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La création d’un chef-d’œuvre parisien

The Peninsula Paris - La création d'un chef-d'œuvre parisien

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Livre réalisé pour The Peninsula Hotels par Christophe Chommeloux (textes) et Caroline Laleta Ballini (visuel).

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La création d’un chef-d’œuvre parisien

P A R I S

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Préface de Son Excellence Cheikh Nawaf Bin Jassim Bin Jabor Al-ThaniPrésident du Conseil, Katara Hospitality

Préface de l’Honorable Sir Michael KadoorieChairman, The Hongkong and Shanghai Hotels, Limited

Sommaire

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Sommaire

H I S T O I r e

Chronologie 08

à travers les siècles 10

Avant le Majestic 12

Une royale adresse 18

La naissance du Majestic 24

L’âge d’or 34

Un décor de carte postale 44

Un très éminent refuge 52

Les folles années du Majestic 60

Politique, diplomatie et renaissance 68

L e M A K I N G O F

La renaissance d’une “Grande Dame” 76

Inspiré par la Ville Lumière 94

Perpétuer la tradition 104

éloge à l’art intemporel 144

L’art lumineux de la verrerie 156

La naissance de LiLi 164

à la recherche de l’Oiseau Blanc 168

A u j O u r d ’ H u I . . . e T P O u r L e S I è C L e à V e N I r

Fidèle à la tradition 178

Une nouvelle dimension culinaire 184

Réunir hospitalité et diplomatie 212

L’art de recevoir avec style 214

La chambre la plus personnalisée au monde 234

Une sensation de bien-être 238

Ready to Rolls 244

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Katara Hospitality est particulièrement honorée de voir son nom associé à celui de l’emblématique Peninsula Paris, une référence dans l’hôtellerie de luxe depuis plus d’un siècle.

Notre objectif est de transmettre aux générations futures un héritage exceptionnel en consacrant nos ressources et notre expertise à investir dans des propriétés patrimoniales telles que le Peninsula Paris, qui représentent à nos yeux non seulement un héritage, mais surtout l’avenir. Nous sommes extrêmement fiers et prenons un immense plaisir à rajeunir ces hôtels pour rendre à ces véritables icônes leur ancienne gloire, tout en nous assurant que leur tradition hôtelière est préservée.

Trouvant naturellement sa place au sein du portefeuille d’établissements prestigieux de Katara Hospitality, ce trésor d’architecture a été entièrement rénové et rendu à son lustre d’antan afin de redevenir un véritable palace parisien au cœur de l’élégant 16e arrondissement. Au cours de quatre années d’un méticuleux travail de restauration, nous avons collaboré avec les meilleurs artisans et ouvriers de France de manière à préserver l’authenticité du bâtiment et le caractère français du Peninsula Paris, tout comme sa valeur historique. Dans le même temps, nous avons ajouté à la richesse du bâtiment les équipements modernes les plus sophistiqués que l’on puisse attendre aujourd’hui d’un palace parisien.

Avec ses chambres et suites spectaculaires, ses larges terrasses, ses boutiques de luxe et son exceptionnel spa, The Peninsula Paris élève à un niveau supérieur de distinction et de confort l’offre mondialement reconnue des hôtels de luxe de la Ville Lumière.

Au moment où nous voyons The Peninsula Paris s’imposer comme l’une des plus luxueuses destinations d’Europe, je suis convaincu qu’il saura offrir de mémorables moments à des générations de voyageurs recherchant le meilleur de l’hospitalité à la française.

Son Excellence Cheikh Nawaf Bin Jassim Bin Jabor Al-ThaniPrésident du ConseilKatara Hospitality

Préface de Son Excellence Cheikh Bin Jassim Bin Jabor Al-Thani

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C’est un réel plaisir pour moi que de rédiger cet avant-propos sur The Peninsula Paris, monument historique et première propriété du groupe Peninsula Hotels en Europe. L’enseigne Peninsula est née en 1928 avec l’ouverture du Peninsula Hong Kong, fruit de la vision de Sir Elly Kadoorie, mon grand-père, qui fut l’un des directeurs de The Hongkong and Shanghai

Hotels, Limited, puis propriétaire et opérateur du groupe The Peninsula Hotels. Sir Elly eut une longue relation avec la France. Il y créa des institutions destinées aux orphelins et veuves de guerre de la région parisienne, et collabora étroitement avec l’Alliance israélite universelle pour construire des écoles à l’étranger.

Je suis donc particulièrement fier que notre entrée sur la scène européenne s’effectue au travers d’une propriété prestigieuse profondément liée aux grands événements culturels, sociaux et politiques de son époque, aussi bien en France que dans le reste de l’Europe. L’esprit Peninsula, dont la tradition emblématique repose sur un sens exemplaire du service et de l’innovation, était opportunément partagé par Léonard Tauber, le fondateur de l’Hôtel Majestic en 1908. Sa passion de l’excellence le poussa à un voyage autour du monde afin d’étudier les plus prestigieux hôtels. Il en résulta cette vision d’un “hôtel aristocratique sans rival”. A partir de 1936, le bâtiment fut utilisé à d’autres fins, dont un centre de conférences internationales, sous l’égide du ministère français des Affaires étrangères. Plus récemment, à partir de 2010, ce monument a fait l’objet de quatre années d’une minutieuse rénovation, accompagnée de la mise en place d’équipements modernes et des technologies les plus avancées.

The Peninsula Paris - La création d’un chef-d’œuvre parisien évoque les personnalités qui ont forgé l’histoire de cet hôtel, ainsi que les architectes, artisans et maîtres ouvriers qui ont participé à sa renaissance. Avant tout, c'est le dévouement de ses équipes de direction et de son personnel qui fait de chaque hôtel Peninsula un “chez soi loin de chez soi”, à Shanghai, New York et désormais Paris.

The Honourable Sir Michael KadoorieChairmanThe Hongkong and Shanghai Hotels, Limited

Préface de l’Honorable Sir Michael Kadoorie

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En partenariat avec Katara Hospitality, The Hongkong and Shanghai Hotels conclut un accord pour faire naître le premier hôtel Peninsula en Europe suite à la mise en vente du bâtiment du 19, avenue Kléber par l’état français.

La terre est creusée sur trois lots qui porteront plus tard le numéro 19, avenue Kléber. C’est là que le comte Alexander Petrovitch Basilewski construit son hôtel particulier.

Le ministère français des Affaires étrangères fait de l’ancien Majestic son Centre de conférences internationales dans le but d’y accueillir de grands rassemblements et des événements de haut niveau.

Le Palais de Castille est démoli. La construction de l’hôtel Majestic de Léonard Tauber s’engage.

Le 19, avenue Kléber est élu pour abriter le quartier général de l’Organisation des Nations-unies pour l’éducation, la science et la culture. L’UNESCO y demeurera jusqu’en 1958.

Le comte Basilewski cède sa résidence à la reine Isabelle II d’Espagne, qui a choisi Paris comme terre d’exil. Elle le rebaptise Palais de Castille et y demeurera 38 ans.

Négociés par Henry Kissinger, les Accords de paix de Paris sont signés dans le salon de l’hôtel Majestic par les états-Unis et le Nord-Vietnam, mettant un terme à la guerre du Vietnam. Ce salon deviendra plus tard le Bar Kléber du Peninsula Paris.

L’hôtel Majestic ouvre ses portes et commence à accueillir ses clients le 1er mars.

Les Accords de Paris sont signés au 19, avenue Kléber. Ils signifient l’arrêt du conflit entre le Vietnam et le Cambodge, ainsi que de la guerre civile des Khmers rouges.

L’hôtel Majestic est réquisitionné pour servir d’hôpital militaire pendant la Première Guerre mondiale. On le surnomme alors l’hôpital Hôtel Majestic.

2009

1864

1946

1868

1958

1906

1973

1908

1991

1914

TIMELINE The Peninsula ParisChronologie

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Le Majestic est rendu à sa vocation, les affaires reprennent à l’hôtel.

Sydney et Violet Schiff organisent un dîner pour célébrer le ballet d’Igor Stravinsky, Renard. La liste des invités, comprenant James Joyce, Sergueï Diaghilev, Pablo Picasso et Marcel Proust, fait entrer ce moment dans l’histoire de l’art moderne européen.

De nombreux délégués descendent à l’hôtel Majestic pour la Conférence de paix de Paris.

George Gershwin compose Un Américain à Paris à l’occasion de son séjour à l’hôtel Majestic.

L’état français acquiert l’hôtel Majestic.

