8
MISE AU POINT / UPDATE Quelles sont les différentes modalités thérapeutiques médicales dune aponévrosite plantaire ? What are the different medical treatment methods for plantar fasciitis? I. Aloulou · C. Dziri · O. Kharrat · S. Lebib · I. Miri · F.Z. Ben Salah · M. Elleuch © Springer-Verlag France 2013 Résumé Introduction :L aponévrosite plantaire correspond àlinflammation de laponévrose plantaire qui prend son insertion au niveau du calcanéum et sétend en éventail jus- quaux bases des premières phalanges. Cette affection entraîne souvent des douleurs talonnières invalidantes. Objectif du travail : Montrer les différentes options théra- peutiques médicales dans le traitement dune aponévrosite plantaire et établir un algorithme de décision thérapeutique. Matériels et méthodes : Nous avons inclus dans ce travail les patients ayant consulté en médecine physique en 2012 pour douleur talonnière en rapport avec une aponévrosite plan- taire. Nous avons exclu les patients qui présentaient des talalgies en rapport avec un pied diabétique, fracture de fati- gue ou une maladie rhumatismale inflammatoire. Résultats : Trente patients ont été colligés dans cette étude : 25 femmes et 5 hommes. La moyenne dâge était de 47,95 ans. Une obésité était retrouvée dans 11 cas. Une radiographie des chevilles de profil était demandée dans tous les cas, révélant une « épine » calcanéenne dans 28 cas. Une échographie de la cheville a été demandée dans un seul cas, révélant des signes en faveur daponévrosite plantaire. Un hyperappui talonnier était présent dans tous les cas, associé à un aspect de pieds plats dans 19 cas, hyperappuis sur les têtes métatarsiennes dans quatre cas et pieds creux dans trois cas. Le traitement proposé était le suivant : infiltration du talon dans cinq cas, mésothérapie dans un cas et ondes de choc dans 20 cas ayant bénéficié de moyens thérapeutiques avant la consultation mais sans amélioration. Des exercices dautoétirements de la chaîne suroachilléoplantaire ont été proposés dans 26 cas. Des orthèses plantaires furent prescri- tes dans tous les cas. L évolution a été favorable dans 25 cas. Un traitement de deuxième intention a été proposé dans les cinq cas restants : deuxième cure dondes de choc dans qua- tre cas et première cure dans un cas. L évolution a été favo- rable sauf pour deux malades qui présentaient une obésité et qui nétaient pas compliants aux autres moyens thérapeu- tiques proposés. Discussion : Le symptôme quasi constant de laponévrosite plantaire est la douleur talonnière. Elle est ressentie surtout lors de la mise en charge, le matin ou après une position assise prolongée. Certains auteurs recommandent léchogra- phie plantaire plutôt que la radiographie standard puisque la présence d« épine » calcanéenne ne confirme ni ninfirme la présence dune aponévrosite plantaire. L examen podo- logique est indispensable afin de corriger un éventuel trouble statique. Les propositions thérapeutiques sont mul- tiples, il ny a pas de consensus standardisé. Notre travail montre la diversité des moyens thérapeutiques possibles et leur association dans beaucoup de cas. En cas déchec thé- rapeutique, on peut proposer des moyens de deuxième intention. L évolution dans notre série a été favorable dans tous les cas. Conclusion :L aponévrosite plantaire est une maladie invali- dante dont la prise en charge associe plusieurs moyens théra- peutiques. Le traitement ne peut être efficace sans lassocia- tion dun amaigrissement en cas de surpoids, dune correction de problèmes statiques éventuels, dautoétirements spéci- fiques et dhygiène de vie. Mots clés Aponévrosite plantaire · Calcanéum · Talon Abstract Introduction: Plantar fasciitis is an inflammation of the plantar fascia that starts from the calcaneum and stret- ches all the way to the base of the first row of the phalanges of the foot. This condition often results in debilitating heel pain. I. Aloulou · C. Dziri · O. Kharrat · S. Lebib · I. Miri Service de médecine physique et réadaptation fonctionnelle, institut dorthopédie Mohamed-Kassab, Ksar Saïd, La Mannouba, Tunisie F.Z. Ben Salah Institut supérieur déducation spéciale, Ksar Saïd, La Mannouba, Tunisie M. Elleuch (*) Service de rhumatologie, hôpital Rabta, Tunis, Tunisie e-mail : [email protected] Méd. Chir. Pied DOI 10.1007/s10243-013-0367-2

Quelles sont les différentes modalités thérapeutiques médicales d’une aponévrosite plantaire ?

Embed Size (px)

Citation preview

MISE AU POINT / UPDATE

Quelles sont les différentes modalités thérapeutiques médicalesd’une aponévrosite plantaire ?

