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Prise en charge des douleurs abdominales de l’adulte aux Urgences

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J Chir 2006,143, N°1 • © Masson, Paris, 2006

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Mise au point

Prise en charge des douleurs abdominales de l’adulte aux Urgences

L. Chiche 1, E. Roupie 2, P. Delassus 3

1. Fédération de Chirurgie Générale et Digestive, CHU Caen – Caen. e-mail : [email protected]. Département d’Accueil et de Traitement des Urgences, CHU Caen – Caen.3. Unité de la Douleur et des Soins Palliatifs, CHU Caen – Caen.

Correspondance : L. Chiche, Fédération de Chirurgie Générale et Digestive, CHU Caen, Côte deNacre, F 14000 Caen.

Résumé / Abstract

Prise en charge des douleurs abdominales de l’adulte aux UrgencesL. Chiche, E. Roupie, P. DelassusLa douleur abdominale, motif fréquent de consultation aux urgences, constitue le symptôme usuel auquel est confronté le chirurgien viscéral de garde. Il est important de connaître les bases de la physiopathologie de la douleur viscérale afin de mieux appréhender les caractéristiques de celle-ci, les douleurs projetées, et les diverses manifestations associées à cette douleur. Les causes de douleur abdominale sont très nombreuses : digestives, extra digestives, chirurgicales ou médicales. La prise en charge aux urgences doit donc être pragmatique et rapide. Elle repose sur l’interrogatoire et l’examen clinique qui vont définir la gravité du tableau, les éventuels premiers gestes à effectuer, les examens complémentaires à demander en priorité et l’orientation du patient. L’échographie est un examen rapide, simple et performant pour les pathologies biliaires et uro-gynécologiques, voire pour certaines pathologies digestives. Cependant les scanners de nouvelle génération ont une performance excellente, notamment pour les pathologies digestives et vasculaires. De la qualité et de la performance de la prise en charge initiale de ces abdomens aigus peut dépendre le pronostic du patient. Cette prise en charge doit aboutir à un traitement étiologique sans oublier la mise en route rapide d’un traitement symptomatique.

Mots-clés : Divers. Diagnostic. Traitement. Douleur abdominale. Urgence.

Management of adult abdominal pain in the Emergency RoomL. Chiche, E. Roupie, P. DelassusAbdominal pain is a commonplace reason for surgical consultation in the emergency department and is the the most common symptom which the digestive surgeon on-call must evaluate. He must understand the pathophysiologic basis of visceral pain and referred pain in order to appreciate its diverse manifestations. Abdominal pain can stem from many causes intestinal and non-intestinal, medical and surgical. Evaluation and management in the emergency department must be rapid and pragmatic; clinical history and physical examination should define the gravity of the case, direct the first diagnostic procedures and complementary examinations, and guide the therapeutic direction. Ultrasonography is a quick and effective diagnostic procedure in the diagnosis of biliary, urologic, and gynecologic pathologies; it can be useful for other digestive problems as well.The new generation spiral CT scanner gives excellent definition of digestive and vascular pathologies. The initial evaluation and management of the acute abdomen may determine the prognosis of the patient ; it should lead to prompt symptomatic relief and to a well-directed treatment appropriate to the diagnosis.

Key words: Miscellanous. Diagnosis. Treatment. Abdominal pain. Emergency.

Introduction

Les douleurs abdominales représententenviron 10 % des motifs de consulta-tion aux Urgences. Leurs causes sont

extrêmement diverses, souvent digesti-ves, parfois extra digestives, et peuventêtre des plus anodines aux plus graves.Leur prise en charge aux Urgences re-pose sur la clinique et constitue un chal-

lenge permanent afin de ne pas tomberdans deux écueils : d’un coté, laisserpasser une urgence vitale, et de l’autremultiplier des examens complémentai-res inutiles et onéreux pour des dou-leurs bénignes et résolutives (dans 30 à40 % des cas).

Avant d’aborder l’aspect pratique dela prise en charge d’un abdomen dou-loureux, il est indispensable de s’arrêtersur quelques bases théoriques. En effet,pour comprendre la douleur viscérale,ses différentes manifestations et causes,il est important de comprendre les méca-nismes physiopathologiques de celle-ci.Puis la prise en charge diagnostique etthérapeutique sera détaillée sachant que,dans ce contexte particulier des Urgen-ces, la démarche doit être rapide etpragmatique pour être efficace.

Bases théoriques

D’après la définition donnée par l’IASP(International Association for the Studyof Pain) la douleur est « une expériencesensorielle et émotionnelle désagréableliée à une lésion tissulaire existante oupotentielle ». Cette définition intègredonc une dimension sensorielle maiségalement affective et émotionnelle.Les mécanismes de la douleur sont trèscomplexes, mais quelques bases élé-mentaires peuvent être rappelées.

