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26 - Sciences et Avenir - Février 2014 - N° 804 DOSSIER Dormir son comptant et aux bonnes heures est une cure de jouvence pour les neurones. On peut ainsi se servir d’un repos optimisé pour améliorer ses performances. Démonstration. DOSSIER RéALISé PAR Elena Sender sommeil Tirer profit de son

S&A - Février 2014 - Dossier Sommeil

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Tirer profit de son sommeil

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  • 26-SciencesetAvenir-Fvrier2014-N804

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    Dormir son comptant et aux bonnes heures est une cure de jouvence pour les neurones. On peut ainsi se servir dun repos

    optimis pour amliorer ses performances. Dmonstration.

    Dossier ralis parElena Sender

    sommeilTirer profit de son

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    N802-Dcembre2013-SciencesetAvenir-27

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    a

    Vitamines, complments alimentaires, psychos-timulants lhiver venu, tout un arsenal pharmaceutique est mis en avant pour doper nos fonctions mentales censes tre fatigues. Cest ignorer que cha-cun condition de ne pas tre insomniaque est dot depuis sa naissance du plus efficace sti-mulant naturel, gratuit, agrable et sans effort: le sommeil. Ainsi, selon un sondage de lInstitut national du sommeil et de la vigi-lance (2012), 31% des Franais dormiraient moins de six heures par nuit, en de du seuil rpa-rateur de sept heures minimum recommand par la communaut mdicale. Chacun aurait ainsi ten-dance rogner petit petit sur

    ses heures de repos, considrant que le sommeil, qui occupe un tiers de la vie, constitue une perte de temps. tort! Car il est dsor-mais prouv que la restriction chronique de sommeil entrane des bouleversements au sein de lorganisme, jusqu modifier lex-pression de certains groupes de gnes impliqus dans le mtabo-lisme (lire p.28). En situation de restriction de sommeil, la plupart des processus cognitifs se dgradent significativement selon le type de fonctions cognitives impliques, du moment de la journe et de lge, explique Arnaud Rabat, docteur en neurosciences lIrba, lIns-titut de recherche biomdicale des armes (lire linterview p.30). Les fonctions excutives deman-

    dent une grosse concentration de nos ressources. Ainsi, si dormir moins naffecte pas tant les proces-sus automatiss, il y a une vritable chute des performances des proces-sus contrls, comme lattention, la prise de dcision ou la mmorisa-tion, ajoute Philippe Peigneux, professeur titulaire de la chaire de neuropsychologie lUniversit libre de Bruxelles (ULB). Mais la bonne nouvelle est que les dernires recherches ont mis en vidence que linverse est tout aussi vrai! Ainsi, dormir son comptant de sommeil, aux bonnes heures (lire p.32), est une cure de jouvence pour les neurones! Mieux, on a aujourdhui accu-mul tant de connaissances sur les mcanismes du sommeil que

    6hpar nuit

    le seuil en de duquel le sommeil nest pas rparateur.

    31%des Franais dorment

    entre deux et six heures par nuit en semaine.

    29 %des Franais sestiment

    tre du matin.

    41 % du soir

    (Source : Institut du sommeil et de la vigilance, 2012.)

    lucIE anD SImOn/pIctuREtank

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  • ide reueide reueIDE REUE

    Hippocampe

    Actylcholine

    ATPATP

    Adnosine

    ATP

    AdnosineAdnosine

    Oscillationscourtes et rapides

    Ractivation et mmorisation

    Oscillationscourtes et rapides

    Le cerveau reoitles informations

    Il les transmet lhippocampe

    Sommeil lent lgerSommeil lent lgerveil Sommeil lent profond (SLP)

    de 60 75 minutes

    90 minutes en moyenne

    UN CYCLE

    de 15 20 minutes

    Sommeil paradoxal Inter-mdiaire

    Cyclesuivantou veil

    N1 N2 N3 SP ou REM

    Thalamus

    N o c o r t e x

    Hipp

    ocampe

    N o c o

    r t e x

    Oscillationsamples et lentes

    ActylcholineActylcholine

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    lon peut dsormais apprendre sen servir pour en tirer le meilleur parti. Lide que sommeil et fonctions cognitives a t voque ds 1924, dans une tude mene par John Jenkins et Karl Dallenbach, deux psychologues amricains de luniversit Cornell, Ithaca, aux tats-Unis. Aprs avoir demand deux tudiants dapprendre des listes de syllabes sans signifi ca-tion par cur, ils ont test leur mmoire aprs une, deux, quatre ou huit heures dveil ou de som-meil. Les rsultats ont montr que les tudiants oubliaient moins les syllabes apprises aprs une priode de sommeil quaprs une priode quivalente dveil. On pouvait donc dj poser pour principe que, pour bien apprendre, il faut bien dormir. Ce nest que des dcennies plus tard, lorsquont t dtermines les dif-frentes phases de sommeil, que les scientifi ques ont commenc