What are the different medical treatment methods for plantar fasciitis?

I. Aloulou · C. Dziri · O. Kharrat · S. Lebib · I. Miri · F.Z. Ben Salah · M. Elleuch

© Springer-Verlag France 2013

Résumé Introduction : L’aponévrosite plantaire correspondà l’inflammation de l’aponévrose plantaire qui prend soninsertion au niveau du calcanéum et s’étend en éventail jus-qu’aux bases des premières phalanges. Cette affectionentraîne souvent des douleurs talonnières invalidantes.Objectif du travail : Montrer les différentes options théra-peutiques médicales dans le traitement d’une aponévrositeplantaire et établir un algorithme de décision thérapeutique.Matériels et méthodes : Nous avons inclus dans ce travail lespatients ayant consulté en médecine physique en 2012 pourdouleur talonnière en rapport avec une aponévrosite plan-taire. Nous avons exclu les patients qui présentaient destalalgies en rapport avec un pied diabétique, fracture de fati-gue ou une maladie rhumatismale inflammatoire.Résultats : Trente patients ont été colligés dans cetteétude : 25 femmes et 5 hommes. La moyenne d’âge étaitde 47,95 ans. Une obésité était retrouvée dans 11 cas. Uneradiographie des chevilles de profil était demandée dans tousles cas, révélant une « épine » calcanéenne dans 28 cas. Uneéchographie de la cheville a été demandée dans un seul cas,révélant des signes en faveur d’aponévrosite plantaire. Unhyperappui talonnier était présent dans tous les cas, associéà un aspect de pieds plats dans 19 cas, hyperappuis sur lestêtes métatarsiennes dans quatre cas et pieds creux dans troiscas. Le traitement proposé était le suivant : infiltration dutalon dans cinq cas, mésothérapie dans un cas et ondes dechoc dans 20 cas ayant bénéficié de moyens thérapeutiques

avant la consultation mais sans amélioration. Des exercicesd’autoétirements de la chaîne suroachilléoplantaire ont étéproposés dans 26 cas. Des orthèses plantaires furent prescri-tes dans tous les cas. L’évolution a été favorable dans 25 cas.Un traitement de deuxième intention a été proposé dans lescinq cas restants : deuxième cure d’ondes de choc dans qua-tre cas et première cure dans un cas. L’évolution a été favo-rable sauf pour deux malades qui présentaient une obésité etqui n’étaient pas compliants aux autres moyens thérapeu-tiques proposés.Discussion : Le symptôme quasi constant de l’aponévrositeplantaire est la douleur talonnière. Elle est ressentie surtoutlors de la mise en charge, le matin ou après une positionassise prolongée. Certains auteurs recommandent l’échogra-phie plantaire plutôt que la radiographie standard puisque laprésence d’« épine » calcanéenne ne confirme ni n’infirmela présence d’une aponévrosite plantaire. L’examen podo-logique est indispensable afin de corriger un éventueltrouble statique. Les propositions thérapeutiques sont mul-tiples, il n’y a pas de consensus standardisé. Notre travailmontre la diversité des moyens thérapeutiques possibles etleur association dans beaucoup de cas. En cas d’échec thé-rapeutique, on peut proposer des moyens de deuxièmeintention. L’évolution dans notre série a été favorable danstous les cas.Conclusion : L’aponévrosite plantaire est une maladie invali-dante dont la prise en charge associe plusieurs moyens théra-peutiques. Le traitement ne peut être efficace sans l’associa-tion d’un amaigrissement en cas de surpoids, d’une correctionde problèmes statiques éventuels, d’autoétirements spéci-fiques et d’hygiène de vie.

Mots clés Aponévrosite plantaire · Calcanéum · Talon

Abstract Introduction: Plantar fasciitis is an inflammationof the plantar fascia that starts from the calcaneum and stret-ches all the way to the base of the first row of the phalangesof the foot. This condition often results in debilitating heelpain.

I. Aloulou · C. Dziri · O. Kharrat · S. Lebib · I. MiriService de médecine physique et réadaptation fonctionnelle,institut d’orthopédie Mohamed-Kassab, Ksar Saïd,La Mannouba, Tunisie

F.Z. Ben SalahInstitut supérieur d’éducation spéciale, Ksar Saïd,La Mannouba, Tunisie