1916 1919 1922 1928 1936

The Peninsula ParisChronologie

2014 The Peninsula Paris ouvre ses portes le 1er août.

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S I r e L Ly K A d O O r I e

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Ellis et Elly Kadoorie, deux frères originaires de Bagdad, mirent

pied à terre à Shanghai en 1880. Leur arrivée marqua le début d’une

remarquable entreprise familiale destinée à perdurer.

En 1890, les frères Kadoorie firent l’acquisition des premières actions de la société mère des hôtels Peninsula, The Hongkong and Shanghai Hotels.

Depuis, la famille Kadoorie demeure l’actionnaire majoritaire de l’un des plus prestigieux groupes d’hôtels de luxe au monde, la première enseigne d’hôtellerie de luxe en Chine. Ce riche patrimoine, dont l’origine remonte pratique-ment à la naissance de Hong Kong elle-même, continue de prospérer au fil du temps.

SIèCLESà travers les

Incarnation du luxe, le groupe The Peninsula Hotels fût de nombreuses fois primé pour ses dix hôtels, chacun situé au cœur des destinations privilégiées que sont les villes de Hong Kong, Shanghai, Beijing, Tokyo, New York, Chicago, Beverly Hills, Bangkok, Manille et désormais Paris.

Les hôtels The Peninsula ont fait une entrée remarquée en Europe le 1er août 2014, avec un édifice patrimonial magnifique-ment restauré et discrètement modernisé, offrant une qualité inégalée de sophistication et d'inspiration : The Peninsula Paris.

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Bien avant de devenir l’adresse d’un emblématique palace parisien,

le 19, avenue Kléber fut le siège d’un château des plus romantiques.

AVANTle

MAJESTIC

Pour le groupe The Peninsula Hotels, la vie parisienne ne fait que commencer. Mais en tant que bâtiment, l’hôtel The Peninsula Paris possède une riche histoire.

Avant que l’édifice ne trouve son incarnation en Hôtel Majestic en 1908, le terrain était occupé par un château de style romantique construit alors à la demande d’un mil-lionnaire russe.

En effet, chacun des établissements du groupe The Peninsula Hotels à travers l’Asie et les états-Unis possède de fascinantes histoires à raconter, chacun ayant été conçu avec une approche unique de l’héritage et du savoir-faire représentatifs de son pays d’accueil. C’est donc tout naturel-lement que le premier Peninsula en Europe contient à lui seul l’histoire la plus riche de toutes les propriétés du groupe.

Lorsque la transformation du bâtiment a débuté en septembre 2010, sa décoration intérieure révélait les stigmates d’un siècle d’utilisations diverses. De sa raison d’être originale en qualité de somptueux Hôtel Majestic, en passant par un hôpital militaire, puis en accueillant les quartiers généraux de l’armée allemande avant de devenir un centre de conférences internationales.

Avec une telle histoire, on imagine facilement que ses sept étages constituent autant de témoins de tous les événements politiques, militaires et culturels qui ont façonné l’Europe au cours du siècle passé.

Au fil du temps, Marcel Proust, James Joyce, Pablo Picasso, Igor Stravinsky, Irving Berlin, George Gershwin, et Dmitri Chostakovich, entre autres, l’ont fréquenté, faisant du numéro 19 l’un des bâtiments les plus passionnants de Paris.

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Rampe en fer forgé et bronzepar Schwartz et Meurer

G r A N d e S C A L I e r d ’ H O N N e u r

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L e S P r e M I è r e S A N N É e S

Dans beaucoup d’endroits à travers le monde, les événements qui se sont déroulés de 2010 à 2014 auraient représenté suffisamment d’effervescence pour une douzaine de vies. Pour le numéro 19, avenue Kléber, quatre années de restauration n’ont constitué qu’un nouveau chapitre de l’histoire commencée en 1852, lorsque le ter-rain aujourd’hui occupé par l’hôtel n’était encore qu’un champ de boue sillonné de sentiers de chasse. Une photographie de l’avenue Kléber en 1865 montre une ville de Paris aujourd’hui inconcevable, un environnement qui n’est plus familier qu’aux habitants de quelques petites cités rurales. Sur cette image, les bâtiments offrent un visage médiéval et ressemblent à des maisons de marchands agricoles, sans aucune commune mesure avec les quartiers monumentaux qui allaient bientôt les remplacer.

Ce document d’archives dévoile également un fragment d’une autre propriété se trouvant sur l’emplacement du futur numéro 19. C'est à cet endroit que s’installa bientôt un personnage qu’on pourrait décrire comme l’équivalent au XIXe siècle d’un oligarque russe, néanmoins très cultivé et doté d’un goût certain. C’est à ce moment-là que le véritable héritage aristocratique du Peninsula Paris commença à prendre forme.

Une photographie de l’avenue Kléber en 1865 montre un Paris méconnaissable aujourd’hui.

1852

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L E PA L A I S D ’ U N C O M T E

Les archives de la ville de Paris racontent que débutèrent en février 1864 des travaux de construction sur trois emplacements comprenant le 19, rue du roi de Rome et l’extrémité ouest de l’avenue de Sofia, où se situe aujourd’hui l’entrée principale du Peninsula Paris et qui porte désormais le nom d’avenue des Portugais. Son nom a été changé le 14 juillet 1918 en mémoire des 30 000 soldats portugais qui se sont battus aux côtés des troupes alliées durant la Première Guerre mondiale, comme l’atteste une plaque commémorative apposée sur le mur du Peninsula Paris. A l’époque, ces emplacements appartenaient au comte Alexander Basilewski et les archives indiquent le début de la construction d’un hôtel particulier conçu par Clément Parent le 18 février. La taille combinée de ces lots correspondait à l’espace d’un pâté de maisons, ce qui fut plus tard essentiel pour la survie à long terme de l’hôtel de Basilewski.

L’homme qui engagea Parent avait sans aucun doute fait son choix parmi les meilleurs architectes travaillant dans le style Beaux-Arts. Basilewski faisait partie des hommes les plus riches de Russie quand il décida de faire construire un petit château à Paris. Le père du comte avait amassé une énorme fortune grâce au rôle influent qu’il jouait à la cour du Tsar pour qui il avait contribué à collecter les impôts. Alexander avait ensuite investi et plus que triplé l’héritage laissé par son père, dans les mines d’or russes. Lors de sa mort en 1878, le comte Basilewski laissa à la princesse Souvoroff, sa fille aînée, une fortune lui rapportant la somme de 1 250 000 dollars américains par an, ce qui fit d’elle la femme la plus riche du monde.

Clément Parent venait d’une famille d’architectes bien connue de l’aristocratie. Son frère Henri, lui aussi architecte, manqua de peu de se voir attribuer la création de l’Opéra de Paris en 1860, arrivant second de l’appel d’offre derrière Charles Garnier.

1864

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Bien qu’issu d’un milieu aussi éminent, Parent fut sans doute surpris par le niveau exceptionnel des demandes du comte Basilewski qui avait imaginé une résidence parisienne digne d’un roi et qui devait « ressembler à un château de l’extérieur, à un palais à l’intérieur, et posséder tout le confort moderne ». On peut imaginer qu’il voulait dire disposant d’un système de plomberie adapté.

Cependant, l’hygiène n’était pas la préoccupation principale de Basilewski. Il donna ordre à Parent de construire un palais qui serait à la hauteur de la ville que les Russes appelaient alors la capitale du monde. Les plans comprenaient une cour à laquelle on pouvait accéder par six portes, flanquée de piliers en pierre sur lesquels des formes allégoriques seraient sculptées par Bloche pour représenter les continents de la planète.

Basilewski avait également indiqué que le bâtiment devait s’élever sur deux niveaux au-dessus d’un profond sous-sol comprenant une vaste cave à vin. Le bâtiment se composait de trois pavillons qui, si l'on en croit un journal du XIXe siècle, avaient en leur centre « un portique soutenu par huit colonnes arrangées dans un ordre composite et supportant l’emblème héraldique du Comte Basilewski ».

