnement rassurant

    celui qui la traverse :les quartiers et struc-tures les plus touchs

    sont les plus anciens, tels que les clbresmonuments des places royales de Durbar,classs au patrimoine mondiale de lhuma-nit et vieux de prs de dix sicles. Ceux-cise sont effondrs tels des chteaux de carte.Mais lessentiel de la ville contemporaine at pargn, ce qui surprend larchitecte Pra-jwal Hada: Nous avions calcul quun sismede cette ampleur pourrait dtruire des milliersde btiments et jeter jusqu 100000 personnes la rue. Nous en sommes heureusement loin,et nous devons tudier pour comprendre com-ment ces immeubles ont tenu. Beaucoup ontla chance dtre construits les uns contre lesautres, une solidarit qui leur a permis decontenir le choc.

    TOURS. Aprs la nouvelle secousse de mardi,les btiments rcents semblent avoir tenu lechoc, mais des structures plus anciennes,dj fragilises par le sisme du 25 avril, sesont effondrs. Nous avons vrifi les dix lo-tissements que nous avons construits et ils nesont pas gravement endommags, assurait,aprs le premier sisme, Narendra Bajcharya,directeur de lentreprise immobilire ConfortHousing. Nous avons demand au gouverne-ment de les certifier, car cela rassurerait lesclients.Il leur faudra en effet faire un important tra-vail de communication, surtout que la nou-velle tendance, depuis cinq ans, est de cons-truire en hauteur. Des tours de plus de dixtages dans une ville de prs de trois millionsdhabitants, lextension latrale restreintecar coince entre deux chanes de monta-gnes. Beaucoup taient en construction ouen phase dinauguration au moment dusisme. Je pense que plus personne ne voudraacheter des appartements en hauteur avant uncertain temps, lche la jeune architecte deCivil Homes, qui craint une crise du secteurimmobilier.

    REPORTAGE

    Depuissantes secousses ont fait une cinquantaine demortsmardi auNpal.

    La terre tremble denouveauM ardi, dix-huit joursaprs la catastrophequi a fait autour de8000 morts, cest une suc-cession de onze secousses quiont de nouveau atteint leNpal, un tremblement deterre dune magnitude de 7,3,suivi de fortes rpliques. Se-lon un bilan encore provi-soire, ce nouveau sisme,ressenti jusqu New Delhi etau Tibet, aurait fait une cin-quantaine de morts et plusdun millier de blesss.Point rouge. Son picen-tre se situe au nord-est deKatmandou, prs de Kodari, la frontire tibtaine, nonloin de lEverest, dans lesdistricts de Sindhupalchok etde Dolakha. Une rgionmontagneuse et enclave quiavait t, comme tout lepays, durement touche parle tremblement de terre du25 avril, dune magnitude de7,8, puis frappe de pleinfouet le lendemain par un se-cond sisme de 6,8.Laquasi-totalit de ses habita-tions furent dtruites.Caroline de Paulin, de lONGSolidarits Internationalspcialise dans lassainisse-ment, se trouvait Chautara,chef-lieu du Sindhupalchok, 1 800 mtres daltitude,mardi matin: Une douzainede btiments se sont effondrsdans la rue principale. Il y a euune belle panique, tout lemonde sest retrouv sur lestade de foot, o est install lecamp des Nations unies. Heu-reusement, les quipes de re-cherche de larme, qui devai-ent redescendre Katmandouaujourdhui, taient encore let se sont mises immdiate-ment fouiller les dcombres.Selon la Croix-Rouge, deux

    personnes taient arrivesmortes lhpital norvgieninstall sur le stade, et 40 per-sonnes se trouvent en soinsdurgence, raconte-t-elle.Mais il est difficile davoir desinformations sur les zonesrecules. On annonce des glis-sements de terrain et la routede Katmandou serait bloque.Hier, les btiments encoredebout avaient t inspects,et un point rouge avait tpeint sur la plupart dentre euxpour demander leur destruc-tion, les fondations tant tropendommages.Marius Musca, coordonna-teur de la mission durgencede Mdecins du monde auNpal, raconte au tlphonequil se croit sur un bateau,tellement la terre fait desvagues, rplique aprsrplique. Dans la clinique delONG installe Gloch, unezone trs isole, des blesssont commenc arriver.A Katmandou, Elose Dussa-bly, une rsidente franaise,venait de reprendre son tra-vail aprs les vnements de

    REPRES

    CHINE

    INDE

    Katmandou

    150 km

    NPAL

    Chautara

    Golch

    06h11 UTC25 avril7,8 de magnitude

    07h36 UTC12 mai6,3

    07h05 UTC12 mai7,3

    Le tremblement de terre du25 avril dune magnitude de 7,8 afait autour de 8000morts, dont dixFranais, 16000 blesss, et a dtruitenviron 300000maisons, surtoutdans les zones rurales. Son picentre se situait environ 150 kilomtres louest de la capitalenpalaise, Katmandou, et environ15 kilomtres de profondeur.

    Les besoins en aiderestent importants et nousavons unbesoin urgentde fonds pour [distribuerlaide]dans les plus brefsdlais.

    Jamie McGoldrickcoordinateurhumanitairede lONUauNpal

    150Npalais et une centaine dtrangers seraient encore ensevelisdans la zone de trek du Langtang,selon les autorits locales.Huit Franais ont trouv la mortle 25 avril dans cette rgion.

    a

    CANNESTout ce qui se passe

    au Festival de Cannesest suivre en direct

    et en temps relsur Tlrama.fr:critiques, infos,

    rencontres, vidos,coulisses, revue de web

    www.telerama.fr/cannes

    LIBRATION MERCREDI 13MAI 2015 MONDE 9

  • LesretraitesgrecquesaurgimeBruxelles et le FMIfont pression surAthnes pourbaisser lespensions, alorsque 45%desretraits viventdj sous le seuilde pauvret.

    I onnis Varvkis, aventuriergrec du XIXe sicle, a sa statuedans le jardin national dAth-nes. Sous le regard imptueuxde cet homme daffaires et pirate,se runit chaque jour une assembleimprovise dlgants vieillards,

    presque aussiconnue quele Parthnon,

    dans la capitale grecque. Ces im-passibles octognaires et nonag-naires se retrouvent pour jouer auxcartes ou au backgammon. Mais, enpriode lectorale, ils se livrentgalement des joutes oratoirespiques, qui ont contribu leurclbrit. Savent-ils quils sont aucur des difficiles ngociations en-tre la Grce et ses cranciers ? Ledernier Eurogroupe, lundi Bruxel-les, a donn lieu mardi une dcla-ration juge plus optimiste quelors des prcdents sommets. EtAthnes a, une fois de plus, honorles chances de sa dette en rem-boursant 750 millions deuros auFMI, mardi. Mais les blocages per-sistent. Les interlocuteurs du gou-vernement grec nayant pas re-nonc le faire plier sur lesrformes quils entendent lui impo-ser. Parmi ces rformes, exigespar les cranciers, mais dont lecontenu est rarement prcis publi-quement, figureraient une nouvelledrgulation du march du travail(dans un pays o il ny a dj prati-quement plus de conventions col-lectives), ainsi quune nouvellebaisse des retraites.