M. Elleuch (*)Service de rhumatologie, hôpital Rabta, Tunis, Tunisiee-mail : [email protected]

Méd. Chir. PiedDOI 10.1007/s10243-013-0367-2

Aim of the study: To show the different medical treatmentoptions available for plantar fasciitis and establish a treat-ment decision algorithm.Equipment and methods: Patients included in this study hada physical medicine and rehabilitation appointment in 2012for heel pain associated with plantar fasciitis. Patients wereexcluded if they presented with heel pain associated withdiabetic foot, a stress fracture or an inflammatory rheuma-toid condition.Results: Thirty patients were included in this study:25 women and 5 men. The average age was 47.95 years.Obesity was present in 11 cases. A lateral x-ray of the anklewas requested in all cases, which revealed a calcaneal spur in28 cases. An ultrasound of the ankle was requested in a sin-gle case, which revealed indicative signs of plantar fasciitis.Excessive weight bearing to the heel was present in all cases,combined with flat feet in 19 cases; excessive weight bearingto the ball of the foot was seen in 4 cases and high arches in3 cases. The following treatments were proposed: infiltrationanaesthesia of the heel in 5 cases, mesotherapy in 1 case andshockwave therapy in 20 cases which received treatmentbefore the appointment; however, no improvement was seen.Stretching exercises for the Achilles tendon and plantar fas-cia region were proposed in 26 cases. Arch support orthoticswere prescribed in all cases. In 25 cases, favourable progresswas seen. A second-line treatment was proposed in theremaining 5 cases; this was a second dose of shockwavetreatment in 4 cases and a first dose in one case. Progresswas favourable in all cases, except for two patients who wereboth obese and were not compatible with other means oftreatment proposed.Discussion: The symptom that is practically constant inplantar fasciitis is heel pain. It is felt most when weight bea-ring, in the morning or following a period of prolongedsitting. Some authors recommend plantar ultrasonographyrather than standard x-ray imaging, as the presence of acalcaneal spur neither confirms nor denies the presence ofplantar fasciitis. A podiatric examination is invaluable inorder to correct a potential issue when standing. There aremany treatment methods available, with no standard consen-sus on which one is best. Our study showed the range ofpossible treatment options available and the fact they werecombined in many cases. If a therapy fails, a second-linetreatment may be proposed. Progress in our series of studieswas favourable in all cases.Conclusion: Plantar fasciitis is a debilitating condition thathas many treatment options available to manage it. Treat-ment will not be effective without the combination of losingweight if the patient is overweight, the correction of poten-tial problems when standing, specific stretching exercisesand a good lifestyle.

Keywords Plantar fasciitis · Calcaneum · Heel

Introduction

Les douleurs plantaires constituent un motif fréquent deconsultation en médecine générale, rhumatologie, orthopé-die, médecine physique... La cause la plus fréquemmentretrouvée est l’aponévrosite plantaire [1].

Sur le plan anatomique, l’aponévrose plantaire, ou fasciaplantaire, est formée d’une mince bande de tissu fibreuxs’étendant du bord antéro-inférieur du calcanéus à la faceplantaire des articulations métatarsophalangiennes et à la basedes phalanges proximales des orteils [2]. Sur le plan fonction-nel, cette structure constitue le principal stabilisateur de lavoûte plantaire. Elle s’allonge avec l’accroissement des char-ges, absorbe les chocs et aide à protéger les tissus mous [3].

Plusieurs facteurs peuvent contribuer à la genèse d’uneinflammation au niveau du fascia plantaire et même à l’appa-rition d’une calcification à l’origine de cette structure [4].

Le diagnostic positif de l’aponévrosite plantaire est portésur des données cliniques : douleurs d’apparition progressivesiégeant à l’origine de l’aponévrose plantaire et sur 1 cm àpartir de cette zone, un maximum de la douleur au premierappui le matin ou à la mise en charge après une station assiseprolongée, diminution fréquente de la douleur après quel-ques pas. À l’examen physique, une zone sensible est retrou-vée à la palpation de la partie médiale du talon [1]. Sur leplan thérapeutique, plusieurs moyens thérapeutiques sontproposés. Le choix de ces moyens est variable d’un sujet àun autre, selon ses facteurs de risque, les éléments de l’exa-men clinique et les traitements antérieurs proposés.

L’objectif de cette étude est de montrer la diversité desmoyens thérapeutiques médicaux proposés aux patients etla stratégie optée dans la prise en charge de l’aponévrositeplantaire selon un algorithme décisionnel.

Matériels et méthodes

Nous avons inclus dans ce travail les patients ayant consultéen médecine physique en 2012 pour douleur talonnière enrapport avec une aponévrosite plantaire.

Le diagnostic positif était porté sur une symptomatologiefaite d’une douleur plantaire survenant à la marche le matinou après une station assise prolongée. L’examen clinique met-tait en évidence une douleur à la palpation de l’origine del’aponévrose plantaire sur la tubérosité médiane du calcanéus.

Nous avons exclu les patients qui présentaient des talal-gies en rapport avec d’autres étiologies : diabète, fracture defatigue ou maladie rhumatismale inflammatoire.

