Revue Toxicologie Maroc n9 2011

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N 9 - 2me trimestre 2011 Publication officielle du Centre Anti Poison du Maroc

Ministre de la sant

Maroc

Rapport 2010 du Centre Anti Poison du Maroc

DOSSIER : Envenimations ophidiennes Toxicologie Maroc - N 9 - 2 trimestre 2011 - 1 au Marocme

EditoLes Centres Anti Poison et lamlioration des stratgies de sant publiqueGrace linformation toxicologique quil assure 24 heures sur 24, le Centre Anti Poison du Maroc (CAPM) vise orienter le professionnel de sant sur la conduite tenir la plus rationnelle devant une intoxication. De mme, quand il est sollicit par la victime intoxique ou par sa famille, le CAPM a pour objectifs de rassurer, dviter les dplacements inutiles lhpital, de promouvoir les gestes les plus utiles et de dconseiller les habitudes aberrantes. Il est dmontr aujourdhui que les Centres Anti Poison contribuent largement la dcongestion des services durgence, ainsi qu la rduction des frais de dplacement et des frais engags lhpital. Mais ce Service mdical rendu par le CAPM ne constitue en fait que la partie apparente dun ensemble dactivits visant lamlioration de la sant de la population par la diminution de la morbidit et de la mortalit lies aux intoxications. En effet, des activits en amont et en aval de lInformation Toxicologique permettent de collecter linformation, de tracer lpidmiologie des intoxications en terme de distribution spatiale et temporelle, en identifiant les sous-groupes risque et les conduites thrapeutiques adoptes par les professionnels de sant. Les connaissances ainsi acquises permettent de dfinir les stratgies de prvention, de prise en charge et de formation et dinformation bases sur des ralits pidmiologiques. Au fil des numros publis par la revue Toxicologie Maroc, lquipe ditoriale a voulu montrer les diffrents aspects du travail fourni par le CAPM en abordant les problmatiques en rapport avec des toxiques spcifiques, comme cest le cas des intoxications par envenimation ophidiennes prsentes dans ce numro. Cette nouvelle dition se caractrise galement par la prsentation du rapport annuel des intoxications collectes durant lanne 2010. Ce rapport constitue un feed back pour tous les professionnels de sant qui ont contact le CAPM par tlphone, qui lont sollicit pour une analyse toxicologique ou qui ont tout simplement dclar un cas dintoxication. Nous les remercions de leur implication positive et constructive pour lamlioration des stratgies de sant publique. Ce rapport prsente galement les statistiques nationales de rfrence pour tout chercheur travaillant dans le domaine de la toxicologie. Les mdias, avides dinformation actuelle, prcise et transparente, trouveront galement des donnes qui alimenteront leurs interventions crites ou audio visuelles, comme cel a dj t le cas lors de la large diffusion des donnes du rapport de lanne 2009.Pr Rachida Soulaymani-Bencheikh Directrice de Publication

Directrice de Publication Pr Rachida Soulaymani Bencheikh Comit De RDaCtion Rdactrice en Chef Dr Naima Rhalem Secrtaire de rdaction Mme Rachida Aghandous Rubrique institutionnelle Dr Hanane Chaoui Rubrique Rapports et Rsultats Dr Asmae Khattabi articles originaux Mr Lahcen Ouammi Clinique Dr Sanae Achour alertes du CaPm Dr Houda Sefiani infos et revues de presse Dr Ghyslaine Jalal Responsable diffusion Mme Hind Jerhalef Relecture Dr Jean Marc David EDITION Directrice de lEdition Dr Siham Benchekroun Directeur artistique Chafik Aaziz Socit dEdition Socit Empreintes Edition Rs. Alia, 8, rue Essanaani. Appt 4. Bourgogne. Casablanca [email protected]

Tel : 0522 260 184. Fax : 0522 367 035

IMPRESSION Imprimerie Maarif El Jadida. Rabat Dossier de presse : 14 /2009 ISSN : 2028-4152 Dpt lgal : 2009 PE 0052 Tous les numros sont disponibles sur le site : www.capm.ma2 - Toxicologie Maroc - N 9 - 2me trimestre 2011

CliniqueDfinition et CLAssifiCAtion Des serPents Du MAroCChafiq Fouad1, Fekhaoui Mohamed2, Mataam Abderrahmane 2, Rhalem Nama 1,3, Khattabi Asmae 1,3, Soulaymani-Bencheikh Rachida 1,41- Centre Anti Poison et de Pharmacovigilance du Maroc 2- Institut Scientifique de Rabat 3- Laboratoire de Gntique et Biomtrie, Facult des Sciences, Universit Ibn Tofail de Knitra 4- Facult de Mdecine et de Pharmacie de Rabat

DfinitionUn serpent est un reptile corps cylindrique, trs allong, dpourvu de membres apparents, appartenant au groupe des ophidiens. Les serpents (ou ophidiens) ont de nombreuses vertbres portant des ctes, des yeux protgs par une caille transparente (sans paupire), une langue bifide et rtractile [1]. Un serpent non venimeux est dfini comme tout serpent dpourvu de crochets et de glandes venin. Un serpent venimeux est dfini comme tout serpent qui a des crochets et des glandes venin seuls attributs anatomiques qui les distinguent des serpents non venimeux [2]. La morsure de serpent est la consquence directe du rapprochement accidentel ou intentionnel entre lhomme et le serpent [3]. Les serpents ou ophidiens constituent avec les lzards et les amphisbnes lordre des Squamates. Ils sont rpartis en deux infra-ordres [3,4] : 1- Lordre des Scolecophidiens comprenant 370 espces : ce sont des petits serpents fouisseurs dpourvus dappareils venimeux, se nourrissant principalement de fourmis et de termites. Trois familles composent cet infra-ordre: les Leptotyphlopidae, les Anomalepididae et les Typhlopidae. 2- Lordre des Alethinophidiens prsentant une diversit cologique. Ces serpents se nourrissent principalement de vertbrs et sont caractriss par lindpendance de leurs mandibules et leur capacit ingrer des proies plus grosses que le diamtre de leur propre corps. Ce groupe comprend deux lignes fouisseuses distinctes dAnilioidea, plusieurs lignes de Booidea (boas, pythons et taxons apparents) et les Caenophidia. Les serpents de la ligne des Caenophidia reprsentent la grande majorit

des serpents actuels avec environ 2500 espces, et comprennent 11 familles : les Acrochordidae, Dipsadidae, Xenodermatidae, Lamprophiidae, Pareatidae, Homalopsidae, Natricidae, Pseudoxenodontidae, Colubridae, Viperidae, et Elapidae. Les connaissances concernant la systmatique des ophidiens ont une importance capitale pour les cliniciens, les toxicologues et producteurs de srums. Elles permettront de mieux connaitre la problmatique des accidents de morsures de serpents, damliorer la prise en charge intgre et de cibler les actions de sensibilisation au niveau des zones prsentant des risques gographiques. Malheureusement, au Maroc, lidentification prcise du serpent agresseur est problmatique car les professionnels de sant ne sont pas conscients de lintrt de lidentification et ne disposent daucune formation sur la taxonomie des serpents du Maroc.