Mécanismes généraux de la douleur [1, 2]• Mécanismes nociceptifs (figure 1)

Pour qu’il y ait perception d’une dou-leur, il faut un stimulus douloureux,thermique, mécanique, ischémique ouchimique, et la mise en jeu de récep-teurs ou nocicepteurs. Les nocicepteurssont constituées par les terminaisons li-bres de fibres nerveuses périphériques,disséminées dans la peau, les muscles,

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les articulations, le péritoine ou les pa-rois des viscères. Ce sont les phénomè-nes inflammatoires qui modifient lasensibilité de ces récepteurs. Ces noci-cepteurs sont en effet aussi des chémo-récepteurs. La lésion tissulaire (isché-mie, distension, infection) libère dessubstances comme la bradykinine, l’his-tamine ou les prostaglandines qui vontsensibiliser les récepteurs et en prolon-ger l’activation.

Au niveau périphériqueÀ partir des nocicepteurs, le messagedouloureux est véhiculé par les fibresnerveuses périphériques de deux types :les fibres A delta faiblement myélinisés,rapides, et les fibres C non myélinisées,plus lentes. Ces fibres contenues dansles nerfs périphériques rejoignent lacorne postérieure de la mœlle par l’in-termédiaire des racines rachidiennespostérieures.

Au niveau médullaireAu niveau de la corne postérieure de lamœlle, se situent les relais spinaux avecdeux catégories de neurones spinaux :– les neurones nociceptifs spécifiquessitués dans les couches périphériques(couche 1), répondant à des stimulationspériphériques intenses correspondant àleur champ récepteur limité (fibres Adelta) ;– les neurones nociceptifs non spéci-fiques ou neurones convergents, situésdans la couche profonde de la cornepostérieure répondant à des stimula-tions mêmes légères et dont le champrécepteur est étendu. Ce sont ces neu-

rones convergents qui reçoivent desafférences de territoires aussi bien cuta-nés que viscéraux qui expliquent le phé-nomène de douleur projetée. Ainsi, en casd’agression d’un viscère, la celluleconvergente qui a l’habitude de recevoirdes messages de la peau dans le mêmemétamère ressent non la douleur viscé-rale propre, mais la douleur de la zonecutanéo-musculaire. Ainsi, la douleurde colique hépatique se traduit par unedouleur au niveau de la pointe de l’omo-plate.

Les axones de neurones nociceptifsde la corne médullaire croisent la lignemédiane pour se diriger de façon ascen-dante vers le cortex.

Au niveau du cortexIl existe quatre sites supra-spinaux oùsont décodés les messages avec libéra-tion d’hormones et interaction des mes-sages affectifs et émotionnels. Il n’y adonc pas qu’un centre cérébral de ladouleur mais de nombreuses aires cé-rébrales impliquées dans la sensationdouloureuse.

• Le rôle du système autonome

Ce système à l’étage abdominal est trèscomplexe.

Les fibres afférentes provenant desstructures viscérales sont des fibres nonmyélinisées conduites vers le systèmenerveux central par l’intermédiaire dunerf pneumogastrique, des nerfs splanch-niques, et des nerfs du système nerveuxautonome d’origine pelvienne. Il n’y a pasde centre spécifiquement et exclusive-ment autonome au niveau du système

Figure 1 : Physiopathologie de la douleur abdominale (Mécanisme nociceptif).Aδ (m, r) : fibre nerveuse périphérique myélinisée, rapide ; C (nm, 1) : fibre nerveuse périphérique non myélinisée, lente.

Aδ (m, r)

C (nm, l)

Thalamus VPL (sensoriel discriminant )Thalamus médian vers frontal (affectif )Hypothalamus (végétatif -stress)Complexe amygdalien (compréhension cognitive)

Système nerveuxcentral

Corne postérieur moelle

Neurones spécifiques

Neurones convergents

Douleur projetéeirradiation

Stimulus thermiquechimique , mécanique

ischémique

Recepteurs(Nocicepteurs)

Périphérie

Peau

Cartilage

Os

Péritoine

nerveux central. De plus, il existe unpremier niveau d’intégration central re-présenté par la mœlle épinière où desréflexes autonomes peuvent se mettreen jeu, réflexes purement médullairescomme la sudation, les variations de lapression artérielle, les réflexes de mic-tion ou de défécation.

Sur le versant efférent, le systèmenerveux autonome se subdivise en uncontingent sympathique et parasympa-thique.

Les stimuli douloureux peuventêtre véhiculés par le système nerveuxsympathique, en particulier la douleurprovenant des viscères abdominauxhauts de l’intestin jusqu’au côlon et sou-lagés par le blocage du plexus coeliaque.Le sympathique lombaire intervientpartiellement dans la transmission desdouleurs viscérales pelviennes. La miseen action de ce système sympathique etparasympathique entraîne des expres-sions aspécifiques de la douleur, commeles pleurs, l’augmentation de la fré-quence cardiaque et respiratoire, l’iléus,la vasoconstriction artériolaire avec re-distribution du flux sanguin.