    percevoir que tous les stades ntaient pas quivalents pour consolider les apti-tudes. Pour rappel, le som-meil est une succession de quatre six cycles de quatre-vingt-dixminutes en moyenne qui survient le plus souvent la nuit. Chaque cycle comprend quatre stades selon la nouvelle nomenclature amricaine (voir linfographie ci-contre), qui varient en dure au fur et mesure que lon se rapproche du lever: som-meil lent lger (stade N1 et N2), sommeil lent profond (SLP, stade N3), sommeil paradoxal (SP). Pendant ces phases, le cerveau produit di rentes activits lec-triques, mesures par lctro-encphalogramme (EEG). En dbut de nuit, on fait plus de som-meil lent profond, alors quen fi n de nuit le sommeil paradoxal est privilgi. Il y a vingt ans, la litt-rature scientifi que considrait le

    sommeil paradoxal comme le stade le plus important pour prserver les fonc-tions cognitives. Mais depuis dix ans, tout est remis en question. Quasiment tous les sp-cialistes saccordent dsor-mais sur le fait que le SLP

    est le grand stimulateur de nos fonctions cognitives.

    Et plusieurs tudes sont venues confi rmer son importance pour amliorer lapprentissage.

    Le sommeil lent profond permet de mieux mmoriser

    Bjrn Rasch, professeur luni-versit de Fribourg, en Suisse, a ainsi fait une belle dmonstration publie dans la revue Pnas (2012). Il a men une exprience avec 30 participants ayant un som-meil rgulier de plus de sixheures par nuit. quips dlectrodes sur la tte, ils ont t diviss en trois groupes. 21h30, le pre-mier groupe (16personnes) a t invit jouer un jeu de mmo-risation de paires de cartes, avant daller se coucher 23 h. Au bout de quarante minutes de sommeil dment mesur par lEEG tous ont t rveills. Ces qua-rante minutes ne correspondent pas un cycle complet, com-mente Bjrn Rasch. Il comprend des phases de sommeil lent lger et moins de vingt minutes de sommeil lent profond. Mais pas de sommeil paradoxal, qui arrive plus tard au cours de la nuit. Le chercheur a alors propos aux volontaires def-fectuer une nouvelle tche afin de crer une interfrence avant de tenter de restituer les paires de cartes mmorises avant de dor-mir. Le deuxime groupe (14 per-sonnes) a suivi le mme protocole mais en ayant droit quatre-vingt-dix minutes de sommeil, soit un cycle complet, comprenant qua-rante minutes de SLP et une trs courte phase de sommeil para-doxal. Et les scores fi naux ont t

    PHYSIOLOGIE

    Obsit, diabte, moins dormirbouleverse lexpression des gnes

    Dormir trop peu a des consquences physiologiques importantes et varies. Les sujets dormant moins de cinq heures par nuit ont un risque dobsit et de diabte de type 2 deux fois et demi plus lev que ceux dormant plus de sept heures. Ils ont aussi un risque dhypertension augment. Une quipe mene par Derk-Jan Dijk, de luniversit du Surrey (Royaume-Uni) a ainsi dmontr pour la premire fois (Pnas, 2013) que la restriction de sommeil modifi e jusqu lexpression des gnes. 26 participants de 23 31 ans dormant en moyenne 8,2heures par nuit ont t recruts. Pendant deuxsessions dune semaine, ils ont pu faire soit de longues nuits, soit de courtes nuits (moins de six heures). lissue de celles-ci, ils ont subi une prise de sang et pass des tests. Leur transcriptome, cest-

    -dire lensemble des ARN messagers en circulation dans le sang, refl tant une bonne part de lexpression du gnome, a t analys. Et les rsultats ne laissent pas place au doute. Un sommeil de moins de six heures entrane de mauvais rsultats aux tests comportementaux (vigilance, temps de raction, performances cognitives) et lexpression de 711 gnes en est bouleverse. Ces gnes rgulent pour certains le mtabolisme (ce qui pourrait favoriser le diabte de type 2 et lobsit). Dautres rgulent les rponses infl ammatoires (impact possible sur la sant cardio-vasculaire). Dautres encore contrlent le stress, le vieillissement et lhorloge circadienne. Reste dmontrer si lindividu, en rattrapant ce manque de sommeil, peut, ou non, remettre les choses en ordre sur le long terme

    SOMNIFRESIls permettraient un

    sommeil rcuprateur. Pas tant que cela. Certains

    suppriment la phase de sommeil lent profond si bnfi que, dautres le sommeil paradoxal. Des molcules qui prservent

    davantage les cycles naturels sont ltude.