Pour chaque sujet retenu dans cette étude, nous avonsprécisé différents éléments :

• l’interrogatoire précisait l’âge, le sexe, l’activité spor-tive, les antécédents médicaux et chirurgicaux, la durée

2 Méd. Chir. Pied

d’évolution de la symptomatologie, le siège et le type dela douleur, l’uni- ou la bilatéralité de la symptomatologie,les facteurs aggravants, les facteurs de soulagement et lestraitements antérieurs proposés ;

• à l’examen clinique, nous avons noté l’indice de massecorporelle (IMC), l’examen des chaussures, le siège dela douleur à la palpation, la recherche de rétractionsmusculotendineuses au niveau du pied par l’évaluationde la flexion dorsale de la cheville, les déformations del’arrière-pied et l’examen des pieds sur podoscope. Unexamen général était complété pour chaque patient ;

• chez tous les patients, une radiographie standard du pieden charge de profil a été demandée. D’autres examenscomplémentaires étaient proposés, notamment chez cer-tains patients présentant une douleur plantaire bilatérale(bilan inflammatoire et/ou bilan radiologique standardorienté) ;

• un bilan infectieux et un bilan d’hémostase (dosage desplaquettes, du taux de prothrombine et du temps de cépha-line activée) étaient effectués systématiquement chezles patients devant bénéficier de traitement par ondes dechoc ;

• les possibilités thérapeutiques étaient les suivantes : letraitement médical, les orthèses plantaires, l’infiltrationdu talon, la mésothérapie, les ondes de choc, les exercicesd’autorééducation et d’autres moyens physiques adaptésen fonction de chaque cas, la douleur avant et après trai-tement par l’échelle visuelle analogique (EVA) étaitévaluée.

Résultats

Trente patients furent colligés dans cette étude : 25 femmeset 5 hommes. La moyenne d’âge était de 47,95 ans. Uneactivité sportive régulière était pratiquée chez trois patients.Aucun patient n’avait d’antécédent de maladie inflamma-toire. La symptomatologie évoluait depuis cinq mois enmoyenne. La douleur était de type mécanique, siégeant auniveau de la partie médiale du talon dans 27 cas. La sympto-matologie était bilatérale dans cinq cas.

La marche soulageait la douleur dans 25 cas. Un traite-ment médical et des talonnettes du commerce étaient déjàprescrits chez 12 patients, sans succès.

Une obésité était retrouvée dans 11 cas. Un chaussageinadapté à type de chaussettes était noté dans 16 cas. À lapalpation, la douleur siégeait au niveau de la partie médiola-térale du talon chez 27 patients et le long de l’aponévroseplantaire dans trois cas. Une limitation de la flexion dorsaledu pied était retrouvée dans cinq cas.

Un hyperappui talonnier était présent dans tous les cas,associé à un aspect de pieds plats dans 19 cas ; des hyper-

appuis sur les têtes métatarsiennes étaient notés dans quatrecas ; il y avait trois cas de pieds creux.

Le reste de l’examen était sans particularité chez tous lespatients.

La radiographie des chevilles de profil demandée danstous les cas révélait une « épine » calcanéenne dans 28 cas.Une échographie de la cheville a été demandée dans un seulcas, révélant des signes en faveur d’aponévrosite plantaire.

Un traitement de première intention était prescrit, à typede traitement médical dans tous les cas : un antalgiquepalier 1 associé à un anti-inflammatoire non stéroïdien dans15 cas, des myorelaxants dans dix cas. Une infiltration dutalon a été pratiquée dans cinq cas et une mésothérapiedans un cas. Les ondes de choc ont été indiquées dans20 cas chez des patients ayant bénéficié de moyens théra-peutiques avant la consultation, sans amélioration.

Des exercices d’autoétirements de la chaîne suroachilléo-plantaire furent proposés dans 26 cas, des orthèses plantairessur mesure dans tous les cas.

L’évolution a été favorable sur le plan de la douleur dans25 cas.

Dans les cinq cas restants, un traitement de deuxièmeintention a été prescrit : deuxième cure d’ondes de chocdans quatre cas et première cure dans un cas.

L’évolution a été favorable sauf pour deux malades chezqui nous avons noté une obésité et une absence d’adhésionaux autres moyens thérapeutiques proposés.

Nous n’avons eu aucune complication à court ou à longterme.

Discussion

L’aponévrosite plantaire résulte de l’augmentation de lacharge au niveau des pieds. Ces contraintes mécaniquesagissent sur « l’arche » longitudinale du pied mais avec uneffet maximal sur l’aponévrose plantaire et particulièrementà son origine sur la tubérosité calcanéenne moyenne. Lacause de l’aponévrosite plantaire est multifactorielle : desfacteurs mécaniques comme l’obésité, l’excès de pronationdu pied, la station debout prolongée sur une surface dure,l’augmentation des pressions métatarsiennes, un chaussageinadéquat augmentent les pressions sur l’aponévrose plan-taire. À long terme, ces contraintes peuvent entraîner desmicrofissures aponévrotiques entraînant une réponse inflam-matoire [5,6].