Caractéristiques spécifiques de la douleur abdominale [2]• Intrication des systèmes nociceptifs et végétatifs

La douleur viscérale diffère nettementdes douleurs venant d’autres tissus (peau,os), par sa localisation plus vague, ses in-trications complexes entre le systèmesensitif et autonome, et l’importance desréponses émotionnelles qu’elle génère.

Les douleurs viscérales aiguës indui-sent, souvent par activation du systèmeautonome mais également via les voiessupra spinales, des modifications de lapression artérielle, de la fréquence car-diaque et respiratoire, mais aussi dutonus musculaire. Elles génèrent des ré-ponses émotionnelles, souvent intenses,intégrant le vécu ancien du patient.

• Notion de douleur reflexe et hyperalgésie

La douleur projetée est un élément im-portant de la sémiologie de la douleurviscérale, expliquée par le phénomènede convergence. Ces douleurs référéess’accompagnent également d’une hyper-algésie de la peau et des tissus profonds,de contractions musculaires à l’originedes signes classiques de défense et decontracture.

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Les viscères pleins (foie, pancréas,rate) sont insensibles, sauf lorsque leurcapsule est distendue. Les viscères creuxsont sensibles à la distension et à l’in-flammation (colique néphrétique ouhépatique). Les nocicepteurs localisésdans les parois viscérales ont un seuil deréponse à la distension variable.

Démarche diagnostique

La connaissance des mécanismescomplexes de la douleur viscérale nepeut que souligner l’importance del’accueil du patient dans l’ambiance,parfois chaotique, des Urgences.

Apport de la cliniqueL’interrogatoire et l’examen cliniquesont fondamentaux et permettent :– d’identifier la gravité du tableau :1) douleur abdominale avec signes degravité généraux, la super urgence (SU) ;2) douleur abdominale avec signes degravité locaux l’urgence vraie (UV) ;3) douleur abdominale a priori sans gra-vité immédiate l’urgence relative (UR).– de classer le type de tableau : 1) syn-drome péritonéal localisé ou généralisé ;2) syndrome occlusif ; 3) syndrome dou-loureux réactionnel à une cause extradigestive ou médicale ; 4) syndromedouloureux isolé.– d’évoquer la plupart des causes.

L’examen clinique est la base de tou-te la démarche

Cet examen doit être fait, noté etdaté (heure). Un tableau abdominalpeut être rapidement évolutif et il estimportant de réitérer l’examen pouren évaluer l’évolution spontanée ouaprès traitement.

• Présentation du patient : facteurs vitaux

Le premier objectif de l’examen est dereconnaître les signes de gravité géné-raux qui imposent une prise en chargesans aucun retard comme des signes dechoc, hémorragique ou autre, une dé-tresse respiratoire, une confusion ou undésordre neurologique aigu.

• Analyse du terrain et de l’anamnèse

L’interrogatoire du patient et de l’en-tourage familial, ainsi que la lettreéventuelle du médecin traitant, vontpermettre de réunir le maximum d’in-formations.

Âge et antécédentsAu cours de l’interrogatoire, il faut in-sister notamment sur les antécédentsvasculaires, les comorbidité métaboli-ques (diabète) et, bien sûr, les antécé-dents de la sphère digestive, notammentles antécédents chirurgicaux abdomi-naux.

Il faut rechercher un traumatismerécent qui n’est pas toujours spontané-ment rapporté et, à l’inverse, se méfierdes relations entre la douleur et un évé-nement considéré comme responsabledu tableau.

La liste de médicaments que prendle patient est une mine d’information,et parfois la clé du problème, surtoutchez des patients dont l’interrogatoireest difficile (prise d’anti-inflammatoires,d’antiagrégants plaquettaires, d’anti-coagulants, d’immunosuppresseurs, d’an-tiarhytmiques etc.)

Analyse de la douleurCinq points doivent être bien analysés :1) le mode d’installation et son évolu-tion : le caractère brutal et sans répitest un élément sémiologique impor-tant (perforation, colique néphrétique).L’augmentation de la douleur est unsigne de gravité ;2) l’intensité de la douleur, certes estsubjective, mais elle doit être évaluéepar une échelle analogique. Rappelonsque les douleurs les plus intenses sontcelles de l’ischémie et de la pancréatiteou de la colique néphrétique ;

3) le type de douleur : les mots man-quent souvent au patient qu’il faut aiderà décrire sa douleur. La douleur trans-fixiante, constrictive, est nettement plusinquiétante qu’une « brûlure » ou unepesanteur ;4) le siège de la douleur initiale etactuelle : l’abdomen peut être divisé en9 régions : l’épigastre, les deux hypo-chondres, les deux fosses iliaques,l’hypogastre, les deux flancs et la ré-gion périombilicale (figure 2). Chaquelocalisation correspond à plusieursdiagnostics à évoquer. Les irradia-tions doivent être recherchées : versl’épaule droite (foie, voies biliaires),postérieures (rétro péritoine, pancréaspar exemple), vers l’épaule gauche (irri-tation péritonéale, rate), vers les testicu-les (coliques néphrétique). À l’inverserappelons qu’une douleur épigastriquepeut être le signe d’un infarctus, unedouleur de l’hypochondre, d’une pleu-résie ou d’une pneumopathie.5) Les facteurs déclenchants ou apai-sants doivent être recherchés.

