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1 Dossier contrôle de gestion 2000/2001 Université de Paris XI Faculté Jean Monnet L’ORGANISATION DU TRAVAIL DU CONTROLE DE GESTION Brice CHAVENTRE Emilie FAURET [email protected] Axel MARCHADIER Hélène PALARIC Olivia VILLATTE

l'organisation du travail du contrôle de gestion

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Dossier contrôle de gestion 2000/2001Université de Paris XI Faculté Jean Monnet

L’ORGANISATION DU TRAVAILDU CONTROLE DE GESTION

Brice CHAVENTREEmilie FAURET [email protected] MARCHADIERHélène PALARICOlivia VILLATTE

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Sommaire

Introduction page 3

I- Apparition et évolution du contrôle de gestion page 4

1. Environnement économique et technologique des entreprises page 4

2. L’entreprise et sa gestion page 6

3. L’apparition du contrôle de gestion page 8

4. Les différentes formes de contrôle page 10

5. Les sources d’informations page 12

II- Organisation du contrôle de gestion : généralités page 14

1. La structure organisationnelle page 14

2. Un positionnement hiérarchique adapté page 19

III- Organisation du contrôle de gestion : pratique page 22

1. Questionnaire type sur l’organisation du travail du contrôle de gestion page 22

2. L’organisation du travail du contrôle de gestion dans une PME page 23

3. L’organisation du travail du contrôle de gestion dans un groupe page 24

4. Conclusion page 28

IV- Les groupes internationaux : le contrôle de gestiondes filiales à l’étranger page 28

1. Les caractéristiques du système de contrôle de gestionau sein d’un groupe international page 29

2. Les obstacles au fonctionnement d’un système de contrôlede gestion à l’international page 31

3. Une solution de synthèse aux problèmes rencontrés : le systèmeunifié d’informations de groupe page 32

Conclusion page 34

Bibliographie page 34

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Introduction

Loin du rôle peu enviable d’un "père fouettard", chiffrant les écarts et distribuant les mauvaispoints, le contrôleur de gestion est le dénominateur commun d'un déploiement à trois niveaux(stratégie, contractualisation, exploitation) et sur trois dimensions (prévoir, mesurer, agir).

Sa mission consiste à apporter à la direction générale toutes les informations nécessaires àl’élaboration de la stratégie, à l’aider à la formaliser et à la valoriser, à favoriser ledéploiement de la stratégie à l’horizon annuel et au niveau opérationnel. Il a un rôle importantde conseil, de gardien de la cohérence, de diffusion de l’information, de communication et defacilitateur du dialogue de gestion. C’est un accompagnateur du changement.

Cependant, le contrôleur de gestion n’a pas d’autorité hiérarchique dans l’ensemble del’entreprise sauf dans son service s’il regroupe plusieurs personnes. En fait, sa place n’a pasd’importance intrinsèque. La place et le rôle du contrôleur de gestion dépendent de l’intérêtque porte le décideur, le manager au contrôle de gestion. Le service peut rester une "coquillevide" ou à l’inverse devenir l’"éminence grise" de la direction. L’identité de l’entreprise, lesystème de valeur et le comportement du dirigeant sont déterminants pour fixer le rôle ducontrôleur de gestion.

Au travers de notre étude, bien que définissant le métier du contrôleur de gestion, nous nousattacherons plus particulièrement à l’organisation de son travail dans les PME et les groupes.Ainsi nous verrons dans un premier temps, en guise d’approche, comment est apparu lecontrôle de gestion et quelle a été son évolution. Puis, afin d’obtenir une vision plus précisedu sujet, nous aborderons l'aspect purement théorique de l'organisation du travail ducontrôleur de gestion. Dans un troisième temps, nous confronterons la théorie et la pratique autravers d’entretiens réalisés auprès de contrôleurs de gestion appartenant à différents types destructure. Enfin, nous élargirons le sujet en nous intéressant à l’organisation du travail ducontrôleur de gestion à l'international.

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I- Apparition et évolution du contrôle de gestion

Il nous a semblé essentiel, dans le cadre de notre sujet, de retracer l'apparition et l'évolution ducontrôle de gestion puisque son organisation en découle de façon directe. Par conséquent,nous y avons consacré une part importante de notre étude.

1. Environnement économique et technologique des entreprises

Il est possible de repérer les évolutions majeures du contexte économique et technologiquedes entreprises à partir du début du XXème siècle et du développement massif del'industrialisation.

a. Environnement économique

Pour bien comprendre les outils d'aide élaborés par les gestionnaires dans leurs prises dedécision, il convient de caractériser les forces et les contraintes de l'environnement actuel desentreprises.

a) L'offre

Les producteurs industriels, peu nombreux au début du XXème siècle et localisésgéographiquement dans seulement quelques pays occidentaux, proposent des produits peudiversifiés, qui satisfont le marché.

L'offre en quantité, nettement inférieure aux besoins qui s'expriment, trouve sans problèmedes débouchés, de manière stable dans le temps et l'espace.

Les entreprises y ont peu besoin de lutter entre elles et leur mode de gestion est relativementproche.

Le développement de plusieurs pays et marchés, la forte croissance conjoncturelle après laSeconde Guerre mondiale provoquent de profondes modifications dans l'offre de production :- des entreprises de plus en plus nombreuses, situées dans des zones géographiques très

éloignées et très différentes, proposent des produits assez similaires ;- on aboutit aujourd'hui à une mondialisation des échanges, des marchés autour de trois

pôles qui forment la triade : zone Europe, zone Amérique, zone Asie ;- cette extension du champ d'action des entreprises modifie profondément leur gestion car la

concurrence s'intensifie et les gestionnaires ont besoin de nombreux paramètres pourdifférencier leurs produits.

b) La demande

Avec l'industrialisation du début du siècle et l'apparition de produits satisfaisant des fonctionset des besoins nouveaux, la demande accepte et absorbe sans difficulté les productions desentreprises.

Cette "première" demande en forte croissance est seulement quantitative, peu évolutive dansle temps et peu exigeante dans les caractéristiques des produits.

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Après une période de production et de consommation de masse, avec des produits standard, lademande devient plus précise dans ses attentes, plus versatile dans sa fidélité aux entrepriseset à leurs marques, avec des évolutions rapides et imprévisibles. Les produits doivent être plusdiversifiés et avec une dimension qualitative certaine.

On est donc passé d'une économie de production à une économie de sélection.

b. Environnement technologique

Avec les contraintes techniques du début du siècle, les entreprises disposaient de machines"rigides" destinées à une seule opération, une seule fonction, un seul produit. A partir de1960, grâce à la diffusion des technologies de l'électronique pouvant s'intégrer dans tous lesmétiers, à tous les niveaux de gestion, les rigidités techniques disparaissent.

Les machines et les postes de travail deviennent polyvalents, flexibles pouvant changerd'outils, de fonctions, de produits. Cette souplesse dans la production permet de réduire unecontrainte forte des entreprises et de proposer des produits plus diversifiés en petite quantité.

Mais les potentialités des technologies électroniques ne s'arrêtent pas au domaine de laproduction ; l'information et la communication sont particulièrement touchées parl'électronique, la télématique qui offrent des supports aux performances presque illimitées.

Les entreprises intègrent ces nouvelles technologies de l'information et de la communicationtant à l'intérieur qu'à l'extérieur de leur organisation, modifiant ainsi sensiblement leur modede gestion, leur processus décisionnel, leur structure de fonctionnement.

c. Évolution des modes de production

De ces nombreuses évolutions du contexte tant économique que technologique desentreprises, il en découle une adaptation nécessaire des modes de production.• Les entreprises ont d'abord mis en place une organisation taylorienne pour une production

standardisée.• Puis face à une demande de plus en plus segmentée, les entreprises ont élaboré une

organisation avec une différenciation retardée des produits permettant une productiondiversifiée.

• Aujourd'hui, les entreprises doivent souvent modifier leur organisation et leurscombinaisons productives pour une production flexible.

Ainsi, l'environnement économique et technologique paraît aujourd'hui instable, enperpétuelle évolution dans le temps et dans l'espace. Les besoins en information et laconception des systèmes d'information de l'entreprise dépendent fortement des degrés deturbulence et de complexité du contexte de gestion.

è Les entreprises doivent adapter leurs outils de production, la structure et le fonctionnementde leur organisation ; elles doivent donc aussi réfléchir à des évolutions de leurs outils degestion, et au contrôle de gestion en particulier.

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2. L'entreprise et sa gestion

La présentation des objectifs et des variables actuelles de la gestion permet de mieux situer lesenjeux du contrôle de gestion.

a. La gestion des entreprises aujourd'hui

La gestion, science des choix et de l'action, consiste à conduire une organisation en utilisantde nombreuses techniques et démarches pour aider aux décisions.

