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Pratique du lavage gastrique

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Page 1: Pratique du lavage gastrique

PRATIQUE DU LA VAGE GASTRIQUE

HERICORD, L. LUQUEL

Le lavage gastrique a pour but d'6vacuer, grfice un mouvement d'eau, les m6dicaments de l'estomac (pris dans un but d'intoxication) qui s'y trouvent encore au moment ota il est pratiqu~ puis 6ventuellement d'y introduire du charbon activ6 ou une purgation.

Cette m~thode, d~crite pour la premi6re lois par Kussmaul en 1870, est consider6e thfioriquement comme la m6thode la plus sftre d'6vacuation des toxi- ques medicamenteux ing6r~s mais l'inocuit~ et l'effi- cacit~ du proc6d6 restent d6batms [1]. I1 convient donc de discuter les pr6cautions dont il faut s'entourer ainsi que les moyens ~ mettre en oeuvre pour am6liorer cette manoeuvre qui reste complexe par rapport d'autres moyens de vidange gastrique. Le lavage gas- trique reste une manoeuvre complexe qui nficessite d'abord la pose d'une sonde gastrique. L'introduction de cette sonde se Iait actuellement par la bouche [1, 3-4]. Elle est poussfie, avec pr~caution, dans le pharynx puis dans l'oesophage en s'aidant 6ventuel- lement des mouvements de d6glutition du patient s'il est conscient. Cette pause est le plus souvent aisfie en raison de la taille et de la rigidit6 de la sonde dont la position intragastrique est d'habitude v~rifi6e par une injection d'air dont on recueille le bruit au niveau de l'fipigastre mais aussi par le reflux du liquide gastrique.

Le lavage, lui-m6me, consiste ~ introduire par gra- vit~ une certaine quantit6 d'eau darts l'estomac et recueillir par siphonnage ce liquide avec les d6bris alimentaires et toxiques qu'il contient. La manoeu- vre est ensuite r~p~t6e, un certain nombre de lois. Les quantit6s d'eau injectees ~ chaque cycle sont pr6- cises (4 ml/kg/cycle) et ne devraient pas dfipasser 200

300 ml chez l'adulte et 50 ~ 100 ml chez 1'enfant car au-del~, il existe un risque de distension du pylore et donc de passage de toxiques non ~vacu6s vers le duod6num [1, 6].

Service des Urgences, H6pital Saint-Antoine, 184, rue du Fau- bourg Saint-Antoine, F-75012 Paris.

Une automation de ce cyle [5] a ~tfi rendue possi- ble. Les quantit~s de liquide recueillies doivent ~tre

peu pros figales aux quantit~s administrfies. Si elles sont moindres, le lavage risque d'etre inefficace (obs- truction de la sonde) et dangereux avec un risque pos- sible d'intoxication par l'eau si l'on utilise de l'eau non salve (passage d'eau hypotonique darts le duodenum).

Les pr6cautions ~ mettre en oeuvre tiennent aux conditions g~nfirales du lavage gastrique, ~ l'instal- lation et ~ la surveillance du patient :

- - il semble bien admis que le lavage gastrique doit Ctre fair en milieu hospitalier, dans un local off il existe un mat6riel de r~animation pr~t ~ l'usage [2] et par tan personnel entraTnfi. En pratique, deux per- sonnes sont n~cessaires dont une efiectue le lavage tandis que l'autre reste proche du patient. L'intro- duction d'un appareillage automatique [5] permettrait

une seule personne de pratiquer ce geste ;

- - l'installation diff6re selon l'fitat de conscience du patient. Si celui-ci est vigilant, apr~s explication de la manoeuvre pour obtenir route sa cooperation [2], il peut ~tre install~ en position assise ou semi- assise ; mais pendant la pose de la sonde gastrique, l'immobilisation de ses poignets est souvent n~ces- saire [7].

Chez un patient comateux, le lavage gastrique ne se conqoit qu'apr~s mise en place d'une voie vei- neuse, d'une intubation et souvent d'une ventilation artificielle. La pose de la sonde gastrique nficessite parfois de dfigonfler l~g~rement le ballonnet de la sonde d'intubation qui, pour certains, doit etre ensuite mod6r~ment surgonflfi pendant le lavage [3]. Le patient peut etre en dficubitus dorsal mais le dficu- bitus latfiral du c6t~ gauche [8] est parfois jug~ pr~- ffirable, afin que les toxiques se collectent dans le fundus, avec la tate en d6clive pour fiviter une aspi- ration.

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Pendant toute la dur6e du lavage, quel que soit son 6tat de conscience, le patient est particuli~rement surveill6 par un mfdecin en raison de la survenue possible de complications qui sont rares mais parfois redoutables [2] :

- - digestives et traumatiques : souvent minimes, elles peuvent ~tre endoscopiquement visibles, ulcfi- r fes ou n6crotiques ;

Des perforations cesophagiennes out 6t6 d6crites. Elles sont attribu6es ~ la rigidit6 habituelle des sondes ;

- - r e sp i r a to i r e s : les inhalations bronchiques sont plut6t le fait d 'une mauvaise indication ou d'un d6faut de surveillance. La survenue de broncho- spasme a 6t6 observ6e ;

-- cardiovasculaires : une r6action adr6nergique avec tachycardie et HTA est fr6quente mais est sans cons6quence sur la poursuite du lavage. Un malaise vagal est rarement observ6. Un arret cardiaque est possible surtout au cours de l'6vacuation de drogues psychotropes ou cardiotropes ;

-- m6taboliques [2, 9] : il s'agit surtout d'hypona- tr6mie, cons6quence de l'absorption d'eau non sal6e. Les enfants y sont partictfli~rement exposfs. La techni- que peut ~tre mise en cause en cas de lavage avec de grandes quanfit6s unitaires et un dfifaut darts le recueil.

