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ACTA OPIITHALMOLOGICA I956 (Cliniqice Ophtrtlmologiqiie de l'Unive,h te' de Gand, Directem : Pro/. J. FinnCois) NOUVELLES RECHERCHES PHYSICO- ET HISTO-CHIMIQUES SUR LE MUCOIDE DE LA CORNEE PAR jules FranCois et Marcel Rabaey".) (Gand):>'>) Le stroma cornken contient une grande quantitk de mucopolysaccharide acide ou mucoide, qui se compose, d'aprks Meyer et Chaffee dune molkcule de glucosamine (hexosamine), d'acide hexuronique, d'acide acktique et d'acide sulfurique; cette composition est analogue B celle de I'acide mucoi'tine - ou chondroi'tine - sulfurique. Les memes auteurs, en se basant sur des propriktes de rotation et sur des analyses enzymatiques, dkduisent que l'on a affaire A un ester sulfurique de l'acide hyaluronique. La sclkrotique contient elle aussi une substance mucoi'de, dont la composition est celle de l'acide chondroi'tine-sulfurique (Levene). Nous savons dCj& que le mucoi'de de la cornke est tr&s basophile puisqu'il absorbe abondamment les colorants basiques, et qu'il est en mkme temps chromotrope, puisqu'avec certains de ces colorants il se produit une rkaction mktachromatique. D'autre part, et contrairement i ce que rapporte Winkelman, nous avons pu nous convaincre, grice i des techniques personnelles, que le mucoi'de sclkral prksente lui aussi une rkaction mi-tachromatique et qu'il posskde A peu pres les memes propriktks que le mucoi'de cornken, non seulement en ce qui concerne la chromotropie, mais aussi en ce qui concerne son rapport avec le pH. Entre le mucoi'de de la cornke et le mucoi'de de la sclkrotjque il y a cependant une grande difference quantitative et topographique. La sclkrotique contient en effet beaucoup moins de mucoi'de et la distribution de cette substance y est aussi beaucoup plus irrCguliPre. C'est ainsi que la partie interne de la sclkrotique contient la plus grande quantitk de mucoide, que la rkaction mktachromatique est la plus Cvidente au niveau des parties postkrieures, voisines du nerf optique, et qu'elle disparait au niveau des parties antkrieures, voisines du limbe. M&me *) Chargt: de recherches du Fonds National de la Recherche Scientifique. *") Resu aoiit 5, 19.55. 45

NOUVELLES RECHERCHES PHYSICO- ET HISTO-CHIMIQUES SUR LE MUCOIDE DE LA CORNEE

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ACTA OPIITHALMOLOGICA I956

(Cliniqice Ophtrtlmologiqiie de l'Unive,h te' de Gand, Directem : P r o / . J . FinnCois)

NOUVELLES RECHERCHES PHYSICO- ET HISTO-CHIMIQUES SUR L E MUCOIDE DE LA CORNEE

PAR

jules FranCois et Marcel Rabaey".) (Gand):>'>)

Le stroma cornken contient une grande quantitk de mucopolysaccharide acide ou mucoide, qui se compose, d'aprks Meyer et Chaffee d u n e molkcule de glucosamine (hexosamine), d'acide hexuronique, d'acide acktique et d'acide sulfurique; cette composition est analogue B celle de I'acide mucoi'tine - ou chondroi'tine - sulfurique. Les memes auteurs, en se basant sur des propriktes de rotation et sur des analyses enzymatiques, dkduisent que l'on a affaire A un ester sulfurique de l'acide hyaluronique.

La sclkrotique contient elle aussi une substance mucoi'de, dont la composition est celle de l'acide chondroi'tine-sulfurique (Levene).