La gestion est à la fois théories et pratiques, application de plusieurs sciences, hybride entredes sciences "dures" (sciences exactes) et des sciences "molles" (sciences humaines),carrefour de plusieurs disciplines (économie, histoire, géographie, sciences politiques, droit,sociologie, mathématiques).

Dans son acception actuelle, la gestion (traduction du terme anglo-saxon management)regroupe deux dimensions : la gestion stratégique (ou gestion de marché) et la gestionopérationnelle (ou gestion de l'entreprise). Ainsi la gestion voit son champ d'action s'agrandirtant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'organisation.

Dans ce contexte complexe et incertain, les variables à gérer comme leviers des décisions semultiplient et s'influencent réciproquement, parfois de manière contradictoire ; ainsi, parexemple, le gestionnaire doit piloter la qualité tout en minimisant les coûts, et réduire lesdélais tout en distribuant des produits et des services sur un espace plus grand.

Le cadre actuel de la gestion est celui de la recherche d'une compétitivité permanente, c'est-à-dire d'une position concurrentielle forte tant par les prix que par d'autres paramètres.

Liés à la compétitivité, deux concepts forts apparaissent aujourd'hui dans les objectifs de lagestion. Nous allons les présenter avant d'en déduire les variables à piloter : la valeur et laperformance.

b. Performance, valeur et coût

a) La performance

Pour être compétitive, toute entreprise doit être performante, c'est-à-dire meilleure que sesconcurrents tant dans sa stratégie que dans son organisation.

è En gestion, le terme de performance est défini comme l'association de l'efficacité et del'efficience. L'efficacité consiste pour une entreprise à obtenir des résultats dans le cadre desobjectifs définis. L'efficience correspond à la meilleure gestion possible des moyens, descapacités en relation avec les résultats.

La performance oblige donc à une vision globale interdépendante de tous les paramètresinternes et externes, quantitatifs et qualitatifs, techniques et humains, physiques et financiersde la gestion.

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Le gestionnaire doit donc rechercher la performance globale, qui intègre plusieurs niveauxd'évaluation :- pour la production, c'est l'amélioration permanente de la productivité, donc un rendement

physique, associé à un niveau élevé de qualité ;- pour la vente, c'est la compétitivité sur le marché ou la différence valeur-coût ;- pour la finance, c'est la rentabilité.

b) La valeur

Aujourd'hui, la notion de valeur prend une importance cruciale dans la gestion, au-delà de sonsens économique premier. La valeur concerne le produit et l'entreprise.

• La valeur d'un produit n'est pas seulement la différence entre un prix de vente et un coûtde revient mais l'appréciation subjective et fluctuante, par la demande, de l'utilité apportéepar les fonctions d'un produit.

• La valeur d'un produit ne s'obtient pas seulement par l'activité de transformation dematières premières en biens et ne se limite pas à la notion de valeur ajoutée ; elle découleaussi de l'apport de toutes les activités principales (logistique interne, opérations(production), logistique externe, marketing et ventes, services) et de soutien (infrastructurede l'entreprise, gestion des ressources humaines, développement de la technologie,approvisionnement) de l'organisation comme l'analyse la notion de "chaîne de valeur" deM Porter.

La valeur de l'entreprise dépendra ainsi, en partie, de la valeur de ses produits et de sesactivités.

Le gestionnaire n'agit plus seulement en fonction des coûts mais doit piloter le couple valeur-coût.

L'approche en termes de valeur oblige donc à gérer les activités, à remettre en causeéventuellement l'organisation et son système d'information.

c. Les variables de gestion essentielles aujourd'hui

Dans cet environnement, face à ces contraintes économiques et technologiques, quels sont lesleviers essentiels de l'action pour le gestionnaire ?

Il semble possible de présenter les dimensions essentielles de la gestion contemporaine. Pourêtre compétitive et performante, l'entreprise recherche la flexibilité sous de nombreusesformes, induisant ainsi une gestion de variables multiples : gestion du temps, du risque, de lataille, des frontières, de l'innovation, de la qualité, de la structure, des connaissances, descoûts…

Tous ces problèmes actuels conduisent le gestionnaire à piloter un changement permanent tantdans les produits, les activités que dans les structures, le management, les outils de gestion.

La problématique actuelle de la gestion des entreprises peut donc être résumée de cette façon :le contexte (mondialisation, forte concurrence, segmentation des marchés, demandehétérogène, instable, technologies flexibles, complexité de l'environnement, incertitude del'environnement) influence la détermination des objectifs pour l'entreprise (valeur,

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performance, productivité, flexibilité, coût, qualité, délai) qui conditionnent les variables degestion (variables stratégiques, variables organisationnelles, temps, espace, taille, qualité,innovation, risque, connaissances, changement).

è Construits pour une économie de l'offre dans un environnement stable et peu concurrentieldans la première moitié du XXème siècle, la plupart des outils de gestion et de contrôle degestion en particulier doivent être rénovés pour aider au management, compte tenu desbesoins actuels.

3. L'apparition du contrôle de gestion

a. Les premières formalisations

a) Histoire des coûts

L'histoire du calcul des coûts apparaît comme la plus ancienne car elle concerne toutes lesformes d'entreprise, dès lors que s'instaure une activité économique.

La diffusion des pratiques et des formalisations (pas nécessairement corrélées) sur le calcul etl'analyse des coûts progresse véritablement avec la première phase de la révolutionindustrielle et ira en s'amplifiant.

Bertrand Gille parle de "socialisation de la technique" ; au-delà d'un processus technique, lecalcul et l'analyse des coûts comportent des aspects économiques, organisationnels, sociaux,juridiques, donc transmettent une vision transversale et pluridisciplinaire des entreprises.

Les modifications organisationnelles de la production expliquent l'évolution des besoins dansle calcul des coûts. C'est le passage du système du "putting-out" (production externalisée chezles ouvriers) au système de "factory" (production regroupée dans une usine).

• Le système externalisé de production ou putting-out

Dans le système de production le plus répandu avant la révolution industrielle, l'entrepreneurest un intermédiaire qui se déplace, apporte travail et matières premières chez l'artisan quipossède ses outils puis revient chercher le produit fini (d'où l'origine du terme "prix derevient").

Dans ce système, l'entrepreneur ne cherche pas à connaître le coût, puisque l'information de lavaleur ajoutée lui est donnée par le "prix de revient" qu'il compare au prix d'achat desmatières.

• Le système regroupé de production ou factory

Les nouvelles technologies du XVIIIè et du XIXè siècle bouleversent les sources d'énergie etles machines et poussent ainsi à une organisation concentrée de la production : les machinessont regroupées dans des usines dans lesquelles les ouvriers viennent travailler.

L'entrepreneur n'est plus alors seulement un intermédiaire marchand, il devient également uninvestisseur et un innovateur. Dès lors il cherche à mesurer des coûts et à contrôler le travail.

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Dans l'histoire des coûts appliquée aux entreprises industrielles, plusieurs étapes apparaissentavec une évolution du vocabulaire.

♦ D'abord c'est la comptabilité industrielle qui s'élabore et se diffuse avec le développementindustriel occidental durant tout le XIXè siècle (même si des formalisations n'apparaissent,en France, dans des traités de comptabilité industrielle qu'à partit de 1870).

Elle consiste à mesurer les coûts des flux internes à l'organisation, c'est-à-dire les coûts detransformation des matières premières sur les machines de l'usine avec des ouvriers. Elle doitpermettre au gestionnaire de mesurer les coûts des processus de production, donc des produitsfabriqués, et d'aider à la fixation des prix face à la concurrence des autres industriels.

♦ Vers 1915 avec l'OST (organisation scientifique du travail) proposée par F. Taylor, lacomptabilité s'affine, segmente les activités, calcule des normes (coûts standard, coûtspréétablis), des écarts par rapport aux normes, contrôle des résultats, des responsabilités.La comptabilité devient analytique d'exploitation afin de prévoir et de vérifier lesréalisations de toutes les organisations, et pas seulement industrielles.

♦ A l'heure actuelle, le terme comptabilité de gestion permet d'intégrer toutes les démarcheset les techniques qui aident les gestionnaires à connaître les coûts au sein de leurorganisation.

b) Histoire du "contrôle"

Le contrôle des activités et le domaine du contrôle de gestion qui en découle sont plutôtcorrélés à la phase d'industrialisation de la fin du XIXè siècle et surtout du début du XXè

siècle.

• Né de l'évolution du monde technique et économique avec les analyses de Taylor (1905)sur le contrôle de productivité, les recherches de Gantt (1915) sur les charges de structureet les choix de General Motors (1923) et de Saint-Gobain (1935) pour des structures pardivision, le contrôle de gestion concerne alors principalement l'activité de production maisne s'appelle pas encore ainsi.

• Une première évolution dans les enjeux et le champ d'analyse des premières formes decontrôle de gestion va apparaître avec l'accroissement de la taille des unités de productionet de leur diversification. Il devient nécessaire de déléguer des tâches, des responsabilitéstout en exerçant un contrôle sur les exécutants.

