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IEP de Toulouse Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique Mémoire de recherche présenté par M. Antoine LAFOREST Directeur du mémoire : M. Jérôme VICENTE Date : 2013

Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

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Mémoire de fin d'études

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IEP de Toulouse

Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications

français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché

oligopolistique

Mémoire de recherche présenté par M. Antoine LAFOREST

Directeur du mémoire : M. Jérôme VICENTE

Date : 2013

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IEP de Toulouse

Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications

français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché

oligopolistique

Mémoire de recherche présenté par M. Antoine LAFOREST

Directeur du mémoire : M. Jérôme VICENTE

Date : 2013

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Remerciements

Je remercie toutes les personnes qui m’ont aidé dans la réalisation de ce mémoire et

notamment M. Jérôme VICENTE qui, en tant que Directeur du mémoire et Professeur

d’économie à l’IEP de Toulouse, m’a donné les clés utiles à ma réflexion à travers les cours

magistraux et séminaires dispensés.

L’élaboration de ce mémoire a été possible grâce à plusieurs personnes qui ont su

m’aiguiller dans mes recherches et que je tiens à remercier, notamment M. Frédéric

GRAZZINI, Directeur de la practice Human Capital Management du cabinet Sopra

Consulting, ainsi que les collaborateurs d’Orange que j’ai rencontrés lors de ma mission pour

leur accueil et leurs conseils avisés.

Je remercie également chaleureusement mon père pour sa contribution et son soutien à

la rédaction de ce mémoire, grâce à son expérience professionnelle de plus de 25 ans dans les

télécommunications.

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Avertissement : L’IEP de Toulouse n’entend donner aucune approbation, ni improbation

dans les mémoires de recherche. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leur

auteur(e).

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Abréviations

3G : Norme de téléphonie mobile de 3e génération

4G : Norme de téléphonie mobile de 4e génération

ADSL : Asymmetric Digital Subscriber Line

ANFR : Agence Nationale des Fréquences

ARCEP : Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes

BLR : Boucle Locale Radio

CEPT : Conférence Européenne des administrations des Postes et Télécommunications

CSA : Conseil Supérieur de l’Audiovisuel

EDGE : Enhanced Data Rates for GSM Evolution

FFT : Fédération Française des Télécoms

FSI : Fonds Stratégique d’Investissement

GPRS : General Packet Radio Service

GSM : Groupe Spécial Mobile

Mhz : Megahertz

MMS : Multimedia Messaging Service

MVNO : Mobile Virtual Network Operator

NFC : Near Field Communication

NMT : Nordic Mobile Telephone

OTT : Over The Top

PME : Petite et Moyenne Entreprise

RTC : Réseau Téléphonique Commuté

SIM : Subscriber Identity Module

SMS : Short Message Service

TPE : Très Petite Entreprise

UIT : Union Internationale des Télécommunications

UMTS : Universal Mobile Telecommunications System

VoIP : Voix sur IP

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SOMMAIRE

INTRODUCTION .................................................................................................................... 1

PREMIÈRE PARTIE - LA STRUCTURE DU SECTEUR TRÈS RENTABLE DES

TÉLÉCOMMUNICATIONS EN FRANCE .......................................................................... 7

CHAPITRE 1- DU MONOPOLE À L’OLIGOPOLE ......................................................................... 8

CHAPITRE 2- UN SECTEUR MAJEUR DE L’ÉCONOMIE FRANÇAISE .......................................... 21

DEUXIÈME PARTIE - L’ARRIVÉE D’UN NOUVEL ENTRANT SUR LE

MARCHÉ, UN BOULEVERSEMENT MAJEUR POUR LE SECTEUR ....................... 34

CHAPITRE 1- LA MODIFICATION DU PAYSAGE DES TÉLÉCOMMUNICATIONS EN FRANCE ....... 35

CHAPITRE 2- LE RENOUVELLEMENT DES STRATÉGIES DES OPÉRATEURS DE

TÉLÉCOMMUNICATIONS ......................................................................................................... 46

CONCLUSION ....................................................................................................................... 57

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Introduction

Arnaud Montebourg, Ministre du Redressement Productif, et Fleur Pellerin, Ministre

déléguée à l’Economie Numérique, qui ont saisi en novembre 2012 l’Autorité de la

concurrence sur le contrat signé entre Free Mobile et Orange, écrivent dans une tribune

intitulée « Enfin une politique industrielle pour les télécoms » publiée le 12 mars 2013 dans

Le Figaro1, avoir trouvé « en arrivant aux responsabilités, un secteur des télécoms meurtri,

méprisé, en proie au doute et au déclin. Quel paradoxe pour un secteur d’avenir ! », accusant

leurs prédécesseurs d’avoir privilégié les consommateurs aux dépends des producteurs. Au

troisième trimestre 2012, Bouygues Télécom annonçait une perte nette de 16 millions

d’euros. Chez SFR, c’est un plan social concernant la suppression d’environ 1000 postes qui a

été lancé. La valeur boursière de France Telecom a quant à elle été divisée par deux, soit une

perte sèche de 7 milliards d’euros pour le patrimoine de l’Etat actionnaire.

Ce constat est symptomatique de la modification du paysage du secteur des

télécommunications français. Celui-ci est en effet en proie à de multiples interrogations et à

de nouveaux enjeux qui l’entrainent dans une recomposition permanente et une redéfinition

constante des stratégies de ses acteurs. Malgré cela, le marché des télécoms poursuit son

développement et continue d’innover à différents niveaux. Ce mémoire s’attachera à

comprendre les mécanismes d’un secteur clé de l’économie, au potentiel de croissance

prouvé, les télécommunications.

***

1http://www.lefigaro.fr/mon-figaro/2013/03/12/10001-20130312ARTFIG00469-enfin-une-politique-industrielle-

pour-les-telecoms.php

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Mon choix de prendre comme objet d’étude pour ce mémoire le secteur des opérateurs

de télécommunications français repose sur trois piliers. Premièrement, je souhaite orienter ma

carrière professionnelle vers ce domaine, parce que c’est un secteur qui innove constamment,

aussi bien dans la technologie que dans les usages, et dans lequel les enjeux pour l’avenir sont

forts. Deuxièmement, la période de choix de ce sujet a coïncidé avec l’arrivée sur le marché

du quatrième opérateur de téléphonie mobile. Or, j’ai été fortement interpellé par le tapage

médiatique provoqué par cette entrée, et ce de manière unilatérale. En effet, je me suis étonné

que tous les commentateurs, à quelques exceptions près, encensent les bienfaits de ce

renforcement concurrentiel en vantant les mérites d’un acteur qui allait révolutionner le

secteur, alors que dans ce type d’opération avantages et inconvénients cohabitent souvent.

Troisièmement, je souhaitais travailler à l’occasion de la rédaction de ce mémoire sur un cas

concret à partir d’une base théorique. Le secteur français des opérateurs de

télécommunications constituant un exemple intéressant d’oligopole, cela a été l’occasion pour

moi de m’appuyer sur les fondamentaux théoriques acquis à l’IEP de Toulouse en matière

d’économie.

***

Les télécommunications se définissent comme « transmission, émission ou réception

d'informations par fil, radioélectricité, optique, ou d'autres systèmes électromagnétiques »2. A

l’origine, elles concernent des inventions telles que le télégraphe (Antonio Meucci), le

téléphone (Alexander Graham Bell) ou encore la radio (Guglielmo Marconi). Dans son

acceptation moderne, on parle de services de télécommunications pour la téléphonie fixe et

mobile, ainsi que pour l’accès à internet, pour les ménages et les entreprises. Outre ces

services B to C3 (marché final, 84% du CA des télécommunications), le secteur comprend

également les services B to B4 (marché intermédiaire entre opérateurs, 16% du CA du

secteur) qui concernent les services de transmission des données, c’est-à-dire l’établissement

d’interconnexions entre opérateurs.

Le marché français des télécommunications est dominé par une poignée d’acteurs, ce

qui le place en situation d’oligopole. Longtemps l’opérateur historique qu’est France Télécom

se trouvait en situation de monopole, avant l’ouverture à la concurrence qui a vu l’émergence

de deux autres acteurs, SFR et Bouygues Télécom, puis récemment l’arrivée de Free (Groupe

2 Dictionnaire Larrousse

3 Business to Consumer

4 Business to Business

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Iliad) en tant que quatrième opérateur de réseau dans la téléphonie mobile. Dans ce mémoire,

l’accent sera mis sur les opérateurs de télécommunications « mobiles », bien qu’il ne soit pas

possible d’écarter la partie « fixe » puisque les entreprises dont nous parlons sont présentes

sur les deux segments. Néanmoins, l’entrée de Free sur le marché concernant la partie mobile

du secteur, il semble plus intéressant de se focaliser dessus.

Le faible nombre d’acteurs tient aux caractéristiques techniques de l’activité

(infrastructures en réseau) mais aussi au coût très élevé des investissements requis pour une

pénétration du marché. En effet, les services de télécommunications sont techniquement

caractérisés par l’installation et la gestion des réseaux de communications, ce qui requiert de

lourds investissements. Ils peuvent être de type terrestre (câbles en cuivre, fibre optique, etc)

ou aériens (antennes hertziennes, satellites).

Les services en réseaux tels que les télécommunications génèrent des externalités

positives, également appelées externalités de réseaux, qui peuvent conduire à un phénomène

de monopole5. De même, une des spécificités des services en réseaux tient à la structure des

coûts de cette activité. En effet, les coûts fixes sont extrêmement élevés en ce qui concerne le

déploiement des infrastructures, ce qui limite d’autant plus les possibilités de concurrence.

Quant aux coûts liés aux services (coûts fixes élevés, coûts marginaux faibles), ils assoient

l’intérêt de diffusion au plus grand nombre. Les externalités de réseaux d’une part, et les coûts

de réseaux d’autre part, provoquent une dynamique de diffusion des services en réseaux

répondant à la loi des rétroactions positives. Cette loi stipule qu’une hausse de la demande va

entraîner une hausse de l’offre (notamment grâce aux économies d’échelle), celle-ci stimulant

à son tour la demande, etc. Les économistes parlent dans ce cas de « causalité circulaire ». De

facto, les effets de rétroactions positives favorisent les situations d’oligopole.

Un oligopole est une branche de l’économie (industrie ou services) dans laquelle un

petit nombre de firmes est en concurrence. Une des caractéristiques principales de ce type de

marché réside dans le fait que les firmes ne peuvent pas ignorer le comportement de leurs

concurrents. Les interactions stratégiques entre ces firmes sont au cœur de la théorie de

l’oligopole, représenté ici par le secteur français des télécommunications, c’est pourquoi ce

mémoire s’efforcera de les analyser.

5 J. Vicente, Cours de microéconomie, ch. « Les externalités de réseaux », IEP de Toulouse, 1

e année

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Les opérateurs de télécommunications physiques français sont au nombre de quatre :

Orange, SFR, Bouygues Télécom et, depuis janvier 2012, Free. Ce passage de trois à quatre

acteurs ne change pas le caractère oligopolistique du secteur. Pour exemple, aux Etats-Unis, le

secteur des télécommunications est reconnu comme étant un oligopole avec quatre

concurrents en présence : AT&T, Sprint, T-Mobile et Verizon.

Cette situation de « marché imparfait6 » peut également être analysée au travers de la

théorie des jeux7. Selon cette théorie, l’interaction entre les stratégies de deux individus ou

firmes maximisant leur gain les conduit à une situation sous-optimale au sens de Pareto : c’est

l’équilibre de Nash. On peut comprendre grâce à ce modèle la stabilité des stratégies des

opérateurs avant l’arrivée de Free sur le marché, puisqu’aucun d’entre eux ne pouvait

réellement modifier sa stratégie sans affaiblir sa position.

***

Dans ce contexte, une situation optimale peut être obtenue via une entente entre les

différents acteurs, ce qui est interdit par les autorités de concurrence. Ainsi, le Conseil de la

concurrence français a condamné le 1er

décembre 2005 les opérateurs Orange, SFR et

Bouygues Télécom à des amendes de plusieurs dizaines de millions d’euros pour entente. Il

leur est reproché d’avoir échangé entre 1997 et 2003 des informations précises concernant le

volume de leurs ventes. Ce type d’échanges est de nature à altérer le jeu de la concurrence,

puisque les opérateurs ont défini ensemble les parts de marché qu’ils s’octroyaient.

Au sens de Pareto, cette situation est optimale. Cependant, on peut légitimement se

demander si ce système est optimal du point de vue du consommateur, notamment en ce qui

concerne les prix d’accès aux services. Lors de l’introduction de Free sur le marché et le

lancement de ses offres « low cost », l’entreprise et les commentateurs ont souligné le gain de

pouvoir d’achat octroyé aux clients. L’enjeu de ce mémoire sera de déterminer si cet

effondrement des prix ne sera pas destructeur de valeur à long terme, et comment les

opérateurs adaptent leurs stratégies à ce nouveau contexte.

Dans l’hypothèse où l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un secteur faiblement

concurrentiel a entraîné une révolution dudit secteur, un certain nombre de questions,

6 La théorie de la concurrence imparfaite a été développée par l’entre-deux guerres par Edward Chamberlain au

Etats-Unis et par Joan Robinson en Angleterre. 7 La théorie des jeux a été développée par John von Neumann et Oskar Morgenstern en 1944 dans un ouvrage

intitulé Theory of Games and Economic Behavior.

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auxquelles ce mémoire tentera de répondre, se posent. Est-ce que les opérateurs français de

télécommunications auront toujours les moyens d’investir dans des infrastructures aux coûts

extrêmement élevés ? Pourront-ils innover de la même manière qu’ils l’ont fait depuis 25

ans ? Les clients bénéficieront-ils toujours de la qualité d’un réseau performant sur le long

terme ? Les nouvelles offres proposées par les opérateurs donnent-elles réellement un gain de

pouvoir d’achat aux consommateurs ?

Ces questions que soulève le contexte du sujet font apparaître un paradoxe. Dans un

secteur faiblement concurrentiel, l’arrivée d’un nouvel acteur n’est assurément pas neutre. En

effet, alors que le nombre d’abonnés est en constante augmentation (la France compte 40

millions d’abonnements à la téléphonie fixe, 73 millions au mobile et 23 millions à internet),

avec un taux de pénétration aujourd’hui supérieur à 100% pour la téléphonie mobile, le

chiffre d’affaires des télécommunications en France est en baisse (-6,4% au premier trimestre

2013), du fait de la naissance d’un quatrième opérateur. Dans ce contexte, comment les

opérateurs de télécommunications français doivent-ils repenser leurs stratégies pour retrouver

le chemin de la croissance ?

***

La méthodologie de ce mémoire de recherche s’appuie essentiellement sur la lecture

de travaux universitaires, d’études, d’articles de presse, ainsi que sur les témoignages

d’experts que j’ai eu l’occasion de rencontrer durant mon stage de fin d’études8. Cette base

documentaire capitalisée pendant plusieurs mois a permis de nourrir ma réflexion sur le sujet,

puis d’élaborer une problématique pertinente au regard du sujet ainsi qu’un plan qui permette

d’exposer ces recherches de manière cohérente. Les difficultés auxquelles j’ai été confronté

tiennent au fait que ce sujet fait référence à un événement récent, pour lequel il est ardu

d’avoir le recul nécessaire à son analyse. Peu d’ouvrages empiriques ont été publiés sur

l’introduction de Free sur le marché. En termes de statistiques du secteur, il n’a pas été

difficile de trouver des rapports riches en données, comme l’étude Xerfi sur le secteur des

Télécommunications publiée en 20129. Cependant malgré de nombreuses recherches et

contacts à des organismes, certaines données statistiques qui auraient été importantes pour ce

mémoire sont restées introuvables, notamment en ce qui concerne les données internes aux

entreprises. Malgré un nombre important de sollicitations d’acteurs pour des entretiens, peu

8 Stage de fin d’études réalisé dans le cabinet de conseil Sopra Consulting, avec une mission de 5 mois chez

Orange. 9 Xerfi 700, « Télécommunications », Juillet 2012

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ont accepté de répondre aux questions posées. Face à leur volonté de rester anonymes, leurs

points de vue seront exposés dans ce mémoire sans présentation de l’auteur. En outre, il n’est

pas possible de prévoir avec certitude les stratégies qui seront déployées par les forces en

présence, mais des tendances se dégagent et des préconisations peuvent être formulées.

***

Afin d’apporter des éléments de réponse à cette problématique qui nous servira de fil

conducteur, la rédaction de ce mémoire s’articulera autour de deux parties.

La première s’attachera à expliquer l’organisation d’un secteur majeur de l’économie

française, à travers le prisme de ses évolutions technologiques, commerciales et

institutionnelles. Nous verrons en quoi ces évolutions ont fait passer le secteur d’un monopole

détenu par France Télécom à un oligopole plus réglementé, puis nous étudierons les

caractéristiques de l’économie de ce secteur : tissu économique, forces en présence, segments

de croissance, etc.

La seconde partie traitera concrètement du bouleversement provoqué par l’entrée sur le

marché d’un nouveau concurrent, Free, notamment en termes de conséquences macro et

micro sur l’économie. Enfin, nous traiterons du renouvellement des stratégies déployées par

les opérateurs de télécommunications, entre modèles de croissance remis en cause et accent

mis sur l’innovation pour maintenir une création de valeur.