Nous savons dCj& que le mucoi'de de la cornke est tr&s basophile puisqu'il absorbe abondamment les colorants basiques, et qu'il est en mkme temps chromotrope, puisqu'avec certains de ces colorants il se produit une rkaction mktachromatique. D'autre part, et contrairement i ce que rapporte Winkelman, nous avons pu nous convaincre, grice i des techniques personnelles, que le mucoi'de sclkral prksente lui aussi une rkaction mi-tachromatique et qu'il posskde A peu pres les memes propriktks que le mucoi'de cornken, non seulement en ce qui concerne la chromotropie, mais aussi en ce qui concerne son rapport avec le pH.

Entre le mucoi'de de la cornke et le mucoi'de de la sclkrotjque il y a cependant une grande difference quantitative et topographique. La sclkrotique contient en effet beaucoup moins de mucoi'de et la distribution de cette substance y est aussi beaucoup plus irrCguliPre. C'est ainsi que la partie interne de la sclkrotique contient la plus grande quantitk de mucoide, que la rkaction mktachromatique est la plus Cvidente au niveau des parties postkrieures, voisines du nerf optique, et qu'elle disparait au niveau des parties antkrieures, voisines du limbe. M&me

*) Chargt: de recherches du Fonds National de la Recherche Scientifique. *") Resu aoiit 5, 19.55.

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entre les faisceaux conjonctifs la coloration metachromatique se distribue de fason trks inkgale, se localisant de prkfkrence entre les gros faisceaux.

En partant des recherches de Dempsey, Wislocki et coll., nous avons Ctudit sur des preparations histologiques, l’interaction des colorants basiques (plus particulikrement le bleu de mkthylkne et le bleu toluidine) et du mucoide, tant de la corn& que de la sclkrotique.

C’est ainsi que nous avons examine I’influence du pH, de la concentration du colorant, de la nature et de la concentration du tampon, de la tempkrature, de l’epaisseur des coupes et de l’alcool sur l’absorption de bleu de mkthylkne par des coupes cornkennes dtstpithklialisCes, fixkes dans du formol B 10 O/O. Les figures 1 et 2 nous donnent un exemple de l’influence du pH.

Nous sommes arrives A la conclusion qu’au niveau de la cornee (et mCme au niveau de la sclkrotique) la reaction mktachromatique peut &tre vtrifike le mieux en colorant avec une solution de bleu de mkthylkne tamponnee de pH 4,7, le tampon etant de l’acide acetique et de l’acktate de soude B M/10 et la concentration de bleu de inkthylkne etant de 16 mgr. O/O. A ce p H l’absorption du colorant par le mucoide est pratiquement maximale, alors que l’absorption non sklective du collagine est trks minime.

Cette technique de coloration est trks facile, absolument siire et tout A fait appropriee A I’ktude du mucoi’de cornken. I1 est possible, m&me avec des petits fragments de tissu, d’obtenir des resultats reellement quantitatifs en ce qui concerne la basophilie du stroina et la quantiti. de mucoi’de qui y est prksente.

La reaction mktachromatique est plus prononcke et plus belle avec le bleu de toluidine. Si ce colorant possPde B peu prks les m&mes propriktts que le bleu de methylhe , il donne cependant dkjB, A p H 4,7, une absorption non selective

Fig. 1. Absorption par mm3 de tissu du bleu de intthyltne (coiic. 16 mgr. O/o)

h differelits pH par des coupes cornitennes (vache).

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Fig. 2. Absorption par mm3 dc tissu du bleu de mkthyltne (conc. 16 mgr. O i u ) h diffkrents pH par des coupes de cornke, de scltrotique, de nerf

optique (vache) et de mklanosarcome dc l’uvte (homme).

marquke, de telle sorte qu’il ne convient pas aussi bien pour des recherches quantitatives.

Fig. 3. Absorption par mm8 de tissu du bleu de mkthylhe par des coupes de cornke (vache) avant et apri.s traitement par l’hyaluronidase (Rondax Evans : 3 mgr. dans 1 cc.. incubation B 37’ pendant 60 h.). La difference entre les deux courbes donne I’absorption

de bleu de mkthy1i.m par le mucoide.