Recherche des signes associésL’interrogatoire et l’examen doivent re-chercher des modifications du transit,des vomissements, de la fièvre et desfrissons, ou tout autre signe, commeune toux, une éruption cutanée, etc.

• Examen clinique

L’examen clinique doit être completextra abdominal et abdominal : del’inspection (cicatrice, voussure, respi-

Figure 2 : Localisation de la douleur : approche diagnostique.

HCGHCD

épigastre

FID FIG

Flanc

droitFlanc

gauche

hypogastre

periombilical

Cholécystite*

Appendicite sous hépatique*

Pneumopathie

Epanchement Pleural

Foie cardiaque

Colique néphrétique

Pyélonéphrite*

Appendicite*

Pathologie gynécologique

Pancréatite

Epanchement Pleural

Sigmoïdite*

Colique hépatique

Ulcère

Pancréatite

Infarctus du myocarde

* Syndrome septique

En bleu pathologies médicales

Colique néphrétique

pyélonéphrite*

Globe urinaireHC : hypochondre, D : droit, G : gauche

FI : fosse iliaque, D : droite, G : gauche

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ration de l’abdomen) à la palpation, àla recherche de hernies, de défense oude contracture, d’empâtement lombaire.Les touchers pelviens doivent êtreréalisés à la recherche de masse ou dedouleurs.

Cet examen clinique définit la gra-vité du tableau et éventuellement le typede syndrome (occlusif, péritonéal) etpermet : 1) d’orienter le patient vers uneprise en charge chirurgicale plus oumoins rapide, ou médicale ; 2) de déci-der des premiers gestes à effectuer ; 3)de prescrire les examens complémentai-res les plus adéquats.

Si fondamentale que soit la clinique,il ne faut pas oublier qu’elle a ses limi-tes : il est illusoire de trouver des signesfrancs chez le grand obèse, ou le sujetatteint d’une pathologie neurologiquedégénérative, et la prudence s’imposedans l’interprétation du tableau cli-nique chez le patient diabétique, souscorticoïdes ou immunosuppresseurs.C’est notamment dans ce contexte quela biologie et surtout la radiologie sontimportantes.

Apport de la biologieLa demande des tests biologiques doitêtre orientée par la clinique et nécessitede connaître les valeurs prédictives po-sitives et négatives des différents tests.On peut ainsi distinguer : 1) les testsgénéraux, numération formule sanguine(NFS), ionogramme, C-réactive pro-téine (CRP), peu spécifiques mais trèssensibles et qui sont importants pourl’évaluation de la gravité du tableauclinique. Ce sont des marqueurs de l’in-fection, de l’inflammation, de la dés-hydratation, de l’hypoxie ; 2) les testsspécifiques, évaluant la souffrance d’unorgane ou le retentissement d’un évé-nement sur un parenchyme (tests decytolyse hépatique, amylasémie, lipasé-mie, béta HCG).

Au terme de cette approche initiale,l’attitude doit être pragmatique :

Soit il s’agit d’une SU (superurgence), la douleur abdominale s’ac-compagne de signes de choc. Il fautalors engager des mesures de réanima-tion et prendre en charge le malade envue d’une chirurgie, ou le placer en uni-té de soins intensifs ;

Soit il s’agit d’une UV (urgencevraie), la douleur abdominale s’ac-

compagne de signes locaux évidents(syndrome occlusif ou péritonéal), onsuspecte une appendicite, une cholé-cystite, une sigmoïdite, une hernieétranglée. La biologie préopératoireest dirigée en fonction de cette suspi-cion diagnostique. On discute desexamens radiologiques nécessairespour confirmer le diagnostic ou déci-der de la stratégie médicochirurgicale ;

Soit il s’agit d’une UR (urgence re-lative), la douleur abdominale ne s’ac-compagne d’aucun signe de gravité lo-cal ou général. Les questions àrésoudre sont : 1) le diagnostic est-ilfait, suspecté, ou indéterminé ? ; 2) faut-il hospitaliser le patient et pourquoi ? ;3) quel examen radiologique demanderet quand (en urgence ou en différé) ?

