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Rubrique proposée par Gérard Guez, avocat à la Cour - [email protected] 76 // REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MARS 2009 - N°410 Management Nouvelles méthodes, nouvelles pratiques La communication paradoxale Après avoir étudié les nouvelles méthodes et pratiques, nous analysons la commu- nication paradoxale à l’aide d’une autre grille de lecture. Le changement, un système interactif à trois niveaux et à double détente. Cette grille de lecture, issue de l’école de Palo Alto, nous permet d’éclairer la commu- nication sous un jour nouveau. Information n° 1 Toute communication se construit à partir d’une chaîne d’interactions à 3 niveaux. 1. Niveau des informations Dans une société de consommation, l’in- formation devient une denrée comme une autre. Sans information, chacun est condamné à l’ignorance, l’ignorance conduit à l’impuissance. Qu’en tirer comme leçon si ce n’est aujourd’hui, que la rétention d’information est la pire des solutions au niveau du management. Bien plus, l’expérience prouve que lorsque les gens manquent d’informations, ils ont ten- dance à les inventer, d’où l’intensité des bruits de couloirs, conséquence inévitable de la rétention d’information. 2. Niveau des relations Toute relation se construit autour d’une notion d’échange d’informations. Toute relation se fortifie, au cours du temps, au travers du flux d’échange d’informations. Participation et adhésion déclenchent toujours motivation et confiance. Si le flux se tarit ou si la qualité des échanges baisse, la conséquence immédiate sera la frustration et la méfiance, donc la démo- tivation. Conséquence une relation non entretenue est une relation condamnée, à plus ou moins brève échéance. 3. Niveau des valeurs Toute relation, qui s’inscrit dans le temps dans un concept de cohérence et de conti- nuité, renvoie nécessairement à l’idée d’une solidarité vécue et à la notion de valeurs par- tagées, qui sont les fondements et les racines d’une véritable communauté d’esprit, avec comme corollaire une fluidité, une souplesse et une authenticité de la communication. Information n° 2 De cette chaîne à 3 maillons découle un système à double détente, de complexité croissante : (sous-système 1) : interaction entre les Management paradoxal INFORMATION RELATION VALEURS STATUT RECONNAISSANCE INTER-RELATION INTERPRÈTATION NIVEAU 1 NIVEAU 2 NIVEAU 3 NIVEAU 3 NIVEAU 2 NIVEAU 1 Plus un changement est important, plus le poids des valeurs et des relations est essentiel niveaux information et relations simple- ment, en clair, les valeurs ne sont pas remises en cause, il s’agit de veiller à la bonne information et à l’entretien de la relation, sans plus, le but poursuivi : consolider ce qui existe déjà, maintien du système en l’état ; (sous-système 2) : à l’expérience, les informations reçues seront perçues comme des menaces, induiront une situation exceptionnelle et dangereuse, remettant en cause les valeurs, la situa- tion va créer des tensions au niveau de la relation et tendre à susciter frustrations et méfiance, au niveau des intervenants, le but poursuivi : renforcer la relation avant qu’elle ne se détériore trop forte- ment, d’où nécessité de revoir le système des valeurs partagées pour recréer un contexte de solidarité, sans lequel la relation ne saurait survivre longtemps aux tensions. Information n° 3 Si la chaîne de communication se construit dans l’ordre suivant : étape 1 : l’informa- tion ; étape 2 : les relations ; étape 3 : les valeurs ; avec un emboîtage de type pou- pées russes, avec interaction et super- position des niveaux, à chaque étape, la même chaîne peut être utilisée au niveau de la mise en œuvre de la gestion de tout projet, mais dans un ordre inverse : étape 1 : les valeurs ; étape 2 : les rela- tions ; étape 3 : l’information. Qu’est-ce que cela signifie aujourd’hui ? Que le premier rôle essentiel d’un manager est d’être d’abord le garant des valeurs, notamment par rapport aux pro- jets de changement. Le grand timonier ne délègue à personne d’autre que lui le droit de choisir les valeurs et de donner les orientations du grand dessein. Que le deuxième rôle fondamental d’un manager est de veiller au pilotage des systèmes de relations, en s’appuyant sur un réseau de palpeurs et d’informateurs bien placés, pour anticiper et suivre l’évo- lution des relations. Tâche plus que rare- ment effectuée et maîtrisée aujourd’hui dans les faits, officiellement pour des raisons de temps, officieusement, pour nous, par absence de méthode et de pratiques de travail. Que le troisième rôle déterminant d’un manager c’est enfin d’utiliser l’information comme moyen de recadrer les problè- mes, le plus vite possible, afin de prévenir interprétation ou malentendu à la source, et d’éviter une dégradation des valeurs, avec comme conséquence immanquable un état de crise. Nous verrons dans le prochain numéro comment maîtriser le changement.

