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É trangement, la scène d’une pareille présentation nous projette dans le passé, à une époque que nous croyons révolue et que le livre même pré- tend combattre : l’avant 14 janvier et les médias valorisant les «réalisations du ré- gime.» Publier les noms de personnes ayant aidé l’ancien régime à tenir toutes ces années et faire justice à tous ces gens dont la ré- putation a été éclaboussée, voire dont la vie a été brisée par les écrits de journa- listes à la solde du système est et reste, une revendication légitime. Les journalistes et les hommes de médias qui n’ont rien à se reprocher, demandent, depuis deux ans, l’ouverture du dossier. D’un côté, ils veulent connaître les noms de ceux qui ont gangréné le secteur de l’intérieur, empêchant toute possibilité de liberté d’expression et d’épanouissement personnel et d’un autre, ayant abattu la co- lère populaire sur les médias. Au- jourd’hui, des journalistes honnêtes se font agresser, insulter, sont chassés des lieux de couverture des événements et sont accusés d’appartenir aux «médias de la honte» à cause de leurs collègues incri- minés. Les anciens militants, la population, l’élite tous veulent connaître les noms de ceux qui ont nourri le système et qui ont trahi leur profession en étouffant la possibilité de toute revendication et réclament le droit de savoir. Mais la nouvelle de la sor- tie du livre ne comble pas ces attentes et pour cause, un véritable court-circuit a été opéré par cette publication. État de droit Le président provisoire, « ancien militant des droits de l’Homme » et ayant toujours vanté les mérites de la justice transition- nelle, a trouvé en la publication d’un pa- reil livre, la possibilité de faire passer ce ''Le Système de propagande sous Ben Ali'' ou la «liste noire» des journalistes corrompus, longtemps attendue par tous, vient de tomber ! Il ne s’agit pas d’une liste établie par le syndicat des journalistes, pas plus que d’une publication réalisée par le ministère de la Justice transitionnelle, mais d’un livre édité par la présidence provisoire de la République ! De nombreuses personnes ont été surprises de voir le livre présenté par Salah Attia, zeélateur réputé de Leila Ben Ali et du régime déchu, sur une chaîne de télévision, Al Motawasset, connue pour être proche de la Troïka… actuel Une honte pour la République Le “Livre noir” de la Présidence 8 - Réalités - N°1458 - du 5 au 11/12/2013

Livre noir une honte pour la république

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Page 1: Livre noir une honte pour la république

Étrangement, la scène d’une pareilleprésentation nous projette dans lepassé, à une époque que nous

croyons révolue et que le livre même pré-tend combattre : l’avant 14 janvier et lesmédias valorisant les «réalisations du ré-gime.»Publier les noms de personnes ayant aidél’ancien régime à tenir toutes ces annéeset faire justice à tous ces gens dont la ré-putation a été éclaboussée, voire dont lavie a été brisée par les écrits de journa-listes à la solde du système est et reste,une revendication légitime. Les journalistes et les hommes de médias

qui n’ont rien à se reprocher, demandent,depuis deux ans, l’ouverture du dossier.D’un côté, ils veulent connaître les nomsde ceux qui ont gangréné le secteur del’intérieur, empêchant toute possibilité deliberté d’expression et d’épanouissementpersonnel et d’un autre, ayant abattu la co-lère populaire sur les médias. Au-jourd’hui, des journalistes honnêtes sefont agresser, insulter, sont chassés deslieux de couverture des événements etsont accusés d’appartenir aux «médias dela honte» à cause de leurs collègues incri-minés.Les anciens militants, la population, l’élite

tous veulent connaître les noms de ceuxqui ont nourri le système et qui ont trahileur profession en étouffant la possibilitéde toute revendication et réclament ledroit de savoir. Mais la nouvelle de la sor-tie du livre ne comble pas ces attentes etpour cause, un véritable court-circuit a étéopéré par cette publication.

État de droitLe président provisoire, « ancien militantdes droits de l’Homme » et ayant toujoursvanté les mérites de la justice transition-nelle, a trouvé en la publication d’un pa-reil livre, la possibilité de faire passer ce

''Le Système de propagande sous Ben Ali'' ou la «liste noire» des journalistes

corrompus, longtemps attendue par tous, vient de tomber ! Il ne s’agit pas

d’une liste établie par le syndicat des journalistes, pas plus que d’une

publication réalisée par le ministère de la Justice transitionnelle, mais d’un livre

édité par la présidence provisoire de la République !

De nombreuses personnes ont été surprises de voir le livre présenté par Salah

Attia, zeélateur réputé de Leila Ben Ali et du régime déchu, sur une chaîne de

télévision, Al Motawasset, connue pour être proche de la Troïka…

actuel

Une honte pour la République

Le “Livre noir” de la Présidence

8 - Réalités - N°1458 - du 5 au 11/12/2013

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du 5 au 11/12/2013 - N°1458 - Réalités - 9

actuelEN COUVERTURE

Beaucoup pensent que le SNJT a fortement réagi à lapublication du Livre Noir, car il avait demandé d’avoiraccès à l’archive des journalistes impliqués dans le sys-tème Ben Ali et la Présidence avait refusé.

Nous avons une position de principe : le SNJT est contre letraitement de l’archive, qui est la propriété de tout le peuple tu-nisien, par une institution ou une personne ou un parti. Cetteopération ne peut avoir lieu en dehors du système de la justicetransitionnelle et via des experts. Ces deux conditions n’étantpas réunies, cela met en doute la crédibilité de ce livre, d’autantplus qu’il y a eu des gens qui servaient le régime de Ben Ali etdont les noms n’ont pas été cités. On se demande alors quelssont les critères de sélection des journalistes cités dans le livre?En ce qui concerne le contenu lui-même, nous ne nions pas quece bouquin contienne des vérités, mais elles auraient dû êtretraitées autrement. En plus, nous avons noté que certaines in-formations étaient fausses ou exagérées. On ne peut pas mettresur un même pied d’égalité quelqu’un qui a écrit un seul articledans sa vie où il faisait l’éloge de Ben Ali et un autre qui apassé vingt ans à servir l’ancien régime !

