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LES CARACTERISTIQUES DU DROIT ADMINISTRATIF I) C’est un droit jurisprudentiel : Le droit administratif est une création du juge. En effet c’est le juge qui a élaboré progressivement et à l’occasion des problèmes qui se sont posés, les grands principes du droit administratif. En droit administratif la jurisprudence tient un rôle de premier plan et ce caractère jurisprudentiel explique dans une large mesure sa résistance à toute tentative de codification systématique (absence d’articles). Il n’existe pas ainsi, en droit administratif, un code analogue à celui qui existe par exemple en droit civil ou en droit pénal. Ce caractère jurisprudentiel doit toute fois être nuancé dans ce sens qu’à côté de la jurisprudence il existe d’autres sources du droit administratif. D’abord la constitution qui est la loi suprême et qui contient des dispositions intéressant directement le droit administratif. Par exemple le domaine de la loi et du règlement, la délégation du pouvoir du chef du gouvernement… En dehors de la constitution il y’a des textes qui se rapportent à l’organisation communale (c’est la charte communale : c’est un dahir qui organise les collectivités territoriales). En dehors des lois et des règlements, on peut parler également de la coutume, c'est-à-dire l’usage considéré comme obligatoire et que certains considèrent comme une source du droit administratif. Quant à la doctrine, c'est-à-dire les notions et les théories élaborées par les auteurs, ainsi que leurs opinions, elle influence incontestablement la pensée du juge et du législateur. On peut se référer ici à la France pour constater que la théorie générale du service public est intimement liée aux idées de certains auteurs, comme Léon Duguit et Maurice Hauriou. II) C’est un droit autoritaire : Le droit administratif est un droit de commandement, un doit inégalitaire dans lequel l’administration dispose de prérogatives et de privilèges par rapport aux administrés, qui sont obligés la plupart du temps de se soumettre. La justification de ces privilèges résulte dans le fait que l’administration est chargée de la réalisation de l’intérêt général. L’administration détient ainsi le pouvoir de prendre des actes administratifs unilatéraux (décisions

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LES CARACTERISTIQUES DU DROIT ADMINISTRATIF

I) C’est un droit jurisprudentiel   :

Le droit administratif est une création du juge. En effet c’est le juge qui a élaboré progressivement et à l’occasion des problèmes qui se sont posés, les grands principes du droit administratif. En droit administratif la jurisprudence tient un rôle de premier plan et ce caractère jurisprudentiel explique dans une large mesure sa résistance à toute tentative de codification systématique (absence d’articles). Il n’existe pas ainsi, en droit administratif, un code analogue à celui qui existe par exemple en droit civil ou en droit pénal. Ce caractère jurisprudentiel doit toute fois être nuancé dans ce sens qu’à côté de la jurisprudence il existe d’autres sources du droit administratif. D’abord la constitution qui est la loi suprême et qui contient des dispositions intéressant directement le droit administratif. Par exemple le domaine de la loi et du règlement, la délégation du pouvoir du chef du gouvernement…En dehors de la constitution il y’a des textes qui se rapportent à l’organisation communale (c’est la charte communale : c’est un dahir qui organise les collectivités territoriales). En dehors des lois et des règlements, on peut parler également de la coutume, c'est-à-dire l’usage considéré comme obligatoire et que certains considèrent comme une source du droit administratif. Quant à la doctrine, c'est-à-dire les notions et les théories élaborées par les auteurs, ainsi que leurs opinions, elle influence incontestablement la pensée du juge et du législateur. On peut se référer ici à la France pour constater que la théorie générale du service public est intimement liée aux idées de certains auteurs, comme Léon Duguit et Maurice Hauriou.

II) C’est un droit autoritaire   :

Le droit administratif est un droit de commandement, un doit inégalitaire dans lequel l’administration dispose de prérogatives et de privilèges par rapport aux administrés, qui sont obligés la plupart du temps de se soumettre. La justification de ces privilèges résulte dans le fait que l’administration est chargée de la réalisation de l’intérêt général. L’administration détient ainsi le pouvoir de prendre des actes administratifs unilatéraux (décisions exécutoires), c'est-à-dire des décisions qui produisent des effets de droit à l’égard des administrés sans leur consentement et qui sont obligatoire pour eux. C’est ce qu’on appel le principe de l’exécution forcée, ou l’exécution d’office. De tels privilèges ne se rencontrent pas dans les rapports entre particuliers. Cependant le terme autoritaire n’est pas synonyme d’arbitraire car l’administration doit respecter dans son activité quotidienne la légalité, c'est-à-dire le droit en général. Si le citoyen estime que la décision qui a été prise est illégale, car elle n’a pas respecté la loi, la constitution, elle va porter plainte devant la juridiction administrative. Cette dernière va considérer si cette décision est légale ou non. L’administration doit concilier entre ses privilèges et les droits des citoyens.