    FLEGME. Assis en rang doignon,les vieillards du jardin ont tous djvu leurs pensions diminuer duntiers depuis cinq ans. Je ne toucheplus que 680 euros par mois, pr-

    cise ainsi Dimitri, 83 ans, qui futtailleur de chemises pour hommesavant de prendre sa retraite 65 ans. Moi, je suis veuf, et je peuxme contenter de peu. Mais les familles,comment peuvent-elles survivre, si onles appauvrit sans cesse ? sinter-roge loctognaire, dont les enfantsont migr en Sude. Le vieux Di-mitri na pas vot pour Syriza, lacoalition de la gauche radicale arri-ve au pouvoir fin janvier. Et il sof-fusquerait presque de la nouvellemode du sans cravate adoptepar certains nouveaux ministres.Le costume, ce nest jamais anodin.La cravate impose lautorit et le res-pect, affirme-t-il, en connaisseur.Pourtant, ce grand-pre tir qua-tre pingles soutient dsormais lecombat de son gouvernement face Bruxelles et au FMI. On lui tord lebras pour imposer des mesures impo-pulaires. Mais pour linstant, il tientbon, constate-t-il, avec un flegmeoriental.Les retraites ? Cest une vritablebombe retardement, admet ununiversitaire recrut par le nouveaugouvernement pour plancher sur la

    rforme de la scurit sociale.Lquation est simple, explique-t-il. En Grce, il y a dsormais3,5 millions dactifs, 1,5 million dechmeurs, et 2,6 millions de retraits.Il va donc bien falloir trouver unmoyen pour continuer financer lesystme, alors que les inactifs sontpotentiellement plus nombreux que les

    actifs, et que lconomie est essouf-fle par cinq ans daustrit.Mais comment faire face au prilvieux, dans un pays o le vieillis-sement de la population, amorcds le dbut du XXe sicle, sest ac-centu avec lexil de 300000 jeunesdiplms depuis deux ans ? Lescranciers ont leur ide. Ils veulentsupprimer la prime de lEtat accordeaux retraites les plus modestes, celles 480 euros, qui seraient alors rdui-tes 320 euros, croit savoir luni-

    versitaire. Mais qui peut vivre avecsi peu ? sinquite-t-il.

    DMUNIS. Or cette pensionmodeste 480 euros concerneraitun tiers des retraits. Lesquels, biensr, sont aussi des lecteurs.Comme lensemble des 2,6 millionsde retraits, qui nont peut-tre pas

    vot pour Syriza maisqui, comme Dimitri,se retrouvent parfoisen premire ligne poursoutenir la rsistancedu gouvernementcontre des cranciersplus inflexibles quils

    ne lont jamais t face aux prc-dents gouvernements grecs, malgrlchec patent de laustrit impo-se au pays.Aujourdhui, la Grce est en guerre.On nous trangle, car nous sommesdevenus lexemple abattre. Pourdissuader les autres pays europensde voter eux aussi contre laustrit,martle ainsi Voula Arnaoutaki, 56ans. Retraite de la fonction publi-que depuis quatre ans, Voula estlexemple repoussoir pour les

    cranciers. Mais ils feignentdignorer que jai bnfici duneretraite anticipe, justement parcequon ma pousse vers la sortie, aunom de laustrit. Et, avant de fairecroire que les retraits grecs se lacoulent douce un ge prcoce, ilfaudrait aussi rappeler quen Grce,il faut attendre en moyenne deux ansavant de toucher toute sa retraite, enraison de retards chroniques dans lesadministrations. 400000 candidats la retraite attendent aujourdhui leversement de leurs pensions, souli-gne cette femme nergique.Elle travaille dsormais commebnvole dans lun des centres quidistribuent des mdicaments auxplus dmunis. Parmi eux, beaucoupde retraits. Ces vieux qui mendientleurs mdicaments, poursuit Voula,ils nont mme plus peur dune sortiede leuro. Car euro ou drachme, ilsnont plus rien dans la poche.45% des retraits grecs viventaujourdhui sous le seuil de pau-vret, et 17% dans une misre ab-solue, selon une estimationrcente du ministre dlgu laScurit sociale.

    ParMARIA MALAGARDISEnvoye spciale Athnes

    Ils veulent supprimer la primedEtat accorde aux retraites lesplusmodestes, celles 480 euros,qui seraient rduites 320 euros.Un universitaire grec

    REPORTAGE

    AAthnes, en aot 2013. LaGrce compte aujourdhui 2,6millions de retraits. PHOTOPETROSGIANNAKOURIS. AP

    7,2milliards deuros, cest lemontant de la derniretranche de prt que ngociedepuis des mois Athnesavec ses cranciers.

    Bientt lheure de vrit?Le 30 juin, le plan de sauvetagede la Grce arrive chance.Lpuisement des liquiditscontraindrait Athnes cesserles remboursements de ses dettes. Ce qui pourrait arriver dansdeux semaines, a affirm, lundi,le ministre des Finances grec.

    REPRES LesGrecs,pas travailleurs [],les Allemandstravailleursmais radins,cest faux.Angela Merkeldevant les lvesdun lycedeBerlin,mardi

    67ans pour quarante annes decotisations : cest dsormais lgede la retraite en Grce, depuisfin 2012.

    LIBRATION MERCREDI 13MAI 201510 MONDE

  • Q uand il a t assassinle 27 fvrier, loppo-sant russe BorisNemtsov travaillait

    un rapport qui devait, preu-ves lappui, dmontrerlingrence de larme russedans lest de lUkraine.Trois mois aprs sa mort, sesamis, dont le jeune opposantIlia Iachine, ont achev sonuvre en publiant un rap-port de 64 pages intitulPoutine, la guerre.La guerre en Ukraine est uneguerre non-dclare, uneguerre cynique qui reprsenteun crime contre la nationrusse. Poutine restera danslhistoire comme le prsidentqui a transform Russes etUkrainiens en ennemis, sestexclam le jeune homme endnonant le cot excessifdu conflit pour la Russie, quia dpens un milliard de dol-lars en dix mois et perdu220 soldats en Ukraine.Tmoignages. Le Kremlin,qui nie la prsence de trou-pes russes sur le sol ukrai-nien, a refus de commenterla publication de ce rapport.Sur le terrain, les combats nese sont jamais compltementarrts, malgr les deux ac-

    cords de Minsk, celui de sep-tembre comme celui de f-vrier. Lundi, le secrtairegnral de lOtan, JensStoltenberg, a mme estimque les sparatistes prorus-ses, qui contrlent unebonne partie des rgions deDonetsk et de Lougansk, etla Russie avaient accru leurscapacits militaires au pointdtre capables de lancer denouvelles attaques trs courtterme. Dans le rapport pu-bli mardi, les opposants sebasent sur des sourcesouvertes, comme des arti-cles de presse ou des tmoi-gnages de soldats ou de leursfamilles, dont une bonne

    partie est dj connue. Ledossier montre que des trou-pes russes ont t dployesds aot 2014, lors de la con-tre-offensive qui a fait perdre larme ukrainienne tousles gains territoriaux quelleavait enregistrs au cours desdeux mois prcdents. Tous

    les succs majeurs des spara-tistes ont t raliss par lesmilitaires russes, a expliquIachine, de la batailledIlovask en aot 2014 celle de Debaltseve en jan-vier-fvrier 2015. Ces deuxbatailles ont fait norm-ment de victimes au sein delarme ukrainienne en re-traite. Cest l aussi quon re-lve le maximum de pertesrusses, 150 en aot, 70 enjanvier-fvrier 2015.Enterrements. La prsencede troupes russes avait tpour la premire fois docu-mente par des associationsde mres de soldats, la suitedenterrements dans la r-

    gion de Pskov,dans louest de laRussie. Le rapportremonte plus loin,avec les prpara-tifs du Kremlinpour arrimer ds

    2012 lUkraine Moscou eninfiltrant profondment lesservices de renseignement etlarme de ce pays voisin. Ilrappelle que le conflit Donetsk a t initi au prin-temps dernier par des agentsstipendis par la Russie.HLNE DESPIC-POPOVIC

    Sur le terrain, les combats nese sont jamais compltementarrts,malgr les deuxaccords deMinsk.

