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L'Ordre Nouveau

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L'ordre nouveau - Maurice de Wilde - Duculot - 1984

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  • Maurice DE WILDE

    L'Ordre Nouveau

    Tradirit du n~rlrritdais par Jean- Pitrrre Orhan et P ~ t r f Tunneni.i3uld

  • Maurice De Wilde a &t assistk par E. Verhoeyen pour la recherche d'archives et par R. Panis pour la documentation photographique.

    Toutes rcpmducuons ou adaptaiions d'un exiraii qulconquc dc nc livre par :quelque pmckdk que ce soit et notamrncnt par photocopie ou microfilm. tsemes pour tous pay.

    6 Uitgevcrij De Nederlandsche Boekhandel, Antwerpen-Amsterdam, 1982 O tdiiions DUCULOT. Paris-Gernbloux, 1984 (Imprim en Belgique sur les presses Durulo~.)

    ISBN 2-80 1 1-0484- 1 (&ilion originale : ISBN 90-289-9786-5. De NederIandsche Boekhandel.)

  • Avant-propos

    Si on ne le savait pas encore. notre pays est unique h plusieurs gards. Mme dans l'criture de son histoire, I l est frappant en effet de constater - par constraste avec ce qui se passe ailleurs - le peu d'ouvrages publis chez nous propos de certains aspects de la seconde guerre mondiale. surtout la collabora- tion. Nos historiens auraient-ils moins le got du travail qu'ailleurs? Pas du tout. Si les publicalions font dfaut. c'est indubitablement pour une autre rai- son. C'est que depuis 1955, nous sommes gratifis dans ce pays d'une loi. appe- le loi-archives, en vertu de laquelle la consultation des archives ne peut tre exige par un citoyen belge qu'aprs une priode de 100 ans. En toutes lettres : cent ans ! Cela signifie que durant tout un sicle, cette consultation est laisse au bon... ou au mauvais vouloir des instances supkrieures juges seules aptes autoriser ou non I'accs A {( leurs archives. Mme la ginration qu i a connu la guerre et qui, aujourd'hui, disparaii peu peu, ne peut donc connatre l a ralit de son propre pass.

    Une question surgit aussittt : pourquoi. l'inverse de nouveau de ce qui se passe dans les autres pays, doit-on dissimuler si longtemps ce qui a si profond- ment boulevers notre socit l'poque de la seconde guerre mondiale ? Pour- quoi notre population et surtout notre jeunesse doivent-elles tre maintenues dans une telle ignorance de ce qui s'est tram dans les coulisses de la collabora- tion ? On en a fait le reproche aux enseignants et aux coles. C'est dtourner 9 responsabilit des vrais coupables ! Les responsables de cet obscurantisme, cc sont nos lgislateurs qui, $ une unanimit tonnante, ont jug que cette histoire. souvent peu reluisante il est vrai. devait durant cent ans nous tre cache. Et la rkdution sensihle ou la suppression pure et simple des cours d'histoire ne fera qu'aggraver ['ignorance parfois dkroutante que nos jeunes ont du pass. Et pourtant, qui ne sait d'o il vient. ne sait pas non plus oii il va...

    La seule explication possible A cette mise au secret durant tout un sikcle. c'est que beaucoup de choses doivent tre tenues cachees pendant trs long- temps. Et peut-tre pas tellement pour rnknaget ceux d e nos compatriotes qui. pendant la guerre (meme aprs 1940) ont affich ouvertement leur sympathie d

  • t'gard du nazisme : au cours de la seconde guerre mondiale il y a eu en effet ct d'un peu de blanc et d"un peu de noir, tnormment de gris. Par notre enqute, nous :wons voulu. niaIgre tout. relever le dfi. Un dfi que certains ont qualifi d'norme gageure. Pourquoi tenir celte gageure. nous direz-vous? Parce qu'il en va de l'histoire comme de l'actualit : dans Ics deux cas assurer le droit a l'information de noire population esi une tche certes difficile. mais indispensable. I l est vain de proclamer que le pubIic doit tre inform. quand les autorits ne donnent pas les moyens de le faire $ ceux qui en sont chiirgs. Ides plaies ne sont pas encore cicatrises. avnce-t-(in, I'krnotion est encore irop vive. N'cst-il pas grand temps. :iprs quarante ans. de savoir. en toute connais- sance de cause. pourquoi ces htessures ont t infliges de part ci d'autre ?

    Dks lors. ou sommes-nous :ille chercher nos informations? Le Centre de Recherches ct d'tudes Hisioriques de la Seconde Guetrc Mondiale nous a aid dans la mesurc de ses moyens. car l r i aussi on attend que s'ouvrent tous les dossiers de I'Auditorat gnkral. Au Centre. nos premiers remerciements.

    A la Sretk de 1'Eiat. nous avons. durant tout un mois. respeciC scsupu- leusemenl toutes les rgles du jeu subtil qui nous fut impose. Ce qu ne nous a pas empech d'tre mis, sans que nous sachions encore ;iujourd'hui pourquoi. A la porte.

    Heureusement. il restait I'Auditorat gknral. Pendant des annes. il nous a accueilli entre ses murs sotenneIs et nous a appris ce qu'est la patience. Car i l nous f u t prtsent la u n choix bien tudi de documents livres au compte- gouttes. Quoi qu'il en soit. ces documents nous ont t d'une telle utilit que pour la premjcre fois. nous sentions le sol s'affermir sous nos pas. Nous pou- vions donc nous rjouir bnn droit de ce que l'Auditeur gnral de I'tpoque fiit en inertie temps un historien. A lui et 6 ses collriboniteurs. toute notre grati- tude pour avtiir bien voulu nous toltrer si longtemps. Et cela mme si un grand nombre de dossiers nous sont rests ferms. comme celui de la collaboration conomique. pour n'en citer qu'un seul ...

    Le Service des Victimes de la Guerre au ministre de la Sant publique s'est montr efficace ei rkaliste : il nous a transmis tous les dossiers demands.

    Quelques particuliers nous ont ouvert. en tout ou en partie. leurs archives prives. Qu'ils en soient. eux aussi. remercis.

    Ce que nous n'avons pu obtenir en Belgique. nous l'avons reu de notre ancien occupanl, mmr par la poste. Ainsi. nos

  • que Ibn n poursuivie ;i la libration. Cette approche nous paraissait par trop facile. Car les conceptions autoritaires, on ne les retrouve pas uniquement dans les mouvements ouvertement collaborateurs. Elles ont exist aussi, des degrs divers, dans les milieux dirigeants. C'est la raison pour laquelle dans le livre comme dans les missions de tlvision, nous ne nous sommes pas limits A suivre les futurs mouvements collaborateurs. Nous avons voulu aussi savoir comment les milieux dirigeants se sent prtparks l1av6nemeni d'un Ordre Nouveau et A ce qui apparaissait alors comme la fin de la dmocratie, Ensuite comment ces memes milieux ont estim. pendant la guerre. en profitant de l'absence de parlement. de gouvernement et de syndicats, pouvoir raliser les projets autoritaires qu'ils avaient labors avant la guerre. Enfin, lorsqu7iI appa- rut que l'Angleterre ne cderait pas et qu'un trait de paix entre la Belgique et l'Allemagne n'arriverait pas se conclure, comment ces milieux dirigeants firent provisoirement marche arri2re et prparrent. toujours dans une optique autoritaire, ce que devait tre, selon eux, l'avenir de la Belgique aprs la guerre.

    Maurice DE WILDE (Janvier 1984)

    Le lecteur trouvera en f in d'ouvrage une liste des abrviations ainsi qu'un glossaire de la terminologie utilise en allenaund el en nerlandais. Chaque fois qu'un de ces termes apparoir pour la premire fois dans le rexre. on en trou veru la Iraducrion en note infrapaginale.

  • (1) et (2) La milice (Dierse Mititanten Orde) du Verdinaso et (3) le chef de cette milice Joris Van Severen. 3

  • 1 Les petits dictateurs '

    Le soutien allemand aux nationalistes flamands : une constantc

    I I ne faut pas attendre, loin s'en faut, la prise de pouvoir d'Hitler en 1933 pour trouver une volonte allemande d'influence en Belgique, ei particulitre- ment en Flandre. Apres la dtfaite de 1918, des cc amis br allemands a de la Flandre taient rcsts en contact avec des activistes flamands kmigrhs en Allemagne et aux Pays-Ras. C'est le cas, dans une large mesurc. du Dr Robert Oszwald (1883-1945). Attache durant la premise guerrc mondiale Ia section politique dc l'administration d'occupation allemande Bruxelles, il suivit de prs et encouragea m&me l'aventure des activistes. Par la suiic, il resta en rela- tion notarnmcnt avec l'activiste Raf Verhulst migr en Allemagne et fut tres li au Rund der Flamenfreunde (Ligue des Amis de la Flandre) fond6 a Berlin en 1930.

    Les efforts allemands pour exercer une influence en Flandre avant 1933 s'inscrivent dans le contexte gntral dc la politique quc menait I'Allcmagne pour reconqukrir une position de force en Europe. Un des principaux objectifs de cette politique consistait ;1 rirduire l'ascendant politique et culturel de la France. L'aide d Ia presse tait une des mthodes pour y arriver et, h l'evidence, on ne sr fit pas faute de l'utiliser. Ainsi, sur proposition d'Oszwald en 1928. le ministre allemand des AiTaires trangres accorda une subvention annuelle de 3.000 Reichsmark a deux priodiques en dificult, Vlaanderen et Jong Dietsckland, porte-parole de l'aile la plus radicale du mouvement activiste et ce titre. anti-belges et anti-franais rabiques : ils contribuaient a maintenir le prestige de l'Allemagne et soutenaient sa politique revancharde, Peu aprks la prise de pouvoir d'Hitler, le rdacteur en chef de Jang Dietschland. Victor Lee-

    [. Notre propos. dans ce chapitre, n'est pas de traiter I'histoire gknrale des mouvements d'Ordre Nouveau dans les annes trente, mais pluii de mettre en vidence certains aspects jusqu'ici incornus de ces mouvements autoritaires.

  • mans qui. en 1932, avait publi une brochure logieuse sur le national-socia- lisme, sollicita nouveau du ministre allemand de 13 Propagande un subside pour un numro spkcial sus l'Allemagne.

    Le national-socialisme trouva. surtout avant l'avnement d'Hitler. un ter- rain favorable au sein du Verdinaso ( Verbond van Dietsche Nationonl-Solidaris- ten) fond en 1931 par l'ancien dput du FronrpurrrJ Joris van Severen et le pote Wies Moens. Le Verdinaso fut le premier mouvement en Flandre d tenter de concilier une idologie ouvertement fasciste et un naiionalisme farouche- ment anti-belge. Dans le Verdinaso. ce n'est pas tant son idologie Dinasn - un amaIgame d'influences franaises. italiennes. rillemandes et ;iuirichiennes mal assimiles - qui attira l'attention des nationaux-socialistes allemands que ses manifestations extrieures: le salut au cri de a Ileil Vun Seiterri~ ii. le culte du leider 4. Fa milice et son uniforme copie sur celui des Sf~trn.icrhteilungen nazis. le style militariste de tout Ic mouvement. En 1930 djh. des journaux allemands surnommaient, avec admiration. Van Severen l'a Hitler flamand fi.

    La soif inextinguible de pouvoir de Van Severen ne filit aucun doute : il ne fait pas moins de doute. en tout cas jusqu'en 1933. qu'il rva de Icrnps li autre A haute voix d'un coup d'ptat. En 1931. Van Sevesen tenta un rapprochement avec le parti d'Hitler, le N.S.D.A.P. qui, ;i l'cpoque. n'tait pus encore a u pouvoir en AIlemagne et qui tmoignait au Verdinriso un vif intcrt. Walther Rcusch, troitement li au Bund der FIf~nienfieiiride. riIlri. en avril 1933, jusqu'A juger le Verdinaso comme la seule organisation nakionalisie-flamande i meriter une subvention a'llemande : 20.000 Reichsmrirk par an. prudemment achemins par In Hollande. suffiraient ! On ignore s'ils furent effectivement verses. mme si le bruit counit ri l'poque que le Verdinaso recevait de l'argent allemand.