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juand nous traitons par l’hyaluronidase des coupes corntennes et scltrales, Ses dans le formol, nous constatons que l’absorption des colorants basiques h u e d’une fason trks importante (tableau I et figure 3 ) . Cette diminution Fait progressivement, mais surtout au cours des premitres heures. Notous endant que m&me aprks une longue incubation dans l’hyaluronidase la :tion mttachromatique persiste encore dans une certaine mesure.

AprPs incubation dans l’eau distillte

Tableau I . orption de bleu de methylene (conccntration 16 mgr “10, tampon A I’acetate M/10, 4,7, to 20” C) par des coupes de cornkc dPs&pith&dis& de vache (fixation dans )rmol, epaisseur des coupes 10 ,a, lecture de 5 coupes A la fois). L a solution d’hyalu-

ronidase est la Kondase Evans : 3 nigr. dans 1 cc., to 37’ C.

Aprks incubation dans l’hyaluronidase

Avant l’exptrience 0,75 I I

cau distillte hyaluronidase

AprPs 23 h. 0,68 0,14

es expkriences semblent donc montrer que le mucoi’de de la cornte est impost au moins partiellement par I’hyaluronidase. Le m&me phtnomtne serve d’ailleurs au niveau de la scltrotique, oh la dkcomposition est encore rapide (tableau 11).

Tableau I I . Technique identique A celle indiquke au tableau I.

n n t c : 5 coupes 0,707 0,287

ltrotique : 10 coupes 0,790 0,145

Le chiffre de l’absorption du colorant par la sclerotique apr& incubation dans l’hyaluronidase est relativement trop eleve, puisque la sclerotique contient par unite de volume moins de mucoi’de que la corn& et qu’elle contient aussi plus d’acides nuclkiniques (vaisseaux, nerfs etc.).

La decomposition plus rapide du mucoi’de sclkral peut &tre due A la com- position chimique differente de ce mucoi’de ou encore A sa repartition parti- culikre, puisque nous savons qu’au niveau de la sclkrotique la substance chromo- trope se trouve surtout entre les gros faisceaux conjonctifs.

Nous avons dit plus haut, en nous basant sur la diminution ou la disparition de la basophilie, que le mucoi’de de la cornte est, semble-t-il decompose par l’hyaluronidase. A ce sujet nous devons cependant faire remarquer que pour obtenir ce resultat il est necessaire que ce ferment soit present A une haute concentration (tableau 111).

Concentration de l’hyaluronidase

Tableau III. Coupes de cornte de vache, 10 p, to 38” C, incubation pendant 45 h. dans une solution d’hyaluronidase B concentration croissante. Technique de coloration identique A celle

du tableau I.

Absorption Diminution de bleu de m6thylene de la basophilie en O / o

3/10.000.000 3/1.000.000 3/100.000 6/100.000 3/10.000 6/10.000

0,685 0,685 0,667 0,475 0,137 0,102

0 0 3

32 80 86

Nous pouvons d’autre part affirmer les faits suivants : 1.- Bien que des recherches physico-chimiques aient montrk la presence en

petite quantite .d’hyaluronidase dans l’humeur aqueuse, cette dernikre n’a in vitro aucune influence sur la basophilie des coupes cornkennes fixees.

2.- Le venin d’abeille A haute concentration produit kgalement une diminution de la basophilie du stroma cornken.

3.- La reaction P. A. S. (periodic-acid-Schiff reaction) est aussi positive dans des coupes corneennes, trait& par l’hyaluronidase et dont la basophilie est par consequent fortement diminuke, que dans les coupes, qui ne l’ont pas ktk.