Au CŒur du NuMÉrO 19

Ces ornements extérieurs étaient une aubaine pour Parent, qui avait fait ses classes d’architecte en rénovant des châteaux pour le compte des aristocrates ayant survécu à la Révolution française de 1789, ou pour des citoyens nouvellement enrichis pendant l’ère napoléonienne. Le bâtiment créé par Parent avait un air romantique et bourgeois. Il possédait des ornements aristocratiques et majestueux, mais exprimait essentiellement l’idée de richesse et de pouvoir. Ce qui se traduisait encore plus dans la décoration intérieure de l’édifice, dont la pièce centrale était un vestibule entièrement réalisé en marbre de Carrare. Le journal hebdomadaire illustré The Architect, imprimé en 1869, décrit ainsi le bâtiment et son propriétaire : «...qui avait donné carte blanche à son architecte et à son sculpteur pour construire ce qu’ils voulaient, le résultat étant une façade de style Renaissance française sur deux niveaux et cinq fenêtres de large, flanquée de chaque

Le Grand Salon de l’Hôtel Basilewski

19

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côté par une aile à corniche, l’ensemble surmonté d’un habituel toit français très pentu. La frise est sculptée d’armes et d’attirails guerriers représentant artillerie, cavalerie et infanterie, les armoiries de la famille Basilewski trônant en leur centre. Le vestibule central est composé d’un marbre du blanc le plus pur, divisé en plusieurs sections par des colonnes striées. Les portes ouvrant sur la rue depuis l’avant-cour sont encadrées d’énormes piliers surmontés par d’audacieuses et monumentales allégories réalisés par Bloche de main de maître et représentant l’Europe, l’Asie, l’Afrique et l’Amérique. »

C’était une structure conçue pour durer et constituer un monument à la gloire de ses propriétaires.

Le nouvel édifice devint rapidement l’objet de toutes les conversations à Paris et, pour la première fois, le site du futur Peninsula Paris exerça une irrésistible attraction sur les mondains. On y donnait des réceptions pratiquement tous les soirs quand le comte était en ville, le plus souvent à la demande insistante de ses trois filles, en particulier la princesse Souvoroff, née comtesse Koucheleff, l’une des figures les plus célèbres de la haute société européenne du XIXe siècle. Elle tenait cour au numéro 19 avec ses deux sœurs, la comtesse de Galvo et Madame Dublet.

Malgré l’opulence dans laquelle vivait le comte, tout n’était pas rose au numéro 19. La rumeur avait couru dans Paris que Basilewski avait été forcé de quitter la Russie en raison d’un différend entre le Tsar et son père. On glosait également beaucoup sur les jeux d’argent, bien qu'il n’existât aucune preuve concrète que Basilewski eut perdu des sommes conséquentes aux tables de jeu. Quelle qu’en soit la raison, les Basilewski occupèrent le 19, avenue Kléber pendant une période remarquablement courte. En 1868, le comte vendit sa coûteuse nouvelle résidence à la reine Isabelle II d’Espagne, qui avait perdu son trône et choisi de s’exiler à Paris.

Quand le comte Basilewski quitta son hôtel particulier, il avait 82 ans et son grand âge fut peut-être l’une des raisons de ce soudain départ qui le vit se réinstaller en l’espace de quelques mois seulement à Saint-Pétersbourg.

A sa mort, bien qu’il eût quitté le numéro 19 depuis déjà dix ans, la célébrité de l’Hôtel Basilewski conservait toujours son empreinte. Le 22 mai 1878, Le New York Times publia un article sur la mort du comte, orthographiant son nom avec un “v” à la manière russe et relatant que « le comte Basilevski, considéré comme l’homme le plus riche de Russie, jouissant pendant de nombreuses années d’un revenu de 5 000 000 de roubles par an, c’est-à-dire environ 4 000 000 $, est mort à Saint-Pétersburg à l’âge de 92 ans. Il avait passé la plus grande partie de sa vie à Paris, où il a construit le superbe Hôtel Basilevski. »

Le New York Times avait de bonnes raisons de mettre en avant l’hôtel et le numéro 19, avenue Kléber. Depuis l’installation de la reine Isabelle II, l’ancienne résidence des Basilewski était passée du statut de curiosité architecturale à celui d’un des bâtiments les plus captivants et les plus en vue de Paris, où les intrigues et les scandales étaient monnaie courante, la reine Isabelle elle-même y tenant généralement l'un des premiers rôles. Pendant près de quatre décennies, l'emplacement qui abrite désormais le Peninsula Paris fut l’un des endroits les plus en vue d’Europe, en raison de l’étonnant charisme de la reine, ainsi que de son penchant pour les hommes beaucoup plus jeunes qu’elle. 19

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La reine Isabelle II prit résidence sur le site actuel du Peninsula Paris en 1868, l’année même où elle fut contrainte à l’exil par la “Révolution Glorieuse” qui donna jour à la Première République espagnole. De son accession au trône

en 1833, encore dans sa prime enfance, jusqu’à son exil, son règne fut une période tumultueuse, les réactionnaires carlistes espagnols refusant d’accepter une femme comme héritière de la couronne. Isabelle, qui avait l’intention évidente de continuer à gouverner son pays en exil, rebaptisa rapidement l’Hôtel de Basilewski en Palais de Castille – le nom porté par la couronne espagnole jusqu’en 1700 – qui devint le centre de la communauté bourbonne en exil à Paris. Le Palais de Castille devint la demeure de l’unique monarque en exercice sur le sol français. Isabelle prit d’ailleurs l’habitude de se prétendre Française, au plus grand ravissement des Parisiens qui affluaient à son palais de l’avenue Kléber.

Au cours de son exil, la reine Isabelle II fit du château

un vibrant noyau de la vie parisienne.

ROYALEadresse

Une

L’Illustrated Newspaper de Frank Leslie, une revue américaine qui montrait un intérêt particulier pour Sa Majesté d’Espagne, rapporta en 1869 que la nouvelle résidence de la reine était « l’une des perles qui ornent le riche coffret baptisé le Nouveau Paris », et qu’elle s’était rapidement appropriée « le mobilier, d’une simplicité stricte qui fut amené, dit-on, du Palais Royal de la Granja de San Ildefonso, près de Madrid. »

L’Illustrated Newspaper semblait jouir d’excellentes sources, car il décrivait de manière détaillée l’intérieur de l’édifice. « Les appartements du premier étage sont réservés à la reine », écrivit le propriétaire du journal. « Dans l’autre aile de l’hôtel, séparés de la chambre de la reine par l’escalier, se trouvent les appartements destinés au jeune prince des Asturies. Ce palais n’est sans doute pas aussi raffiné que l’Escorial (demeure des monarques espagnols), néanmoins, il constitue une demeure nullement indigne d’une reine en exil. »

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adresse

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e N r É S I d e N C e

La reine Isabelle vécut dans le Palais de Castille pendant 38 ans, offrant au Peninsula Paris une distinction unique, puisqu’aucun autre hôtel au monde n’a eu le privilège d’être si longtemps l’adresse d’une figure royale de telle importance. La reine d’Espagne ne fit pas seulement du 19, avenue Kléber une résidence royale, elle en fit le siège du gouvernement en attente, déterminée à voir un jour sa famille opérer un retour triomphal. Pour passer le temps, elle fit du palais un centre de libre débat sur l’art et sur la place des femmes dans la société.

En juin 1870, la reine abdiqua au Palais de Castille en faveur de son fils Alfonso, en présence de nombreux nobles espagnols. Annonce suivie par ce qui fut décrit comme des fêtes splendides par le Dictionnaire Historique des Rues de Paris, organisées par Marfori, un ancien acteur et dernier en date des nombreux jeunes amants d’Isabelle. Alfonso fut convoqué à Paris, où il reçut le titre de Roi Alfonso XII.

Isabelle continua à résider au Palais de Castille après le retour d’Alfonso en Espagne pour prendre les rênes de son pays. Au début, elle fit de fréquents voyages en Espagne. Le 7 janvier 1878, le New York Times rapporta qu’Isabelle était déterminée à « gouverner le pays à travers son fils » afin de prendre de nombreuses revanches, avec pour conséquence que « pour un temps le pauvre garçon vécut une période difficile, devant supporter les amers reproches de sa mère. »

Le cabinet de travail de la reine Isabelle II au Palais de CastilleL’Illustration

1869

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Sa Majesté la Reine Isabelle II prit possession de l’Hôtel Basilewski

I N V I T É S A u PA L A I S

Isabelle fut bientôt encouragée à visiter Madrid moins fréquemment, et pendant les 23 années qui suivirent, elle tint cour au numéro 19, suivant une routine de rencontres diplomatiques, de fastes dîners et de voyages occasionnels pour “prendre les eaux” dans des stations thermales allemandes. Dans ses mémoires, Lillie de Hegermann-Lindencrone, une chanteuse accomplie et épouse d’un ministre danois, évoque ainsi la vie de tous les jours au Palais de Castille : « Je fus enchantée lorsque la marquise de Podesta, dame de compagnie d’Isabelle, me demanda si j’aimerais faire la connaissance de la reine », écrit-elle en 1897. « Je suis allée la voir dans son magnifique palais de l’avenue Kléber. La reine m’a reçue dans une belle salle ornée de tapisseries anciennes des Gobelins et meublée avec un goût exquis. »

A l’aube du XXe siècle, la reine Isabelle avait fait de sa résidence parisienne l’un des salons les plus animés de la ville. Régulièrement, elle organisait des soirées de gala auxquelles seule l’élite était conviée, dont quelques-uns des artistes les plus éminents de l’époque, parmi lesquels de nombreux peintres impressionnistes.