Nouvelles méthodes, nouvelles pratiques

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Rubrique proposée par Gérard Guez, avocat à la Cour - [email protected]

76 // REVUE FRANCOPHONE DES LABORATOIRES - MARS 2009 - N°410

Management

Nouvelles méthodes, nouvelles pratiquesLa communication paradoxaleAprès avoir étudié les nouvelles méthodes et pratiques, nous analysons la commu-nication paradoxale à l’aide d’une autre grille de lecture.Le changement, un système interactif à trois niveaux et à double détente. Cette grille de lecture, issue de l’école de Palo Alto, nous permet d’éclairer la commu-nication sous un jour nouveau.

Information n° 1Toute communication se construit à partir d’une chaîne d’interactions à 3 niveaux.1. Niveau des informationsDans une société de consommation, l’in-formation devient une denrée comme une autre. Sans information, chacun est condamné à l’ignorance, l’ignorance conduit à l’impuissance. Qu’en tirer comme leçon si ce n’est aujourd’hui, que la rétention d’information est la pire des solutions au niveau du management. Bien plus, l’expérience prouve que lorsque les gens manquent d’informations, ils ont ten-dance à les inventer, d’où l’intensité des bruits de couloirs, conséquence inévitable de la rétention d’information.2. Niveau des relationsToute relation se construit autour d’une notion d’échange d’informations. Toute relation se fortifie, au cours du temps, au travers du flux d’échange d’informations. Participation et adhésion déclenchent toujours motivation et confiance. Si le flux se tarit ou si la qualité des échanges baisse, la conséquence immédiate sera la frustration et la méfiance, donc la démo-tivation. Conséquence une relation non entretenue est une relation condamnée, à plus ou moins brève échéance.3. Niveau des valeursToute relation, qui s’inscrit dans le temps dans un concept de cohérence et de conti-nuité, renvoie nécessairement à l’idée d’une solidarité vécue et à la notion de valeurs par-tagées, qui sont les fondements et les racines d’une véritable communauté d’esprit, avec comme corollaire une fluidité, une souplesse et une authenticité de la communication.

Information n° 2De cette chaîne à 3 maillons découle un système à double détente, de complexité croissante :

(sous-système 1) : interaction entre les

Management paradoxal

INFORMATION RELATION VALEURS

STATUTRECONNAISSANCEINTER-RELATION

INTERPRÈTATION

NIVEAU 1 NIVEAU 2 NIVEAU 3

NIVEAU 3 NIVEAU 2 NIVEAU 1

Plus un changement est important,plus le poids des valeurs et des relations est essentiel

niveaux information et relations simple-ment, en clair, les valeurs ne sont pas remises en cause, il s’agit de veiller à la bonne information et à l’entretien de la relation, sans plus, le but poursuivi : consolider ce qui existe déjà, maintien du système en l’état ;

(sous-système 2) : à l’expérience, les informations reçues seront perçues comme des menaces, induiront une situation exceptionnelle et dangereuse, remettant en cause les valeurs, la situa-tion va créer des tensions au niveau de la relation et tendre à susciter frustrations et méfiance, au niveau des intervenants, le but poursuivi : renforcer la relation avant qu’elle ne se détériore trop forte-ment, d’où nécessité de revoir le système des valeurs partagées pour recréer un contexte de solidarité, sans lequel la relation ne saurait survivre longtemps aux tensions.

Information n° 3Si la chaîne de communication se construit dans l’ordre suivant : étape 1 : l’informa-tion ; étape 2 : les relations ; étape 3 : les valeurs ; avec un emboîtage de type pou-pées russes, avec interaction et super-position des niveaux, à chaque étape, la même chaîne peut être utilisée au niveau de la mise en œuvre de la gestion de

tout projet, mais dans un ordre inverse : étape 1 : les valeurs ; étape 2 : les rela-tions ; étape 3 : l’information.Qu’est-ce que cela signifie aujourd’hui ?Que le premier rôle essentiel d’un manager est d’être d’abord le garant des valeurs, notamment par rapport aux pro-jets de changement. Le grand timonier ne délègue à personne d’autre que lui le droit de choisir les valeurs et de donner les orientations du grand dessein.Que le deuxième rôle fondamental d’un manager est de veiller au pilotage des systèmes de relations, en s’appuyant sur un réseau de palpeurs et d’informateurs bien placés, pour anticiper et suivre l’évo-lution des relations. Tâche plus que rare-ment effectuée et maîtrisée aujourd’hui dans les faits, officiellement pour des raisons de temps, officieusement, pour nous, par absence de méthode et de pratiques de travail.Que le troisième rôle déterminant d’un manager c’est enfin d’utiliser l’information comme moyen de recadrer les problè-mes, le plus vite possible, afin de prévenir interprétation ou malentendu à la source, et d’éviter une dégradation des valeurs, avec comme conséquence immanquable un état de crise.Nous verrons dans le prochain numéro comment maîtriser le changement.