Ainsi, après l'analyse des coûts, les entreprises mettent en place des budgets prévisionnels etréels pour contrôler les réalisations et mesurer les écarts ; c'est pourquoi le contrôle de gestionest souvent considéré comme synonyme, à tort, du contrôle budgétaire.

Si les premiers principes et méthodes du contrôle de gestion sont apparus entre 1850 et 1910,aux États-Unis et en Europe, les pratiques se sont élaborées progressivement en fonction desbesoins des entreprises.

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• Ensuite, avec le développement des produits et des services dans une conjoncture encroissance, les gestionnaires vont chercher dans le contrôle de gestion une aide auxdécisions ainsi que des pistes pour contrôler les acteurs dans la structure.

Jusqu'au début des années 70, les grandes entreprises françaises qui ont introduit un contrôlede gestion ont reproduit approximativement le modèle des firmes industrielles américaines :- un processus de planification, de gestion budgétaire, de contrôle budgétaire, allant du long

terme au court terme ;- dans une structure hiérarchique découpée verticalement en centres de responsabilité ;- avec un système de pilotage par le couple objectifs-moyens (c'est-à-dire des informations

sur des résultats qui permettent de réguler les actions).

Ainsi, depuis le début du siècle, le contrôle de gestion a été conçu dans le cadre d'une gestiontaylorienne fondée sur quatre principes :- stabilité dans le temps ;- information parfaite des dirigeants ;- recherche d'une minimisation des coûts ;- coût de production dominant dans le coût total.

Le contrôle de gestion est alors un modèle pour mesurer et contrôler la productivitéindustrielle et en particulier la productivité du travail direct.

• A partir des années 70, les perturbations extérieures et intérieures aux organisationsobligent à une remise en cause assez profonde de ce modèle dans ses objectifs, ses outils,ses utilisations.

b. Des évolutions permanentes

Tout système d'information d'aide à la gestion d'une performance doit tenir compte descontraintes et des opportunités de l'environnement économique, des orientations stratégiquesdes entreprises, des contraintes de structure des organisations.

Ainsi de nombreuses pressions et évolutions ont fait émerger un contrôle de gestion avec desobjectifs plus larges, des démarches et des outils diversifiés.

4. Les différentes formes de contrôle

a. La notion de contrôle

• Contrôler une situation signifie être capable de la maîtriser et de la diriger dans le sensvoulu. Tout contrôle vise à mesurer les résultats d'une action et à comparer ces résultatsavec les objectifs fixés à priori pour savoir s'il y a concordance ou divergence.

Le contrôle doit donc aboutir, si nécessaire, à un retour sur l'amont pour rectifier les décisionset les actions entreprises. Pour une entreprise, le contrôle est d'abord compris et analysécomme le respect d'une norme ; c'est un contrôle de régularité. Il participe alors au "processusde la gestion" :

Information è Décision è Action è Contrôle

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Au sein d'une organisation, le contrôle se développe de manière dynamique ; c'est pourquoi ilfaut plutôt parler du processus de contrôle.

• Le processus de contrôle comprend toutes les étapes qui préparent, coordonnent, vérifientles décisions et les actions d'une organisation. Le processus comprend donc en généraltrois phases :

Décision è Action è RésultatAvant Pendant Après

Ces trois étapes sont repérées par des questions et des tâches précises :- finalisation : quels objectifs ? quelles ressources ? comment employer au mieux ces

ressources ? comment évaluer les résultats ?- pilotage : pendant l'action, quelles corrections mettre en place si nécessaire pour réorienter

le déroulement en fonction des finalités choisies ?- évaluation : quelle mesure des résultats ? quelle efficience ? quelle efficacité ?

Le processus de contrôle touche toutes les décisions et actions d'une entreprise.

Ainsi il est possible d'appliquer ces trois étapes sur les trois niveaux de décision mis enévidence par I. Ansoff : décision stratégique, décision tactique, décision opérationnelle. Onobtient un processus de contrôle distinct pour chaque niveau de décision ; cette définitionpermet de délimiter le contrôle de gestion.

b. Décisions de gestion et niveaux de contrôle

Avec un découpage temporel de la gestion, clair plus que réaliste, il est possible de définirplusieurs contrôles corrélés à chaque niveau de gestion.

• La gestion stratégique oriente les activités sur le long terme de l'entreprise : à ce niveau,un contrôle stratégique doit aider les prises de décisions stratégiques par la planificationstratégique, l'intégration de données futures en fonction d'un diagnostic interne et externe.

• La gestion quotidienne ou courante suit les actions de court terme (un an) et très courtterme (moins d'un an) : c'est alors un contrôle d'exécution ou contrôle opérationnel quidoit permettre de réguler les processus répétitifs (productifs ou administratifs) en vérifiantque les règles de fonctionnement sont respectées.

Dans cette décomposition du temps, le contrôle de gestion est alors positionné commeinterface entre le contrôle stratégique et le contrôle opérationnel. Il permettrait de réguler surle moyen terme en contrôlant la transformation des objectifs de long terme en actionscourantes.

c. La place du contrôle de gestion

Désormais, il est possible d'enrichir les premières définitions du contrôle de gestion :- le contrôle de gestion doit permettre de gérer au mieux les décisions et les actions de

moyen terme, en général un an ;- le contrôle de gestion est aussi l'interface entre la stratégie et les actions de routine et doit

assurer la cohérence entre les deux ;

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- en tant que processus de contrôle il est possible de préciser, pour les trois étapes, lestâches du contrôle de gestion :• la finalisation du contrôle de gestion consiste à planifier les actions (planification

budgétaire) et à établir les rôles des acteurs,• le pilotage dans le contrôle de gestion consiste à déclencher des actions correctives en

fonction des écarts, des tableaux de bord mis en place,• l'évaluation dans le contrôle de gestion correspond à la mesure des résultats et de la

performance des actions.

è H. Bouquin propose alors la définition suivante : "Le contrôle de gestion est formé desprocessus et des systèmes qui permettent aux dirigeants d'avoir l'assurance que les choixstratégiques et les actions courantes seront, sont et ont été cohérents, notamment grâce aucontrôle d'exécution." L'idée essentielle à retenir est que le contrôle de gestion est unsystème d'information qui s'est construit par étapes, sur l'organisation interne del'entreprise. Il s'appuie sur une représentation, une modélisation, à un moment donné, del'organisation de l'entreprise.

5. Les sources d'information

a. La comptabilité, matière première essentielle du contrôle de gestion

Le système d'information financier comptable, commun à toute entreprise, est la premièresource de données pour mesurer et analyser l'activité économique. Mais la comptabilitégénérale n'est pas suffisante pour décomposer les coûts et calculer des rentabilités.

Dès le début du siècle, des ingénieurs et des gestionnaires américains et français (Gantt)élaborent des méthodes d'analyse des coûts : séparation coût fixe-coût variable, notion depoint mort, imputation rationnelle proposée en France en 1928 par Rimailho.

La comptabilité est donc, jusqu'aux années 70, la source essentielle des analyses menées parle contrôle de gestion ; d'ailleurs l'organisation du travail fondée sur les principes tayloriens seretrouve dans ce système d'information comptable et correspond aux objectifs assignés aucontrôle de gestion.

En France, c'est le PCG 1982 qui définit les notions fondamentales de coût et utilise le termede "comptabilité analytique" et non "comptabilité de gestion". Le PCG doit permettre uneharmonisation du vocabulaire, des procédures et des analyses.

b. Comptabilité de gestion et comptabilité financière

Si les deux termes existent, la frontière entre ces deux comptabilités n'est pas très nette et lesgestionnaires utilisent les deux conjointement. D'ailleurs la comptabilité financière a besoinde la comptabilité de gestion pour établir ses résultats.

Les angles d'attaque de ces comptabilités diffèrent par les utilisations de leurs informations ;en effet, la comptabilité financière est "réservée" à ceux qui financent les activités, les tiersqui ont besoin d'évaluer la situation de l'entreprise, alors que la comptabilité de gestion estutilisée par ceux qui gèrent pour aider à positionner l'entreprise par rapport aux concurrents.

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Cette dichotomie simple ne reflète pas complètement la réalité car les pratiques conduisent àutiliser les informations d'où qu'elles viennent pourvu qu'elles soient pertinentes pour lesdécisions. Il n'est pas possible de faire un classement des comptabilités selon les utilisateurscar alors chaque décideur ou responsable, selon sa position et son métier, aurait besoin de sonpropre système d'information.

Il est difficile d'élaborer des passerelles entre la comptabilité de gestion et la comptabilitéfinancière même si la gestion actuelle a besoin de cette association et si des logiciels peuventaider à cette intégration.

c. Vers une normalisation internationale

L'internationalisation des marchés et des échanges commerciaux et financiers, lamultiplication des alliances transnationales entre entreprises, nécessitent une homogénéisationdes indicateurs de performance des entreprises.