En mars, The Friends Intelligencer publia un passage du journal de Paris de M.M. Hallowell. « Six heures du soir, à l’angle de l’avenue Kléber et de la rue Pauquet... Nous sommes au Palais de Castille, ainsi nommé depuis qu’en 1868 Sa Majesté Isabelle d’Espagne y a trouvé refuge pour abriter sa maturité et le déclin de sa souveraineté. Un couple à l’allure grave a franchi les grandes portes de fer, salué par l’officier de garde qui porte solennellement la main à la visière de son casque. La reine est dans ses appartements. Quelques visiteurs sont ensuite reçus, mais de manière informelle. La plupart des calèches s’arrêtent avant le portail et leurs passagers entrent dans le jardin à pied. Dans le hall d’entrée, en revanche, on observe plus de protocole, suivi par les annonces officielles... »

1878

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Après avoir vu la reine, le journaliste affirme qu’elle « porte plus le deuil de son royaume que celui de son mari. Pendant des années, sa demeure semble avoir enduré cette tristesse. La lumière du jour y est à peine tolérée. » Le 26 mars 1904, le San Francisco Call publia cependant en première page un article tout à fait différent sur la vie de la reine Isabelle au 19, avenue Kléber, avec ce titre : « Le train de vie royal de l’ex-reine Isabelle à Paris ».

Le document décrit la reine recevant les dignitaires au Palais de Castille, se livrant à des essayages avec des couturiers et conférant les honneurs à tous ceux qui trouvaient grâce à ses yeux. Décrivant les longues files de musiciens et d’artistes du Quartier Latin qu’on lui présentait et pour lesquels « elle était prête à dilapider son or, à condition qu’ils soient jeunes, beaux et talentueux», l’article précise que tout éventuel protégé « qui manquait de charme aux yeux de la reine » ou « qui avait un cheveu gris ou deux » était rapidement éconduit, mais que les élus recevaient ensuite une pension annuelle en échange de fréquentes visites au palais.

L’article du San Francisco Call fut le dernier sur cette reine haute en couleur. Deux semaines après sa publication, Isabelle mourut d’une pneumonie, et sa dépouille fut exposée au Palais de Castille sous un immense lustre recouvert de gaze noire.

Suite au décès d’Isabelle, le sort du Palais de Castille demeura incertain. D’un côté le gouvernement des états-Unis souhaitait en faire son ambassade en France. De l’autre, Léonard Tauber voulait le démolir pour y construire un luxueux hôtel. Tauber l’emporta finalement et ouvrit les portes de l’Histoire à l’Hôtel Majestic, puis, un siècle plus tard, au premier hôtel Peninsula en Europe.

1904Exposition du corps de S. M. la reine Isabelle II d’Espagne dans Le Grand Salon du Palais de Castille transformé en chapelle ardente. Le Monde Illustré

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La brochure originale de 1910 met en valeur l'élégance du plus transcendant hôtel de l'époque

H ô T e L M A j e S T I C PA r I S

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Fils d’un hôtelier juif, Léonard Tauber naquit à Vienne le 6 juin 1857 et grandit dans la petite auberge de son père, où il découvrit les bases de l’hôtellerie. En 1881, à 24 ans, il vint s’installer à Paris, où il fut plus tard naturalisé français,

le 18 juillet 1892.

Lors de ses 19 premières années à Paris, Tauber travailla dans quelques-uns des plus beaux hôtels de la ville. Il en gravit peu à peu les échelons, jusqu’à devenir gérant de l’Hôtel de Calais, au 5, rue des Capucines (aujourd’hui l’Hôtel Mansart) et enfin de l’Hôtel de Vendôme, au numéro 1, place Vendôme. En 1900, grâce à l’argent économisé durant presque deux décennies et au soutien de certains de ses riches clients, il ouvrit son premier palace parisien, l’hôtel Regina, avec son associé Constant Baverez. Situé au 2, place des Pyramides, qui croise la rue de Rivoli face au Jardin des Tuileries et au Louvre, l’hôtel existe toujours. Ce bâtiment du Second Empire fut édifié à l’emplacement des écuries royales du palais du Louvre et fut inauguré à temps pour l’Exposition universelle qui offrit à Paris sa tour Eiffel.

En 1900, Paris était en plein essor, l’hôtel Regina connut un grand succès et la réputation de Tauber en tant qu’entrepreneur hôtelier fut vite reconnue. On appréciait particulièrement ses idées modernes et son très raffiné sens de l’esthétique. Tauber fut particulièrement encensé pour avoir su associer trois grands styles architecturaux : des arcades typiques de la rue de Rivoli, une sobre façade à balcons qui rappelle le Louvre tout proche, ainsi qu’un toit de style Empire s’harmonisant parfaitement avec les bâtiments voisins.

Un tel succès l’encouragea rapidement à envisager une expansion. En 1905, son intérêt se porta sur le Palais de Castille de l’avenue Kléber, inoccupé depuis le décès de la reine Isabelle d’Espagne.

Les incessantes rumeurs à propos de la vente de cette « somptueuse propriété », ancienne demeure royale, devinrent un sujet de prédilection pour la presse parisienne, amplifiées par la stature des « hautes personnalités » liées au destin du Palais de Castille. Pour certains commentateurs, le roi Alfonso XIII d’Espagne allait certainement conserver le palais, dont il « avait le désir de devenir propriétaire, en mémoire de ses grands-parents ».

La conception du palace moderne que Tauber avait en tête

s’incarna sous la forme d’une propriété unique en son genre,

à la fois somptueuse, sobre et élégante.

NAISSANCEdu

La

MAJESTIC

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D’autres soutenaient que « cette propriété ne peut guère échapper aux mains du roi des Belges, qui a montré un intérêt particulier pour le palais, sans conteste l’un des plus beaux et mieux situés de la ville, étant donné la proximité du bois de Boulogne... » Une autre source, se prétendant la mieux informée, laissa entendre que « le gouvernement américain était déterminé à faire du Palais de Castille son ambassade à Paris. »

Si l’un de ces trois prétendants l’avait emporté, le Palais de Castille existerait peut-être toujours aujourd’hui. Mais d’après Le Figaro, le prix demandé pour la propriété était suffisamment élevé pour dissuader à la fois le gouvernement des états-Unis et le roi des Belges. Quant au petit-fils d’Isabelle, il dut conclure que les 2,8 millions de francs de la vente (soit environ 8 millions d’euros de 2014) compensaient amplement l’attachement sentimental qu’il portait au bien-aimé palais de sa grand-mère.

u N S I T e e x C e P T I O N N e L

L’emplacement de la propriété, à la fois proche du bois de Boulogne, de l’Arc de triomphe, de la tour Eiffel et du Trocadéro, constituait un atout majeur aux yeux de Tauber. Mais ce qui l’attirait avant tout était l’impressionnante étendue du terrain occupé par le palais. L’ensemble comprenait le lot du 19, avenue Kléber, mais également trois parcelles adjacentes qui s’étendaient sur toute la longueur de l’actuelle avenue des Portugais et accueillaient les jardins du Palais de Castille. Ce site offrait à Tauber l’exceptionnelle opportunité d’élargir son empire en construisant « un hôtel aristocratique sans rival » qui, une fois terminé, pourrait se targuer d’être le plus grand hôtel d’Europe.

En 1903, quand Tauber fit appel à Sibien pour créer les splendides nouveaux intérieurs du Regina, il avait déjà en tête la construction d’un hôtel gigantesque qui contiendrait quatre fois plus de chambres et de suites que le premier. Les deux hommes s’accordèrent sur un style haussmannien, rehaussé de touches décoratives néoclassiques. Mais, comme pour le Regina, le principal souci de Tauber était que son hôtel propose une décoration intérieure féérique, associée à un incomparable niveau de service.