    Immkdiatement aprs son affiliation au Verdin;iso en mai 1933. Wrd Herrnans se rendit. en compagnie de Van Severcn. ri Essen daas la Ruhr. Le chef du Verdinaso y ngocia. en vain d'ailleurs. des subsides A son mouvement avec des dirigeants du SiahIltelm. une organisation revancharde composke d'anciens combattants de la premire guerre mondiale. On sait d'autre part qu'un informateur. dont on ignare le nom et qu i aurait rencontr personnelle- ment Van Severen. fit part au N.S.D.A.P. de ce que le chef du Verdin;iso tii toujours dispos accepter l'aide allemande: {i restc savoir i i . poursuivait-il. {( s'il l'utilisera comme nous pouvons i'esperer . Et de fait. ;i partir de 1934. Van Severen abandonna la voie du pangermanisme pour s'engager sur des chemins belges plus susceptibles de le mener une grande formation. ce q u i

    7. Groupement des solidaristes nationaux thiois. Le mouverneni 0 thiois O ou a grand-nerlan- dais ii songeait A un tcgroupement des peuples nkerlandophones (Pays-Bas. Flandre et Nord de la France).

    3. Parti cr apres la premire guerre mondialc i partir du mouvement frontiste des soldats flamands de l'Yser.

    4. Chef. 5. Sturmabieilung (S.A.) : sectian d'assaut. troupe de hti du N.S.D.A.P. 6. Naiio~alsoziollstisrhp Deursrhc Arheitspar~ei: Partr national-socialiste des travailleurs a13c-

    mand~ (le parti naai).

  • (41 Un landdag (congrs} du Veginaso. L'orateur est ~rniel Thiers. Assis a sa droite : Van Severen. A la droite de ce dernier : le chef du Verdinase-Hollande. Ernst Voarhoeve. A I'eirtrlme-droite de Ca photo : le chef de la Jeunesse du Verdinaso, Lao Poppe. (5) August Borrns (au milieu) et Arnaat Bockaert (a dmitel, tous deux administrateurs de la S.A. De Schelde ditrice de Vdk sn Siaat. (6) Fritz Scheuermann, l'officier da l'Abwehr avec lequel le chef du V.N V Staf De Ctercq 47) eut des contacts durant la mobil~sation et diivaloppa la Militaire Organisatie.

  • n'eut pas l'heur de plaire aux nombreux milieux allemands qui avaient suivi avec grand interet le Verdinase & ses &buts.

    Les declarations que Van Severen fit Antoon ver Hees en 1935 sont signi- ficatives de son comportement l'poque. A. ver Hees, sur lequel nous revien- drons plus loin, &ait le fils d'un activiste migr en Allemagne. Naturalis allemand, il travailla pour le Dm~sches Nachichtenbro7 et fut en relation troite avec le Bund der Flamenfreunde. Devant ver Hees, Van Severen y alla de remarques inamicales, moqueuses et mme agressives A I'adresse de 1'Alle- magne. Neanmoins, il exprima, au cours de la m&me conversation, le dsir d'entrer en contact avec un service allemand intress par la question coloniale. Van Severen s%taait vu proposer une concession coloniale : il tait disposk, disait-il, A la vendre aux Allemands h condition de recevoir pour son mouve- ment une part, ft-elle minime, du gateau (pour son mouvement ... et peut-&tre miorne pour lui-meme : Van Severen, en effet, manquait toujours d'argent et devait se faire entretenir par des amis fortuns). On ne sait si cette proposition aboutit A un rsultat concret. Les Allemands continu2rent cependant se mfies de Van Severen. Rien d'tonnant ds lots si en juin 1940, l'Administra- tion militaire traitera son mouvement (lui-mme fut tut le 20 mai 1940 par des militaires franais) de {t politiquement et moralement suspect r}.

    Par contre, et surtout aprs 1936, lorsque Van Severen eut abandonne definitivement son attitude anti-belge, de nombreuses personnalits dans les cercles {t belgicistes manifestrent une grande sympathie pour le Verdinaso, Ce fut le cas, entre autres, de l'industriel Leon Bekaert, de membres de la noblesse tels que le comte de Renesse, les princes de Croy, Harold d'Aspremont- Lynden (ministre P.S.C. apr2s la guerre}, Thierry de Lirnburg-Stirum, Pierre d'ydewalle, gouverneur aprts la guerre de la Flandre Occidentale, le commis- saire royal $ la Rk-forme administrative et futur banquier Louis Camu, le leader socialiste Henri de Man, le banquier et ministre catholique Philip Van Isacker. De mme, Van Severen aurait entretenu de bonnes relations avec la Cour, avec Mgr Lamiroy, I'kv&que de Bruges (l'imprimeur de l'kv&ch, Beyaert, tait un ami personnel du leader du Verdinaso) et avec le chanoine Willy Gracco qui se pr- sentait comme l'homme de confiance du Cardinal et qui fut, suivant l'minent Dinasci F. Van Dorpe, membre secret du Verdinaso.

    Aprs 1933 : le ministre allemand de la Propagande alimente la caisse du V.N.V.

    A partir de 1934, l'intret allemand pour le .Verdinasa dhclina de faon vidente. Par contre, le V.N.V. (Vlaamsch Nationaal Verbond) crk- en octobre 1933 n'eut, dans les annes 1935- 1940, qu'di se fliciter de plus en plus des efforts de rapprochement qui se manifestaient du ct allemand.

    7. Agence de p e w allemande. 8. Parti nationaliste flamand.

  • Contrairement au Verdinaso, le V.N.V. participa, lui, des dlections. Aux lkgislatives de mai 1936, la liste remporta 16 siges la Chambre. Comme la liste Rex de Leon Degrelle, le V.N.V. btntficia, sans aucun doute, de la suspi- cion largement rpandue l'egard des partis traditionnels, mfiance encourage par les scandales politico-financiers et les consquences de la crise conomique des annes trente. Comme le Verdinaso. le V.N.V. tait un mouvement autori- taire A vises totalitaires. mais il ne prsentait pas la mme homognit idolo- gique. Des thiois radicaux (Jeroom Leuridan, Reimond Tollenaere) y cdtoyaient des fdralistes modrs (Gerard Romse, Hendrik Borginon, Hendrik J. EIias), des nationaux-socialistes notoires (W ard Hermans, H e m a n Van Puymbroeck) y rencontraient des dmocrates (le mme Hendrik Borginon), tandis qu'on trou- vait quelques libres-penseurs 5i ct de catholiques parfaitement dkvots. En bref, et en simplifiant : autant de tgtes. autant d'opinions ! Et au milieu de tous ces courants en sens divers, Staf De Clercq qui devait maintenir le navire A flots !

    Il n'y russit finalement pas mal du tout car, m&me si le V.N.V. ne devint jamais le parti de tous les nationalistes-flamands comme il aimait s'en donner l'image, il compta peu avant l'clatement de la seconde guerre mondiale bien plus de membres que le Verdinaso : 26.205 pour le V.N.V. au 30 juin 1939 - du moins selon De Clercq - contre un nombre (certifi, lui) de 2.453, au 3 1 aoOt 1939, pour le Verdinaso (qui ne compta jamais plus de 4.000 membres et vit, partir de 1934. le nombre de ses membres dcrotre).

    Exista-t-il, avant 1933. des relations entre Ie futur fondateur du V.N.V., le Frontparrij et certains milieux allemands ? On ne le sail pas. Et si elles exis- trent. on en igno~e l'ampleur. Ce n'est qu% partir des annkes 1936-1937 que se nourent des liens plus troits entre l'Allemagne d'une part. le V.N.V. et surtout son quotidien Volk en Siaat d'autre part. Le N.S.D=A.P. avait dj tent en 1933 d'avoir la mainmise financire sur le predcesseur du Volk en Staat. le

    journal De Schelde. Les bailleurs de fonds hollandais qui, en 1928, avaient mis sur pied De Schelde et avaient par ailleurs soutenu les activistes flamands, durent intervenir plusieurs reprises. Jusgu'en novembre 1936, De Schelde tait aux mains de la Stichring ter Bevordering der ~VederIandsche Beschaving et n'tait pas A proprement parler un journal V.N.V., au grand dam du reste de Ia direction de ce parti. En novembre 1936. il se passa des vnements pour le moins singuliers ! Le quotidien fut rebaptis Volk en Staal A l'insu de son admi- nistrateur-dlguk Karel Peeters. Une diminution drastique du capital fut impo- see pour amortir les pertes. Peeters fut remplac comme adrninistrateur-cielgu par le commerant et ancien activiste Hendrik Van Hoofdstad t. conseiller du Vlaams Ekonornisch Verbond. juge au Tribunal de Commerce d'Anvers. finan- cier et homme de confiance de Staf De Clercq. Des ngociations A propos d'une aide au journal chourent avec la Nationaal-Socialistische Beweging Io de

    9. Fondation pour la promotion de la culture (civilisation) nerlandaise. 10. Mouvement national-socialiste.

  • l'ingnieur hollandais Anton Mussert. Enfin, le dput V.N.V. Gerard Romse se prtsenta comme mandataire de nouveaux pourvoyeurs de fonds (pour- voyeurs dont on ignore jusqu' prsent le nom, & supposer qu'ils aient &t effec- tivement trouvs).

    De mme, on ignore si cette poque dj de l'argent provenant d'Alle- magne aboutit effectivement dans la caisse du Volk en Sraar. Ce dont on est sr, par contre. c'est qu'un montant de 800 Reichsmark (9.600 frs d'alors, 120.000 frs au moins de nos jours) fut attribu chaque mois au journal par le ministre allemand de la Propagande. Quand cette aide dbuta-t-elle? On ne peut rpondre cette question avec prcision. De toute maniere, en dcembre 1937, l'aide tait dkj effective depuis un certain temps, et on possde certaines indications permettant de croire qu'en avril 1937, eIle tait dkjA accordee. L'argent provenait du ministre allemand de la Propagande (Prorni), par l'inter- mdiaire de Robert Holthofer qu i dirigeait 1'Aussenstelle ' ' du Prorni Essen. A cette fin, le Promi puisait lui-mme dans les sommes importantes verses au N.S.D.A.P. par des banquiers et industriels allemands. Holthofer etait membre du N.S.D.A,P. depuis 1933 et avait dj t impliqu en 1933 dans la tentative allemande d'achat du journal De Schelde.

    L'arent allemand destin au Volk en Sraat fut perqu aux Pays-Bas par Staf De Clercq, Arnaat Bockaert (gendre de Frans Daels et administrateur de la Kredietbank de 1935 1944). August Borms et Hendrik Van Hoofdstadt. Hol- thfifer lui-mme faisait partie depuis 1936 de la direction de la Deutsch-Nieder- landische Gesellxchafl 12. au sein de laquelle un ancien pourvoyeur de fonds du Schelde. l'armateur Van Beuningen, joua un rBle important.

    Pour une raison encore inconnue, on ferma le (i bureau Holthofer O dans la seconde moiti de l'anne 1938, mais cela ne signifie pas pour autant que I'aide du Promi au Volk en Sraar s'arreta. bien au contraire. Quoi qu'il en soit. en janvier 1939, les subsides avaient dkj quintuple (4.000 Reichsmark par mois, environ 45.000 francs belges de l'poque, soit au moins 580.000 francs actuels). On ne sait si cette aide s'est poursuivie jusqu' l'invasion allemande du 10 mai 1940. 11 est en effet possible que le Promi y ait mis fin par mesure de prudence aprs que le gouvernement belge eut ptomulguk en juin 1939 une loi selon laquelle l'acceptation d'une aide financire trangre des fins de propagande ou de presse tait punissable de peines d'emprisonnement.