III) C’est un droit en perpétuelle évolution   :

Le droit administratif est une discipline qui est dynamique qui évolue en fonction des changements de la société. C’est un droit qui change constamment et s’adapte aux circonstances. C’est un droit dont la transformation est liée aux missions de l’administration et des besoins de la collectivité. Le Maroc, lorsqu’il a obtenu son indépendance en 1958, n’avait pas une économie structurée, une économie de développement. L’Etat était obligé de développer le secteur économique. Il a crée des établissements publics : des entités administratifs qui fonctionnent comme des sociétés privés, mais qui appartiennent à l’Etat. Par exemple l’Etat a crée des offices pour l’activité de l’agriculture. L’Etat était devenu ce qu’on appel un Etat entrepreneur dans la mesure où il créait des entités économiques. Le Maroc était

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donc un Etat en crise et sur recommandation des institutions financiers internationales, qui lui ont conseillé de modifier sa structure économique, il a entamé un programme d’ajustement des structures : cela veut dire que l’Etat doit s’est retiré des secteurs économiques (l’Etat possédait des hôtels, la commercialisation des céréales, etc.). Ainsi, l’administration est appelée à améliorer les relations avec les citoyens, à simplifier les procédures et les circuits administratifs.

IV) C’est un droit jeune   :

C’est un droit nouveau et moderne. En France, les premières notions de droit administratif sont apparues à la fin du 19ème siècle. Le Maroc était régi par le droit musulman classique.Le Maroc était très endetté à la fin du 19ème siècle et les puissances voulaient récupérer leur argent. Acte d’Algésiras : le Maroc autorise les puissances étrangères à investir dans ses territoires. Cet acte prépare le traité de protectorat de 1912, signé à Fès. La France a accepté que le sultan continue à régner, mais non à gouverner. Avec le protectorat la France introduit toute la législation qui réglementait son territoire national. C’est la France qui introduit les notions du droit positif. Il y’a donc modernisation de tout l’arsenal juridique par le biais du protectorat. Le droit administratif dans sa conception moderne remonte à cette date. Mais le Maroc avait une organisation administrative dans la mesure où il avait un sultan et ses vizirs.a) la situation administrative du Maroc avant 1912 : jusqu’en 1912 le Maroc était organisé selon le principe de l’Etat musulman classique. C'est-à-dire le principe du califat. A la tête de l’Etat, il y avait le sultan qui dirigeait le pays à l’aide de ses collaborateurs, appelés vizirs. Il y avait le grand vizir (principal vizir), le vizir Bahar (ministre des affaires étrangères), le vizir Chikayat (ministre de la justice), etc. l’essentiel des pouvoirs était concentré entre les mains du sultan et il n’y avait pas de séparation des pouvoirs telle que ce principe existe dans les sociétés contemporaines. Avec l’acte d’Algesiras du 7 avril 1906 de nouvelles réformes ont été introduites concernant l’organisation de la police marocaine, la création d’une banque d’Etat, de services de douane, des travaux publics, etc. Mais c’est surtout le protectorat de la France par le traité de Fès du 30 mars 1912 que va être posé les bases juridiques du droit administratif.

b) les réformes introduites par le protectorat : le problème qui était posé était de savoir s’il fallait soumettre l’administration au même droit que les particuliers, ou au contraire, la soumettre à un droit spécial, différent du droit privé. Il fallait donc choisir entre le système de l’unité de juridiction et du droit applicable, ou bien opter pour la dualité de juridiction et la séparation du contentieux. Les autorités françaises avaient deux options : ou bien encrer les tribunaux qui seront compétentes en affaire civiles et administratives et appliquer le même droit, ou bien séparer les tribunaux ordinaires civils (ou commun) et les tribunaux administratifs : dualité. Finalement le choix fut porté sur l’unité de juridiction et la dualité du droit applicable : mélange des deux. Il a été crée des tribunaux ordinaires qui étaient compétentes pour appliquer le droit civil et le droit administratif. Après 1912, le Maroc appliquait le principe d’unité de juridiction et de dualité des droits. C’est à partir des années 1990 qu’on a crée les tribunaux administratifs (ce sont les tribunaux administratifs qui sont compétents pour traiter les affaires administratives). En s’inspirant de l’expérience tunisienne les autorités du protectorat ont établi la nouvelle réforme judiciaire qui s’est illustré par le dahir du 12 août 1913 sur l’organisation judiciaire. L’article 8 de ce dahir a délimité le domaine de compétence des tribunaux modernes en matière administrative, essentiellement aux contentieux indemnitaires, tout en leur interdisant de se prononcer sur l’annulation des actes administratifs. Ce n’est qu’en septembre 1928 qu’un dahir fut promulgué et qui accorde au fonctionnaire de l’administration la possibilité de former un recours pour excès de pouvoir, devant le conseil d’Etat français, contre les décisions relatives à l’application de leur statut. Recours en indemnité.

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Il y’a des cas où une fonctionnaire est lésé dans ses droits. Exemple   : un fonctionnaire a été viré sans raison valable. Il n’avait pas le pouvoir d’attaquer en justice l’administration. Ce n’est qu’en 1928 qu’il le peut. Si par exemple une décision de révocation d’un employé doit être signée par un directeur du département, selon la loi, et si cette décision est signée par un chef de division, ce denier a dépasse donc ses attributions. C’est une décision de révocation considérée comme illégale et par conséquent le fonctionnaire est capable d’attaquer le chef de division devant le conseil d’Etat (chambre administrative de la cour de Cassation. Recours pour excès de pouvoir).

c) les réformes intervenues après 1956 : l’indépendance. Le législateur marocain a crée en 1957 une cour suprême avec une chambre administrative chargée de statuer sur les recours en annulation pour excès de pouvoir, formés contre les décisions émanant des autorités administratives. Il faut souligner que l’indépendance n’a pas remis en question le système de l’unité juridictionnel, mais de la séparation du contentieux. Il a fallu attendre 1991 pour assister à la création de véritables juridictions administratives.