    DestroupesrussesenUkrainedsaot2014DOCUMENTUn rapport posthumede lopposantassassin BorisNemtsov embarrasse leKremlin.

    Environ 1400migrants originaires de Birmanie et du Bangladesh, en majorit membresde la minorit musulmane apatride rohingya, sont arrivs, lundi, enMalaisie et en Indonsie dans la province dAceh (photo), bord dembarcations en bois, dont certainesntaient plus du tout manuvrantes, faute de fuel dans les moteurs. Plus de 1000dentre eux se trouvaient au large de lle de Langkawi, enMalaisie. Nous pensons quil yavait trois bateaux avec bord 1018 migrants, abandonns par des passeurs dans deseaux peu profondes, a dclar un chef de la police locale. Un millier de migrants sonthbergs dans des centres, voire chez lhabitant. Les Rohingya de Birmanie sont considrs par lONU comme lune des minorits les plus perscutes au monde. PHOTOREUTERS

    ASIE DES RFUGIS ROHINGYA LA DRIVE

    600mtres, cest la hauteurdune tour quont escalade mains nues unRusse et un Ukrainiende 22 et 25 ans Shenzhen, en Chine. Ces SpiderMen staient djfilms en train descaladerla Shanghai Tower, hautede 632 mtres, lan dernier.

    Il ny a aucuneraisonden vouloiraux lecteurs.Suggrer quilsnaient pas comprisnest pas honnte.Ils nont pas vouluce qui leur taitpropos.David Miliband lundi, proposde ladfaitedeson frreEdaux lgislativesbritanniques. Leur relationest tenduedepuis 2010.

    Trois candidats une lection prsidentielle surun plateau de tlvision,cest habituel dans un paysdmocratique. Mais ce quisest pass lundi soirsur Canal13, en Argentine,dpasse tout ce qui a tfait en matire de mlangeentre politique et tlralit. Lanimateur vedetteMarcelo Tinelli a invit son mission ShowMatch, version locale deDanse avec les stars, lestrois principaux candidats la prsidentielle du25 octobre. Accompagnsde leur pouse, tour derle, ils ont fait talage deleurs talents de danseurset racont des blagues.Daniel Scioli, gouverneurproniste de la provincede Buenos Aires, a nousa cravate avec la seulemain gauche. La droite, il laperdue en 1999 lors dunecourse de horsbord. Mauricio Macri, maire millionnaire de la capitale, sestlivr un numro comiqueavec un de ses imitateurs,tandis que sa femmele dcrivait trs fougueuxau lit.Quant SergioMassa, avocat et pronistedissident, il a racont quesa femme avait des poux,rapports par les enfantsde lcole. La classe. Undes trois hommes serale prsident du pays danssix mois. F.X.G.

    DANSE AVECLA POLITIQUEEN ARGENTINE

    LHISTOIRE

    Pour lutter contre Boko Haram, le prsident tchadien,Idriss Dby, qui sest rendu lundi au Nigeria pour rencontrer le prsident sortant, Goodluck Jonathan, et son successeur, Muhammadu Buhari, a rclam nouveau unemeilleure coordination des armes de la rgion. Si nousdevons continuer la lutte et attraper Abubakar Shekau[chef de la secte islamiste, ndlr], il faudra que les armestravaillent ensemble, a soulign Dby Abuja. Et deregretter un manque de coopration interarmes qui at bien exploit par Shekau.Depuis fvrier, larmetchadienne participe en premire ligne une oprationrgionale contre Boko Haram, qui sest empar de pansentiers du nordest du Nigeria. Larme nigriane a certesrepris du terrain depuis la miavril, mais le Tchad se plaintde la lenteur dAbuja rcuprer les villes libres parles troupes de Dby. Selon des sources militaires duTchad, environ 5000 soldats tchadiens sont engags surla zone NigerTchadCameroun. Dby a dvoil un sensde lhumour en qualifiant Jonathan de grand dmocratepour avoir assur la stabilit dans la rgion. PHOTOAFP

    TCHAD : DBY RCLAME AU NIGERIAUNE VRAIE COOPRATION MILITAIRE

    LES GENS

    LIBRATION MERCREDI 13MAI 2015 MONDEXPRESSO 11

  • Hollande,touteunehistoireavecFidelCuba

    dcouvrent une bouteille de rhum HavanaClub Aejo, cadeau de bienvenue de PernodRicard.

    Lundi8h30La Havane, son enchevtrement de maisonscoloniales dcaties et ses immeubles des fif-ties dignes du Corbusier et de Niemeyer,sveillent. Dans la petite bibliothque tapis-se de bois noir de la rsidence de lambassa-

    deur de France une copie de pa-lais vnitien, Hollande converseavec le cardinal Ortega, mdia-

    teur officiel entre le rgime et les opposants.Dont certains taient censs assister len-tretien, mais il nen sera rien. Avec dautresCubains, je cherche le bien de ma patrie, ex-plique le prlat qui ressent une joie profonde, la faon dun courant deau, qu[il] peroi[t]frache et claire aprs avoir t fait comman-deur de la Lgion dhonneur. Le tout dans unfranais impeccable.

    9h30Emergeant entre les ficus gants, luniversitde La Havane attend Franois Hollande. Leservice dordre local a des chemises blancheset le sourire inexistant. Des haut-parleurscrachotent la Bayamesa et la Marseillaise, lesdeux hymnes nationaux. On peine trouverdes tudiants sur les bancs dbordant dhuilesgrisonnantes des deux pays. Trois jeunessadresseront quand mme au prsident fran-ais, sans jamais oublier un couplet dhom-mage Fidel et aux acquis de la rvolutionsocialiste. Hollande envoie un message di-rect Washington, appelant, sans prononcerle mot, la leve de lembargo. Car sil est

    possible dempcher le mouvement des mar-chandises, il nest jamais possible de freiner lemouvement des ides et de la culture, insiste-t-il. Il annonce galement des accords uni-versitaires, des partenariats dans la sant,laugmentation des bourses et la reconnais-sance des diplmes cubains.

    11heuresSur le Paseo del Prado, des militaires cubainsportent la casquette souple vert kaki, em-blme des gurilleros. Aux cts dun des filsdu Che, rvolutionnaire francophile, Hollandeinaugure le sige de lAlliance franaise, lePalacio Gomez, aux colonnades immacules.Avant de faire monter la temprature de ses

    gardes du corps en se lanant dans une baladeau dbott. Jai dambul, comme on dit, ra-conte-t-il goguenard. Un prsident franais,les Cubains navaient jamais vu a, ni leurs pa-rents, ni leurs grands-parents. En ralit, lechef de lEtat croisera surtout des touristesfranais On se voit en Mayenne, hein ? et une statue de lion, son signe astrologiquedevant lequel il demande tre pris en photo.