Pour réaliser son rêve, Tauber réunit un groupe d’investisseurs dans une société à responsabilité limitée qui acquit le Palais de Castille et ses jardins pour y construire un nouvel hôtel : le Majestic. La démolition du palais d’Isabelle commença immédiatement, le 17 février 1906. Et alors que les ouvriers détruisaient les différentes pièces, démantelaient le porche et défonçaient les murs, de parfaits étrangers, qui n’avaient jusqu’alors naturellement jamais eu le privilège de fréquenter la royale demeure, marchaient librement dans les jardins et entraient dans le bâtiment pour admirer la salle de réception en marbre, où le vent s’engouffrait désormais à travers les murs déchirés du palais en ruine.

La restauration du Peninsula Paris fait écho à cette histoire, non seulement du fait de l’extraordinaire transformation opérée, mais également par sa volonté d’offrir un accès démocratique à ces merveilles précédemment tenues à l’écart du public.1906

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R

Un des petits salons de la Galerie Kléber par P.-A. Dumas

Jardin d’HiverDécor treillage artistique par Bocquet

Ameublement par Alavoine

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Salle à manger, par P.-A. Dumas, aujourd’hui LiLi

Alors que la démolition du Palais de Castille suivait son cours (l’essentiel de ses boiseries et de ses équipements ayant été sauvegardés afin d’être intégrés au nouvel hôtel) et que le terrain était défriché et préparé pour la construction de l’incroyable bâtiment haussmannien de 28 mètres de hauteur, Tauber se lança dans une extraordinaire mission.

Il embarqua pour un tour du monde dans le but d’étudier les plus grands hôtels de la planète. L’intrépide hôtelier observa toutes les nouvelles tendances et les raffinements des établissements de luxe. Il s’intéressait particulièrement à l’Amérique et à ses riches voyageurs, toujours plus nombreux à effectuer un “European Tour”. Tauber se rendit plusieurs fois à New York, Chicago, Washington et Boston, et il est probable que ses pas l’aient conduit à l’un des hôtels les plus célèbres de New York à l’époque : le Gotham (aujourd’hui The Peninsula New York).

L’objectif de Tauber était de « prendre note des progrès en matière de conception hôtelière, les plus infimes soient-ils, qui seraient susceptibles de plaire à un client élégant et exigeant. » A son retour, il conçut lui-même le modèle des intérieurs de l’hôtel, s’inspirant des fruits de son voyage et y incorporant ses propres idées nouvelles. Dans un récit sur la construction de l’hôtel publié par les Frères Draeger en 1910, il déclara que selon lui, l’hôtel devrait faire « naître chez chaque voyageur l’illusion délicate qu’il

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n’est pas un étranger dans une ville étrangère, mais plutôt qu’il séjourne dans le palais d’un ami, qui aurait édifié une demeure affichant de belles proportions et renfermant de rares trésors. »

Cette description de Tauber pourrait parfaitement s’appliquer au Peninsula Paris d’aujourd’hui. A cela rien d’étonnant de la part d’un homme en avance sur son temps qui avait déjà réalisé l’importance de créer un équilibre entre ampleur et intimité, une règle d’or cultivée par chaque hôtel Peninsula. Il partageait également avec The Peninsula Hotels la conviction que l’ameublement d’un hôtel de luxe devait tirer profit des plus grands savoir-faire et être assorti d’un service sans pareil. Pour Tauber, rien ne devait être autorisé à perturber la sensation que son hôtel était un endroit magique où tous les rêves pouvaient se réaliser.

L A r É A L I S AT I O N d ’ u N r ê V e

Tauber commentera plus tard qu’avec le Régina, il avait posé la première pierre de son grand concept et que le Majestic en constitua le « couronnement ». Et c’est ainsi que la demeure d’une reine céda sa place à ce que Tauber espérait voir devenir le "roi des hôtels européens", dépensant sans compter pour rendre son rêve encore plus beau. Exactement de la même manière que la réincarnation du Majestic en Peninsula Paris s’est réalisée à travers une savante alchimie de technologies de pointe et de talents exceptionnels, Tauber fit appel aux maîtres artisans des maisons les plus chevronnées de la capitale, dans le but de créer, par sa grandeur et sa beauté, « à la fois le plus américain et le plus parisien des hôtels. »

La Grande Terrasse Kléber.

Linge de table de La Cour Batave,

le grand magasin à la mode,

sur le boulevard Sébastopol

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Tauber réunit une liste impressionnante d’artistes et de maîtres artisans, à commencer par l’architecte Armand Sibien.

• La grande salle du restaurant fut conçue et exécutée par Alavoine, spécialiste d’une interprétation conservatrice de l’Art nouveau et dont l’entreprise parisienne de décoration d’intérieur deviendra bientôt l’une des plus en vogue de New York.• Les établissements Porcher fournirent un nombre impressionnant de salles de bains.• L’entreprise américaine Otis installa les ascenseurs (encore une nouveauté dans le Paris du début du XXe siècle). • Le talentueux maître artisan P.A. Dumas réalisa les boiseries dans la salle à manger et les petits salons disposés le long de la galerie de l’hôtel. Dumas était contemporain et collègue d’émile Gallé (l’un des principaux représentants de l’Art nouveau, célèbre pour son dessin de la bouteille de champagne Perrier-Jouët) et son travail, en particulier ses meubles, trouvent aujourd’hui preneur à des prix très élevés dans les ventes aux enchères. Au Majestic, Dumas fut également chargé de créer plusieurs toilettes des dames et boudoirs d’une exquise minutie. • Le vaste travail de ferronnerie fut exécuté par Schwartz et Meurer, la société qui avait construit la tour Eiffel.

En choisissant les maîtres artisans les plus talentueux, Tauber voulait mettre tous les atouts de son côté pour que son hôtel corresponde à une nouvelle génération de

Chambre à coucher

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Boudoir de style Adam, par P.-A. Dumas

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voyageurs fortunés, dont un bon nombre de nouveaux riches. L’hôtel Majestic ouvrit ainsi ses portes à l’époque où les bagages Louis Vuitton commencèrent à faire fureur auprès de ces entrepreneurs privilégiés, à tel point que la maison ouvrit bientôt, en 1913, le plus grand magasin de maroquinerie au monde, sur les Champs-élysées. D’énormes paquebots, dont le SS France, ou l’Oceanic et l’Adriatic, tous deux appartenant à la fameuse White Star Line (futur propriétaire du tristement célèbre Titanic), faisaient désormais la traversée de New York vers l’Europe en seulement sept jours. Tauber, avide de ce type de clientèle, tentait de la séduire dans ces termes : « Tout y a été conçu pour que le voyageur trouve le maximum de joie et de confort. Si on ajoute que les prix sont très raisonnables, on peut affirmer que toutes les familles aisées, de passage à Paris, y trouveront des avantages qu’elles ne peuvent rencontrer dans aucun autre hôtel de premier ordre. »

Grâce à l’esprit innovateur de Tauber, le Majestic put atteindre cet objectif. Pour que l’hôtel soit à la fois rentable pour ses investisseurs et abordable pour ses clients, il eut l’idée de le construire à grande échelle. Là où le Regina n’en proposait que 117, l’hôtel comportait 400 chambres et suites uniques, dont « le faux luxe, le faux confort ou le lustre superficiel » étaient exclus. Chaque chambre possédait une antichambre destinée au rangement, ainsi que sa propre salle de bain. Celle dont jouissait la suite la plus spacieuse et la plus grandiose de l’hôtel était équipée des installations autrefois utilisées par la reine Isabelle d’Espagne au Palais de Castille.

1913

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Pour assurer un service rapide, le Majestic fut agencé de manière à permettre un “service par étage”. Ainsi, chacun des cinq niveaux occupés par les chambres possédait son propre office, comprenant une cuisine pour le petit déjeuner, des connexions téléphoniques vers les chambres de l’étage et des boîtes aux lettres pour les hôtes.

Si les chambres du Majestic se révélaient somptueuses, Tauber était encore plus déterminé à ce que les espaces communs de son nouvel hôtel soient transcendants, dépassant les attentes de sa riche clientèle internationale par la beauté de sa décoration et de son ameublement. La plupart des boiseries des salons du Majestic nécessitèrent par exemple plus de trois ans de travail, avant d’être assorties de tapis orientaux de la maison Dalsème, l’importateur le plus éminent à Paris au XIXe siècle.