Nous verrons que le principal résultat obtenu est qu’une concentration se dessine dans

le secteur. Si une fusion entre opérateurs, souvent entendue mais peu probable

économiquement, est à écarter, une mutualisation plus poussée des réseaux semble être la

voie vers laquelle se tourne les acteurs du secteur, et ce afin de palier des coûts fixes très

élevés de développement d’infrastructures.

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Première partie - La structure du secteur très rentable des

télécommunications en France

Afin de mieux analyser les nouvelles stratégies mises en place par les opérateurs de

télécommunications, il convient en premier lieu de faire un rappel sur les grands jalons qui

ont marqué l’évolution de ce secteur. Du monopole détenu originellement par France

Télécom à la situation à la veille de l’introduction de Free sur le marché, comment s’est

développé ce secteur ? Quelles technologies ont été déployées au cours des décennies ? En

quoi le cadre réglementaire a façonné le visage d’un nouveau marché ? Pourquoi parle-t-on

d’un marché oligopolistique ? Autant de questions qui nous permettront d’appréhender ce

secteur à travers une histoire, des institutions, des technologies.

Etudier la composition du tissu économique et des segments de croissance nous

permettra dans un deuxième temps de nous forger une vision globale du secteur. Quelles sont

les caractéristiques structurelles des services de télécommunications ? Pourquoi parle-t-on de

convergence entre ces métiers, ceux des médias et du numérique ? Quelles sont les forces en

présence ? Outre les opérateurs « physiques » disposant de leurs propres infrastructures, quels

autres acteurs jouent un rôle dans cet univers éclectique ? Sur quels piliers a reposé la

croissance de ces services ?

Au travers de la réponse à ces questions, nous tenterons de montrer que c’est un

secteur en pleine croissance qui a du s’adapter à l’arrivée d’un nouveau concurrent.

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Chapitre 1- Du monopole à l’oligopole

Des télécoms comme services industriels de l’Etat à l’existence d’entreprises privées

cotées en bourse, le visage du secteur a énormément évolué, notamment du point de vue du

marché et du cadre réglementaire.

Section 1- L’évolution du cadre réglementaire : entre libéralisation et

régulation

Les premiers services de télécommunications en France ont été instaurés par l’Etat

sous la Révolution Française puisque, en 1792, est déployé le réseau de télégraphie optique de

Chappe, afin d’acheminer rapidement les informations dans un contexte d’instabilité politique

et de guerre civile.

En 1878, suite au remplacement du télégraphe optique par le télégraphe électrique,

puis l’invention du téléphone, l’Etat français crée un ministère des Postes et Télégraphes. Il

faudra attendre 1923 pour que les « PTT » (Postes, télégraphes et téléphones) voient le jour,

administrés à partir de 1941 par la Direction générale des Télécommunications.

(I) La libéralisation du secteur

C’est à partir de 1988 que s’amorça une déréglementation du secteur qui s’est traduite

par une ouverture à la concurrence dans le domaine de la téléphonie mobile. En effet, suite à

la diffusion par la Commission européenne d’une directive de mise en concurrence des

services de télécommunications10

, la Direction générale des télécommunications devient

France Télécom le 1er

juillet 1988.

« La présente directive s'inscrit dans le processus de libéralisation des marchés des

télécommunications dans l'Union européenne, processus engagé au milieu des années 80.

Une des principales impulsions à cette ouverture a été donnée en 1987 par le livre vert de la

Commission sur le développement d'un marché commun pour les services et équipements de

télécommunication. Deux objectifs y étaient fixés: mettre en place un réseau de

10

Directive 88/301/CEE de la Commission européenne, 16 mai 1988

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télécommunications intégré au niveau européen, et favoriser le développement de services

aux plus bas tarifs possibles ». La directive « vise à libéraliser les marchés de terminaux de

télécommunication. Elle prévoit l'abolition des droits spéciaux ou exclusifs pour

l'importation, la commercialisation, le raccordement, la mise en service et l'entretien des

équipements terminaux de télécommunication »11

.

La loi du 2 juillet 1990 transforme France Télécom en une entité dotée d’une

personnalité morale distincte de l’Etat en lui octroyant une indépendance financière, son

budget n’étant dorénavant plus voté par l’Assemblée Nationale. Cette déréglementation

concernant la téléphonie mobile, les opérateurs ont donc du obtenir des licences

d’exploitation octroyées par l’Etat français. Chaque opérateur retenu avait ainsi l’obligation

d’investir dans son propre réseau et sa licence comportait des obligations de couverture

géographique. En 1991, ce sont donc France Télécom et SFR qui obtiennent les deux

premières licences, rejoins en 1995 par Bouygues Télécom.

Le 26 juillet 1996, c’est la téléphonie fixe qui est à son tour soumise à la concurrence.

En effet, la loi de réglementation des télécommunications12

votée à cette date a procédé à la

transposition des directives communautaires libéralisant les télécommunications13

.

« Les dispositions de l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, en tant

qu'elles permettent l'établissement et l'exploitation, par des opérateurs autres que France

Télécom, de réseaux ouverts au public, en vue de la fourniture de tous services de

télécommunications autres que le service téléphonique au public entre points fixes, prennent

effet à compter du 1er juillet 1996 … la fourniture au public, par des opérateurs autres que

France Télécom, du service téléphonique entre points fixes sur les réseaux autorisés en

application de l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications ne pourra, sous

réserve de l'application de l'article 2 de la loi n° 96-299 du 10 avril 1996 relative aux

expérimentations dans le domaine des technologies et services de l'information, prendre effet

qu'à compter du 1er janvier 1998. A la demande des opérateurs concernés, les autorisations

correspondantes pourront être délivrées à compter du 1er janvier 1997 »14

.

11

http://europa.eu/legislation_summaries/information_society/legislative_framework/l24119a_fr.htm 12

Loi n° 96-659 du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications 13

http://www.finances.gouv.fr/notes_bleues/nbb/nbb255/255_ouv.htm 14

Article 23 de la loi du 26 juillet 1996

Page 17: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

10

A partir du 1er

janvier 1998, d’autres opérateurs que France Télécom peuvent donc

fournir des services de téléphonie fixe, la loi établissant la fin des monopoles de droit sur la

téléphonie fixe dans le cadre d'une réglementation asymétrique15

. Dans la déréglementation

asymétrique, l'ancien monopole, ici France Télécom, conserve son infrastructure mais doit la

mettre à la disposition de ses propres concurrents, contrairement à la déréglementation

symétrique dans laquelle les nouveaux concurrents ne sont pas aidés et tous respectent les

mêmes règles. Afin de favoriser les nouveaux entrants, une série de règles asymétriques

régulant les rapports contractuels entre l'opérateur historique et les nouveaux entrants ont été

prévus : contrôle des prix de l'opérateur historique, droit d'accès aux infrastructures (en

l'occurrence la mise à disposition du réseau de câbles en cuivre appartenant à l'opérateur

historique, qui relie les abonnés aux centraux téléphoniques, nous y reviendrons plus tard) à

un prix très proche du coût de production.

Les services de télécommunications sont, au niveau européen, régis par la directive

2002/21/CE du 7 mars 2002, également appelée « Paquet Télécom ». Elle vise à garantir un

niveau de concurrence satisfaisant dans toute l’Europe, ce qui se traduit en France par des

transpositions dans la loi. En parallèle des ces dispositions ouvrant le secteur à la concurrence,

des textes législatifs viennent donc le réglementer. La loi du 31 décembre 200316

définit

l’application du service universel aux télécommunications, obligeant à fournir un « service

téléphonique de qualité à un prix abordable », à « acheminer gratuitement les appels

d’urgence », à « fournir un service de renseignements, un annuaire », et à « garantir la

desserte du territoire en cabines téléphoniques dans le domaine public ». Cette loi prévoit

également que France télécom ne sera plus en charge du service universel, ce service pouvant

être fourni par d’autres sociétés. Néanmoins, suite à l’appel à candidature du 12 novembre

2004, l’opérateur historique fut logiquement choisi comme représentant du service universel.

Selon Philippe Deubel17

, « le dégroupage des lignes téléphoniques a malgré tout

permis l'introduction d'une réelle concurrence et l'émergence d'offres innovantes sur le

marché de l'accès à l'Internet haut débit puis du « triple play » (Internet, TV numérique, voix

IP). Des acteurs importants ont pu se développer dans ce cadre, notamment Free-Iliad ».

Nous reviendrons sur cette notion de dégroupage dans une partie consacrée aux technologies.

15

http://www.melchior.fr/France-Telecom-du-monopole-a.9893.0.html 16

Loi n° 2003-1365 du 31 décembre 2003, suite à la directive européenne 2002/22/CE. 17

Professeur agrégé d’économie à l’Université Lille I

Page 18: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

11

La dernière étape de la libéralisation des télécommunications en France réside dans

l’attribution d’une quatrième licence de téléphonie mobile, qui fut octroyée au Groupe Iliad.

Le 17 décembre 2009, la candidature de Free Mobile à une licence de téléphonie mobile a en

effet été retenue par l’ARCEP18

, comme en témoigne l’article 5 de cette décision : « La

candidature de la société Free Mobile à l’obtention d’une autorisation d’utilisation de

fréquences dans la bande 2,1 GHz en France métropolitaine pour établir et exploiter un

système mobile de troisième génération est retenue ». Cette décision se cristallisera deux ans

plus tard par l’ouverture des services de Free Mobile le 10 janvier 2012, dont nous

reviendrons dans la deuxième partie de ce mémoire sur les conditions et modalités.

Ces différentes étapes de libéralisation ne sont cependant pas synonymes de

dérégulation. En effet, sur un marché de type oligopolistique, la concurrence restera toujours

imparfaite. Ainsi, des institutions veillent à ce que la concurrence soit libre et loyale sur le

marché. En France, c’est l’Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des

Postes (ARCEP) qui assure cette mission et qui dispose pour cela de la possibilité de

sanctionner des contrevenants. D’autres institutions existent également de manière parallèle.

(II) La multiplication des acteurs institutionnels

Les pouvoirs publics ont toujours souhaité garder une forme de régulation dans le

secteur des télécommunications, notamment parce que certains services de téléphonie ont un

caractère de biens collectifs, comme par exemple la norme GSM (Groupe Spécial Mobile) sur

laquelle nous reviendrons plus tard. Outre les législateurs français et européen dont nous

avons fait part ci-dessus, ce sont maintenant les institutions qui nous intéressent, dans le sens

où ont pour vocation de répondre aux défaillances du marché.

Il convient en premier lieu de présenter l’Autorité de Régulation des Communications

électroniques et des postes (ARCEP19

), puisque c’est l’institution garante de la concurrence

dans le secteur des télécommunications en France. L’ARCEP est une autorité administrative

indépendante20

, créée le 5 janvier 1997 sous le nom d’Autorité de Régulation des

Télécommunications (ART). Sa mission principale est de veiller à l’existence d’une véritable

concurrence sur ce marché, afin qu’elle soit bénéfique pour le consommateur. Dans ce cadre,

18

Décision n° 2009-1067, Arcep, 17 décembre 2009 19

http://www.arcep.fr 20

Institution de l’État chargée, en son nom, d’assurer la régulation de secteurs considérés comme essentiels et

pour lesquels le Gouvernement veut éviter d’intervenir trop directement.

Page 19: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

12

elle dispose de la compétence pour fixer des obligations générales imposées aux opérateurs,

sanctionner ces derniers si elles ne sont pas respectées, mais également attribuer les

fréquences et numérotations nécessaires à l’exercice du métier des opérateurs, à travers le

système des licences. Elle est également la garante du développement de l’emploi, de

l’innovation, et de la compétitivité dans le secteur des télécommunications, tout comme celle

des intérêts des territoires et des utilisateurs dans l’accès aux services et aux équipements.

Une des missions de l’ARCEP a été de réguler les conflits portant sur l’

« interconnexion » entre les opérateurs. L’interconnexion est une notion-clé dans le cadre de

l’ouverture à la concurrence du marché des télécommunications. Dans la mesure où les

utilisateurs des réseaux des différents opérateurs doivent être capables de communiquer entre

eux puisque nous sommes en situation de marché libre, il y a la nécessité de connecter les

réseaux entre eux, phénomène appelé l’interconnexion. Dans le cas contraire, l’opérateur qui

aurait initialement le plus de clients rapporterait tout le marché. Il y aurait donc un risque

d’abus de monopole21

. L’institution, ici une autorité de régulation qu’est l’ARCEP, impose

donc des accords d’interconnexion entre opérateurs (donc une stratégie coopérative), afin

d’instaurer une concurrence. En l’absence de régulateur, le marché de la téléphonie mobile ne

se serait pas développé en France.

L’Agence Nationale des Fréquences (ANFR22

) est quant à lui un établissement public

à caractère administratif23

créé le 1er

janvier 1997. Sa mission est de coordonner sur le

territoire français l’implantation des stations radioélectriques dans le but d’assurer une

utilisation optimale des sites disponibles et de veiller au respect des normes en matière

d’exposition du public aux champs électromagnétiques. Les opérateurs ne peuvent, sans son

accord, prendre une décision d’implantation.

Le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA24

) est également une institution régulant

les actions des opérateurs de télécommunications, notamment depuis qu’ils jouent un rôle

dans les métiers de l’audiovisuel (distributeur de contenus via ADSL et sur téléphones

mobiles). Selon le CSA, « ce phénomène est à l'origine d'une pression concurrentielle

21

J. Vicente, Cours de Théorie économique des institutions, ch. « Asymétries d’informations et théorie de

l’agence », IEP de Toulouse, 4e année

22 http://www.anfr.fr

23 Personne morale de droit public disposant d’une autonomie administrative et financière afin de remplir une

mission d’intérêt général, autre qu’industrielle ou commerciale, sous le contrôle de la collectivité publique dont

il dépend (État, région, département ou commune). 24

http://www.csa.fr

Page 20: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

13

nouvelle pour l'accès aux contenus et la vente de services. Elle contribue également à

l'accroissement de l'offre de programmes mise à la disposition du public »25

. En ce sens, elle

régule les services de communication audiovisuelle des opérateurs, tout comme l’ARCEP

régule les réseaux.

La Fédération Française de Télécoms (FFT26

), créée en 2007, réunit les associations et

les opérateurs de télécommunications français. Elle a pour mission de promouvoir une

industrie responsable et innovante au regard de la société, de l’environnement, des personnes

et des entreprises, de défendre les intérêts économiques du secteur et de valoriser l’image de

ses membres et de la profession au niveau national et international. Pour réaliser ses missions,

elle privilégie non pas la régulation contrainte mais la régulation ouverte, dans le respect des

règles de la concurrence en vigueur27

.

Au niveau européen, la Conférence européenne des administrations des postes et

télécommunications (CEPT), créée le 26 juin 1959, est une organisation de coordination entre

les entreprises européennes du secteur des télécommunications. Tout comme la FFT, elle a

pour vocation de faire de la régulation ouverte.

Au niveau international, l’Union internationale des télécommunications (UIT28

),

agence des Nations Unies pour le développement spécialisé dans les technologies de

l'information et de la communication, fut créée en 1865. Son principe fondateur est la

coopération internationale entre les gouvernements des Etats membres et le secteur privé. Sa

principale mission est la production de normes à portée internationale.

Nous avons donc compris dans cette première section que le secteur des

télécommunications en France fait l’objet depuis 25 ans d’une libéralisation du marché tout

en restant régulé par des institutions diverses, ce qui nous permet de comprendre les raisons

pour lesquelles un nouveau concurrent est apparu en 2012. Il paraît cependant nécessaire de

revenir sur les fondamentaux de l’essor fulgurant de ce marché au cours des dernières

décennies, ce qui nous permettra de comprendre entre autres pourquoi il ne peut exister

qu’un faible nombre d’acteurs.

25

CSA, « Les opérateurs télécom, nouveaux acteurs du secteur audiovisuel », La lettre du CSA n° 217 – Juin

2008, 30 juin 2008 26

http://www.fftelecoms.org 27

http://www.fftelecoms.org/articles/qui-sommes-nous 28

http://www.itu.int/fr/

Page 21: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

14

Section 2- L’essor du marché depuis la fin des années 1980

Cette évolution du marché peut se comprendre au travers de deux éléments : les

services et la technologie.

(I) Des technologies sans cesse renouvelées

Les technologies utilisées dans les télécommunications sont en évolution constante,

gage de la croissance du secteur (sur laquelle nous reviendrons dans une section consacrée

aux segments de croissance). Les technologies utilisées par les opérateurs de

télécommunications (mobile et fixe) répondent souvent à des normes, qui permettent une

meilleure visibilité pour le grand public et une compatibilité entre les différentes technologies.

(A) Dans la téléphonie mobile

En France, il existe plusieurs normes liées à la téléphonie mobile. Le marketing et la

communication des opérateurs ont rendu familières les normes 1G, 2G, 3G et 4G, le « G »

représentant l’abréviation « génération ».