Certains praticiens confondent l’aponévrosite plantaire etl’épine calcanéenne, l’association entre les deux est étudiéedans plusieurs travaux. L’épine calcanéenne peut être retrou-vée chez des patients asymptomatiques. La présence del’épine calcanéenne n’est pas systématique dans l’aponévro-site plantaire, toutefois, elle est plus fréquente chez lespatients présentant cette affection [4,7,8].

Méd. Chir. Pied 3

L’origine de l’épine calcanéenne est la tension excessivesur l’origine du fascia plantaire aboutissant à l’apparition decette calcification.

Le diagnostic de l’aponévrosite plantaire est clinique, tou-tefois, des examens complémentaires peuvent être nécessai-res dans certains cas posant le problème de diagnostic diffé-rentiel avec d’autres pathologies [1,9].

Dans la littérature, l’échographie est l’examen complémen-taire le plus rapporté. L’avantage de cet examen est d’aider audiagnostic par la mise en évidence d’un épaississement del’aponévrose plantaire et la diminution de l’échogénicité ;ces paramètres sont contrôlés dans le suivi du patient [10–12].L’échographie-doppler peut montrer des signes en faveurd’hyperhémie locale [13].

Dans notre étude, la radiographie standard est l’examencomplémentaire choisi dans tous les cas devant sa simpli-cité et sa rapidité d’exécution. L’objectif de cet examen dansnotre série était d’étudier l’arche plantaire de profil, derechercher une éventuelle épine calcanéenne et/ou achil-léenne associée et d’étudier les structures osseuses.

Les options thérapeutiques pour le traitement de l’aponé-vrosite plantaire sont multiples. L’efficacité de ces moyensest variable selon les études [14,15].

Les traitements médicaux sont proposés en associationaux autres moyens thérapeutiques. Aucune étude dans la lit-térature n’a montré l’efficacité de ces moyens seuls dans letraitement de l’aponévrosite plantaire [14].

Dans notre série, des antalgiques de palier 1 sont souventprescrits en association aux anti-inflammatoires non stéroï-diens en l’absence de contre-indications. Les myorelaxantspeuvent être prescrits en présence de rétractions de la chaînesuroachilléoplantaire.

L’infiltration du talon par un corticoïde permet d’agirlocalement au niveau de l’aponévrose plantaire, siège de l’in-flammation et de la douleur. Le site de l’infiltration est guidépar la palpation. Dans la série de Hakan, comportant 30 mala-des, 47 talons ont été infiltrés. Les résultats ont été évaluéspar mesure de la douleur (EVA) et par l’étude échogra-phique. Des améliorations significatives ont été mises en évi-dence chez tous les malades concernant l’épaisseur, le carac-tère hypoéchogène de l’aponévrose, et concernant la douleur(EVA), cela un mois et six mois après l’infiltration [16].

Peu de complications sont rapportées dans la littératureconcernant l’infiltration de corticoïdes. Néanmoins, des infil-trations répétées peuvent entraîner une rupture du fascia plan-taire et une atrophie du coussinet graisseux plantaire. Citonségalement le cas d’un patient ayant présenté un abcès stérilequelques jours après une deuxième infiltration plantaire [17].

Dans notre série, l’infiltration a été pratiquée seulementdans cinq cas. Nous n’avons pas rapporté de complicationssuite à ce traitement.

L’usage d’orthèses plantaires est approuvé par plu-sieurs études dans le traitement de l’aponévrosite plantaire[14,18,19].

L’objectif des orthèses plantaires est de corriger les trou-bles statiques… Une étude publiée en 2009 a comparédeux groupes de patients suivis pour aponévrosite plantaire :un groupe de 63 patients portant des orthèses plantaires pré-fabriquées et un second groupe de 62 patients portant desorthèses sur mesure. Les orthèse préfabriquées étaientconçues à partir d’un moule de pied sans particulière correc-tion, tandis que les orthèses sur mesure sont conçues spécia-lement pour le pied du patient. L’évaluation de la douleurmontre une amélioration dans les deux groupes sans diffé-rence significative [20].