Au-delà des associations nationales de comptables et de contrôleurs de gestion qui discutentde leurs problèmes et harmonisent leurs pratiques, des consortiums ou des fédérationsinternationales essaient de rassembler ces professions pour élaborer des procédurescommunes. Mais les convergences sont difficiles à trouver et l'observation de la réalité faitapparaître une juxtaposition de référentiels.

Depuis une vingtaine d'années, une institution internationale réfléchit au problème de lamondialisation des règles comptables.

• En 1973, des associations professionnelles de comptables ont constitué un comitéinternational pour la normalisation comptable, l'IASC (International Accounting StandardsComittee), organe privé sans pouvoir institutionnel sur les entreprises.

Pendant une première période, de 1973 à 1995, le comité a essayé d'élaborer des normesinternationales en comparant les normes de chaque pays et en choisissant les plus pertinentes.

Les normes internationales étaient déterminées de telle manière qu'elles soient les pluscohérentes possibles avec des référentiels nationaux très différents.

L'IASC avait alors un rôle d'harmonisateur pour des pratiques financières transnationales(fusions, consolidations, achats) sans pour autant avoir un quelconque pouvoir de contraintesur les entreprises pour leur adoption.

Le comité a ainsi édicté trente-deux normes comptables internationales (IAS, InternationalAccounting Standard).

• En 1995, l'IASC a conclu un accord avec un organisme regroupant les commissions debourse (IOSCO) pour proposer une panoplie complète de normes permettant auxentreprises de se faire coter à l'étranger avec les mêmes états financiers.

Ainsi, l'IASC n'est plus seulement un harmonisateur mais devient un concepteur de normes exnihilo sans référence à une pratique déjà existante dans un pays.

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Mais l'IASC n'est pas le seul organe de réflexion et des divergences, des rapports de forceapparaissent.

Ainsi le Financial Accounting Standards Board (FASB), comité américain travaillantdavantage sur la finance, a émis des normes moins strictes que l'IASC dans le domaine desdépréciations d'actifs, favorisant éventuellement des entreprises qui souhaiteraient seprésenter sur des marchés boursiers américains.

De même, le SEC (Securities and Exchange Commission), organe très puissant de la bourseaméricaine, essaie d'influencer les orientations de l'IASC pour maintenir sa suprématie.

Ainsi en 1998, il existe deux référentiels adaptés aux firmes transnationales : le premier estaméricain et le deuxième est celui de l'IASC ; les entreprises hésitent parfois à opter pour lesnormes IASC car elles craignent des difficultés pour pénétrer le marché américain.

La tendance d'un rapprochement des référentiels nationaux vers une norme internationalesemble inéluctable : sinon comment lire et comparer des bilans de sociétés de nationalitédifférente ? La convergence apparaîtra certainement dans quelques années.

Le contrôle de gestion est dépendant de tendances d'harmonisation internationale car il utilisedes données comptables et financières issues des systèmes comptables imposés, mais lesdémarches et les techniques du contrôle de gestion ne sont pas soumises à des normalisationseuropéennes ou internationales ; chaque entreprise élabore ses systèmes de prévisions, decontrôle, ses tableaux de bord "sur mesure" en fonction de ses besoins.

De la même façon que les entreprises ont évolué avec le contexte et l'environnementéconomique, le contrôle de gestion, sa place, son organisation se sont adaptés aux différentesstructures d'entreprise.

II- Organisation du contrôle de gestion : généralités

Dans cette seconde partie, nous allons tenter de définir quelle est la place et le rôle ducontrôleur de gestion dans l’organisation ou la PME. Plus précisément, l’étude portera dansun premier temps sur la structure organisationnelle propre à chaque type d’entreprise, puis,dans un deuxième temps, nous élaborerons les différents organigrammes possibles.

1. La structure organisationnelle

Les organisations offrent une grande diversité de structures en même temps qu’une stabilité etune efficacité très différentes. Depuis le début du siècle, chercheurs et praticiens ont tentéd’expliquer les causes profondes de ces différences. Leurs réponses, très variées, peuvent êtreappréhendées au travers de l’examen d’écoles, de doctrines qui caractérisent les tendancesdominantes de certaines approches.

Du foisonnement de ces théories, Henry Mintzberg, professeur de management à l’universitéMcGill de Montréal, a tiré une synthèse particulièrement intéressante. Dans son célèbreouvrage Structure et dynamique des organisations, il définit la structure d’une organisation

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comme "la somme totale des moyens employés pour diviser le travail entre tâches distinctespour ensuite assurer la coordination nécessaire entre ces tâches".

D’après Mintzberg, les organisations sont composées de cinq éléments de base :

• le centre opérationnel : il rassemble les membres de l’organisation (opérateurs) dont letravail est directement lié à la production des biens et des services. Il procure les entréesnécessaires à la production, fabrique et distribue les produits, assure la maintenance.

• le sommet stratégique : sa fonction est de faire en sorte que l’organisation remplisse samission de façon efficace et qu’elle serve les besoins de ceux qui la contrôlent ou qui ontsur elle du pouvoir (propriétaires, administrations…). Il exerce des fonctions desupervision directe : allocation des ressources, règlement des conflits, contrôle, diffusionde l’information, leadership. Il est également chargé de la gestion des conditions defrontière de l’organisation et de ses relations avec l’environnement(contacts à haut niveau,négociation…). Enfin, il doit développer la stratégie de l’organisation.

• la ligne hiérarchique : c’est la ligne d'autorité, composée de cadres, contremaîtres, etc., quijoint le sommet stratégique au centre opérationnel. Chaque membre de la chaînehiérarchique accomplit, à son niveau, le travail du sommet hiérarchique.

• la technostructure : elle est composée d’analystes, chargés de la conception et del’adaptation de la structure, qui agissent sur le flux de travail par le biais de lastandardisation.

• les unités fonctionnelles logistiques : il s’agit des unités qui ont une fonction particulière àremplir : recherche, contentieux, relations publiques, etc. Elles interviennent indirectementdans le flux de travail.

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Le contrôleur de gestion trouve sa place dans la technostructure : il aide la ligne hiérarchiqueet le centre opérationnel, et a une influence sur la façon dont les autres travaillent.

A partir de son étude, Mintzberg déduit qu’il existe cinq formes de configurationsstructurelles parmi lesquelles on peut classer toutes les organisations. Chaque forme sedistingue des autres par le type de contexte dans lequel elle est envisageable, mais aussi pardes différences fondamentales dans le style de contrôle qui s’y exerce et dans la nature et lalocalisation des pouvoirs des cinq catégories d’acteurs.

a. La structure simple

La structure simple (PME en râteau) : elle concentre les pouvoirs au sommet, repose sur unefaible formalisation des procédures, laisse peu de place au contrôle de gestion. En effet, lecontrôle de gestion est ici un outil de gestion prévisionnel et le contrôleur, quand il existe, estpolyvalent.

b. La bureaucratie mécaniste

La bureaucratie mécaniste (administration, entreprises publiques caricaturales) : elle s’adaptebien à un environnement simple et stable, elle comporte un poids important de règles denormalisation des tâches adaptées à la production de masse. Le contrôleur de gestion a un rôlede gestion prévisionnelle, notamment vers les fonctionnels, qui est marginalisé ettechnocratique.

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c. La bureaucratie professionnelle

La bureaucratie professionnelle (hôpital, université) : elle laisse une place beaucoup plusfaible au contrôle d’exécution au profit d’un contrôle de gestion orienté vers les résultats. Onla rencontre dans les environnements stables mais complexes (expertise-comptable) où il fautdéléguer les opérations à un personnel qualifié capable de prendre en charge de façonautonome tous les éléments d’une situation, guidé par des obligations de résultats que lastabilité de l’environnement permet de décrire de manière précise sur un horizon à courtterme.

Le contrôleur de gestion y rencontre un problème de légitimité, de compréhension mutuelle.Mais sa situation dépend de la répartition du pouvoir entre les opérationnels et lesfonctionnels administratifs, et de son talent pour faire comprendre les processus transversaux.

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d. La structure divisionnelle

La structure divisionnelle (grandes entreprises diversifiées) : elle s’adapte à un environnementrelativement simple et stable. Le contrôleur de gestion y a un rôle fondamental : cettestructure repose sur la délégation en objectifs-moyens que permet le processus de contrôle degestion, "inventé" dans sa forme actuelle en même temps que la structure par produits etmarchés (Alfred Sloan, Donaldson Brown, Pierre Du Pont, Pennsylvania Railways au milieudu XIXè, selon la description de A.D. Chandler).

e. L'adhocratie

L’adhocratie (gestion par projets) : sa fluidité n’y circonscrit pas une structure de pouvoirstable. Le jeu interpersonnel du pouvoir s’y exerce pleinement alors que dans les autresconfigurations le pouvoir est plus ou moins concentré. C’est une des raisons pour lesquelles P.Drucker parle de "structure systémique" à son propos.