Ces observations concordent avec celles de Lillie pour d’autres tissus : ,I think it is true that the capacity to reduce reduction unit titer of a hyaluronidase preparation; that is, when the concentrations used are varied and we try to reach some sort of an evaluation by the concentration-time relationship .that it

49 Acta Ophthalmol. Vol. 34, I I

takes to clean out the metachromatic material completely, we find that different lots of enzyme varying as much as a hundred fold in their enzyme titer, as determined by the turbidity reduction technique, will only show tenfold varia- tion in their capacity to digest connective tissue mucus.<(

Toutes ces observations jettent un doute skrieux sur la conception, suivant laquelle la partie chroniotrope devrait etre kliminke des coupes tissulaires apris incubation dans l’hyaluronidase avant que l’on puisse voir la disparition de l’absorption du colorant. L’on a bien plus l’impression qu’un des constituants de ce ferment interfkre avec le colorant basique.

Disons aussi que l’hyaluronidase, qui a ktk bouillie, ne diminue la basophilie du stroma cornken que de 10 O/O, alors que le ferment, qui ne I’a pas ktk ( A titre de contrDle) la diminue de 60 o/o.

De tout ceci nous pouvons conclure que le probltme est trks complexe et qu’il n’est de ce fait pas ktonnant que l‘importance de l’hyaluronidase et d’autres ferments dans la physico-pathologie de la cornke soit encore ma1 connue.

A l’aide de notre technique de coloration, nous avons ktudik le comportement du mucoide de la cornke lors de la pknktration de vaisseaux dans cette mem- brane. Nous avons provoquk la &oformation vascztlaire par des injections intra-camkrulaires d’alloxane et par des injections intra-cornkennes de tkr& benthine (fig. 4, 5 , 6 et 7).

Ces expkriences (fig. 8) nous ont montrk que si la quantitk totaIe de mucoide dans la cornke ne diminue presque pas, sa concentration par contre et sa

Fig. 4. (Obj. 16 mm., ocul. S X, Leitz). Injection in t r acamhla i r e d’alloxane chez le lapin. Oeil normal de contrble. Coloration an bleu de mtthylkne

(conc. 16 mgr. O / o ) h pH 4,7.

50

Fig. 5. (Obj. 16 mm., ocul. 8 X, Leitz). Cornkc de lapin onze jours aprks une injection i n t r a c a m h l a i r e d'alloxane. Coloration a u bleu de mkthylene (conc. 16 mgr. O/o) h pH 4,7. Fort gonflement du stroma.

Les couches antdrieures sont Ics moins color&.

quantitk par unit6 de volume diminuent fortement par suite d'un gonflement tr&s marquk du stroma et que les vaisseaux pknktrent pour la plupart dans les couches antkrieures de la cornke, prkciskment cellcs, oh la concentration du mucoi'de est la plus rkduite.

De ces observations nous pouvons conclure :

Fig. 6 . (Obj. 3,5 X, ocul. 8 X, Leitz). Corn& de lapin onze jours a p h une injection intra- camkrulaire d'alloxane. Coloration au bleu dc mt.thyltne (conc. 16 mgr. " i o ) h pH 4 , 7 . Partie iuxtalimbique. Pkndtration de vaisseaux dans la z6ne antirieure, oh la concen-

tration en mucopolysaccharide acide est la plus ri-duite.

Fig. 7. (Obj. 16 mm., ocul. 8 X, Leitz). Idem qu ' i la figure 6, mais i un plus fort grossissement.

Autour des vaisseaux le stroma n'est presque pas colori..

a) Le mucoi'de de la cornke ne doit pas Stre dktruit et avoir disparu pour que

b) Ce n'est que la haute concentration du muco'ide qui emptche la pknktration des vaisseaux puissent pknktrer dans la membrane.

des vaisseaux dans la cornke.

m

. - -.. - _ --. .

Joun - 4 . . I2 MY% 4 d I1 :b

opcity ofcornea. Muczd.

Fig . 8. I, I1 et 111 sont empruntCs i Ashton, Cook et Langham. - IV : quantitk absolue du mucoide et concentration de cette substance dans la cornke aprts injection intra-

camhulaire d'alloxane en comparaison avec la corn& normale.