dentale; ce sont donc des serpents inoffensifs pour lhomme. Son aire de distribution se trouve au niveau du Sahara marocain. 2- Famille des Boidae : lEryx jaculus (Boa javelot) est le seul reprsentant. Sa taille est de lordre de 80 cm, il est dpourvu de crochets. Cest un serpent constricteur tuant sa proie par touffement. Cest une espce rare, trs discrete et confine lextrme Est du pays (hauts plateaux). 3- Famille des Colubridae [3,9] : comprenant 15 espces caractrises par un corps allong, des cailles lisses et des plaques cphaliques larges. La tte est arrondie et faiblement distincte du corps. La queue est filiforme. Cette famille est loin dtre homogne et toutes les tentatives de classifications se sont rvles infructueuses. Les serpents aglyphes furent initialement dcrits comme nayant ni glande venin, ni appareil inoculateur. Cette notion a t reconsidre, puisquon estime que la grande majorit des serpents aglyphes possde en rgion temporale une glande de Duvernoy drive des glandes salivaires. Lapparition dun sillon ou dun canal creus le long dune ou plusieurs dents va permettre la pntration de la salive dans les tissus de la proie. Les colubrids opisthoglyphes ont des crochets postrieurs et sillonns partiellement et il existe donc un risque dinoculation du produit de scrtion de la glande de Duvernoy, surtout en cas de contact prolong. 4 - Famille des Viperidae (Tableau I) : comprenant 7 espces au Maroc dont la rpartition gographique est bien dtermine, savoir : Bitis arientans, Cerastes cerastes, Cerastes vipera, Vipera latasti, Daboia mauritanica, Vipera monticola, Echis leucogaster. Cette famille possde un appareil venimeux complexe avec

ClassificationLinventaire et la classification des ophidiens au Maroc a t dfinie par les nombreux travaux raliss par le dpartement de Zoologie et dEcologie Animale de lInstitut Scientifique de Rabat [5,6,7,8] et complte par une grande base de donnes issue de linventaire des collections de rfrences de lInstitut Scientifique de Rabat. Au Maroc, la faune ophidienne montre la prsence de cinq familles de serpents: 1- Famille des Leptotyphlopidae : reprsente par une seule espce: Leptotyphlops macrorhynchus, petit serpent vermiforme dune longueur de 17 28 cm, ne prsente aucune scrtion toxique dans sa cavit buccale ni de glande

Toxicologie Maroc - N 9 - 2me trimestre 2011 - 3

Cliniquetableau i : Serpents venimeux du maroc Espce

Dfinition et classification des serpents du Maroc

Naja legionis

Description, habitat et biologie

Description : Taille : 1,8 2,5m , de couleur brun noirtre ou gris clair; Habitat : Milieux arides, semi-dserts, arganeraies, oasis, oueds temporaires; Biologie: Recherche la fracheur et lhumidit dans les zones basses des dunes, les jardins et les cultures Activit : crpusculaire ou nocturne pendant la saison chaude, diurne le reste de lanne.

Echis leucogaster Description : Taille moyenne 83 cm , son museau court et arrondi avec tte large et plate, de couleur brun ple orange sombre et porte des bandes sombres sur toute la longueur; Habitat : Rgions subdsertiques rocheuses ou sablonneuses des zones sahariennes; Biologie : De murs nocturnes

Bitis arietans

Description : Serpent trs massif de forme trapue et lourde pouvant atteindre une taille de 1,91 m avec une tte nettement spare du corps, triangulaire petite et plate. Narines souvrant au niveau de la partie suprieure du museau. Coloration : fond brun et marron avec des tches blanches et noires en forme de chevrons. Habitat: Terrestre frquente dans les zones steppiques vgtation claire, mais aussi des fourres de palmier. Biologie: Lent, gonfle son corps et siffle si menac (Puff Adder). Posture frappante : dresse sa partie antrieure du corps en S et frappe rapidement. Activit : actif laurore parfois nocturne; Description : Taille maximum de 1,60 m, de forme trapue tte triangulaire avec prsence de tches sombres en chapelet en lignes sinueuses ou en bandes transversales; Habitat: Rochers, collines broussailleuses, vieux murs, boulis vgtation trs ensoleills, forts substrat rocheux et dans les endroits clairs bien exposs au soleil. Biologie : Nocturne et plus active au cours de dbut de soire. Capture les proies par embuscade. Drange, elle tend maintenir sa position plutt que de fuir, siffle fort. Description: Taille moyenne de 65 cm avec tte aussi large que longue et une queue courte, pointue et noirtre. De couleur jaune sable, ple avec des tches plus sombres. Les cailles supra-oculaires en forme de cornes; Habitat: Dsert, regs, hamadas, dunes non vives. Biologie: Nocturne et erratique lt, sdentaire en hiver. Passe la journe sous une couche de sable, yeux lextrieur. Emet un frottement caractristique et laisse sur le sable des traces sinueuses typiques.

Daboia mauretanica

Cerastes cerastes

Cerastes vipera Description: Petite taille de 49 cm . Les yeux sont apicaux et ports par une petite tte bien individualise. De couleur claire (jaune sable ou rouge brique ple), et porte des taches sombres le long du corps; Habitat : Localise dans les rgions sablonneuses et surtout les ergs et senfonce laissant uniquement ses yeux lextrieur.

Vipera latastei

Description : Petite taille (53 cm) avec un museau qui porte un appendice dirig vers le haut; Habitat : Pentes dboulis ensoleilles et portant des broussailles, forts claires et feuillus; Biologie: Espce anthropophobe ne tolrant pas la prsence de lhomme. Terrestre et habituellement diurne et nocturne et crpusculaire en saison chaude. Si elle est drange, elle attaque plutt que de senfuir. Frquente galement dans des biotopes ctiers substrat sablonneux.