Malheureusement pour Tauber et ses investisseurs, l’empire austro-hongrois annexa la Bosnie-Herzégovine et sa capitale Sarajevo à la fin de 1908. Cet événement conduisit six ans plus tard à l’assassinat de l’archiduc d’Autriche François Ferdinand, héritier présomptif du trône. La Première Guerre mondiale fut bientôt déclarée et la fortune de l’hôtel Majestic subit les aléas du destin. Tauber n’eut donc que peu de temps pour établir la réputation du Majestic comme l’hôtel le plus élégant d’Europe, mais il s’empressa de faire passer le message au monde entier.

Hall et Grande Galerie,

The Lobby d’aujourd’hui.

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Londres accueillait les Jeux olympiques et l’économie se remettait de la panique de 1907, qui avait vu la valeur des actions américaines diminuer de moitié. Une photographie prise cette même année retrace bien l’humeur de l’époque : une famille se tient en haut de l’Arc de triomphe, les parents sont tournés vers l’avenue Kléber et admirent le

splendide nouvel Hôtel Majestic. L’avenir paraît radieux et les tourelles du nouvel établissement de Tauber dégagent un air de pleine confiance, à l’aube d’une ère de prospérité.

Le toit de son nouvel hôtel était l’un des projets les plus chers au cœur de Tauber. Comme le montrent les plans détaillés du Majestic originellement présentés le 16 février 1906, il prévoyait de le doter d’une inédite et complexe toiture à mansardes, qui s’élèverait sur trois niveaux au-dessus de la structure principale.

The Peninsula Paris Book

Des vues panoramiques à couper le souffle sur Paris et l'avenue Kléber, du haut de l’Arc de triomphe

Page de droite :la terrasse du Majestic est bondée d’hôtes élégants observant un biplan en vol vers les cimes de Montmartre

Un vent d’optimisme soufflait sur l’Europe en ce début d’année 1908.

Le 1er mars, l’Hôtel Majestic de Léonard Tauber ouvrit ses portes.

D’ORL’âge

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S A L O N d e L e C T u r e

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La décoration du 19, avenue Kléber témoigne du raffinement de l’époque

Les toits mansardés constituaient depuis longtemps un trait typique du paysage parisien. Aisément reconnaissables à leur forte pente et à leur travail décoratif, ils furent à l’origine développés au XVIe siècle par l’architecte français Pierre Lescot. Les plus beaux exemples du travail de ce dernier peuvent être admirés à l’aile qui porte son nom au palais du Louvre, mais c’est par François Mansart que ses innovations furent popularisées en France. Cet architecte du XVIIe siècle s’inspira largement des techniques de conception de Lescot, mais c’est avec son propre patronyme qu’elles passèrent à la postérité.

Les courbes et atours du Majestic sont désormais symboliques de cette ère d’élégance et de raffinement, mais avant de pouvoir réaliser la gigantesque toiture comme il l’entendait, Tauber dut mener une bataille féroce pour réussir à convaincre les autorités parisiennes.

T O u j O u r S P L u S H A u T

Les plans originaux du Majestic semèrent d’emblée la consternation parmi les fonctionnaires, lorsque Tauber déposa sa demande de permis auprès du préfet de la Seine. Dans une note à la mairie de Paris datée du 8 juillet 1905, il décrivait un bâtiment qui, une fois terminé, serait le plus grand de l’avenue Kléber avec « une

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superficie totale de 4649,39 mètres carrés... une façade de 84,53 mètres donnant sur l’avenue Kléber, une façade de 55,01 mètres sur le côté gauche de la rue Pauquet et sur le bout de la rue La Pérouse, une autre façade de 84,53 mètres. »

Les proportions monumentales du projet et l’ampleur de son toit mansardé furent la source d’une réelle préoccupation au sein des bureaux du maire et du préfet de la Seine, qui craignaient que les nombreuses rues environnantes fussent condamnées à rester dans l’ombre la majeure partie de la journée. Tauber dut les rassurer de nombreuses fois sur la hauteur de son hôtel de luxe.

« A chaque retrait du toit de l’“Hôtel des Voyageurs”, l’établissement possédera la même hauteur d’étage et conservera les mêmes lignes de façade. Les propriétaires suivront la décision du préfet de la Seine en cas de désaccord », écrivit Tauber dans une lettre datée du 10 mars 1906. « Nous ne dépasserons pas le périmètre légal et suivrons les règles établies par la ville de Paris quand nous construirons l’hôtel. »

Les autorités de la ville étaient également préoccupées par le poids de l’hôtel et par l’intégrité de sa structure. Sibien réussit à les rassurer sur ce point - l’architecte avait décidé depuis le début du projet d’utiliser une nouvelle avancée technique pour la construction du Majestic : du béton renforcé. L’autodidacte belge François Hennebique avait inventé en 1879 une technique qui consistait à incorporer des barres métalliques dans le béton, afin d’augmenter sa résistance à la traction. Il avait d’abord eu l’idée de recouvrir de béton la structure métallique afin de la protéger du feu et s’était rapidement rendu compte que cette approche permettait également à la structure de supporter un poids beaucoup plus important.

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Au Majestic, Sibien mit à profit les deux aspects du système de Hennebique. Il utilisa ce nouveau “béton armé” pour l’ensemble de la structure, afin de garantir sa résistance et de prévenir la propagation d’un éventuel incendie. Les mesures prises par Tauber et ses constructeurs rassurèrent la ville et les plans pour les immenses combles qui couronnent encore aujourd’hui le bâtiment furent finalement approuvés.

Tauber tenait particulièrement à une structure à la Mansart, afin de pouvoir créer une terrasse spectaculaire avec vue sur les toits de Paris, la tour Eiffel et l’Arc de triomphe, un choix en grande partie influencé par sa passion pour une toute nouvelle invention : l’aviation.

Durant la première décennie du XXe siècle, la France s’enthousiasmait pour l’aéronautique et Paris devint l’épicentre de cette nouvelle passion nationale. De nombreuses avancées décisives furent d’ailleurs le fait de Français pendant cette période pionnière de l’aviation. En mars 1908, le mois où le Majestic ouvrit ses portes, l’aviateur français Léon Delagrange revendiqua le premier vol au monde avec passager. Son compagnon dans le petit biplan, le peintre, inventeur, pilote de course et concepteur

Grâce à Léon Delagrange, la sculptrice Thérèse Peltier fut la première femme a voler à bord d’un avion, aux environs de 1908

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1910

d’avions Henri Farman, effectua six mois plus tard le premier trajet de l’histoire aérienne européenne entre deux villes, Châlons et Reims, couvrant les 27 kilomètres en 20 minutes. Tauber suivait avec enthousiasme les exploits de Farman et Delagrange, ainsi que les vols d’essai de Louis Blériot, qui allait devenir en 1909 le premier homme à traverser la Manche en avion.

Le fondateur du Majestic se représentait la terrasse de son « grand hôtel des voyageurs » comme une sorte de tribune d’où l’on pourrait venir assister à la naissance de l’aviation, en compagnie de clients distingués admirant les vols des intrépides as du pilotage. Une illustration publiée dans la brochure de l’hôtel en 1910 montre précisément ce que Tauber avait en tête - la terrasse est bondée d’hôtes élégants et, dans un coin, une femme vêtue d’une robe de style édouardien, accompagnée d’un homme en redingote, observent un biplan en vol vers les cimes de Montmartre.

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Fontaine du Grand Hall par Alavoine, aujourd’hui le lobby

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u N L I e u à L A M O d e

Dès son ouverture, le nouvel hôtel Majestic attira une clientèle prestigieuse et put s’enorgueillir de recevoir fréquemment de nombreuses personnalités de l’époque, comme Anatole France. A l’instar d’autres membres de l’élite littéraire et culturelle parisienne, le futur prix Nobel de littérature était séduit par les splendides espaces publics du Majestic, en particulier la Grande Terrasse Kléber, où les voyageurs, mondains, artistes et aristocrates étrangers se réunissaient pour un thé ou un cocktail.

Au Majestic, Anatole France rédigea de nombreuses notes pour ses célèbres romans Les Dieux ont soif et La révolte des anges et y fut régulièrement remarqué en compagnie de sa maîtresse, Léontine Lippmann. Plus connue sous son nom d’épouse, madame Arman de Caillavet, celle-ci tenait dans son hôtel particulier du 12, avenue Hoche un salon littéraire, dont les membres abrégeaient souvent les débats pour se rendre au Majestic. Outre Anatole France, on y croisait Léon Blum, Raymond Poincaré, Sarah Bernhardt, Lucien Guitry, Antoine Bourdelle et Marcel Proust. Ce dernier s’inspira d’ailleurs de Madame de Caillavet pour le personnage de Madame Verdurin dans A la recherche du temps perdu.