    I I est par consquent irnpossi ble jusqu' prsent de dterminer avec prcision le montant global de l'aide allemande au Volk en Slaat. Mais il ne fait aucun doute que ce montant s'est lev au minimum 40.800 Reichsmark. c'est-dire A quelque 490.000 francs belges de l'poque et plus de 6 millions de francs belges actuels. Cette estimation minimale se hase sur I'hypothkse que I'aide ne dbuta pas avant avril 1937, que la multiplication par cinq du montant attribu ne pr- cda pas janvier 1939 et que I'aide fut supprime partir de juillet 1939.

    I 1. Service dcentralis. 12. Communaut de travail germano-nerlandaise.

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  • Mais il existe une autre hypothse, maximale ceile-18. An cours de I'enquete entamde en 1939 par la justice belge propos du Volk en Slaai et poursuivie durant I'occupation, Antoon Mermans dclara (le 23 avril 194 1) que lors de son entre en fonction comme administrateur-dklgu de la S.A. De Schelde qui editait Volk en Staai, il avait exig que toutes les sommes provenant dxlle- magne fussent dsormais inscrites dans la comptabilitk du journal comme

    soutien du V.N.V. ii.. II ressort des documents laisss par Staf De Clercq que le V.N.V., de 1937 jusques et y compris 1939. a accord 1.203.70 francs d'alors (au moins 14 millions de francs belges actuels) au Voik en Staat. Si on doit dduire de la dclaration de Mesmans que tous les montants inscrits sous la rubrique ci soutien du V.N.V. il ont et- en rtalit des subsides allemands camoufls, alors le Volk en Staal a reu du Promi, entre 1937 et 1939, plus de 1,200.000 francs d'alors. De toute faon, dans un rapport dttaill du 10 janvier 1939, le Promi estima &tre en mesure d'ttablir que le V.N.V. 4 par l'importance du soutien financier A son journal est troitement dependant de (lui) ii et que (( Ee chef de ce parti est main tenant prt aligner sa conduite exclusivement sur (ses) directives #. Quand on sait par ailleurs que Ie Promi tait d l'kpoque de connivence avec 1'O.K.W. l 3 entre autres pour faire barrage 21 l'envahissant Auswartiges Amr 14, on a alors fait le tour des allis du V.N.V. en Allemagne. Selon un avis datt du 21 juin 1939 d u Sicherheitsdiensr (S.D.), le service de renseignements secrets de la S.S. " allemande qu'une vive nvalite opposait A I'O.K.W., le Promi ne prenait aucune dcision se rapportant A la propagande sans i'acord de I'0.K.W. Le rferendaire du Promi, responsable de la propa- gande pour la Belgique, la Hollande, Ea Suisse et le Luxembourg, fut qualifie par le S.D. d'instrument docile aux mains des autorits de 1'O.K.W. comp- tentes pour ces regions (il s'agissait du major Marwede et du Regierungsrar l 6 Neumeister, deux officiers de l'Abwehr 17). Le Promi transmettait h I'0.R.W. toute la correspondance concernant la Flandre.

    A un moment inconnu, probablement en 1936 ou peu de temps avant, le chef du V.N.V., Staf De Clercq, entra, par i'entremise de Ward Hermans, en contact avec des officiers du commandement militaire allemand dont dependait aussi Ie service militaire de renseignements et de sflretb, I'Abwehr. Nous revien- drons plus loin sur les contacts entre le V.N.V. et l'Abwehr. Qu'il suffise ici de signaler que Staf De Clercq, dans un document du dbut de I'anne 1942, a corrobor le jugement du Promi de janvier 1939. 11 situe la prise de contact avec l'Abwehr en 1934-1935 et ajoute : (t DPs cet instant, toute la politique du V.N.V., bien que determine en toute indpendance, fut toujours exhcutke aprPis examen et discussion avec les instances allemandes et approuve par elles. L'objectif tait le suivant : rendre la Belgique suspecte comme allike miIi-

    13. Oberkammando der Wehmachi : haut commandement de t'Arme allemande. 14. Ministre allemand des Affaires trangres. 15. Schuizstaflel: section de protection. 16. Conseiller du gouvernement. Grade le plus bas chez les hauts fonctionnaires. 17. Service d'espionnage et de contre-espionnage de la Wehmachi.

  • taire de la France et la librer de cette alliance r}. On peur donc supposer que la campagne des nationalistes-flamands contre l'accord militaire secret conclu en 1920 entre la France et la Belgique fut bien accueillie en Allemagne.

    Dans cet ordre d'ides, une note non datte (sans doute de 1936 ou 1937 et tss vraisemblablement ecrite par Staf De Clercq) sur

  • Schelde, qui taient A l'origine aux mains de la Stichiing, avaient et achetees, un moment non prkcis par Vrijdaghs, par rc le bureau d'Essen rh (Holthofer). Le 13 janvier 1939, Jan Wannijn, un activiste migrk aux Pays-Bas, ecrivait Staf De Clercq ce qui ressortait incontestablement des pieces A sa disposition : ~i par les actes que vous avez posks, la conviction est tablie que vous avez laisse une puissance trangre i notre lutte nationale disposer de parts du Schelde et qu'ont ttk acceptes de la part de cette meme puissance des subsides mensuels qui, pour des annes, desserviront auprs du grand public la cause du nationalisme flamand i ) .

    Deux interprtations peuvent 2tre proposes propos de I'assertion avande par Vrijdaghs et Wannijn Ch supposer qu'elle corresponde A la rkalitk). Soit, le { r bureau Holthafer e a revendu les parts qu'il possdait dans la S.A. De Schelde A la Stichting au moment o il a t liquide (probablement fin 1938) ; soit les parts sont testkes propriete allemande et il existait entre le Promi et la Stichiing un accord selon lequel les parts continuaient pour la forme apparte- nir A la Srichtirag tout en tant en ralit aux mains des Allemands.

    Les accusations du

  • (1 2) A Is fin des annes 34 une poignes da RBthaur- sbcialigtes flamands se mqmuphrent autour de Heman Van Rivmbroeck (deuxime 8 panir do la gaucha). (13) J d Van De Wisle (deuiiime B partir de la droite), professeur d'alhdnde et secrtaire de rdaction des organes de presse De Vbg et Nmuw Vlaendemn. (14) Leon Degrelle reu par Is cardinal Van Roqr ap&s sa victoire aux 6lections de 1936.

  • prcisment ceux dont le S.D. estimait lui, pouvoir se servir. Les directives que I'0.K.W. donne au Dr tspert, coPlaborateur du Promi (et du S.D.), sont rvla- trices de sa tactique: Ispert devait cesser soute relation avec les nationalistes flamands anti-V.N.V. et prendre au contraire cantact avec la direction du V.N.V.. le Verdinaso, Ie Kathalieke %?~amsche Volksparrij '' et avec des socia- listes flamands. Tout contact dYPspert, insistait-on, avec des nationalistes ia- mands en dehors du V.N.V. tait mal venu.

    Tout porte A croire que 1'O.K.W.. dans la perspective d'une guerre l'Ouest, cherchait hi te r toute accointance avec des personnes ou des groupes ouvertement nationaux-socialistes. Ce qui comptait pour l'0.K.W. dans un mouvement comme le V.N.V., ce detait en effet pas tant sa puret idtologique que les services concrets qu'il pouvait rendre. En ce sens, le V.N.V. tait un parti prendre en considration : avec Ia bndiction de 1'O.K.W. et du Promi, il prit ses distances par rapport A certains aspects du national-socialisme et sa dmarche belliqueuse. Des groupuscules nazis surgis aprs 1936 en Flandre, surtout autour de Van Puymbroeck, s'taient en effet compromis aux yeux de I'opinion publique : on eut vite fait de les liquider comme ~r vendus ir et 4 valets d'Hitler 1).

    Le V.N.V. lui-mme n'aimait pas non pIus passer pour pro-allemand. Ainsi en 1938, Van Puymbroeck fut dmis de sa Fonction de rdacteur en chef du Volk en Stuat. E t Staf De Clerq liquida cette meme anne le chef de la Jeu- nmse V.N.V. Hilaire Gravez qui il reprochait d'etre beaucoup trop pro-nazi. En rtalit. iI s'agissait dans ce dernier cas d'une affaire personnelle. Une affaire qui ne fut pas parmi les pIus reluisantes de l'histoire du V.N.V. ! Gravez, depuis 1936, tait snateur provincial A Alost. Depuis quelque temps. son sige tait convoit par Adiel Bebeuckelaere.

  • Les amis de la # nouvelle ip Allemagne

    Si, extkrieurernent. le V.N.V. ne manifestait que modrment sa sympathie l'gard de l'Allemagne, la Flandre toutefois comptait, A la fin des annees 1930, plusieurs dizaines de nationaux-socialistes. germanophiles sans rtserve. Ceux-l ne cachaient pas, c'est le moins qu'on puisse dire, leurs sympathies : la Flandre, proclamaient-ils ouvertement, faisait, au fond, partie integrante du Reich allemand et n'attendait que le rattachement sa (( sur-patrie de l'Est. En t2te de ces extrmistes, on trouve le Narionaal Socialisfische Vlaamsche Arbeidspartij (N.S.V.A.P.) fond le 20 mars 1938, A 18 ans, par un ancien garon de course du Volk en Staal : August Segers. Derritre la fondation de ce parti, se cachait Van Rappard, un leader national-socialiste hollandais la solde du parti nazi allemand : en fait donc, le N.S.V.A.P. n'tait qu'une filiale flamande du mouvement hollandais. Le programme du parti le montre suffi- sance : # Notre peuple est allemand. Allemands, notre idal et notre combat. Notre nostalgie de la grande mre-patrie socialiste, notre amour pour Adolf Hitler nous donneront la force d'accomplir notre destin. Notre mot d'ordre: aprs l'Autriche, la Hollande. Aujourd'hui i'Autrihe, demain la Flandre rb. La composition du N.S.V.A.P. est frappante : principalement des mtcontents du V.N.V. qui ne trouvaient pas i'idologie de ce parti assez radicale, et des Dina- SOS dus qui, aprs 1934, ne trouvrent plus dans le Verdinaso de quoi satis- faire leurs aspirations ami-belges !

    Manifestement, meme chef du N.S.V.A.P., Gust Segers continua A se com- porter en garon de course ! Il tait djh clair auparavant que le parti nazi allemand, la S.S. en particulier, entretenait des relations avec un groupe de Flamands anti-V.N.V. Ce groupe comprenait non seulement le ((quatuor i> Vrijdags-Parasie-Van Puymbroeck-Herrnans (ce dernier fut pourtant dput V.N.V. en 19391, mais aussi Ren Lagrou qui, fin 1940, sera nomm d la tete de l'A lgemene S. S.- Vlaanderen institue sur ordre direct de Berlin. Lagrou, un avocat originaire de Flandre Occidentale install A Anvers, avait, aprts une vocation religieuse rat&, milit au sein du mouvement tudiant thiois, flirt un temps avec le Verdinaso, et, aprs un dltour par le Katholieke Vlaamsche Volkspariij, en 1933, avait quitt la politique active. 11 garda malgr tout des contacts avec des thiais radicaux qui ne se retrouvaient ni dans le V.N.V., ni dans le Verdinaso: ainsi avec les frres Van Thillo, Edmond, et Renk qui deviendra fin 1940, avec lbppui de Lagrou, chef du Vrijwillige Arbeidrdienst ". De son ct, H. Van Puymbroeck, alors qu'il &ait encore rdacteur en chef du Volk en Staat, mit sur pied plusieurs groupuscules pro-nazis. comme par exemple De vrienden van kef nieuwe Duifslund ou De A deiaar. Avec Van Puym- broeck, Lagreu tait I'axe autour duquel gravitaient les groupuscules nazis flamands, actifs surtout dans la rkgion anversoise. Pour eux, {( Diets i.} (thiois) ne

    20. Parti ouvrier national-socialiste flamand. 21. Service Volontaire du Travail.

  • reprsentait qu'un glissement phontique de (( Duits b (allemand) ; et quand ils pensaient (( Groofnederlands (Grand-nerlandais). ce n'tait pas avec i'ide d h n e runification des Pays-Bas en une unit politique indpendante, comme le prbnait le V.N.V., mais avec l'espoir d'un rattachement rapide au Grand Reich. La S.S. allemande, qui avait en vue le mme objectif, ne comprit que trop bien l'usage qu'elle pourrait faire en temps a utile 1) de Lagrou et ses parti- sans !