Vipera monticola Description : Le plus petit reprsentant du genre (39cm) avec une tte petite et triangulaire distincte du cou. Le museau lgrement retrouss et arrondi . Les narines latrales et les cailles dorsales carnes; Habitat et biologie: Gnralement diurne et terrestre labri sous les pierres ou dans les vgtations

des crochets solnoglyphes canaliculs et replis contre le palais lorsque la gueule est ferme et qui se dploient et pntrent dans la chair de la victime en cas dattaque. 5- Famille des elapidae (Tableau I) : reprsente par une seule espce : Naja Legionis. Ce type de serpent prsente un crochet venimeux situ en avant du maxillaire (protroglyphe) sillonn ou canalicul.

ConclusionLes connaissances sur la biogographie et lcologie des serpents venimeux du Maroc sont dimportance capitale pour le clinicien. Elles permettent de dterminer le risque ophidien, cibler les actions de sensibilisation et planifier la disponibilit de la srothrapie adapte. Elles ne peuvent tre acquises que par une collaboration entre cliniciens, herptologistes, pidmiologistes et toxicologues.

1. Rey A. Le Grand Robert de la langue franaise. Le Robert Paris 2011 - 2. Lewis RA. Dictonnary of toxicology. Boca Raton Floride. Lewis publishers. 1998. - 3. Chippaux JP. Venins de serpents et envenimations. Paris : IRD. 2002- 4. Vidal N. Quest-ce quun reptile venimeux? systmatique des ophidiens. In :Mion G, Larrch S, Goyffon M. Aspects cliniques et thrapeutiques des envenimations graves. Ganges : Urgences Pratiques publications ; 2010. p. 54-59 - 5. Aellen V. Contribution lherptologie du Maroc. Bull Soc Sci Nat Maroc. 1951 ; 31:159-199. -6. Bons J. Aperu sur le peuplement herptologique du Maroc Oriental. Bull Soc Sci Nat Phy. Maroc. 1960 ; 40:53-75. -7. Fahd S, Pleguezuelos JM. Los reptiles del Rif. Rev Espaola Herp. 2001 ; 15:13-36. - 8. Fekhaoui M. Amphibiens et reptiles du Maroc, tude nationale sur la biodiversit. Rabat. Ministre de lEnvironnement ; 1998. -9. Larrch S, Mion G, Donnard S, Doare R. Envenimations par les colubrids. In : Mion G, Larrch S, Goyffon M. Aspects cliniques et thrapeutiques des envenimations graves. Ganges : Urgences Pratiques publications ; 2010. p. 116-123.

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CliniqueLutte Contre Les Morsures De serPents : un Dbut De strAtgieChafiq Fouad, Rhalem Nama, Soulaymani-Bencheikh Rachida Centre Anti Poison et de Pharmacovigilance du Maroc

Conscient de la gravit des morsures et envenimations de serpents (MES), le Centre Anti Poison du Maroc entreprend plusieurs actions visant rduire les retombes de ces incidents. Le Dr Chafiq Fouad est le mdecin responsable de la mise en place dune stratgie spcifique la lutte contre les MES. Les premiers lments de cette stratgie sont : - evaluation de lampleur du problme au niveau national et rgional; - Sensibilisation des professionnels de sant sur les zones risques (circulaire ministrielle N 014146 du 14 juillet 2008); - Formation du personnel mdical et paramdical oprant dans les zones forte incidence, par lorganisation de journes de sensibilisation sur les MES (Chtouka Ait Baha, Tiznit, Sidi Ifni, Benslimane). Ces formations ont port sur lintrt de lidentification des espces ophidiennes de la rgion, les premiers gestes de secours et la prise en charge des envenimations ophidiennes;

- Proposition de la srothrapie contre les morsures de serpents parmi la liste des antidotes essentiels au Maroc; - Elaboration dune fichesurlestoxidrmes rencontrs au Maroc

Dautres actions restent dvelopper telle limplantation dun systme dinformationspcifiqueauxMES, pour suivre lvolution des diffrents indicateurs de morbidit et de mortalit, et valuer limpact des actions de prvention et de prise en charge entreprises par le CAPM.

Sance de sensibilisation, personnel mdical et paramdical, Tiznit, 2010

La srothrapie dans Les envenimations ophidiennesLenvenimation ophidienne est une urgence absolue ncessitant parfois des gestes de ranimation (remplissage vasculaire, intubation-oro-trachale, ventilation artificielle). En cas denvenimation grave, limmunothrapie antivenimeuse peut savrer trs utile. En Europe, la mise en place dimmunoglobulines Fab2 hautement purifies ayant un fort pouvoir neutralisant sur le venin des trois principales vipres endmiques en Europe a amlior le pronostic des envenimations. La prcocit du traitement par ces immunoglobulines dans les envenimations grade II et III a rduit la morbidit, les squelles et les dures dhospitalisation. Les indications de limmunothrapie antivenimeuse sont : Dans le syndrome viprin : Grade II (envenimation de gravit intermdiaire), grade III (envenimation grave), et grade I (envenimation minime) en cas de grossesse ou de lsions potentiellement hmorragiques, de morsure au visage ou du cou, et quand lge < 11 ans ou > 60 ans ; Dans le syndrome cobraque. tant donn que la srothrapie est non disponible au Maroc, et en sappuyant sur les types despces de serpents venimeux du Maroc, le CAPM a propos parmi la liste des antidotes essentiels limportation du Fav-Afrique, antivenin polyvalent qui serait efficace contre la Bitis arietans, Echis leucogaster et Naja haje do lintrt du contexte gographique (espces prsentes dans la rgion) et de lidentification. La posologie initiale est de 2 ampoules quels que soient lge et le poids de la victime. Son cot est de lordre de 1000 dhs par ampoule.