Apport de la radiologie [3, 4]

Aujourd’hui, les trois examens dispo-nibles en urgence de façon courantesont les clichés d’abdomen sans pré-paration (ASP), l’échographie et lescanner. La multiplicité des appareils etleur progrès (en particulier pour ce quiconcerne le scanner) ont incontestable-ment modifié et amélioré l’approchediagnostique. Le choix est guidé par letype de tableau :

Soit il s’agit d’une SU (super urgen-ce), il n’y a pas d’examen à envisager,

tout au plus un scanner, après réanima-tion, et si le patient est stabilisé ;

Soit il s’agit d’une UV (urgencevraie) ; selon les hypothèses et l’état dupatient on demande des clichés d’ASP,qui peuvent confirmer l’occlusion dugrêle ou le pneumopéritoine, une écho-graphie, qui peut confirmer la cholécys-tite, un scanner qui peut confirmer unesigmoïdite, etc.

Soit il s’agit d’une UR (urgence re-lative) ; l’échographie ou le scannersont à discuter, s’ils permettent de faireun diagnostic et d’éviter l’hospitalisa-tion, sinon cette démarche diagnostiquepeut être différée.

Il est fondamental de connaître lesperformances des différents examenspour faire des demandes justifiées et rai-sonnées :

• L’ASP permet-il un bon débrouillage ? [5]

Il doit être de bonne qualité pour êtreinterprétable et dans plus de 50 % desdouleurs, il est non contributif. Maisil peut, rapidement et à faible frais,confirmer un diagnostic clinique (corpsétranger, opacité sur le trajet de l’uretè-re, niveau colique de volvulus, d’occlu-sion du grêle (figure 3) ou du côlon(figure 4), montrer un pneumopéritoineet permettre une orientation chirurgi-cale rapide (figure 5).

Figure 3 : Cliché d’abdomen sans préparation : niveaux sur le grêle en faveur d’une oc-clusion sur bride.

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Figure 4 : Cliché d’abdomen sans préparation : niveaux sur le côlon en faveur d’un obstacle sigmoïdien.

Figure 5 : Cliché centré sur le thorax et les coupoles : volumineux pneumopéritoine (perforation d’ulcère duodénal).

Figure 6 : Échographie abdominale (sonde de 7,5 MHz) : aspect d’appendicite.

• L’échographie est indiquée en cas de… bonne indication, bonne performance, bon opérateur, bon rendement ! [6]

Les progrès des appareils et desradiologues permettent d’élargir lesindications de l’échographie déjà re-connue pour le les pathologies bi-liaires, urinaires et gynécologiques àd’autres pathologies comme l’appendi-cite (figure 6), les sigmoïdites. L’écho-graphie est d’autant plus rentable quel’on se trouve devant un patient nonobèse, compliant, présentant un syn-drome péritonéal localisé, une suspicionde pathologie uro-génitale, et que l’écho-graphiste de garde est expérimenté.

• Le scanner est-il la révolution de l’urgence ? [7, 8]

Les nouveaux scanners, multi barrettes,sont un progrès remarquable dans l’ima-gerie abdominale, permettant de fairetrès rapidement des diagnostics étiologi-ques précis (figures 7 et 8), de décidersans retard d’une intervention, d’éviterles laparotomies blanches ou inutiles, deredresser des diagnostics erronés (pa-thologies non digestives, vasculaires outhoraciques). De plus il permet d’éviterou de ne pas prolonger une hospitalisa-tion. Une étude, avec les scanners d’an-cienne génération avait déjà montré quela sensibilité de la clinique, associée auscanner était de 90 % versus 76 % pourla seule clinique [8]. Cependant il seraittechniquement et économiquement im-pensable (prix du scanner) de réaliser cetexamen pour chaque douleur abdomi-nale. Il faut donc que sa prescription soitréfléchie et justifiée. La communicationet la collaboration avec le radiologue estun point crucial qui permet de gagneren temps et en performance.

Les données épidémiologiques [9-12]Plusieurs études portant sur des sériesd’urgences abdominales ont été réali-sées dont la plus récente est un audit faità l’occasion du rapport de l’AssociationFrançaise de Chirurgie (AFC) deBouillot et Bresler [12] (tableau 1).

Depuis plus de 20 ans les choses ontpeu changé, en dehors de la baisse deprévalence de l’appendicite et de l’ulcèreperforé, et de l’augmentation des patho-logies urinaires. L’âge est un élémentd’orientation important : selon la classed’âge, on observe des prévalences très

a b

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Mise au point

Figure 7 : Scanner : a) coupe abdominale sus mésocolique : petit pneumopéritoine, entouré (perforation colique) ; b) coupe pel-vienne (sigmoïdite diverticulaire).

a b

Figure 8 : Scanner : a) occlusion colique ; b) sténose sigmoïdienne.

a b

Tableau 1

Auteurs[Références]Année

Wilson et al.[9]1977 De Dombal[10]

1979

AURC et ARC[11]

1981

Bouillot et Bressler[12]