52 i

c) Ce n’est que lorsque cette concentration est notablement rkduite, par suite d’un gonflement par exemple, que les vaisseaux peuvent ptnttrer.

Nos expkriences sur la vascularisation expkrimentale de la cornke ont bien mis en evidence l’importance et le r81e nkfaste du gonflement du stroina cor- &en. Celui-ci se distingue en effet du stroma sclkral par sa forte hydrophilie. Cette propriktt est frappante, lorsqu’on place une cornke dans l’eau, ce qui amkne un gonflement considkrable (Cogan, Van Walbeek, Holmgren).

Or ce gonflement important du stroma cornken se produit par I’intermkdiaire du mucoide. DkjA les recherches de Hertel avaient montrk que les fibrilles collagknes ne jouent dans le processus qu’un rBle passif. Nos recherches per- sonnelles au microscope par contraste de phase et au microscope klectronique ont confirm6 cette conception.

Bien que la dimension des fibrilles collagknes de la cornke se trouve A la limite du pouvoir de rksolution, on peut, au microscope par contraste de phase, avoir une idke assez nette de la fine structure fibrillaire, que nous avons ktudike A I’aide de coupes prCpartes B la congklation et d’autres aprits inclusion dans la paraffine aussi bien de cornkes normales que de cornkes gonflkes dans l’eau distillke (fig. 9).

Contrairement B l’hypothkse d’Aurell et de Holmgren, nous voyons qu’en cas de gonflement I’eau n’est pas ou du moins pas uniquement absorbke au niveau des fentes microscopiques entre les faisceaux fibrillaires, mais que les faisceaux eux-mtmes sont fortement klargis.

a : corn& normale. b : cornte gonflte dans l’eau distillte.

Fig. 9. Cornte de bceuf. Coupe A la congtlation, 15 p, examinte au microscope par contraste

de phase (Wild, obj. 40, ocul. 10 X).

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De mcme les images, obtenues au microscope klectronique (centre de Micro- scopie klectronique de 1’Universitk de Gand, Directeur : G. Vandermeerssche) B l’aide de prkparations obtenues aprks dissociation mkcanique ou B l’aide de rkpliques de coupes, montrent que les fibres collagknes ne sont pratiquement pas modifikes par le gonflement de la cornke. Sur les repliques de coupes de c o d e gonflke, l’on voit nettement que la structure devient simplement plus lacbe.

Le gonflement du stroma cornken est anisotrope, puisqu’il se fait uniquement d a m le sens de sa largeur. Ce fait ne peut s’expliquer que par une disposition fibrillaire bien ordonnke dans la structure molkculaire mgme du mucoi‘de cor- nken ou plus probablement par une liaison solide des molkcules du mucoi’de au collagkne.

Or Van der Hoof voit sur des images obtenues au microscope ilectronique des fibrilles collagknes qui par places sont entourkes d’un manchon de substance amorphe. Nous avons kgalement, lors de nos propres examens au microscope klectronique, obtenu souvent des images oh les fibrilles collagknes ktaient entourkes et incluses dans une substance amorphe (fig. 10 et 1 1 ) . I1 semble donc bien qu’il existe une liaison intime entre le collagkne et le mucoi’de cor-

Fig. 10. Fibres de cornke lion gonflee, traitke au bleu de m6thylkne. Examen au microscope

klectronique, specimen ombrk, grossissement original : 17.000 X.

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Fig. 1 1 . Fibres de cornke non gonflCe, traitee au bleu de mtthylknc. Examcn au microscope

Plectroniquc, specimen non ombre, grossisscmcnt original : 17.000 X.

nken. Nos connaissances B ce sujet sont pourtant encore pour ainsi dire in- existantes.

c

Le gonflement du stroma cornken est fortement tributaire du pH. Ce fait avait dkjP ktk remarquk par Van Walbeek et Neumann. Nous avons pu le confirmer en dkterminant le degrk de gonflement dans diffkrentes solutions- tampon (tableau IV et V).