Les normes « 1G »

Les normes « 1G » sont les normes associées à la première génération de téléphonie

mobile, la voix circulant par un canal analogique29

, le contrôle étant effectué par un canal

numérique30

. En France, cette norme fait tout d’abord référence à la technologie « Radiocom

2000 » lancée par France Télécom en 1986. Fonctionnant sous la bande de fréquence 400

MHz, c’est avec cette technologie qu’on parle pour la première fois de téléphonie cellulaire.

L’utilisation qui en est faite par la plupart des usagers concerne des appareils installés à bord

de véhicules.

En parallèle, SFR marque l’arrivée de la concurrence dans le secteur en important une

technologie des pays nordiques31

, appelée Nordic Mobile Telephone (NMT) dans la bande de

29

La transmission analogique de données consiste à faire circuler des informations sur un support physique de

transmission sous la forme d'une onde. 30

La transmission numérique consiste à faire transiter les informations sur le support physique de

communication sous forme de signaux numériques (série de 0 et de 1). 31

Finlande, Norvège, Suède, Danemark

Page 22: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

15

450 MHz, autorisée par les pouvoirs publics. Cette technologie, qui avait prouvé son

efficacité dans plusieurs pays depuis le début des années 1980, représente donc la première

évolution technologique dans le secteur. En coopération avec Alcatel-Thomson, SFR a

transposé le savoir-faire nordique pour que la technologie soit utilisable sur le sol français, et

ce à partir de 1989.

Les normes « 2G »

Les normes de deuxième génération représentent le passage du mi-analogique/mi-

numérique au tout numérique. Cette norme a offert la possibilité, en plus de la voix,

d’envoyer des données textes (SMS) puis des messages multimédias comme le MMS. En

France, comme partout en Europe, la norme utilisée est le GSM (Global System for Mobile

Communication). Mis en place en 1992, cette norme se base en Europe sur deux fréquences :

900 MHz et 1800 MHz, raison pour laquelle on appellera les terminaux produits avec cette

norme des « bi-bandes par opposition aux « tri-bandes », qui sont les terminaux compatibles

aux Etats-Unis. En effet, la norme GSM, généralisée au niveau européen, devait asseoir la

capacité des Européens à s’affirmer sur le plan technologique face aux Etats-Unis et leur

norme CDMA32

.

Cette norme a vu le jour grâce au groupe créé par la CEPT qui a rassemblé opérateurs

et fabricants de terminaux. Le « Groupe Spécial Mobile » a ainsi été mandaté pour organiser

et résoudre les modalités techniques liées à l’utilisation de la norme. L’acceptation officielle

de la norme GSM a été signée en 1997 par les acteurs (opérateurs et fabricants) de 17 pays

différents.

La norme GSM a deux propriétés majeures :

- elle permet à l’utilisateur de passer d’un réseau à un autre, tout en assurant la

continuité du service (téléphoner et envoyer des SMS et MMS).

- elle permet aussi la mise en place de la carte SIM (Subscriber Identity Module). Celle-

ci va alors permettre aux utilisateurs de changer de téléphone tout en gardant la même

ligne.

32

Code Division Multiple Access

Page 23: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

16

Les principaux avantages de cette norme, par rapport à Radiocom 2000 et NMT

étaient une meilleure qualité du son, une réduction des risques de piratage des lignes

téléphoniques, ou encore une diminution de la taille des téléphones mobiles.

Deux nouvelles technologies ont également vu le jour à la suite du GSM, qui

concernait uniquement les échanges de voix : il s’agit du GPRS33

(2001) et du EDGE34

dont

l’apport est l’échange de données sur réseau mobile. Le GPRS est souvent qualifié de

« 2,5G », il offre un débit deux fois supérieur à celui du GSM, ce qui permet la transmission

des données et un premier pas vers l’internet mobile. EDGE quant à lui est une évolution du

GPRS apparue à la veille des réseaux de troisième génération.

La norme « 3G »

C’est en 2004 qu’apparaît la troisième grande génération en matière de téléphonie

mobile, basée au départ sur la technologie UMTS35

dont les fréquences (900 MHz et 1800

MHz) ont été attribuées par l’ARCEP en 2001 et 200236

. La 3G, dont l’UMTS et ses

évolutions (HSDPA37

, HSPA+ et DC-HSPA+) offrent un débit théorique bien supérieur à

celui du GSM, va servir de socle technologique au développement des usages et des nouveaux

services avec la téléphonie mobile : télévision, visioconférence, accès haut débit à l’internet

mobile. Après la première génération basée sur des technologies françaises, et la deuxième

basée sur des technologies européennes, c’est désormais une norme mondiale qui est utilisée.

(B) Dans la téléphonie fixe

Pour comprendre les évolutions opérées dans le domaine du mobile, il convient

également de faire un état des lieux des différentes évolutions technologiques du domaine de

la téléphonie fixe, qui se sont faites de manière parallèle, notamment dans le cadre du

développement des accès à internet.

Les connexions physiques

33

General Packet Radio Service 34

Enhanced Data Rates for GSM Evolution 35

Universal Mobile Telecommunications System 36

Conformément à la décision n°00-0835, ARCEP, 28 juillet 2000 37

High Speed Downlink Packet Access

Page 24: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

17

A l’origine, la téléphonie fixe (transmission de la parole à distance) est possible

techniquement grâce aux réseaux de câbles en cuivre appartenant à France Télécom, appelé

Réseau téléphonique commuté (RTC). C’est ce réseau qui est utilisé par la technologie

xDSL38

pour fournir les foyers en accès à internet, l’ADSL en étant la variante la plus connue.

Il s’agit d’une technologie qui permet d’atteindre des débits de plusieurs mégabits par

seconde (Mbits/s) sur des lignes téléphoniques classiques.

De même, le « câble » qui permettait de recevoir des chaînes de télévision

supplémentaires via une installation parallèle à celle de France Télécom permet aujourd’hui

de recevoir l’internet haut débit et le téléphone.

La fibre optique, constituée physiquement d’un fil de verre très fin permettant la

transmission d’informations à un débit très élevé grâce à des impulsions lumineuses, est en

cours de développement, notamment dans les grandes villes françaises pour les particuliers.

Les connexions sans fil

Le satellite est une technologie permettant d’acheminer des informations et d’offrir

des services de téléphonie et d’internet. Néanmoins, son coût très élevé en fait un moyen de

communication peu privilégié.

Le Wimax, technologie de transmission de données par voies hertziennes, est utilisé

dans des zones du territoire dans lesquelles il n’y a ni le câble ni l’ADSL.

Enfin, la BLR (Boucle Locale Radio) consiste à remplacer les derniers kilomètres de

lignes téléphoniques connectant un particulier ou une entreprise par des ondes radio dans des

régions à faible densité de population.

Nous avons vu que les technologies déployées par les opérateurs de

télécommunications ont évolué très rapidement depuis les années 1980, passant de normes

purement françaises à des normes internationales standardisées, notamment pour la

téléphonie mobile. Les technologies déployées ont servi de socles à des services toujours plus

enrichis pour les utilisateurs.

38

Digital Subscriber Line (Ligne numérique d’abonné)

Page 25: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

18

(II) L’évolution des services proposés

On distingue, dans les services proposés par les opérateurs de télécommunications, les

services grand public (particuliers) et les services aux entreprises.

(A) Les services grand public

Service historique fourni par les opérateurs de télécommunication, la téléphonie peut

être dite fixe ou mobile. La téléphonie fixe fait partie intégrante des offres de fourniture

d’internet à haut débit. Elle connaît même un renouveau dans la mesure où les technologies de

voix sur IP39

(VoIP) offrent un son de qualité améliorée. Au 4e trimestre 2011, la téléphonie

sur IP concernait 52% des abonnements40

. Le marché de la téléphonie mobile est quant à lui

en constante augmentation. Le taux d’équipement des Français en la matière est aujourd’hui

de 112%41

.

L’accès à internet est le deuxième service proposé par les opérateurs de

télécommunications. Popularisé par les offres ADSL, couplées avec l’accès à la téléphonie

fixe, voire mobile, et la télévision, le nombre de foyers équipés s’élève en 2010 à 64% de la

population, contre 12% il 10 ans auparavant42

.

Avec le développement sans précédent de l’internet mobile (24,1 millions de Français

disposent d’un smartphone, soit 44,4% de la population43

), les opérateurs de

télécommunication offrent également des services dans les contenus. Grâce à la technologie

UMTS qui a permis d’élever sensiblement les débits de transmission des données pour que les

utilisateurs accèdent au haut débit mobile, les téléphones portables sont devenus des appareils

multifonctions permettant de se connecter à internet, de prendre des photos, des vidéos, de les

envoyer, de télécharger des films, des applications et des jeux. De même, grâce aux

connexions internet filaires de plus en plus rapides, les opérateurs peuvent désormais proposer

des services tels que la vidéo à la demande (VOD), la diffusion de la télévision en haute

définition ou encore la vidéosurveillance.

39

Mode de téléphonie utilisant le protocole de télécommunications créé pour Internet (IP pour Internet Protocol).

La voix est numérisée puis acheminée sous forme de paquets comme n'importe quelles autres données. 40

Données Xerfi 41

Selon l’Arcep, 73,8 millions de cartes SIM pour une population de 65,8 millions de personnes au 1er

trimestre

2013 42

http://www.insee.fr/fr/themes/document.asp?ref_id=ip1340 43

http://www.journaldunet.com/ebusiness/internet-mobile/equipement-et-usages-des-smartphones-0613.shtml

Page 26: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

19

(B) Les services aux entreprises

Le type de services aux entreprises est similaire à ceux pour le grand public, mais les

usages sont néanmoins différents. En ce qui concerne la voix (téléphonie fixe et mobile), les

services sont identiques à ceux destinés aux particuliers, mais ils incorporent des

fonctionnalités supplémentaires comme les options de numérotation ou les conférences

téléphoniques. La voix sur IP assure des garanties de sécurité bien supérieures aux anciennes

normes de téléphonie fixe, ce qui correspond à des besoins pour des clients professionnels.

Pour leur accès à internet, les entreprises ont des besoins différents de ceux du grand

public. En effet, du fait de leur taille et donc du nombre important de postes connectés à

internet, les volumes de données qui transitent sur leurs réseaux nécessitent des connexions à

très haut débit, le plus souvent grâce à la technologie de fibre optique. Tout comme la voix,

l’accès à internet présente des enjeux forts en terme de fiabilité et de sécurité.

Les entreprises, selon leur taille, ont des besoins en terme de traitement des données.

Leur transmission doit être effectuée de manière complexe et sécurisée, comme le montrent

les enjeux actuels qui existent autour du Cloud Computing44

et du Big Data45

. Pour répondre à

ces besoins, les opérateurs fournissant l’accès à internet proposent des services tels que les

interconnexions de LAN (réseaux internes à l’entreprise) ou les liaisons louées (location de

liaisons physiques appartenant aux opérateurs pour la transmission des données, comme la

fibre optique ou le câble) pour les transferts d’un gros volume de données. Les opérateurs

proposent également des solutions de stockage à distance.

De même, les opérateurs proposent également des solutions « machine to machine »

permettant des échanges de données entre ordinateurs sans intervention humaine. Les

entreprises utilisent ce type de service notamment pour des besoins logistiques liés à la

sécurité, la monétique ou encore la gestion des équipements.

Nous l’avons compris, de la Direction générale des Télécommunications ayant le

monopole de la téléphonie fixe à la présence de plusieurs opérateurs fournissant des services

44

Utilisation de serveurs distants (en général accessibles par Internet) pour traiter ou stocker l'information. 45

Phénomène d’explosion des volumes de données de nature informatique à traiter par l’entreprise.

Page 27: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

20

dans la téléphonie fixe et mobile, dans l’internet et dans les médias, le secteur français des

télécommunications a connu une transformation à tous niveaux : politique, institutionnelle,

réglementaire, technologique et commerciale. Après avoir étudié ce passage d’un marché en

situation de monopole à un système oligopolistique, nous allons désormais nous intéresser à

son fonctionnement d’un point de vue économique en regardant plus précisément la

composition du tissu économique ainsi que les segments de croissance sur lesquels se sont

appuyés les opérateurs.

Page 28: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

21

Chapitre 2- Un secteur majeur de l’économie française

Le secteur des télécommunications occupe une place importante dans l’économie

française, puisqu’il pèse 3% du PIB national. Nous allons étudier dans cette partie la

composition du tissu économique d’une part ainsi que les piliers de la croissance de ce secteur

d’autre part.

Section 1- La composition du tissu économique, entre éclatement des

acteurs et concentration des métiers

Les opérateurs de télécommunications sont évidemment les acteurs les plus importants

du secteur, dans le sens où ils possèdent les réseaux physiques permettant de fournir des

services associés. Néanmoins, ils ne sont pas les seuls à jouer un rôle dans ce secteur dans

lequel la concurrence s’est nettement accrue au cours des dernières années.

(I) Evolution et caractéristiques structurelles : maille économique éclatée

et convergence

(A) Un secteur atomisé

Le marché des services de télécommunications, tels que nous les avons décrits dans la

partie précédente (téléphonie, internet, etc), est composé de plus de 4900 entreprises46

, pour la

plupart des TPE. Le chiffre d’affaires du secteur s’élève à 70,4 milliards d’euros, ce qui en

fait un poids lourd au niveau européen, environ 87% des revenus étant générés par les

activités de télécommunications filaires et sans fil.

Tableau récapitulatif des entreprises composant le secteur (Source : Xerfi)

46

Recensées en 2009, donnée Xerfi – Voir en Annexe 1 les principales sociétés du secteur

Page 29: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

22

Attirées par la rentabilité du secteur, de nombreuses entreprises se créent, passant de

3072 en 2005 à 4581 en 2010. Ainsi, on comprend que malgré la situation d’oligopole dont

jouissent les opérateurs de télécommunications, le secteur est extrêmement concurrentiel, en

particulier pour les petites entreprises.

Cependant, le nombre de créations d’entreprises est en diminution depuis 2010, le solde

création / défaillances restant tout de même positif.

Il est également intéressant de voir dans quels sous-secteurs d’activité ces entreprises

exercent. Alors que ce sont les télécommunications sans fil (46,6%) et filaires (40,8%) qui

génèrent la majorité du chiffres d’affaires du secteur, tandis que celles par satellite (5,5%) et

les autres activités47

(7,1%) sont minoritaires, les entreprises composant le tissu économique

47

Comprend la fourniture d’applications spécialisées, l’exploitation de stations de communications, la fourniture

d’accès à internet par l’intermédiaire de réseaux dont l’opérateur n’est pas propriétaire, la fourniture de

téléphone et d’internet dans des lieux publics, la fourniture de télécommunications par la voix sur IP,

l’acquisition et la revente de capacités réseau dans services supplémentaires.

Page 30: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

23

des télécommunications sont pour 51,6% d’entre elles présentes dans les activités annexes,

tandis qu’elles sont 38,7% dans le filaire et seulement 7% dans le sans fil.

Enfin, il convient de noter qu’une des composantes du tissu économique du secteur des

télécommunications est le taux d’investissement très élevé de la part des entreprises. Entre

2005 et 2011, les investissements ont connu une croissance de 25% pour atteindre 7,9

milliards d’euros, ce qui tient essentiellement à l’accroissement des dépenses de déploiement

des réseaux très haut débit, qui ont atteint 2,5 milliards d’euros en 2011 (1,8 M€ pour les

réseaux mobiles, 700 m€ pour les réseaux de fibre optique).

On remarque également qu’en 2011 les dépenses d’investissement ont augmenté pour la

deuxième année consécutive :

Page 31: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

24

(B) La convergence des services et des infrastructures48

Sous l’effet de la déréglementation, de l’évolution des technologies et de la vitalité

économique du secteur, le mariage des télécommunications, de l’informatique et de

l’audiovisuel ouvre de nombreuses perspectives de développement de nouveaux services

intégrant voix, données et images. Le rapprochement entre ces industries induit un

phénomène de convergence à plusieurs niveaux.

La convergence des services

Aujourd’hui, les technologies radio permettent d’offrir des services de visiophonie ou

des accès à des applications multimédias à partir de terminaux mobiles (smartphones), grâce à

la technologie UMTS que nous avons évoquée précédemment, ce qui n’était auparavant

possible que sur des lignes fixes. Ce terminal permet aujourd’hui non seulement de passer ses

communications vocales mais également de transférer des données, d’accéder à Internet et de

payer de façon parfaitement sécurisée des services ou des biens achetés au travers soit de

serveurs en ligne, soit de manière physique grâce à la technologie NFC49

qui permet le

paiement sans contact.

Désormais, le fait de souscrire un abonnement internet permet d’accéder à plusieurs

services (téléphonie, télévision, internet) proposé par le même opérateur, preuve de la

convergence entre communications et médias. Ces services, également disponibles sur

téléphone mobile, sont proposés par les mêmes opérateurs « globaux ».

La convergence des infrastructures

L’offre de services est également de plus en plus décorrélée des plates-formes réseau.

