Polycop étude de cas

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Haute cole de gestion de Genve Cours de mthodologie

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MENER UNE ETUDE DE CAS

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Source : POTOK, Frdric, Annexe B, Mthode danalyse et de rsolution de cas, in : Principes de management, ERPI, 2002, pp. 379- 392. Objectifs (POTOK, 2002 : 379) : Se familiariser avec la mthode danalyse et de rsolution de cas Apprendre comment prparer une analyse de cas Apprendre comment prsenter les rponses aux questions danalyse Les rgles du jeu (POTOK, 2002 : 380-381) : Dmontrer ses comptences Eviter une argumentation hors sujet Rpondre prcisment la question pose Ne pas supposer quil ny a quune seule rponse Accepter les limites du jeu La prparation du texte (POTOK, 2002 : 381-383) : Premire lecture : survol Seconde lecture : plus approfondie Rpondre aux questions (POTOK, 2002 : 383-390) : Comment aborder les questions qui suivent le texte ? : Distinguer deux types de questions : 1. les questions menant lanalyse du cas 2. les questions menant la rsolution du cas

a) Lanalyse du cas :Analyser revient oprer des liens entre les lments thoriques des chapitres et les composantes pratiques du cas. Les lments thoriques aborder de faon raisonne les composantes pratiques.

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premire partie des questions : trs factuelle relever les lments pertinents dans le texte seconde partie des questions : demande effort de rflexion recherche dans la littrature lments de rponse imaginer une situation qui dcoule de ce qui est dcrit dans le cas

b) La rsolution du cas :Rsoudre revient aller au-del de lanalyse dlments prcis.

Mthodologie classique pour la rsolution de cas :I II III IV tape du diagnostic tape de la recherche des causes tape dlaboration des solutions tape de planification de lapplication des solutions

I) Etape du diagnostic :Il convient de bien distinguer : 1. le(s) symptme(s) ou indicateur(s) du problme 2. le(s) problme(s) lui/eux-mme(s) Il faut donc reprer et rassembler les symptmes pour en dduire le(s) problme(s)

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Haute cole de gestion de Genve Cours de mthodologie Exemples (POTOK, 2002 : 385) : (voir Corrigs) Exemple 1 :

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Lundi, lorsque Pierre rentre de lcole, sa mre le rprimande parce quil na pas rang sa chambre le matin avant de partir. Pierre hausse les paules et senferme dans sa chambre. Mardi, Pierre rentre de lcole tardivement. Sa mre le rprimande. Pierre hausse les paules et sen va dans sa chambre. Cest tous les jours ainsi, pour une raison ou une autre. Exemple 2 : Une entreprise connat un taux dabsentisme lev et dcide de mettre en place un systme de primes de prsence. Ces primes sont tellement intressantes que mme les employs rellement malades insistent pour tre prsents, ce qui nuit leur sant et leur rendement. Fig. 1 : les vnements dun cas ( adapter selon les cas) (POTOK, 2002 : 387) :

Certaines causes entranent un ou des problmes Des consquences fcheuses qui engendrent2) Etape de recherche des causes :Un problme nexiste que parce que certaines conditions sont runies (caractristiques individuelles, dynamique de groupe, politique de lentreprise, etc.)

3) Etape dlaboration des solutions :Aprs avoir considr tous les aspects du cas, il convient de trouver des solutions appropries, ralisables. Une argumentation solide est ncessaire ; il sagit dexpliquer pourquoi telle solution convient, de dterminer ses avantages et ses inconvnients. Les solutions qui se ressemblent doivent tre rassembles. Il convient galement de faire preuve dimagination. Finalement, il faut privilgier, selon ses valeurs, une seule solution, la plus applicable et la justifier. 4

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4) Etape : planification de lapplication de la/des solution(s) :Cette tape est cruciale dans la stratgie de gestion. Il faut se demander comment raliser la solution retenue, dans le temps.

Cas Carole : Exercice (POTOK, 2002 : 391-392) : une femme slective1Premire partie : 1 Cuisines Laurier 1990 inc. est une petite entreprise de 125 employs qui 2 fabrique des armoires de cuisine et de salle de bains. Tous les services de 3 la compagnie sont diviss en petits groupes et ceux-ci ont la responsabilit 4 dune seule tche, sauf le service de la peinture dont les employs changent 5 de tche plusieurs reprises chaque semaine. Dans les autres services de 6 lusine tels que le dbitage, lassemblage et lexpdition, des tches 7 spcifiques prdtermines incombent des travailleurs en particulier. Par 8 exemple, au service de lassemblage, quatre personnes soccupent de 9 percer et de mettre de la colle sur les diffrentes pices, cinq autres se 10 chargent dassembler le tout afin de former un module et trois travailleurs 11 situs la fin de la chane dassemblage installent les portes sur les 12 caissons. 13 Le service de la peinture comprend 15 employs qui sacquittent de la 14 teinture, du ponage et du vernissage des armoires de cuisine. Un 15 contrematre dirige les travaux de cette quipe de travail. Le rle de cet 16 employ est de planifier en dbut de journe le travail quil y a faire et de 17 le rpartir entre les 14 autres travailleurs afin quil soit accompli avant la fin 18 de la journe. Chacun des travailleurs possde les comptences 19 ncessaires pour excuter lune ou lautre des trois activits (teinture, 20 ponage et vernissage). La rpartition des trois activits entre les 21 travailleurs se fait donc spontanment le matin sous la supervision du 22 contrematre, qui dtermine le nombre de personnes ncessaires pour 23 chacune delles. Chaque employ excute habituellement les trois 24 diffrentes tches chaque semaine, contrairement aux employs des 25 autres services qui accomplissent toujours la mme tche.

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Cas fictif prpar par Julie Drapeau, Julie Dub, Eric Gauthier, Myriam Laroche, Isabelle Longval et Flix Savard dans le cadre du cours de Comportement organisationnel (automne 2001) du programme de baccalaurat de la Facult des sciences de ladministration, lUniversit Laval. Toute ressemblance avec une entreprise existante ou des personnes relles relverait dune pure concidence.

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Haute cole de gestion de Genve Cours de mthodologie Deuxime partie :

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26 Une des employs du service de la peinture sadapte trs mal cette 27 situation, ce qui provoque de la frustration chez ses confrres et consurs 28 de travail. Lemploye en cause, Carole, une femme dans la quarantaine, 29 travaille depuis deux ans dans cette entreprise. Elle est lexemple type 30 dune personne qui nadhre pas du tout la mthode de travail en 31 vigueur. Lorsque le chef dquipe numre les tches effectuer dans la 32 journe, elle se porte volontaire pour les moins exigeantes et souvent les 33 obtient en usant de son influence sur ses collgues. Lorsquon loblige 34 effectuer une tche quelle napprcie pas, elle ny met aucune ardeur et la 35 fait rapidement, sans sy appliquer. Comme il sagit dun travail dquipe, sa 36 ngligence passe pratiquement inaperue car les autres employs 37 compensent en fournissant plus defforts. Aprs quelque temps, le 38 suprieur immdiat de Carole a abandonn et la laisse choisir les tches 39 excuter sans lui imposer de mesure disciplinaire en raison de son 40 rendement mdiocre. Parce que lencadrement de lassignation des tches 41 laisse dsirer et que cette assignation se fait chaque matin, il est 42 pratiquement impossible pour les dirigeants dintervenir. 43 Depuis que Carole a dcouvert que les employs des autres services nont 44 quune seule tche matriser, elle a limpression davoir plus de 45 responsabilits que les autres sans en retirer les avantages qui en 46 dcoulent. Elle ne voit donc aucun intrt tre polyvalente si son salaire 47 nest pas plus lev. Lorganisation de son service ne suscite chez elle 48 aucune amlioration de lestime de soi ni aucune satisfaction ; elle travaille 49 pour gagner sa vie, sans plus. Sa seule proccupation consiste calculer 50 le nombre dheures quil lui reste avant de pouvoir retourner chez elle et 51 enfin se consacrer ses activits personnelles. 52 Aprs avoir entendu les observations de certains intervenants, les 53 dirigeants cherchent un moyen daugmenter le rendement de ce genre 54 demploy afin que cette situation se rgle et ne se reproduise pas. Les 55 dirigeants ont galement peur de perdre certains de leurs bons employs, 56 qui pourraient en avoir assez dtre pnaliss par le comportement de 57 travailleurs comme Carole.