2004

Nombre de cas 991 6097 3772 953DANS* 53,3 % 43,0 % 22,0 % 34,8 %Appendicite 18,8 % 24,1 % 26,0 % 7,5 %Cholécystite 7,0 % 8,9 % 10,0 % 6,1 % + 1,5 % colique hépatiqueOcclusion Intestinale Aiguë 3,2 % 4,0 % 9,0 % + 3,0 % (hernie) 6,7 % + 3,4 % (hernie)Colique néphrétique 5,8 % 2,8 % 4,0 % 11,0 %Ulcère perforé 2,8 % 2,8 % 4,0 % –Pancréatite aiguë 1,7 % 2,3 % 4,0 % 4,3 %Diverticulose colique 1,4 % 2,1 % 2,0 % 3,8 %Pathologie gynécologique 3,2 % – 7,0 % 6,1 %Autres diagnostics 1,3 % 9,3 % 6,0 % 6,0 %

*DANS : douleur abdominale non spécifiée (aucune cause n’est trouvée).

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différentes des différents diagnostics.Avant 30 ans l’appendicite et lesaffections gynécologiques sont, avecles douleurs abdominales non spécifiées(DANS) les pathologies les plus fré-quentes. À l’inverse, après 70 ans, lesDANS sont rares et le diagnostic les plusfréquents sont les hernies étranglées, lesanévrysmes rompus, les cancers, lessigmoïdites, les cholécystites et les péri-tonites [12]. Plus le patient est âgé plus lapathologie est organique et souvent chirur-gicale.

Les valeurs prédictives positives del’examen clinique sont supérieures à70 % pour l’appendicite, la coliquenéphrétique, la pancréatite, la sigmoïdi-te et la hernie étranglée (90 % pour ces2 derniers diagnostics). Elle sont mé-diocres pour les coliques hépatiques, lesulcères, les occlusions. Cependant aprèsexamens complémentaires, les valeursprédictives positives sont supérieures à80 %, sauf pour l’appendicite (74 %),les péritonites (66 %), l’occlusion, et lesaffections gynécologiques.

Conduite à tenir pratique

Les étapes de la conduite à tenir doivent suivre un plan simple [13]• Éliminer une super urgence

Il s’agit le plus souvent de douleurs dif-fuses, avec au premier plan (ou associé)des signes de retentissement généralinquiétants. Ce diagnostic de superurgence est donc réalisé par l’examenclinique (signes de choc, d’hémorragie,confusion, détresse respiratoire, anurie,etc.) et par la biologie (déshydratation,anémie, acidose, insuffisance rénale).

Selon le contexte et l’examen ab-dominal, le diagnostic étiologique estparfois évident, imposant une chirur-gie immédiate, ou peut être facile-ment confirmé par un scanner en ur-gence.

Les principales causes sont la gros-sesse extra utérine rompue, ou une autrecause d’hémopéritoine, l’anévrismerompu, l’occlusion et la péritonite, vuestardivement ou sur terrain fragile(enfant, vieillard, immunodéprimé),l’ischémie mésentérique ou la nécrosecolique, la pancréatite aiguë nécrotico-hémorragique.

Ces diagnostics imposent la mise enroute de mesures de réanimation immé-diate et, pour la plupart des pathologies,une intervention chirurgicale dont les

résultats sont souvent aléatoires, dépen-dants de l’état du patient à l’arrivée, dela rapidité de la prise de décision et dela qualité de la réanimation.

• La super urgence éliminée, il faut distinguer les « ventres chirurgicaux » des douleurs médicales

Les douleurs abdominales « chirurgicales »Les éléments d’orientation les plus im-portants sont ceux de la clinique. Ilspermettent, par la localisation de ladouleur dans plus de 70 % des cas,d’évoquer le bon diagnostic et de de-mander si besoin l’examen complémen-taire adéquat (figure 2).

On définit ainsi les syndromes péri-tonéaux localisés et diffus, les syndromesocclusifs et les syndromes douloureuxisolés. Pour les syndromes péritonéauxlocalisés, la localisation de la douleur etdes signes est l’orientation étiologiqueprincipale (syndrome appendiculaire,vésiculaire, ou sigmoïdien). Les syndro-mes occlusifs doivent être caractérisésrapidement en occlusion grêlique ou oc-clusion colique.

Parfois la clinique est peu contribu-tive. Il n’existe pas de signe clinique oubiologique spécifique, la décision estalors soit d’hospitaliser pour surveillan-ce, soit de réaliser une échographie ouun scanner, ce qui permet d’orienterl’hospitalisation ou de redresser des dia-gnostics en fait chirurgicaux ou de réo-rienter le patient en Médecine.

Les douleurs abdominales « médicales »Les douleurs abdominales peuventaussi être le symptôme d’une patho-logie purement médicale. Dans cespathologies médicales, le terrain et lesantécédents sont essentiels à connaî-tre. Ces pathologies médicales sontnombreuses et la liste suivante ne sau-rait être exhaustive.