    11h30Il nest pas midi que des verres embus deglace font leur apparition lhtel Sevilla,construit sur le modle de lAlhambra, opatientent les hommes daffaires franais :des mojitos ! Paille jaune sans alcool, paille

    Pendant les trente heures de sonvoyageofficiel sur lle carabe, lentourage duprsident de la Rpubliquena pas cessde survendre unmoment historique.

    ParLAURE BRETTONEnvoye spciale Cuba

    T rente heures historiques ladjec-tif a connu un pic dinflation, lundi,dans lentourage de Franois Hol-lande au fil de sa visite Cuba. Trenteheures o il a coch beaucoup de cases quifont bomber le torse lElyse. Premier prsi-dent franais dans lle depuis son indpen-dance en 1898, premier chef dEtat occidentalsur place depuis la rvolution cas-triste de 1959 et donc premier di-rigeant europen rencontrer Fi-del Castro chez lui, La Havane. a parle aumonde, Cuba. Et pas simplement ceux qui ontcoll un jour des affiches de Che Guevara, r-sume le Prsident avant de quitter la capitalecubaine.

    Dimanche22h50Ce nest pas son registre de langage mais, endbarquant La Havane flanqu dunenorme dlgation, Hollande confie sonmotion dtre Cuba aprs sa tournedans les Antilles. Cest toujours bien que laFrance soit la premire, en avance, se vantera-t-il chacune de ses tapes en terre rvolu-tionnaire. Pendant son sjour, la MaisonBlanche fera savoir quun voyage de BarackObama Cuba est dsormais envisageable.Et lAllemagne? Vous avez vu? Merkel bougeparce que nous bougeons, fanfaronne uneministre. Pour une fois que cest dans ce sens.Pour son trip, Hollande est accompagn de sixfemmes et Matthias Fekl (Commerce ext-rieur), qui est l pour rappeler que nous avonsun gouvernement paritaire. En sinstallantdans leur chambre dhtel, les journalistes

    REPORTAGE

    Franois Hollande et Fidel Castro, lundi, LaHavane. Cest le premier prsident franais venir sur

    Le prsident franais luniversit de LaHavane, lundi. PHOTOYAMIL LAGE. AFP

    LIBRATION MERCREDI 13MAI 201512 FRANCE

  • acquis socialistes de la rvolution: Ce seraittellement facile de basculer dans la mondialisa-tion sans rien prserver.

    12h45Un doux parfum de fleur doranger flottedans le hall du Sevilla. Aprs avoir admir lesphotos spia des stars du show-biz passesavant lui, Hollande file prendre une doucheavant de djeuner avec les chefs dentreprise.Hollande Cuba, cest une ide gniale,senflamme le PDG du groupe de caf quita-ble Malongo, qui rhabilite depuis 2008 lesplantations des anciens colons dans le sud delle. Obama a commenc louverture, maisCuba a besoin de contrepoids. Cest bien jou.

    Derrire la diplomatie, la guerre commercialea bel et bien commenc. LAmrique se rap-proche parce que la Chine se rapproche et doncnous, on se rapproche aussi, balance un diri-geant franais. Hollande tente la synthse :Nous ne sommes pas venus faire des affairesmais accompagner un dveloppement conomi-que. Nuance.

    15heuresAlors quil est attendu par les Franais deLa Havane la rsidence de lambassadeur,o Sgolne Royal lira son discours sa place,le prsident franais file en douce chez FidelCastro, dans le quartier de Hermanitas, o leLider Maximo le reoit en survtement et enfamille. Sourd aux critiques qui fusent detoutes parts droite, gauche, exils cu-bains, Hollande dfend ce geste lgarddu peuple cubain et dun pays indpendant.Il range le camarade Fidel au rayon des der-niers survivants de la guerre froide. De quoibrouiller son image de prsident social-d-mocrate? Hollande lude. Lancien hommefort de lle na pas refait lhistoire avec sonhte. Hollande explique : Quand vous tesdans lhistoire, pas besoin de le rappeler. Cestquand vous ny tes pas que vous y faites sanscesse rfrence. Il faudrait passer le message son entourage, qui insiste lourdement surlentre dans lhistoire du prsident fran-ais.

    16h15Franois Hollande passe enfin en coup devent voir ses compatriotes, qui se desschentsous le soleil cubain depuis plus de deuxheures dans le jardin de lambassadeur.Pour 98% des Franais, Che Guevara cest untee-shirt, relativise Marisol Touraine (Affai-res sociales, Sant), interroge sur la portepolmique de la rencontre avec Fidel Castro.

    16h45Plaza de la Revolucin, Hollande et ses septministres rendent hommage Jos Mart,pote, journaliste, diplomate, hros de laguerre dindpendance de 1895 et inspirateurde la rvolution de 1959. Sous lil du Che etde son cri de ralliement Hasta la victoriasiempre en lettres de fer forg, Hollandedpose une gerbe aprs une dmonstration

    de pas de loie des militaires cubains, dignede la Core du Nord.

    17heuresDans le Palais de la rvolution, la dlgationfranaise longe une minifort quatorialeplante sous des ranges de nons. AnnickGirardin (Dveloppement, Francophonie)dgaine son portable pour immortaliserlinstant. Les hautes portes du btimentsemblent faites dcorce de bois. Cest Ju-rassic Park ici, lche un journaliste amri-cain. Hollande et le prsident Castro parle-ront plus dune heure. De la COP21, lidefixe du prsident franais, des relations inter-nationales et de coopration bilatrale. RalCastro, qui lisait des livres en franais dansle maquis en 1959, est dans lide dune mu-tation de son pays tout en gardant lidentit deCuba. Un nouvel avatar de non-alignqui sduit Hollande, totalement piqu au jeude la diplomatie mondiale. Aprs les pala-bres, les deux hommes dnent de langousteset promettent de se revoir en France.

    23heuresHollande schappe pour une balade de quel-ques minutes dans Habana Vieja, la vieilleville aux maisons coloniales espagnoles d-frachies. Au grand dam de lElyse, le petitgroupe tombe sur des photographes franais.Hollande, Royal, Girardin en goguette cu-baine, cest dans la bote.