    L'action de ces groupes ne se limitait pas rpandre la propagande nazie. Le N.S.V.A.P. possdait une collection d'armes et plusieurs de ses membres espionnaient avant Sinvasion pour le compte de l'Allemagne - i'un d'eux, l'ancien Dinaso Wim Lauwaert fut m&me condamn pour espionnage - et fournirent au consulat allemand les noms de personnes opposes au rgime nazi. En juin 1940, un adjudant de la gendarmerie dterra un metteur radio dans le jardin de Ea maison de Lagrou : nul doute qu'il n'aura pas servi simple- ment de jouet ! En remerciement pour les services rendus, Lagrou put compter sur l'aide gnreuse des Allemands. 11 ne faut ds lors pas s'tonner qu'aprs la capitulation belge du 28 mai 1940 et son retour de captivit franaise, il ait cru son heure arrive. Comme avant l'occupation, Lagrou resta un homme de confiance du Sicherheifsdienst. Son alli Ward Hermans tait en rapport avec diffrents services allemands : le S.D. (via le Haupsrurmfhrer 22 Josef Perey}. la Gestapo " (via Werner Best), le ministre de la Propagande (via le journal Der Angrgfl. En mme temps, il tait correspondant de plusieurs journaux alle- mands et reut, comme August Borms, un subside du Promi. Celui-ci esprait ainsi le tenir sous sa coupe et mettre un frein son travail de sape lyntrieur du V.N.V. Hermans reut aussi de l'argent en provenance d'Aix-la-Chapelle (probablement de la 5.D.-Aussensrelle 24 laquelle &ait rattach son ami Perey) ; argent qui, a son gout, se faisait parfois trop attendre.

    Selon le Sicherheirsdienst de la S.S., le ministre allemand de la Guerre tait en outre entr en contact en 1936 avec Ward Hermans parce qu'il savait. disait-il, que Hermans tcherait {( en cas de conflit gerrnano-belge, d'empcher par tous les moyens, y compris donc le sabotage, Ia participation des flamands une guerre contre l'Allemagne ir.

    La DeVlag et les tudiants : la politique sous le couvert de la culture

    Le grand intr&t intellectuet pour l'Allemagne, vivace depuis le 19' sicle chez un grand nombre de Flamands cultivs, fut habilement mis profit par certains milieux allemands : partir de leur passion pour Beethoven et Wagner,

    22. Capitaine. 23. Geheime Sruatspalizei : police secrte d'hat. 24. Service dcentralise du Sicherheiisdienst.

  • LES CATHOLIQUES

    ,i pour REX

    aPOND L'VQUE DE BRUCE!!

    (1 5) En 1937, I'episcopet prend position contre Rex. (lg Un meeting de Rex devant una glise en Wallonie. (1 T1 et (1 fl) LE mystique du chef su aein da Rex.

    - Le Chef -

    Le conqurant "am* * w . - . p l i ) i W r ~ ? - " '-' CA .--Zr-- id& .. ani r-

    Les hommes $"n%*n*l-wh--win-d

    L a mystique ~ ~ y ~ Z q ~ t ~ & ~ d r C " , idnii wsn*. a a Yh C.C AmouII w % P m m-rwmli

    A Hitler, L Nurrolini, k ! ? ! ? ~ , ~ i * ~ H i r u n n l P i C n m . d d n ~ i a i ~ L r ' r i ~ ~ I . ~ - kpi- 13H mnll W. -*r Ali,& rrvm Uu*nrp*. ii

    N.,mYm. Ik m a* u- c d , UI* k wu, h"

    Le vrai conqurant n'accepte jamais la dfaite, ni la victoire.

    1

  • Nietzsche et Drer, ils amenrent ces Flamands A s'intkresser galement a u developpement politique de 1'AlIemagne. Dans cet esprit. fusent organiss par i'intermdiaire du Bund der Fl~menfreunde, des changes d'tudiants, de profes- seurs d'universit et d'artistes. Et c'est ainsi que se dveloppa la curiositk pour les {{ ralisations i} du regime nazi et que l'attention se porta sur le Service du Travail. la Jeunesse hitlerienne, la ({ reponse allemande )} au chmage. (( la paix sociale i } et le slogan rc une Volkswagen pour chacun i>.

    Ceci dit. on n'en resta pas un innocent change culturel. On s'en rend dljb compte quand on sait que les ((tudiants o allemands en Belgique (Wal- ther Reusch, Fritz Scheuermann} travaillaient. semble-[-il. pour l'Abwehr, et que les a tudiants e flamands a Berlin faisaient tout autre chose qu'tudier. Certains transmettaient des informations. D'autres comme Jan Servaes, fils du peintre bien connu en Flandre, se spialistrent dans le maniement du tklex sans f i I . Un apprentissage qui lui vint B point quand il fut amen travailler pour l'ancien activiste Godfried Rooms. employ au rninisttre allemand des Affaires etrangeres. A noter que l'Allemagne nazie n'tait plus depuis long- temps une terre inconnue pour le national-socialiste jur qu'tait Jan Servaes : il y avait dj sjourn de 1935 A 1938 et y avait notamment effectu un service de travail volon taire.

    Autre ( 4 tudiant invit i ) , Jules De Hen, membre du V.N.V., fut accueilli en Allemagne aprks que, souponnk d'espionnage pour le compte des AIlemands. il eut fu i la Belgique en 1939. De Hen trouva asile auprs du Vlaams Sekrera- riaat de ver Hees A Berlin. Ses a &tudes r) consistrent envoyer, via un met- teur radio, des slogans anti-franais et dfaitistes aux soldats flamands avant et pendant la campagne des dix-huit jours. En somme pour l'Abwehr, un service en change d'un autre !

    A partir de 1935- 1936, fut institue la Deutsch- Vlamische A rbeitsgemeins- chafrlDuitsch- Vl~amsche A rbeidsgemeenschap " ((De Vlag). La branche flamande etait dirige par le professeur d'athkne Jef Van de Wiele, kgalement secrtaire de rdaction du mensuel Nieuw-Vlaamderen ; la branche allemande, A l'origine. par Jupp Deckers. La vritable mission politique de la DeVlag ne se rvlera que durant l'occupation. 11 est toutefois utile de remarquer que, ds le dbut, l'organisation fut soutenue par l'Allemagne. Le journal germano-nerlandais de la DeVlag fut financk par Theodoor Reissman-Grone ( 1863- 1949) que de nom- breux liens unissaient la Flandre. De 1830 A 19 15 il fui rfrendaire pour la Hollande, la Belgique et l'Afrique du Sud au sein de I'Alldeutscher Verband (association qui tait une manation de l'imprialisme allemand) ; en 1898. il fut CO-fondateur et financier de la revue gerrnano-flamande Germania (un priodique qui annonait De Vlag). En mme temps, Reissman-Grone tait depuis 1896 propritaire de la Rheinisch- West$alische Zeitung, porte-parole du patronat du Rhin et de la Rhur. Pendant une longue priode aussi. il travailla

    25. ommunauit de travail germano-flamande, en abrg DeVlag. De YIag dsigne son journal.

  • comme conseiller du Bergbau-Verein l6 auquel tait galement li le bailleur de fonds du V.N.V., Holthofer. Par l'entremise de son gendre Otto Dietrich, futur attach de presse dwitler, il organisa en 1929 une rencontre entre Hitler et le financier rhnois Emil Kirdorf, rencontre qui marqua un tournant en ce qui concerne le soutien apport Hitler par certains gros industriels et banquiers allemands.

    Rien d'&tonnant, en voyant les milieux industriels allemands frquentes par le financier de la DeVlag, Reissman-Grone, A ce qu'un des premiers voyages d'tude des membres flamands de Ia DeVlag en Allemagne ait concern prcisment des fabriques d'armes de la Ruhr. En 1939 encore, visite fut faite un autre {{ centre culturel rb : un centre de formation de la Luftwafle A Detmold oh eut d'ailleurs lieu, dans l'intimit, une runion avec les pilotes de la Lgion Condor, cette lkgion qui, durant la guerre civile espagnole, sut se rendre si utile aux yeux de Franco. Les membres de la DeVlag ne resterent pas longtemps les seuls s'inttresser A l'Allemagne. Ce mtme engouement pour le national-socia- lisme se retrouve, jusqu'en 1936, dans le mouvement ktudiant catholique. Aprts un voyage en Rhnanie en fvrier 1934, au cours duquel une visite eut lieu Leverkusen la IG-Farben (un des plus importants bailleurs de fonds d'Hitler), l'organe du Leuvens Karhokk Viaamsch ~oo~siudentenverbondZ~ s'enthou- siasma pour le nouveau rgime qui n'admettait (4 plus de lutte de classes i}, et pour le nouveau type d'tudiant (4 qui n'est plus l'homme de caste qui se croit suprieur au proltaire et au bourgeois, mais le jeune homme qui porte l'uni- forme S.A. ou S.S., qui vit en communaut, qui endurcit son corps grAce A une stricte discipline et 21 une saine pratique du sport rb. L'enthousiasme des tu- diants catholiques eut toutefois une nette tendance se refroidir mesure que l'on eut vent de la (4 perscution de l'glise ri en Allemagne.

    Degrelle : de l'ambition et de l'argent A gogo

    C'est en 1933 que Rex apparut dans le milieu tudiant de Louvain parmi les jeunes membres de l'Action Catholique. Jusqu'en 1935, et ce, alors que les ambitions politiques de la jeune gneration rexiste s'&aient trs t6t ouvertement manifestees, les relations avec l'autorit ecclsiastique se maintinrent au beau fixe. L'aumnier de l'Action Catholique, Mgr Picard, encourageait vivement Degrelle et ses partisans. Et parmi les CO-fondateurs des (4 ditions de Rex i ) , la maison d'dition cre par le mouvement en 1934, on retrouve ct de Degrelle, de son ptre et de son beau-pre, l'avocat louvaniste Maurice Schot qui devint par la suite snateur C.V.P. et administrateur de la Socit Gknsale de Banque et les Pres Norbertins d'Averbode. Trks vite les dettes de la maison d%dition s'accumulrent vis--vis de l'abbaye d'Averbode au point que, pour

    26. Asswiation de l'industrie minire allemande. 27. Asswiation des tudiants de fUniwersit catholique de Louvain.

  • les apurer, le beau-pre de Degrelle se vit, en juin 1935, oblig de racheter les 600 parts des Peres.

    Cette m&me anne 1935, Degreue, tenaille par la soif du pouvoir, se jeta dans i'arne politique et entama dans son journal La Pays RPeI une virulente campagne contre les scandales de corruption dans lesquels des politiciens de tous bords taient impliquts. Inform par Gustaaf Sap, ancien ministre des Finances et administrateur de 1'Algemeene Bankvereeniging (la banque du Boe- ren bond). Degre 1 le prit violemment partie les poli ticiens-banquiers carho- liques qui durant des annees avaient eu la E( dlicatesse r) (ou la vanit !) de couvrir les bilans falsifits de la banque. Lots de ce que Ton a appele le s coup de Courtrai i ) en novembre 1935, Degrelle traita le ministre d'tat P. Segers d'c excrment vivant f i , s'appliqua A se prtsenter comme Ie grand purateur du parti catholique et affirma sans ambage sa volont d'en prendre la tete, La rupture etait consommee entre Degrelle et le parti catholique, meme si aprs les tlections de 1936, le cardinal Van Roey reut encore Degrelle en audience,

    Voyant que son plan au sein du parti catholique avorterait, Degrelle se skolut h faire de Rex une grande organisation politique indpendante. A partir de I& Ia carrikre tortueuse de Degrelle ne prsente qu'une constante : la marche vers la conquete du pouvoir. Le mouvement, dans son entier, fut mis au service des tendances dictatoriales de Degrelle. tendances qui sont un des traits domi- nants de tous les dirigeants fascistes.