L’objectif des orthèses plantaires est de corriger les trou-bles statiques, un excès de pronation et de diminuer lescontraintes mécaniques au cours de la marche. Les orthèsesplantaires sont généralement fabriquées sur mesure [21].Toutefois, le coût élevé des orthèses sur mesure limite leurprescription dans certains cas. Une étude publiée en 2009 acomparé deux groupes de patients suivis pour aponévrositeplantaire : un groupe de 63 patients portant des orthèsesplantaires préfabriquées et un second groupe de 62 patientsportant des orthèses sur mesure. L’évaluation de la douleurmontre une amélioration dans les deux groupes sans diffé-rence significative [20].

Selon notre expérience, les orthèses plantaires sur mesuresont préférables aux orthèses de commerce.

Le port d’orthèses plantaires ne dispense pas d’un chaus-sage adapté contenant parfaitement l’orthèse plantaire. Dansnotre expérience concernant des patients tunisiens, une adhé-sion au chaussage conseillé est parfois difficile en raisondu chaussage souvent inadapté pour contenir des orthèsesplantaires.

Un chaussage adapté et régulièrement renouvelé doit êtreconseillé dans tous les cas [22].

Les ondes de choc sont des ondes mécaniques caractéri-sées par une augmentation abrupte de la pression suivied’une phase rapide de pression négative [23].

Les ondes de choc sont connues pour leur effet de litho-tripsie en délivrant des ondes de choc focalisées. Un autretype d’appareil permet de délivrer des ondes de choc radialesatteignant 3 à 4 cm de profondeur (Fig. 1). L’applicationdans l’aponévrosite plantaire se fait par le biais de percuteurqui sera appliqué perpendiculairement au point douloureuxau niveau du talon (Fig. 2).

Le mécanisme d’action le plus décrit est mécanique par lebiais de la création d’une néolésion susceptible de mieuxcicatriser par la suite. Le résultat est une amélioration dumétabolisme local. Les ondes de choc ont fait preuve deleur efficacité dans plusieurs études, particulièrement pourles cas rebelles aux autres moyens de traitement non invasifs[24–28].

4 Méd. Chir. Pied

Les contre-indications sont essentiellement la prised’anticoagulants, les troubles de l’hémostase, les tumeurs,les infections, la présence de pacemaker, la corticothérapieau long cours, les pathologies vasculaires et neurologiques,

les enfants de moins de 17 ans et les personnes âgées de plusde 75 ans [23].

Peu de complications sont rapportées lors de l’utilisationde cette technique. Les complications les plus fréquentesretrouvées dans la série de Chuckpaiwong et al. comportant225 patients sont : l’accentuation des douleurs au coursde la séance, un engourdissement, des dysesthésies et desecchymoses ou des pétéchies [29].

Dans notre série, aucune complication n’a été observée àcourt et à long terme.

Le traitement par ondes de choc n’est pas un traitement depremière intention, il est souvent proposé après échec d’untraitement conservateur [24,25].

L’évolution peut être favorable dès les premières séances ;toutefois, elle est parfois plus tardive. Il faut expliquer auxpatients que le résultat ne peut être jugé qu’après la der-nière séance. Une deuxième cure d’ondes de choc peut êtreproposée dans certains cas. Dans notre série, cette deuxièmecure a permis l’amélioration de la symptomatologie.

Les étirements spécifiques sont intéressants à appliquer.En effet, la douleur ressentie dans les premiers pas le matinou après une station assise prolongée entraîne une contrac-tion musculaire et un raccourcissement du fascia plantaire.De ce fait, même si d’autres traitements sont efficaces sur ladouleur et l’inflammation du fascia plantaire, le traitementsera incomplet, et la récidive de la douleur sera observéelors de la remise en position debout.

Ainsi, il faudrait rétablir la longueur du fascia plantaireet éviter sa rétraction par le biais d’exercices d’étirementsspécifiques. Des attelles de nuits sont parfois proposées afinde mettre en posture tout le système suroachilléoplantaire etéviter sa rétraction [30]. Le Taping du pied est une autreméthode de posture permettant de maintenir l’étirement etd’éviter les rétractions [31].

Les étirements spécifiques sont appris au patient qui pourrapoursuivre une autorééducation à domicile. L’autoétirementdu triceps sural peut être effectué en position debout contrele mur (Fig. 3). L’autoétirement de l’aponévrose plantaire esteffectué en position assise en plaçant la jambe du côté étirécroisée sur l’autre jambe, en saisissant les orteils avec la maincontrolatérale et en amenant les orteils en extension (Fig. 4).L’association d’un moyen physique, à type de cryothérapie,avec l’étirement peut être effectuée en position debout, enplaçant une bouteille d’eau froide sous le pied et en effectuantune flexion dorsale du pied (Fig. 5). Chaque exercice doit êtrepratiqué quotidiennement à raison de trois fois par jour etrépété dix fois dans chaque série. Chaque étirement doit êtremaintenu dix secondes [32].