Le contrôleur de gestion y a un rôle fondamental de délégation et suivi dans les projets. Maisil a des concurrents pour la coordination, surtout si le contrôle est très comptable et que lecontrôleur s’isole.

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2. Un positionnement hiérarchique adapté

Le contrôleur de gestion est le navigateur de l’entreprise. Il connaît le but (qu’il a aidé àdéfinir) et les plans d’actions qui permettront de l’atteindre. Il suit en permanence la marcheréelle de l’entreprise et avise les responsables des écarts avec la route prévue afin que ceux-cipuissent prendre à temps les mesures correctives nécessaires.

Il est à la fois :- le conseiller économique de l’entreprise (c’est-à-dire de tous les responsables, et pas

seulement du directeur général) ;- le "mécanicien" du système budgétaire (c’est-à-dire celui qui conçoit, anime et

entretient le système) ;- l’"animateur" du système de contrôle de gestion.

Alors quel positionnement au sein de la structure ?

Le contrôleur de gestion se trouve placé le plus souvent en position "fonctionnelle", et estrattaché directement au directeur général, au directeur financier ou à un autre positionnement.

a. Rattachement au directeur général

C’est la meilleure solution :

• la légitimité du contrôleur de gestion qui ne dispose pas de pouvoir hiérarchique estrenforcée par ce bon positionnement. Ce dernier se justifie également par l’étendue duterrain d’action : stratégie, contractualisation, exploitation.

• les préoccupations du contrôleur de gestion sont également plus larges que celles dudirecteur administratif et financier.

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b. Rattachement au directeur financier

Cette solution présente plusieurs inconvénients :- le directeur financier peut constituer un "écran" plus ou moins opaque entre le directeurgénéral et le contrôleur de gestion ;- le contrôleur de gestion porte l’étiquette "direction financière" qui peut rendre plus difficileses rapports avec les opérationnels eux-mêmes et leurs responsables, car il sera à la fois jugeet partie ;- les sources d’information seront prioritairement de nature économique et financière audétriment de données opérationnelles (volume, qualité, délai).

c. Autre positionnement

Certaines organisations ont placé la fonction au même niveau que les principaux responsablesde l’entreprise, ce qui peut faciliter les communications.

DG

Rattachement au Directeur Administratif et Financier

DAF

CDG

DG

Rattachement en râteau

CDGDAFDPDC

DG

CDG

Rattachement au Directeur Général

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Dans les PME, le contrôleur de gestion est souvent confondu avec le directeur administratif etfinancier ou avec le secrétaire général. Il occupe alors une position hiérarchique sans que celaprésente les mêmes inconvénients que dans une grande entreprise.

Enfin, dans une structure par divisions ou centres de profit, le contrôleur de gestion peut êtredécentralisé : le contrôleur de gestion de la division est rattaché hiérarchiquement auresponsable de la division et fonctionnellement au contrôleur de gestion central.

Quoi qu’il en soit, il est impératif qu’il soit le plus "terrain" possible. Passer plus de 20 % deson temps dans un bureau est déjà beaucoup. N’oublions pas que son champ d'action s’étendde la direction générale aux opérationnels. Ce n’est qu’à l’écoute active du terrain qu’il pourraremplir efficacement sa mission.

d. La problématique du positionnement

La question du positionnement "idéal" revient régulièrement. Les échanges qui en découlentfont apparaître que, quel que soit le type de rattachement (même celui au directeur général),les insatisfactions demeurent nombreuses.

En fait, derrière cette question se pose celle du pouvoir et du rapport de force au sein del’entreprise. Ce rapport se compose d’un certain nombre d’éléments :- autorité- image- influence- sanction- information- temps.

C’est ce que l’on appelle également les curseurs du pouvoir. Au-delà de son rattachement, lesvéritables questions sont au nombre de trois :- comment se positionne chacun des curseurs à l’égard de la direction générale ?- comment se positionne chacun des curseurs à l’égard des opérationnels ?- quels sont les leviers dont le contrôleur de gestion dispose pour rééquilibrer voire inverser lerapport de force en sa faveur ?

En effet, aucun rattachement ne contribue jamais, pour des raisons tant liées à l’organisationqu’à lui-même, à positionner tous ces curseurs de son côté. Cela tient au fait qu’en matière depouvoir, il existe trois composantes :- les curseurs qui représentent le pouvoir intrinsèque résultant de son positionnement ;- la volonté à utiliser ce pouvoir. Cela dépend des enjeux stratégiques et financiers desmissions que le contrôleur de gestion conduit ;- la capacité personnelle à l'exercer. Celle-ci est fortement conditionnée par son expertise, sacapacité à persuader, à oser et à entreprendre.

Nous allons à présent confronter la théorie à la pratique à travers l'analyse de trois entreprisesprésentant des organisations différentes en ce qui concerne le contrôle de gestion.

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III- Organisation du contrôle de gestion : pratique

1. Questionnaire type sur l’organisation du travail du contrôle de gestion

Ce questionnaire a été utilisé lors des entretiens avec les contrôleurs de gestion des troisentreprises.

I/ Présentation générale de l’entreprise

II/ Présentation de l’organisation du travail du contrôle de gestion

1) Quel statut avez-vous dans l’entreprise ?

2) Quel est votre rôle en tant que contrôleur de gestion dans l’organisation ?

3) Comment définissez-vous la fonction du contrôleur de gestion : plutôt "bureau" ou plutôt"terrain" ?

4) Quelles sont :- vos tâches ?- vos objectifs ?

Existe-il un travail quotidien répétitif ?

Quelles sont les échéances à respecter ?

5) Quel rôle jouez-vous entre les différents services ?

6) Quelle est votre position dans l’organigramme ?

7) Votre service est-il indépendant ou est-il rattaché à un autre service (comme le servicefinancier par exemple, etc.) ?

Cela pose-t-il problème ?

8) Quels sont les facteurs qui déterminent telle ou telle organisation ?

9) Comment fonctionne le service de contrôle de gestion en interne ?

III/ Conséquences de l’organisation de l'entreprise

1) Quels sont les avantages et les inconvénients de votre position ?

2) Quel est votre rôle dans la stratégie de l’entreprise ?

3) Quel est votre pouvoir dans l’organisation de l’entreprise ?

4) Comment les autres acteurs vous perçoivent-ils ?

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IV/ Point de vue personnel du contrôleur de gestion

1) Si vous en aviez le pouvoir, changeriez-vous l’organisation du contrôle de gestion ?

2) Selon vous, le contrôle de gestion est-il à sa véritable place dans cette organisation ?

2. L’organisation du travail du contrôle de gestion dans une PME

I/ Présentation de l'entreprise

Il s’agit d’une banque de dépôt classique dont l'activité est répartie sur huit agences. Sonactivité peut être décomposée de la façon suivante :

- 20% pour le réseau d’agences (activité domestique) ;- 80% pour la salle des marchés.

Tout d'abord, cette banque contribue au financement de l’économie du Portugal par l'accordde crédits aux entreprises portugaises. D'un point de vue fiscal il est en effet plus intéressantpour ces entreprises de se financer à l’étranger. Ensuite, 50% du portefeuille d'activité de labanque concerne des entreprises nord-américaines.

En outre, cette entreprise emploie 150 à 160 salariés en France.

II/ Présentation de l'organisation du travail du contrôle de gestion

Au sein de cette entreprise, le contrôle de gestion dépend de la direction financière. Il n’estpas rattaché à la comptabilité qui constitue un service à part.

• Les missions du contrôle de gestion

Dans le cas présent, le contrôle de gestion possède une fonction de production des états desynthèse quotidiens ou mensuels. De plus, il effectue le contrôle de l’activité et affine lesdocuments comptables. Il est également en charge de la réalisation d'une étude de rentabilitélors du lancement d’un nouveau produit. Enfin, il donne une explication dynamique deschiffres comptables.

• Les fonctions du contrôleur de gestion

Dans cette entreprise, le contrôleur de gestion effectue plutôt un travail administratif. En effet,il établit des plans budgétaires : ceux-ci sont réalisés en fonction des directives générales à 2-3ans. Selon des taux préétablis, il détermine un compte d’exploitation prévisionnel. Ainsi, leresponsable d'agence peut comparer les chiffres réalisés aux prévisions. Il doit égalementréaliser le budget, son suivi, et discuter avec les responsables des écarts constatés.

Il doit donc :- analyser les nouveaux produits à mettre en place ;- établir le budget et le suivre ;- réaliser des tableaux de synthèse.

Il est impératif d'obtenir une certaine cohérence entre les prévisions et les résultats définitifs.Si cela est nécessaire, il faut procéder à des ajustements.