Les technologies deviennent polyvalentes et permettent un transport de façon indifférenciée

de la voix, des données et des contenus multimédias. Les réseaux, quel que soit le support

physique qu’ils utilisent (câble, fibre optique, systèmes hertziens) sont désormais capables de

supporter des débits élevés et deviennent multiservices. Le secteur offre de nouvelles

opportunités à tout acteur disposé à se diversifier dans le secteur des services de

télécommunications, comme en témoigne le nombre élevé de créations d’entreprises. Des

48

P.-Y. Badillo, D. Roux, Les 100 mots des télécommunications, Que sais-je ? (P.U.F.), 2009 49

Near Field Communications

Page 32: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

25

opportunités d’autant plus intéressantes que ce marché se révèle être particulièrement

attractif :

- En termes sectoriels : certains usages sont en pleine effervescence et devraient selon

les prévisions enregistrer une croissance à deux chiffres (les contenus haute définition

par exemple)50

;

- En termes de rentabilité.

Les acteurs du marché sont bien évidemment conscients de ces opportunités, comme le

montrent l’analyse des forces en présence.

(II) Les forces en présence : des opérateurs possédant des réseaux

physiques et des acteurs secondaires

L’opérateur historique des télécommunications françaises, France Télécom devenu

Orange le 1er

juillet 201351

, qui fut en situation de monopole jusqu’en 1988 pour le mobile, et

1998 pour le fixe, est toujours leader incontestable du marché. Orange capte en effet 42,5%

des abonnés à Internet et plus de 38% des abonnés à la téléphonie mobile. Il devance donc ses

trois principaux concurrents, que sont SFR, Bouygues Télécom et Free.

Outre les quatre opérateurs connus du grand public, il existe des entreprises

spécialistes des services aux entreprises, des organismes publics et des acteurs des

télécommunications. Ces opérateurs supplémentaires viennent faire concurrence à la fois aux

opérateurs historiques mais aussi aux petites entreprises qui proposent le même type de

services.

50

http://www.01net.com/editorial/585705/4g-beaucoup-des-promesses-et-quelques-realites/ 51

http://www.orange.com/fr/groupe/France-Telecom-devient-Orange

Page 33: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

26

(A) Les opérateurs de réseaux physiques

France Télécom / Orange

Détenu à 27% par l’Etat français et le FSI52

, Orange est

le leader français de la téléphonie fixe, de l’accès à internet et

de la téléphonie mobile53

. Présent à l’international, le groupe

réalise 47,6% de son chiffre d’affaires en France.

Les clients du groupe sont les particuliers, les

entreprises via sa filiale Orange Business Services ainsi que les

opérateurs mobiles virtuels (MVNO, voir partie suivante).

SFR

Filiale à 100% du groupe Vivendi54

, SFR (Société

Française du Radiotéléphone) fut créé en février 1987, lors

de l’ouverture à la concurrence de la téléphonie mobile.

Initialement spécialisé dans ce secteur, l’opérateur propose

également aujourd’hui des services d’accès à internet depuis

la fusion avec Neuf en 2007, ainsi que des contenus

multimédias.

L’entreprise occupe la deuxième place sur les

marchés de la téléphonie mobile et la troisième pour la fourniture d’accès à internet, avec une

clientèle composée de particuliers, de professionnels et d’administrations.

Bouygues Télécom

Troisième acteur historique de téléphonie mobile en France, Bouygues Télécom est

une filiale du groupe Bouygues depuis 1994. Elle occupe logiquement la 3e place dans la

52

Fonds stratégique d’investissement 53

Voir Annexe 2 – Analyse SWOT de France Télécom 54

Membre du CAC40, Vivendi est une multinationale spécialisée dans les secteurs de la communication, des

médias et du divertissement.

Page 34: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

27

téléphonie mobile, mais seulement la 4e pour ce qui est du marché d’accès à internet, loin

derrière ses concurrents avec 5,7% de parts de marché en 2012.

Néanmoins, le groupe entend renforcer son poids

sur ce segment grâce au rachat des activités télécoms de

Darty en mai 2012 (300000 abonnés internet et 40000

abonnés mobile). Tout comme Orange et SFR, il propose

des services aux particuliers, aux entreprises, et loue

également son réseau aux MVNO.

Free (Groupe Iliad)

Iliad est détenu en majorité par Xavier Niel (58,6%55

). Créé en 1991, Iliad exerce à

l’origine des activités dans la fourniture de services de Minitel. C’est à partir de 1999 que le

groupe devient un fournisseur d’accès à internet et de

téléphonie fixe, notamment via sa filiale Free. Le groupe

occupe aujourd’hui la deuxième place du marché français,

devançant de peu SFR. Il est le premier opérateur à avoir

proposé une offre « triple play »56

à moins de 30 euros par

mois, affichant les prémices d’une stratégie reposant sur des

offres commerciales à bas coûts.

Depuis 2012, Iliad est également présent sur le marché de la

téléphonie mobile, ce que nous détaillerons dans la seconde partie de ce mémoire. Au premier

trimestre 2012, l’opérateur possédait déjà 3,8% de parts de marché.

Numericable Completel

Détenu par trois fonds d’investissement étrangers, Numericable Completel est leader

sur le marché des télécommunications par câble pour la télévision via le réseau Numericable

(3,42 millions d’abonnés), et de la fourniture d’accès à internet par fibre optique57

via le

55

http://www.iliad.fr/amf/2013/documentdereference2012.pdf 56

Offre composée d’un accès à internet, de téléphonie fixe et de télévision. 57

S. Godeluck, « Numericable reste le leader du très haut débit en France avec 500.000 clients », Les Echos, 13

avril 2012

Page 35: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

28

réseau Completel, et présent dans la téléphonie fixe et mobile via le réseau de Bouygues

Télécom.

Numericable est né en 2007 de la fusion de NC Numericable, Noos et Est

videocommunications. Alors que ses offres commerciales sont destinées aux particuliers,

avec la fourniture de services similaires à ceux des autres

opérateurs, Completel est spécialisé dans les solutions de

télécommunications pour les entreprises et les

administrations. Ses 10000 km de réseau en font le premier

opérateur de télécommunications par fibre optique pour les

professionnels en France. Ses solutions comprennent des

services de téléphonie, (fixe, centres d’appel), des solutions

d’accueil58

, d’interconnexions de sites, d’accès internet et

de cloud computing.

Il est intéressant de noter que Numericable Completel utilise le réseau de Bouygues

Télécom pour la téléphonie mobile, tandis que ce dernier utilise le réseau fibre optique du

câblo-opérateur dans ses offres très haut débit.

(B) Les opérateurs de réseaux virtuels

Les MVNO (Mobile Virtual Network Operator) sont des opérateurs de téléphonie

mobile virtuels, dans le sens où ils ne possèdent pas leurs propres infrastructures ni les

fréquences de télécommunications mais les louent aux opérateurs existants (Orange, SFR,

Bouygues Télécom – Free ne louant pas son réseau pour le moment) pour proposer des offres

à leurs clients. Leur arrivée sur le marché fait suite à l’avis favorable de l’ARCEP le 10 juin

2004. Aujourd’hui, il existe une cinquantaine de MVNO en France.

C’est dans une logique de renforcement de la concurrence que l’ARCEP a souhaité

l’apparition d’opérateurs virtuels. Néanmoins, malgré une progression croissante, leur part de

marché cumulée n’atteignait que 11,2% au 1er

trimestre 201259

. Contrairement aux opérateurs

physiques qui sont présents sur tout le territoire, les MVNO privilégient des stratégies de

niche, dans le sens où ils se développent dans des régions faiblement couvertes, où le taux de

58

Numéros commençant par 0800 par exemple. 59

Source Xerfi

Page 36: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

29

pénétration est faible, ou encore en s’adaptant à des spécificités régionales : c’est le cas par

exemple de Breizh Mobile, qui facture moins les communications passées à l’intérieur de la

Bretagne que les autres. Pour proposer des offres attractives, ces opérateurs acquièrent leurs

clients via des canaux à faibles coûts (par exemple Internet), dématérialisent leurs supports

administratifs ou encore maintiennent des coûts de structures faibles. Les clients sont, en

fonction des opérateurs, des particuliers ou des professionnels.

Parmi les MVNO les plus connus, il convient de citer M6 Mobile, CIC Mobile, qui

utilisent le réseau d’Orange, Joe Mobile, La Poste Mobile pour SFR, Numericable pour

Bouygues Télécom.

Nous avons vu que le tissu économique du secteur des télécommunications s’étendait sur un

spectre large, des opérateurs « classiques » générant plusieurs milliards d’euros de chiffre

d’affaires à de nombreuses TPE présents dans des marchés de niches, en passant par les

opérateurs mobiles virtuels. L’évolution de cette maille fait apparaître une caractéristique

qu’est la convergence entre les métiers de la téléphonie, de l’internet et des médias. En effet,

les opérateurs de télécommunications, avec les offres multiservices, proposent tous de la

téléphonie (fixe et mobile) et un accès à internet. Il convient désormais de s’intéresser aux

segments de croissance phare qui ont permis à ce secteur d’occuper une place prépondérante

dans l’économie française, et qui explique le renforcement de la concurrence de ces dernières

années marqué par l’arrivée d’un quatrième opérateur physique sur le marché de la

téléphonie mobile.

Section 2- Des segments de croissance à bout de souffle

Face à la multiplication des acteurs et le renforcement de la concurrence, les opérateurs de

télécommunications ont axé leurs stratégies sur le développement de deux segments porteurs :

la voix via une incitation à consommer plus, et les données grâce à l’essor le la consommation

de l’internet mobile.

(I) La voix, pilier de la croissance du secteur

Page 37: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

30

En 2009, l’usage de voix (environ 200 milliards de minutes consommées) s’équilibrait

entre la téléphonie fixe et la téléphonie mobile (respectivement 50% de parts de marché).

Aujourd’hui, on observe une croissance pour le mobile et une baisse pour le fixe.

Bien que l’usage de la téléphonie fixe soit en déclin, l’usage de la voix par les

consommateurs est toujours un segment de croissance, tiré par la téléphonie mobile. Avec un

trafic de téléphonie fixe et mobile s’élevant à 61,1 milliards de minutes, la croissance reste

soutenue avec une augmentation de +4,7% en un an au premier trimestre 201360

. Ce volume,

tiré par la progression du trafic de téléphonie mobile, connaît un taux de croissance annuelle

de 20%.

La consommation de téléphonie fixe s’élève à 27,8 milliards de minutes au premier

trimestre 2013, ce qui correspond à une baisse de -8,8% en un an. Il s’agit d’une baisse

consécutive sur quatre trimestres. Le trafic des box vers les mobiles connaît en effet sa

première baisse (-4,3%), après une période de ralentissement de sa croissance en 2012. De

même, le trafic de ligne fixe à ligne fixe est en recul de 7%, ce qui correspond à 1 milliard de

minutes consommées en moins.

Le volume de consommations téléphoniques mobiles atteint quant à lui 33,3 milliards

de minutes au premier trimestre 2013, soit une augmentation de 5,4 milliards de minutes par

rapport au premier trimestre 2012 (23 minutes de plus consommées par client et par mois,

pour un total de 2h51 minutes de communications mensuelles). L’augmentation du trafic de

voix au départ des mobiles est en augmentation annuelle de 19,5%.

Néanmoins, malgré ces chiffres faisant état d’une croissance de l’usage de la

téléphonie, les revenus qui y sont associés sont eux en baisse. Le revenu des communications

mobiles ne cesse en effet pas de diminuer depuis cinq années. La voix, qui fut un segment de

croissance pour les opérateurs de télécommunications, n’est donc plus un relai de croissance,

du fait de la concurrence accrue dans ce secteur.

60

Données Arcep

Page 38: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

31

(II) L’explosion de l’accès à internet

La croissance du réseau Internet61

et la généralisation de l’utilisation du protocole IP

(qui permet d’échanger des données d’un ordinateur à un autre) pour les réseaux de

télécommunications mobiles, pour les réseaux internes des entreprises (Intranet) ou pour les

réseaux reliant l’entreprise à ses fournisseurs et clients (Extranet), induisent une croissance

sans précédent du trafic des données à partir des années 2000.

En France, le marché de la connectivité Internet s’est fortement développé sur le

segment « entreprises », avant que les particuliers prennent le relai de la croissance. Le

nombre de SMS envoyés s’élève au premier trimestre 2013 à 49,4 milliards, avec une

croissance annuelle de 11,5%. Le volume de données transitant par les réseaux mobiles est

quant à lui de plus de 30 Pétaoctets pour le trimestre, en augmentation de 66% par rapport à

l’année dernière.

61

Ensemble des réseaux de communication électronique interconnectés entre eux et permettant à ses utilisateurs

d’échanger des informations.

Page 39: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

32

Cependant, le revenu des données (SMS, MMS, accès à internet) dans les services

mobiles n’augmente plus non plus depuis le deuxième trimestre 2012, cette différence entre la

stagnation ou la baisse des chiffre d'affaires des opérateurs et l'augmentation importante des

volumes s'expliquant selon l'Arcep « par la baisse des prix de détail des services de

communications électroniques, que l'Insee a chiffrée à 9,5% en 2012 »62

.

On comprend donc que les segments de croissance qui ont servi de piliers aux opérateurs de

télécommunications français deviennent désuets, du fait d’un renforcement de la concurrence

du secteur et de ce qui semble être une baisse des prix.

62

« Mobile : le volume de données échangées a augmenté de 70% en 2012 », L’Expansion, 4 avril 2013

Page 40: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

33

Le secteur des télécommunications en France se caractérise, nous l’avons vu, par une

structure oligopolistique. Cette situation s’explique par des raisons historiques (France

Télécom était un monopole pour le mobile jusqu’en 1988 et pour le fixe jusqu’en 1998) et par

d’importantes barrières à l’entrée, qui tiennent à la fois à la réglementation (attribution des

licences par l’ARCEP), aux technologies (complexité, coût de développement) et à l’économie

(importance des investissements à réaliser pour la mise en place d’un réseau). Par exemple,

l’entrée de Free sur le marché en tant que quatrième opérateur de téléphonie mobile a coûté

à Iliad la bagatelle de 2 milliards d’euros.

La filière des services de télécommunications, qui génère un chiffre d’affaires de 70,4

milliards d’euros (notamment dans les télécommunications filaires et sans fil), comprend

quelque 4900 entreprises, ce qui en fait un secteur atomisé. Cet éclatement est symptomatique

d’un renforcement de la concurrence. Bien que les parts de marché soient majoritairement

détenues par les trois acteurs « historiques » que sont Orange, SFR et Bouygues Télécom, de

nouveaux poids lourds ont fait leur apparition. Outre Free (dans le mobile) et Numericable

(surtout dans le fixe), des opérateurs virtuels (MVNO) ont fait leur apparition et réussissent à

se faire une place dans le paysage concurrentiel.

Les segments de croissance sur lesquels se sont appuyés les opérateurs de

télécommunications tendent aujourd’hui à s’effriter, du fait de cette concurrence poussée. La

croissance de la consommation n’entraîne plus une croissance des revenus, signe du

bouleversement induit par l’arrivée de Free sur le marché de la téléphonie mobile. C’est

pourquoi nous allons tenter de comprendre dans la deuxième partie de ce mémoire les

tenants et aboutissants de ce changement majeur. Nous comprendrons notamment pourquoi

la modification du paysage concurrentiel entraîne des conséquences importantes sur

l’économie et oblige les entreprises à repenser leurs stratégies.

Page 41: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

34

Deuxième partie - L’arrivée d’un nouvel entrant sur le marché,

un bouleversement majeur pour le secteur

Afin de comprendre en quoi l’entrée d’un nouveau concurrent sur le marché des

télécommunications a fait l’effet d’un tremblement de terre, il convient dans un premier temps

de voir en quoi cela a modifié la physionomie du secteur. Dans quelles conditions Free a-t-il

pu pénétrer un oligopole dans lequel les barrières à l’entrée sont extrêmement fortes ? Quel

rôle les pouvoirs publics ont-ils joué ? Où le nouvel opérateur a-t-il trouvé les ressources

nécessaires ? Quelles conséquences cela a-t-il pour les entreprises du secteur ? Pour

l’emploi ? Pour les consommateurs ?

Etudier les nouveaux modèles de croissance et les solutions innovantes mises en avant

nous permettra dans un deuxième temps de comprendre comment les opérateurs renouvellent

leurs stratégies pour faire face à ce bouleversement. Pourquoi Free a-t-il choisi de « casser les

prix » en ne proposant que des offres « low-cost » ? Le service est-il réellement moins cher

qu’auparavant ? Cela correspond-il à la juste valeur des services proposés ou au contraire

détruit-il de la valeur ? Les opérateurs peuvent-ils maintenir ce modèle à long terme ?

L’innovation peut-elle permettre aux opérateurs de retrouver le chemin de la croissance ?

Au travers de la réponse à ces questions, nous tenterons de montrer que ce secteur est

en pleine transformation, mais que des solutions existent pour continuer à créer de la valeur.

Page 42: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

35

Chapitre 1- La modification du paysage des

télécommunications en France

Nous étudierons dans ce chapitre les modalités et les conditions d’une introduction de

Free sur le marché facilitée par les pouvoirs publics, ainsi que les conséquences

macroéconomiques que cela a entraîné. Puis, nous nous intéresserons aux nouvelles

caractéristiques du secteur, au niveau environnemental et conjoncturel.