Dans notre série, les exercices d’autorééducation ont étéappris à tous les patients.

En ce qui concerne le traitement par toxine botulinique,une expérience préliminaire est rapportée par Chou et al.(toxine de type A) [33]. Dans cette étude, une patiente a

Fig. 1 Appareil utilisé pour le traitement par les ondes de choc

Fig. 2 Application du percuteur de l’appareil de l’onde de choc

perpendiculairement au niveau du point douloureux

Méd. Chir. Pied 5

bénéficié d’une injection de toxine au niveau du point dou-loureux du talon et au niveau de l’arche plantaire. L’EVA estpassée de 8 à 2,2 après une semaine, et à 1,5 après trois semai-

nes. D’autres études sont nécessaires pour juger de l’intérêt dela toxine dans le traitement de l’aponévrosite plantaire.

Chirurgie

La chirurgie est une solution de dernier recours après quetoutes les autres méthodes thérapeutiques ont échoué[34,35]. La section de l’aponévrose plantaire consiste àsectionner l’attache qui est le siège de l’inflammation. Ellepeut se faire par une technique conventionnelle ouverte oupercutanée.

Ces techniques chirurgicales n’ont pas été indiquées dansnotre étude.

Quelle stratégie thérapeutique ?

Les moyens thérapeutiques sont diversifiés. L’attitude théra-peutique diffère selon les équipes. Cependant, la plupart des

Fig. 3 Exercice d’étirement du triceps sural contre le mur

Fig. 4 Exercice d’étirement de l’aponévrose plantaire

Fig. 5 Association d’un moyen physique (cryothérapie) et d’un

exercice d’étirement du triceps sural

6 Méd. Chir. Pied

études confirment l’intérêt d’associer certains moyens théra-peutiques : traitement médical, exercices d’étirements etaction sur les facteurs de risque.

Dans la dernière figure, nous avons illustré la stratégiethérapeutique préconisée au service de médecine physique(Fig. 6).

Conclusion

L’aponévrosite plantaire est une affection qui ne pose géné-ralement pas un problème diagnostique. Les moyens théra-peutiques sont multiples, permettant d’agir sur les phéno-mènes inflammatoires au niveau de l’aponévrose, decorriger et prévenir les facteurs de risque. Nous avons essayédans ce présent travail de proposer un algorithme décision-nel relatif à notre conduite à tenir face à une aponévrositeplantaire.

Références

1. Hossain M, Makwana N (2011) Not plantar fasciitis: the differen-tial diagnosis and management of heel pain syndrome. Orthopae-dics and trauma 25:198–206

2. Bartold SJ (2005) Fasciite plantaire. Le fascia plantaire commesource de douleur : biomécanique, signes cliniques et traitement.EMC Podologie 1:29–41

3. Puttaswamaiah R, Chandran P (2007) Degenerative plantar fascii-tis: a review of current concepts. Foot 17:3–9

4. Wainwright AM, Kelly AJ, Winson IG (1995) Calcaneal spursand plantar fasciitis. Foot 5:123–6

5. Schlienger JL (2010) Conséquences pathologiques de l’obésité.Presse Med 39:913–20

6. Werner RA, Gell N, Hartigan A, et al (2010) Risk factors forplantar fasciitis among assembly plant workers. PM R 2:110–6

7. Johal KS, Milner SA (2012) Plantar fasciitis and the calcanealspur: fact or fiction? Foot Ankle Surg 18:39–41

8. Osborne HR, Breidahl WH, Allison GT (2006) Critical differen-ces in lateral X-rays with and without a diagnosis of plantar fas-ciitis. J Sci Med Sport 9:231–7

Fig. 6 Algorithme décisionnel devant une aponévrosite plantaire

Méd. Chir. Pied 7

9. Van Linthoudt D, Gerster JC (2013) Acute heel pain related toapatite deposition in the plantar fascia. Joint Bone Spine80:344–5

10. Karabay N, Toros T, Hurel C (2007) Ultrasonographic evaluationin plantar fasciitis. J Foot Ankle Surg 46:442–6

11. Fabrikant JM (2011) Plantar fasciitis treatment outcome study:plantar fascia thickness measured by ultrasound and correlatedwith patient self-reported improvement. The Foot 21:79–83

12. Ozdemir H, Yilmaz E, Murat A, et al (2005) Sonographic evalua-tion of plantar fasciitis and relation to body mass index. Eur JRadiol 54:443–7

13. Walther M, Radke S, Kirschner S, et al (2004) Power dopplerfindings in plantar fasciitis. Ultrasound Med Biol 30:435–40

14. Lafuente-Guijosa A, O’mullony Muñoz I, de La Fuente ME,Cura-Ituarte P (2007) Plantar fasciitis: evidence-based review oftreatment. Reumatol Clin 4:159–65