    23h20A son arrive lhtel Nacional, o dfilrentstars et mafieux amricains avant la rvolu-tion, Hollande croise une partie de sa dlga-tion en pleine dgustation de cigares dans lesjardins. Des touristes de Buenos Aires lui de-mandent une photo. Aprs Cuba, je vais meprsenter en Argentine, se marre Hollandeavant de raconter sa journe aux reporterssous un portrait de Compay Segundo, mythi-que leader du Buena Vista Social Club. Unreste de Cohiba aux lvres, le dput com-muniste Andr Chassaigne apostrophe lin-venteur du pacte de responsabilit et ducrdit impt comptitivit emploi (CICE), sidcris par la gauche de la gauche Paris :Aujourdhui, Franois, je te le dis, cest unsans-faute. Mais, attention, jai dit au-jourdhui.

    verte avec. Dans la touffeur tropicale et enplein jet-lag, les hommes daffaires votentvert. Matre de crmonie officieux, Jean-Jacques Barberis, conseiller de Hollande pourle commerce extrieur, virevolte dun groupe lautre, ostensiblement heureux. Les Cu-bains ont une attitude assez offensive et, par-don de le dire, assez business, en fait, salue letrentenaire. Au-del des contrats peu se-ront signs cette fois, les autorits veulentparler coopratives, Scop, conomie socialeet solidaire, mutualisme. Mais aussi infras-tructures de transports et de tlcoms, ner-gies renouvelables et agroalimentaire. Il ya tout faire ici, smerveille Sgolne Royal(ministre de lEcologie et de lEnergie), quijuge respectable de vouloir conserver les

    SgolneRoyal et le Prsident se baladant LaHavane. A.JOCARD. AFP

    ET ENSUITE,HATIFranois Hollandea achev mardi satourne dans lesCarabes par unetape en Hati. Il devaity signer des accords decoopration et soutenirles efforts de reconstruction dans cette leravage par un sismeen 2010. Sur place, unepartie de la populationexige de la France leremboursement de ladette de lindpendance sujet abordpar le prsident hatien, Michel Martell, enprsence de FranoisHollande.

    REPRES

    Labellervolutionde 1959contre ladictature deBatista, celle quiavait fait levertant desprance,[] sesttransforme encauchemarpolitique.Franois Hollandedansune tribunepublieen2003dans leNouvelObservateuretexhumeparReporters sansfrontires

    Retrouvez nos articles sur la visite officielle de FranoisHollande dans lesCarabes: de SaintMartin Hati enpassant par Cuba.

    SURLIB.FR

    lle deCuba depuis son indpendance, en 1898. PHOTOALEXCASTRO. AP

    LIBRATION MERCREDI 13MAI 2015 FRANCE 13

  • Trafiquantouinfiltr,ClaudeHermant,letroubledelidentitaireLex-barbouze, figurede lultradroite, est souponndavoir fourni des armes AmedyCoulibaly.

    I l a un look de videur, une car-rure de catcheur, et cet hom-me-l est encombrant. En pri-son depuis le 23 janvier, ClaudeHermant, 52 ans, figure de lultra-droite identitaire lilloise, est soup-

    onn dtre impli-qu dans le rseauqui a fourni des ar-

    mes Amedy Coulibaly, auteur delattaque contre lHyper Cacher enjanvier. Mais aussi dtre un infor-mateur de la gendarmerie et desdouanes. La Voix du Nord a rvllaffaire fin janvier, et ce dernier re-bondissement en mai. Ce pilier delextrme droite locale, bte noiredes antifas de Lille, aurait-il russilexploit dtre la fois un trafi-quant darmes qui alimentent les fi-lires jihadistes et un indic desgendarmes?Incarcr lisolement depuis le23 janvier, au centre dune infor-mation judiciaire ouverte Lillepour trafic darmes en bande orga-nise, il est un polar lui tout seul:ex-membre du service dordre duFN, ancien para et mercenaire.Quand il a t arrt, il tait ven-deur de frites occasionnel Lille lejour, et surveillant dinternat dansun centre mdico-pdagogique dela rgion trois nuits par semaines.Il aurait trouv le temps, comme leprouverait un mail du 21 novembrecit par la Voix du Nord, dinformerles gendarmes sur un trafic darmesfranco-belge Charleroi : SalutClaude, nous avons vu avec notre hi-rarchie, nous sommes partants pourles deux dossiers que tu nous as pr-sents (armes-Charleroi).

    PAINTBALL. Linformation judi-ciaire a t ouverte ds le 7 mai2014, six mois avant ce mail, et huitavant les attentats de Paris. On luireproche davoir remilitaris desarmes, cest--dire de les avoir ren-dues oprationnelles sans autorisa-tion, puis de les avoir revendues.Son avocat, Maxime Moulin, recon-nat que son client sy connat enarmes: Cest un combattant.Claude Hermant a quitt les para-chutistes en 1982 au grade de ser-gent, a t volontaire auprs des l-

    gions croates pendant la guerre delex-Yougoslavie, puis barbouze auCongo la fin des annes 90. Vraitrafiquant, ou juste infiltr aban-

    donn par sa hirarchie ? Cest lathse que lex-mercenaire tente devendre aux enquteurs. Je ne seraipas le prochain Marc Fievet, a-t-illch aux journalistes de la Voix duNord entre deux portes du palais dejustice. Fievet est cet ancien doua-

    nier franais infiltr chez les narco-trafiquants, lch aprs avoir tarrt au Canada, incarcronze ans. Indic des gendarmes ?

    Son avocat ne veut niconfirmer ni infirmer,mais ajoute: Si les in-formations des journauxsont vraies, qua fait lagendarmerie ? Sous-entendu: pourquoi na-

    t-elle pas pu empcher Coulibaly denuire? Selon le Nord Eclair belge, untrafiquant de Charleroi serait tou-jours en cavale, faute de coordina-tion entre les forces de lordre fran-aises et belges. La friterie oHermant travaille, la Frite Rit, rue

    de Solfrino Lille, dont le fondsappartient sa compagne, tait leQG de militants de lultradroite lil-loise. Le week-end, Hermant ani-mait des sances de paintball Ennetires-en-Weppes, dans lacampagne lilloise. Lhomme, quirefuse le qualificatif dextrmedroite, raconte son avocat, maisqui se dit chauvin, fier de son dra-peau, a t responsable de la scu-rit de la controverse Maison dupeuple flamand de Lambersart, prsde Lille, ouverte entre 2008 et 2012,repaire didentitaires. Il organisaitdes camps Ars, du nom du dieugrec de la guerre, avec rveils lanuit, marches forces, techniques

    de survie et messes, pour ceux quile souhaitaient, dit son avocat,des camps scouts un peu virils. Enoctobre 2011, il tait lun des orga-nisateurs dune manif identitaire Lille, avec Serge Ayoub, le chef deTroisime Voie, mouvement dis-sous aprs lassassinat du militantantifa Clment Mric.

    FANTME. Hermant est n aucur du pays minier, Bruay-la-Buissire, lpoque Bruay-en-Artois. Il grandit entre un mineurencart au Parti communiste etune mre au foyer. Il a un diplmede plombier. Aprs larme, il estrecrut par dautres services delEtat, indique son avocat sans endire plus. Entre 1994 et 1999, ila t membre du Dpartementprotection et scurit (DPS) duFront national, avec lequel il estaujourdhui brouill. En 2001, il ra-conte ses missions de fantme(Libration du 6 juin 2001), dmen-ties par le FN. Il dit avoir tform linfiltration et la ma-nipulation de foule, au sige du FNen 1997, par danciens fonction-naires du renseignement pour or-ganiser la dstabilisation de certainsquartiers ou des villes qui ne sont pasacquises aux ides du Front. [] In-filtrer. Prendre contact avec des ban-des. Inciter la violence ou la r-bellion. [] Dans un quartier, si vousmettez le feu une voiture, danslheure qui suit, neuf fois sur dix,vous en avez quinze autres qui br-lent. [] En faisant avancer linscu-rit, vous faites progresser llectoratdu Front.Il a ensuite jou les instructeurs auCongo-Brazzaville pour le comptedu DPS et, lch par le servicedordre du FN, a pass huit moisdans les prisons congolaises dans lecadre dune affaire rocambolesquede complot contre Brazzaville, puisgraci. Du fond de sa cellule,lhomme fait passer le messagequil na pas lintention de porterun costume trop grand pour lui etque, comme il a balanc le DPS,il pourrait inquiter dautres per-sonnes. Son avocat: Il peut se met-tre en quatre pour vous rendre ser-vice, mais si vous ntes pas rgloavec lui, il sen souviendra.