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    Actylcholine

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    AdnosineAdnosine

    Oscillationscourtes et rapides

    Ractivation et mmorisation

    Oscillationscourtes et rapides

    Le cerveau reoitles informations

    Il les transmet lhippocampe

    Sommeil lent lgerSommeil lent lgerveil Sommeil lent profond (SLP)

    de 60 75 minutes

    90 minutes en moyenne

    UN CYCLE

    de 15 20 minutes

    Sommeil paradoxal Inter-mdiaire

    Cyclesuivantou veil

    N1 N2 N3 SP ou REM

    Thalamus

    N o c o r t e x

    Hipp

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    Oscillationsamples et lentes

    ActylcholineActylcholine

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    Limportance cruciale du sommeil lent profond

    veil : le cerveau stocke les informationsDurant lveil, les neurones mettent des ondes courtes et rapides. Les informations reues sont encodes de manire temporaire par lhippocampe, grce un neuromdiateur, lactylcholine. Et ils larguent de ladnosine, une molcule issue de la dgradation de lATP (adnosine triphosphate) qui leur donne lnergie ncessaire. Ladnosine qui saccumule sur les rcepteurs des neurones tout au long de la journe provoque un ralentissement de leur activit et un besoin de dormir. La cafine, qui se fi xe sur les mmes rcepteurs, contre cet e et.

    Sommeil lent profond : rgnrer et consolider ses souvenirsLors de cette phase, ladnosine est pompe par les neurones pour synthtiser de nouvelles rserves dnergie sous forme dATP. Le cerveau fait son plein dnergie et se rgnre. Par ailleurs, le taux dactylcholine chute. Cela entrane la synchronisation des neurones du nocortex. Ils se mettent mettre tous en mme temps des ondes amples et lentes. Le thalamus, lui, produit des ondes courtes et rapides. Ces phnomnes poussent lhippocampe faire linverse qu lveil. Il dstocke les informations, les trie et les envoie vers le nocortex pour un encodage long terme. Ce quon appelle la ractivation hippocampo-corticale, pivot central de la mmorisation et la gestion des informations nocturnes, selon un des modles les plus populaires en tout cas. (Daprs le modle de J. Born Neuroscience & Biobehavior, Rev 2012.)

    BETTY LAFON

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    a sans appel: ceux ayant pu faire du sommeil lent profond ont bien mieux mmoris (78%) que les autres (52%). De plus, leur per-formance est parfaitement corrle au temps quils ont pass en som-meil lent profond, observe Bjrn Rasch. Le chercheur constate ga-lement quil faut un minimum de vingt minutes en SLP pour que le processus de consolida-tion de la mmoire senclenche. Ainsi pour bien mmoriser, le SLP est recommand. Comment fairepour y parvenir? Sendor-mir grosso modo la mme heure chaque soir, afin que le cerveau habitu enclenche aussitt les premiers cycles riches en SLP.

    Les odeurs aident apprendre en dormant

    Dans la journe, on peut aussi programmer une sieste, condi-tion quelle soit dau minimum quatre-vingt-dix minutes, pour tre sr datteindre cette phase assez longtemps (lire p.34). On peut galement envisager de pro-voquer artificiellement ce qui se passe dans le sommeil lent pro-fond. Ainsi, Lisa Marshall, de luni-versit de Lbeck en Allemagne, a-t-elle montr quen reproduisant dans le cerveau de volontaires les ondes du sommeil lent profond par stimulation transcranienne,