Le gonflement est minimal P un p H dktermink, mais variable : c’est ainsi que pour la solution tampon A l‘acktate la valeur du p H est de 4,5 - 4,65 et pour la solution tampon au phosphate de Mc Ilvaine e l k est de 3,95. Du c8te acide de ce p H la sclkrotique gonfle kgalement, ce qui montre que dans cette z8ne le gonflement se fait surtout aux dkpens du collaghe. Du c8te alcalin par contre la sclkrotique ne gonfle pas, tandis que le gonflement de la cornke se fait pour ainsi dire exclusivement par I’intermediaire du mucoide. L’on peut remarquer le mCme phknomhe lors de la coloration du stroma cornken par le bleu de mJthyltne, si l’on utilise dcs tampons diffkrents.

Diffkrents dissoEvants organiques, A constante diklectrique diffkrente (alcool kthylique, alcool isopropylique, alcool mkthylique, propylkne glycol, glycerine)

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Tableau IV

Solution tamponnke

de Mc Ilvaine M/5 au phosphate

Aprts 48 heures la cornke

fraiche Poids par mgr. de tissu cornken cornke

PH

Eau distillke 6,80 525 2.160 4,lO 3.010 5 7 3 Formol 10°/o 4,45 640 835 1,30 812

pH

Tableau V. Solutions taniponnkes B l’acktate Milo.

Apri.s 24 heures Aprts 48 heures Poids de la cornke

fraiche avant poi& total par poi& total par I’expkrience de la cornhe mgr. de tissu de la corn,Le mgr* de

cornken cornken

3,50 3,72 3,12 4,05 4,03 4,50 4,65 4,94 5,lO 5,30 5,55

405 mg. 315 560 622 370 415 420 420 430 443 4 70

1.560 1.155

910 700 395 370 370 410 595 790 925

3,84 3,OO 1,63 1,14 1,08 0,89 0,88 0,97 1,15 1,78 2,26

1.750 1.315 1.025

915 405 370 365 402 630 910

1.108

4,27 3,41 1,83 1,47 1,09 0,89 0,87 0,96 1,47 2,28 2,70

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emptchent aussi I’absorption d’eau par la cornte fraiche dans les memes pro- portions qu’ils emptchent l’absorption de bleu de mkthylkne par des coupes cornkennes fixkes (tableau VI).

-

Poids par mgr. de tissu

COrnten

Certains produits, appelks fixateurs en histologie, empcchent kgalement l’absorption d’eau par le stroma cornken et cela d’une f q o n gtnkralement irrtversible. Les tableaux VII et VIII donnent un apersu de l’action de ces produits et montrent que leur effet est trks variable suivant leur mode d’action sur le muco’ide ou sur les protkines.

C’est ainsi par exemple que les rkactifs oxydants, comme le bichromate de potasse, ont trks peu d’influence. Au bout de 2 heures de fixation la cornie se gonfle au point d’atteindre A peu prks le double de son poids. Celui-ci diminue un peu aprks lavage, sans doute par l’klimination du bichromate qui est assez lourd.

Le traitement par le formol empkche en grande partie l’absorption d’eau par la cornke, et ne change rien, quand celle-ci est dkjB gonflte. I1 a d’autre part trks peu d’influence sur la basophilie. Ces faits s’expliquent assez facile- ment par l’action polymkrisante du formol sur les protkines.

Rappelons que dans les mClanges de glycerine et d’eau on peut laisser gonfler et dkgonfler une m@me corn& A volontk en modifiant simplement la concen- tration de la glyckrine, les phtnomknes d’absorption et d’extraction d e a u titant complktement rkversibles, ce qui montre que la corn& n’est pas fix& par la glyckrine.

(solution tampon z i l’acktate, pH 4,7) par une quantitk tgale de coupes

fixkes dans le formol

Tableau VI. Les dissolvants organiques ont ktC ajoutks a u colorant ?I la concentration de 30 O i o .