15. Dmitri Luke BS (2002) Plantar fasciitis: a new experimentalapproach to treatment. Med Hypotheses 59:95–7

16. Genc H, Saracoglu M, Nacir B, et al (2005) Traitement de l’apo-névrosite plantaire par infiltration de corticostéroïdes : suivi àlong terme par échographie. Rev Rhum 72:68–73

17. Theodore A, Buccilli Jr, Hugh Ryan Hall, et al (2005) Sterileabscess formation following a corticosteroid injection for thetreatment of plantar fasciitis. J Foot Ankle Surg 44:466–8

18. Yong Lee S, McKeon P, Hertel J, et al (2009) Does the use oforthoses improve self-reported pain and function measures inpatients with plantar fasciitis? A meta-analysis. Phys Ther Sport10:12–8

19. Walther M, Kratschmer B, Verschl J, et al (2013). Effect of diffe-rent orthotic concepts as first line treatment of plantar fasciitis.Foot Ankle Surg 19:103–7

20. Baldassin V, Gomes CR, Beraldo PS, et al (2009) Effectivenessof prefabricated and customized foot orthoses made from low-cost foam for noncomplicated plantar fasciitis: a randomizedcontrolled trial. Arch Phys Med Rehabil 90:701–6

21. Tik-Pui Fong D, Pang KY, Man-Ling Chung M, et al (2012) Eva-luation of combined prescription of rocker sole shoes andcustom-made foot orthoses for the treatment of plantar fasciitis.Clin Biomech 27:1072–7

22. Rajput B, Abboud RJ (2004) Common ignorance, major pro-blem: the role of footwear in plantar fasciitis. Foot 14:214–8

23. Chevutschi A, Legrand C, Thevenon A (2010) Les ondes de chocen pratique courante. Kinesither Rev 106:18–21

24. Scot Malay D, Pressman MM, Assili A, et al (2006) Extracorpo-real shockwave therapy versus placebo for the treatment of chro-nic proximal plantar fasciitis: results of a randomized, placebo-controlled, double blinded, multicenter intervention trial. J FootAnkle Surg 45:196–210

25. Hyer CF, VanCourt R, Block A (2005) Evaluation of ultrasound-guided extracorporeal shock wave therapy (ESWT) in the treat-ment of chronic plantar fasciitis. J Foot Ankle Surg 44:137–43

26. Scott-Weil L, Roukis TS, Borrelli AH (2002) Extracorporealshock wave therapy for the treatment of chronic plantar fasciitis:indications, protocol, intermediate results, and a comparison ofresults to fasciotomy. J Foot Ankle Surg 41:166–72

27. Rompe JD, Kullmer K, Riehle HM (1996) Effectiveness of low-energy extracorporal shock waves for chronic plantar fasciitis.Foot Ankle Surg 2:215–21

28. Roques CF (2003) Agents physiques antalgiques : données clini-ques actuelles. Ann Readapt Med Phys 46:565–77

29. Chuckpaiwong B, Berkson EM, Theodore GH (2009) Extracor-poreal shock wave for chronic proximal plantar fasciitis:225 patients with results and outcome predictors. J Foot AnkleSurg 48:148–55

30. Lance D, Barry AN, Chen Y, et al (2002) A retrospective studyof standing gastrocnemius soleus stretching versus night splintingin the treatment of plantar fasciitis. J Foot Ankle Surg 41:221–7

31. Hunt GC, Sneed T, Hamann H, et al (2004) Biomechanical andhistiological considerations for development of plantar fasciitisand evaluation of arch taping as a treatment option to controlassociated plantar heel pain: a single subject design. The Foot14:147–53

32. Colné P (2007) L’étirement spécifique de l’aponévrose plantairediminue de façon notoire les douleurs talonnières plantaires enrapport avec une souffrance chronique de l’aponévrose plantaire(aponévrosite plantaire). Il constitue une alternative au traitementchirurgical de ces douleurs chroniques. Kinesither Rev 65:4–14

33. Chou LW, Hong CZ, Wu ES, et al (2011) Serial ultrasonographicfindings of plantar fasciitis after treatment with botulinum toxina: a case study. Arch Phys Med Rehabil 92:316–9

34. Benton Weil W, Borrelli AH, Scott Weil L (1998) Percutaneousplantar fasciotomy: a minimally invasive procedure for recalci-trant plantar fasciitis. Foot Ankle Surg 37:269–72

35. Tay KS, Ng YC, Singh IR, Chong KW (2012) Open technique ismore effective than percutaneous technique for TOPAZ radiofre-quency coblation for plantar fasciitis. Foot Ankle Surg 18:287–92

8 Méd. Chir. Pied