Section 1- L’introduction de Free sur le marché

(I) L’arrivée de Free : conditions et modalités

Dans le prolongement du Paquet Télécom établi en 2002 par la Commission

européenne, une mise à jour a été publiée le 13 novembre 2007, dont les dispositions

réglementaires sont applicables en 2010, et adoptée le 24 novembre 200963

. Cette nouvelle

directive encadre les conditions d’accès aux réseaux de télécommunications pour des

nouveaux entrants et permet aux régulateurs nationaux, dans le cadre d’un renforcement de la

concurrence, d’obliger les opérateurs historiques à séparer leurs activités commerciales de la

gestion de leurs infrastructures.

Le gouvernement Fillon II, dans une volonté de renforcer la concurrence dans un

secteur des télécommunications où les opérateurs ont été condamnés dans le passé pour

entente sur les prix, a lancé le 1er

août 2009 un appel à candidatures pour l’attribution d’une

quatrième licence de téléphonie mobile, après transmission de la décision de l’Arcep de

mettre en vente une quatrième licence64

. Le coût de celle-ci a été fixé à 240 millions d’euros,

bien en deçà des 619 millions d’euros que déboursèrent Orange, SFR et Bouygues Télécom

au début des années 2000 pour l’attribution de la licence pour la technologie UMTS65

.

Selon la décision de l’Arcep, le nouvel entrant doit respecter certaines conditions :

« Les obligations minimales qui seront imposées au candidat qui sera retenu à l’issue de la

63

http://www.arcep.fr/index.php?id=9578 64

Décision n° 2009-0610, Arcep, 16 juillet 2009 65

Cette baisse du prix s’explique par la division des fréquences en trois lots.

Page 43: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

36

présente procédure sont identiques à celles qui étaient imposées dans les trois précédents

appels à candidatures. Il devra notamment respecter des obligations en matière de couverture

de la population, de fourniture de services, de disponibilité et de qualité de ces services. Il

devra obligatoirement fournir le service de téléphonie, un service de messagerie

interpersonnel, l’accès à Internet et un service de transmission de données. Ces services

devront être fournis sur l’ensemble de la zone de couverture de l’opérateur, avec un taux de

réussite dès la première tentative qui devra être, pour chaque service, d’au moins 90%. Le

candidat qui sera retenu devra couvrir a minima 25% de la population au bout de 2 ans puis

80% de la population au bout de 8 ans après la délivrance de l’autorisation ».

Outre les obligations inhérentes au nouvel entrant, la décision de l’Arcep contraint

également les opérateurs existants sur les questions de d’itinérance, de partage de sites et

d’interconnexions : « Ainsi que le prévoient les cahiers des charges 3G des opérateurs

existants, cette mise en œuvre doit se faire en privilégiant des négociations commerciales

entre opérateurs. Toutefois, en cas de litige, l’Autorité pourra être saisie en règlement de

différend, en application des dispositions de l’article L. 36-8 du code des postes et des

communications électroniques. Dans cette hypothèse, l’Autorité s’attachera à mener la

procédure dans des délais compatibles avec les impératifs commerciaux de l’opérateur

nouvel entrant, sur le fondement des objectifs de l’article L. 32-1 du code des postes et des

communications électroniques, notamment « la définition de conditions d’accès aux réseaux

ouverts au public et d’interconnexion de ces réseaux qui garantissent la possibilité pour tous

les utilisateurs de communiquer librement et l’égalité des conditions de concurrence », «

l’absence de discrimination, dans des circonstances analogues, dans le traitement des

opérateurs » et « l’exercice au bénéfice des utilisateurs d’une concurrence effective et loyale

entre les exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques

» ». Il est intéressant de noter que l’Arcep propose donc aux trois opérateurs de s’entendre

pour favoriser l’arrivée du nouveau concurrent, mais qu’elle s’octroie également le droit de

trancher en cas de désaccord.

L’offre la plus solide étant celle de Xavier Niel pour Free, face à des dossiers plus

faibles comme ceux de Numericable ou Virgin, l’Arcep choisit le 17 décembre 200966

cet

acteur déjà bien implanté dans la téléphonie fixe et qui a les capacités d’investir massivement

dans le développement d’un réseau de télécommunications mobiles.

66

Décision n°2009-1067, Arcep, 17 décembre 2009

Page 44: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

37

Pour permettre à Free de pénétrer ce marché aux barrières importantes, le régulateur

lui a donc accordé des avantages non négligeables. Tout d’abord, comme le montre l’extrait

de la décision de l’Arcep, un des opérateurs existants a du signer un accord d’itinérance avec

Free, puisque lors du lancement des offres, le 10 janvier 2012, ce dernier devait couvrir a

minima 25% de la population. Orange a donc accepté d’ouvrir son réseau à Free pour un

montant de 1 milliard d’euros sur 6 ans67

. Ensuite, la décision de l’Arcep prévoyait l’accès de

Free aux « points hauts » des opérateurs existants, c’est-à-dire aux meilleurs emplacements

auxquels les trois opérateurs ont installé leurs antennes. Enfin, l’opérateur a également obtenu

des avantages en ce qui concerne la terminaison d’appels68

. Lorsqu’un abonné d’un opérateur

souhaite appeler ou envoyer un SMS à un abonné d’un autre opérateur, le premier opérateur

doit s’affranchir d’un droit de péage au second. Les montants de ces redevances étant

identiques pour tous, l’équation s’équilibre au final. Or, l’Arcep, du fait que Free possèderait

peu de clients au début, a décidé de créer une asymétrie des terminaisons d’appel afin de

rééquilibrer les charges que devraient supporter le nouvel opérateur69

.

Dans un souci de renforcement de la concurrence, l’Arcep a permis l’introduction

d’un nouvel acteur sur le marché, et ce en lui procurant des avantages concurrentiels pour

qu’il puisse bâtir un réseau de télécommunications viable. Cependant, il est légitime de se

demander si cette régulation du secteur n’a pas de conséquences néfastes pour l’économie.

(II) Des conséquences importantes sur l’économie

Nous avons vu que l’arrivée d’un quatrième opérateur sur le marché relevait d’une

décision réglementaire et politique dans la mesure où des avantages lui ont été accordés. Les

offres low-cost, sur lesquelles nous reviendrons dans une partie consacrée aux modèles de

croissance, ont immédiatement bénéficié de l’adhésion des consommateurs.

Bruno Deffains, Professeur d’économie à l’Université Paris II Panthéon-Assas70

, a

publié en 2012 une étude d’impact qui quantifie le choc au niveau de l’emploi interne des

67

Communiqué de presse d’Orange, « Free et Orange signent un accord d’itinérance pour la 2G et la 3G », 3

mars 2011 68

Tarif d’interconnexion facturé par un opérateur à ses concurrents à chaque fois qu’un de ses abonnés est

appelé par un client d’un autre réseau. 69

« L’Arcep propose une terminaison d’appel asymétrique en faveur de Free », www.freenews.fr, 14 décembre

2011 70

http://www.u-paris2.fr/1277109159778/0/fiche___annuaireksup/

Page 45: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

38

opérateurs, de l’emploi direct auprès des partenaires de premier rang (fournisseurs,

distributeurs et administration), ainsi que sur l’emploi induit sur la chaîne des partenaires. Il

en résulte selon lui que le secteur de la téléphonie mobile a généré en 2011 dans l’économie

française 25,8 milliards d’euros de valeur ajoutée, ce qui correspond à 345000 emplois

(24000 internes, 130000 directs et 191000 induits). Les trois quarts de ces emplois n’ont pas

été créés chez les opérateurs mais dans le reste de l’économie, notamment dans la distribution

et dans les services achetés par les opérateurs (centres d’appel, maintenance, etc), secteurs

enclins à subir plus brutalement les conséquences des modèles low-cost.

L’économiste explique son analyse dans un article publié dans Les Echos71

. Selon lui,

le chiffre d’affaires des télécommunications mobiles va baisser de 6,5 milliards d’euros (soit

une baisse de 30% sur deux ans), du fait des offres commerciales à prix cassés proposés par

Free. Il prévoit dans le même temps une forte réduction des dépenses et des marges des

opérateurs, ce qui entraînerait la destruction de 61600 emplois : 10600 chez les opérateurs,

35200 chez les partenaires directs et 15800 de manière indirecte. Néanmoins, cette perte

d’emplois serait en partie compensée selon l’expert par les créations d’emplois liées au

développement du nouvel opérateur, en portant la destruction nette à 55000.

Bruno Deffains explique également qu’il n’est pas évident que des créations d’emplois

se fassent par ailleurs, au vu de la conjoncture économique actuelle72

. Le pouvoir d’achat

libéré par la baisse des prix s’orienterait d’abord vers d’autres produits de l’offre en

télécommunications, comme les téléphones par exemple. En effet, les économistes parlent de

« biens systèmes » pour évoquer la hausse de la demande d’autres composantes du système en

cas de baisse des prix sur un des segments73

. Or, des biens tels que les téléphones mobiles, ne

sont pas produits en France, ce qui ne permettrait pas la création d’emplois.

Ainsi, moins de six mois après l’arrivée de Free sur le marché, les opérateurs de

télécommunications ont annoncé des suppressions de postes74

. Chez Bouygues Télécom, un

plan de départs volontaires concernant 556 salariés a été lancé. Dans le même temps, SFR a

annoncé un plan visant à supprimer un millier d’emplois, ainsi qu’un plan de réorganisation

prévoyant une réduction des coûts de 1 milliard d’euros entre 2012 et 2014. Ces réductions de

dépenses ont également un impact négatif sur les investissements qui seront cruciaux dans les

71

B. Deffains, « Free : quand l’idéologie de la concurrence dessert l’économie », Les Echos, 11 juin 2012 72

B. Deffains, D. Thesmar, « Le choix Free, un mal ou un bien pour l’emploi ? », Les Echos, 7 février 2013 73

B. Deffains, « Pourquoi Free Mobile met l’emploi en danger », Les Echos, 18 décembre 2012 74

G. de Calignon, « Les opérateurs engagent des suppressions de postes », Les Echos, 4 juillet 2012

Page 46: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

39

prochaines années pour le développement de nouvelles technologies comme la fibre optique

ou la 4G75

. Chez SFR par exemple, ils seront réduits de 150 à 200 millions d’euros.

A court terme, le nivellement des offres par le bas devrait avoir pour conséquence une

baisse du chiffre d’affaires du secteur et donc des destructions d’emplois et une baisse des

investissements, bien qu’à long terme un renforcement de la concurrence soit censé avoir des

conséquences positives. Nous allons désormais essayer de comprendre les grandes tendances

de la transformation du secteur à travers l’analyse de données économiques.

Section 2- Un secteur des télécommunications déstabilisé

(I) Au niveau de l’environnement

Analyse PESTEL du secteur des télécommunications (Sources : auteur et Xerfi)76

75

T. Breton, « Free menace l’innovation dans les télécoms », Le Monde, 22 juin 2012 76

En stratégie d’entreprise, l’analyse PESTEL permet d’étudier l’influence des facteurs environnementaux.

Secteur des

télécommunications

Politique

• Soutien pour le

déploiement du très haut

débit mobile et internet (+)

• Nombreuses taxes (-)

Légal

• Déréglementation au

niveau européen (+)

• Interventions de l’Arcep

dans les prix des

terminaisons d’appel (-)

Economique

• Crise économique,

chômage qui réduit la

propension des ménages à

consommer (-)

• Baisse des investissements

chez les opérateurs (-)

Ecologique

• Mouvements contre les

antennes relais (-)

Socioculturel

• Importance de la

communication, réseaux

sociaux (+)

• Taux d’équipement élevé

dans la téléphonie mobile

(-)

Technologique

• Succès des smartphones et

tablettes (+)

• Développement de la 4G

et de la fibre optique (+)

• Saturation du réseau (-)

Page 47: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

40

Cette analyse PESTEL permet d’analyser de manière globale l’environnement externe

qui a de l’influence sur le secteur des télécommunications. Ce modèle permet notamment de

comprendre quelles sont les menaces et les opportunités qui pèsent sur le secteur, ce qui est

indispensable pour l’élaboration de stratégies d’entreprise. En prenant en compte l’influence

de cet environnement ainsi que l’arrivée de Free sur le marché, il est possible d’étudier

l’évolution des caractéristiques du secteur.

Les dépenses des ménages en services de télécommunications, à la veille de l’arrivée

de Free sur le marché, se situaient à 25,53 milliards d’euros. Bien que ce chiffre marque une

légère baisse par rapport à l’année précédente (2010), il est 1,7 fois plus grand que celui de

2000.

De même, le nombre d’abonnements à la téléphonie mobile a connu une augmentation

croissante au cours des dix dernières années, passant de 17 millions en 2011 à 49 millions

début 2012.

Page 48: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

41

Malgré cette croissance du nombre d’abonnements souscrits, il est à souligner qu’en

2011 cette croissance tendait à diminuer, et ce depuis plusieurs années.

Ainsi, il est important de noter que des facteurs environnementaux pesaient déjà en

tant que menaces sur les opérateurs de télécommunications avant même l’entrée de Free sur le

marché, que ce soit au niveau des dépenses des consommateurs ou de la croissance des

abonnements. Le renforcement de la concurrence est donc intervenu dans un contexte

économique difficile pour les opérateurs de télécommunications.

Par ailleurs, ces dernières années ont coïncidé avec l’apparition dans l’environnement

des télécommunications d’acteurs « over-the-top77

» (OTT) que sont par exemple Apple,

Amazon, Facebook, Google et Microsoft. Principaux fournisseurs de contenus, leurs activités

surchargent les réseaux de manière exponentielle sans qu’ils financent le déploiement et la

maintenance des infrastructures78

: c’est le paradoxe du passager clandestin79

. Alors

qu’auparavant les opérateurs choisissaient les contenus disponibles pour leurs clients via des

portails, ils sont désormais obligés de suivre le rythme des innovations de ces entreprises

influentes au niveau mondial. Par exemple, un acteur qui refuserait de fournir un accès à

l’App Store d’Apple sur son réseau en subirait lourdement les conséquences sur le nombre de

souscriptions à des forfaits avec de l’internet mobile.

Outre les pressions concurrentielles sur l’environnement, il est important de noter que

la conjoncture est difficile depuis quelques années.

77

L’Over The Top est une position stratégique dans une chaîne de valeur. Elle consiste pour un acteur de l’OTT

à utiliser les structures existantes installées par un autre acteur pour fournir un service. 78

http://ceps-oing.org/Nos-actions/Les-publications/248 79

Mancur Olson, La logique de l’action collective, 1965

Page 49: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

42

(II) Au niveau de la conjoncture

En 2012, plus de 4,5 millions de carte SIM ont été vendues par les opérateurs, pour

atteindre un total de 73,1 millions au mois de décembre. En un an, Free a réussi à amasser 5,2

millions de clients80

, chamboulant la répartition des parts de marché des différents opérateurs.

Source : Le Monde

L’année 2012 a été marquée par des revenus en baisse dans le secteur des

télécommunications (-4,4%) à 49,8 milliards d’euros (hors chiffre location et vente de

terminaux et d’équipements81

) pour la vente de détails et l’intermédiation (services entre

opérateurs), l’arrivée de Free sur le marché ayant affecté le chiffre d’affaires par la baisse des

80

« Free a recruté 5,2 millions d’abonnés en 2012 », Lemonde.fr avec AFP, 28 février 2013 81

Données Xerfi

Page 50: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

43

tarifs. En effet, au cours des neuf premiers mois de l’année 2012, le chiffre d’affaires des trois

principaux opérateurs a diminué82

: -9% chez Bouygues Télécom, -6,9% chez SFR et -2,5%

chez Orange. La baisse des revenus générés par les opérateurs sur le marché de détail est

imputable à la hausse de la TVA (passée de 5,5% à 19,6%) et donc au durcissement de la

concurrence. En effet, les opérateurs ont choisi de ne pas répercuter cette hausse sur les prix

TTC des forfaits afin de rester attractifs face aux prix proposés par le nouvel entrant, ce qui

s’est mécaniquement traduit par un repli de leurs revenus hors taxes.

Ce décrochage des revenus n’est en outre pas compensé par les revenus liés au fixe, en

baisse de 3% en 2011. Ce secteur de la téléphonie fixe et de l’accès à internet est en effet

touché du fait de la diminution du nombre d’abonnements à la téléphonie fixe (en RTC) et de

ceux à l’internet bas débit, le marché du haut débit étant le seul à compenser ces baisses de

revenus (+4,1% à 10,2 Md€ en 2012). En ce qui concerne le marché intermédiaire, la chute

des revenus liés aux terminaisons d’appel (du fait d’un rapport asymétrique entre Free et les

autres opérateurs, comme nous l’avons expliqué précédemment) ne permet pas de relever les

ternes revenus tirés des autres sources rentables, le chiffre d’affaires des services

d’interconnexion ayant diminué de 5,7% en 2012. Orange, dont le revenu moyen par abonné a

baissé de 10% en 2012, craint un recul équivalent pour 201383

, ce qui n’appelle pas à

l’optimisme pour les bénéfices des opérateurs de télécommunications.