    ParHAYDE SABRAN

    Il organisait descampsArs,dunomdudieu grec de la guerre,avec rveils la nuit,marchesforces

    PROFIL

    6personnes ont t mises enexamen dans ce trafic darmesen bande organise, dontHermant, figure de lultradroitelilloise, et un douanier lillois.

    En 2009, des antifas stonnaient des liens possibles entrela police et les identitaires de laMaison du peuple flamand: cesderniers avaient diffus les prnoms, linitiale du nom et la villede 26 dentre eux. Des infosobtenues en garde vue, selonles antifas (lire sur Libration.fr).

    REPRES Cenest pas parcequevous savezposerduplacoquevous savezbtir unemaison.Remilitariserdes armesncessitedumatriel lourd.Me MoulinavocatdeHermant

    ClaudeHermant laMaison flamandedeLambersart (Nord), en octobre 2011. PHOTOC. LEFEBVRE. VOIXDUNORD.MAXPPP

    Cr en 1985, le Dpartementprotection scurit (DPS) estle service dordre du FN. Il a faitlobjet en 1999 dun rapport parlementaire relevant de nombreuxactes de violences et affirmantque le DPS fait galement officede service de renseignementpour le parti dextrme droite.

    LIBRATION MERCREDI 13MAI 201514 FRANCE

  • C est jeudi 7 mai, audtour dune runionau ministre de laJustice, quun dispositif debrouillage des sallesdaudience a t dcouvert.Ce jour-l, lAssociation dela presse judiciaire (APJ) ef-fectuait un bilan dtapeavec les concepteurs de lafuture cit des Batignolles Paris (XVIIe), annoncecomme le plus beau palaisde justice du monde. Datedouverture prvue : 2017.Son cot, au gr de recourssuccessifs et damnage-ments en tout genre, estpass de 700 millions 2,4 milliards deuros L,premire surprise, le prsi-dent de lAPJ, Pierre-AntoineSouchard, obtient confirma-tion que la cit comporterades salles daudience d-pourvues de box presse.Mieux, lEtablissement pu-blic du palais de justice deParis (EPPJP), qui conduit leprojet, prvoit linstallationde brouilleurs dans les pr-toires, empchant ainsi jour-nalistes comme avocatsdaccder Internet.Depuis une petite semaine, lapolmique va bon train: quipeut bien tre lorigine decette ide de gnie? Pierre-Antoine Souchard soupire :Le projet tel quil est conuest une succession daberra-tions. Que des architectes nesoient pas spcialistes du rlede la presse dans les procs,pourquoi pas. Mais on peutsinterroger sur le rle des ma-gistrats qui ont particip llaboration du cahier descharges [tabli sous NicolasSarkozy, ndlr]En effet, le conseil dadmi-nistration de lEPPJP, prsidpar Jean-Claude Marin, pro-cureur gnral prs la Courde cassation, est compos dereprsentants de la magistra-ture, de lordre des avocats,de la maire et du prfet depolice de Paris. Jusquici,lEPPJP a invoqu des rai-sons de scurit pour justi-fier les bizarreries de sonjoyau. Sollicites par Libra-tion, ses quipes nont pasdonn suite, laissant planerle mystre sur les prises dedcision.Mutique elle aussi jusque-l,la chancellerie a enfin ragi.Lentourage de ChristianeTaubira indique Librationque des consignes ont t

    donnes pour que des solutionstechniques soient trouves afinde supprimer le brouillageprvu dans le projet de 2012.Rien, en revanche, na filtrde la position de la ministreconcernant les box. Enltat, le projet donne uneimage de la justice contraire celle que sen fait la garde desSceaux, savoir accessible et

    ouverte au public, prcisetoutefois le ministre.En coulisse, daucuns repro-chent Taubira de ne pas treintervenue suffisamment tt,et de rejeter la faute sur laprcdente mandature.LEPPJP doit transmettre ra-pidement la chancellerieune copie corrige.

    WILLY LE DEVIN

    LacitjudiciaireembrouillelapresseBATIGNOLLESNiwifi ni box pour les journalistesriennest prvudans le futur palais de justice parisien.

    Des chiffres bruts, sans appel. En France, le tabac tuaitdirectement 2700 femmes en 1980. En 2010, 19000.Une hausse sans prcdent. Ces donnes viennentdune tude, publie mardi dans The European Journalof Public Health, qui prsente lvolution de la mortalitattribuable au tabac par sexe, de 1980 2010, en France.Ainsi, la mortalit lie au tabac dans lHexagone estde 78000 en 2010. Dans la population de 35 69 ans,un dcs sur trois chez lhomme et un dcs sur septchez la femme sont directement attribuables au tabac.Le plus impressionnant est la traduction chiffre du tabagisme en pleine expansion chez les femmes: Ces estimations sont cales sur la mortalit par cancer dupoumon. Cette mortalit par cancer du poumon dans lapopulation diminue de 1% par an depuis 1992 chezlhomme et augmente de 4% par an depuis 1984 chez lafemme, note Catherine Hill, qui dirige le service debiostatistique et dpidmiologie de lInserm, loriginede ltude. .F.

    EN 2010, 78 000 MORTSATTRIBUABLES AU TABAC

    Lallongement douzemois [dela dure des stages]ouvrira grand laporte des driveset des emploisdguiss.La CFDTqui dnoncecettedisposition ajouteauprojetde loiMacronpar lessnateurs, lesquels ontadoptmardi lensembledu textepar 185 voixpouret44contre dont 7 socialistes

    43Ce sont les propositionsformules par le comitde suivi du droit au logement opposable dans unrapport remis mardi laministre du Logement,alors que 60000mnagesattendent un relogement.

    Lavocat Karim Achoui at condamn, mardi, 10000 euros damendepour travail dissimul, pournavoir pas dclar sonchauffeur entre 2009et 2010. Nous allons faireappel, a dclar Achoui,avant dajouter: Je constate que lacharnementjudiciaire ne sest pasarrt. Le chauffeur, dontloncle et le pre avaientt dfendus par Achouiavant dtre assassins,avait port plainte en 2011.Selon ses dires, KarimAchoui, qui tait sorti deprison dbut 2009, lavaitembauch pour2500 euros par mois. Nondclar, il navait pas debulletins de salaire. Lavocat conteste lavoir salari.Selon Achoui, il le conduisait occasionnellement titre amical. Les versements dargent provenaientdes administrateurs provisoires du cabinet, affirmetil. Mais six tmoins, dontcinq ayant travaill au cabinet, ont affirm que cethomme tait bien le chauffeur personnel de KarimAchoui. PHOTOAFP

    KARIM ACHOUICONDUIT PAYERUNE AMENDE

    LES GENS

    LTUDE

    LIBRATION MERCREDI 13MAI 2015 FRANCEXPRESSO 15

  • Avant,dansmatte,desvacances,ctait impossibleUngroupede 128 personnes issues demilieuxdfavoriss ont particip fin avril un sjour dans lesAlpes-Maritimes grce un rseaude lutte contre lexclusion.