Ces risques incitent ~ 6tre particuli~rement atten- tif aux indications de la m6thode : 6vacuation prin- c ipalement des m6dicaments potent ie l lement toxiques et aux contre-indications que sont :

-- les d4rivfs p~troliers qui exposent aux risques d'inhalation et qui peuvent ~tre 6vacufs seulement apr~s intubation ;

- - les produits moussants qui exposent aux ris- ques d'asphyxie et qui doivent aussi ~tre 6vacu6s, si n6cessaire, apr&s intubation ;

-- les caustiques : dont l '4vacuation par sonde gastrique fait courir un risque important de perfora- tion oesophagienne.

L'efficacit~ du lavage gastrique est li6e : - - au mat6riel, et plus particuli~rement, ~t la

taille de la sonde gastrique [4, 6]. I1 semble que la sonde nasogastrique puisse provoquer les m~mes complications et soit moins efficace que les sondes de plus grand diam~tre en raison de la taille des d6bris alimentaires ou m6dicamenteux. La plupart des anteurs s'accordent sur la n6cessit6 d'utiliser une sonde gastrique de gros calibre : 36 gt 40 F chez l'adulte (12 ~ 13,2 mm de diam~tre) et 16 ~ 26 F chez l 'enfant (5,3 ~ 8,6 mm), qu'il est donc n6cessaire d'introduire par la bouche. En effet, il a 4t6 montr~ qu'avec l 'augmentation du calibre de cette sonde l'efficacit6 de la vidange gastrique par rapport ~t ceUe obtenue avec les vomissements provoqu6s [8, 10], s'am61iore. Le materiel utilis6 est classiquement un tube en caoutchouc de Faucher ou bien en silastic plus souple ;

R#an. Urg., 1993, 2 ( 2 bJs), 199-201

-- ~ la qualit6 de l'eau utilis6e : qui peut ~tre l'eau du robinet [1, 4, 5]. Mais la possibilit~ d'une intoxica- tion par l'eau [9], rare et survenant plut6t chez l'erffant fait pr4ffrer ~ certains auteurs [3, 4] l'ufilisation addi- fionn6e de sel (de 4 ~ 9 gr/l). Sinon, il n'existe pas dans la litt6rature [5, 11] d'6tude contr616e qui permette d'affirmer la n6cessit6 d'utiliser de l 'eau sal6e.

L 'eau doit ~tre, de pr6f6rence, t i lde [3, 5] de faqon 6viter une hypothermie, si de grandes quantit6s en

sont utilis~s. Mais l'emploi d 'une eau plus chaude (45 %) a pour avantage de diminuer le p6ristaltisme et d 'augmenter la dissolution des agglom6rats m6di- camenteux [11].

Aussi, Mac Dougal et Mac Lean recommandent, en association avec le massage @igastrique, de l'uti- liser pour quelques cycles, quand le lavage ~ l 'eau t i lde ne ram~ne plus de d4bris m6dicamenteux [12] ;

- - ~ la quantit6 d 'eau utilis6e : la plupart des auteurs [1, 6] recommandent de laver l 'estomac jusqu'5 ce que l'eau de lavage revienne , claire ,. Des quanti tfs variables allant de 2 g 100 1 ont ainsi 6t6 rapport6es. Pour certains, cependant [7, 10], le lavage, meme si le liquide recueilli est rapidement , clair ~, ne devrait pas etre inf6rieur ~ 10 1, dans la mesure of 1 il n 'est pas 6vident que le seul aspect du lavage soit suffisant pour affirmer qu'il ne persiste plus de toxiques intragastriques ;

- - au massage 6pigastrique : certains m~dica- ments comme l'aspirine, les barbitufiques, le mepro- bamate ont tendance ~ former des agglom6rats dont il est difficile de d6barrasser l 'estomac.

Aussi, Bartecchi [13], a d6crit tree technique pour tenter de les briser. Quand le lavage gastrique selon la technique habituelle, ne ram~ne plus rien, la sangle abdominale est d6tendue, en repliant les cuisses sur le bassin. Dans cette position, un massage vigoureux et rythmique de l '@igastre est alors pratiqu6, asso- ci6 ~ quelques cyles de lavage ~ l 'eau chaude. I1 est possible ainsi de recueillir encore des m4dicaments ;

-- ~ la r@6tition du lavage [14] : cette techni- que qui consiste ~ laisser en place la sonde gastrique et & aspirer r6guli~rement l'estomac ne doit ~tre envi- sag~e que dans les intoxications graves.

Mais il reste ~ montrer par des 6tudes contr61~es que les quelques modifications apport6es au lavage gastrique sont efficaces et il fant rappeler que ce geste qui n'est pas sans risques doit ~tre, dans sa pra- tique, bien codifi6.

R 6 f e r e n c e s

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R#an. Urg., 1993, 2 (2 bis), 199-201