Méthodologie d’investigation des expéditions polaires

Méthodologie Méthodologie d’investigation des d’investigation des expéditions polairesexpéditions polaires

La question de l’organizingLa question de l’organizing

Géraldine Rix-Lièvre*, Pascal Lièvre** Géraldine Rix-Lièvre*, Pascal Lièvre** **Université Blaise Pascal, UFR STAPS, PAEDI EA 4281**Université Blaise Pascal, UFR STAPS, PAEDI EA 4281

•Université d’Auvergne, CRCGM EA 3849Université d’Auvergne, CRCGM EA 3849•[email protected] [email protected]

•[email protected]@wanadoo.fr

Colloque « Gestion de projet et expéditions polaires: que pouvons-nous apprendre? »UQAM, 10-11 Juin, Montréal, Canada.

Investir l’organisation Investir l’organisation « en train de se faire »« en train de se faire »

L’action collective de s’organiser dans toute son effectivité

Nouvelle orientation méthodologique centrée sur les « manières de faire »: – Qui s’intéresse au processus

– Dans une perspective énactive

– Qui s’attache à l’expérience vécue des acteurs comme action située


Des obstacles Des obstacles méthodologiquesméthodologiques

Pour être au plus près de - L’acceptation

- Le système de place - Le secret - Le privé

Pour appréhender l’ « agir » – Le dire insuffisant – L’observation insuffisante

Pour saisir les dimensions individuelles et le collectives– On part de l’individu, mais on perd le

collectif– On part du collectif, mais on perd l’individu


Les expéditions polaires : Les expéditions polaires : un terrain favorableun terrain favorable

Un terrain ouvert au chercheur

Une situation « extrême »

Un collectif réduit

Une période limitée


Logistique Logistique des Situations Extrêmesdes Situations Extrêmes

3 ans d’investigations méthodologiques avec des perspectives pluridisciplinaires

Adossées à des avancées dans le champ de l’ergonomie, de l’anthropologie…

Plusieurs essais en expéditions 2004 : une expédition « test »2005-2006 : Une mise en œuvre sur une

expédition Labrador 2006


Vers un observatoire de Vers un observatoire de l’organisantl’organisant

Un Journal De Bord Multi-média: J.D.B.M.

Un Dispositif d’Objectivation des Pratiques Situées : D.O.P.S.


J.D.B.M. et J.D.B.M. et participation observanteparticipation observante

Appréhender la "bande moyenne" du déroulement de l’expédition

Point de vue du chercheur engagé : tenir son rôle d’acteur, le rôle de chercheur lui étant subordonné

Un acteur chercheur Praticien expérimenté des

expéditions polaires à ski


La construction d’un La construction d’un J.D.B.M.J.D.B.M.

Différentes traces (mails, documents écrits, audio, vidéo…) construites tout au long de l’expédition par un chercheur en vue de rendre compte du déroulement du projet

Un travail de ré-flexion, de distanciation

Pour produire, a posteriori, un récit de l’expédition partagé par le collectif


D.O.P.S. et observation D.O.P.S. et observation participanteparticipante

Etudier les pratiques des expéditeurs en situation lors de phases critiques

Une observation participante : un chercheur suiveur, novice en terme d’expédition

Un dispositif visant le point de vue de chaque acteur, ses rationalités-en-acte dans ces moments particuliers


Modalités de Modalités de mise en œuvre du D.O.P.S.mise en œuvre du D.O.P.S.

Enregistrements en situation :– Du comportement de l’acteur– D’une perspective subjective

située grâce à une caméra embarquée

Entretien a posteriori à partir de la perspective subjective située: l’entretien en re situ subjectif

Pour décrire, in fine, des processus d’action


Illustration des 2 postures Illustration des 2 postures au cours du projet Labrador au cours du projet Labrador

20062006En phase de préparation :

– L’expert fait état de la manière dont il gère habituellement ce risque en expédition

– Le chef d’expédition propose une autre technique avec des chiens

– Le novice pose des questions naïves et se charge de filmer les échanges


Au cours du raid : – La perte des chiens :

une réaction vive de l’expert sur l’emplacement du lieu de camp, un compte rendu dans le journal de bord multimédia

un retrait du débat du novice, un journal de bord personnel exutoire

– La progression entre deux fjords investiguée avec le DOPS


Au retour du raid : – Interviews par un extérieur sur

la perte des chiens– Entretiens en re situ subjectif


Les apports du J.D.B.MLes apports du J.D.B.M Il permet de rendre compte du

déroulement d’une suite d’événement1. Choix d’une technique par le chef d’expédition =

les chiens, 2. Mise en œuvre non stabilisée,3. La perte des chiens, 4. Bricolage d’une nouvelle technique à l’écart du

chef d’expédition

Interprétation « Des erreurs et une certaine négligence du chef

d’expédition » Des recommandations précises pour une

nouvelle expédition à ce chef d’expédition de façon à mieux gérer ce risque lié à l’ours


Les apports du D.O.P.SLes apports du D.O.P.S Il permet de rendre compte

comment le risque des ours est vécu par le chef d’expédition

Le risque n’existe pour le chef d’expédition que lorsqu’il y a des traces effectives d’ours et dans ce cas là la solution est : le fusil + la vigilance

On peut comprendre ce qui apparait comme a priori irrationnel


Le croisement des apportsLe croisement des apports Le chef d’expédition, un ancien

alpiniste: le risque est avant tout dans la « verticalité »

Le choix des chiens, un dispositif non contraignant pour rassurer ces coéquipiers. Mais le risque n’existe pour lui que s’il y a des traces d’ours, alors la solution est le fusil et la vigilance.