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Haute cole de gestion de Genve Cours de mthodologie Questions pertinentes :

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1. Quelles diffrences de fonctionnement remarquez-vous entre le service de la peinture et les autres, et quoi correspondent ces diffrences en matire de gestion des tches ? 2. Quelles consquences sur les relations de travail entre employs de divers services peuvent avoir les diffrences de fonctionnement des services ? 3. Quel est ou quels sont les problmes rencontrs ? 4. Quelles en sont les causes ? 5. Comment rsoudre le ou les problmes ? 6. Comment mettre en place la ou les solution(s) retenue(s) ?

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CORRIGES DES EXERCICES

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Haute cole de gestion de Genve Cours de mthodologie Ex 1 p.3 : Problme comportement de Pierre Ses attitudes sont des symptmes

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Son problme : problme relationnel et refus de se soumettre lautorit Ex 2 p.3 : Systme pour prvenir labsentisme problme apparent Ce systme fonctionne tellement bien quil engendre nouveau problme On serait tent de se concentrer sur le moyen de donner des rcompenses sans entraner la prsence des personnes malades ; diminuer les primes de prsence mettre des pnalits en cas dabsence (passer un systme de sanctions) Le vritable problme considrer : le taux dabsentisme anormalement lev Cas Carole : 1. 2. Rsum (utile pour distinguer lessentiel du dtail) Diagnostic a) symptmes : observations de certains intervenants peur des dirigeants de perdre de bons employs b) problmes : le comportement inadmissible de Carole dtrioration de lambiance de travail dir et cadres ne sont pas parvenus diriger/motiver Carole

3. Causes 3.1. Les caractristiques de Carole (causes de son comportement) : Elle exerce une forte influence sur ses collgues Son caractre est fort (elle nhsite pas agir diffremment des autres) Le travail ne constitue quune source de revenu ses yeux Ses activits extra-professionnelles sont prioritaires ses yeux Elle entretient un sentiment dinjustice vis--vis de ses collgues Elle se sent floue (non reconnaissance de sa polyvalence) 3.2. Comportement du groupe : Le manque defforts de Carole est compens par ceux du groupe 9

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3.3. Comportement du suprieur direct : Aucune mesure disciplinaire nest prise contre Carole Il la laisse choisir la tche quelle prfre 3.4. Comportement de la direction : Lassignation des tches nest pas encadre 4. Solutions

Dpend des options choisies : Par ex : changer Carole de service (une seule tche) satisferait les autres employs Approche de confrontation : Par ex : imposer des pnalits aux moins performants Par ex : licencier Carole et faire ainsi un exemple 5. 6. LA solution + arguments Application de LA solution :

Selon la solution dfendue : Par ex : rencontrer Carole et lui annoncer les sanctions auxquelles elle sexpose si elle ne change pas Par ex : lui donner une dernire chance, en fixant des objectifs atteindre Par ex : rencontrer les autres membres du groupe et leur demander de ne plus pallier le manque defforts de Carole ()

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RECUEIL DE CAS A ETUDIER

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Haute cole de gestion de Genve Cours de mthodologie Cas n1 : Albert, un bon fils au travail

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Albert pdale toute allure. Il est en colre. Ah ! cest ainsi ?! , se rpte-t-il sans cesse. Et pourtant, il est sr et certain davoir fait les choses comme il faut. En tout cas, sa mre vient de lui confirmer. Et ce quelle a dit du monde de lconomie, cest clair. Il passe encore une fois tous les vnements dans sa tte a fait peu de temps quil a pass ses examens dapprentissage. Il tait content davoir trouv une place de vendeur chez XdressS, la grande chane internationale de magasins de chaussures. Spcialit : chaussures et prt--porter mode et pas cher. Vous avez d en recevoir un prospectus la maison. Chaque dbut de saison sont expdis des tousmnages, et des centaines de clients se prcipitent immdiatement sur les nouveauts. a part comme des petits pains. Ct qualit, par contre Hier jeudi, en fin daprs-midi, Albert tait encore dans sa priode dessai. Il tait tout seul au magasin. Madame Brun, une vieille dame, lui a demand conseil. Elle voulait savoir si on avait encore une paire de chaussures 80 francs quelle avait repre sur le prospectus quelle tenait la main. Elle cherchait des souliers pour les cinq annes venir, cette paire lui plaisait et le prix lui semblait abordable. Albert reconnut bien volontiers que cette paire tait jolie et bon march, mais mit quelque rserve quant sa durabilit en cas dusage quotidien. Elle ne tiendrait franchement pas cinq ans. Par contre, il y avait deux autres sortes de chaussures assez semblables qui feraient laffaire. De qualit bien meilleure, lune cotait 160 francs et lautre 210 francs. Madame Brun rpliqua quelle devait vivre avec sa rente, qui ntait pas grande, et quil tait hors de question de dpenser autant pour des chaussures. Albert obtempra et lui conseilla de sadresser au magasin Crevoisier, non loin de l, spcialis dans la chaussure robuste et vraiment pas chre. Madame Brun trouva son bonheur pour 110 francs. Une solide paire qui lui plut tout de suite. Sitt rentre chez, elle tint appeler XdressS pour remercier Albert de son bon conseil. Mais elle tomba non pas sur Albert, mais sur son chef, le responsable du rayon Dames. Madame Brun lui raconta sa bonne nouvelle et fit transmettre ses meilleures salutations Albert. Ce matin, Albert a t appel au bureau du chef. Celui-ci lui rappela quen tant quemploy de la chane XdressS il avait pour devoir de vendre les produits de la maison. Il aurait d vendre loffre exceptionnelle 80 francs, quoi quil en pense. Il est pay pour a. Albert rpondit quil tait videmment trs heureux de travailler chez XdressS et quil avait bien essay de vendre des chaussures Madame Brun, et mme des plus chres de meilleure qualit qui plaisaient autant sa cliente, mais quil avait ressenti comme tout fait intenable de lui refiler des godasses de pacotille alors quelle vit sans le sous. Du coup, le chef ne sen tint pas l. Il raconta laffaire au patron, M. Dupuis. Celui-ci convoqua Albert dans son bureau et lui signifia clairement que sa conception du commerce ne pouvait absolument pas tre tolre dans un magasin de la chane XdressS, et quil navait plus qu aller chercher une place ailleurs. Le soir, Albert raconta toute lhistoire ses parents. A la fin, sa mre le regardait tout en souci, et son pre trs en colre. Tu es un idiot fini ! Tu veux jouer les hros, mais tu 12