    on augmentait la consolidation de la mmoire (2006, Frontiers in Human Neuroscience). Mais Bjrn Rasch est all encore plus loin. Le troisime groupe de son exprience (les 12 personnes restantes) a suivi le mme proto-cole que le premier (sommeil de quarante minutes), une excep-tion prs. Pendant lapprentissage des paires de cartes, les partici-pants ont respir une odeur de rose. Cette mme odeur a ensuite t diffuse durant leur sommeil. Et l, surprise: les participants ont atteint des scores de 84% de recon-naissance exacte! Suprieure donc au groupe qui avait dormi quatre-vingt-dix minutes. La diffusion de lodeur augmente lefficacit du SLP, explique le chercheur. Cela aurait pu tre un son aussi. Plus gnrale-ment, lenvironnement dans lequel nous apprenons quelque chose est un facteur crucial. Il est donc pos-sible damliorer artificiellement lefficacit de lapprentissage pen-dant le sommeil. En relisant par exemple une leon de mathma-tiques tout en respirant une odeur de citron, puis en sendormant juste aprs avec cette mme odeur. Dans ces cas-l, quarante minutes suffisentComment ce sommeil lent profond peut-il permettre de telles prouesses dans le cer-veau? Des tudes, notamment

    a Pour bien mmoriserIl faut favoriser le sommeil lent profond, plus abondant en dbut de nuit, car il consolide la mmoire smantique (connaissances gnrales). Pour cela, mieux vaut se coucher heures rgulires pour accumuler tous les jours le mme besoin de sommeil, et donc faciliter la rgulation des rythmes et la qualit du sommeil. Ou bien faire au moins 90minutes de sieste dans laprs-midi.

    a Pour garder un esprit cratif Il faut favoriser le sommeil paradoxal, stade abondant surtout en fin de nuit. Et ce, en prolongeant une grasse

    matine si cest possible ou bien en faisant une sieste dau moins 90 minutes le matin.

    a Pour ragir limprvuIl faut avoir dormi le nombre dheures ncessaire (dtermin par son chronotype), sinon la capacit de dcision et raction limprvu est amoindrie. Une sieste peut aider effacer la dette de sommeil nocturne.

    a Pour stimuler ses performances dans la journeUne courte sieste de 20 minutes en dbut daprs-midi rehausse le niveau des performances cognitives.

    Quelle est la diffrence entre manquer de sommeil de faon chronique et passer une nuit blanche? Aucune! Une rduction chronique, mme modre, du temps de sommeil peut avoir des consquences comportementales importantes. Nous avons men une tude sur 12hommes de 20 37 ans qui nont dormi que quatreheures par nuit durant sept jours, puis ont t soumis des tests cognitifs. Au 7ejour, ils avaient le mme niveau de dfaillance attentionnelle quaprs une nuit sans dormir! Si lon ne dort que sixheures par nuit, cet tat est atteint au bout de deux semaines. Toutes les fonctions cognitives sont-elles altres? Le manque de sommeil ne semble modifier le mtabolisme que de certaines zones spcifiques du cerveau (cortex prfrontal notamment), et donc naltrer que certaines fonctions cognitives. Les fonctions excutives qui permettent ladaptation des situations nouvelles (inhibition motrice, mmoire de travail, flexibilit) semblent trs altres par le manque de sommeil. Les capacits plus automatises semblent moins affectes. Est-on plus fatigu le soir ou le matin?Les individus en dette chronique de sommeil semblent plus dfaillants le matin (vers 9 h) que le soir. Vers 19 h, une sorte de second souffle, peut-tre d lhorloge biologique, favorise la lutte contre le besoin de sommeil. Certains rsistent-ils mieux que dautres? Les individus de plus de 30 ans semblent mieux rsister une dette chronique de sommeil. Les plus jeunes, au cortex prfrontal moins mature, sont plus dfaillants. De plus, les individus experts dans leur domaine les pilotes de chasse par exemple seraient mieux protgs, car ils pilotent en mode automatique en quelque sorte. Faire une grasse matine permet-il de rattraper le manque de sommeil? Dormir plus le week-end ne suffit pas pour rcuprer ses capacits! Nos sujets mme aprs deux nuits de huit heures, voire trois, prsentent des capacits attentionnelles excutives altres. Une dgradation cognitive lente semble sinstaller. Seule bonne contre-mesure : dormir rgulirement et tenir compte de ses besoins quantitatifs de sommeil. Propos recueillis par E. S.

    interview

    ArnAud rAbAt ChEf DE PROjEt DANS LUNIt fAtIgUE Et VIgILANCE, INStItUt DE REChERChE BIOMDICALE DES ARMES (IRBA)