    Comme on le sait, Degrelle nken est pas h un mensonge prts. Ainsi aujour- d'hui encore, il continue A jurer ses grands dieux qu'au grand jamais, ni avant, ni pendant l'occupation, il ri\ reu un seul centime de 1'Allemagne. La rkalitk est cependant tout autre.

    Il ne fait aucun doute que Degrelle, pour amver A ses fins, n'a refus l'aide fmanciere ni de l'Italie, ni de l'Allemagne. Du 23 avril au 3 mai 1933 dlj8, quelques mois aprs la prise de pouvoir d'Hitler, Degrelle et deux de ses colla- borateurs, Guido Eeckels et Jean Denis, se rendirent A Berlin et assistrent aux ftes du premier mai. Les billets de train ainsi qu'un visa leur furent gratuite- ment fournis par l'ambassade allemande A Bruxelles. Jusqu'en 1936, Degrelle ne sernbIe pas avoir entretenu d'autres relations avec l'Allemagne.

    Durant l'&t- 1936, nprs le rsultat spectaculaire de Rex aux Ilections lgis- latives du mois de mai (d'un seuI coup, 21 dputs et 12 senateurs, 72.000 voix rien qu'en Flandre. pour 166.000 au V.N.V.). Degrelle parvint A se faite inviter par Mussolini. II rencontra le Duce et son ministre des Affaires trangeres et gendre Ciano A Rome le 27 juillet 1936, le jour mme de la naissance de sa fille Anne. Rhsultat concret de l'entrevue, Ciano lui accorda une aide fmancire massive. Selon Xavier de Grunne, snateur rexiste jusqu'en 1937, Rex reut, d'aobt 1936 jusques et y compris mai 1937. 19 millions de francs belges de l'kpoque. Bien que de Grunne ffit bien plac pour le connatre - il alla cher- cher les billets Rome et accompagna Degrelle dans son voyage -, ce chiffre norme parait cependant exagere. En novembre 1937, Ciano note en effet sa dkision d'acwrcler de nouveau a son subside n Rex. A savoir 250.000 lires par

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    (19) A is fin d- annes 30. Degrelle copiait consciencieusement les mthodes de propagande de Hitler. (20) Rex ou Moscou : des vignetes antt-commu- nistes avec de I'argent venu d'Italie (1 9361. [ai) La LBgion Nationale portait aux nues Mussolini.

  • mois. Si on considtre que Rex, d'aoUt 1936 A mai 1937, a reu chaque mois cette mme somme, le montant total de hide se monte alors, compte tenu de la dvaluation de la lire en 1936, environ 4.338.000 francs belges, soir, grosso modo, 47 millions de nos jours : une somme en elle-meme impressionnante et qui fut apparemment donc encore augmente partir de 1937. Si on y ajoute le credit de 250.000 Reichsmark (2.975.000 francs de l'poque, environ 32 millions de francs aujourd'hui) mis A la disposition de Rex par l'intermdiaire de l'industriel Gustave Wijns, il devient vident que Rex, bien plus que le V.N.V., fut soutenu financirement par IWranger.

    La gnerositk du Promi n'est pas la seule preuve du grand interet manifest en 1936 par les dirigeants du IIIC Reich A l'tgard de Degrelle. Sur le conseil de Ciano, son pourvoyeur de fonds italien, le chef de Rex, sur la l ande de sa rcente victoire IectoraIe, s'adressa le 6 septembre l'ambassade d'Allemagne A Bruxelles : il dsirait rencontrer le ministre de la Propagande Goebbels et si possible le Fhrer lui-meme. Trois semaines A peine plus tard, son vu deve- nait rbaIitt : le 26 septembre 1936, Degrelle prenait le th avec Hitler. C'est A cette occasion que G. Wyns reut le crdit alloue et cit plus haut de 250.000 Reichsmark. PIusieurs personnes, chacune A leur manikre, participtrent la mise en uvre de cette rencontre : le Gauleiter '' N.S.D.A.P. d'Aix-la-Cha- pelle et Cologne Josef Groh6 (qui en juillet 1944 fut promu A Ia tete de I'Admi- nistration civile allemande en Belgique) et des diplomates non officiels de la s Diensrsielle Ribbentrop il '' (parmi lesquels Otto Abetz).

    Degrelle ne fut pas le seul avoir tk reu par Hitler et son futur ministre des Affaires etrangeres von Ribbentrop: peu avant lui, 'ltait le cas de Pierre Qaye, chef du groupement parlementaire rexiste. Aucun chef nationaliste fla- mand n'a jamais russi - ni avant, ni pendant la guerre - A rencontrer Hitler. Pour y arriver, Degrelle n'eut, lui, pas bouger le petit doigt.

    Le secret qui entourait les rencontres de Degrelle avec Hitler et Goebbels (qu'il vit encore .A Cologne le 9 octobre 1935) n'ernpecha pas quelques nou- velles de filtrer. Par ailleurs, l'aide financiere allemande et italienne d Degrelle cessa, fin 1936. d'&te un secret pour les milieux gouvernementaux belges. Pour la representation allemande 4 Bruxelles, il Gtait temps dksomais de faire preuve de prudence : aprs tout, kcrivait lkmbassadeur d'Allemagne ses sup- rieurs Berlin, le premier ministre de la Belgique, ce n'ktait pas Degrelle mais Van Zeeland. Berlin aussi adopta manifestement une attitude plus prudente: fin 1936, la prernire avance de 100.000 Reichsmark sur la somme de 250.000 Reichsmark promise par le Promi fut convertie en papier [Rex reut 140 tonnes de papier qui furent affectes A des fins de propagande et de presse). Mais malgrk l'insistance de G. Wyns. l'aide s'arsCta l. On peut suppo- ser que les dirigeants allemands n'taient pas dispases. en soutenant un leader d'opposition belge, A troubler A nouveau Ies relations belgo-allemandes qu i

    28. Dlgu du parti nazi dans un g m (+on). sorte de gouverneur. 29. Les uservices * de von Ribbentrop.

  • taient en train de s'amliorer. A cela s'ajoute aussi le fait que i'arnbassade d'Alle- magne RruxeIles et peut-Etre aussi le ministre allemand des Affaires trangres - ni l'une. ni l'autre n'itaient aux mains des nazis les plus fanatiques - n'apprciaient pas particutirement les interventions de diplomates amateurs tels quqOtto Abetz en faveur de Degrelle. A forriori Degrelle. (Notons ce propos. que durant ~"ocupation. Degrelle ne se fera pas faute de se servir au maximum d'Otto Abeu. A l'poque ambassadeur frais emoulu d'Allemagne A Paris).

    En 1936, l'ambition immodre de Degrelle tait un fait suffisamment connu. Et pourtant, l'Allemagne et 1'Italie ne furent pas les seules A s'intresser lui, Cet intlst. Degrelle le rencontra aussi en Belgique. dans les milieux dirigeants. C'est ainsi que le baron de Launoit. banquier et industriel. souscrivit d'un seul coup 120.000 abonnements au journal Le Paw Rel qui fut durant tout un mois distribu gratuitement dans la province de Litge. C'est ainsi aussi qu'en fvrier 1937, de concert avec l'ancien ministre Sap et le futur ministre Charles d'Aspremon t-lyn- den. Degrelle dcida de provoquer a Bruxelles une lection partielle. Il n'eut, pour ce faire. aucun scrupule ri pousses un collaborateur d dmissionner de son sige de dputt. Degrelle voulait faire de cette 6Ietion une sorte de consultation populaire qui l'aurait port au pouvoir ... DpIorable erreur ! A l'exception du V.N.V.. tous les partis. y compris les communistes. prtfsenfrent un adversaire prestigieux : I'extra-parlementaire et ex-Premier ministre Paul Van Zceland qui remporta une crasante victoire. Ce qui n'empcha pas Degrelle de prsenter malgr tout, dans son style habituel. ses 69,242 voix (contre 275.840 Van Zeeland) comme une vic- toire. II convient ici de remarquer que le Cardinal avait considrablement con- tribu la dfaite de Degrelle en proclamant in e-vrremis que les catholiques ne pouvaient voter que pour Van Zeeland. Ce rsultat lectoral montre sans ambi- gut que. dans le duel Degrelle-Van Zeeland qui fui prsente comme un match enire le fascisme (Degrelle) et la dmocratie (Van Zeeland). les Belges s'taient clairement prononcs contre Degrelle.

    A la fin de I'annEe 1936, Degrelle perdit un gtand nombre des adhrents qu'il avait recruts cette mme annke 1936 dans les milieux francophones et souveni anti-flamands (entre autres parmi les anciens combattants). Le 6 octobre 1936, tait sign entre Rex et le V.N.V. un accord secret - tellement secret que son existence fut dvoile deux jours plus tard dans Le Soir ! Une pariie des partisans francophones de Degrelle assirnilhent le V.N.V. au !i traitse A la patrie rh Barns : ds lors, conclure une coalition avec des s tratres a , c'tait vouloir marier l'eau et le feu. Staf De Clercq et Degrelle. mais surtout ce der- nier, eurent toutes les di ficults faire admettre raccord par leurs partisans. En fait. Degrelle le denona trs rapidement. traita Borms de s cadavre qu'on dterre ih et sbattira du mme coup les foudres des Flamands. Pour nombre d'entre eux, c'en &tait fini de Degrelle comme partenaire de confiance.

    11 en alla de mme du cte allemand. Le mtme Degrelle. qui en 1936 etait reu en personne par Goebbels. von Ribbentrop et Hitler, fut l'objet, partir de 1937. d'une desaflection croissante de Ia part des Allemands. Di-saffection due en partie au fait que Degrelle, par son enttement. perdait de pIus en pIus de parti-

  • sans : pour les Allemands s'evanouissait ds lors une grande partie de son intrt. Les lections lgislatives de 1939 furent catastrophiques pour Rex : il conserva A peine quatre siges de dputs. parmi lesquels celui de Degrelle lui-mme. et un siege de snateur. Dsormais, Degrelle allait s'vertuer se dbarrasser de sa repu- tation pro-allemande (merne si le parti texisie applaudit de I"utriche et A i'invasion de la Tchcoslovaquie par IXllelemagne).

    Son inconstance, ses fanfaronnades et son bluff continuels lui firent perdre beaucoup de sa popularit. Mais le fait que les partis traditionnels aient reussi un tant soit peu A endigues la crise onornique a aussi jou un rle. Or Degrelle avait justement compt sur une aggravation de cette crise en 1936. Lors d'un entretien avec un correspondant allemand de plusieurs journaux belges. le Dr Duesberg, DegreIIe dclara, peu avant les lections lgislatives de mai 1936. avoir espr de la crise une radicalisation croissante des masses qui aurait dil ramener A lui tous les adversaires du communisme. Seule une amlio- ration de la situation kconomique pouvait, seIon lui, maintenir le systme exis- tant des partis. En quoi, pour une fois, i l ne se trompait pas !

    Ceci dit, en 1940, Degrelle n'tait pas encore tout fait hors course aux yeux des Allemands. En janvier 1940. il demanda raide financire de i'ambas- sadeur d'Allemagne Bruxelles pour un nouveau quotidien neutraliste. Le Journal de Bruxelles. L'ambassadeur ne rpondit qu'en partie A sa requte. 11 acceptait de proposer A Berlin la souscription A 10.000 abonnements mais peur trois mois seulement, non pas pour une anne entitre. Pour une raison incon- nue, le projet ne fut jamais mis i execution. En mars 1940. Ie mCme ambassa- deur se dkclara il nouveau d'accord p u r proposer Berlin de subsidier Le Pays Rel par l'intermdiaire de publicits d'une valeur de 1.000 Reichsmark (1 1.900 francs). A ce point de vue. le journal rexjste etait mis sur le mme pied que L'toile belge librale, Lo Mtropole catholique, L'IndPpendance Belge Cjoumal independant) et l'hebdomadaire Cassandre.