Comment jugez-vous cette action de la part du présidentde la République et quel est son objectif selon vous ?

Tout d’abord, nous voudrions comprendre pourquoi Le LivreNoir ne concerne que les journalistes. Il y a aussi des avocats,des juges, des hommes d’affaires qui ont servi l’ancien régime.Ce livre pourrait être une introduction pour dévoiler la véritésur l’appareil de propagande de Ben Ali, mais cette affaire nedevrait pas être traitée de cette manière. Car elle concerne toutun pays. Il est impossible de la résoudre dans le cadre de rè-glements de comptes entre partis politiques ou pour servir unecampagne présidentielle avant l’heure, entreprise par MoncefMarzouki.

Le SNJT a demandé maintes fois d’avoir une copie de laliste noire des journalistes ayant servi le régime, mais laPrésidence ne vous l’a pas donnée, pourquoi ?

À maintes reprises nous avons demandé à la Présidence denous fournir cette liste et non l’archive retrouvée dans le Palais.Pour nous, il s’agissait d’une couverture pour le syndicat quandil allait la publier. Je me rappelle qu’Ayoub Massoudi, l’ancienconseiller du président, m’avait montré une partie de cette ar-chive et je lui avais formulé cette demande. À chaque fois nousavons reçu de la Présidence des promesses qui n’ont jamais ététenues.

Êtes-vous convaincue que, malgré tout, il est nécessairede publier la liste noire des journalistes ayant servi l’an-cien régime ?

Nous avons besoin de connaître ceux qui avaient servi ce sys-tème, mais cela doit se faire dans le cadre de la loi sur la justicetransitionnelle, laquelle n’a toujours pas vu le jour. Nous récla-mons que toute l’archive trouvée à la présidence soit révéléeet pas seulement la partie mise dans le livre. Il faut aussi dé-voiler l’archive du ministère de l’Intérieur, du RCD et de l’ex-ministère de l’Information, relative à ce système depropagande.Nous estimons que le rôle d’un président de la République estde conserver l’archive et de la donner à la justice, au lieu del’utiliser comme instrument de chantage. Le chef du gouver-nement et le ministre de l’Intérieur devraient faire de même.

Allez-vous entamer des actions concrètes après la publi-cation du livre ?

Nous n’allons pas lui donner davantage de valeur. Il s’agitd’une analyse partielle de l’archive trouvée au Palais. Il y a desgens qui sont cités et qui sont réellement impliqués et d’autresqui n’ont même pas été mentionnés.

Propos recueillis par H.Z.

Néjiba Hamrouni, Présidente du SNJT

«Le Livre Noir sert la campagne présidentielle de Marzouki avant l’heure»

Le Syndicat national des journalistes tunisiens

(SNJT) n’a pas tardé à réagir à la suite de la

publication du Livre Noir de Moncef Marzouki.

Pour Néjiba Hamrouni, sa présidente, il s’agit

d’une analyse incomplète de l’archive trouvée

au Palais et une tentative de la part du

président de la République de régler ses

comptes et de faire sa propre propagande.

qu’il n’a pu réaliser par les lois. Mais il aoublié que l’exigence d’ouvrir le dossierdes journalistes corrompus vient de l’as-piration des Tunisiens à construire un Étatde droit. Or, dans un État de droit, accuser

les gens de corruption ne se passe pas endehors des tribunaux, mais via la voie dela justice. Il passe ainsi outre les fonda-mentaux des Droits de l’Homme et afficheun total mépris des lois et des institutions

en publiant une liste de personnes n’étantpas passées devant le juge ni ayant pujouir de leur droit à la défense. Le président provisoire fait preuve égale-ment d’un dépassement inacceptable dans

Page 3: Livre noir une honte pour la république

actuel

10 - Réalités - N°1458 - du 5 au 11/12/2013

un pays ayant connu une Révolution :celui du pouvoir exécutif qui s’immiscedans la justice. Le ministère de la Justicetransitionnelle est ainsi court-circuité. Leprésident provisoire – éditeur – court-cir-cuite aussi le syndicat des journalistes tu-nisiens… Il a également ouvert, en collabora-

tion avec son bureau de presse et lespersonnes ayant participé à l’élabo-ration du livre, une archive qui de-vait être consultée par un comitéspécial désigné pour trancher danscette affaire et composé d’historiens,d’hommes de loi et de médias. Tant d’infractions commises par le Prési-

dent provisoire dans cette publicationdans un pays qui se veut démocrate… Pisencore le Président tente, à travers celivre, de gagner des voix et de se faire«apprécier» , dans un geste plutôt popu-liste et irréfléchi dans une période de criseoù le citoyen perd confiance en la classepolitique.