Toxicologie Maroc - N 9 - 2me trimestre 2011 - 5

Article originalProfiL PiDMioLogique Des CAs De Morsures De serPents DCLArs Au Centre Anti Poison Du MAroC (1980 2008)Chafiq Fouad1, Rhalem Nama1,2, Ouammi Lahcen1,2, Fekhaoui Mohamed 3, Semlali Ilham1, Soulaymani Abdelmjid 2, Soulaymani-Bencheikh Rachida1,4 1- Centre Anti Poison et de Pharmacovigilance du Maroc 2- Laboratoire de Gntique et Biomtrie, Facult des Sciences, Universit Ibn Tofail de Knitra 3- Institut Scientifique de Rabat 4-Facult de Mdecine et de Pharmacie de Rabat

introductionLes morsures et envenimation de serpents (MES) sont lorigine de mortalit importante et dhandicaps physiques et psychologiques chez lhomme, mais leur reconnaissance comme problme de sant publique lchelle internationale est entrave par une insuffisance des donnes pidmiologiques [1]. Au Maroc, ltude des ophidiens pouvant tre lorigine des accidents de MES, montre la prsence de deux familles venimeuses dont la distribution gographique est spcifique chacune des espces identifies [2].Nombre total d'intoxications toutes causes confondues 8000

Lampleur des MES au Maroc na jamais t dcrite partir dune base de donnes nationale ; ceci a justifi ce travail dont lobjectif tait de dcrire les caractristiques pidmiologiques des accidents de MES recenss par le Centre Anti Poison du Maroc (CAPM), entre 1980 et 2008, sur lensemble du Royaume.

matriel et mthodeNous avons men une tude rtrospective vise descriptive sur une priode de 29 ans allant du premier janvier 1980 au 31 dcembre 2008.

Cette tude a concern tous les cas de MES signals au CAPM par courrier ou tlphone. Lanalyse statistique a port sur la frquence des MES, lge, le sexe, lorigine du patient (rural ou urbain), lheure de la morsure, la saison, le type des serpents agresseur, la provenance du patient et la rgion, les signes cliniques et les modalits volutives. Les donnes ont t enregistres sur une base de donne nationale et analyses par lapplication Excel et le logiciel Epi info 3.3.2.

Nombre de cas demorsures de serpent 500 450 400 350

7000

Nombre total d'intoxications toutes causes confondues Nombre de cas morsures de serpents

6000

5000

300 250 200 150

4000

3000

2000 100 1000 50 0 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008

0

Annes

Dclaration obligatoire des intoxications

Cration du CAPM

Mise en place de lInformation Toxicologique

Premire Journe Portes Ouvertes

Dbut de lidentification des espces ophidiennes par le CAPM

Circulaire concernant les zones gographiques risque ophidien

Figure 1 : Distribution des cas daccidents de MES en fonction des annes et certains vnements qui ont accompagn cette volution, CAPM, 1980 - 2008

6 - Toxicologie Maroc - N 9 - 2me trimestre 2011

Profil pidmiologique des cas de morsures de serpents dclars au Centre Anti Poison du Maroc

Article originalTableauII:AppareilsatteintslorsdesMES(ClassificationWHOArt),CAPM,1980-2008

tableau i : Rpartition des cas de meS dclars par provinces, CaPm, 1980 - 2008

Provinces Essaouira Agadir Ida-Ou-Tanane Tiznit Tata Ifrane Chefchaouen Oujda Angad Azilal Errachidia Rabat Khnifra Safi Taounat Nador Ttouan Tan Tan Taroudant Chichaoua Mekns Autres provinces Totaux

Effectif 326 276 176 170 123 112 65 51 42 39 31 21 21 20 19 19 17 16 14 191 1749

% 18,6 15,8 10,1 9,7 7,0 6,4 3,7 2,9 2,4 2,2 1,8 1,2 1,2 1,1 1,1 1,1 1,0 0,9 0,8 10,9 100,0

Catgories deffets selon le systme ou organe Affections du systme gastro-intestinal Troubles de la frquence et du rythme cardiaques Affections de lappareil respiratoire Troubles du systme nerveux central et priphrique Affections de lappareil cardio-vasculaire gnral Troubles de ltat gnral Affections de la peau et de ses annexes Autres catgories deffets Total

Effectif 980 364 288 294 234 233 33 34 2460

% 40 14,8 11,7 12,0 9,5 9,5 1,3 1,3 100

tableau iii : evolution des cas de meS dclars par rgions et par provinces, CaPm, 1980-2008

RsultatsAu total, 1761 cas daccidents de MES ont t dclars au CAPM durant la priode allant de 1980 2008 soit 2,06% de lensemble des cas dintoxications et une moyenne annuelle de 60 cas de MES (les piqres et les envenimations scorpioniques (PES) tant exclues), lincidence tant de 0,2 pour 100 000 habitants par an. La rpartition temporelle des cas de MES a montr une augmentation relle partir du dbut de fonctionnement effectif du dpartement de linformation toxicologique du CAPM (Figure 1). Lge moyen des victimes tait de 26 17,5 ans avec des ges allant de la priode nonatale 98 ans. Les enfants 15 ans reprsentaient 31% des cas. Le sex ratio (SR) tait en faveur du sexe masculin (SR=1,2) et 70% des cas de MES survenaient en milieu rural. La rencontre entre le serpent et lhomme se faisait surtout entre 10 heures et midi et entre 17h et 19h et la distribution saisonnire montre que les MES sont plus frquentes en t suivi du printemps. La province ayant dclar le plus grand nombre daccident de MES tait celle dessaouira avec 326 cas (18,6%), suivie par la province dAgadir Ida-Ou-Tanane avec 276 cas (15,8 %). Les cinq rgions les plus touches par les accidents de MES ont t, par ordre

Rgion / Province Souss-Massa-Daraa Agadir Ida-Ou-Tanane Tiznit Ouarzazate Taroudant Chtouka Ait Baha Zagora Mekns-Tafilalt Ifrane Khnifra Errachidia Mekns Guelmim Es-Smara Tata Guelmim Es-Semara Assa-Zag Tan Tan Marrakech-Tensift-Al Haouz El Kelaa des Sraghna Marrakech Chichaoua Essaouira LOriental Oujda Angad Figuig Jerada Nador Taourirt Tadla-Azilal Azilal Beni Mellal Doukala-Abda Safi El Jadida Layoune-Boujdour-Sakia El Hamra Layoune Boujdour Rgions ltalit gale 0 n Total

Favorable 323 175 135 2 6 4 1 160 111 20 19 10 113 94 2 4 4 9 64 1 3 2 58 64 37 5 2 18 2 28 26 2 13 12 1 7 6 1 186 772 958

Squelles 7 5 2 0 0 0 0 0 0 0 0 0 2 2 0 0 0 0 2 0 0 0 2 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 11 11

Dcs 45 40 5 0 0 0 0 10 0 4 4 2 9 6 1 1 1 0 5 1 0 0 4 2 1 1 0 0 0 2 2 0 2 2 0 1 1 0 0 76 76