    Notons encore, A propos de l'aide financitre extrieure la presse rexiste, une cemrnunication de la direction de I'Auslandsorganisafioli 3 ' A la section presse du ministre allemand des Affaire etrangeres. En octobre 1939, Schulze, le responsable de t'A uslandsorganisation du N.S.D.A.P. en Belgique, avait eu vent de la situation financire catastrophique du Pays RPel, une situation telle que les rdacteurs n'taient plus pays rkgulirernent. La direction de l'A usland- sorganisaiion en avertit cr ultra confidentielIement ii la section presse du minis- tre allemand des Affaires trang6res en suggrant de faon vidente bien que non exprimee qu'il y avait IA une possibi1it. d'influence.

    Pendant l'occupation aussi. Pe journal continua A Eire en dficit et ne put subsister qu'avec l'aide financire allemande. Ce qui ne g2na pas Degrelle: il continua A se croire le roi sans couronne de la Belgique, mieux encore, le chef spirituel de i'Europe ...

    30. Annexion. 3 1. Organisation p u r l'tranger.

  • 2 Plutt Berlin que Moscou

    La BeIgique neutre : u la politique des mains libres u

    S'il subsistait encore, l'tpoque, un doute sur les intentions belliqueuses de l'Allemagne, il fut dfinitivement ecarte en mars 1936 lorsque, au mpris de taus les traits internationaux, elle occupa militairement la Rhnanie. La menace grandissante de la guerre fut pour la Belgique l'occasion de dknoncer I'amrd militaire secret franco-belge conclu en 1920, et de suivre officiellement A partir d'octobre 1936 une politique extk-neure (i d'indtpendane i i . Les poli- tiques trangre et militaire - depuis toujours, dans une certaine mesure, chasse garde de la Cour - devaient, tant selon Albert 1"' que Lopold III, tendre (4 d. maintenir le pays i'ecart de tout conflit et empecher qu'il ne devienne A nouveau le champ de bataille de l'Europe B. Concrtement, cela signifiait que la Belgique ne suivrait pas de politique agressive A l'gard du voisin de plus en plus puissant de i'Est. DljB la fin de i'annie 1936, au cours de conversations prives avec des diplomates allemands, le gouvernement belge (surtout Van Zeeland) avait fait part de la volont de la Belgique d'un certain rapprochement avec 1'Allemagne.

    Les vritables motifs qui ont conduit la Belgique adopter cette politique d'independance restent encore obscurs. Incontestablement, la volont de ne pas heurter de front l'Allemagne et de lui fournir le moins d'arguments possibles pour envahir la Belgique, a jou un rle. D'un autre chte, un certain nombre d'indications laissent supposer que la peur du communisme, ou de ce qui pas- sait pour tel, etait grande, surtout dans les milieux industriels. La France, od le Front Populaire de gauche tait arriv au pouvoir en 1936, avait conclu le 2 mai 1935 un pacte d'assistance avec i'Union Sovitique. Dans de telles cir- constances, ttait-il toujours indiqu de maintenir un accord militaire avec le voisin du Sud ?

    Ce distanciement de la Belgique par rapport A la France, l'mernagne aussi I'appelait de ses vux. On en a notamment Ia preuve quand on sait que les 27 et 28 septembre 1935, Joachim von Ribbentrop, diplomate officieux et A partir

  • de fkvrier 1938 ministre des Affaires trangres d'Hitler, rendit visite au Pre- mier ministre belge Paul Van Zeeland dans l'intention de faire sortir la Bel- gique de la sphre d'influence des puissances occidentales. Des promesses furent-elles ds ce moment faites von Ribbentrop? On ne le sait. Ce qu'on sait, et on le verra encore pIus loin, c'est que la Belgique tait dispose A un rapprochement conomique avec 1'Allemagne. Ds septembre 1936, I'AusWnr- tiges Amt pouvait faite part i'ambassade d'Allemagne Bruxelles de la grande satisfaction de Berlin pour de I'} adopte par la Belgique sur la scne internationale. De son cdt, Jacques Davignoa, alors nouvel ambassadeur belge Berlin, dclarait de la part de Lopold III et de Van Zeeland au ministre allemand des Affaires trangtres de l'poque, von Neurath, que la Belgique se rejouissait A son tour de la satisfaction allemande.

    Davignon. comme il le dcla~a lui-m2me un diplomate allemand en novembre 1938, tait A la base de ce dtsengagernent de la Belgique par rapport A la France. ainsi qu' l'origine de la politique d'indpendance et plus tard de neutralit qui lui tait associe. Un autre personnage joua un rle essentiel dans la mise en place de cette politique d'indipendane : le baron Pierre Van Zuy- len, directeur gnbal aux Affaires ttrangtres A partir de 1934. Tous deux, Van Zuylen comme Davignon, appartenaient A des familles catholiques lies aux milieux de l'industrie et de la banque.

    1936-1937 : amlioration des relations commerciales belgo-allemandes

    Les affaires avec l'Allemagne constituaient un point important dans l'agenda des dirigeants industriels belges, plusieurs faits l'indiquent. Le 28 septembre 1936. l'A ussenhandelsstelle ' de Saxe tcrivait 4 la Reichssttrlle fr Aussenhandel que cr l'attitude ferme et hostile du gouvernement allemand A I'egard du communisme i } etait minemment apprtcie par les milieux indus- triels belges : certaines commandes, habituellement destintes auparavant $ l'Espagne et 4 la France, prenaient de plus en plus le chemin de l'Allemagne, D'un sjour d'une semaine pass en Belgique, Car1 Eoerdeler (commissaire aux Prix et Salaires jusqu'en 1935 et depuis la fin des annes 1930 un des princi- paux Ilkments de l'opposition Hitler), conclut dans un rapport au prsident de la Reichsbank dat du 12 juin 1937 qu'il y avait un march A prendre en Belgique. La tendance anti-franaise. disait-il, ttait de plus en plus rpandue ; l'inverse, s la tendance germanophile ii. s'ttait dkveloppe de manire surpre- nante. La Belgique ne voulait rien ctder du Congo (a ils estiment y avoir trop investi 8 ) . mais, par contre, ils taient disposes A collaborer, au Congo, avec 1'Allemagne: en change des matires premitres, l'Allemagne fournirait ce

    1 . Senice du commerce extrieur. 2. Direction centrale du commerce extrieur.

  • Y,--; nn u0 wuenrergnem. drnaaarrr me eergiqtie d Berlin jusqu'en 1936, organisa an 1934 une rencontra secrette entre Hitler, Goring. Goebbels et son cousin Maurice Lippens (2) - ici en tm que Gouverneur Gknral du Congo au dbut des annes 20. (31 Une a garden-party xi chez le Premier ministre Van Zeeland. DeuxiPime

    partir de la droite : le libral Paul Hymans, ministre des Affaires trangres B plusieurs reprisas. (4) Assis au milieu : l'ambassadeur de Grande-Bretagne en Allemagne, Sir Neville Henderson. lors d'une rkeption en 1938, en compagnie du i7eichsfuhmrS.S. Heinrich Himmler ( gauche) et du ministm de la Propagande Goebbels (assis a la gauche da Henderson).

    1

    AlainTexte surlign

  • qu'on appellerait aujourd'hui le {( know how Q, des machines et de Ia main d'uvre. A cette fin on pouvait crer des cr entreprises-cadres ib (destines chapeauter des socits) belgo-allemandes. ~i J'ai l'impression )>, poursuivait Goerdeler, fi que les Belges attachent une grande importance B cette solution, par le fait qu'ils tiennent pour fort incertaine i'volution en Afrique et qu'ils souhaitent assurer leur avenir colonial en collaboration avec l'Allemagne i). Toujours selon Goerdeler, les Belges insistaient a une fois de plus sur l'incapa- cit et la rticence des Franais coloniser G d e l G ~ ' z a x e n = e T n & ~ -- -- --.- - -- -7-

    Lent avec le Roi, te Premier ministre Van Zeeland et le comte Lippens. C'est surtout ce dernier, a trs cooprant o selon Goerdeler, qu i paraissait indiqut pour tre le partenaire dans une discussion avec les banquiers et industriels allemands~intresss~par~ conventions - sur - - le cuivre, . - l'ttain - - - et - le - zinc. -

    Dans cette optique. Maurice Lippens (1875-1956) tait en effet une p e r s o n mtt prkcieuse : politicien liberal, il ttait aussi une des figures marquantes de l'empire colonial de la Socit Gnrale (dont il fut d'ailleurs conseiller). De plus, Lippens-avait-t gouverneur gnral du Congo - de - 192 1 h 1922. C'hait galement un cousin d'Andrk de ~ ~ h o v e de ~ x t e r ~ h e r n qui fut ambassadeur de Belgique successivement A Berlin jusqu'en 1935. A Paris jusqu'en 1938 et \ ensuite A Rome. Grce a l'intervention d'Andre de Kerchove, Lippens parvint Se faire recevoir en octobre 1934 par les nouveaux dirigeants allemands (Goeb- bels, Goring et Hitler lui-meme) : Lippens devenait ainsi le premier homme d q t a t belge A @tre reu par le Fhrer - deux ans avant Lkon Degrelle. En ralit il ri.e s'agissait pas d'une rception officielle : tout fut men dans - - le plus? - - 'grand secret et la visite ne fut connue que grce une f u i t e . % ~ ~ tard, en 1936, \ Lippens fut encore propos par i'arnbassade allemande comme candidat la prsidence d'un futur Comit d'tudes belgo-allemand et d'une Association belgo-allemande (Deutsch-Belgische Gesellschafi). C'est le journaliste Raymond De Becker (il travaillait l'poque L'Indpendance Belge, qui passait pour un organe semiiifficiel du gouvernement) qui dans la cration du Comit d'tudes institu en 1937 joua le rBle dyntermdiaire entre l'ambassade et les Belges fava- rables au projet. De Becker venait des mouvements de jeunesse catholiques, connaissait H. de Man, ktait un fidle du

  • cachaient, cela ne fait en tout cas aucun doute du c8t allemand. des intentions politiques.

    A partir de 1937, se constitutrent des comits conomiques belgo-aiie- mands. Y sigeaient des figures de proue des mondes industriel et financier belge et allemand. k ce niveau aussi, on voyagea beaucoup dans les deux sens. Schacht, ministre allemand des Affaires tconomiques et prsident de la Reichs- bank sjourna en Belgique du 13 nu 15 avril 1937. 11 s'y entretint avec le Roi. H. de Man, le Premier ministre Van Zeeland, Louis Franck (gouverneur de la Banque Nationale), l'ancien ministre Theunis ainsi qu'avec d'autres persennali- ts de i'industrie, de la finance et de la Cour. Il reut chez tous un accueil cha- leureux, et en vint entre autres la conclusion que Van Zeeland aussi (( recon- naissait parfaitement la ncessit de se rapprocher de l'Allemagne d'une manire ou d'une autre ib. Van Zeeland qui entretenait des relations trs troites avec l'empire britannique, avait en effet expos un plan proposant une nouvelle approche long terme des problkmes kconomiques internationaux. Ce plan aurait facilite pour IWlemagne l'accs aux rnatikres premires africaines - et donc congolaises. On se rend compte de l'importance de la question coloniale pour 1'Allemagne quand on sait qu'elle constitua un des points principaux de i'entretien du 13 avril 1937 entre Schacht et Leopald III. L'Allemagne, dtclara Schacht, tait favorable h un rapprochement en politique internationale, mais elte devait au prealable acqurir l'indpendance conomique. Et tant qu'elle ne posskdait pas de colonie, cette indpendance demeurerait impossible, Ce que Ie Roi pouvait trs bien comprendre ...