Difficulté à transformer ses modalités de gestion de risques liés à l’ours

Recommandation : Ne pas confier la gestion des risques liés à l’ours à ce chef d’expédition


Un observatoire, deux Un observatoire, deux chercheurs, des postures chercheurs, des postures

complémentairescomplémentaires Intériorité Intériorité

ExtérioritéExtériorité ExpertExpert Perspective Perspective

objectivationobjectivation CollectifCollectif Déroulement de Déroulement de

l’expéditionl’expédition Rendre compte de Rendre compte de

l’enchaînement des l’enchaînement des opérations opérations constitutives de constitutives de l’organisationl’organisation

Extériorité Extériorité

IntérioritéIntériorité NoviceNovice Perspective Perspective

subjectivationsubjectivation IndividuIndividu La centration sur des La centration sur des

moments particuliersmoments particuliers Mettre à jour des Mettre à jour des

connaissances tacites, connaissances tacites, des rationalités-en-des rationalités-en-acteacte

Merci de votre attention…Merci de votre attention…

[email protected]@univ-bpclermont.fr

[email protected]@wanadoo.fr

Références Références Lièvre P., Rix G., 2009, « Mode d’interprétation des Lièvre P., Rix G., 2009, « Mode d’interprétation des

matériaux issus d’un observatoire de l’organisant », matériaux issus d’un observatoire de l’organisant », Revue Internationale de PsychosociologieRevue Internationale de Psychosociologie, Eté 2009. , Eté 2009. Numéro spécial coordonné par Martine Hlady Rispal, Numéro spécial coordonné par Martine Hlady Rispal, Marie José Avenier, Yora Dvanov.Marie José Avenier, Yora Dvanov.

Rix G., Lievre P., 2008, “Towards a codification of Rix G., Lievre P., 2008, “Towards a codification of practical knowledge”, practical knowledge”, Knowledge Management: Knowledge Management: Research and Practice,Research and Practice, 6, 225-232. 6, 225-232.

Lièvre P, Rix G., 2007, Vers la construction d’un Lièvre P, Rix G., 2007, Vers la construction d’un observatoire de l’effectivité organisationnelle, une observatoire de l’effectivité organisationnelle, une illustration à partir d’une investigation d’une illustration à partir d’une investigation d’une expédition polaire, expédition polaire, Méthodes de recherche innovante Méthodes de recherche innovante pour créer des connaissances valides et pour créer des connaissances valides et opérationnellesopérationnelles, ISEOR & Academy Of Management, , ISEOR & Academy Of Management, coordination Henri Savall, Marc Bonnet, Véronique coordination Henri Savall, Marc Bonnet, Véronique Zardet, Michel Péron, Volume 1, p561-570.Zardet, Michel Péron, Volume 1, p561-570.

Différents rendus Différents rendus

Réalisation d’un récit d’expédition : Réalisation d’un récit d’expédition : – Sous la forme d’un écrit et d’un filmSous la forme d’un écrit et d’un film– Permet d’aborder l’activité d’un chef Permet d’aborder l’activité d’un chef

d’expédition par rapport à celle d’autres d’expédition par rapport à celle d’autres dirigeantsdirigeants

– Prenant en compte le déclaratif et sa Prenant en compte le déclaratif et sa pratique effective en situation pratique effective en situation

Des processus d’action aux principes Des processus d’action aux principes sous-jacents à l’activitésous-jacents à l’activité– Formalisation de la pratiqueFormalisation de la pratique– Mise en évidence de typesMise en évidence de types

Différents niveaux de Différents niveaux de résultatsrésultats

Mobilisation des matériaux par les acteurs Mobilisation des matériaux par les acteurs pour le projet pour le projet

Diffusion du récit d’une expédition Diffusion du récit d’une expédition polaire : un retour et partage d’expériencepolaire : un retour et partage d’expérience

Construction de savoir d’action intégrant Construction de savoir d’action intégrant les connaissances tacites et des savoirs les connaissances tacites et des savoirs scientifiques classiquesscientifiques classiques

Une perspective pour envisager Une perspective pour envisager l’organisation en situation extrême, des l’organisation en situation extrême, des principes d’organisationprincipes d’organisation