Réponse du Taïeb Zahar, président de la Fédération tunisienne des directeurs de journaux

“L’opinion publique saura discerner le mensongede la vérité”

« Le livre constitue un véritableblanchissement de nombreuses

personnes impliquées et dont le nomn’a pas été cité. Il témoigne d’une bas-sesse politique jamais constatée aupa-ravant, surtout venant d’une personnequi se targue d’être militante en Droitsde l’Homme mais qui, en éditant cetteliste, ne respecte ni la loi ni l’éthique. Iln’y a jamais eu recours à ce genre deprocédure par le passé. Nous n’avonsnon plus jamais connu autant de diffa-mations dans les journaux comme on enconnaît depuis deux ans sans aucuneréaction de la part du locataire intéri-maire de Carthage. Dans un édito paru en 2011, nous avonsexigé l’ouverture du dossier de la cor-ruption et nous continuons aujourd’huià exiger de faire la lumière sur le finan-cement occulte qui arrose la presse etqui vient de milieux douteux. Jamais auparavant on n’a essayé defaire mesure de rétention sur la pressepour la mettre à genoux sur le plan fi-nancier, telle la suppression des abon-nements publics, et par l’absence detransparence et d’équité dans la distri-bution de la publicité publique. Ontrouve aujourd’hui le moyen de sortirun torchon rempli de contre vérités etde mensonges qui fait honte au prési-dent et à tout le pays. Aujourd’hui nous exigeons que ces ar-chives soient remises à la justice et nonpas livré à l’apanage d’un clan pour ré-gler des comptes partisans.De toutes les façons, l’opinion publiquesaura discerner le mensonge de la vé-

rité. Au niveau de la fédération, nousnous réservons toutes les mesures lé-gales et avons tous les droits, par la loi,de défendre notre dignité et de faireéclore la vérité.Et M. Zahar de poursuivre : « Nousn’avons pas attendu la sortie de ce tor-chon truffé de calomnies et de men-songes pour réclamer la lumière sur lecomportement concussionnaire de cer-tains journalistes qui ont usé et abusé dutemps de l’ancien régime et qui au-jourd’hui sont “récupérés” par la Troïkapour continuer à faire leur sale boulot.C’est ce qui vaut probablement à “Réa-lités” d’être à “l’honneur”.Je souhaite rappeler les termes del’édito que j’ai signé dans notre éditionn°1317 du 24 mars 2011 qui porte letitre : «ATCE et Police Politique : ledevoir de vérité ! » :« Il me parait évi-dent d’affirmer que la presse tuni-sienne, tout medias confondus, est entrain de jouer un rôle déterminant dansla réussite de la transition démocra-tique. Toutefois, pour se réconcilieravec l’opinion publique et conquérirson rang de quatrième pouvoir, il luifaudrait solder le lourd legs du passé.Car si un secteur est sorti sinistré des23 ans de pouvoir de Ben Ali, c’est biencelui de l’information. Pour les direc-teurs de publications, le choix étaitclair, soit se soumettre au diktat de Ab-delwaheb Abdallah et faire de la languede bois la seule ligne de conduite et duharcèlement des démocrates le sport fa-vori, soit d’essayer de résister en privi-légiant un journalisme respectueux de

la déontologie et de ses lecteurs et s’at-tirer par voie de conséquence les fou-dres de guerre du Pouvoir. Vousdevenez de fait l’ennemi à abattre. Réa-lités a toujours adopté une attitudedigne et en conformité avec ses prin-cipes de respect de la liberté d’expres-sion. Des compromis oui, descompromissions jamais. Nous avonssouvent dû payer un lourd tribu pournotre indépendance. Nos fidèles lec-teurs pourront en témoigner. Bientôtnous publierons pour ceux qui n’ontpas eu l’opportunité de nous lire, et enparticulier les jeunes, des articles parustout au long des trente deux annéesd’existence de notre journal et qui ontsuscité de la part du pouvoir des sanc-tions allant de la suspension de six moisà la saisie du numéro incriminé, enpassant par des périodes plus au moinslongues de privation de publicité etd’abonnements publics. Pressions fi-nancières (même si nous n’avions ja-mais bénéficié de plus d’une page depublicité par numéro, alors que d’autresen avaient dix fois plus et employaientdix fois moins de journalistes) maiségalement pressions politiques intolé-rables. Si aujourd’hui j’ai décidé d’enparler, ce n’est pas pour rechercher unequelconque reconnaissance pour Réali-tés, mais plutôt pour demander descomptes à ceux qui ont mis en place etutilisé un instrument (l’Agence Tuni-sienne de Communication Extérieure)créée dans le seul but de vassaliser lapresse libre. Le député Mohamed Ya-hiaoui ne s’est guère trompé en quali-

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du 5 au 11/12/2013 - N°1458 - Réalités - 11

EN COUVERTURE actuel

Les articles rédigéspar Moncef Marzouki en soutien à Ben Ali

L’arroseur arrosé Et si l’on voulait procéder dans cette lo-gique de délation sur laquelle s’est ap-puyée la présidence et ses collaborateursdans l’élaboration du livre, nous décou-vrirons rapidement que le nom du prési-dent provisoire Moncef Marzouki

figurerait en tout mérite sur la liste enquestion. Ainsi, lui qui a toujours assurés’être toujours opposé à Ben Ali, a écritdans un article titré « Pour que réussisel’élève la Tunisie » et paru le 25 mars1989 sur les pages d’Essabah : «Pour queviennent ces 99% non pas en réveillanten nous l’ironie mais pour exprimer laconfiance que nous avons en l’homme duconsensus, pour qu’il soit le président detous les Tunisiens et non pas celui desuns et pas des autres et de l’attente quecette confiance soit réciproque ». En matière d’articles, les phrases ci-des-sus citées, parues en soutien à l’ancienprésident Ben Ali à la veille des électionsd’avril 1989, ne constituent nullement uneexception puisqu’il avait publié d’autresécrits allant dans le même sens. Ainsi, si nous voulions passer outre lemépris des lois et des droits dont le pré-sident se réclame, et supposons mêmeque le droit lui revenait d’écrire au-jourd’hui pareil livre, en consultant lespages, l’on constate qu’il tombe lui-même dans une campagne de diffamation

qu’il dirige à l’encontre de ceux qu’ilcite. Il éclabousse la réputation de per-sonnes innocentes et omet de citer cellesqui sont fortement et publiquement im-pliquées…