    En tant que puissance coloniale mondiale, la Grande-Bretagne devait inhi- tablement, elle aussi. 2tre concernke par le problme. Et elle aussi ktait dispose A faire d'importantes concessions. Le 19 novembre 1937, le ministre britannique des Affaires ktrangkes, Lord Halifax, rencontrait Hitler. Au cours de l'entretien, Halifax reconnut que Ie Fhrer n'avait pas seulement rendu de grands services l'Allemagne, mais avait aussi, en le combattant si efficacement dans son pays, coup6 la route de l'Ouest au communisme. Les Britanniques se montraient dispo- ss accepter une expansion de I'Allemagne vers l'Est (Dantzig, Autriche, Tch- cosIovaquie) A condition que tout se passt pacifiquement. La question coloniale fut aborde notamment au cours d'une conversation secrte qui eut lieu le 3 mars 1938 entre Sir Neville Henderson, l'ambassadeur britannique A Berlin, et Hitler. Henderson ne proposa rien moins que de doter le bassin du Congo (y eomptis le Katanga et ses richesses minires) d'une nouvelle administration dans laquelle l'Allemagne aussi trouverait son compte. Manifestement, Hitler ne dksirait pas heurter de front des puissances coloniales telles que la Belgique et le Portugal. Il posskdait, lui, une solution beaucoup plus simple : rendre A 1'Aliemagne ses anciennes colonies. La question coloniale ttait d'ailleurs depuis longtemps, l'ordre du jour. En 1912 deSri, certains milieux britanniques avaient voulu tout simplement faire prksent du Congo I'Allemagne condition de garder la meil- leure part du gteau (le Katanga). L'importance du Congo pour les Britanniques apparatra encore durant la guerre.

  • s Volont de paix n l'Ouest : libert de 1i'Allemagne d l'Est

    L'amtlioration des relations commerciales entre la Belgique et 1'AIlemagne faisait partie de la marche normale des affaires. Les hommes d'affaires choi- sissent de prfrence des dbouch&s sur des marchs politiquement stables, l'idtologie du rgime n'intervenant dans leurs choix qu'en second lieu. C'est la paix. et non la guerre, qui favorise les affaires : les Rotschild, au XIX' sicle, le savaient dj ! ... Or l'Allemagne connaissait un regirne politique stable : et surtout. elle tait le troisime partenaire commercial de notre pays.

    La politique d'ci apaisement 4 britannique avait pour but vident de main- tenir, par des concessions l"Allemagne, l'Ouest en dehors de la guerre. Elle impliquait cependant aussi de laisser l'Allemagne les mains libres A l'Est. Politique dont n'taient certainement pas absentes certaines considrations idologiques. 11 ressort des rapports de i'ambassadeur d'Allemagne Londres. von Diercksen, que les Britanniques songrent jusqu'en aoUt 1939 A une alliance militaire, politique et conomique avec 1' AIlemagne.

    Visiblement, la crainte du communisme etait vive. Car c'est de cela qu'il s'agissait pour les milieux dirigeants comme. et surtout, pour les milieux finan- ciers internationaux. A la mi-novembre 1939, donc aprs l'invasion de la Pologne par l'Allemagne, Paul Berryer djeuna, vraisemblablement en prsence d'un homme de confiance du ministere allemand des Affaircs'ktrangres. chez son frre Joseph, conseiller d'ambassade Berlin. Paul Berryer tait issu d'une famille de banquiers ligeois et ttait le fils d'un ancien ministre des Affaires ktrangres. Tl fut de 1930 A 1942 conseiller juridique et homme de confiance du grand capital belge auptes de la Banque des Rglements Internationaux A Bille dont faisaient partie, c8t de banquiers occidentaux, d'influents financiers allemands et qui servit plus d'une fois dc plaque tournante pour des contacts internationaux secrets A un haut niveau. k Ble. tout le monde dksire la paix : c'est ce que Benyer declara A son frCre durant le djeuner. Personne ne souhaite la victoire de 1'Allemagne sur l'Angleterre. mais personne, non plus, ne veut dbne dfaite de l'Allemagne nazie : cr Hitler i), en effet, a grce au national- socialisme a rbussi & vaincre la crise du monde moderne en rconciliant capital et travail. (...) Si Hitler echouait, ce rksuitat serait nouveau remis en question pour le monde ivilisk rb 4. Selon Berryer, les financiers amricains, eux aussi, admettaient en priv qu'une dfaite d'Hitler conduirait h une insupportable hgmonie juive a non seulement en Europe mais aussi et surtout aux Etats- Unis. C'est pourquoi les milieux financiers internationaux esptraient que la guerre s'achhverait rapidement par

  • (5) Le diplornerte amateur allemand. Otto Metz. pi Charles d0Aspramont-lynden, un des dirigeants chercha durant la guerre I susciter I'interfit des du parti catholique d'svant-guerre. Durant les Belaes et des Francais wur I'Allemaune nazie. II annes 30, il ne dissimulait pas ses sympathies pour deint d'allemaone g Paris en 1940. des mouvements autoritaires tels que Re% et le " . .. Ab8tz sjourna de temps autre en Belgique et Yerdinaso. frquenta le r salon Didier a o II rencontra des (81 Hubert merlot (ZI geuchs). pFusisurs fois Premier politiciens et des journalistes, parmi lesquels ministre. et Ferre Nothomb [ droite) souhaitaient, Raymond Da Becker (6). eux aussi. plus d'ordre et d'autorit.

  • prksident du P.O.B., Henri de Man, qui considhait la neutralit de Ia Belgique comme un but en soi, ne fit pas appel, pour le financement d'une ultime tenta- tive de paix fin 1938-dbut 1939, aux fonds secrets du ministre des Affaires trangres, mais bien Dannie Heinemann, I'administrateur-dlgue du trust Sofina, dont il parvint obtenir une somme de 50.000 frs. Juif d'origine alle- mande naturalis amricain, Heinemann approuva, semble-t-il immdiatement, .idte d'Henri de Man de mettre sur pied un second (( Munich il. A noter que seuls Spaak (ministre des Affaires trangres), Heinemann et Lopold III avaient &t pralablement mis au cousant des plans d'Henri de Man.

    Des plans qui allaient mener de Man dans presque toutes les capitales europeennes importantes. Mais en vain ! Et pourtant, ni de Man, ni meme Heinemann n'ttaient des inconnus pour les AIlemands. Bien que Juif, Heine- mann n'avait pas kte victime des Arisierungsgesetze ' qui cartrent les Juifs de la vie publique allemande, Que du contraire : en 1938, le ministre allemand des Affaires tconomiques, aprs avoir consulte Hitler lui-merne, avait dcidk que Heinemann pouvait rester commissaire de plusieurs societks telles que le trust lectrique A.E.G., en raison de son r61e dans la .vie &conornique et de ses rela- tions avec la maison royale belge. Les Allemands surnommaient en effet Heine- mann e le financier amtricain du Roi des Belges )} (Amtprikanischer Finanzmarrrr des belgischen K6nigs). Et selon l'ambassadeur allemand A Bruxelles, Heine- mann ttait aussi 4 un des conseillers politiques du Roi #.

    Les hommes en place : point de mire de l'Allemagne

    A tout point de vue, les dirigeants du Reich accordaient beaucoup plus dymportance aux contacts avec les milieux ofliciels belges qu'avec les mouvement9 belges d'Ordre Nouveau. Cela apparait clairement dans les listes des Belges invits au congrs du Parti A Nuremberg entre 1937 et 1939. Comme an va pouvoir le constater, la presse belge n%tit pas la seule A s'inttresser i4 ces congrs ...

    Furent en effet les invits d'honneur du Fiihrer lui-meme en 1937 : i'ornni- prksent comte ~ k p e n s , Eugne de Gninne (frtre du snateur rexiste Xavier de Gmnne et du Grand Matre de la Maison de la Reine Elisabeth), Mme Kreglin- get (pouse d'un industriel anversois qui comptait parmi les bonnes connais- sances de Goebbels), Raymond Ledoux (dput de Rex) et ... l'administrateur de la Sret belge, Robert de Foy. Ce dernier fut propos comme invit d%on- neur par le Reichsfhrer-S.S. und Chef der deutschen Polizei 6 , Heinrich Himm- ler en personne (pour les raisons cachtes de cette invitation, voir plus loin). Parmi les cinq invits d'honneur, ne se trouvait donc qu'un seul reprtsentant de mouvements belges d'Ordre Nouveau. Il est dbilleurs le seul dont on sait avec certitude qu'il assista effectivement au congrs du Parti.

    S. Lois d"arianisation. 6. Chef sup&me de la S.S. et de Ia police allemandes.

  • En 1938 galement. les partisans de l'Ordre Nouveau ne formaient qu'une minorit parmi les invitls d'honneur belges. Suite A l'invasion de Ia Pologne, le congrs ne fut pas organis en 1939. L'et-il et, que les organisateurs l'auraient sans doute appel avec tout Ie cynisme dont ils pouvaient faire preuve (4 le congrs de la paix B. Mais de nouveau, on retrouve surtout parmi les quinze hbtes d'honneur belges invitb des personnalits des milieux oficiels. Seuls H. J . Elias (nurnero deux du V.N.V.) et le national-socialiste notoire Joseph De Langhe appartenaient I'Ordre Nouveau. Elias, du reste, ne rpondit pas l'invitation de peur de se compromettre. Quatre autres Belges, eux, acceptrent : Fernand Van Ackere {snateur catholique et prhident de l'Union Nationale Chrtienne des Classes Moyennes), Olivier Grard (haut fonctionnaire aux Affaires conomiques), Pierre Ansiau (directeur la Socitt Gtnkrale des Minerais qui faisait de bonnes affaires avec le gant de la chimie allemande, i'IG-Farben) et le baron de Launoit (minent banquier et industriel). Les trois premiers avaient dj t invitts en 1938.

    Un autre Belge - et pas le moindre - s'attendait A recevoir une invitation au congrs du Parti : Louis Camu. FiIs d'un brasseur d'Alost, il occupa tres tt diverses fonctions dans des cabinets libraux. II fut nomm en 1936 commis- saire royal la Rforme administrative et tait un sympathisant du Verdinaso. Nous reparlerons encore de Camu en tant qu'homme de confiance de Lo- pold III, mais il n'est pas sans int& de noter ici que les Allemands taient au murant de cette relation de confiance entre les deux hommes : autant l'ambas- sade A Bruxelles que le Reichsfuhrer-S.S. Himmler et probablement meme Hitler en personne. Or en juillet 1939, Camu avait dtclar un membre de i'ambassade d'Allemagne A Bruxelles a qu'il se rendrait trs volontiers un congrs du Parti Nuremberg 9. L'ambassadeur i'avait ensuite inscrit dans la catgorie ... {t rserve r> !

    Guerre ou pas, pour les industriels belges, 1i business is business Y,

    On aurait pu penser qu'apds l'invasion allemande de la Pologne en sep- tembre 1939 et la ddclaration de guerre de la France et l'Angleterre A I'Alle- magne qui s'ensuivit, les milieux dirigeants belges seraient devenus ptus pm- dents. Qu'on se dtrompe ! L'Allemagne avait jusqu'alors constitu, aprts la Grande-Bretagne et Ia France, le pays d'exportation le plus important pour la Belgique. N'aurait-il pas et regrettable de perdre un tel march ? Le gouveme- ment belge et un grand nombre d'industriels en jugrent en tout cas ainsi.