Poids de la cornte avant l’exptrience

en mgr.

Eau distillCe 470

Alcool isopropylique 540

Propyltne glycol 440 Glycerine 480

Alcool kthylique 345

Alcool mkthylique 575

Absorption de bleu de mCthylkne Aprts 24 heures

Poids total de la cornke

2.365 890 840

1.620 1.465 1.810

5,03 3,OO 2,53 0,89 1,55 0,42 2,85 1,12 3,33 1,31 3,77 1,66

Tableuu VII.

Fixateur Avant

l'experience

I Poids de la cornke

Apres Apres Aprks 24 h. 48 h. 4 h.

1. Acide phosphotungstique B 3 010 495 mgr. 490

9 . Bichromate de potasse A 3 010 630 1.123

3. Alcool absolu 620 -

4 Acide acetique B 6 Oio 690 1 .660

5. Glyckrine B 30 "10 660 1.200

6. Glyctrine B 5 " / o 605 1.480

7. Sublinit B 3,5 o/o 595 565

8. Eau 655 1.755

9. Eau 525 1.480

450 eau -+

1.530

Aprks h. dans l'eau:

770

2.160 eau -+

1.895 eau -+

2.260 glyctrine pure -+

550 eau --f

3.990

3.310 Acide phosphotung- stique -+

460

1.445

970

2.500

4.450

700

505

4.770

430

I Poids de la scltrotique

1. Acidr acetique Q 6 OIo 790 1.640 2.000 eau -+ 2.190

2. Eau 1.110 1.190 1.190 formol 10 O i o + 1.200

Ces differents produits ne sont cependant pas physiologiques et ne peuvent pas &tre employes en therapeutique. I1 serait pourtant trks utile de disposer de substances qui peuvent influencer le gonflement du stroma cornken sans effet nocif.

$

D'apres les experiences de Ashton, Cook et Langham, il semble que la cortisone emp&che dans une certaine mesure le gonflement de la cornke, qui survient in vivo apres injection dalloxane et nous pouvons nous demander si

58

Tableau V I I I . Influence des fixateurs sur le gonflement de la cornie destpithClialis6e.

1.332 (425)

Poids total de la corn& et poids par mgr. de tissu cornken.

-+ Eau

Avant I’expbrience

I. 395 mgr. fixation dans I’acide osmique 20/0 - 9 cc. + 1 cc. tampon Mc Ilvain, pH 7,4

11. 355 mgr. fixation dam formol 8 O/o tamponnC (PH 6 3 )

111. 570 mgr. fixation dans acide phosphotungstique B 1 010

IV. 395 mgr. eau distillee

V. 328 mgr. eau distiIl6e

VI. 485 mgr. eau distillee

A p r h 24 h.

930 (273)

Aprks 20 h. 1.330 (2,4)

1.880 (497)

1.505

( 4 4

-+ Eau

-+ Eau

-+ Eau

-+ Acide osmi- que 2 O / 0 - 9 cc. + 1 cc. tampon Mc Ilvain pH 7,4

-+ Sublimt 3,5 o/o

-+ Formol 8 O/o

tamponne (PH 6,5)

Apres 36 h. 1 980 (274) 1 595 , i

Apres 52 h. 1690 (2,9)

2.085 I -+ Eau

2.068 I -+ Eau

(4’26) I

Apres lavage

pendant 3 jours 2.080

1.440

2.055

l’action inhibitrice de la cortisone sur la vascularisation de la corn& ne peut pas s’expliquer de cette fagon.

La corn&, plac6e dans I’humeur aqueuse d’un animal trait6 avec la cortisone, ne gonfle cependant pas beaucoup moins que celle plac6e dans l’humeur aqueuse d’un animal non trait6 : un lapin reGoit 5 jours de suite une injection sous-conjonctivale (0. D.) de 10 mgr. de cortisone (cortadren Schering); quatre heures aprks la dernikre injection, il est tu6, en mCme temps qu’un animal de contr8le du mCme poids.