Menaces Outre les dépassements commis et le faitde tenter, via ce livre, de manipuler l’opi-nion dans la promotion de sa propreimage, le Président met en danger la viedes personnes citées. On ne peut trancherde l’acquittement ou de l’implication despersonnes dont le nom a été publié, carcela nécessiterait une procédure judi-ciaire, mais la certitude est que certainesd’entre elles peuvent être agressées, har-celées, si ce n’est pire…Le président aura choisi une période d’in-sécurité, où nous avons connu deux assas-sinats politiques et où des listes dejournalistes menacés de mort sont éta-blies, afin d’en rajouter «une couche» etd’offrir à qui le souhaite le prétexte de delégitimer ses violences. …

Hajer Ajroudi

Réponse du Taïeb Zahar, président de la Fédération tunisienne des directeurs de journaux

“L’opinion publique saura discerner le mensongede la vérité”

fiant l’ATCE, au moment de sa créa-tion en 1990, d’outil de propagandedigne de l’Allemagne Nazi et deGoebbels. D’ailleurs suite à sa décla-ration, Ben Ali décida de boycotter lacérémonie de célébration de la fête dela République. Aujourd’hui, si l’onveut définitivement tourner la page etconstruire une presse digne de la Ré-volution, il faut que les Tunisiens sa-chent comment a été dépensé leurargent. Sur quels critères cette publi-cité publique a été distribuée aussibien aux journaux locaux qu’aux jour-naux étrangers, et pour quels usages ?Quels étaient les mercenaires qui ontbénéficié de sommes d’argent pourfaire de la désinformation ou harcelerles opposants ? Beaucoup de sur-prises nous attendent, mais pour celail faut que les pouvoirs publics jouentle jeu de la transparence. De même, etloin de nous l’idée d’instaurer unechasse aux sorcières, il me paraît im-pératif, au moment où nous venonsjuste de dissoudre la Police Politique,de voir quels étaient les «confrères»qui étaient payés pour faire de la déla-tion. Certains faisaient des rapportsquotidiens en contrepartie d’avantagesde toutes sortes. C’est à ce prix seule-ment qu’on parlera d’assainissementdu secteur et qu’on pourra distinguerle bon grain de l’ivraie. C’est à ce prixenfin que nous distinguerons les vraisjournalistes des mercenaires qui, pro-fitant de cette révolution, tentent de seretrouver une nouvelle virginité. Nousexigeons la vérité ».

Page 5: Livre noir une honte pour la république

14 - RéAlités - N°1458 du 5 au 11/12/2013

Actuel

Fondatrice, en 1936, de l’Union

musulmane des femmes de

Tunisie, Ben Bchira M’rad, filleule

d’illustres cheikhs d’Islam, a entamé le

militantisme âgée d’à peine 22 ans,

quelques années plus tôt, par la simple

initiative d’une soirée de dons.

Loin de l’extrémisme ou de l’agressivité

d’un féminisme moderne, Bchira Ben

M’Rad a caressé le rêve d’une société où

hommes et femmes pouvaient avancer

ensemble. Avant que le sujet des droits de

la femme ne soit évoqué dans d’autres

pays occidentaux, elle a commencé à

bâtir la société dont elle rêvait en Tunisie,

alors colonisée.

Elle a milité tout d’abord pour améliorer

les conditions de la femme tunisienne,

pour arracher son droit à l’éducation,

elle-même ayant joui d’une éduction

rarement disponible aux femmes de sa

génération.

Bchira Ben M’Rad n’a pas seulement

pensé à l’éducation des mères, mais aus-

si aux enfants de la patrie qui étaient

également un peu les siens. Elle collec-

tait les dons, voire fournissait son propre

argent pour aider les étudiants à l’étran-

ger à poursuivre leur cursus universitai-

re. Cette générosité naturelle venant

d’une femme qui, dans un noble geste de

pardon, a offert l’héritage légué par son

Bchira Ben M’Rad

Sur un écran au Théâtre muni-

cipal nous pouvions voir la

photo, en noir et blanc, d’une

femme dont le visage exprime

la volonté et la force. Un souri-

re se dessine sur ses lèvres et

son regard et déterminé…

C’est feu Bchira Ben M’rad,

militante des Droits de la fem-

me à une époque où la femme

tunisienne était reléguée au

rang d’objet. Née en 1913 et

décédée en 1993, c’est

dimanche 1er décembre, au

théâtre municipal, que de nom-

breuses personnalités,

hommes et femmes, sont

venues célébrer son centenai-

re. Ils sont venus rendre hom-

mage à celle qui voua sa vie à

l’émancipation des femmes

tunisiennes et à leur libération

du joug de l’ignorance.

Quand les jeunes découvrent une phase lumineusede leur histoire !

L’éternelle…

Bchira Ben M’Rad, une icône du militantisme féminin

Page 6: Livre noir une honte pour la république

du 5 au 11/12/2013 - N° 1458 - RéAlités - 15

NATION Actuel

mari à ses enfants d’une autre femme,

découverts après sa mort, n’étonne pas.

Car à cette bonté naturelle s’ajoutait la

clairvoyance et la conviction que la

Tunisie ne pouvait obtenir son indépen-

dance sans une jeunesse éduquée et

diplômée. Son combat d’alors n’excluait

pas les hommes, mais si elle les soute-

nait par les dons financiers, elle se sacri-

fiait presque pour les femmes et leur

émancipation.