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oublies que tu dois tre bien not lors de ta premire place, si tu veux atteindre quelque chose dans ta vie ! Sois une bonne fois un adulte, bon sang ! - Laisse le petit tranquille, Jean, sil te plat ! Il a bon cur et a tout fait bien agi. Cest vrai, les gens ne sont pas des clients que lon peut arnaquer comme on veut ! . Mais cest exactement ainsi, la vie dentreprise : la bote doit faire un bon chiffre daffaires, sans quoi elle priclite et il faut remercier le personnel. Leur bont de cur ne leur est pas utile. - Si, bien sr ! A qui est utile une conomie qui trompe les gens et les exploite ? Lconomie doit tre au service de lhomme et non linverse ! - Oh Tu ne comprendras jamais rien lconomie ! Et toi Albert, quest-ce que tu vas faire, maintenant ? . Albert nentend dj plus rien. Il plante l ses parents sans rien dire, nayant en tte que le dsir de retrouver son amie. Il fonce toute allure sur son vlo. Elle, au moins, elle le comprendra. M. Dupuis, de son ct, est aussi dans tous ses tats. Sans citer de nom, il raconte la table familiale lhistoire dAlbert pour conclure que, dcidment, les jeunes ont une drle de conception du commerce ! Son fils, tudiant au gymnase, est dun autre avis. Il reproche son pre davoir moralement mal agi. En tout cas, il aurait ragi comme Albert. Il nen faut pas davantage pour que M. Dupuis se fche tout rouge et rappelle avec vhmence que, sil peut assurer sa famille un si bon niveau de vie et des tudes pour ses enfants, cest bien parce quil a une excellente place de travail, et un bon salaire la fin du mois. Et pour a, il lui faut faire un chiffre daffaires important. Les affaires sont les affaires, voil tout. Questions sur le cas : 1. Pourquoi Albert se trouve-t-il confront un dilemme ? 2. Quelles valeurs sont sous-jacentes chacune des attitudes opposes (attitude attendue en tant qutre humain et attitude attendue comme employ) ? 3. Comment Albert aurait-il pu ragir de sorte que chaque partie (le magasin, Mme Brun et lui-mme) soit respecte le mieux possible ?

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Haute cole de gestion de Genve Cours de mthodologie Cas n2 : Bernard

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M. Bernard est le nouveau chef du service financier. Il est gentil et facile. Une dizaine de jours aprs son arrive, une employe, Sabine, vient se plaindre ouvertement de son laxisme. Il laisse faire aux employs tout ce quils veulent. Les aux employs exagrent, ditelle, discussions interminables entre collgues, coups de fils personnels en province, sjours prolongs la caftria. Tout a influe profondment sur le travail et certains signes commencent annoncer que le pire est pour demain. En tout cas, du temps de M. Jean, le prcdent chef de service, on navait jamais vu a. M. Bernard promet dy mettre bon ordre. En fait, le voil profondment proccup par cette situation. Sa priode dessai est de trois mois et dj, au bout de dix jours, les employs se laissent compltement aller. Si a se sait, cen est fait de sa situation. Le lendemain, M. Bernard dcide de se tenir debout au milieu du service, allant de lun lautre, sous des prtextes futiles, et jetant des regards inquisiteurs sur ce qui se passe. A midi, Mme Berthe, la plus ancienne du service, tlphone ostensiblement sa fille, qui elle demande des nouvelles de sa sant, de son mari et de ses enfants. Lorsquelle raccroche, M. Bernard se prcipite. Vous donnez souvent des coups de fils personnels pendant votre travail ? - Oui. A chaque fois quun de mes enfants est malade, quil est moi et que jen suis responsable. Dailleurs, je lai toujours fait. Cest normal. De plus, jattends toujours midi pour le faire, je suis donc sur mon heure de djeuner. Si vous voulez que je paie la communication, je vous donnerai les cinquante centimes. Les autres membres du service regardent avec intrt la passe darmes. M. Bernard, pour sortir de la ngociation, et montrer son talent dorganisateur propose alors la rgle suivante : Sur lheure du djeuner, les mres de famille peuvent appeler un enfant malade, mais pas question autrement. A la caftria, le service se regroupe autour de Mme Berthe : Vous lavez vu fouiner toute la matine, nous espionner, chercher nous coincer. Quest-ce quil croit, on nest pas des coliers. Dailleurs, il faut se serrer les coudes, il va srement chercher nous embter pour la caftria. Une stratgie est rapidement mise au point. Mme Berthe ira ngocier avec M. Bernard deux pauses caf pour lensemble du service, lune 10h jusqu 10h15 et lautre 15h jusqu 15h15. M. Bernard, ravi de rsoudre son problme si peu de frais acquiesce et rappelle aux uns et aux autres quon peut toujours sentendre si chacun respecte les rgles du jeu. Quelques jours plus tard, Mme Sabine revient. Son fils est malade. Elle doit lemmener voir le mdecin, en fin daprs-midi. Peut-elle sabsenter deux heures, payes rcuprer ? M. Bernard hsite. La procdure interne ne le prvoit pas aux dires de lintresse certains chefs de service le font. Dailleurs un simple coup de fil son collgue des ventes le rassure sur cette possibilit daccorder deux heures rcuprer. Et puis, Sabine est un bon lment qui ne lui donne pas de soucis, et mme plutt des satisfactions. Alors, cest daccord. Le mercredi suivant, deux femmes sont absentes. Mme Berthe, ds larrive de M. Bernard le lui signale en ajoutant quelles arriveront 14 heures. Elles sont en heures de 14

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mdecin rcuprer . M. Bernard sinquite de cette nouveaut. En fait, explique Mme Berthe, cest la rgle institue par M. Bernard lui-mme il y a quelques jours avec Sabine. Le chef de service nest pas daccord et il entend donner son avis a priori sur chaque cas particulier. Cest impossible, lui rpond-on. Comment une mre de famille peut-elle se lever 7 heures, venir au bureau lattendre jusqu 9 heures pour repartir chez elle avec une autorisation, alors que justement ses enfants ont besoin delle ? Abattu et se sentant pig, le chef de service dcide systmatiquement de tout refuser son personnel, pour ne plus se faire avoir. Le vendredi, il reoit une photocopie de lordre du jour des questions des dlgus du personnel. Le point 1 est rdig ainsi : Extension lensemble des services des avantages acquis par le service Finances : caftria, coups de tlphone, enfant malade . Une note laconique de la direction du personnel lui demande de prsenter dans les meilleurs dlais quelques explications. Questions sur le cas : 1. Pourquoi Monsieur Bernard sest-il fait piger par ses employs ? 2. Monsieur Bernard est-il seul responsable de cette situation ? 3. Quels objectifs Monsieur Bernard peut-il se fixer pour dnouer son problme ? 4. Quelles actions possibles et dmarches envisageables peut-il entreprendre pour atteindre ses objectifs ?

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Haute cole de gestion de Genve Cours de mthodologie Cas n3 : Charles

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Dans une grande socit de distribution, Charles vient dtre promu cadre au service des livraisons. Il a t charg de la rorganisation dun des systmes de livraison Il connat bien son mtier et entend montrer rapidement que cela doit changer Pour imposer son image de monstre de travail, Charles dcide de tout remanier de fond en comble : nouvelle organisation du travail, nouvelles procdures suivre, nouveaux dcoupages, nouveaux fichiers. Ses collgues reoivent de plein fouet la nouvelle charge de travail et commencent marquer leur inquitude, sinon leur dmotivation, face un collgue qui chamboule tout, en soccupant des moindres dtails. Dailleurs, le chiffre total des livraisons naugmente pas. Les plaintes, puis les premires critiques arrivent jusqu son patron, M. Boileau : Je ne comprends pas. Vous tes l de 7 heures du matin jusqu 10 heures le soir, vous venez travailler tous les week-ends ce qui me semble assez fou, et encore vous ne trouvez pas le temps dassurer ce que je considre comme une priorit : assurer au minimum la qualit de vos livraisons. - Cest vrai, Monsieur, je travaille normment. Je crois ce que je fais, alors je me dfonce littralement au travail. a, on ne peut pas me le reprocher. Dailleurs, si vous saviez dans quel tat jai trouv le service Jai t oblig de tout remettre en ordre, de tout clarifier. Tout le monde ne la pas compris, on me la mme reproch ! Mais maintenant vous allez voir le changement ! Dans les semaines suivantes, Charles voulut imposer son organisation ses collgues. Mais ceux-ci ne croyaient pas ncessaire de changer si vite, ou de changer tout court : On na pas le temps, pour linstant. Les priorits sont ailleurs. Faisons dabord ce qui a t prvu, on verra ensuite. Mais moi, le temps je le trouve , rtorquait firement Charles, qui se mit imaginer leur place les nouveaux modes de travail qui pourraient coller avec sa rorganisation. Un jour Charles explose : Je me dfonce 15 heures par jour, je manque dy laisser ma sant, vous savez que je suis sous calmants, mon mdecin me la prescrit, et vous me faites des reproches ! Vous feriez mieux de regarder chez vous comment a marche - Que voulez-vous dire ? - Je me comprends, cest le principal. Si tout le monde travaillait comme moi, il ny aurait pas de problmes. Seulement, ds quil faut avancer, plus personne nest l. Je ne peux rien faire de bon parce que vous tranez les pieds Tout cela est votre faute Quelques jours passent Par son agitation personnelle, Charles a fini par crer dans le service une ambiance survolte : les incidents se multiplient entre les gens Mais quelle mouche a piqu tout le monde au service des livraisons ?