    ParMATHILDE FRNOISCorrespondanteNice

    A 101 ans, Marthe navait ja-mais vu le bleu immensede la mer Mditerrane.Jai mis seulement lespieds, parce quelle est frache. Et puisje ne sais pas nager! Mme si elle napas enfil son maillot de bain, Mar-the gote le moment suspendu de sasemaine de vacances Grasse (Al-pes-Maritimes) avec un groupe de128 personnes dont 50 enfants, unsjour organis fin avril par le rseauVacances familiales-Combattre lex-

    clusion. Le sable, le vent, lodeur dela mer je nai pas lhabitude, confiela centenaire, loin de son apparte-ment de la banlieue parisienne.

    CITOYENNET. Habituellement,Marthe et les autres membres dugroupe ne partent pas en vacances.Une situation qui concerne 40% desFranais selon le Crdocet que tente de combattrele rseau : tous les deuxans, il organise une semaine de va-cances pour des non-partants. Touta commenc avec ladoption de la loidorientation relative la lutte contre

    les exclusions vote en juillet 1998.Lgal accs de tous, tout au long dela vie, la culture, la pratique spor-tive, aux vacances et aux loisirs consti-tue un objectif national. Il permet degarantir lexercice effectif de la citoyen-net, nonce le texte. Une dclara-tion dintention gnreuse, mais dix-sept ans aprs son adoption, laccs

    aux loisirs est encore loindtre gal pour tous.Mme si son action est

    marginale compar lampleur delexclusion, le rseau, qui regroupeune dizaine dassociations, essaye,dans la limite de ses moyens, de ren-

    dre effectifs les objectifs inscrits dansla loi : favoriser les dparts et per-mettre une mixit sociale pendant lesvacances. Les membres du rseausoutiennent des personnes aux profilstrs diffrents : des prcaires, des se-niors isols, des handicaps, des mi-grants, dtaille Jean-Pierre Bauvede lassociation Destination Partage.Pour ce sjour Grasse, les vacan-ciers sont arrivs en train des quatrecoins de France. La plupart des mem-bres du groupe ne se connaissaient pasavant le sjour, souligne-t-il. Lesvacances, cest du dpaysement etdes rencontres.

    Des photos du sjour ralises par les participants. Au bord de leau, deuxime partir de la gauche:Marthe, 101 ans, qui habite dans la banlieue parisienne. Le sable, le vent, lodeur de lamer je nai pas lhabitude, ditelle. PHOTOSDR

    REPORTAGE

    LIBRATION MERCREDI 13MAI 201516 FRANCE

  • Des photos du sjour ralises par les participants. Au bord de leau, deuxime partir de la gauche:Marthe, 101 ans, qui habite dans la banlieue parisienne. Le sable, le vent, lodeur de lamer je nai pas lhabitude, ditelle. PHOTOSDR

    POURQUOI ILSNE PARTENT PAS?Prs de la moiti desnonpartants sonds en2014 par le Crdoc invoquent des raisons financires (46%). Les autresavancent notamment desmotifs de sant (16%), professionnels (9%), familiaux(8%) ou des choix personnels (13%).

    REPRES

    Si lon remontedans le temps, onobserve que les plusmodestes nont pasencore rattrap leurniveaudedpart envacances de la findes annes 1990(44%en 1998, 40%aujourdhui).LObservatoiredes ingalits

    82%des cadres suprieurspartent en vacances chaque anne, contre 58%des employs et 47 % desouvriers. 43% des cadrespartent plusieurs fois paran en vacances (10% desouvriers).

    On retrouve Marthe lheure du d-jeuner dans le rfectoire du village devacances situ dans un crin de ver-dure sur les hauteurs de Grasse, avecvue dgage sur la mer, au loin.Quand je rentrerai, je serai peut-treun peu moins vieille, commente-t-elle. Ici, je discute, je fais des rencon-tres et des sorties. a me pousse treplus jeune dans ma tte.

    CALME. A la table d ct, So-theary grignote sur sa chaise haute.Cent ans sparent les deux vacanci-res. Le bb est entour dun groupede jeunes mres venues de Trappes,en rgion parisienne, et de Montlu-on, en Auvergne, grce au centresocial de leur quartier et ATDQuart-monde. Pendant une semaine,leur quotidien sen trouve radicale-ment chang. Ce calme, a fait bi-zarre, mais cest tellement bien, sex-clame Amandine, venue avec sesdeux enfants. Hier, jai pass deuxheures bronzer au bord de la piscine.Les jeunes mres sirotent un jus defruits en se remmorant les momentspasss depuis le dbut de leur sjour.Ce sont de vraies vacances et a faitdu bien au moral, on avait vraimentbesoin de se ressourcer. Ensemble,elles ont visit la plus grande parfu-merie de Grasse, ont mang un pan-bagnat sur la promenade des Anglais,ont tendu leur serviette sur les pla-

    ges cannoises, ont observ avec leursenfants les orques et les dauphinsdun parc aquatique. Des sortiesinenvisageables sans laide financiredu rseau.Quand il nest pas en vadrouille avecses parents, Rayane profite de la pis-cine du centre de vacances. Au borddu bassin, le garon de 7 ans courtpour ne pas se faire clabousser parses copains sous le regard de sonpre. a change des barres dim-meubles. Ici cest soleil, mer et pis-cine, explique Omar, un magasinieroriginaire de Trappes, sans sortir deleau malgr sa fracheur. Pournous, cest compliqu financirementet je ne sais pas si on pourra partir cet

    t. L au moins, je suis sr que mesenfants sont heureux et quils aurontdes choses raconter en rentrant.Omar, sa femme et leurs six enfantsont pu partir avec laide du centresocial de leur quartier.Ce sjour a t financ 65% parlAgence nationale pour les chques-vacances. Les associations rglent

    10%. Le reste est la charge des fa-milles, dtaille Jean-Pierre Bauve.Omar et les siens ont pay au totalde leur poche 600 euros pour lasemaine.

    COMBAT. Le premier obstacle audpart en vacances est incontesta-blement conomique. Mais on re-trouve galement des non-partantsdans des catgories sociales pas for-cment dfavorises: les ruraux quivivent dans un environnement o laculture des vacances est moins dve-loppe, les gens gs victimes de leurisolement, les personnes en situationde handicap qui ne trouvent pas tou-jours des structures adaptes pour

    leur sjour, ouencore les immi-grs qui sont djdans un paysdaccueil et pourlesquels partir,mme pour desvacances, est plusdifficile envisa-

    ger. Je suis convaincu que les vacan-ces jouent un rle dans la cohsion so-ciale, souligne Franois Soulage,conomiste et ancien prsident duSecours catholique. On crve du faitque des strates de la population ne peu-vent plus se parler. Or, notre combatest de faire en sorte que nous apparte-nions tous la mme socit. Les va-