Total 375 220 142 2 6 4 1 170 111 24 23 12 124 102 3 5 5 9 71 2 3 2 64 66 38 6 2 11 2 30 6 4 15 14 1 8 7 1 186 859 1045

Toxicologie Maroc - N 9 - 2me trimestre 2011 - 7

Article originaltableau iV : tableau comparatif des caractristiques volutives entre les PeS et les meS (19892008)

Profil pidmiologique des cas de morsures de serpents dclars au Centre Anti Poison du Maroc

Scorpion Nombre de notifications reues 206 141 sex ratio M/F 0,97 % de cas enfant 15 ans 28,74 Taux denvenimation (%) 10,14 Nombre total de dcs 774 Taux de ltalit moyenne (%) 0,39 Taux de ltalit par envenimation 3,74 Ltalit par enfant 15ans 1,11 Rgions haut risque Marrakech-Tensift-Al Haouz (par ordre dcroissant) Doukala-abda Tadla Azilal Chaouia-Ouardigha Souss-Massa-Daraa Fes- Boulmane

Serpent 1757 1,2 31,7 62 76 7,1 6,8 7,1 Souss-Massa-Daraa Marrakech-Tensift-Al Haouz Mekns-Tafilalt Guelmim-Es Semara Tanger-Ttouan

rural, et par consquent les cas ne sont pas reports [2]. Le nombre mondial estim de cas denvenimations est de 421 000 1 841 000 par an dont 20 000 94 000 dcs et ce nest quen 2009 que lOMS a reconnu que lampleur du problme des MES a t nglige [2, 3]. Au Maroc, du fait de lasous-notification globale des intoxications par les mdecins des diffrentes provinces, le nombre de cas de MES est sous-estim. Les provinces du sud sont les plus touches ; ceci peut sexpliquer par plusieurs facteurs : lcologie des espces, lanthropisation du milieu et la raret des ressources en eau. Cependant la rgion du Nord du Maroc (Tanger-Tetouan) est une rgion prendre en compte du fait du nombre de cas dclars par la province de Chefchaouen. Par ailleurs, 70% des morsures sont survenues en milieu rural alors quEl Koraichi rapporte que la totalit des MES de sa srie se sont produites en milieu rural. Le taux denvenimation (62,0%) reste lev par rapport ce qui a t rapport par certains auteurs et qui est de lordre de 17% [4] et entre 25 30% [5] selon lespce. Il est galement suprieur au taux denvenimation par piqres de scorpion (Tableau IV). Lidentification prcise de lespce de serpent agresseur na t rapporte que dans un seul cas (Daboia mauritanica dans la province de Tiznit) du fait de la difficult de lidentification prcise du serpent agresseur. Un aperu de linventaire des espces ophidiennes du Maroc montre la prsence de deux familles venimeuses [6]: la famille des Elapidae reprsente par le Naja legionis, et celle des Viperidae comprenant 7 espces (Bitis arientans, Cerastes crastes, Cerastes vipera, Vipera latastei, daboia mauritanica, Vipera monticala, Echis carinatus) (Tableau V).

dcroissant : Souss-Massa-Draa (27,4%), Marrakech-Tensift-Haouz(20,7%), Mekns Tafilalt (12,2%), Guelmim-Es Semara (11,8%) et Tanger-Tetouan (8,3%) (Tableau I). Lincidence cumule sur 5 ans de 2004 2008 a montr que la rgion de Guelmim-Es Semara occupait la premire position (1,13 pour 100 000 habitants) suivie par la rgion de Tanger-Ttouan (1,04 pour 100 000 habitants) (Figure 2). Lidentification prcise du serpent agresseur na t rapporte que dans un seul cas (Daboia mauritanica dans la province de Tiznit). Parmi les 1761 cas de MES, 1049 cas taient symptomatiques soit un taux denvenimation de 62,0%. Concernant les signes cliniques, rpartis en fonction du systme dorganes, les affections du systme gastro-intestinal occupaient la premire place (40,0%), suivies par les troubles de la frquence et du rythme cardiaques (14,8%) (Tableau II). La ltalit tait de 7,2% (76 dcs). Lvolution tait favorable dans 92,0% des cas et les squelles taient prsentes dans 1% des cas.Nom scientifique Naja legionis Cerates cerates Bitis arientans Cerastes vipera Daboia mauritanica Echis carinatus Vipera monticola Vipera latastei

La ltalit spcifique aux enfants 15ans tait de lordre de 13,18 %. Enfin, 60 % des dcs (45 dcs) taient dclars par la rgion de Souss-MassaDaraa dont 40 dcs par la province dAgadir (Tableau III), suivie par la rgion de Mekns-Tafilalt (10 dcs). Concernant la prise en charge, il a t rapport : un traitement symptomatique dans 32,0% une abstention thrapeutique dans 23,0%, une surveillance mdicale dans 29,0%, et un traitement spcifique dans 0,5 %.

DiscussionNous avons compt, au terme de cette tude, 1761 cas daccidents de meS durant la priode allant de 1980 2008. Lincidence de 0,2 pour 100 000 habitants par an reste inferieure ce qui a t rapport en Afrique du nord (11 pour 100 000 habitants par an) [1]. Dans le monde, peu de donnes pidmiologiques fiables en rapport avec les accidents de MES sont disponibles, en particulier pour leur survenue en milieu

tableau V : Serpents venimeux du maroc et aire de distribution [8]

Nom commun Cobra ou Naja Vipre cornes Vipre heurtante Vipre de lErg Vipre de Mauritanie Echide carne Vipre naine de latlas Vipre de lataste

Aire de distribution Elapidae Sahara, Laayoune, rgion dAgadir avec extension jusqu Figuig (limite sud des Atlas) Viperidae Zones predsertiques du sud de lAtlas, Goulmime, Tarfaya, Assa, sud-ouest du Maroc, Sahara marocain Sud-ouest du Maroc, valle de Souss, Anti-Atlas, Tan Tan, Souss, Taroudant Tarfaya, Laayoune, Merzouga Anti-atlas, Tan Tan, Moyen-Atlas, environs de Rabat, environs de Marrakech, Draa, Jerada,Goulmima, environs de Ouazzane, Rif central Goulmime, Figuig, Gueltate Zemmour, Sahara marocain Haut atlas, Moyen atlas (rgion Qsiba) Rif, Moyen-Atlas, Haut-Atlas