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Questions sur le cas : 1. Quels objectifs Charles et ses collgues peuvent-ils poursuivre ensemble ? 2. Quelles options pour Charles ? 3. Quelles options pour les collgues de Charles ?

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Haute cole de gestion de Genve Cours de mthodologie Cas n4 : M. Citron et Ludi-Ludo

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M. Citron est contrematre dans lentreprise Ludi-Ludo qui est une manufacture de jouets en bois. Cest la force du poignet quil est arriv ce poste. Lors de sa promotion, il a runi tous ses amis et leur a firement annonc cette nouvelle. Il voulait en faire profiter tout son entourage. Par la mme occasion, chacun savait dsormais quil avait un poste responsabilits chez Ludi-Ludo. Il lui arrive encore parfois de confectionner des jouets en bois. Mais lessentiel de son activit consiste choisir le bon bois, en commander la quantit ncessaire et acheter de nouveaux outils M. Citron apprcie toute nouveaut au sein de lentreprise bref, organiser le travail des employs. Il a donc des relations avec les fournisseurs ; il seconde aussi M. Lechef, propritaire de Ludi-Ludo, lors de la visite des clients par exemple. Lentreprise Ludi-Ludo ne comprenait quune quinzaine demploys. Chaque employ avait son propre matriel et ralisait le jouet de bout en bout. Certains prfraient construire des voitures, dautres de petites maisons ou dautres encore, des poupes. Seulement, M. Lechef, patron de lentreprise, tait un joueur invtr. Il aimait par-dessus tout se rendre au casino et jouer des sommes mirobolantes. Un jour, ce qui devait arriver arriva, M. Lechef perdit toute sa fortune et tous ses biens. Il ne lui restait plus que sa petite entreprise Ludi-Ludo. Comme il avait contract de nombreuses dettes depuis quil jouait, il dut se rsigner, la mort dans lme, vendre sa manufacture de jouets la multinationale du jouet Nosjouets international dirige par le richissime M. Feldrocker. M. Feldrocker sest empress dacheter Ludi-Ludo. En effet, il envisageait de lancer sur le march du jouet un nouveau modle de poupes en plastique. Il se dit que Ludi-Ludo pouvait tre financirement rentable moyennant quelques modifications. Il possdait dj huit entreprises de jouets, ayant chacune sa spcialit, mais il nen avait encore aucune qui fabriquait des poupes en plastique. M. Feldrocker runit les quinze employs de Ludi-Ludo et leur tint le discours suivant : Mes amis, je suis heureux dentreprendre une collaboration avec vous. Je suis heureux de vous annoncer une bonne nouvelle ; tous les actuels salaris garderont un emploi au sein de Ludi-Ludo. Comme je suis le nouveau propritaire de Ludi-Ludo et que jai une vision mondiale du march du jouet, jai dcid que cette manufacture deviendra lentreprise de mon groupe qui produira les poupes Crsa. Ainsi, mes parts de march dans le secteur du jouet augmenteront. Mes designers ont dessin trois varits de poupes Crsa. Ces poupes seront en plastique. . M. Feldrocker, actuellement, je suis responsable du choix et de lapprovisionnement du bois pour les jouets, puisque les jouets seront dsormais en plastique, en quoi consistera mon activit ? sinterroge M. Citron. Votre activit sera essentielle. Elle consistera entretenir des relations avec toutes les entreprises de mon groupe. Pour ce faire, vous disposerez doutils technologiques de toute premire qualit permettant dtre en contact immdiat avec les autres entreprises du groupe Nosjouets international . De plus, comme je suis le nouveau propritaire, je vous 18

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nomme responsable principal de la gestion et de lorganisation du travail dans cet atelier. Vous devrez appliquer les consignes que je vous transmettrai et me faire savoir les problmes que vous rencontrez dans la production des poupes Cresa. Nous rechercherons des solutions vos problmes au niveau de mon groupe Nosjouets international . Satisfait par cette rponse, M. Citron voyait son avenir au sein de lentreprise Ludi-Ludo comme un dfi et se rjouissait de ses nouvelles responsabilits. Cependant, en songeant aux bouleversements que latelier allait subir, il prit conscience des difficults quil aurait affronter. M. Citron avait par ailleurs dj peru des signes dinquitude chez les employs de LudiLudo. Questions sur le cas : 1. Quel sera le principal problme auquel M. Citron sera confront dans ses nouvelles fonctions ? 2. Comment peut-on sattendre ce que les employs vivent les changements annoncs par leur nouveau chef ? Pourquoi ? 3. Quelle attitude vis--vis des employs M. Citron devra-t-il adopter afin de les rassurer, les motiver ?

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Haute cole de gestion de Genve Cours de mthodologie Cas n5 : la runion dinformation ascendante

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Dans le service comptable dune entreprise industrielle, un malaise rgne. Une tension existe entre les personnes, et les incidents sont nombreux. Ils transpirent de manire informelle dans toute lusine, quoique personne nen parle ouvertement. Le Directeur de lusine peroit le malaise, mais les rapports du Chef du service comptable ne le satisfont pas, et il nose pas brusquer les choses de crainte de la dmission pure et simple de ce responsable (que par ailleurs il apprcie). Il demande au Chef du Personnel de faire une enqute et dinterviewer les personnes (il y en 13 dont 9 employs et 4 cadres) pour avoir des clarts sur ce malaise qui dure, et pour prendre des mesures appropries . Le Chef du Personnel, pensant quil faut sexpliquer une bonne fois , dcide de runir lensemble des 13 personnes du Service Comptable en une runion dinformation . Il prvoit cela un vendredi 17H00 pour ne pas gner le service et prvient les employs la veille de ce jour. Il ouvre la runion laquelle tout le monde est prsent, dispos en auditoire par arcs concentriques, par cette introduction parle : Je vous remercie dtre prsents cette runion intime et jespre que vous serez libres 18 heures pour un week-end bien mrit. Aussi, irai-je droit au but. Alors que, individuellement, chacun de vous est la fois dvou et comptent, le travail en commun ne donne pas le rendement escompt et je men inquite, car vous tes collectivement responsables, naturellement, de la marche du service. Le malaise qui semble rgner est assez flou et indfinissable, et puisquil sagit dun problme de service, localis au service, je crois prfrable dessayer de laver notre linge sale en famille. Je souhaite vous interviewer pour y voir clair et pour que la Direction puisse prendre les mesures appropries. Extrait de la suite de la runion (Silence pendant trois minutes) Le Chef du Personnel. Nous allons demander lun dentre vous de faire une description de la situation. (Nouveau silence. Tout le monde regarde le Chef de Service. Celui-ci reste muet.) Un cadre, qui a demand la parole en levant la main. De quoi se plaint la Direction, au juste ? Y a-t-il des sujets de mcontentement de la Direction sur le travail fait dans notre service ? Le Chef du Personnel. Pour linstant, non. Un employ. Vous semblez craindre que tt ou tard des perturbations napparaissent au niveau du travail, de sa qualit ou de son rendement. Le Chef du Personnel. Je pense effectivement que toute tension entre les personnes tant source de frictions, de malentendus, de mfiance, finit ncessairement par retentir sur le travail qui est une uvre collective.