Au début des années 1910, le Majestic adopta son rythme de croisière, à la fois majestueux et palpitant. La journée commençait par une spectaculaire efferves-cence dans l’immense cuisine de l’hôtel située dans les sous-sols. Trois rangées de grands fourneaux, s’étirant sur pratiquement toute la longueur du bâtiment, permettaient de faire face aux commandes de petits-déjeuners qui affluaient du restaurant. Le personnel, en uniforme de lin blanc impeccable, servait les clients dans la salle de restaurant Louis XVI, où ils pouvaient contempler de magnifiques boiseries sculptées d’instruments de musique, de rubans et de vignes. Après le petit déjeuner, les hôtes allaient se promener le long des Champs-élysées. Ils revenaient ensuite déjeuner dans la spacieuse et lumineuse salle à manger ou prenaient le thé dans l’un des petits salons de la grande galerie, tout en jouissant des magnifiques décorations florales de Bocquet.

« Il faudrait être critique d’art pour détailler les merveilles qui ont été réalisées en matière de décoration et d’ameublement dans les salons du Majestic », affirmait la brochure publiée par Tauber en 1910. « Rien ici n’est grand pour étonner simplement par sa grandeur. Rien n’est petit uniquement pour la commodité. Partout une recherche de goût a laissé sa trace. Voici un hall énorme prenant jour par de larges baies sur une grande avenue. Une douce lumière l’inonde et se joue entre les feuilles des plantes 1910

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vertes. L’architecture en a été conçue dans le pur style Louis XVI. On y admire une jolie fontaine de marbre, par Alavoine, et de moelleux tapis d’Orient provenant de la collection Dalsème. »

Un article de 1910, publié dans le magazine spécialisé Le Bâtiment Illustré décrit parfaitement l’hôtel. « Le caractère architectural que possède cet imposant bâtiment est à la hauteur de ce que l’on peut attendre de ce genre de construction », écrit le rédacteur en chef. « L’hôtel est d’une sobre élégance et habilement conçu. Combien nous sommes dérangés dans les hôtels comme l’Astoria, où l’entrée et la sortie des voitures s’effectuent dans la même rue ! Au Majestic, en revanche, l’architecte a mis à profit l’angle de l’avenue Kléber et de la rue Pauquet pour séparer l’arrivée et le départ des voyageurs. On n’y déplore aucun embouteillage. »

L’auteur dévoile ensuite ce qui attend les visiteurs lorsqu’ils descendent de leurs véhicules. « Les clients se retrouvent directement dans le magnifique hall le long de la rue La Pérouse, où le thé est servi jusqu’à cinq heures de l’après-midi » écrit-il. « Ce vaste espace, somptueux, ne souffre d’aucun ornement inutile. Les courbes des fenêtres cintrées sont décorées très sobrement et une superbe frise ornemente la corniche du plafond. La richesse de chaque élément est en adéquation avec l’emploi qui lui est réservé, et la terrasse qui surplombe l’avenue Kléber évoque un luxe habituellement réservé aux plus beaux hôtels de la Côte d’Azur. »

D’une qualité rarement vue dans le Paris de cette époque, et tout particulièrement dans un hôtel, la terrasse de Tauber est une véritable œuvre d’art, qui offre aux Parisiens, comme aux visiteurs, un espace unique et une expérience inoubliable.

L’immense cuisine de l’hôtel, située dans les sous-sols, où trois rangées de grands fourneaux s’étirant sur pratiquement toute la longueur du bâtiment permettaient de faire face aux commandes qui affluaient du restaurant

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En 1911, le Majestic célébrait son troisième anniversaire, l’hôtel affichait complet et les affaires étaient florissantes. Selon le fameux guide de voyage Paris et ses environs, de Ward, Lock & Co, l’hôtel de Tauber se classait en première catégorie (“les plus luxueux et les plus chers”) aux côtés du Ritz et du Meurice,

pourtant bien plus anciens. Le Ritz avait en effet ouvert ses portes en 1898 après la rénovation d’une maison privée bâtie en 1706, et le Meurice avait accueilli ses premiers clients dès 1815.

Premier en son genre, le Majestic fut rejoint par l’Hôtel de Crillon, inauguré un an après lui en mars 1909 et par le Plaza Athénée, qui venait tout juste d’ouvrir ses portes. La section du guide dédiée aux hôtels précise que les chambres du Majestic coûtaient, en 1911, entre 150 et 200 francs, soit de 1000 à 2000 € de nos jours (selon les critères de niveau de vie)

Les prix ne semblaient pas dissuader les clients, et l’hôtel bourdonnait d’activité. La qualité exceptionnelle des prestations offertes, en particulier dans les chambres et les suites, ainsi que le niveau de service irréprochable d'un hôtel 5 étoiles permit que là où le Regina ne dépassait pas la seconde catégorie, le Majestic s’établit rapidement au premier rang des hôtels parisiens, avant même que la peinture n’ait fini de sécher sur les murs du Grand Salon.

1910

Au début du XXe siècle, écrire des cartes postales était très en vogue.

L’hôtel Majestic, symbole de l’élégance parisienne,

constituait un sujet de choix.

Un décor deCARTE POSTALE

Page de droite : à cette époque, le texte devait

être écrit sur le côté image de la carte postale,

laissant le verso pour l’adresse seule. Le timbre

était fréquemment collé également au recto.

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BeAu COMMe uN TABLeAu

La carte postale connut son âge d’or dans les années 1900, jouant à l’époque le rôle des réseaux sociaux d’aujourd’hui. Pendant leur séjour en Europe, les voyageurs, en particulier américains, consacraient un temps considérable à rédiger des cartes, et un touriste assidu pouvait facilement en envoyer plusieurs dizaines. Le Majestic était un sujet recherché, car l’extérieur de l’hôtel était aussi photogénique qu’impressionnant et pouvait être présenté avec l’Arc de triomphe en arrière-plan. En 1912, un visiteur américain adressa un message griffonné sur une photo de la façade du Majestic. « Difficile de résumer Paris sur une carte», écrivit-il, « mais la mode et les paillettes prédominent plus que jamais. Toute la ville en est imprégnée ! Les hommes s’asseyent ensemble pour bavarder, comme le font habituellement les femmes. »

Salon de lecture, aujourd’hui le Lounge Kléber

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Salon Louis XIV par Alavoine, aujourd’hui le Bar Kléber

Salon Louis XV par P.-A. Dumas

On imagine volontiers de tels échanges au Majestic, le long de la Grande Galerie comme au Salon Louis XIV, où les clients se retrouvaient entre amis et prenaient souvent le temps de rédiger leur correspondance. Le papier à lettre de l’hôtel, bleu pâle à en-tête bleu marine, pouvait se retrouver un peu partout dans les petits salons du côté de la rue La Pérouse, la partie de l’hôtel qui accueille aujourd’hui les superbes boutiques du Peninsula Paris. Une illustration de la brochure de Tauber Hôtel Majestic Paris de 1910 dépeint une jeune femme coiffée d’un chapeau dernier cri et enveloppée dans une étole de fourrure, assise dans un fauteuil à haut dossier et concentrée sur l’écriture d’une lettre à la plume.

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Toilette des dames, style Adam

Le Majestic offrait aux femmes tout ce dont elles pouvaient rêver pour soigner leur élégante apparence. Dans les salles de bain des principaux appartements, revêtues de marbre et de boiseries, des lampes Art nouveau éclairaient les grands miroirs surplombant les doubles lavabos. A la manière des meilleurs hôtels d’aujourd’hui, pommades et lotions parfumées étaient alignées sur les étagères, un ruban de soie blanche noué autour de chaque flacon.

Les plus belles suites comprenaient des “toilettes des dames” de style Adam, dont les murs étaient tapissés d’une demi-douzaine de miroirs et équipées de coiffeuses à miroirs latéraux. La chambre à coucher de l’une des suites, à l’angle de l’aile de l’hôtel donnant sur l’avenue Kléber, regorgeait de glaces et de penderies qui n’attendaient qu’à être remplies de somptueuses robes de Monsieur Poiret ou Madame Lanvin.

Salle de bains d’appartementInstallation de la Maison PorcherRevêtements Utzschneider

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Les nouveaux modèles de Poiret, sans corset, étaient amples et dessinaient une fine silhouette, de rigueur pour les femmes élégantes qui descendaient au Majestic.