    Notre combat est de faire en sorte quenous appartenions tous lammesocit. Les vacances ne sont pas uneutopiemais unencessit.Franois Soulageconomisteet ancienprsidentduSecours catholique

    cances ne sont pas une utopie mais unencessit. Cest un moment de ren-contres et de mlange. Tout le con-traire du repli et de lexclusion quiempchent daller de lavant.Comme en tmoigne la famille Kaba.En 2010, Massa et Mohamed quittentla Guine pour la France. Les deuxadolescents rejoignent leur mreNnagbe Cachan (Val-de-Marne),qui gagne sa vie en faisant des mna-ges et des gardes denfants. Moinsdun an plus tard, la famille est int-gre dans un projet de dpart.Avant, je navais mme pas pens partir en vacances. Dans ma tte, centait pas possible, confie Nnagbe.Soffrir des vacances, beaucoupdimmigrs ne lenvisagent pas. Ilsntaient pas nombreux vouloir fairece sjour, explique Elisabeth Offerde lassociation Aspire. Il y a pas malde freins. Il faut notamment vaincre lespeurs de la rencontre de lautre et laconfrontation ses codes.Ce sjour Grasse, cest le troisimeque font Nnagbe et ses enfants. Mo-hamed, 16 ans, pourrait parler pen-dant des heures des sjours auxquelsil a particip. Pour lui, partir en va-cances permet de voir le mondeautrement. Un point de vue quepartage sa mre : Je pense que mesenfants ont pu trouver leur place etsintgrer plus facilement grce auxvacances.

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    Le CarnetEmilie Rigaudias0140105245

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    CARNET

    DcS

    AgatheERISTOVGENGIS-KHAN

    s'est chappele 8mai 2015.

    Elle nous laisseses silhouettes flottantes,

    ses labyrinthes,ses forts de papier,

    sonmondedense et lger.

    De la part de :Hlne, Ariane,Delphine

    ERISTOV,Gilbert LASCAVET,YannickDENIS.

    Les obsques auront lieule vendredi 15mai 2015,

    14 heures, en la cathdralerusse, 12, rueDaru,

    Paris (8e), puis 16 heures,au crmatoriumdu cimetire

    duPre-Lachaise.

    "Claude TREINER,Sandrine, Emmanuel

    et Sandrine,Anna, Tho, Samuel et Sacha,Ont la grande tristesse devous faire part de lamortd'IrneTREINERsurvenue le 8mai 2015.Nous nous retrouveronscemercredi 13mai

    16h15 l'entre du cimetireparisien de Bagneux.Cet avis tient lieude faire-part.

    [email protected]

    SouvenirS

    Guy-NolMOSERLe 13mai 2002, aprs

    beaucoupde souffrancesGuy-Nol

    a rejoint la lumireIl est avec nous tous les jours

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    Tl. 01 40 10 52 45Fax. 01 40 10 52 35

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    LIBRATION MERCREDI 13MAI 2015 FRANCE 17

  • Les attaquespersonnelles, []je les ai entenduesdans la bouche[deNicolas Sarkozy]contre laministrede lEducationnationale, avecdesmotsinsupportables.Manuel VallsPremierministre,mardi lAssemble.

    10000Cest le montant delamende inflige mardipar le tribunal correctionnel de Paris Alain Soralpour injure caractreracial. Lessayiste antismite stait pris en photoen train de faire une quenelle au Mmorial delHolocauste Berlin, fin2013. Il devra aussi payer14001 euros de dommageset intrts au profit desassociations parties civiles.

    N icolas Sarkozy taitprvenu: pour rien aumonde sa vice-prsi-dente Nathalie Kosciusko-Morizet ne renoncerait latotale libert de parolequelle revendique. Elle enfait la dmonstration en cri-tiquant sans retenue le dbatsur lislam que doit organiserla future ex-UMP. Unemauvaise ide, a-t-elle ex-pliqu dimanche au micro deBFMTV.Une ide de Sarkozy, pour-tant. Le 7 fvrier, lancienchef de lEtat avait confi auxdputs Grald Darmanin etHenri Guaino le soin de con-duire une rflexion sur lis-lam de France et de prparerla convention qui allaitfixer la doctrine de la droite.Dabord programm pouravril, ce rendez-vous a trepouss au mois de maiavant dtre fix au 4 juin,aprs le congrs fondateur dunouveau parti, le 30 juin.Emploi. Ennemie dclarede la ligne identitaire incar-ne aujourdhui par LaurentWauquiez et dfendue jus-quen 2012 par le maurras-sien Patrick Buisson, la nu-mro 2 de lUMP juge que laquestion religieuse prend tropde place dans le dbat public.La premire initiative deceux qui prtendent se faireappeler Les Rpublicainsne peut pas tre, selon elle,daller dbattre sur lislam.Je pousse pour que la pre-mire convention soit sur lesquestions dconomie, despritdentreprise et demploi, ainsist NKM. Message reu.

    Lundi, au lendemain de cettedclaration, les porte-parolede Sarkozy faisaient savoirquil ny aurait, ce 4 juin,quune runion de travail huis clos en prsence dequelques lus locaux, de sp-cialistes et de responsablesreligieux. Autant dire que lafameuse convention estreporte sine die.Un revers pour Sarkozy ?Bien au contraire. Limperti-nente mais fidle NKM offre son chef un excellent pr-texte pour enterrer une ini-

    tiative qui menaait de tour-ner au procs de ses propresslogans de campagne. Pas devoile pour les tudiantes nipour les accompagnatricesbnvoles de sorties scolai-res, pas de repas de substitu-tion sans porc dans les canti-nes des coles : avant lesdpartementales, Sarkozystait lanc dans une suren-chre lacarde qui avait effarbon nombre de responsablesde lUMP, dont Guaino etDarmanin.Le 19 mars, le premier staitdit en dsaccord total aveclinterdiction des menus desubstitution. On vit dansune espce de climat dhystrieterrifiant, tout le monde a ledevoir dapaiser et de faire trsattention aux emballementslectoralistes, avait-il dit.

    Quant Grald Darmanin, ilsinterrogeait dans Libra-tion, au lendemain des at-tentats de janvier, sur lob-session de sa famillepolitique pour les ravagessupposs du communauta-risme : Faut-il vraimentsacharner sur les voiles desmamans dlves qui accom-pagnent les sorties scolaires la tour Eiffel ?Emballements. Sauf serenier eux-mmes, Guainoet Darmanin pouvaient diffi-cilement, la faveur dune

    convention surle sujet, exo-nrer Sarkozyde ses embal-lements pas-ss. Et sils nelavaient faiteux-mmes,

    Jupp ou Fillon sen seraientchargs. Depuis Tunis o il setrouvait ce week-end, le se-cond a mis en garde ceux quicommencent penser quilfaut tout interdire. Le Journaldu dimanche rapporte quil aredit cette occasion son op-position linterdiction duvoile luniversit, une me-sure selon lui aussi inoppor-tune quinapplicable : lesFranais verront quon auravot une loi et quelle ne serapas applique. Tout a, ce sontdes coups sans lendemainAu lendemain de son cou-ronnement, Sarkozy pouvaitdifficilement prendre le ris-que de commencer sa car-rire de rpublicain enchef sous le feu des critiquesde ses propres amis.

    ALAIN AUFFRAY

    NKM,unerbellionquisertpointSarkozyUMPLa vice-prsidente sest oppose la tenuedune convention sur lislam, initiative gros risque.

    Cest une tradition socialiste: quelques jours desvotes militant