Des douleurs diffuses chez un patientdrogué évoquent le syndrome de man-que. Ce syndrome ne peut être évoquéque devant l’existence concomitante desautres signes de sevrage qui sont, la my-driase bilatérale, les sueurs, l’agita-tion…

Les patients porteurs d’une drépano-cytose homozygote présentent souvent descrises vaso occlusives (CVO) avec desdouleurs abdominales, mais rarementisolées. Que ce soit dans ce cas, où dansle contexte d’une CVO multifocale, la

recherche d’une autre cause de douleurabdominale que la CVO, doit être sys-tématique (une cholécystite par lithiasepigmentaire peut ainsi être la cause deces douleurs). Chez ces patients, l’antal-gie est une très urgente, car la douleurentretient aussi les facteurs de falcifor-mation.

La douleur de l’hypochondre droit,exacerbée aux mouvements (à la marchepar exemple), chez une femme jeune,doit faire rechercher l’existence d’unefébricule et d’écoulements vaginaux.L’échographie retrouve classique-ment des « cordes » péri hépatiques.Le prélèvement vaginal retrouve deschlamydiae dans le contexte de périhépatite de Fitz-Hugg-Curtis, à traiterpar antibiothérapie.

Des douleurs de l’un ou l’autre deshypochondres doivent aussi amener àune auscultation pulmonaire, à la re-cherche de pneumopathies lobaires infé-rieures, la fièvre et les signes respiratoi-res (comme la toux), sont de bonséléments d’orientation. La radiologiepulmonaire peut apparaître normale(retard radio-clinique) et le scanner êtreutile.

L’age, les facteurs de risques coro-nariens et les douleurs épigastriquesdoivent conduire à éliminer un infarctusdu myocarde, le plus fréquemment infé-rieur.

Une douleur abdominale haute etdes vomissements sont aussi l’apanagede quelques urgences métaboliquestelles l’acidocétose chez le diabétique, l’hy-per et l’hypocalcémie, l’insuffisance sur-rénale.

Parmi les causes rares de douleursabdominales, non chirurgicales, on peutaussi citer : la porphyrie aiguë, les zonaset d’autres causes de douleurs neuropa-thiques.

Enfin, et plus fréquemment, la dou-leur abdominale va évoluer dans uncontexte infectieux associé à des trou-bles du transit à type de diarrhée. C’estle cas des diarrhées virales, bactériennes etparasitaires dont la liste est trop impor-tante pour être ici développée.

Il reste à également évoquer l’ensem-ble des pathologies inflammatoires du grêle,où l’apparition et/ou l’exacerbationd’une douleur doit systématiquementfaire rechercher une complication chi-rurgicale à type d’abcès mais surtout deperforation.

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J Chir 2006,143, N°1 • © Masson, Paris, 2006 Mise au point

• Prendre en charge une douleur abdominale, c’est aussi gérer la douleur

Les bases théoriquesLes chirurgiens ont encore tendance àconsidérer que la prescription d’antal-giques, et tout particulièrement de mor-phiniques, gène le diagnostic de ladouleur abdominale et du syndromepéritonéal. Il a pourtant été maintesfois démontré que cette notion est in-fondée, voire « dangereuse ». En effetdes études, réalisées avec une méthodo-logie irréprochable, ont conduit à mon-trer que non seulement l’utilisation demorphiniques ne masquait en rien lediagnostic, mais qu’elle permettait unexamen plus objectif. Le syndrome pé-ritonéal n’est donc pas masqué par lesmorphiniques et le diagnostic étiologi-que de la douleur n’est pas retardé, maisau contraire peut être amélioré [14-17].

En pratiqueLa première étape est de faire évaluer sadouleur au patient, soit sur une échelle vi-suelle analogique (EVA), soit, plus sim-plement, verbalement. « 0 » corres-pond à l’absence de douleur et « 10 » aumaximum de ce que le patient pensepouvoir supporter.

Il faut prendre en compte trois constats :1) le patient aux urgences a mal, il arrivesouvent angoissé, parfois après un par-

cours pénible plus ou moins long (mé-decin traitant, SOS médecins, etc.), deplus, il va attendre, attendre les résultatsdes examens biologiques, attendre dansle service de Radiologie, éventuellementattendre d’être examiné par le spécialistechirurgical. Il faut donc simultanémentfaire la démarche diagnostique et débu-ter le traitement antalgique ;2) il est prouvé que si la douleur est unsigne d’appel précieux pour comprendrela pathologie, elle est parfois gênantepour faire un examen objectif ;3) il est également bien admis que plusle traitement antalgique est rapide, plusil est efficace.