82

C. Lacombe, « Free a-t-il détruit des emplois ? », Le Point, 31 janvier – 6 février 2013 83

« France Télécom prévoit une baisse d’au moins 10% de l’Arpu en 2013 », Reuters, 20 février 2013

Page 51: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

44

Source : Le Figaro

Les opérateurs ont certes beaucoup moins bénéficié de l’augmentation du nombre

d’abonnements enregistré en 2012, mais ils n’ont pas nécessairement « perdu » des abonnés

stricto sensu84

. Fort de 27 millions d’abonnés en 2011, Orange a par exemple fini l’année

2012 avec 27,2 millions de clients, lorsque Bouygues Télécom en a perdu 100000 pour

redescendre à 11,2 millions. SFR a davantage souffert de l’arrivée de Free, avec une perte de

800000 abonnés, pour un total de 20,78 millions de clients mobiles. Les MVNOs quant à eux

possèdent 7,6 millions de clients.

Source : Le Monde

84

G. Pépin, « Free Mobile a chamboulé le paysage mobile, sans le révolutionner », Le Monde, 28 février 2013

Page 52: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

45

Nous avons vu dans ce chapitre comment Free avait pu pénétrer l’oligopole du

secteur français des télécommunications mobiles. Ce renforcement de la concurrence

orchestré par le régulateur des télécommunications a pu avoir lieu grâce à des avantages

accordés à ce nouvel entrant. Non sans conséquences sur l’économie, les majors français

pâtissent aujourd’hui de cette situation qui vient s’ajouter à un mouvement de baisse de la

croissance déjà initié depuis plusieurs années, comme nous l’a montrée l’analyse de

l’environnement et de la conjoncture.

La stratégie choisie par le nouvel entrant est celle des offres à bas coûts, ce qui tire

inexorablement l’ensemble des prix et des prestations traditionnelles à la baisse. Les

opérateurs mobiles, en panne de revenus, doivent donc définir de nouvelles stratégies qui leur

permettront de renouer avec la croissance et de contrer ce tout « low-cost ». C’est ce que

nous allons étudier dans ce chapitre 2.

Page 53: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

46

Chapitre 2- Le renouvellement des stratégies des

opérateurs de télécommunications

Nous allons nous efforcer dans cette partie de décrypter la stratégie mise en œuvre par

Free tout d’abord, pour comprendre quel est son intérêt à révolutionner ce marché, puis nous

verrons que les stratégies déployées par ses concurrents sont centrées sur l’innovation,

technologique d’une part, et commerciale d’autre part.

Section 1- Une stratégie de croissance basée sur le nivellement des

prix par le bas

(I) L’avènement du low-cost et de la chute des prix

Le 10 janvier 2012, Free est arrivé sur le marché en se positionnant sur le segment de

la simplicité puisque seulement deux offres ont été lancées, tandis que les trois autres

opérateurs en possédaient plusieurs centaines85

. La première, à 19,99€, offrait de la

téléphonie, des SMS et des MMS illimités et un quota de données de 3 Go. La seconde, à 2€,

offrait 1h d’appel et 60 SMS par mois. Ce système de forfaits « SIM only », sans engagement

et sans téléphone subventionné, rappelle les forfaits ADSL à moins de 30€ lancés par Free au

début des années 2000. Cette simplicité des offres constitue la stratégie de Free, car cela lui

évite par exemple d’avoir un système d’information lourd et coûteux, et l’opérateur peut se

permettre de communiquer sur un prix unique. Cette structure de coût légère, associée à un

service client minimal et à une distribution basée avant tout sur internet permet de garantir des

prix bas, le tout en partie financé par la trésorerie accumulée grâce à l’activité de fournisseur

d’accès à internet de Free, qui lui a permis de dégager en 2011 494 millions d’euros de

résultat d’exploitation.

Orange, SFR et Bouygues Télécom, bien que préparés à cette entrée agressive sur les

prix, se sont immédiatement lancés dans une « guerre des prix » afin de limiter la fuite de

leurs abonnés vers Free Mobile. Pour cela, ils ont mis en avant leurs propres offres « low

cost » à travers des marques comme Sosh (Orange), RED (SFR) ou B&You (Bouygues

85

« Low-cost : Free Mobile a dynamité le marché », Lesechos.fr, 18 février 2013

Page 54: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

47

Télécom). Cependant, alors que ces forfaits sont censés être vendus uniquement par internet,

force est de constater qu’ils contaminent petit à petit le reste de la gamme. Par exemple, les

vendeurs Orange en boutique font désormais la promotion des offres Sosh pour garder leurs

clients, car « il vaut toujours mieux promouvoir ces offres moins chères que de perdre un

client qui irait chez Free »86

.

Ainsi, nous observons qu’une diminution brutale du prix des forfaits classiques (avec

subvention de téléphone), de 30 à 40% en moyenne, a eu lieu. Orange a, au moins de juin

2013, inauguré ses premières offres « quadruple play » (fixe, mobile, internet, télévision) low-

cost, dans le sens où elles ne pourront être souscrites que sur Internet, avec un service client

virtuel87

. L’opérateur historique, grâce à sa marque Sosh, possède aujourd’hui 1,2 millions de

clients low-cost (sur un total de 27 millions). De même, les nouveaux abonnés à SFR ou

Bouygues Télécom signent pour ce type d’offres. En mars 2013, ces deux opérateurs

comptaient respectivement 1,3 million et 1,4 million de clients low-cost.

Source : Le Monde

Selon Delphine Ernotte-Cunci, directrice exécutive d’Orange, le marché « va passer à

50% de low-cost dans quelques années », alors que les opérateurs n’attribuaient à ce segment

que 15% du marché maximum avant l’arrivée de Free Mobile88

. Cependant, si les opérateurs

peuvent se lancer dans cette guerre des prix, cela est beaucoup plus difficile pour les MVNOs.

Ces derniers, qui louent des capacités de réseau à un des opérateurs « physiques », peuvent

86

Henri Tcheng, associé dans le cabinet de conseil BearingPoint 87

G. de Calignon, « Orange : une offre quadruple play chez Sosh », Les Echos, 29 mai 2013 88

C. Ducourtieux, « Téléphonie mobile : le marché bascule de plus en plus vers le low cost », Le Monde, 30 mai

2013

Page 55: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

48

difficilement suivre ce modèle économique, dans la mesure où le prix auquel ils louent le

réseau ne leur permet pas d’être rentable avec des offres low-cost. José Caballero, Directeur

Marketing de Budget Mobile, a en effet déclaré que « nous avons du diviser par deux notre

revenu par abonné, et nos marges pas trois ». De même, le patron d’un opérateur mobile

virtuel déclarait en décembre 2012 « on est dans un effet panique. Personne ne peut faire une

marge suffisante pour déployer des réseaux mobiles à ce prix-là »89

.

Face à la réaction de ses concurrents, Free Mobile a décidé d’enrichir davantage son

offre à 2€, la dotant de deux heures de communications et de SMS illimités. B&You, a en

effet sorti en novembre 2012 une offre à moins de 10€ avec appels et SMS illimités,

accentuant le nivellement des prix vers le bas90

. Pour rappel, à l’automne 2011, un forfait

Sosh comprenant deux heures de communications, SMS illimités et 500 Mo de données

internet valait 19,99€. Son prix a donc été divisé par dix en moins de deux ans.

Source : Le Point

Cette guerre des prix entre les opérateurs de télécommunications mobiles a fait de la

France le pays où les forfaits sont les moins chers au monde.

89

G. de Calignon, « La guerre des prix s’accélère dans le mobile », Les Echos, 7 décembre 2012 90

« Bouygues Télécom relance la guerre des prix dans le mobile », Lesechos.fr, 6 novembre 2012

Page 56: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

49

(II) Un modèle économique critiqué

En janvier 2013, l’association de consommateurs UFC-Que Choisir a déposé une

plainte à l’encontre de Free Mobile pour « pratiques commerciales trompeuses ». Alain

Bazot, président de l’association, a en effet déclaré que « le décalage entre le service promis

par Free et la réalité du service nous a proprement stupéfié ». Pour lui, « le low cost a toute

sa place à condition qu’il ne soit pas synonyme d’un service rendu au rabais »91

.

De nombreux consommateurs mettent en effet en avant la mauvaise qualité du réseau

de Free Mobile, ce qui a été prouvé par des tests réalisés sur le terrain par des entreprises

spécialisées. Dans un rapport intitulé « Rapport sur la couverture et la qualité des services

mobiles en France métropolitaine » publié par l’Arcep en novembre 2012, le régulateur

expose les résultats de ces tests92

. En ce qui concerne la navigation web, ses conclusions sont

les suivantes : « De fortes disparités existent entre opérateurs. Selon les indicateurs mesurés,

les performances d’Orange France et SFR sont « supérieures » ou « très supérieures » à

celles des valeurs moyennes, celles de Bouygues Telecom sont « voisines » ou « supérieures »

à celles des valeurs moyennes, tandis que celles de Free Mobile sont « très inférieures » aux

valeurs moyennes ». Il en est de même pour les services de diffusion en ligne : « Les

opérateurs ont des performances très variables. Les performances d’Orange France sont

systématiquement « très supérieures » aux valeurs moyennes. Celles de SFR sont, selon les

indicateurs, « voisines », « supérieures » ou « très supérieures » à celles des valeurs

moyennes. Celles de Bouygues Telecom sont « voisines » ou « inférieures » à celles des

valeurs moyennes. Enfin, les performances de Free Mobile sont toujours « très inférieures »

aux valeurs moyennes ».

Cette mauvaise qualité du réseau de Free Mobile pour l’accès à Internet semble, selon

les experts, liée à des interconnexions sous dimensionnées avec le réseau d’Orange93

. En effet

Free Mobile, qui paye des frais d’itinérance à l’opérateur historique, est accusé de limiter la

bande passante de ses usagers pour réduire ses coûts. Orange, soucieux que ses clients gardent

la même qualité de service qu’auparavant, avait même menacé Free au premier trimestre 2012

91

http://www.arcep.fr/index.php?id=11639&L=1 92

Partie III.3, page 123 93

G. de Calignon, « Free a pris du retard sur le déploiement de son réseau mobile », Les Echos, 14 janvier 2013

Page 57: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

50

de « suspendre le contrat entre les deux acteurs si les incidents sur le réseau de Free Mobile

devaient affecter la qualité de service d’Orange »94

.

Ce type de constat sur la qualité du réseau fourni par Free Mobile, éventuellement du à

des contraintes budgétaires, appelle à une réflexion sur le modèle économique développé par

Free pour proposer des offres low-cost.

En premier lieu, il semble important d’étudier plus en profondeur les avantages

accordés par l’Arcep à Free Mobile en ce qui concerne les terminaisons d’appel. Ces sommes

facturées par un opérateur à un autre sont, comme nous l’avons vu, asymétriques, afin de

rééquilibrer la balance entre les opérateurs déjà installés disposant d’un grand parc de clients

et le nouvel entrant, disposant de peu d’abonnés au départ. Pour l’année 2012, les

terminaisons d’appel vocal étaient facturées 2,4 cts/min par Free Mobile contre 1,5 cts/min

pour les opérateurs établis sur le premier semestre, puis 1,6 cts/min contre 1 ct/min sur le

second semestre95

. En ce qui concerne la terminaison d’appel SMS, ils étaient facturés par

Free Mobile 2,85 cts par SMS, soit 90% de plus qu’Orange, SFR et Bouygues qui facturaient

1,5 ct pour le premier semestre 2012, puis 1 ct pour le second, lorsque Free facturait 1,6 ct96

.

Face à ce constat, Stéphane Richard, PDG d’Orange, a déclaré le 1er

février 2012

devant la commission des affaires économiques de l’Assemblée Nationale que « compte-tenu

de l’usage moyen d’un utilisateur de téléphonie mobile, la proposition de Free revient à faire

financer par les autres opérateurs le forfait de 19,99 euros à hauteur de presque 10 euros.

C’est ce mécanisme de la terminaison d’appel qui permet à la société Free de formuler les

tarifs qu’elle offre ». De même, des experts du secteur affirment que ces terminaisons d’appel

représentent une part importante dans le modèle économique de Free97

. Selon Stéphane

Beyazian, analyste chez Raymond James Equities, « sur le forfait à 19,99 euros, on estime

l’Arpu98

à 22 euros, dont 4 à 5 euros de revenus entrants – environ 3 euros de SMS et 2 euros

d’appels. Or comme c’est de la marge pure, on peut considérer, sur la base d’une hypothèse

d’une marge brute de 80%, que cela finance près d’un tiers du business ». Ainsi, les

terminaisons d’appel sont rentables pour Free, en particulier en ce qui concerne le SMS, car

l’émission de ceux-ci exige souvent une réponse, ce qui n’est pas le cas pour les appels.

94

G. de Calignon, « Orange fait pression sur Free au nom de la qualité de service », Les Echos, 26 mars 2013 95

http://europa.eu/rapid/press-release_IP-12-368_fr.htm?locale=fr 96

http://www.clubic.com/telephone-portable/operateur-telephonie-mobile/actualite-503788-terminaison-appel-

arcep-reduit-avantage-free-mobile-full-mvno.html - Voir en Annexe 3 l’avis rendu par l’Arcep 97

D. Cuny, « Bruxelles menace le modèle économique de Free », La Tribune, 16 avril 2012 98

Revenu moyen par abonné.

Page 58: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

51

En second lieu, il convient de s’intéresser de manière plus approfondie à la différence

de tarifs entre les offres de Free mobile et celles des autres opérateurs. A première vue, Free a

radicalement réduit la facture des consommateurs. Cependant, beaucoup d’analystes ont

raisonné en coûts partiels et non en coûts complets. Alors que les opérateurs existants

proposaient des forfaits accompagnés d’un téléphone, le nouvel opérateur ne propose qu’un

forfait seul. Ainsi cela diminue fortement le différentiel tarifaire, car il faut intégrer le prix du

mobile, de même qu’un certain nombre de coûts que n’a pas à supporter Free, comme un

service client efficace ou encore un réseau devant couvrir l’ensemble du territoire français.

Afin de percevoir le véritable différentiel entre les offres « classiques » des opérateurs

existants et l’offre de Free Mobile, des comparatifs ont été effectués. Pour cela, des forfaits

équivalents chez Orange, SFR, Bouygues Télécom et Free Mobile ont été choisis, en y

incluant le prix du téléphone mobile99

, le tout reporté sur 24 mois (correspondant à la durée

d’engagement).

Certes, Free Mobile a fait baisser le prix des forfaits « tout illimité » des opérateurs

traditionnels. Mais le différentiel de prix affiché dans le cas d’un raisonnement en coûts

complets tend à se réduire considérablement, pour une qualité de service des opérateurs

traditionnels supérieure, comme nous l’avons montré précédemment.

Il n’en demeure pas moins que le modèle économique de Free qui a tiré l’ensemble

des prix du marché vers le bas handicape les autres opérateurs qui doivent assumer des coûts

fixes extrêmement élevés. Pour réussir à créer de nouveau de la valeur dans ce secteur, ils

s’efforcent d’innover, que ce soit dans la technologie ou les offres.

99

Samsung Galaxy S3, dont le prix est celui affiché par les opérateurs.

Page 59: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

52

Section 2- Des stratégies de croissance basées sur l’innovation

(I) Au niveau technologique

Le marché des télécommunications a, nous l’avons compris, considérablement changé

depuis l’arrivée du nouveau concurrent. Alors qu’auparavant le cœur des offres concernait la

durée d’appel, le tout illimité a remis en question ce modèle. Désormais, c’est l’internet

mobile qui permet de différencier les offres. Plus le volume de data augmente, plus la gamme

de forfait est importante, avec une bataille qui se joue désormais sur la vitesse de connexion.

Ainsi, les opérateurs traditionnels tentent, pour se différencier de Free Mobile, d’innover dans

les réseaux dans l’espoir de créer de la valeur, ce qui représente un enjeu crucial puisque leurs

investissements pourraient générer un point de PIB supplémentaire100

.

Le 28 novembre 2012, SFR était le premier opérateur à ouvrir un réseau 4G à Lyon101

.

Cette technologie, permettant d’offrir des débits deux à trois fois supérieurs à la 3G, a

commencé à être déployée depuis l’attribution des licences par l’Arcep fin 2011. Les

opérateurs se sont partagés les bandes de fréquences 2600 Mhz102

et 800 Mhz103

pour un

montant total de 3,5 milliards d’euros versés à l’Etat. Orange, SFR et Bouygues Télécom ont

obtenu l’essentiel des fréquences, contrairement à Free qui n’a pas pu investir autant que ses

concurrents, ce qui incite les trois autres à orienter leur stratégie vers le déploiement de cette

technologie. Free devra nécessairement, s’il souhaite proposer des offres 4G, louer les

infrastructures d’un autre opérateur.

Avant l’arrivée de Free sur le marché, l’innovation dans ce secteur était stimulée par

les terminaux, qui se sont considérablement transformés avec l’arrivée des smartphones104

.