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Le Chef de Service. Pourquoi supposez-vous, Monsieur, que les communications professionnelles et administratives doivent ncessairement pour tre bonnes, se fonder sur une bonne communication du genre disons affectif ? Le Chef du Personnel. Je ne suppose pas, je sais par exprience que les bonnes relations entre les personnes font lefficacit du travail ! Une employe, timidement. Vous ne pouvez travailler, dans ce cas, quavec des gens que vous aimez. Le Chef du Personnel. Nexagrons pas. Il ne sagit pas damour (rires, dtente) ni mme daffection, mais damiti et destime rciproques, de confiance, quoi, et de loyaut ! Le cadre, qui a dj parl. Dans ce cas-l, comment recrutez-vous ? Est-ce sur titres et qualifications ou la sympathie personnelle ? Le Chef du Personnel. Votre question nest pas embarrassante. Vous savez bien quun contact personnel est indispensable pour choisir titres quivalents, entre plusieurs candidats. Cest justement cela que je veux dire, cette ncessit dune confiance, savoir quon pourra communiquer Un autre cadre. Cest bien une question dintuition personnelle et ces employs ont tous en commun de vous tre sympathiques. Une femme. Peut-tre avez-vous besoin de trouver autour de vous des gens qui vous sont sympathiques ? Le Chef du Personnel. Ne trouvez-vous pas justement que cela simplifie considrablement le travail et limine ces tensions pnibles qui naissent de lantipathie, ces rsistances la transmission ou lexcution des ordres ? Le Chef de service. Dans ce cas, je me demande si vous les apprciez parce quils sont non seulement sympathiques mais aussi obissants ? Le Chef du Personnel. Il est certain qu cest une double qualit japprcie normment. Un autre cadre. Serait-il exagr de penser que cest le dvouement et lobissance comme qualits qui, intuitivement perus par vous chez les candidats lembauche, vous les rendent sympathiques ? Le premier cadre. Si ctait cela, il sagirait dun prjug favorable qui serait sujet rvision au cours du travail, et la sympathie premire risquerait de fondre comme neige au soleil la premire rsistance lobissance. Le Chef du Personnel. Il est vident que la rencontre de la dloyaut met rude preuve une premire sympathie. Le Chef de Service. Vous employez indiffremment dloyaut et rsistance lobissance. Vous en arriverez dire quil ny a de type franc que sil obit sans discuter. Le Chef du Personnel. Ouais Vous voulez me faire dire que je ne trouve sympathique que les esclaves ! (Il na pas lair content.) (Silence gnral, gne.) Le Chef du Personnel, sefforant de renouer le dialogue. Je ne vous demande certainement pas, vous, dtre des esclaves. Vous ne pouvez pas vous plaindre de mes ingrences dans votre service, Monsieur. (Il sadresse au Chef de Service), ni vous Messieurs 21

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Dames. (Il sadresse aux autres.) Vous jouissez dune vritable autonomie dans lusine, une sorte de petit Etat dans lEtat. Un autre cadre. Le problme serait de savoir si ce fait perturbe les communications entre le Service et le reste de lUsine. Le Chef du Personnel. En un sens, oui ! Cest--dire que les communications sont strictement rgies par le rglement. Un employ. Mais le rglement, je croyais que ctait trs important. (Mouvement de dtente, sourires.) Le Chef du Personnel. Justement, le rglement, si important quil soit, nengendre que des relations froides et il est, vous le savez bien, source dobligation autant que source de contestation, selon la manire dont on le prend. Le Chef de Service. Il y en a qui prfrent lautorit de la rgle lautorit des personnes. Vous nous dites en tout cas clairement que vous prfrez lautorit des personnes. Questions sur le cas : 1. Etant donn lobjectif de la runion, quelles sont les diffrents types derreurs commises par le Chef du Personnel ? 2. Pourquoi est-on en mesure daffirmer que lon assiste un retournement de situation durant cet change ? 3. Comment le Chef du Personnel aurait-il d sy prendre pour mener son interview ?

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Haute cole de gestion de Genve Cours de mthodologie Cas n6 : lauto-formation au quotidien

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Mon nom est Pierre Duchemin. Jhabite depuis plusieurs annes en rgion parisienne, prs de Versailles. Je sis responsable commercial dans une socit dingnierie en informatique (49 salaris), dont les bureaux sont situs dans la grande Arche de la dfense. Je suis mari, pre de trois enfants, dont deux filles de 8 et 5 ans et un petit garon de 15 mois. Mon pouse Franoise est standardiste mi-temps dans une agence de publicit Versailles. Dans mon mtier, langlais est une ncessit et je le pratique rgulirement avec mes clients. Mais mon problme, cest lallemand Nous venons dtre rachets par un groupe bavarois et les opportunits dvolution outre-Rhin ne devraient pas manquer dans les annes, peut-tre les mois venir. Jai donc dcid de me lancer durgence dans lapprentissage de cette langue que je ne connais pas, et qui je dois vous lavouer ne minspire pas beaucoup. Il faut dire que la culture et la civilisation allemandes me sont tout fait trangres. Mais Franoise, dont ctait la 1re langue vivante au collge et au lyce, ma promis de maider. Pour dmarrer, jai repr une mthode dinitiation avec cassettes et exercices crits qui me semblent intressante. Lallemand en 100 leons , cela me semble raisonnable comme progression, non ? Je pense dailleurs que ces mthodes se valent toutes et que cest la motivation de lutilisateur qui fait la diffrence ! Limportant pour moi, ce sont les cassettes pour pouvoir travailler en voiture, tout au long de mes dplacements dans la journe. Il faut dire que dans mon mtier de directeur commercial, je roule beaucoup (75 000 kilomtres lan dernier) surtout en ville et sur autoroute. Je dois dailleurs quitter Versailles trs tt le matin pour viter les embouteillages de lentre dans Paris et revenir tard le soir afin dviter les embouteillages des retours sur la banlieue. Heureusement que Franoise est une couche-tard, comme moi et que nous supportons trs bien nos cinq-six heures de sommeil par nuit ! Certes, je vois peu les enfants pour le moment, mais il me reste les week-ends et les vacances. Mon projet est assez clair dans ma tte. Nayant pas le temps matriel de suivre une formation longue en immersion complte, ni mme par cours du soir ou par correspondance, je vais faire a moi-mme. Lobjectif est assez simple : minitier suffisamment lallemand dans les six mois qui viennent pour pouvoir soutenir une conversation courante Mon atout : la rgularit de ltude. Mes trajets automobiles quotidiens de dpart et de retour la maison seront dsormais consacrs ma leon du jour, sur le lecteur de cassettes de ma voiture. Et tous les samedis matin, je revisiterai en faisant des exercices crits. Quand jaurai un problme, Franoise maidera. Elle ma dj propos de me faire rviser tous les soirs des listes de vocabulaire technique et les conjugaisons les plus difficiles

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Elle ma dailleurs dj donn deux ides : 1 : partir une huitaine de jours en Allemagne avec les enfants aux prochaines vacances scolaires ; 2 : transformer lan prochain les cours de pr-initiation langlais que Laetitia (notre ane) a commencs cette anne en cours de pr-initiation lallemand. Cela sera sympa que lon puisse tous les trois (elle, sa mre et moi) parler allemand entre nous Pour le reste, je me suis achet un gros guide de voyage pour lAllemagne, que je compte potasser temps perdu sur la gographie, la culture, etc. Franoise aimerait aussi que je me plonge dans quelques romanciers allemands contemporains (traduits en franais bien sr), pour mimprgner , comme elle dit. Mais cela me semble un peu superflu, et je ne vois pas ce que cela mapportera par rapport au cours. Et puis il faut bien souffler un peu, non ? Questions sur le cas : 1. Que penser de son projet proprement dit ? Est-il cohrent ? Est-il vraisemblable ? Sur quels points devrait-il tre clairci, modifi, enrichi ventuellement ? 2. Quels sont les problmes de toutes natures auxquels Pierre Duchemin va devoir faire face pour mener son projet bien ? 3. Si vous tiez sa place, que feriez-vous concrtement pour mettre toutes les chances de votre ct ?