Convaincue également que les femmes

devraient participer à l’Indépendance,

elle fut parmi les premières à être d’une

façon ou d’une autre sur les rangs. Sans

porter les armes, elle fut une menace et

les autorités françaises ne tardèrent pas à

le savoir et à agir en conséquence. Ainsi,

à une époque où la réputation de la fem-

me était d’une telle fragilité que le simple

fait de sortir même pouvait l’anéantir,

elle ne s’est point retirée malgré les arres-

tations et l’emprisonnement.

Bchira M’Rad, qui échappa à l’exil lors

de sa lutte pour l’Indépendance, eut à le

subir après sa proclamation. La femme

qui avait lutté contre les ténèbres et qui

avait ouvert la porte à ses compatriotes

pour qu’elles puissent s’épanouir dans la

lumière, se retrouva alors dans la

«chambre noire» «Bit Dhlem»… exilée

sans avoir quitté la Tunisie, oubliée par

ceux qu’elle avait soutenus, trahie

presque par ceux en qui elle avait cru…

Les dizaines d’années que cette militante

a dû passer dans les oubliettes n’ont pour-

tant effacé ni son souvenir, ni

la grandeur de son œuvre, ni

même la gratitude qu’éprou-

vent des gens qui ne l’ont pas

connue, mais qui savent que

c’est en partie grâce à elle et à

des militantes de sa trempe

que les droits ont été octroyés

et l’éducation a pu être diffé-

rente et riche.

Alors, quand la voix suave de

Sonia M’Barek s’est mise à

déchirer le silence du théâtre

municipal cantonnant «la per-

le», tous ont eu une pensée

émue et reconnaissante pour

Bchira Ben M’Rad qui n’a

certes pas été présente pour

assister à un pareil hommage,

mais dont le souvenir sera

éternel chez les générations

tunisiennes.

Hajer AjroudiDe nombreuses personnalités ont assisté au centenaire de Bchira Ben M’Rad

Une équipe provenant de générations différentes a animé la cérémonie

Page 7: Livre noir une honte pour la république

16 - RéAlités - N°1458 - du 5 au 11/12/2013

Actuel

Décidés le 4 novembre dernier, lesamendements introduits sur les ar-ticles 38 et 79 du règlement interne

de l’Assemblée constituante (ANC) ontété annulés le 27 du même mois. D’autresmodifications apportées aux articles 106 et126 ont par contre été maintenues. Un vif débat national et politique a été pro-voqué par ces amendements. L’oppositiona souligné qu’ils servent l’intérêt d’Ennah-dha et lui octroie plus de pouvoir au seinde l’ANC. Hormis les amendements effec-tués sur l’article 106 prévoyant d’accélérerle rythme de l’ANC et l’adoption de laConstitution, ceux ayant touché les autresarticles ont été rejetés, provocant le boy-cott de la part de l’opposition. Ettakatol, partenaire dans la Troïka, a éga-lement exprimé son refus des mêmes mo-difications, notamment celles touchant àl’article 79, jugeant qu’elles visent parti-culièrement le président du parti et del’ANC, Mustapha Ben Jâafer. Après presque trois semaines de négocia-tions, le 27 novembre 2013, l’ANC a an-nulé lors d’une séance plénière lesamendements apportés aux articles 36 et79. Le vote a été emporté grâce à 150 voixappuyant le retrait contre 49 objections et

14 abstentions. On semble alors avoir dépassé le blo-cage… Néanmoins, les amendements ont été ap-portés lors d’une période critique où quar-tet, opposition et gouvernement essayaientde trouver un terrain d’entente pour pou-voir avancer sur le terrain du dialogue na-tional. L’issue de ce dialogue aurait limitéle pouvoir d’Ennahdha puisqu’elle auraitabouti à un nouveau gouvernement consti-tué de technocrates indépendants. Le partiau pouvoir aurait alors cherché à s’assurerplus de pouvoir à travers l’ANC, institu-tion dont la dissolution fut en été exigée,mais que la Troïka a «réussi à sauver.» Est-ce le blocage du dialogue qui aurait,en cas de réussite, limité le pouvoir d’En-nahdha, qui a rassuré le parti islamiste etl’a incité à revenir sur les amendementspour ne pas ouvrir plusieurs fronts aumême moment ? Sahbi Atig a par ailleurs déclaré qu’En-nahdha «revient sur les amendements pourrenforcer le consensus et faire aboutir ledialogue national et la transition démocra-tique». Ennahdha ne semble donc plusavoir besoin de ces amendements puisquele parti est toujours en place dans le gou-vernement et fait preuve de bonne foi enrevenant sur ces modifications. Mais, en-core une fois, le pays en pleine crise perdun temps précieux à résoudre des pro-blèmes aléatoires et collatéraux.La situation à l’ANC ne s’améliore paspour autant puisque l’Assemblée n’est pasencore sortie de l’impasse. Ainsi, même sile différend autour des amendements a étérésolu, la question de l’ISIE demeurefigée. En effet, le tribunal administratif a annulépour la troisième fois les travaux de lacommission chargée du tri des candida-tures. Les raisons de l’annulation sont«non-conformité à la grille d’évaluationdes candidatures à l’ISIE» et «défaut depromulgation et publication de la loi orga-nique sur l’ISIE II au JORT.»La commission menace de son côté d’ins-taurer une loi, en dernier recours, empê-chant le tribunal d’annuler ses proprestravaux. Outre l’impasse concernant l’ISIE, dont laconstitution est l’un des points de la feuillede route proposée par le Quartet, d’autresblocages parsèment le dialogue national,déclaré par ailleurs cliniquement mort parLazher Akremi.