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Enfin, le contrôleur de gestion diffuse l’information aux responsables pour juger de laréalisation de leurs objectifs : il est un fournisseur d’informations motivantes.

• Le rôle du contrôle de gestion

A la différence de la comptabilité qui a pour rôle de constater, le contrôle gestion explique.

III/ Conséquences de l’organisation de l'entreprise

• Le pouvoir du contrôle de gestion dans l’organisation

Le contrôleur de gestion participe à l’élaboration du plan à court et moyen terme. Il prend partaux discussions. C’est pourquoi il possède une influence "théorique" grâce au dialogue. Iltravaille également avec le service organisationnel pour la mise en place des procédures etdoit lui faire part des dysfonctionnements.

• Les avantages et les inconvénients de l’organisation

La situation du contrôleur de gestion lui permet de suivre de près l’activité de l’entreprise(vision dynamique). Cependant, il rencontre des difficultés avec les centres productifs : ceux-ci comprennent difficilement comment sont "bâtis" les chiffres car ils n’en ont pas la mêmevision. Il s’agit avant tout d’un problème relationnel entre les opérationnels et lesfonctionnels, souvent rencontré dans les grands groupes, mais également dans les PME.

IV/ Point de vue personnel du contrôleur de gestion

Le contrôleur de gestion que nous avons rencontré n'estime pas qu'un changementd’organisation soit nécessaire. Cependant, il pense que l’organisation n’est pas quelque chosede figé et qu’il faut toujours s’adapter aux nouveaux produits et à la réglementation. Il estimeégalement que le contrôle de gestion est à sa place dans cette organisation et ce,vraisemblablement, du fait de la proximité des services dans une PME.

3. L’organisation du travail du contrôle de gestion dans un groupe

a. Merck Eurolab S.A.

I/ Présentation de l'entreprise

L’entreprise MERCK a été créée en 1668. Elle est aujourd’hui présente dans 45 pays à traversle monde et emploie près de 28.000 personnes. MERCK est reconnu dans le monde entier entant que fabriquant et fournisseur de produits chimiques et pharmaceutiques de qualité. En1999, le groupe MERCK EUROLAB S.A. a été créé suite à la fusion de la société PROLABOet de sa filiale COFROLAB, toutes deux filiales à 100% du groupe MERCK.

L’activité est centrée principalement sur le marché européen, qui représente, à lui seul, 70%des transactions. Mais le groupe MERCK EUROLAB est également présent sur les autresgrands marchés : les USA, l’Asie du sud-est et l’Amérique Latine.

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II/ Présentation de l'organisation du travail du contrôle de gestion

Au sein du groupe MERCK EUROLAB, le service du contrôle de gestion dépend du servicefinancier pour des raisons économiques consécutives aux différentes fusions. Avant cettesituation, le service du contrôle de gestion dépendait de la direction générale.

• Les missions du contrôle de gestion

Dans cette entreprise, le contrôleur de gestion :- pilote et contrôle de manière permanente les objectifs acceptés pour l’année : gère des

centres de profit en baissant les coûts pour obtenir des centres de profits rentables ;- fournit à la direction les renseignements nécessaires pour éclairer son action (analyses

ponctuelles ou reporting) ;- pilote l’établissement des budgets internes et externes ;- révise les budgets deux fois par an ;- élabore les tableaux de bord pour contrôler la performance des activités ;- assure les travaux de clôture mensuels et annuels ;- établit les comptes de résultats mensuels ;- surveille les prix standard (détermine et contrôle les coûts standard de production) ;- assure le reporting interne et externe (chiffre d’affaires, marges, résultats, effectifs,

investissements) ;- met en place les procédures de gestion (stocks, cut off…).

• Le rôle du contrôle de gestion

Le rôle du contrôle de gestion est d'aider et de conseiller les opérationnels et les managers.

• Les qualités du contrôleur de gestion

Il doit, avant tout, être un excellent technicien. Il doit avoir le sens du relationnel et de lanégociation, afin de pouvoir accéder à tous les métiers de l’entreprise et de pouvoir "jongler"entre les opérationnels et la direction. Enfin il doit savoir être à l’écoute.

Au sein du groupe MERCK, le contrôleur de gestion est une personne de terrain puisqu'elle vase déplacer dans toute la France afin de mieux comprendre les problèmes rencontrés par lesopérationnels dans les différentes usines et, ainsi, mieux les conseiller.

III/ Conséquences de l’organisation de l'entreprise

• Le pouvoir du contrôle de gestion dans l’organisation

Au sein du groupe MERCK, le contrôle de gestion est un service décisionnel et influent. Parexemple, les contrôleurs de gestion peuvent décider de continuer ou non une activité, car ilssont les mieux placés pour déterminer si cette activité sera profitable à l’entreprise.

• Les liens avec les autres services

Comme on a pu le constater ci-dessus, le contrôle de gestion est surtout en rapport avec leservice financier. Leur lien le plus important se situe au niveau de la mise au point surl’exactitude des comptes. En effet, les deux services doivent obtenir les mêmes résultats. On

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peut également décrire leur lien de la manière suivante : la finance est un outil pour lecontrôle de gestion.

De manière générale, le service du contrôle de gestion entretient de bonnes relations avec lesautres services. Il existe cependant quelques tensions avec certaines fonctions : par exemple,lorsque l'entreprise rencontre certaines difficultés avec les centres de profits, c'est au servicedu contrôle de gestion qu'il appartient de trouver les responsables et celui-ci recouvre alorsl'image d'un "père fouettard". Mais les relations les plus difficiles sont celles entretenues avecle service financier.

• La vision des autres acteurs sur le contrôle de gestion

Les autres acteurs de l'entreprise estiment que les contrôleurs de gestion sont "doués" pour leschiffres mais qu’ils sont "mauvais" pour les conseils.

IV/ Point de vue personnel du contrôleur de gestion

Le contrôleur de gestion que nous avons rencontré pense que l’organisation était meilleurelorsque son service était rattaché à la direction générale plutôt qu'à la direction financière : lesoutien était plus fort, le contrôle de gestion était plus libre et il était enfin plus crédible.

b. Lucent Technologies

I/ Présentation de l'entreprise

Lucent Technologies est un groupe américain composé de différentes filiales réparties parzones géographiques. En ce qui concerne le site du Plessis-Robinson, celui-ci fait partie de lazone Middle-est - Afrique et emploie 700 salariés.

Lucent est un des leaders mondiaux sur le marché des solutions de télécommunication : iloffre aux opérateurs et aux grandes entreprises un large éventail de produits.

Le groupe se concentre sur les secteurs stratégiques à forte croissance tels que les réseauxoptiques et mobiles, les infrastructures Internet, les logiciels de communication et les servicesde conseil pour opérateurs et grandes entreprises.

Lucent est une entreprise d'envergure mondiale : en janvier 2001, elle comptait plus de120.000 collaborateurs avec des entités ou des distributeurs dans plus de 65 pays. Son siègeest situé à Murray Hill dans le New Jersey aux USA.

II/ Présentation de l'organisation du travail du contrôle de gestion

• Les missions du contrôle de gestion

Contrairement à la finance, qui travaille essentiellement pour l’extérieur, le contrôle degestion ne travaille que pour l’entreprise elle-même (en interne) et est centré sur l’activitécommerciale. Il est possible de lui définir trois rôles principaux :- définition des objectifs quantitatifs des commerciaux en fonction des opportunités del'environnement, du marché ;- établissement des prévisions liées à la prospection ;

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- mesure des écarts entre prévisions et réalisations.

En conséquence, le travail du contrôleur de gestion au sein de Lucent Technologies est plutôt"bureau". Le contrôleur de gestion travaille au jour le jour : les reportings sont journalierscontrairement à ce qui se pratique généralement (reporting mensuel), ce qui en fait un travailquotidien obligatoire répétitif.

• Les liens avec les autres services de l’organisation

Le contrôle de gestion doit faire remonter le plus d’informations possibles à la directiongénérale. En fonction des résultats, cette dernière met ensuite la pression sur l’équipecommerciale.

Toutes les données comptables concernant les commerciaux sont transférées par le service dela comptabilité au service du contrôle de gestion afin que celui-ci procède à des vérifications.De plus, le service du contrôle de gestion informe régulièrement la comptabilité afin qu'ellerelance les mauvais payeurs.

• La position du contrôle de gestion dans l’organisation

Il s’agit d’une structure pyramidale où la direction générale, orientée plutôt commerciale, sedistingue de la direction comptable. Ces deux sous-ensembles ne sont pas responsables l’unde l’autre mais collaborent comme nous avons pu le constater ci-dessus.

III/ Conséquences de l’organisation de l'entreprise

• Le pouvoir du contrôle de gestion dans l’organisation

Le contrôle de gestion n’a aucune influence sur les décisions stratégiques etorganisationnelles. Les décisions stratégiques sont prises au niveau international puisappliquées au niveau local par les différentes directions générales nationales.