Tableau I X .

Poids Aprks 16 h. par mgr. de suspension de tissu dans hum. cornCen aqueuse

Poids par mgr. de tissu cornken

Poids de la cornke avant I’expkrience

O.D. 45 mgr. 99 mgr.

0. G. 38 mgr. 78 mgr. Animal de contrble

Aprks 2 h. de

suspension dans hum.

aqueuse

2,70 163 mgr. 3,80

2,05 133 mgr. 3,50

Poids Poids de la cornke avant aprt.s 24 h. l’expkrience

Animal trait6 par 0. D. 45 mgr. 98 mgr. 1,82 1 7 1 mgr. 3,20 la cortisone

O.G. 41 mgr. 90 mgr. 2,60 151 mgr. 3,70

Poids par mgr. de tissu

cornken

Cornee dCs6pithtlialis6e dans eau distillee + tampon au phosphate M/150, pH 7 430 mgr. 1.268 mgr. 2,90 mgr.

Cornee dkskpith6lialisee dans eau distillee + tampon au phosphate M/150, p H 7 630 mgr. 1.915 mgr. 3 mgr.

Corn& dksepithklialis6e dans solu- tion de Ringer + tampon au phos- phate M/150, p H 7 582 mgr. 1.570 mgr. 2,70 mgr.

Cornke dtsepithklialiske dans plasma sanguin 438 mgr. 755 mgr. 1,72 mgr.

CornPe avec epithelium dans 635 mgr. 810 mgr. 1 2 7 mgr. plasma sanguin 562 mgr. 747 mgr. 1,33 mgr.

CornCe dans formol l0”lo f tampon au phosphate, pH 7 530 mgr. 715 mgr. 1,35 mgr.

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L’on prklPve l’humeur aqueuse des 4 yeux. Ensuite 1’011 dkskpithklialise la c0rni.e et l’on en prClPve un morceau, que l’on p&se et place dans cette humeur aqueuse. Le tableau IX donne les rksultats : si le gonflement de la cornke de l’aeil droit, celui qui a r e p les injections sous-conjonctivales de cortisone, est un peu moins prononci. que celui de la cornke de l’eil gauche, la difference est cependant infkrieure A 10 O/O et peut-&tre attribuke A une legPre augmentation du taux d’albumine dans l’humeur aqueuse par suite des injections sous-con- jonctivales.

Nous avons aussi pu verifier que des solutions prote‘iniques concentrtes (serum total, albumine A 5 0 / 0 etc.) empechent en grande partie le gonflement de la corn& (tableau X). Ces solutions pourraient &tre utiles dans les cas de trauma- tisme de la cornke ou dans les cas de dkskpithklisation cornkenne.

In vitro, comme in vivo I’on est frappt. par 1e r6Ie important que jouent 1’CpithClium de la cornke ct la membrane de Descemet en tant que facteurs rkgulateurs et inhibiteurs de la teneur en eau du stroma corneen.

SUMMARY

1. The uptake of basic dyes and metachromatic staining of corneal and scleral mucoid is most selective by using a buffered solution of methylene blue or toluidine blue. The concentration of the dye is 16 mgr. O / o in Walpole’s acetic acid-sodium acetate buffer, p H 4,7.

2. On formol fixed sections of cornea and sclera concentrated solutions of hyaluronidase decrease markedly the uptake of basic dyes.

3. The large amount of corneal mucoid prevents the penetration of blood- vessels in the cornea.

4. At physiological p H the swelling of the corneal stroma depends upon the mucoid. The collagen fibrils do not play an active role.

5. The swelling of the corneal stroma is dependant on the pH. 6. Organic solvents and fixatives affect more or less the swelling power of

7 . Cortisone has no effect, but concentrated protein solutions are highly active.

the mucoid.

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