Dialogue national en réanimation Depuis deux semaines dure le blocage, àcause de la personnalité du chef du gou-vernement, et à l’heure actuelle plus per-sonne ou presque n’y croit. Rappelons quele gouvernement et l’opposition se sont re-trouvés au point mort, les premiers soute-nant la candidature d’Ahmed Mestiri et lesderniers la rejetant. Abdessatar Ben Moussa, président de laLigue des Droits de l’Homme en Tunisie,membre du Quartet, a proposé une solu-tion «neutre», à savoir laisser aux quatreorganismes initiateurs du dialogue le choixdu nouveau chef de gouvernement. La solution pourrait en effet dénouer la si-tuation à défaut d’un refus par les uns oules autres du nom qui sera proposé. Néanmoins le dialogue national entamémalgré maints obstacles se déroule de plusen plus dans une ambiance plombée par laméfiance. Lazhar Akermi a souligné danssa déclaration à Mosaïque FM que la rai-son de la mort du dialogue national est lemanque de confiance entre les différentspartis. Quant à Yassine Ibrahim, il a dé-montré que la crise autour du nom du chefdu gouvernement prouve l’irréalisme et lemanque de pragmatisme des acteurs poli-tiques et des forces syndicales. Il est alors difficile de croire en une possi-bilité de réanimation du processus du dia-logue, même si le quartet peut encore yapporter une solution en proposant unnom.En attendant le dénouement, la situationsécuritaire est plus précaire que jamais.Sahbi Jouini, chargé des affaires juridiquesauprès de l’Union nationale des syndicatsdes forces de sûreté (UNSFS) a déclaré ily a quelques jours que 2 tonnes d’explosifsont été saisis et que la situation ne présagerien de bon. Il a souligné par ailleurs queles autorités n’ont pas encore commencé àlutter contre le terrorisme. D’un autre côté, l’effondrement écono-mique et l’approche des dates commémo-ratives de la Révolution des 17 décembre2010 – 14 janvier 2011 alimentent les ten-sions et les revendications socio-poli-tiques. Aujourd’hui et plus que jamais, ledialogue national devrait aboutir à des pré-mices de solution, quant à l’ANC, elle de-vrait commencer à présenter des projets etdes institutions concrets et finis…

Hajer Ajroudi

Entre amendements et blocages

Situation politique

Au moment où les différentes

parties se réunissaient, entamant

un dialogue qui peine, des

amendements ont été effectués

au niveau du règlement interne

de l’ANC. Le blocage et la

méfiance régnant sur le dialogue

national se sont alors propagés

au sein de l’Assemblée. D’un

côté, Ennahdha insistait pour

imposer Ahmed Mestiri, ce qui a

été jugé par certains comme une

tentative d’installer au pouvoir

quelqu’un sur qui le parti aurait

de l’influence et, de l’autre,

apportait des modifications

pouvant lui octroyer plus de

pouvoir au sein de l’ANC. Des

deux côtés, Ennahdha semblait

ne pas vouloir lâcher le pouvoir,

mais aussi gagner du temps en

cultivant la diversion…

Décryptage

Page 8: Livre noir une honte pour la république

26 - RéAlités - N°1458 - du 5 au 11/12/2013

Actuel

Du festival international du film deMarrakech, inauguré par l’actriceaméricaine, Sharon Stone,ven-

dredi dernier, au forum maroco-russe, ex-pression d’une diplomatie active, le Marocdonne l’impression d’être le seul pays duMaghreb à stable et sûr de lui-même. Une cinquantaine d’entreprises russes par-ticipent par exemple, entre le 1er et le 4décembre, au forum organisé par leConseil d’affaires maroco-russe, présidépar Hassan Sentissi El Idrissi du côté ma-

rocain, en partenariat avec Maroc Exportet l’ASMEX (Association marocaine desexportateurs.)L’objectif est de démontrer les opportuni-tés et les leviers de croissance que peut of-frir le Maroc en tant que marché et passagevers l’Afrique.De même que le royaume veut constituerune opportunité pour les asiatiques et en-tend être «leur carrefour». Ainsi se sontréunis les 21 et 22 novembre les hommesd’affaires marocains et asiatiques à Skhi-

rate pour discuter des opportunités de par-tenariat entre les deux continents, africainet asiatique, en faisant du Maroc le pointde passage pour l’Afrique. La Chine, quiest le 4e partenaire du Maroc, a par ailleursété l’invité d’honneur de la rencontre. Avec l’Espagne, le royaume vient deconclure la création d’un comité straté-gique présidé par les deux chefs des ser-vices de sécurité, Bouchaib Rmail etIgnacio Cosido. Une réunion ordinaire estorganisée d’une façon annuelle et des ren-contres peuvent être tenues entre les deuxchefs respectifs à n’importe quel momentsi besoin est. Rappelons que les attentatsdu 11 mars 2004 à Madrid ont ouvert laporte à une collaboration maroco-espa-gnole en matière de sécurité. Le comité entend aussi renforcer la luttecontre l’immigration illégale et le terro-risme.

Sur tous les fronts

Maroc

Le Maroc continue à s’imposer dans la région. Cinéma, industrie,économie, opportunités d’investissements, tourisme et partenairiatdans la lutte contre le terrorisme, en constituent les points de force.Appuyé par Washington dans son plan d’autonomie du Sahara etconsidéré comme un allié stratégique au Maghreb, le royaume setrouve aujourd’hui sur tous les fronts…

Inauguré par l’actrice américaine, Sharon Stone, le Festival international

du film de Marrakech fait du Marocl’une des capitales du cinéma mondial

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du 5 au 11/12/2013 - N°1458 - RéAlités - 27

Convergence de vues ?