• Les relations avec les autres services

Étant donné que le service du contrôle de gestion n'influence pas les décisions qui sont prises,ce dernier n’entretient pas de relations conflictuelles avec les autres services. Cela signifieégalement que son image est bonne au sein de l’entreprise. Les relations entre responsables deservices sont saines puisque l’information circule avec fluidité et efficacité avant de parvenir àla direction.

IV/ Point de vue personnel du contrôleur de gestion

Le problème rencontré dans l’organisation est le suivant : les responsabilités ne sont pasclairement définies, excepté à très haut niveau. En conséquence, tout le monde a tendance à se"renvoyer la balle" et on constate donc une perte de temps effective.

De plus, le contrôle de gestion n’a pas sa véritable place dans l’organisation puisque LucentTechnologies n’a pas d’activité de production mais uniquement une activité de distribution.Par conséquent, le contrôle de gestion n’a pas pour rôle de gérer les coûts de production alorsque cette mission constitue son métier de base. Au sein de cette entreprise, le contrôle de

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gestion perd donc de sa valeur : il en découle une certaine marginalisation par rapport à laconception de la stratégie.

4. Conclusion

L'aspect dominant qui ressort de ces entretiens est que chaque société, PME ou groupe,possède et utilise son propre contrôle de gestion. En effet, chaque entreprise définit soncontrôle de gestion en fonction de son activité (industrielle ou commerciale) et de sesobjectifs. C’est pourquoi, en pratique, il n’existe pas un type d’organisation du travail ducontrôle de gestion, mais de multiples types, tous adaptés aux spécificités des entreprises ausein desquelles ils évoluent.

L'internationalisation de l'économie a vu naître des groupes d'envergure mondiale et lamultiplication de l'implantation de filiales à l'étranger. C'est pourquoi il est intéressantd'aborder à présent l'aspect spécifique des groupes et l'organisation du contrôle de gestiondans les filiales à l'étranger.

IV- Les groupes internationaux : le contrôle de gestion des filiales àl’étranger

Plus le développement international prend de l’ampleur, plus le contrôle de gestion doit êtreorganisé, pensé et adapté en fonction du marché et de la stratégie de l’entreprise. Lacomplexité et la "sophistication" doivent être évitées. Une direction générale attend d’aborddu contrôle de gestion la fourniture d’éléments de décision dans des délais de plus en pluscourts. Les structures doivent être légères, flexibles et dotées d’outils simples mais souventremis à jour.

Dans cette recherche de rapidité et d'efficacité de transmission des informations, le contrôlede gestion doit traiter des informations pertinentes, claires et adaptées à un coût acceptable.Tout système ne fonctionne que si les hommes sont compétents et bien préparés.

Beaucoup d’entreprises suivent encore leur activité à travers des "reportings" d’origineessentiellement comptable (tendance renforcée par la contrainte de publication trimestrielledes résultats aux USA. Les directives européennes vont d’ailleurs dans le même sens). Entredes entreprises où les produits et les stratégies se ressemblent de plus en plus, avec des cyclesde vie des produits de plus en plus rapides, c’est la disposition et l’utilisation correcte del’information qui souvent fera la différence (c’est un avantage concurrentiel). Mais gérer unetelle mission sur une base internationale va exiger une organisation et une disciplinerigoureuse si l’on veut recueillir, sélectionner, traiter, diffuser l’information de façon efficace.

Pour cela, il est nécessaire au préalable de créer des éléments de cohérence par des règles deprocédure communes, servant pour le reporting, les tableaux de bord, la gestion logistique, laplanification...

Dans un groupe multinational, le système de contrôle de gestion doit faire en sorte que :- la société mère puisse apprécier les performances de ses filiales et analyser leur

évolution ;

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- les directeurs de filiales se fixent et atteignent des objectifs conformes à l’intérêt dugroupe;

- l’autonomie consentie à la filiale soit compatible avec le besoin de contrôle de lasociété mère.

A priori, le problème posé par la mise en oeuvre d’un tel système n’est pas fondamentalementdifférent de celui auquel se trouve confrontée une grande firme purement nationale, structuréeen divisions ou en unités juridiquement indépendantes. Mais dans un groupe multinational, ladistance géographique, économique et culturelle entre la filiale et la société mère le rendbeaucoup plus ardu et en change même la nature.

Par rapport au contrôle de divisions ou de filiales nationales, deux séries de difficultésapparaissent :

- des obstacles d’ordre économique ou comptable qui rendent difficile la mesure de laperformance de la filiale ;

- des obstacles d’ordre organisationnel ou stratégique qui nuisent au bon déroulementdu contrôle et contribuent à entretenir une zone de flou dans le fonctionnement dusystème.

Afin de rester fidèle à notre sujet nous traiterons uniquement des obstacles d’ordreorganisationnel.

Tout d’abord, attardons-nous, dans une première partie, sur les "modalités du contrôle degestion au sein d’un groupe international".

1. Les caractéristiques du système de contrôle de gestion au sein d'un groupeinternational

Le système de contrôle d’un groupe multinational présente habituellement les caractéristiquessuivantes :

a. Un budget d’investissement non délégué

Le choix des investissements constitue une sorte de contrôle ultime sur les activités d’uneunité à l’étranger et, en tant que tel, il est presque toujours le domaine réservé de la maison-mère. En conséquence, les filiales étrangères seront, non des centres d’investissement, maisdes centres de profit.

b. Une procédure d’élaboration des budgets rigoureusement définie mais pouvantrelever d’une approche "autonomiste" ou "intégratrice"

La coordination et l’homogénéité des prévisions budgétaires sont généralement assurées parun épais manuel de procédures. Ce document, source de lourdeurs dans le fonctionnement dusystème, contraint les acteurs à utiliser un mode de raisonnement commun et à présenter lefruit de leur réflexion sur des formulaires standard. Toutefois, selon la culture du groupe, laprocédure de détermination des budgets peut suivre une logique d’intégration ou de laisser-faire.

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• L’approche "intégratrice"

Le responsable de division expose aux responsables de zone, les objectifs à suivre en matièrede politique de produits. Sur cette base, les responsables de zone établissent, pour chaquefiliale, une note d’orientation qui fixe les objectifs et les performances à atteindre selon lescaractéristiques du pays d’implantation. Partant de ces indications, le directeur de filialepropose un plan d’action, un budget correspondant et un programme d’investissements. Unenégociation s’engage alors avec les supérieurs hiérarchiques et les contrôleurs de gestion surle bien fondé des propositions. Si celles-ci sont acceptées, la prévision devient l’objectif duresponsable de filiale, l’acceptation du programme d’investissements n’étant toutefoisdéfinitive que lorsque la maison mère a donné son accord.

Cette méthode est préférable lorsque les besoins de coordination des activités sont grands(l’interdépendance des capacités de production est mieux prise en compte). Elle accélèrel’élaboration des budgets (évite des navettes inutiles). D’emblée, les responsables de filiale sefixent des objectifs compatibles avec ceux du groupe. Cette méthode facilite également laprise en compte de toutes les contraintes qui dépassent le cadre étroit de la filiale (concurrenceinternationale...).

La contrepartie est qu’elle peut conduire à des prévisions moins fiables localement et qu’ellelaisse peu d’initiatives aux responsables de filiale et devient source de démotivation.

• L’approche "autonomiste"

Ce système se caractérise par une variété de procédures selon les types de filiales, ce quipermet de bien appréhender les spécificités des différentes situations. Les budgets sont établisdans la monnaie, la langue et les normes locales et ne font pas l’objet de consolidation. Ilssont certes approuvés par la maison-mère, mais il s’agit le plus souvent d’un acte formel, carle siège fait confiance aux filiales.

Pour construire le budget du groupe, la maison-mère demandera aux unités de lui fournir desdonnées déterminées par grandes masses (en respectant le manuel des procédures) ouexprimées de façon plus ou moins qualitative.

Cette approche nécessite plus de temps et d’échanges d’informations entre les parties, puisquele projet d’ensemble et les prévisions établies localement ne seront rendus compatibles qu’expost. Mais, en laissant plus d’initiatives aux unités, elle est habituellement plus motivante.

• Un système de reporting complexe

Le système de reporting est un élément clé du système d’information de gestion. Il assure laremontée de l’information, depuis les unités élémentaires jusqu’au sommet du groupe. Grâceà lui, les responsables de tous niveaux ont connaissance des résultats et peuvent entreprendrela mise en oeuvre d’actions correctives ou les suggérer simplement. Il fournit également lesdonnées nécessaires aux besoins locaux des filiales (détermination de l’impôt, dossier decrédit...) et à l’établissement des comptes consolidés du groupe.