Un extrait du journal de Un extrait du journal de bord multimédia :bord multimédia :Une trace vidéo Une trace vidéo

construite au cours du construite au cours du raidraid

Une perspectiveUne perspectivesubjective situéesubjective située

Caméra

Enregistreur

Micro

Explicitation de l’acteurExplicitation de l’acteur Description du contexteDescription du contexteChercheur :Chercheur : Donc là, tu cherches quelque Donc là, tu cherches quelque chose de particulier… chose de particulier… M :M : Là je regarde la côte… Là je regarde la côte… C :C : Le danger, il est là pour toi ? Le danger, il est là pour toi ? M :M : Le danger, il est sur la côte… Le danger, il est sur la côte…C : D’accord… C’est un risque, c’est un C : D’accord… C’est un risque, c’est un danger, c’est quoi à ce moment-là ? danger, c’est quoi à ce moment-là ? M :M : Y a un risque, non né… qui n’est pas Y a un risque, non né… qui n’est pas négligeable… Je sais qu’à cet endroit là il y a négligeable… Je sais qu’à cet endroit là il y a une tanière, qu’il y a des tanières parce que je une tanière, qu’il y a des tanières parce que je les ai vues… Je sais qu’y a un phoque qui s’est les ai vues… Je sais qu’y a un phoque qui s’est fait bouffer, je sais qu’il y a des traces d’ours… fait bouffer, je sais qu’il y a des traces d’ours… Donc il y a toutes les indications qui font que… Donc il y a toutes les indications qui font que… C :C : Donc tu me dis ça, à ce moment-là c’est ce Donc tu me dis ça, à ce moment-là c’est ce qui est prégnant ?qui est prégnant ?M :M : Tu vois je le redis… Tu vois je le redis… C :C : Ça te gêne là ? Qu’ils [nos co-équipiers] Ça te gêne là ? Qu’ils [nos co-équipiers] t’aient pas écouté ? Tu me le redis là ?... t’aient pas écouté ? Tu me le redis là ?... M :M : Non ça ne me gêne pas, mais je me dis, ils Non ça ne me gêne pas, mais je me dis, ils ont tort… ont tort… C C : D’accord… : D’accord… M :M : Tu vois, je suis en train de dire, Tu vois, je suis en train de dire, çaça c’est le c’est le genre d’endroit merdique pour telles raisons… genre d’endroit merdique pour telles raisons… Je leur ai dit de pas faire ça, de pas rester Je leur ai dit de pas faire ça, de pas rester devant moi, ils restent devant qu’ils aillent se devant moi, ils restent devant qu’ils aillent se faire voir, quoi !faire voir, quoi !

Nous arrivons au fond d’un fjord.Nous arrivons au fond d’un fjord.Deux coéquipiers progressent devant Deux coéquipiers progressent devant M ; ils se trouvent à environ 50m. Je M ; ils se trouvent à environ 50m. Je progresse à sa gauche légèrement en progresse à sa gauche légèrement en arrière. arrière. M regarde alternativement juste M regarde alternativement juste devant lui, puis la rive droite que devant lui, puis la rive droite que nous longeons.nous longeons.

Il s’arrête et pointant avec son bâton Il s’arrête et pointant avec son bâton la rive droite, alors que j’arrive à sa la rive droite, alors que j’arrive à sa hauteur, il indique : « Tu vois ce sont hauteur, il indique : « Tu vois ce sont des coins un peu merdiques parce que des coins un peu merdiques parce que tu peux avoir des ours planqués là tu peux avoir des ours planqués là dedans qui sortent brutalement… ».dedans qui sortent brutalement… ».Puis recommençant à marcher, et Puis recommençant à marcher, et regardant nos coéquipiers, il regardant nos coéquipiers, il poursuit : « C’est pour ça que je leur poursuit : « C’est pour ça que je leur ai dit de pas rester devant le fusil, ai dit de pas rester devant le fusil, mais… Ils ne m’ont pas écouté ». mais… Ils ne m’ont pas écouté ».

Il continue à progresser vers le fond Il continue à progresser vers le fond du fjord et regarde de manière du fjord et regarde de manière récurrente juste devant lui, nos récurrente juste devant lui, nos coéquipiers et la côte. coéquipiers et la côte.

Formalisation de la pratiqueFormalisation de la pratique

Dans ce fond de fjord, M sait qu’il y a des ours : il a déjà vu des Dans ce fond de fjord, M sait qu’il y a des ours : il a déjà vu des tanières à cet endroit-là. Les traces de pas dans la neige et les tanières à cet endroit-là. Les traces de pas dans la neige et les restes d’un phoque confirment cette éventualité. Tout en restes d’un phoque confirment cette éventualité. Tout en progressant, il guette. Un ours peut être caché derrière un bloc de progressant, il guette. Un ours peut être caché derrière un bloc de glace : on risque de le voir au dernier moment, quand il charge. Il glace : on risque de le voir au dernier moment, quand il charge. Il faut être prêt à intervenir. Le fusil est sur la pulka de M. Pour la faut être prêt à intervenir. Le fusil est sur la pulka de M. Pour la sécurité de tous, il vaut mieux être groupé et derrière le fusil. M l’a sécurité de tous, il vaut mieux être groupé et derrière le fusil. M l’a indiqué à tout le monde, mais les autres continuent à rester devant, indiqué à tout le monde, mais les autres continuent à rester devant, ce qui l’agace. Tout en progressant à son rythme, il reste attentif. ce qui l’agace. Tout en progressant à son rythme, il reste attentif.

Documents

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