Algérie/France

MAGHREB Actuel

Dans le cadre d’un entretien accordé à Al Watan, Hélène Le Gal,conseillère Afrique à la présidence de la République française quiétait à Alger dans le cadre de la préparation du sommet Elysée –Afrique sur la paix et la sécurité, a déclaré que la France et l’Al-gérie avaient des préoccupations et des défis communs.Le dossier du Sahara occidental, discuté entre Obama et le mo-narque Mohamed VI, est également l’un des sujets étudié entrele ministre des Affaires étrangères algérien Lamamra, le ministredélégué chargé des Affaires maghrébines et africaines Bouguerraet Le Gal. La sécurité et les frontières sont également au cœur

des discussions, notamment avec la dégradation de la situationau Mali, en Libye et au Niger. L’éradication des groupes terro-ristes et de l’AQMI sont, selon Le Gal, l’un des enjeux communs,ainsi que la lutte contre le trafic de drogue aux frontières. L’éco-nomie et le développement ont également été évoqués dans lesréunions entre les représentants des deux diplomaties.

Face au rapprochement Rabat – Washington,l’Algérie conserve «sa ligne diplomatique» etcontinue à travailler en étroite collaborationavec la France. Les sujets discutés entre leprésident américain et le souverain marocainreflètent les mêmes enjeux qui animent laFrance et l’Algérie.

Libye

Zone de grandes turbulences

Ainsi, un soldat des forces spéciales aété tué par balles en fin de semaine.

Le quartier général de la section a été éga-lement attaqué par des assaillants dispo-

sant de minianti-chars, deroquettes RPGet de mitrail-lettes. Les groupesterroristes s’enprennent àl’armée dansun affronte-ment dont quivise la destruc-tion de l’ÉtatLibyen, si lalutte était em-portée par lesdjihadistes, ou

le début de la fin des troubles pour les Li-byens, si l’armée et les forces de l’ordrel’emportaient. La Libye devient également une menacepour la région. Les cellules qui y sont ins-tallées représentent une expansion decelles du Mali et du Niger. La Tunisie etl’Algérie peuvent payer le prix d’un ren-forcement interterritorial de l’AQMI et lesfrontières des deux pays du Maghreb sontmenacées. Ansar Alchariaa, combattant actuellementen Libye et dont les hommes opèrent éga-lement en Tunisie, représente la plusgrande menace la Tunisie surtout avecl’implication de puissances qui, en com-battant l’organisation en Libye, et la pous-sent à chercher refuge en Tunisie.

Hajer Ajroudi

Hélène Le Gal

En Libye, comme en Tunisie, les combattants d’Ansar Achariaareprésentent une menace sérieuse pour toute la région

Un semblant de dénouement de la crise sécuritaire s’est fait ressentir la semaine dernière, maispour peu de temps. La Libye, dont le facteur tribal alimente les frictions et les clivages, continued’être la proie des différents clans qui s’y affrontent. Avec l’implantation des cellules de l’AQMI, lafragilité des institutions de l’État, dont celle de la sécurité, et l’artillerie dont dispose les milices, lasituation se fait difficile à contrôler.

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MONDEactuel

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Dimanche, le gouvernement a dé-crété une loi exigeant une autori-sation délivrée par la police pour

pouvoir manifester. La demande de l’au-torisation devra être présentée trois joursavant le rassemblement et comporter lelieu et la trajectoire de la manifestation, lesrevendications, mais aussi les slogans quiy seront scandés. Les réseaux sociaux égyptiens se sont viteenflammés, jugeant cette initiative commeun retour à l’ère de la dictature. Les Égyp-tiens sortis protester avant le 2011 pourlutter ne l’ont pas fait uniquement contrele régime de Moubarek, mais égalementcontre le pouvoir militaire et l’État d’ur-gence dont ils subissaient les abus. La loi promulguée stipule par ailleurs queles autorités peuvent interdire certainesmanifestations pouvant représenter unemenace à la sécurité publique. Elle leurpermet de sévir contre les contrevenants etd’user de répression policière violente en

cas de rassemblement. Le port de cagoule,tout comme le port d’arme lors de mani-festations seront punis d’un an à cinq ansde prison. Dans le cadre de l’utilisationgraduée de la force en cas de violence dela part des manifestants, les forces de l’or-dre peuvent user d’avertissements, tirs dechevrotine, canons à eau, matraques et gazlacrymogène. Aujourd’hui certains mili-tants expliquent que la loi tend à les em-pêcher de protester, surtout à la veille d’unreferendum national sur les amendementsapportés à la Constitution. Le comité des 50 se chargeant de la révision

de la Constitution a entamé samedi le votefinal sur la nouvelle loi fondamentale. Ellesera ensuite soumise à référendum. Certainsarticles sont déjà critiqués pour avoir main-tenu les privilèges de l’armée, tel le juge-ment d’un civil par les militaires ou le droitde regard sur la nomination du ministre dela Défense pendant deux mandants. De son côté, le gouvernement égyptiensoutient que la loi a été adoptée pour orga-niser l’exercice de ce droit, sauvegarder lapaix civile et mettre fin aux manifestationspro-Morsi.

H.A.

Une loi sur le droit de manifester

attise les controverses

Égypte

La semaine dernière, l’Égypte ade nouveau connu de violentsaffrontements entre manifestantset forces de l’ordre. Jeudi, unétudiant a été tué lors d’unemanifestation des pro-Morsi, leprésident déchu. Néanmoins lesmanifestations ont continué,ainsi que les violences.Seulement, cette fois-ci, les«révoltés» ne se limitent plusaux islamistes. Deux visageslaïcs connus de la Révolution de2011 ont été arrêtés : Alaa AbdelFattah et Ahmed Maher,fondateur du mouvement «6 avril». Aujourd’hui lesmilitants égyptiens sortent denouveau dans la rue protestantcontre la loi relative auxmanifestations.