Même si le taux d’équipement en terminaux nouvelle génération est en constante

augmentation, c’est le réseau qui permet aujourd’hui de créer de la valeur chez les opérateurs,

plus précisément celui de quatrième génération. En effet, le débit plus élevé permet d’accéder

à des contenus immédiatement (pages web, images en haute définition, visio-conférences).

100

Etude « L’économie des télécoms en France », Arthur D. Little, 2012 – Voir annexe 4 101

O. Chicheportiche, « SFR lance commercialement la 4G à Lyon. L’arme anti low-cost ? », Zdnet.fr, 29

novembre 2012 102

Décision n° 2011-1080, Arcep, 22 septembre 2011 103

Décision n° 2011-1510, Arcep, 22 décembre 2011 104

D. Barroux, « La 4G peut-elle sauver les opérateurs mobiles ? », Les Echos, 25 février 2013

Page 60: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

53

L’intérêt de cet investissement dans le réseau 4G pour les opérateurs traditionnels est

de sortir de la guerre des prix, que nous avons décrite précédemment. Grâce à cette

technologie les opérateurs pourront vendre des forfaits plus chers que ce que propose Free

aujourd’hui, car de qualité supérieure, et développer de nouveaux services qui généreront

également du chiffre d’affaires supplémentaire. Orange, SFR et Bouygues Télécom espèrent

donc, comme les opérateurs américains, augmenter leurs revenus grâce à la 4G. Néanmoins,

l’enjeu pour eux réside dans le fait de concilier la baisse de leurs chiffres d’affaires dans le

contexte d’un secteur plus concurrentiel avec les lourds investissements requis pour une

généralisation de ce réseau de quatrième génération au niveau national. Par exemple, SFR a

dépensé 1 milliard d’euros pour obtenir les fréquences 4G en 2011 et 1,6 milliard d’euros en

2012 dans le développement de ses infrastructures fixes et mobiles105

.

Si le prix des forfaits est aujourd’hui le même pour un accès 3G et un accès 4G106

, du

fait du peu de zones couvertes, l’ambition affichée par les opérateurs est bel et bien de tirer les

prix vers le haut. Delphine Emotte-Cunci, directrice exécutive d’Orange France, a déclaré

« que ce soit pour la fibre optique ou la 4G, les investissements consentis sont considérables.

Nous déboursons en ce moment 500 millions d'euros par an dans notre réseau mobile. Si les

tarifs ne suivent pas, ces investissements ne pourront tout simplement pas être tenus. Nous

prévoyons toujours d'augmenter nos tarifs de 5 à 10 euros par mois [par rapport à la 3G]

pour les forfaits 4G. Grâce à cette nouvelle norme, on va sortir par le haut de la guerre des

prix ».

La stratégie qui semble se dessiner est donc une sortie de la guerre des prix par le haut

grâce au développement de la 4G. Les opérateurs traditionnels pensent en effet que c’est en

misant sur la qualité du réseau qu’ils pourront se différencier de Free107

. De plus, le

développement de cette technologie est indispensable pour les opérateurs, selon les analystes

d’Exane BNP Paribas et les consultants du cabinet Arthur D. Little, qui ont publié une étude

prospective sur le secteur européen des télécommunications108

. Ils estiment que les revenus

data s’élèveront à 12 euros en moyenne par utilisateur et par mois, contre 10 euros

aujourd’hui. Elle permettra également aux opérateurs de gagner en efficacité, et sera donc

plus rentable. Selon les experts, « pour une même quantité de fréquences, la 4G permet

105

Etude entreprise « Vivendi », Xerfi 700, Juillet 2013 106

C. Ducourtieux, « La 4G ne met pas fin à la guerre des prix », Le Monde, 29 janvier 2013 107

G. de Calignon, « Pour contrer Free, SFR accélère dans la 4G », Les Echos, 25 septembre 2012 108

G. de Calignon, « La 4G pourrait ne pas être la bouée de sauvetage espérée », Les Echos, 13 mars 2013

Page 61: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

54

d'acheminer un trafic de 70 % supérieur à celui de la dernière version de la 3G », ce qui

présentera l’avantage de baisser les coûts d’acheminement de l’internet mobile.

Une autre technologie, la fibre optique, ne concerne pas le mobile mais touche les

opérateurs en tant que fournisseurs d’accès à internet. Celle-ci, dont le déploiement est

activement soutenu par l’Etat dans le cadre du « Programme national très haut débit109

»,

permet l’accès à internet à très grande vitesse. En 2011, France Télécom et SFR ont décidé de

signer un partenariat pour l’installation des infrastructures nécessaires dans les zones à faible

densité de population, afin d’effectuer des économies d’échelle en évitant un dédoublement

des infrastructures. En 2012, c’est Bouygues Télécom qui signait un accord du même type

avec l’opérateur historique, pour mutualiser leurs réseaux en dehors des zones très denses.

Pour France Télécom par exemple, l’investissement dans la fibre optique à l’horizon 2015 se

chiffre à 2 milliards d’euros pour un déploiement dans 220 agglomérations110

.

Positionnement des technologies de télécommunications en France sur la courbe du cycle de vie

Nous l’avons vu, les opérateurs investissent lourdement dans des technologies de

pointe comme la 4G pour les réseaux mobiles afin de se différencier de Free Mobile qui n’a

109

La France s’est dotée en juin 2010 de ce programme destiné à assurer la couverture numérique de l’ensemble

du territoire en 2025. La feuille de route présentée par le Gouvernement prévoit que la moitié des Français ait

accès au très haut débit d’ici à 2017 et l’ensemble des foyers d’ici à 2022. 110

Source : France Télécom

Page 62: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

55

pas encore déployé son propre réseau 3G, dans l’optique de faire remonter les prix de leurs

services. Ce bond en avant technologique s’accompagne en parallèle au niveau commercial

d’innovations dans les offres.

(II) Au niveau commercial

Les opérateurs de télécommunications traditionnels ont été contraints de lancer de

nouvelles offres pour faire face à la politique de Free Mobile, agressive en matière de prix.

Ces nouvelles offres visent à segmenter les forfaits en deux catégories : les low cost d’une

part, pour concurrencer Free sur leurs forfaits positionnés sur de l’entrée de gamme, et les

forfaits dotés d’une qualité de service supérieure, avec notamment un terminal mobile

subventionné.

Alors qu’auparavant, nous l’avons vu, la durée d’appel permettait de segmenter les

offres, ce n’est plus le cas aujourd’hui avec l’avènement des offres « tout illimité » à bas

coûts. Ce qui semble se dessiner chez les opérateurs est une montée en gamme progressive en

fonction du volume de data disponible. Ces offres « premium » donnent également accès à la

4G, ce qui permet une différenciation par la vitesse de connexion. Souvent accompagnées

d’un subventionnement du mobile, elles sont intéressantes pour les opérateurs dans le sens où

elles permettent d’attirer des clients et garantissent un revenu régulier111

. Associées à un

réseau de boutiques conséquent, les opérateurs misent dessus pour se démarquer du nouvel

entrant.

Par exemple, SFR s’est lancé dans une refonte de ses offres qui s’appuient sur la

subvention du mobile, en les simplifiant. L’opérateur propose désormais sept forfaits

seulement, dont cinq d’entre eux contiennent appels et SMS illimités112

, avec un accès

internet s’étalant de 500 Mo à 6 Go. De plus, l’opérateur propose à ses abonnés deux cartes

SIM, ce qui lui permet de pénétrer en même temps le marché des tablettes. Le forfait le plus

haut de gamme offre quant à lui des heures d’appel depuis l’étranger, ainsi qu’un volume de

data réservé à l’usage international113

. Selon le forfait choisi, le client bénéficiera également

d’un service client différencié, en disposant du statut « silver », « gold » ou « platine », et

pourra par exemple avoir accès à une aide informatique personnalisée.

111

R. Potocki, « Quelles perspectives pour le marché français du mobile ? », Telcospinner-solucom.fr, 27 mars

2013 112

http://www.sfr.fr/mobile/offres/toutes-les-offres-sfr?vue=000029 113

Forfait « Carré Voyageur » - Voir Annexe 5

Page 63: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

56

Ainsi, SFR propose des forfaits « haut de gamme » avec subvention, en moyenne 20

euros plus chers que des offres low-cost, mais disposant de services à valeur ajoutée comme

la 4G. Il introduit également le principe de la carte de fidélité avec ses différents niveaux de

service client114

. De l’autre côté de la chaîne, l’opérateur concurrence directement Free avec

ses forfaits RED, sans valeur ajoutée et à des prix alignés sur ceux de Free. La stratégie

affichée est bien de prendre des clients à Free en affichant une qualité de réseau supérieure, et

de conserver un maximum d’abonnés sur des forfaits avec subventionnement du terminal

mobile, plus rentable.

Par ailleurs, les opérateurs traditionnels tentent de proposer à leurs clients de nouveaux

services autour des télécommunications, à l’image de SFR qui s’est lancé en juin 2012 sur le

marché de la télésurveillance avec « Home by SFR », un système d’alarme connecté qui

permet à l’utilisateur d’être immédiatement alerté sur son mobile en cas de problème à son

domicile et de vérifier en temps réel ce qu’il s’y passe grâce à une caméra panoramique. Le

système, disponible sous forme d’abonnement, permet en cas de besoin pour le client de

demander 24h/24 l’intervention sur place d’un agent de sécurité.

114

C. Ducourtieux, « Mobiles : après l’offensive de Free, SFR mise sur le haut de gamme », Le Monde, 24

septembre 2012

Page 64: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

57

Conclusion

Est-ce que les opérateurs français de télécommunications auront toujours les moyens

d’investir dans des infrastructures aux coûts extrêmement élevés ? Pourront-ils innover de la

même manière dont ils l’ont fait depuis 25 ans ? Les clients bénéficieront-ils toujours de la

qualité d’un réseau performant sur le long terme ? Les nouvelles offres proposées par les

opérateurs donnent-elles réellement un gain de pouvoir d’achat aux consommateurs ?

Ces questions que nous avons soulevées lors de l’introduction de ce mémoire

constituent le socle de notre réflexion sur le secteur français des télécommunications. Oui, les

clients des opérateurs traditionnels bénéficieront d’une bonne qualité de réseau, comme le

montrent les dernières études commandées par l’ARCEP, tandis que le réseau du nouvel

entrant est encore trop jeune pour le qualifier de « performant ». Les investissements déployés

par les acteurs de ce secteur, notamment dans la 4G et la fibre optique, tendent à prouver que

la qualité du réseau est une priorité pour eux, dans le sens où elle constitue une manière de se

différencier de leur nouveau concurrent. Cependant, pour qu’ils puissent continuer à innover

sur le long terme, ils doivent utiliser leur avance technologique pour sortir par le haut de la

guerre des prix via de nouvelles offres et ainsi retrouver le chemin de la croissance. En effet,

face à la stratégie de Free Mobile basée sur le low-cost, l’enjeu n’est plus de l’imiter mais de

se différencier. Certes, cette baisse des prix a redonné un certain pouvoir d’achat aux

consommateurs, mais aux dépends de la qualité du réseau et du système de terminaux mobiles

subventionnés, qui, vendus seuls, alourdissent la facture.

Ainsi, l’oligopole constitué par Orange, SFR et Bouygues Télécom s’est largement

ouvert à la concurrence dans la dernière décennie, avec tout d’abord l’apparition des MVNOs

qui captent aujourd’hui un dixième du marché, puis Free qui a conquis plusieurs millions de

Page 65: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

58

clients en moins de deux ans. Néanmoins, cette concurrence est profondément régulée par une

institution qu’est l’ARCEP, qui a offert au nouvel entrant des avantages non négligeables

dans la conquête de nouveaux clients, au point d’être rappelé à l’ordre par la Commission

européenne, notamment sur les tarifs d’interconnexions. Dans un contexte économique de

croissance atone, le gouvernement lui-même appelle à la vigilance dans ce secteur qui

pourrait être porteur dans les prochaines années.

Bien que l’arrivée de Free sur le marché rende les analyses à long terme difficile, des

grandes tendances se dégagent. Une première hypothèse serait un rééquilibrage des marchés

avec des acteurs indépendants qui accepteraient des marges plus faibles, à l’image du secteur

des télécommunications américain, allemand ou anglais qui sont structurés autour de quatre

grands opérateurs. La seconde hypothèse est une concentration du marché, du fait de la

stabilité qui existait lorsqu’il n’y avait que trois concurrents. La presse économique a

beaucoup parlé ces derniers mois de rapprochements entre des poids lourds du secteur : SFR

et Numericable, ou bien Bouygues Télécom et Free Mobile en sont des exemples. On peut

légitimement penser que de telles opérations de fusion ne seront jamais acceptées par le

régulateur des télécommunications, puisque celui-ci vient de faciliter la création d’un

quatrième concurrent. La troisième hypothèse, sûrement la plus probable, est celle d’une

mutualisation des réseaux. Alors que des accords ont été passés entre Orange et les autres

opérateurs pour le déploiement de la fibre optique dans les zones les moins denses du

territoire, cette mutualisation des investissements pourrait également se généraliser dans le

mobile, avec comme modèle celui du partage des coûts, ceux-ci étant intrinsèquement très

élevés du fait que les télécommunications sont des métiers à coûts fixes. Cette solution,

adoptée par Telefonica et Vodafone en Grande-Bretagne, permettrait aux opérateurs

d’économiser 20% d’investissements et 7% de frais de fonctionnements115

, ce qui n’est pas

négligeable à l’heure où les opérateurs français développent des plans de réduction des coûts.

Si cette hypothèse était validée dans les prochaines années, la concurrence ne se jouerait

cependant plus sur les infrastructures.

A l’heure actuelle, les grands enjeux qui animent la téléphonie mobile concernent la

4G, en plein déploiement au niveau national. Si SFR, puis Orange, ont été les premiers à

proposer cette nouvelle technologie à leurs clients, dans certaines zones seulement, Bouygues

Télécom a obtenu l’autorisation de l’ARCEP d’utiliser les bandes de fréquence 1800 Mhz

115

G. de Calignon et S. Godeluck, « Télécoms : le casse-tête de la consolidation à venir », Les Echos, 6

décembre 2012

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59

pour cette nouvelle technologie, ce qui devrait lui permettre dès le mois d’octobre 2013 de

proposer ce service sur tout le territoire. Il faudra néanmoins quelques mois supplémentaires

pour voir si ce développement donne aux opérateurs traditionnels un avantage sur Free

Mobile, qui maintient pour le moment ses offres low-cost et continue de gagner des parts de

marché.

Outre la 4G et la fibre optique, les opérateurs sont à la recherche de technologies qui

vont pouvoir les différencier techniquement. Bien que nous n’ayons pas approfondi ces

questions dans ce mémoire, elles ont devenir récurrentes dans les prochaines années. Il s’agit

notamment de la NFC pour le paiement sans contact, le paiement sur mobile, le cloud

computing ou encore les services d’e-santé. Les opérateurs investissement en effet dans des

laboratoires de R&D, comme le montre l’exemple des Orange Labs chez l’opérateur

historique.

L’évolution de ce secteur est donc incertaine pour le moment, mais les stratégies mises

en œuvre pour le moment par les opérateurs ainsi que les possibilités économiques qui

s’offrent à eux devraient leur permettre de résister face à ce nouveau concurrent. Cette

situation, à défaut de susciter l’espoir dans un contexte morose, présente l’intérêt d’être un cas

très intéressant à étudier du point de vue des relations entre les acteurs et les institutions

économiques.