L’étape suivante est de soulager. Lamesure analogique de la douleur per-met de définir le seuil de prescriptiondes différents paliers antalgiques :1) En cas de douleurs inférieures à« 4 », l’utilisation d’antalgiques de pal-lier 1 est utile. Le paracétamol prend làtout son intérêt. Il faut cependant s’as-surer de la température du patient avantinjection, du fait de son effet antipyré-tique. L’acide acétyle salicylique estformellement contre indiqué dans cetteutilisation, en raison de ses propriétéanti aggrégantes. Rappelons que certainescauses de douleurs abdominales justi-fient, seules, la prescription d’anti-inflammatoires (anti-inflammatoires

Points essentiels• La douleur viscérale a des mécanismes complexes, elle est caractérisée par des intrications

étroites entre le système sensitif et autonome et par l’importance des réponses émotion-nelles qu’elle génère.

• La douleur abdominale doit être considérée à la fois comme un symptôme désagréablepour le patient (à combattre) et l’expression d’un phénomène pathologique sous jacent (àutiliser) ; ce qui implique certes au mieux un traitement étiologique mais également untraitement symptomatique rapide.

• L’interrogatoire et l’examen clinique restent à la base de toute la démarche diagnostiqueet thérapeutique.

• Le premier objectif est d’individualiser les trois classes de tableaux de gravité décroissan-te : la super urgence (douleur avec signes de gravité généraux), l’urgence vraie (douleuravec signes de gravité locaux) et l’urgence relative (sans aucun signe de gravité).

• Le second objectif est de définir la cause de la douleur abdominale et de reconnaître lesurgences chirurgicales que l’on peut classer en première intention en syndromes.

• Les douleurs abdominales non spécifiques (sans cause retrouvée) sont fréquentes mais ilfaut rappeler que plus le patient est âgé, plus la pathologie est organique et volontiers chi-rurgicale.

• L’échographie reste l’examen de première intention, rapide et simple en matière de patho-logie biliaire, urinaire et gynécologique.

non stéroïdiens -AINS-). C’est le cas dela colique néphrétique pour laquelle laprescription d’AINS intraveineuxd’emblée est recommandée à visée an-talgique (conférence de consensus).2) En cas de douleurs supérieures à « 4 »,il est licite d’envisager la prescriptionde morphiniques ou de morphinomi-métiques. L’idéal est de le faire après unpremier examen « chirurgical » mais,en cas d’attente prolongée et surtout sile diagnostic est fait, la décision doit êtreprise en rappelant que celle-ci est le re-flet de l’intensité de la douleur, de va-leur sémiologique importante et nemasque pas des signes organiques, sur-tout si les règles précises de prescrip-tions et de surveillance sont respectées.Une ampoule de 10 mg de chlorhydrate demorphine est diluée dans 10 ml de sérumphysiologique, et 3 mg (3 ml) injectés en in-traveineux toutes les 10 minutes, jusqu’à ceque le score soit inférieur à « 4 », et ce, quelque soit le poids du patient. La demi-vie dela morphine permet une antalgie proche de4 h 00. La surveillance du patient comprendla fréquence respiratoire (risque faible, à cesdoses, d’hypoventilation), la conscience et lespupilles (myosis serré). Toute réinjection doitêtre précédé de ce type de surveillance, le ma-lade étant gardé en continu sous l’attentiondes soignants. Chez l’insuffisant rénal et legrand vieillard, les réinjections sont espacées(à 15 min par exemple) lorsque l’EVA estproche de « 4 ». La contre indication de lamorphine dans la colique hépatique, du faitd’un effet spastique sur le sphincter d’Oddi,est théorique.

Un autre outil thérapeutique et antalgi-que est la sonde gastrique. Elle soulage defaçon spectaculaire en cas de distensiongastrique ou de perforation gastro-duodénale vue précocement, mais elle aégalement un effet antalgique en cas devomissements abondants ou en cas d’il-éus important. Sa prescription doit êtrejustifiée (syndrome occlusif du grêle, vo-missements abondants). Sa mise en placedoit respecter des règles simples(explication au patient, sujet assis,manœuvres douces (attention au pa-tient sous anticoagulants). Sa position(à vérifier éventuellement par cliché ra-diologique) et son efficacité (aspirationdouce et continue) doivent être contrô-lées. Elle représente à elle seule, parfoisl’élément essentiel du traitement ou enconstitue la première étape, évitant lacomplication gravissime que constituel’inhalation, c’est la raison pour laquellesa mise en place ne doit pas être retardée.

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Prise en charge des douleurs abdominales de l’adulte aux Urgences L. Chiche, E. Roupie, P. Delassus

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Conclusion

Les douleurs abdominales sont unmotif de consultation fréquent. Laconduite à tenir est pragmatique : lebut n’est pas de faire un diagnosticprécis mais de détecter les vraies ur-gences chirurgicales ou médicalesimposant une prise en charge rapide.La démarche doit être rigoureuse, ra-pide et efficace Elle repose sur unexamen clinique complet et réitéré, etpeut être améliorée grâce à la disponibi-lité, aujourd’hui croissante, du scannermulti barrette. Le traitement de ces dou-leurs doit commencer aux Urgences, quele traitement étiologique soit rapide oudifféré, médical ou chirurgical.

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