Violents affrontements entre forces de l’ordreet manifestants refusant la loi relative

aux manifestations

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du 5 au 11/12/2013 - N° 1458 - RÉalitÉs - 41

ACTUALITÉS Économie

Aujourd’hui, certes les langues se sontdéliées et il est plus facile de dénoncerdes crimes, mais il est impératif demettre en place un observatoire spécia-lisé qui aura la mission de gérer ces dos-siers. Bien qu’on soit toujours dans lethéorique, à travers le CTAF, le pôlejuridique et financier pourrait être l’ins-titution adéquate. Ceci dit, ce pôle inter-vient après coup, il nous faudra doncune institution qui permet d’agir enamont pour la prévention contre le blan-chiment d’argent. Ceci est indispensablelors des appels d’offres. D’ailleurs, laTunisie a failli vendre les parts de laBanque de Tunisie à un donds suspect, ils’agit d’un Fonds de Luxembourg dontles sources de financement étaientinconnues. À l’échelle internationale,sur le marché mondial, une affaire deblanchiment d’argent, à travers unesociété écran implantée en Tunisie, a étédémasquée. Deux millions d’euros ontété gelés et l’affaire est actuellemententre les mains du Pôle juridique etfinancier.

Comment prévenir

le blanchiment d’argent Les moyens de prévention du blanchi-ment d’argent sont multiples mais diffi-ciles à réaliser actuellement dans l’envi-ronnement d’insécurité qui règne dans lepays. Une mesure serait efficace dansl’immédiat et qui a été saluée par l’Ordredes experts comptables et faisant partiede la loi des Finances de 2014. Cettemesure propose de baisser les transac-tions cash à moins de 20.000 dinars.Cela permettra de baisser le flux illicited’argent. Abderrahman Ladgham, min-istre auprès du chef du gouvernementchargé de la Gouvernance et de la luttecontre la corruption, insiste sur le ren-forcement du cadre juridique, la diffu-sion de la culture de l’honnêteté et l’in-tégrité et la création de nouvelles sourcesde revenus stables. Selon le ministre, ledépartement chargé de la gouvernance etde la lutte contre la corruption a adoptéune démarche globale basée sur l’identi-fication des zones à risques, le renforce-ment de la coordination entre les dif-férents intervenants à l’échelle nationaleet internationale, la réforme des sys-tèmes financier, fiscal, douanier et ban-caire, la protection des divulgateurs, ain-si que le renforcement de la loi sur ladéclaration des biens.

N.J

Une «Compétition

pour la diversité des Genres»

Femmes et intégration économique

La compétition pour la diversitédes genres apportera son appui,

en Tunisie, aux entreprises voulantpromouvoir la mixité. Des expertsinternationaux assisteront ces entre-prises durant 16 mois. En effet, en Tunisie, le taux de chô-mage atteint 22.5% des femmescontre 13.1% pour les hommes. 45%des femmes poursuivent un cursusuniversitaire contre 30% des hommesen Tunisie. 39% des femmes diplô-mées du supérieur sont au chômagecontre 16% des hommes sans travail.Nous comptons seulement une seulefemme sur 10 personnes dans despostes de responsabilité. Elles ne représentent, en Tunisie, que24.3% de l’ensemble de la main-d’œuvre. Dans la situation actuelle, où la déci-sion d’achat dans le monde est prise à85% par des femmes, ce pouvoirféminin devient un atout de compéti-tivité. En effet, les entreprises dominant lemarché sont celles justement ayantfavorisé l’équilibre entre le nombred’hommes et de femmes dans leslieux de travail. Les équipes mixtessont plus performantes et trouventplus facilement réponse aux pro-blèmes posés que des équipes homo-gènes.

Promouvoir la mixitéOutre la culture de l’entreprise quidevrait croître, promouvoir et donnerla chance aux femmes, un appui aucapital féminin s’impose. Ainsi, proposer des modalités de tra-vail souples, prendre en charge lagarde d’enfants ou de personnesâgées en offrant un service de garde-rie ou des cours supplémentaires,offrir des possibilités de mentorat auxjeunes employées, et lutter contre leharcèlement sexuel, optimiseraient lepotentiel féminin et la présence desfemmes dans le marché du travail.Des actions devraient être réaliséesen Tunisie, améliorant l’évolution dela carrière professionnelle desfemmes comme le mentorat, la for-mation, le coaching, la création d’unréservoir de talents et de plans de car-rière pour les employées promet-teuses. Les actions peuvent égale-ment être effectuées dans le dévelop-pement de processus d’évaluation etde promotion transparent et sans pré-jugé de genre, la sensibilisation et laformation des managers en res-sources humaines sur les préjugésliés au genre, la promotion desmodèles de réussite de femmescadres… À suivre.

Hajer Ajroudi

Le programme EconoWin – bureau Tunis (Intégration éco-nomique des femmes dans la région MENA) soutenu par laCoopération internationale allemande GTZ et financé par leministère fédéral de la Coopération économique et duDéveloppement BMZ – a lancé vendredi dernier l’initiative«Compétition pour la diversité des Genres.» L’initiative englobe la Tunisie, l’Égypte, la Jordanie et leMaroc. Huit entreprises et 32 consultants locaux bénéficie-ront de l’appui du programme dans le cadre de l’intégrationéconomique des femmes dans la région MENA, deux pourchaque pays.