8 - Toxicologie Maroc - N 9 - 2me trimestre 2011

Profil pidmiologique des cas de morsures de serpents dclars au Centre Anti Poison du Maroc

Article original

Deux syndromes diffrents peuvent survenir habituellement suite aux morsures par ces deux familles [7] : - le syndrome viprin par la famille des viperidae qui se manifeste par un syndrome inflammatoire clinique (douleur, dme) et biologique (hyperleucocytose, protinurie), parfois accompagn dune hypotension ou dun tat de choc et dun syndrome hmorragique [8] - le syndrome cobraique du aux lapids qui entraine des paralysies des muscles stris et une paralysie respiratoire en quelques heures [9]. Lanalyse des signes cliniques montre que les affections du systme gastrointestinal occupaient la premire place (40,0%) et taient domins par les vomissements et les nauses. Ces troubles digestifs seraient dus la stimulation de la Chmotriggerzone par certaines toxines aggravant les troubles hydrolectrolytiques [10]. Ldme, premier signe objectif denvenimation viprine na t observ que dans 2,0% de lensemble des signes cliniques. Ce signe a t rapport dans la srie dEl Koraichi dans 82,0 % des cas [4]. De mme, la ncrose cutane dont la svrit est dpendante de la composition du venin et la quantit inocule na t que rarement rapporte (7 cas) [11]. Le syndrome hmorragique responsable de plus de la moiti de la morbidit et de la mortalit dues aux morsures de serpents dans le monde na t rapport que dans 1,3% [12]. Les signes correspondant aux troubles du systme nerveux central et priphrique (12,0% dans notre srie) orientent difficilement vers un syndrome cobraque devant labsence de signes pathognomoniques de ce syndrome et labsence didentification du serpent agresseur. La majorit des cas de dcs sont survenus dans la province dAgadir, suivie par la province de Tata. Ceci pourrait sexpliquer par laire de distribution gographique de la Bitis arientans et de la daboia mauritanica. En ce qui concerne la rgion de TangerTetouan pour laquelle Chefchaouen est une province haut risque ophidien, les espces en cause (Vipera latastei et Vipera monticala) ne sont pas aussi dangereuses que celles incrimines dans les rgions du sud. Par ailleurs, plusieurs paramtres cliniques et biologiques manquent, ce qui ne permet pas de faire une bonne interprtation des donnes.

Figure 2 : Incidence cumule sur 5 ans des MES selon les rgions, CAPM, 2004-2008

Au niveau de la prise en charge, le traitementspcifiquenatrapportque dans 12 cas alors que la srothrapie tait disponible avant 2001. Limplantation dun systme dinformation spcifique aux envenimations ophidiennes, pour la collecte des donnes et le suivi de lvolution des diffrents indicateurs de morbidit et de mortalit reste donc dvelopper.

Rfrences1. Chippaux JP. Incidence et mortalit par animaux venimeux dans les pays tropicaux. Med trop. 2008 ; 68 :334-339 2. Warrell DA. Snake bite. Lancet. 2010 ; 375 : 77-88 3. Kasturiratne A, Wickremasinghe AR, de Silva N, et al. The global burden of snakebite: a literature analysis and modelling based on regional estimates of envenoming and deaths. PLoS Med. 2008; 5: 218. 4. El Koraichi A et al . Epidmiologie des envenimations par morsure de vipere en unit de soins de ranimation pdiatrique a lhpital dEnfant de Rabat au Maroc. Annales francaises dAnesthsie et de ranimation. 2011 ; 30 : 83-85. 5. Larrch S et al. Envenimations ophidiennes graves. Le praticien en anesthsie Ranimation.2010 ; 14 :254-263. 6. Fekhaoui M. Amphibiens et reptiles du Maroc, tude nationale sur la biodiversit. Observatoire national de lenvironnement, ministre de lenvironnement .1998. 7. Chafiq F, Rhalem N, Fekhaoui M, Soulaymani R. Conduite tenir devant une morsure de serpent. Esprance mdicale. Juin 2008. Tome 15, N 148 : 230-234. 8. Chippaux JP. Envenimations et intoxications par les animaux venimeux et vnneux. Med trop. 2006 ; 66 : 423-428 9. Chippaux JP. Med trop. 2007 ; 67 : 9-12. 10. Mion G, Olive F, Giraud D, Lambert E, Descraques C, Garrab E, Goyffon M. Surveillance clinique et biologique des patients envenims. Bull Soc Pathol Exot 2002 ;95 :139-43. 11. Chippaux JP. Inflammation et ncrose dans les envenimations viprines: le syndrome viprin. In: Mion G, Goyffon M. Les envenimations graves. Paris: Arnette; 2000:35-42. 12. White J. Snake venoms and coagulopathy. Toxicon. 2005;45:951-67.

ConclusionCette tude nous a permis de dcrire les caractristiques relatives aux MES au Maroc et de relever les rgions risque ophidien qui sont Souss-Massa-Draa, Marrakech-Tensift-Al Haouz, MeknsTafilalt et Guelmim-Es Semara. Les limites de cette tude taient le manque dinformations concernant le serpent agresseur, les perturbations des paramtres biologiques et la prise en charge dtaille des patients envenims. Ces derniers restent primordiaux pour la mise en place dune stratgie de prise en charge adquate des envenimations avres des serpents. Lamlioration de la prise en charge des accidents de MES ne peut se faire que par une collaboration troite entre cliniciens, herptologistes, pidmiologistes, toxicologues et producteurs de srums spcifiques.

Toxicologie Maroc - N 9 - 2me trimestre 2011 - 9

CLINIQUEMorsure / envenimation ophidienne : Toxidrmes *Patient prsentant une morsure de serpent venimeux sans identification de lespce agresseur

Syndrome viprin

Syndrome cobraque

Grade 0 (Morsure blanche)

Grade 1 (Envenimation mineure)

Grade 2 (Envenimation modre)

Grade 3 (Envenimation svre)

Douleur modre, traces de crochets, pas doedmes, pas dhmorragies, pas de troubles de lhmostase.

Douleur importante, dme ne dpassant pas le coude ou le genou, pas dhmorragies, absence de signes gnraux, troubles mineurs de lhmostase.

Oedme dpassant le coude ou le genou, prsence de phlyctnes et de ncrose, saignement modr au niveau de la morsure, hmaturie, gingivorragies, symptmes gnraux modrs (hypotension modre, vomissements, douleurs abdominales, diarrhes), coagulopathie.