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Haute cole de gestion de Genve Cours de mthodologie Cas n 7 : L'histoire de Maria2

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Maria ouvrit dlicatement l'enveloppe, son cur battait un peu. De la lettre accompagne d'un volumineux contrat, elle ne retint que la phrase magique : Nous confirmons votre engagement . Elle s'assit, se laissa doucement envahir par la joie, puis empoigna le tlphone et annona la bonne nouvelle ses parents en Espagne. Elle allait travailler comme serveuse dans un htel restaurant de luxe, en Suisse. Lorsqu'on lui prsenta la brigade du restaurant, Maria pensa qu'elle ne parviendrait jamais retenir tous ces prnoms. Il y avait au moins quarante personnes, cuisiniers, plongeurs, ptissiers, serveurs, matres d'htel. De fait, l'htel Edelweiss comptait environ une centaine d'employs. La responsable de la brigade, la cheffe des matres d'htel, s'appelait Mme Catherine Chollet. C'tait une femme nergique, la cinquantaine, qui aimait rpter qu'elle en avait vu dans la vie. L'accent bordelais, haut perche sur ses talons, elle serra la main de Maria et lui dit avec un regard bienveillant : Tu verras petite, j'ai du caractre, mais je suis juste. Le premier mois, tout se passa bien. Maria apprit peu peu connatre ses collgues. II y avait Pedro, un Espagnol, avec lequel elle aimait converser durant les heures de pauses ; et puis Alberto, Christian, Chantal, Ahmed, Pierre, Kenza, Georges, un des matres d'htel, et bien d'autres encore. La plus sympathique, c'tait Christine, la rceptionniste. Toute petite et menue, sa tte boucle mergeait peine de derrire son bureau entre un bouquet de fleurs et, bien mis en vidence, la photo de ses trois enfants dans un cadre bariol. Lorsque Maria prenait son service, elle l'accueillait toujours avec un grand sourire et ne manquait pas de s'informer de tous les changements survenus dans l'htel : ainsi, le directeur financier avait une nouvelle coupe de cheveux et ne portait plus que des costumes clairs ; Stphane, l'apprenti cuisinier, avait russi ses examens, etc. Lorsque, tard dans la nuit, Maria, fatigue, s'installait dans sa voiture, elle avait pris l'habitude d'enclencher la radio, de se remettre un peu de rouge lvre, juste pour la route, et avant de dmarrer, elle clignait de l'il en se regardant dans le rtroviseur et dclarait haute voix : C'est super ! . Le stress dans la restauration, c'est normal, surtout dans un grand restaurant, et c'est mme plutt grisant. Ce mouvement de va et vient continu des clients, cette sensation d'tre toujours dborde, ce trop-plein de vie, c'est bien ce qui plaisait le plus Maria. Mais dans les mois qui suivirent son engagement, l'htel commena connatre des difficults financires. Chantal, une des serveuses, tait partie la retraite et n'avait pas t remplace, faute de moyens. II va falloir mettre les bouches doubles ! , avait annonc Mme Chollet l'quipe. Le climat tait devenu tendu, il y avait des bruits de licenciement. Maria comme ses collgues s'appliquaient d'autant plus. Ils travaillaient tous d'arrache-pied. A part Alberto qui, en courant avec ses plateaux, chantait Le travail, c'est la sant , plus personne n'avait le cur plaisanter.2

Source: Ethique EPGESC IRE, 1998 25

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C'tait un dimanche midi, jour de grande affluence, la salle manger tait bonde. Maria et Mme Chollet taient en cuisine affaires remplir les plateaux destins aux clients. Mme Chollet trempa plusieurs fois ses doigts dans un des plats avant de les pourlcher. C'est pas trs propre pour les clients ! , ne put s'empcher d'observer Maria qui tait une employe extrmement mticuleuse et consciencieuse. De quoi je me mle. Tu crois que j'ai le temps de manger! , rtorqua schement tout aussitt Mme Chollet. L'Espagnole, elle fait des histoires ! , s'tait plainte ce soir-l Mme Chollet Pierre, un des serveurs. Ce dernier regarda la cheffe des matres d'htel et rpondit spontanment, sans trop savoir pourquoi, car Maria n'avait jamais t dsagrable avec lui : C'est vrai, elle a des sautes d'humeurs. Elle n'a pas un caractre facile . C'tait prsent sr, Fatou, la serveuse du bar avait t licencie pour motif conomique. Quel sera le prochain ? , murmurait on dans tous les couloirs, car il y en aura d'autres. Maria ne prenait plus la peine de se sourire dans le rtroviseur, le soir, lorsqu'elle dmarrait. Elle ne pensait plus qu' une chose : dormir. Depuis l'incident en cuisine, l'attitude de Mme Chollet envers Maria avait sensiblement chang. Elle tait devenue plus froide, elle ne l'appelait plus par son prnom, elle disait Lopez . Lorsqu'elle avait pour la premire fois entendue Mme Chollet hurler : Lopez ! Trois cafs pour la deux ! , elle avait eu un sentiment d'indignation, mais elle n'avait pas os protester; aprs tout Mme Chollet, c'tait la cheffe. Et surtout, Maria avait peur de perdre son poste de travail. Cela avait mme fait rire Pierre qui avait ajout : Si tous les Lopez se tenaient par la main, il feraient le tour du monde ! . Il lui avait sembl que ses collgues s'taient distancis d'elle, ils la saluaient peine, enfin elle ne savait pas trs bien. Ce qui est sr, c'est qu'elle se sentait mal. Un soir, Maria avait d rassembler au moins quatre tables, pour permettre toute une quipe de voyageurs trangers de s'asseoir. Ils taient tous l, prsent, aprs avoir travers le monde entier, chemises lgrement ouvertes, cravates dnoues, dtendus, heureux, bavards. Maria et Mme Chollet, cte cte, debout, prenaient les commandes, lorsqu'un des clients espagnols posa les yeux sur le fin profil de Maria et ne put s'empcher de s'exclamer dans un mauvais franais Elles sont belles, les filles de mon pays ! . Cela avait dur peut tre dix secondes, mais, c'est sr, dans le regard que Mme Chollet adressa Maria, il y avait eu du mpris. Maria tressaillit de peur : II ne pouvait pas s'exprimer en espagnol , pensa-t-elle. Le soir mme, Mme Chollet attribua la station la plus faible Maria, celle o il y avait le moins de clients, o elle aurait le moins de chance d'avoir des pourboires. Et elle la renvoya plus tt : C'est calme, Lopez, fiche le camp ! . A peine tait-elle partie qu'elle se retourna vers Pierre, Kenza et Pedro et dclara : Bon dbarras, ce soir, on sera tranquilles . II s'en suivit toute une conversation au sujet de Maria. Elle tait ttue, pas srieuse, elle passait son temps faire du charme aux clients, elle tait trop mticuleuse, elle faisait des histoires pour rien, bref elle les empchait de travailler, et ce ntait pas le moment. Depuis ce soir-l, l'ambiance n'tait plus la mme. Mis part le sourire de Christine, c'est tout juste si on saluait Maria lorsqu'elle prenait son service. Mais c'est l'affaire de la caisse qui fit tout basculer. Maria connaissait son mtier, d'ailleurs elle avait commenc l'ge de 26