Le fait de répondre à des missions aussi diverses entraîne cependant des difficultés. Selon lespréoccupations, la nature des informations à transmettre (leur fréquence d’émission) n’est pasforcément la même. La consolidation demande une homogénéisation préalable des procédures

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comptables. L’obtention des résultats par filiale, par secteur d’activité ou par zonegéographique est souvent peu commode, car les structures juridiques du groupe ne coïncidentpas avec ses structures de gestion. Un travail important de retraitement et de mise en forme del’information s’avère donc nécessaire.

Aussi, abordons désormais le problème des obstacles au fonctionnement d’un système decontrôle de gestion à l’international.

2. Les obstacles au fonctionnement d’un système de contrôle de gestion à l’international

Le contrôle de gestion des filiales à l’étranger bute, entre autres, sur deux difficultés :- la distance (géographique, économique et culturelle) existant entre la maison-mère et sesfiliales, qui rend toute gestion prévisionnelle à la fois plus indispensable et plus délicate àmettre en œuvre ;- l’incompatibilité qu’il peut y avoir entre la construction d’un système efficace de contrôlede gestion et la volonté de réaliser des arbitrages financiers ou commerciaux quel’environnement international rend possible.

a. Les inconvénients de la distance

La distance entre la filiale et la société mère pousse à la décentralisation, à l’autonomie desfiliales, mais elle tend aussi à diminuer l’efficacité du contrôle au niveau de l’ensemble dugroupe.

Lorsque le contrôle s’effectue par le biais d’un système budgétaire, les différences culturellesde pays à pays risquent de rendre inopérantes les observations de la société mère auxpropositions budgétaires de la filiale. Cette dernière est en effet en mesure de se retrancherderrière des particularités locales pour négocier un budget trop facile à respecter, ou justifieren fin d’année des écarts négatifs par rapport à celui-ci. Les dirigeants de la maison-mèrepeuvent ne pas être en mesure d’apprécier la valeur des arguments avancés.

Dans un groupe purement national, les dirigeants de la société mère ont une connaissanceprofonde et intuitive de l’environnement économique, puisqu’ils y vivent depuis toujours.Toute assertion pourra être appréciée et toute explication évaluée.

Cette connaissance profonde et intuitive n’existe pas pour des filiales à l’étranger. Ici, lespécialiste est le directeur de la filiale : c’est lui qui connaît mieux que quiconquel’environnement local, qu’il soit originaire du pays ou envoyé par la maison-mère. Personnedans la société mère n’est vraiment en mesure de contester ce qu’il affirme.

La distance constitue donc un obstacle au contrôle de la maison-mère, et cette situation estd’autant plus critique que le nombre de pays d’implantation est grand et que ces pays sonthétérogènes, tant au niveau de leur développement économique, de leur culture ou de leursystème politique, administratif et social.

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b. Quelques solutions

a) La mise en place de directions régionales

La création de directions régionales, chargées du contrôle des filiales situées dans une zonegéographique donnée, présente les avantages suivants :

- elle réduit la distance entre l’unité contrôlée et le centre de contrôle ;- elle permet une meilleure connaissance des particularités locales et une meilleure

coordination de l’action des filiales qui dépendent d’une même zone.

Mais il arrive aussi que la création d’une zone géographique ne fasse que déplacer leproblème de la communication à un échelon plus élevé. La direction régionale peut faire écranentre les filiales étrangères et la maison-mère, accroître les distorsions dans les messagestransmis.

b) Une bonne politique des ressources humaines

Un système de contrôle de gestion efficace nécessite une bonne circulation de l’informationdonc une communication fluide. Cela entraîne une bonne gestion de la mobilité du personneldirigeant.

Une des solutions consiste à gérer les filiales avec des cadres locaux et à employer, au niveaude la société mère, des spécialistes de zone géographique qui seront capables de communiqueravec les cadres des filiales.

Une autre solution consiste à employer des cadres étrangers ou des cadres du pays de lasociété mère ayant une expérience internationale. Dans la filiale, les cadres seraientprincipalement du pays de la filiale mais auraient l’expérience de la société mère.

c. L’existence d’arbitrages internationaux

Dans le domaine financier, la scène internationale permet une plus grande variété des sourcesde financement, un plus grand éventail de placements possibles, une multiplicité desmonnaies utilisables, une multiplicité des structures légales utilisables et des différencesfiscales de pays à pays. Cela implique d’une part, une certaine centralisation, contradictoireavec l’autonomie de la filiale, et d’autre part une modulation des profits au moyen de prix decessions internes trop élevés ou trop bas, de prêts interfiliales à des taux d’intérêt très bas outrès élevés, de facturations de prestations de services à des prix excessifs ou trop faibles,d’arrêtés de compte à des dates différentes, toute chose qui introduit de l’arbitraire dans lamesure de la performance des filiales.

3. Une solution de synthèse aux problèmes rencontrés : le système unifié d’informationde groupe (SUIG)

a. Principe

Il s’agit d’un système unique qui répond aux besoins d’information dans les domaines de lacomptabilité, du contrôle de gestion et de la trésorerie, et qui assure la cohérence des donnéesremontées des différentes filiales pour les trois domaines précités.

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L’unification n’est souhaitable que si les trois domaines ont des préoccupations suffisammentcommunes et si les entités de base partagent les mêmes facteurs clé de succès. La mise enplace d’un SUIG suppose aussi que le groupe puisse se satisfaire d’un reportingessentiellement financier. Ce système est recommandé pour les groupes décentralisés, ceux oùle contrôle de la gestion opérationnelle (gestion commerciale, gestion industrielle) se réaliseau niveau de la filiale à partir de ses propres indicateurs (essentiellement physiques), et où lecontrôle de gestion du siège est surtout un contrôle financier. Le SUIG est aussi recommandéaux groupes à activité unique (sidérurgie, presse, édition…). Dans une telle situation, uncontrôle de gestion depuis le siège est efficace, car les informations sont pertinentes etsuffisantes pour appréhender l’activité de chaque entité.

Par contre, le SUIG est déconseillé pour les petits groupes diversifiés sans réel contrôle degestion dans les unités. La disposition de la seule information financière est insuffisante pourassurer le contrôle depuis le siège.

b. Fonctionnement

La comptabilité réalise ses calculs en faisant référence aux structures juridiques. Le contrôlede gestion analyse les résultats par branche, par zone géographique, par fonction, etc.A l’intérieur d’un groupe, nombreuses sont les filiales qui ont des activités multibranches.Aucun problème ne se pose pour celles où chaque métier est exercé par un établissementdistinct ayant sa propre comptabilité. Mais, dans les filiales à comptabilité unique, le SUIGdoit permettre une comptabilité par branche.

Une première solution consiste à restructurer le groupe et l’information comptable d’unemanière telle que l’unité de base soit une entité opérationnelle mono-branche. Toutes lesinformations seront saisies à ce niveau et une table des structures les agrégera selon lesbesoins, soit par branche, par pays, par entité juridique.

Une deuxième solution consiste à conserver l’organisation actuelle et à associer à chaquedonnée un code dépendant du type d’analyse et du type de document que l’on souhaiteobtenir. Toute donnée se verra ainsi attribuée un code branche, un code pays, un codefonction, etc., et les états comptables et de gestion seront la résultante de tris effectués sur telou tel code.

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Conclusion

Dans notre première partie, nous avons mis en évidence l'influence de l'environnementéconomique sur le fonctionnement de l'entreprise et, par conséquent, sur l'organisation dutravail du contrôle de gestion. Dans notre seconde partie, nous avons développé l'aspectthéorique de cette organisation. Puis nous avons, dans notre troisième partie, confronté lathéorie à la pratique avant d'aborder, dans notre quatrième et dernière partie, l'aspectspécifique de l'organisation du travail du contrôle de gestion à l'international.

En conclusion, il faut noter que les techniques du contrôleur peuvent être les mêmes danstoutes les entreprises mais que le rôle, l'importance et la place accordés au contrôle de gestionsont fonction des stratégies adoptées, dans le cadre du métier de l'entreprise, ainsi que de laculture de l'entreprise et des comportements psychosociologiques des acteurs et desdirigeants. Il n'existe donc pas un modèle unique et universel d'organisation du travail ducontrôle de gestion, mais autant d'organisations possibles qu'il existe d'entreprises.

Bibliographie

ALAZARD Claude, SEPARI Sabine, Contrôle de gestion, Manuel et applications, DECFépreuve n°7, 4ème édition, Dunod, Paris, 1998.

BERLAND, cours de comptabilité de gestion, Université de Paris XI, Faculté Jean Monnet,2001.

BOUIN Xavier, SIMON François, Les nouveaux visages du contrôle de gestion, Dunod.

BOUQUIN Henri, Contrôle de gestion, 1ère édition, Puf, 1986.

BUSSENAULT Chantal, PRETET Martine, Organisation et gestion de l'entreprise, tome 2,Vuibert, 1999.

GERVAIS Charles, Contrôle de gestion, 6ème édition, Economica.

GUEDJ Norbert, Le contrôle de gestion, édition Organisation.