Oedme dpassant la racine du membre, ncrose tendue, pistaxis, hmoptysies, saignement digestif, symptmes gnraux modrs (hypotension prolonge, choc, raction anaphylactique), atteintes viscrales, coagulopathie.

Paresthsies du membre mordu, ptosis bilatral pathognomonique, atteinte des paires crniennes (troubles de la dglutition et de la phonation, paralysie ascendante, arrt respiratoire).

Famille des Viperidae Bitis arietans, Cerastes cerastes, Cerastes vipera,Vipera latastei, Vipera monticola, Daboia mauretanica, Echis leucogaster * Auteur : Chafiq Fouad - Centre Anti Poison du Maroc

Famille Elapidae Naje legionis

Rfrences 1. Harry P, De Haro L. Traitement des envenimations par les serpents en France. Ranimation 2002 ; 11 : 548-53. 2. Larrch S, Boucau C, Erauso T, Mion G. Envenimations ophidiennes graves. Le praticien en anesthsie ranimation. 2010, 14 : 254-263 3. Fekhaoui M. Amphibiens et reptiles du Maroc, tude nationale sur la biodiversit. Observatoire national de lenvironnement, ministre de lenvironnement .1998.

Le CAPM tient remercier le Pr Fekhaoui Mohammed, chef de Dpartement de Zoologie et dEcologie Animale et Mr Mattaam Abderrahmane, taxidermiste lInstitut Scientifique pour leur collaboration la lutte contre les MES.

10 - Toxicologie Maroc - N 9 - 2me trimestre 2011

RapportrAPPort AnnueL 2010 Des intoxiCAtions DCLAres Au Centre Anti Poison Du MAroCChaoui Hanane1,2, Semlali Ilham1, Rhalem Naima1,2, Idrisssi Mouncef1,2, Soulaymani Bencheikh Rachida1,31- Centre Anti Poison du Maroc 2- Facult des sciences, Universit Ibn Tofail, Knitra 3- Facult de Mdecine et de Pharmacie, Rabat

introductionLe Centre Anti Poison du Maroc (CAPM) est un centre national ddi la gestion des problmes toxicologiques, qui dessert toute la population marocaine [1], estime en 2010 31 851 000 habitants [2]. Lobjectif de ce rapport est de dcrire les caractristiques des intoxications dclares au CAPM au cours de lanne 2010, afin de mettre jour le profil des intoxications au Maroc.

- Les dossiers mdicaux des cas pris en charge par le service de lInformation Toxicologique (IT) ; - Lesfichesdanalysedetoxicologie pour les demandes parvenues au laboratoire de toxicologie du CAPM ; - Les relevs mensuels des piqres et envenimations scorpioniques (PES). Les piqres et envenimations scorpioniques (PES), faisant lobjet dun systme dinformation part, ont t analyses sparment. La gradation des cas dintoxications aigus a t faite selon le Poisoning Severity Score (PSS) [3]. Les tranches dge qui ont t adoptes sont celles de lInternational Programme on Chemical Safety (IPCS) de lOMS [4].

RsultatsI- Evolution des dclarations Les dclarations des intoxications aigues et des PES sont en augmentation rgulire danne en anne (Figure 1). II- Intoxications aigus en dehors des PES 1. Effectif des intoxications aigus selon le systme dinformation Au cours de lanne 2010, le CAPM a recens 7801 cas dintoxications aiges soit une incidence de 23,46 pour 100 000 habitants. Parmi ces cas, 35% ont t pris en charge par le service dInformation Toxicologique, 58% des cas ont t notifis sur les fiches de dclaration des cas dintoxications reues par courrier et 7% sont parvenus au laboratoire pour analyse toxicologique.

matriels et mthodesLa collecte des cas dintoxications aigus au CAPM se fait par : - Les fiches de dclaration des cas dintoxications reues par courrier partir des provinces et prfectures mdicales du royaume ;

Figure 1 : Evolution des dclarations des cas dintoxications selon les annes

Toxicologie Maroc - N 9 - 2me trimestre 2011 - 11

Rapporttableau i : Rpartition des dclarations des cas dintoxications selon la rgion au cours de lanne 2010

rapport annuel 2010 des intoxications dclares au Centre Anti Poison du Maroc

Rgions Rabat Sal Zemmour Zair Tanger Ttouan Oriental Mekns Tafilalt Grand Casablanca Marrakech Tensift Al Haouz Tadla Azilal Souss Massa Draa Chaouia Ouardigha Fs Boulemane Taza Al Hoceima Gharb Chrarda Beni Hssen Guelmim Essaouira Doukkala Abda Laayoune Boujdour Oued Dahab Total

Total 1472 954 940 830 776 683 380 375 264 205 166 155 147 72 49 3 7471

% 19,7 12,77 12,58 11,11 10,39 9,14 5,09 5,02 3,53 2,74 2,22 2,07 1,97 0,96 0,66 0,04 100,00

Incidence/100 000 Habitants 55,63 98,25 47,19 37,09 20,32 20,84 25,47 11,1 15,41 12,04 8,97 7,88 28,71 3,5 15,51 1,55 23,46

La voie orale tait prdominante (69,63%). Les patients ont t hospitaliss dans 49,82% des cas (Tableau III). Les intoxications taient isoles dans 97,70% des cas. Dans 65,37% des cas, elles taient de grade 2 selon le PSS (Tableau IV). Lvolution des cas tait favorable dans 98,60% des cas. Le CAPM a enregistr 97 cas de dcs au cours de lanne 2010 soit une mortalit de 0,30 pour 100 000 habitants (0,24 en 2009) et un taux de ltalit de 1,24% (0,97 % en 2009). Lanalyse des cas de dcs a montr que les produits gazeux taient les plus mortels suivis des pesticides (Tableau V). III- Piqres et envenimations scorpioniques (PES) Durant lanne 2010, 28 379 cas de PeS ont t dclars au CaPm par les 16 rgions du Maroc (29 923 cas en 2009). Le sex ratio est inchang (0,92). La tranche dge des enfants de moins de 15 ans est passe de 24,9% en 2009 25,3% en 2010. Le taux denvenimation a augment de faon hautement significativeavec 9,56% contre 8,30% en 2009. Malheureusement, on a not une augmentation des cas de dcs avec un taux de ltalit gnral suprieur celui de 2009, de mme que le taux de ltalit chez les enfants de moins de 15 ans pass de 0,71% 0,77% (Tableau VI).