    Les Britanniques avaient impos Ie blocus avec interdiction de commerce de transit de la Belgique vers l'Allemagne d'une srie de marchandises qui auraient pu etre utilises par i'industrie de guerre allemande : un certain nombre d'industriels belges s%veetutrent pourtant 4 contourner cette interdic- tion,

  • C'est surtout le commerce du textile qui semble avoir t particulirement lucratif A IYpoque. Ainsi, Frantz Van Dorpe, membre important du Verdinaso, homme actif dans le secteur courtraisien du textile et jusqu'en dcembre 1939, representant de I'IG-Farben en Belgique, aurait fait d'excellentes affaires en revendant A l'poque l'Allemagne des quantites de textile provenant des tats-unis. C'est du moins ce que nous avons pu apprendre au cours d'une interview preparatoire de plusieurs militants et sympathisants Dinaso (il faut dire que ces hommes rejoignirent la Vlaams Legioen pendant la guerre: ils suivirent donc un tout autre chemin que Frantz Van Dorpe puisque celui-ci entra dans la Rsistance au milieu de 12nnee 1941). Leurs dkclarations sont dmenties avec la plus grande fermet par Frantz Van Dorpe qui prtend nbvoir jamais. ni avant, ni pendant, ni aprs la mobilisation, import de textiIe des tats-unis, ni de quelqu'autre pays que ce soit. Quant aux exportations de mati2res textiles traites en Belgique ces mmes kpoques, Frantz Van Dorpe nous dclara avoir toujours respect les clauses des accords de Paris de mars 1940 rglementant l'exportatian vers des pays belligrants, et les prescriptions belges en cette matire.

    A la mme poque, Roger de Staercke s'arrangea pour faire livrer, en leur imposant formellement ou effectivement un dtour, de grandes quantits de laine anglaise l'Allemagne, prenant ainsi le risque d'un arrt des exportations anglaises. Comme par hasard, le frre de Roger de Staercke, Auguste, jusque 18 un petit commerant en textiIe de la chausske d'lxeltes Bruxelles, obtint alors des licences d'exportation vers l'Allemagne pour plusieurs centaines de tonnes de laine ...

    Tout cela, on le comprend parfaitement, faisait le bonheur des Allemands. Une communication du ministre allemand des Affaires bconomiques celui des Affaires trangeres date du 6 novembre 1939 indique en ce sens que I'asso- ciation des commerants en laine belges prfererait renoncer la laine anglaise plutbt que de laisser s'tchapper le commerce avec 1'AElemagne. L aussi a prvalu le principe : R business is business (and. .. profit !).

    Les Belges ultra-neutralistes

    Si l'on se reporte sur Ie terrain politique, on constate l aussi que les milieux dirigeants belges ont tout fait paut que la 4 politique de neutralit O inaugure officiellement en septembre 1939 comporte aussi et surtout une atti- tude bienveillante l'gard de l'Allemagne. En septembre 1939, parut dans plusieurs journaux francophones, un manifeste sign par treize intellectuels et dfendant des positions ultra-neutralistes. Ce manifeste fut par aprs [ant- rieurement selon certains) approuve par le ministre des Affaires trangres. Un certain nombre des signataires du manifesle se retrouveront durant l'occupation dans la presse collaboratrice : Pierre Daye, Robert Poulet, Gabriel Figeys, Gas- ton Derijcke, Paul Herten et Paul Colin.

  • (91 Gustaaf Sep, ministre des Finances (a gauche). en compagnie de quelques fonctionnaires de son rninisthre, (10) Des membres de la KSA. {Kathdieke Studenwnnektie), saluent u la romaine 8 le cardinal Van Roey (en haut, a droite).

  • La presse flamande publia aussi un manifeste en faveur de la neutralit sign par un grand nombre de personnes. Mais i l y a mieux encore : en octobre 1939, parut le nouvel hebdomadaire L'Ouest. Ce priodique fut subsidi jusqu'en jan- vier 1940 par le gouvernement belge et reut. selon son redacteur en chef Raymond De Becker, de l'argent e provenant de Finlande )i. D'aprs Lion Degrelle. cet argent provenait de l'ambassade allemande. Des partisans de l'Ordre Nouveau et des journalistes s indpendants fi de tous bords (ainsi qu'Herg. le crateur de Tintin) collaborrent A cet hebdomadaire et y dfendirent la politique de B neutra- lit A outrance 0 adopte par la plupart des milieux dirigeants.

    UR des hauts lieux de cet esprit (( neutraliste r}. c'&tait l'poque le {( salon Didier anim par les poux Edouard et Lucienne Didier (mais surtout par Lucienne) dans leur maison de l'avenue de l'Hippodrome Ixelles. S'y rencon- trrent plus ou moins rkgulirernent des {( diplomates de charme O allemands de

    l'curie von Ribbentrop ii comme Otto Abetz et M a x Liebe (qui joueront gale- ment un rle dans la Belgique occupe) et des jeunes catholiques tels que Marcel Grgoire. Albert Lohest et Henri Bauchau (chef. de 1940 i 1943, du service des Volontaires du Travail pour la Wallonie), des sexistes comme Pierre Daye et Jos Streel, des Dinaso comme Joris Van Severen. des socialistes comme P. H. Spaak. H. de Man ou Lo Moulin, et des journalistes comme Robert Poulet et Raymond De Becker. A p r h la capitulation. certains d'entre eux s'engageront avec plus ou moins d%hsitation sur la voie de la collaboration.

    Avant la guerre, les poux Didier organishent rgulirement - notamment A Knokke, dans le domaine de la famille Lippens - des rencontres entre jeunes nazis et participants venus de diffrents autres pays europens. Une ide revenait sans cesse la surface, au cours de ces rencontres comme au salon Didier : celle d'un Ordre Nouveau europken, qui ferait accepter par l'Ouest, une expansion sans contrainte du IIIe Reich l'Est, ide chre A Abetz et Liebe. Autre ide en cours dans ces milieux : celle d'une autorit royale forte. De Man, lui. dfendait au {(salon Didier ii la conception d'un syndicat unique ri des travailleurs manuels et intellectuels r ~ , syndicat quY1 contribuera A consti- tuer durant l'occupation.

    De temps autre, une voix, vox clumans i n deserfo, s'klevaii contre la neu- tralit tout prix. Ainsi celle du leader libral Victor de Laveleye qui repro- chait a u gouvernement de l'poque de ne voir qu'un danger : celui du cornmu- nisme. Pourtant, poursuivait de Laveleye, cc ce n'est pas l'Arme Rouge qui campe nos frontitres r> ! Voix sans cho: mis part quelques libraux (e.a. Jean Rey) et quelques socialistes (e.a. Isabelle Blume), la grande majorit des politiciens suivaient l'orientation du gouvernement.

    Le ti spectre du communisme fi en Europe

    Avec cette parole de Laveleye (qui durant I'occupation, appellera la B.B.C. londonienne les Belges la resistance active contre les Allemands et les

    AlainTexte surlign

  • collaborateurs). nous touchons A une des obsessions majeures des milieux diri- geants des annes trente: la crainte du communisme, ennemi public no 1 du national-socialisme par ailleurs. C'est cette obsession commune aux nazis et aux milieux conservateurs belges qui les rapprochera partiellement les uns des autres.

    Ces miIieux n'avaient jamais pu accepter la revolution russe de 1917 ni l'instauration du suffrage universel en Belgique en 191 9. En effet, la dmocrati- sation du droit de vote permettait non seulement aux socialistes de progresser, mais aussi aux communis~es de participer aux lections et dbinsi propager leurs ides. Les communistes. avant 1940. n'ont jamais it numiriquement impor- tants : cela tait notamment d i , aux yeux des conservateurs. ce que les socia- listes suivaient, consciemment ou non, la politique de Moscou (en ce sens, les choses n'ont pas tellement chang !).

    Consquence de la crise ciconornique. les Iections de 1936 amedrent une polarisation de l'lectorat : gain pour Rex et le V.N.V. droite. pour les com- munistes gauche, lourdes pertes pour le parti catholique et dans une moindre mesure pour les libraux. maintien des socialistes. Les grves spontanes qui clat2rent au port d'Anvers apss les klections de 1936 et se ptopagtrent partir de juin 1936 dans tour le pays. provoqurent une vritable psychose dans les milieux de droite. On craignait un Front Populaire compos de comrnu- nistes. de socialistes. d'ventuels libraux et chrtiens-dmocrates. Les exemples franais et espagnols risquaient de faire tache d'huile: la droitc unanime s'opposa Sr l'ide d'un Front Populaire ; les mouvements fascistes belges, avec en premikre ligne Rex. le Verdinaso et la Lgion Nationale Belge, servirent de troupes de choc.

    Ds le mois d'aoUt 1935, des plans de coup d'tat circulrent dans les milieux de droite et parmi les militaires. Un coup d'ctat qui devait dboucher sur un rgime autoritaire. ferait du Roi le chef s vritable ir de la nation et en finirait une fois pour toutes avec la dmocratie parlementaire, Prirent part aux discussions prparatoires qui se poursuivirent jusq u'en octobre 1936 : des repr- seniants de la Lgion Nationale (un mouvement fond en 1922 et fortement inspirt du fascisme italien). l'organisation de classes moyennes Burgerwel- zijn7 i ) . qui s'appuyait fermement sur Rex. Rex lui-mme et 1'U.F.A.C. (Union des Fraternelles de t'Arme de Campagne 14- 18. une organisation d'anciens combattants). Degrelle, en voulant rduire l'affaire son seul profil et en con- cluant un accord en octobre 1936 avec le V.N.V.. fit chouer tout le projet: pour les autres belgicistes du groupe. le V.N.V. reprsentait le diable en per- sonne. le fossoyeur de la Belgique et bien d'autres choses encore ! Selon Degrelle. le colonel Lambert Chardome. des Chasseurs ardennais. aurait offert en octobre 1936 i'appui de son rgiment une {( marche ib dcisive e sur BruxeIles H .

    7. Associaiion flamande. antrieure au rexisme. qui a fusionn par la suite avec I'association u Biiqerstrijd-Actlon Civique 9.

  • L'chec de ce projet n'empecha pas les milieux etablis de poursuivre dans le mme esprit. Selon Degrelle, au cours de I't 1936, le baron de Launoit, dont la prodigalit a toujours t connue (au moins A l'egard des organisations de droite), rgla d'un seul coup 120.000 abonnements mensuels au Pays Rel qui fut ainsi distribue aux ouvriers de la province de Liege comme antidote l'ide juge funeste de Front Populaire.

    De Launoit apporta probablement aussi son appui A la Lgion Nationale et entretenait par ailleurs une milice prive personnelle qui Ctait la terreur de son entreprise. Il jouissait d'une bonne rputation dans la haute socit belge (entre autres auprs de la princesse Madeleine de Croy, membre du Verdinaso).

    Deux catholiques de droite. Gusraaf Sap (ancien ministre) et Charles d'Asprernont-Lynden, songeaient, eux, en 1936 B une coalition gouvernemen- tale regroupant l'aile droite du patlj catholique, Rex et le V.N.V. Durant i't de la meme annte 1936. circulait aussi en Flandre I'idke primitivement lance par le Standaard de Gustaaf Sap et Jan Boon d'un rassemblement de toutes les s forces populaires saines ir. Une idte qui n'eut pas beaucoup de suites si ce nqest l'accord de dcembre 1936 entre le V.N.V. et l'aile flamande du parti catholique. Au congrs catholique d'aotlt 1936, il n'avait aussi t quesiion que d'anti-communisme.

    L'enfer. peur tous ces milieux, c'tait A I'poque, l'Espagne o, aux yeux des catholiques, un gouvernemeni de gauche kcrasait l'&lise, foulait aux pieds les principes mPrnes de Ia religion et ne cherchait qu'une chose : extirper la religion d u pays et bannir l'glise. Dieu merci. un sauveur surgit en la personne de Franco ! Dieu merci, se trouvkrent des Belges, surtout au sein de la Lkgion Nationale, pour faire contrepoids l'engagement de leurs compatriotes dans les Brigades internationales et pour lutter aux cts de Franco ! Mme le socialiste Spaak, A la fin des annes trente, reconnut le gouvernement insurg de Franco. Trs t6t, en Belgique, se constitukrent de