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treize ans ; comment pouvait-il en tre autrement ? Elle n'avait jamais eu de problmes de caisse. Lorsqu'elle typait, elle se concentrait, elle redoublait d'attention. Chaque serveur avait sa propre caisse ; part le matre d'htel, personne ne pouvait typer sur celle d'un autre. La caisse devait tre vrifie au dbut et la fin de la journe et elle devait tre imprativement, chaque fois, juste. II manque dix francs ! avait dplor Maria, aprs avoir recommenc maintes fois la lecture de la caisse. La journe avait t rude, c'tait en plein t, juste avant la fermeture. La brigade tait sur les genoux. Recommence ton calcul ! , ordonna Mme Chollet qui, ce soir-l, tait de service. Rien faire, il manque dix francs , se plaignit encore une fois Maria. Alors c'est que tu as fait une erreur d'encaissement ! . Mais c'est impossible, je fais tellement attention , protesta Maria. Tu te crois ne de la cuisse de Jupiter ? Tu te crois parfaite, au-dessus des autres ? . Les autres s'taient rassembls et faisaient prsent un cercle autour de Maria. Et cette fois, elle craqua et en pleurs, elle osa affirmer: L'erreur, c'est peut tre aussi vous qui l'avez commise, vous avez la cl de la caisse, non ? . Pedro secoua la tte : Tu nous fais perdre notre temps ! Et puis, c'est gonfl d'accuser Catherine, cela fait trente ans qu'elle travaille dans cet htel ! . Kenza ricana et dit : a change pas, elle fait toujours des histoires pour rien . Mme Chollet, rouge de colre conclut On rglera cela demain en prsence du directeur gnral . Cette nuit-l, Maria allonge dans son lit, visualisa et visualisa cette scne ; elle ne parvenait pas s'endormir. Elle se souvint alors que sa grand-mre, lors de sa dernire visite, avait laiss une bote de somnifres. Elle en prit un. II fallait tre en forme le lendemain. Nous sommes runis la demande de Mme Chollet , annona le directeur gnral Maria. Vous avez des problmes relationnels avec elle ? Expliquez-vous ! . Maria, vitant le regard de Mme Chollet, murmura doucement et c'est peine si on pouvait l'entendre : La caisse hier soir n'tait pas juste, il manquait dix francs, et continua-t-elle il me semble que depuis quelque temps mes collgues ne me font plus confiance . Ecoutez Mme Lopez, l'htel, pour cette fois, remboursera ces dix francs , et avec un sourire il ajouta Soyez plus souple et cooprative, plus gentille avec Mme Chollet et avec vos collgues . Depuis ce jour-l, il n'y avait plus une nuit o Maria ne prenait un somnifre pour s'endormir. Chaque matin, elle apprhendait de se rendre son travail. Maintenant, plus personne ne lui parlait, sauf bien sr Christine. Elle avait l'impression d'tre une pestifre. Si seulement je pouvais arrter quelque temps , songea-t-elle. Elle avait dj pris ses vacances. Physiquement, elle se sentait mal, sans trop savoir o exactement, aussi elle dcida d'aller voir un mdecin. A part un peu de fatigue, vous tes en pleine forme ! , dclara le mdecin aprs l'avoir examine. Vous avez des ennuis ? . Elle aurait voulu lui expliquer, mais elle ne savait vraiment pas comment le dire ; peut-tre, il ne croirait pas et peut-tre mme que ce qu'elle venait de vivre n'tait rien, qu'elle s'coutait trop. C'est pourquoi, elle se contenta d'expliquer: Il y a des tensions normes au travail, je suis puise . Le mdecin secoua la tte, mchouilla son stylo, puis demanda Quelle est votre profession ? . Je suis serveuse , rpondit-elle. II soupira, regarda les cernes qui creusaient ses yeux et dit gentiment : Bon, c'est vrai, un peu de repos vous fera du bien ; une semaine cela vous va ? . 27

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Maria n'tait pas sortie de chez elle, durant cette semaine. Elle n'arrtait pas de ressasser tous ces derniers vnements. Le mieux serait peut-tre que je change d'emploi, mais je ne trouverai pas facilement un poste si bien rmunr , pensa-t-elle. Elle aurait voulu en parler ses parents, mais ils taient loin, ils avaient leurs problmes, aussi elle renona. Les premiers mots que lui dit Pierre son retour furent : Pendant que Madame tait malade, on a d bosser deux fois plus . Maria tait d'abord reste silencieuse. Elle se sentait un peu coupable. Tu sais, je prfre travailler qu'tre malade lui rpondit elle. De chien, c'est pas possible ! , hurla Mme Chollet lorsqu'elle entra dans la cuisine, L'Espagnole a fait une erreur de commande. Le client est furieux, pardi, la place d'une sole meunire, il se trouve avec un steak frite ! . Elle se planta devant Maria et vocifra : Tu as la tte o ? Cela ne suffit pas d'avoir une jolie tte, il faut l'avoir pleine, tu ne vas pas aller loin comme cela, je te le garantis . Maria reconnut l'erreur ; c'est vrai pour la premire fois de sa carrire, elle s'tait trompe. Elle s'excusa plusieurs fois : Je ferai plus attention la prochaine fois, je suis un peu fatigue en ce moment ! . II lui semblait qu'elle ne savait plus travailler, qu'elle n'tait plus bonne rien. D'un ct, Mme Chollet avait raison de lui donner systmatiquement les stations les plus faibles. Allonge sur son lit, Maria avait tant lu et relu la lettre de licenciement qu'elle avait reu que les mots semblaient danser devant ses jeux : ... caractre difficile ...mauvaises performances... pas d'esprit d'quipe... . Elle n'avait plus envie de rien. Je ne bouge plus , se disait-elle en remontant ses couvertures. On tait en dbut d'aprs-midi et elle avait dj aval deux tranquillisants. Elle se remmora toute l'affaire. Elle se sentait impuissante, vide. Elle essaya, pour se reprendre un peu, de penser ses parents, son village en Espagne, lorsque le tlphone sonna. C'tait Christine, Bonjour Maria, je t'appelle de chez moi ! . Tout aussitt la communication fut interrompue. Puis de nouveau, le tlphone sonna, C'est le petit, mon petit diable, il a dcroch la prise , expliqua Christine en riant. Je voulais voir comment tu vas et puis surtout je voulais te dire que tu pouvais compter sur moi ; je suis prte t'aider. Tu sais, une rceptionniste, elle voit et entend tout, je tmoignerai. On a vraiment t injuste ton gard et moi j'aime la justice. Je suis prte parler au directeur gnral ou, si tu prfres, on peut aller consulter un syndicat, je t'accompagnerai. Tu le retrouveras ton poste. On se voit demain ? On organisera la dfense ! . Maria sourit. Lorsqu'elle raccrocha, elle tira les rideaux, remonta les stores et dit haute voix en clignant de l'oeil au soleil : Demain, 15h30, rendez-vous avec Christine, au caf du Commerce . Questions sur le cas : 1. Quels problmes sont l'origine du mobbing dont il est question dans ce rcit ? 2. Quelles sont les diffrentes tapes, faits qui permettent de confirmer que Maria est bien victime de mobbing ? 3. Dans quelle mesure Maria est-elle une victime sacrificielle (thse de Ren Girard) ? 4. Comment pourrait se dnouer cette histoire ? 5. Comment prvenir de type de situation ? 28