Nouveau-n

Nourrisson

Bb marcheur

Enfant

Adolescent

Adulte

Personne ge

Figure 2 : Rpartition des intoxiqus selon lge au cours de lanne 2010

DiscussionEn 2010, lanalyse des donnes montre une augmentation des dclarations des intoxications aigus de 2,06% par rapport 2009 [5].

2. Rpartition gographique des intoxications La rgion la plus reprsente tait celle de Rabat Sal Zemmour Zar (19,71%) suivie de la rgion de Tanger Ttouan (12,77%) (Tableau I). Ces intoxications se sont produites en milieu urbain dans 82,18% des cas. 3. Caractristiques de lintoxiqu La tranche dge la plus touche tait celle de ladulte avec 48,88% (Figure 2). Le sex ratio tait de 0,76. Lge moyen des intoxiqus tait de 21,14 ans. 4. Caractristiques du toxique Les intoxications aux mdicaments taient en tte (25,25%), suivies des intoxications alimentaires (23,14%) et des intoxications aux produits gazeux (22,27%) (Tableau II). 5. Caractristiques des intoxications La circonstance accidentelle tait la circonstance la plus frquente (84,10%).

Ces intoxications se sont produites domicile dans 87,26% des cas, dans un lieu public dans 7,54% des cas et un milieu professionnel dans 3,32% des cas.

tableau ii : Rpartition des dclarations des cas dintoxications selon le toxique incrimin au cours de lanne 2010

Toxique Mdicaments Aliments Produit gazeux Pesticides Animaux Produits mnagers Produits industriels Drogues Plantes Minral Mtaux lourds n

Total 1765 1617 1560 706 441 371 287 150 84 5 3 6989

% 25,25 23,14 22,32 10,10 6,31 5,31 4,11 2,15 1,20 0,07 0,04 100,00

12 - Toxicologie Maroc - N 9 - 2me trimestre 2011

rapport annuel 2010 des intoxications dclares au Centre Anti Poison du Maroc

RapportEffectif 6092 1152 7244 6124 529 83 233 4 45 7018 5187 547 1661 23 15 16 7449 2371 2388 4755 % 84,10 15,90 100,00 87,26 7,54 1,18 3,32 0,06 0,64 100,00 69,63 7,34 22,30 0,31 0,20 0,21 100,00 49,82 50,18 100,00tableau iV : Rpartition des cas dintoxications selon le grade de svrit

tableau iii : Caractristiques des intoxications aigues dclares au CaPm au cours de lanne 2010

Caractristiques Circonstance Accidentelle Volontaire n Lieu Domicile Public Ecole Milieu Professionnel Prison Institutions de sant n Voie Orale Cutane Inhale Injectable Oculaire Rectale n Hospitalisation Oui Non n

0 1 2 3 4 n

Grade

Effectif 784 1007 4526 542 97 6924

%

11,32 14,54 65,37 7,83 1,40 100,00

Concernant les PES, laugmentation du taux de ltalit chez les enfants de moins de 15 ans peut tre du au taux lev denvenimation et aussi la dclaration des cas de dcs par de nouvelle provinces. Par ailleurs, le taux de ltalit par envenimation scorpionique a diminu ce qui est un indicateur dune meilleure prise en charge.

ConclusionLes dclarations des cas dintoxications au CAPM ont considrablement augment au fil des annes. La base de donnes du CAPM est un outil prcieux pour la collecte et le suivi des cas dexposition aux toxiques. Elle peut tre utilise comme un systme de surveillance en temps rel. Ces donnes sont utilises pour identifier les risques, amliorer la prvention, former les professionnels de sant, soutenir les actions rglementaires (par exemple retrait de produits trs toxiques) et guider et stimuler la recherche clinique. A noter que la performance et la fiabilit des donnes dpendent en grande majorit de la qualit et de lexhaustivit des dclarations.

Malgr cette augmentation, lincidence des intoxications aigus pour lanne 2010 (23,46/100000 habitants) a diminu par rapport lanne prcdente (26,10/100 000 habitants) vu laccroissement de la population marocaine. La rgion la plus dclarante tait la rgion de Rabat Sal Zemmour Zair, comme lanne prcdente, du fait que les professionnels de sant de cette rgion, contactent plus le centre par tlphone; et que la majorit des demandes danalyses de toxicologie qui parviennent au laboratoire, vue la proximit, proviennent de cette rgion. Lanalyse des caractristiques de lintoxiqu et de lintoxication montre que leurprofilpourlanne 2010 reste presque inchang par rapport lanne prcdente ce qui prouve la fiabilit du systme dinformation utilis pour le recueil des donnes. Concernant le toxique incrimin, les mdicaments sont toujours en tte suivi cette anne des intoxications alimentaires, qui ont connu une hausse de 52,13% par rapport 2009 (ce sont les produits gazeux qui ont occup la deuxime place en 2009). Cette augmentation peut tre explique par ladoption, en 2010, dun systme de surveillance des toxi-infections alimentaires collectives plus exhaustif.

Pour les cas de dcs, ce sont les produits gazeux qui viennent en premire position comme en 2009. Mais la particularit de 2010, cest que 29 cas de dcs par gaz sur 33 taient dus au monoxyde de carbone et 4 cas un gaz trs toxique qui est lhydrogne sulfur survenus chez des boueurs [6]. Les dcs par pesticides ont occup la deuxime place (contre la troisime en 2009) cause de lutilisation accrue et but dautolyse (23 dcs sur 29) du phosphure daluminium (Phostoxin), un raticide puissant dont la toxicit touche plusieurs organes.Sex ratio Age moyen Circonstance

tableau V : analyse des cas de dcs toxique au cours de lanne 2010 selon le toxique incrimin

0,88 27,92 ans Accidentelle Volontaire Inconnue Produit gazeux Pesticides Inconnus Mdicaments Aliments Animaux Produits industriels Plantes Drogues (Ecstasy)

Toxiques incrimins

59,79% 34,02% 6,19% 34,02% 29,90% 9,28% 6,19% 5,15% 5,15% 5,15% 4,12% 1,03%

Toxicologie Maroc - N 9 - 2me trimestre 2011 - 13

Rapporttableau Vi : Caractristiques des PeS dclares au cours de lanne 2010

rapport annuel 2010 des intoxications dclares au Centre Anti Poison du Maroc

Caractristiques Nombre de rgions dclarantes Nombre de provinces dclarantes Nombre de cas dclars Incidence Moyenne Sex Ratio % enfant