    Plus on est jeune, moins on rsiste

    Mode demploi pour tre plus performant

    Dr

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    celle de Jan Born de luniversit de Lbeck, ont explicit le mca-nisme qui se cache derrire cette mmorisation nocturne. lorigine du sommeil lent pro-fond, il y a une chute du neuro-mdiateur actylcholine. Qui va entraner une cascade de phno-mnes lectriques aboutissant une ractivation des souvenirs (voir linfographie p.29). Au cur du systme, lhippocampe, petite structure au centre du cerveau, impliqu dans la mmorisation. Pendant lveil, il stocke les infor-mations reues. Pendant le som-meil lent profond, il les redistribue dans di rents endroits du cortex pour un stockage long terme. Plus une personne doit mmo-riser de choses, plus sa phase de SLP est intense et profonde. Le cerveau en a mme tellement besoin quen cas de restriction de sommeil et donc de SLP , il naura de cesse de le rattraper ds quil le peut, quitte sauter les stades intermdiaires.

    Le sommeil paradoxal est primordial pour la crativit

    Mais si le rle du SLP est aujourdhui mis en lumire, le sommeil paradoxal, appel aussi sommeil REM (Rapid Eye Move-ment), nest pas pour autant cart. Il serait primordial pour dautres types de fonctions, notamment pour la crativit. Pour preuve, lquipe de Sara Mednick, de luni-versit de Californie (Pnas, 2009), a soumis 77volontaires de 18 35ans deux sessions de tests valuant la capacit faire des associations (syntaxiques, sman-tiques) de mots. Lune avait lieu le matin, lautre laprs-midi, entrecoupes dun repos veill ou dune sieste de quatre-vingt-dix minutes. Rsultat: le sommeil amliore les scores aux tests das-sociation uniquement sil contient du sommeil paradoxal, autrement dit du rve. Et la chercheuse de conclure: Ces dcouvertes vali-

    dent la recommandation du prix Nobel Friedrich August Kekule Apprenons rver! En cas de problme pineux rsoudre, rien de tel donc quun som-meil prolong le matin riche en sommeil para-doxal ou une sieste dau moins de quatre-vingt-dix minutes en premire par-tie de journe. La rponse surgira peut-tre au rveil. En cas dmotions fortes, il faut aussi privilgier le sommeil. Jan Born a ainsi sign dans Neuro-biology of Learning and Memory

    (2013) une tude portant sur 16jeunes volontaires invits mmoriser 50 photos contenu motionnel ngatif et 50 photos contenu neutre avant de dormir trois heures, soit en dbut de nuit (davantage de SLP) ou en fi n de nuit (davantage de sommeil para-doxal). Rsultats: La mmorisa-tion des photos motionnelles a t meilleure que celle des neutres aprs le sommeil paradoxal.

    De bonnes nuits rduisent la charge motionnelle

    Els van der Helm et Matthew Wal-ker, de luniversit de Berkeley (tats-Unis) ont fait, quant eux, passer deux IRM fonctionnelles 34participants douzeheures dintervalle comprenant ou non une nuit de sommeil (Current Bio-logy, 2011). Pendant quils passaient lIRMf, il tait demand aux volon-taires de noter lintensit mo-tionnelle de 150images ngatives. Puis la mme chose douze heures aprs. Observation: les sujets ayant dormi voient leur activit amyg-dalienne (rponse motionnelle) diminuer devant les mmes pho-tos. Et les notes dvaluation nga-tives sont moins leves. Les auteurs font lhypothse, en sappuyant sur des travaux ant-rieurs, que le sommeil REM est lorigine de cette rduction de la charge motionnelle, mais ce nest pas encore prouv. Lquipe de Philippe Peigneux a reproduit lexprience sur plusieurs nuits (Journal of Sleep Research, 2013) Nous avons trouv ce jour que la charge motionnelle diminue aprs quelques nuits de sommeil en effet, mais pas plus au cours dune nuit avec beaucoup de sommeil REM que de non-REM ou vice versa, note-t-il. A aire suivre donc. Quoi quil en soit, le mot dordre

    gnral est de respecter les rythmes habituels, son chrono-type, et dviter les dettes de som-meil. E. S.

    SENIORSIls dormiraient moins. En ralit, les personnes

    ges dorment en moyenne le mme nombre

    dheures sur un jour mais compensent

    de plus courtes nuits par de petites

    siestes.

    Llectroencphalogramme permet de mettre en vidence les di rentes phases de sommeil dans le cerveau du dormeur.

    BURGER / PHANIE

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