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60

ANNEXES

Annexe 1 : Principales sociétés du secteur, dans Etude « Télécommunications », Xerfi

700, Juillet 2012

Annexe 2 : Matrice SWOT de l’entreprise France Télécom, dans Etude « France

Télécom », Xerfi 700, Octobre 2012

Annexe 3 : ARCEP, Modélisation des coûts de terminaison d'appel SMS d'un

opérateur mobile nouvel entrant, Octobre 2012

Annexe 4 : L’économie des télécoms en France, Etude pour la Fédération Française

des Télécoms, Arthur D. Little, Novembre 2012

Annexe 5 : Les forfaits avec subvention de SFR, Août 2013

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61

Annexe 1 – Principales sociétés du secteur

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Annexe 2 – Analyse SWOT de France Télécom

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64

Annexe 3 - Modélisation des coûts de terminaison d appel SMS d un opérateur mobile nouvel

entrant

© Autorité de régulation des communications électroniques et des postes 1

Octobre 2012

ISSN : 2258-3106

Modélisation d

e

s coûts de terminaison d’appel SMS d’un opérateur mobile nouvel entrant

Synthèse des réponses à la consultation publique

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Annexe 4 – L’économie des télécoms en France

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73

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74

Novembre 2012

h. Les opérateurs télécoms ont injecté 204 Mds€ dans l’économie française entre 2006 et 2011

11%

19%

10%

37%

23%

Emploi direct et indirect

Les opérateurs télécoms ont versé

76 Mds€ en charges salariales

directes et indirectes(1)

Autres fournisseurs

/ sous-traitants

Les opérateurs ont versé

46 Mds€ d’autres charges

(marketing, commissions de

distribution…) à leurs fournisseurs

Etat

Les opérateurs ont versé

23 Mds€ à l’Etat en taxes (hors

TVA), impôts, licences et dividendes

Equipement du territoire en

réseaux

Les opérateurs ont investi

39 Mds€ dans le déploiement,

l’upgrade et l’entretien des

réseaux télécoms

Actionnaires privés

Les opérateurs ont versé

20 Mds€ à leurs actionnaires

privés

Notes : (1) Incluant salaires et charges; (2) CA déclaré en France ou paru dans la presse, pour Apple estimation basée sur les ventes annoncées en France; (3) Données redressées

pour prendre en compte le CA effectif estimé des acteurs internationaux en France; (4) Impôt sur les sociétés et impôts, taxes et versements assimilés (hors TVA), licences

et fiscalité spécifique;; (5) Hors licences des opérateurs;; si donnée France non disponible estimation au pro rata de l’emploi en France; (6) conclusion d’une étude Ericsson

portant sur les pays de l’OCDE;; (7) selon une étude Capital Economics réalisée sur le marché britannique, investir ~5Mds€ dans la 4G permet de créer 0,37 points de PIB

Sources : h) ARCEP, Diane, opérateurs; i) Diane, opérateurs; a) opérateurs; b) Capital Economics, étude Ericsson / Arthur D. Little; analyse Arthur D. Little

i. Revenus, emplois, impôts-taxes et investissements 2011 en France de 5 acteurs

de chaque catégorie

2. Les télécoms sont les principaux moteurs du développement des filières

numériques de communication

b. Impact des investissements très haut débit sur le PIB en France

a. Initiatives des opérateurs télécoms français dans les filières

numériques de communication d’ av enir

Investissements d’avenir:

75M€ Investissements d’avenir:

75M€

Partenariats stratégiques

~6,2 Mds€ d’investissement

dans la 4G

(hors licences)

+0,46 point

de PIB(7)

~20 à 30 Mds€ d’investissement

dans la fibre

+0,75 point

de PIB(6)

Exemple du Cloud Computing

Revenus(2)(3) : 68 Mds€ Impôts, taxes et

licences(4): 7,1Mds€

Emplois directs :

167 000

Investissements(5) :

7,6Mds€

8%

14%

11%

3% 64%

5 opérateurs télécoms

2% 13%

1% 7%

77%

1% 10%

1%

1%

88%

1% 4%

2%

1%

92%

5 équipementiers réseaux 5 fabricants de terminaux 5 fournisseurs de contenus 5 acteurs internet OTT

2

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75

3. La performance des opérateurs télécoms se dégrade sous l’effet de fortes

pressions

Novembre 2012

Notes : (1) Appels illimités (min. 500 minutes), SMS/MMS illimités (min.1000 SMS,) Internet 1, 2 ou 3 Go; avec fonction modem quand disponible, offres sans mobile, offres sans

engagement quand disponible; opérateurs dont la part de marché > 15%; (2) Appels nationaux illimités (min. 3000 minutes), internet haut débit avec téléchargement illimité

y compris pour usage intensif quand disponible, TV; hors câblo-opérateurs; (3) IFER : taxe sur les infrastructures de réseau, (4) TST : Taxe sur les services de télévision,

affectée au COSIP (compte de Soutien à l’Industrie des Programmes Audiovisuels; (5) groupe fiscal France; (6) top 30 acteurs selon le CA 2011 dans chaque catégorie; (7)

affectation des acteurs par région selon la nationalité de leur siège social

Sources : a) ARCEP b) opérateurs; c) FFT; d) Upnext Research, Diane; e) Diane, presse; f) Thomson Reuters; analyse Arthur D. Little

b. Impact de la concurrence sur les prix des

services télécoms

c. Fiscalité spécifique aux opérateurs télécoms en France en 2011

a. Impact de la réglementation sur les revenus des opérateurs mobiles en France

2011

-4,9

-0,9

-4,0

2010

-3,8

-0,8

-3,0

2009

-3,0

-0,6

-2,3

2008

-1,9

-0,6

-1,3

2007

-1,1 -0,3

-0,8

Impact de la baisse des tarifs de roaming

Impact de la baisse des prix des terminaisons d’appel

Total 2007-2011 : ~14,7 Mds€

En Mds€

Prix d’une offre mobile comparable(1), en € TTC par mois, octobre 2012

7867

50423820

Prix d’une offre fixe comparable(2), en € TTC par mois, octobre 2012

775648434032

0,38%

5,78%

(5)

f. Evolution des revenus du top 30 des acteurs de chaque catégorie(6)

de l’écosystème numérique selon le ur nationalité(7)

Amérique du Nord

Amérique du Sud

Asie

Oceanie

2011

3 333

635

1 155

70

1 446

27

2010

3 067

643

1 025

66

1 312

21

2009

2 820

652

937

45

1 165

21

2008

2 817

686

954

37

1 117

24

2007

2 619

Europe

893

42

968

20

2006

696 594

762

32

837

17

2 243

En milliards de dollars Croissance 2006-2011

+118%

+7%

+73%

+51%

+58%

Amérique du Sud

Europe

dont –9%

depuis 2007

Océanie

Asie

Amérique du

Nord

e. Impôts sur les sociétés

en France

2011, en % du CA

d. Taux de fiscalité spécifique

au secteur des

télécommunications

253

127

Copie privée, VOD

TST / COSIP(4)

«Taxe Télécom »

IFER antennes(3)

IFER cuivre

1 211

41 150

235

405

Redevances de

gestion (fréquences)

Financement

Régions

Fin de la publicité

sur France TV

Départements,

communes

Sur-fiscalité totale : 1,2 Mds€ / an

En M€

0,06% 0,12%

0,81%

1,79% 1,95%

2,79%

Cinéma, ayant-droits

Etat

Cinéma (CNC) et TV

En % du CA 2010

Les opérateurs télécoms subissent une dissymétrie fiscale qui les pénalise vis-

à-vis des autres acteurs globaux

En Europe, les revenus de l’écosystème numérique de communication stagnent,

contrairement à l’Asie et l’Amérique du Nord

3

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77

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78

Annexe 5 – Forfaits SFR

Page 86: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

79

BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES

J. von Neumann, O. Morgenstern, Theory of Games and Economic Behavior, 1944

M. Olson, La logique de l’action collective, 1965

G. Johnson, K. Scholes, R. Whittington, F. Frery, Stratégique, 8e édition, Pearson

Education, 2008

P.-Y. Badillo, D. Roux, Les 100 mots des télécommunications, Que sais-je ?, P.U.F.,

2009

ARTICLES

Communiqué de presse d’Orange, « Free et Orange signent un accord d’itinérance

pour la 2G et la 3G », 3 mars 2011

S. Godeluck, « Numericable reste le leader du très haut débit en France avec 500.000

clients », Les Echos, 13 avril 2012

« Stratégie numérique: la Commission met en question la proposition de l'autorité

réglementaire française d'appliquer des tarifs de gros plus élevés à Free Mobile,

Lycamobile et Oméa Télécom; elle ouvre une enquête », Communiqué de presse de la

Commission européenne, 13 avril 2013

D. Cuny, « Bruxelles menace le modèle économique de Free », La Tribune, 16 avril

2012

B. Deffains, « Free : quand l’idéologie de la concurrence dessert l’économie », Les

Echos, 11 juin 2012

T. Breton, « Free menace l’innovation dans les télécoms », Le Monde, 22 juin 2012

G. de Calignon, « Les opérateurs engagent des suppressions de postes », Les Echos, 4

juillet 2012

C. Ducourtieux, « Mobiles : après l’offensive de Free, SFR mise sur le haut de gamme

», Le Monde, 24 septembre 2012

G. de Calignon, « Pour contrer Free, SFR accélère dans la 4G », Les Echos, 25

septembre 2012

« Bouygues Télécom relance la guerre des prix dans le mobile », Lesechos.fr, 6

novembre 2012

O. Chicheportiche, « SFR lance commercialement la 4G à Lyon. L’arme anti low-cost

? », Zdnet.fr, 29 novembre 2012

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G. de Calignon et S. Godeluck, « Télécoms : le casse-tête de la consolidation à venir

», Les Echos, 6 décembre 2012

G. de Calignon, « La guerre des prix s’accélère dans le mobile », Les Echos, 7

décembre 2012

B. Deffains, « Pourquoi Free Mobile met l’emploi en danger », Les Echos, 18

décembre 2012

C. Lacombe, « Free a-t-il détruit des emplois ? », Le Point, 31 janvier – 6 février 2013

B. Deffains, D. Thesmar, « Le choix Free, un mal ou un bien pour l’emploi ? », Les

Echos, 7 février 2013

G. de Calignon, « Free a pris du retard sur le déploiement de son réseau mobile », Les

Echos, 14 janvier 2013

C. Ducourtieux, « La 4G ne met pas fin à la guerre des prix », Le Monde, 29 janvier

2013

« Low-cost : Free Mobile a dynamité le marché », Lesechos.fr, 18 février 2013

« France Télécom prévoit une baisse d’au moins 10% de l’Arpu en 2013 », Reuters,

20 février 2013

D. Barroux, « La 4G peut-elle sauver les opérateurs mobiles ? », Les Echos, 25 février

2013

« Free a recruté 5,2 millions d’abonnés en 2012 », Lemonde.fr avec AFP, 28 février

2013

G. Pépin, « Free Mobile a chamboulé le paysage mobile, sans le révolutionner », Le

Monde, 28 février 2013

A. Montebourg et F. Pellerin, « Enfin une politique industrielle pour les télécoms »,

Le Figaro, 13 mars 2013

G. de Calignon, « La 4G pourrait ne pas être la bouée de sauvetage espérée », Les

Echos, 13 mars 2013

G. de Calignon, « Orange fait pression sur Free au nom de la qualité de service », Les

Echos, 26 mars 2013

R. Potocki, « Quelles perspectives pour le marché français du mobile ? »,

Telcospinner-solucom.fr, 27 mars 2013

« Mobile : le volume de données échangées a augmenté de 70% en 2012 »,

L’Expansion, 4 avril 2013

G. de Calignon, « Orange : une offre quadruple play chez Sosh », Les Echos, 29 mai

2013

Page 88: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

81

C. Ducourtieux, « Téléphonie mobile : le marché bascule de plus en plus vers le low

cost », Le Monde, 30 mai 2013

TRAVAUX UNIVERSITAIRES

B. Deffains, Rapport sur l’impact de Free en termes d’emplois, 2012

J. Vicente, Cours de microéconomie, ch. « Les externalités de réseaux », IEP de

Toulouse, 1e année

J. Vicente, Cours de théorie économique des institutions, ch. « Asymétries

d’informations et théorie de l’agence », IEP de Toulouse, 4e année

TEXTES LEGISLATIFS

Commission européenne, Directive 88/301/CEE, 16 mai 1988

Assemblée Nationale, Loi n° 96-659 sur la réglementation des télécommunications, 26

juillet 1996

Arcep, Décision n° 00-0835, 28 juillet 2000

Parlement européen, Directive 2002/22/CE, 7 mars 2002

Assemblée Nationale, Loi n° 2003-1365, 31 décembre 2003

Arcep, Décision n° 2009-0610, 16 juillet 2009

Arcep, Décision n° 2009-1067, 17 décembre 2009

Arcep, Décision n° 2011-1080, 22 septembre 2011

Arcep, Décision n° 2011-1510, 22 décembre 2011

ETUDES

CSA, « Les opérateurs télécom, nouveaux acteurs du secteur audiovisuel », La lettre

du CSA n° 217 – Juin 2008, 30 juin 2008

Xerfi 700, « Bouygues », Mai 2012

Xerfi 700, « Télécommunications », Juillet 2012

Xerfi 700, « France Télécom », Octobre 2012

Arthur D. Little, « L’économie des télécoms en France », Novembre 2012

Xerfi 700, « Vivendi », Juillet 2013

RAPPORTS

Iliad, Document de référence, 2012

Page 89: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

82

Arcep, Rapport sur la couverture et la qualité des services mobiles en France

métropolitaine, Arcep, Novembre 2012, Partie III.3, P. 123

SITES VISITES

Site internet de l’Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des

Postes : www.arcep.fr

Site internet de l’Agence Nationale des Fréquences : www.anfr.fr

Site internet du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel : www.csa.fr

Site internet de la Fédération Française des télécoms : www.fftelecoms.org

Site internet de l’Union Internationale des télécommunications : www.itu.int/fr

Site internet de l’INSEE : www.insee.fr

Sites internet de la presse généraliste et économique :

o www.lemonde.fr

o www.lefigaro.fr

o www.lesechos.fr

o www.lexpansion.fr

o www.latribune.fr

Sites internet spécialisés dans les nouvelles technologies :

o www.journaldunet.com

o www.01net.com

o www.clubic.com

Sites internet des opérateurs de télécommunications :

o www.orange.com

o www.sfr.fr

o www.bouyguestelecom.fr

o www.free.fr

Blog des consultants en télécommunications du cabinet de conseil Solucom :

telcospinner-solucom.fr

Site internet des sciences économiques et sociales : www.melchior.fr

Page 90: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

83

TABLE DES MATIERES

Introduction ............................................................................................................................... p.1

Première partie – La structure du secteur très rentable des télécommunications en

France ........................................................................................................................................ p.7

Chapitre 1 – Du monopole à l’oligopole ............................................................................. p.8

Section 1 – L’évolution du cadre réglementaire : entre libéralisation et

régulation .............................................................................................................. p.8

(I) La libéralisation du secteur ............................................................ p.8

(II) La multiplication des acteurs institutionnels ................................ p.11

Section 2 – L’essor du marché depuis la fin des années 1980 ............................. p.14

(I) Des technologies sans cesse renouvelées ....................................... p.14

(II) L’évolution des services proposés ................................................ p.18

Chapitre 2 – Un secteur majeur de l’économie française .................................................... p.21

Section 1 – La composition du tissu économique, entre éclatement des acteurs

et concentration des métiers ................................................................................. p.21

(I) Evolution et caractéristiques structurelles : maille économique

éclatée et convergence ......................................................................... p.21

(II) Les forces en présence : des opérateurs possédant des réseaux

physiques et des acteurs secondaires ................................................... p.25

Section 2 – Des segments de croissance à bout de souffle ................................... p.29

(I) La voix, pilier de la croissance du secteur ..................................... p.29

(II) L’explosion de l’accès à internet .................................................. p.31

Page 91: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

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Deuxième partie – L’arrivée d’un nouvel entrant sur le marché, un bouleversement

majeur pour le secteur .............................................................................................................. p.34

Chapitre 1 – La modification du paysage des télécommunications en France ................... p.35

Section 1 – L’introduction de Free sur le marché ................................................ p.35

(I) L’arrivée de Free : conditions et modalités .................................... p.35

(II) Des conséquences importantes sur l’économie ............................ p.37

Section 2 – Un secteur des télécommunications déstabilisé ................................ p.39

(I) Au niveau de l’environnement ....................................................... p.39

(II) Au niveau de la conjoncture ......................................................... p.42

Chapitre 2 – Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications ...... p.46

Section 1 – Une stratégie de croissance basée sur le nivellement des prix par le

bas ......................................................................................................................... p.46

(I) L’avènement du low-cost et de la chute des prix ........................... p.46

(II) Un modèle économique critiqué ................................................... p.49

Section 2 – Des stratégies de croissance basées sur l’innovation ........................ p.52

(I) Au niveau technologique ................................................................ p.52

(II) Au niveau commercial .................................................................. p.55

Conclusion .................................................................................................................................. p.57

Annexes ...................................................................................................................................... p.60

Page 92: Mémoire Antoine Laforest - Le renouvellement des stratégies des opérateurs de télécommunications français face à l’arrivée d’un nouveau concurrent sur un marché oligopolistique

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RESUME

Ce mémoire de recherche s’inscrit dans un contexte de transformation d’un secteur

majeur de l’économie française.

Les télécommunications ont largement évolué dans les dernières décennies. D’un

monopole détenu par l’Etat, nous sommes passés à une libéralisation de cette activité qui

constitue aujourd’hui un oligopole doté de quatre acteurs principaux. Le développement des

technologies et des services a permis aux entreprises du secteur de s’appuyer sur des segments

de croissance solides pendant de nombreuses années. Cependant, le renforcement de la

concurrence initié dans les années 2000 qui a vu l’arrivée d’un nouvel entrant sur le marché

en 2012 a bouleversé l’économie du secteur, et oblige les opérateurs à redéfinir leurs

stratégies.

Le mémoire présenté ici expose le fait que l’introduction d’un nouveau concurrent

arrive dans un contexte difficile, et que cette concurrence artificielle met en péril la croissance

des opérateurs. Il analyse les changements actuels et fait part des nouvelles orientations

stratégiques adoptées par ces entreprises. Une stratégie à deux niveaux semble être mise en

place par les opérateurs de télécommunications traditionnels pour se différencier de Free : sur

le plan technique tout d’abord, avec de lourds investissements effectués dans des technologies

innovantes comme la 4G ou la fibre optique, puis sur le plan commercial avec un alignement

des offres entrée de gamme sur celles du nouvel entrant, mais également une montée en

gamme via des forfaits possédant une qualité de service supérieure.

Mots-clés : Télécommunications, Stratégie, Concurrence, Réseaux, Mobile