Haute cole de gestion de Genve Cours de mthodologie Cas n8 : la runion

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Face aux difficults du march, et son encadrement qui lui reproche de ne pas prendre assez dinitiatives et de ne pas assez couter le terrain, le directeur dexploitation dune socit de services dcide dappliquer ses cadres un remde la mode : la concertation, pour les faire participer, les faire adhrer et les motiver la vie de la socit. M. Poulain a pris les grands moyens : deux jours pleins dans une luxueuse rsidence au cur de la fort de Rambouillet pour tablir ensemble un plan stratgique pour les cinq ans venir : volution du march, forces et faiblesses de la socit, atouts, opportunits saisir, plans dactions, etc. La veille au soir, les cadres arrivent au rendez-vous, quelque peu surpris. Cest la premire fois quune telle runion est organise. La socit deviendrait-elle malade de la parlotte ? Les cadres sont-ils devenus dun coup si intelligents quon prenne la peine de demander leur avis ? Que peuvent-ils exprimer dautre que ce quils disent quotidiennement depuis plusieurs mois ? La runion commence, anime par M. Poulain en personne. A lissue de la prsentation de lobjectif poursuivi, il propose de laisser la parole un volontaire. Silence pais. Personne ne bronche. Bon, reprend le directeur. a commence bien. Je vais vous montrer ce quoi moi javais pens et nous allons en discuter. Ds le premier transparent sur ltat du march, des remarques se font entendre : Pas daccord ! Je ne crois pas que a voluera ainsi . Vers la fin de lexpos, chaque transparent est comment par une srie de Oui, mais vous oubliez un point essentiel . Ce point tant dailleurs aussitt contest par une autre partie de lassemble. A lissue de la premire journe de runion, M. Poulain constate que le travail na pas beaucoup avanc. La discussion a vite tourn aux principes gnraux. Et chacune de ses ides a immdiatement t dmolie par une majorit dintervenants. Pour amliorer la situation, M. Poulain recourt au travail en groupe pour la deuxime journe. Malheureusement, les rsultats ne sont pas meilleurs. Chaque sous-groupe prsente ses plans pour les cinq ans venir. Les autres se font un plaisir de descendre systmatiquement chaque point nonc aux cris de Oui, mais . La runion tourne la grande rigolade. On croirait voir un stand de tir o les pigeons dargile sont envoys et chacun samuse tirer dessus. Bientt, les clats de rire, la drision deviennent la rgle. Alors, M. Poulain, qui bouillait dune rage intrieure mal contenue depuis de longues minutes, demande la parole. Les participants se taisent et le voient qui, pendant trois ou quatre minutes de silence total, fait de visibles efforts sur lui-mme pour se calmer. Enfin, cest dune voix sourde, presque dtache quil annonce : Messieurs, il est quatre heures. La runion est termine. Merci dy avoir particip. Simplement, je voudrais vous faire noter deux petites choses : au prix o nous sommes tous pays, je pensais pouvoir rcolter aprs deux jours de travail, une somme de rflexion qui nous aurait aids affronter lavenir. Eh bien franchement, eu gard linvestissement, je dirai que je nen ai pas pour mon argent. Aprs ces deux jours, je nai rien, ou presque rien. 29

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La deuxime chose, cest que jai jou le jeu de la concertation. Jai voulu entendre, et tenir compte, de vos ides et de vos avis. Or, vous ntiez daccord sur rien sauf dtruire les ides du voisin, ou les miennes. Ce nest pas trs rassurant sur le niveau des cadres de cette maison, ni sur lavenir. Je ne vous cache pas ma profonde dception. Merci, Messieurs. Un grand silence suivit cette remarque. Les cadres sont vexs, tristes ou en colre, selon leur caractre. Tous sont malheureux et mcontents. Aprs le dpart de Poulain, ils vont boire un dernier verre et commentent la sortie du patron : Cest toujours la mme chose, il veut avoir notre avis et ds quon le donne, il nest pas content. Cest vous dgoter de participer. On nest pas des moutons, quand mme on est des cadres Et chacun sen va en pensant : Evidemment, Poulain est techniquement plus fort que nous et nos avis sont faibles mais Poulain, en tout cas, il est faible pour la concertation . Questions sur le cas : 1. Pour quelles raisons cette runion a-t-elle t infructueuse ? 2. Du ct de Poulain, quelles actions possibles et dmarches envisageables pour que de telles runions ne se reproduisent plus ? 3. Du ct des cadres, quelles actions possibles et dmarches envisageables pour que de telles runions ne se reproduisent plus ?

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Haute cole de gestion de Genve Cours de mthodologie Cas n9 : Mme Rose et Ludi-Ludo

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Mme Rose travaille dans une petite manufacture de jouets en bois depuis bientt vingt-cinq ans. Cette manufacture sappelle Ludi-Ludo. Mme Rose na pas son pareil pour travailler avec un ciseau bois, une lime ou un marteau pour construire des petites voitures ou des poupes en bois. Elle aime son travail, car il lui permet duser de son adresse manuelle. Toute sa vie, elle sest efforce damliorer sa technique de coupe pour que le rsultat de son travail soit toujours plus propre et parfait. Depuis toute petite, son rve tait de construire des jouets pour enfants. Avec ses jouets, elle savait que les petites filles et les petits garons se construiraient des histoires, se btiraient un monde imaginaire. Participer llaboration de ce monde irrel la remplissait de joie. Comme son patron, M. Lechef, avait appris apprcier son travail, il lui avait donn toujours plus de responsabilits. Mme Rose dessinait et construisait elle-mme de nouveaux jouets. Lui reconnaissant des talents de couturire, il lui avait propos de broder des robes pour les poupes. Au sein de lentreprise Ludi-Ludo, Mme Rose a pu dvelopper tous ses talents et spanouir pleinement, car elle trouvait son travail trs vari. Lentreprise Ludi-Ludo ne comprenait quune quinzaine demploys. Chaque employ avait son propre matriel et ralisait le jouet de bout en bout. Certains prfraient construire des voitures, dautres de petites maisons ou dautres encore, comme Mme Rose, des poupes. Seulement, M. Lechef, patron de lentreprise, tait un joueur invtr. Il aimait par-dessus tout se rendre au casino et jouer des sommes mirobolantes. Un jour, ce qui devait arriver arriva, M. Lechef perdit toute sa fortune et tous ses biens. Il ne lui restait plus que sa petite entreprise Ludi-Ludo. Comme il avait contract de nombreuses dettes depuis quil jouait, il dut se rsigner, la mort dans lme, vendre sa manufacture de jouets la multinationale du jouet Nosjouets international dirige par le richissime M. Feldrocker. M. Feldrocker sest empress dacheter Ludi-Ludo. En effet, il envisageait de lancer sur le march du jouet un nouveau modle de poupes en plastique. Il se dit que Ludi-Ludo pouvait tre financirement rentable moyennant quelques modifications. Il possdait dj huit entreprises de jouets, ayant chacune sa spcialit, mais il nen avait encore aucune qui fabriquait des poupes en plastique. M. Feldrocker runit les quinze employs de Ludi-Ludo et leur tint le discours suivant : Mes amis, je suis heureux dentreprendre une collaboration avec vous. Je suis heureux de vous annoncer une bonne nouvelle ; tous les actuels salaris garderont un emploi au sein de Ludi-Ludo. Comme je suis le nouveau propritaire de Ludi-Ludo et que jai une vision mondiale du march du jouet, jai dcid que cette manufacture deviendra lentreprise de mon groupe qui produira les poupes Crsa. Ainsi, mes parts de march dans le secteur du jouet augmenteront. Mes designers ont dessin trois varits de poupes Crsa. Ces poupes seront en plastique. . Mais, Monsieur Feldrocker, je nai pas lhabitude de couper et de tailler dans le plastique, signale Mme Rose, je ne sais que travailler le bois. Comment vais-je faire ? 31

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Ne vous faites pas de soucis, rpond M. Feldrocker, jai pens tout ! Des machines se chargeront de fondre chaque partie de la poupe. Une fois fondues, votre travail consistera assembler ces parties et les vtir avec des vtements qui sont fabriqus dans mon entreprise dhabits pour poupes situe sur un autre continent. Si je vous comprends bien, des machines remplaceront mon travail qui ne constituera plus quen assemblage des parties des poupes et les habiller avec des vtements identiques, rflchit Mme Rose haute voix. Votre travail quotidien sera en effet modifi. Quoi quil en soit, vous pouvez tre heureuse de prserver votre emploi ! Je connais de nombreuses entreprises o presque tous les postes ont t supprims au profit de machines, surtout dans votre branche, surtout dans votre rgion. Les sourcils froncs, linquitude se lisait sur le visage de Mme Rose Questions sur le cas : 1. Quel est le problme de Mme Rose ? 2. Comment M. Feldrocker aurait-il pu sy prendre pour tmoigner plus de comprhension envers Mme Rose ? 3. Quelles perspectives soffrent Mme Rose ?

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