Chambre à coucher (ci-dessus) et salle de bains (ci-dessous), comprenant toujours la baignoire de la reine Isabelle d’Espagne

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u N M O N d e e N M A r C H e

L’hôtel Majestic devint l’une des destinations préférées des riches familles américaines. Le New York Times se faisait fréquemment l’écho dans sa rubrique mondaine de nouvelles concernant les Américains en voyage à Paris. L’édition du 27 février 1909 relate par exemple que « Pour célébrer les anniversaires de Washington et de Lincoln, Mme Charles B. Weeks et sa fille, Mme Fairbanks Smith, organisèrent cette semaine une réception dans le jardin d’hiver de l’hôtel Majestic. Le jardin fut largement décoré de drapeaux et de fleurs. Les invités, dont le nombre dépassait les quatre-vingts personnes, étaient presque tous américains.» La rubrique se poursuivait avec « M. et Mme Ernest Fabbri et leur famille de New York ont quitté cette semaine l’hôtel Majestic pour Biarritz, dans deux automobiles. »

Trois ans plus tard, de nombreux visiteurs américains partageaient dans leur correspondance leur enthousiasme à se joindre à l’imminent voyage inaugural du RMS Titanic qui, après avoir attiré l’attention du monde entier sur son prétendu caractère insubmersible, quitta Southampton le 10 avril 1912.

Avec à son bord des suites de première classe d’une valeur équivalente à 58 000 € d’aujourd’hui, il n’est guère surprenant que les nombreux passagers nord-américains qui avaient réservé leur traversée au départ de Cherbourg (à destination de Queenstown, en Irlande, puis New York), aient pu passer les derniers jours de leur séjour européen dans l’un des meilleurs hôtels de Paris.

Le naufrage du Titanic n’endigua en rien le flot de voyageurs qui traversaient l’Atlantique dans les deux sens. Ainsi, Mlle Berthe Leroy, qui avait survécu au drame, écrivit dans son journal qu’au cours des trois décennies qui suivirent, elle effectua la traversée 36 fois. En 1912, l’Europe exerçait un attrait irrésistible, et particulièrement la France et Paris. Avec Renoir et Monet toujours en activité, la gloire des impressionnistes était à son apogée. Les Américains avides de culture et de raffinement recherchaient, pour s’en imprégner, des hôtels comme le Majestic.

En 1913, les clients du Majestic avaient complètement oublié le Titanic, tout particulièrement les amateurs d’art, qui se précipitèrent le 29 mai à la première du très attendu 1913

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La salle de restaurant style Louis XVI, aujourd’hui The Lobby

Sacre du Printemps au Théâtre des Champs-élysées, à Paris. Chorégraphié par Vaslav Nijinski et interprété par les Ballets Russes de Sergueï Diaghilev, il reposait sur une musique composée par Igor Stravinsky, un habitué du Majestic.

Le modernisme de ce ballet provoqua de vives réactions et divisa le monde de la musique classique. Le 30 mai, la terrasse, la salle à manger et le restaurant Louis XVI du Majestic bruissaient des conversations louant ou condamnant la vision de Stravinsky. Si le monde avait continué dans cette voie, l’hôtel Majestic existerait peut-être encore aujourd’hui, mais l’Histoire en décida autrement et se révéla bien plus destructrice que l’iceberg qui avait coulé le Titanic.

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E ntre 1908 et 1914, un flux ininterrompu de clients américains traversa l’Atlantique jusqu’à Cherbourg pour venir à Paris récompenser la vision de Tauber, jusqu’à ce que la nature des visiteurs de l’hôtel ne change soudainement.

En 1914, six ans après l’ouverture du Majestic, un riche banquier américain du nom d’Edward Toland arriva à l’hôtel à l’issue d’un long voyage des Etats-Unis à Liverpool sur l’entrepont d’un cargo. Au sein du palace parisien de Tauber, il trouva pourtant tout sauf de la gaieté et du confort.

Il découvrit Paris dans les derniers jours de septembre, peu après la première bataille de la Marne, qui s’était tenue du 6 au 12. L’armée allemande était désormais à seulement 50 kilomètres de la capitale.

Dans son livre The Aftermath of Battle in France with the Red Cross, il décrivit plus tard son périple à travers la ville. « Paris était désert », écrit-il, « presque toutes les boutiques étaient fermées et les fenêtres condamnées. Quand j’ai tourné sur l’avenue de l’Opéra, elle était complètement vide, à peine une simple charrette entre l’Opéra et le Louvre, et pas une âme sur les trottoirs. »

Toland avait étudié à Princeton et avait travaillé quatre ans en tant qu’ingénieur avant de devenir banquier d’affaires en 1912. Le déclenchement de la Première Guerre mondiale avait mis le secteur bancaire en suspens, et il prit la décision de

Tout au long de ce que les Français baptisèrent ensuite “la Der des Ders”,

l’hôtel Majestic joua un rôle noble dans l’histoire de la Premiere Guerre mondiale.

REFUGE

TRèSéminent

Un

Edward Toland

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53

Page 58: The Peninsula Paris - La création d'un chef-d'œuvre parisien

54

traverser l’Atlantique « pour participer à l’effervescence et observer le peuple français en temps de guerre. » Ces commentaires pourraient laisser penser que Toland était un personnage cynique, il s’avéra être tout sauf cela. Il n’était qu’un jeune homme entraîné dans les tumultes de la guerre et il se retrouva rapidement à œuvrer au milieu des hommes gravement blessés.

Quelques heures après son arrivée à Paris, on le présenta à Mme F., une infirmière en chef. Elle expliqua à Toland que les hauts fonctionnaires parisiens tentaient de maintenir les blessés hors de la ville, mais qu’ils continuaient tout de même à affluer. Elle lui décrivit les centaines de soldats blessés au front en Flandre, étendus sur d’immondes paillasses le long de voies de garage pendant que les autorités débattaient de leur sort, craignant que Paris ne se retrouve en état de siège si les Allemands poursuivaient leur avancée vers le sud et que le spectacle de soldats gravement blessés ne porte un coup au moral de la population.

L’idée de créer des hôpitaux privés temporaires dans des hôtels avait été initiée par de riches personnalités et était soutenue par la Croix-Rouge. Mme F. proposa à Toland de l’emmener en visiter un. « Elle était en route pour le “Majestic Hotel Hospital” sur l’avenue Kléber, près de l’Arc de triomphe, et je décidai de l’accompagner. »

Le “Majestic Hotel Hospital” avait été fondé par un médecin britannique, Leslie Haden-Guest, que la rumeur décrivait comme un « millionnaire socialiste » ayant loué l’hôtel pour le convertir en clinique, par charité. La réalité des faits reste confuse.

Haden-Guest servit dans le Corps médical de l’armée royale britannique pendant la guerre des Boers, la Première et la Seconde Guerres mondiales, et reçut la Croix Militaire (Military Cross) pour ses actions. Il fut le fondateur du comité franco-britannique de la Croix-Rouge ainsi que de l’ordre de Saint-Jean. Après la guerre, il rejoignit le parlement britannique en tant que député travailliste de la circonscription de Southwark North, avant de poursuivre son ascension en entrant à la Chambre des Lords le 2 février 1950, devenant ainsi le baron Haden-Guest et tenant le rôle de gentilhomme de service (“Lord in Waiting”) auprès du roi. Il est de notoriété publique qu’il choisit le Majestic en raison de la taille de ses espaces de réception. A l’ouverture de l’hôpital, son personnel était exclusivement britannique, soigneusement sélectionné et transporté à Paris en bateau puis par le train.

Les zeppelins allemands survolant la capitale à une altitude de plus de 3000 mètres lâchaient alors des pluies de bombes qui terrorisaient la population parisienne. L’activité de la ville était comme suspendue et les temps peu propices à la pratique du métier d’hôtelier.

Leslie Haden-Guest

1914

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« J’ai quitté l’hôpital [Majestic] à sept heures du soir pour rentrer chez moi et dormir un peu », écrivit Toland. « Le Métro ne fonctionnait pas, alors j’ai marché de l’Étoile à l’Opéra, où j’habitais. Dans les rues, on ne croisait pas âme qui vive et il n’y avait pratiquement aucun éclairage. La place de la Concorde était aussi sombre et silencieuse qu’un cimetière de campagne, mis à part un énorme projecteur sur le toit de l’Hôtel de Crillon, qui balayait le ciel à la recherche d’avions allemands. Le contraste avec le Paris de l’année dernière était impressionnant. »

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u N P O r T r A I T S A I S I S S A N T

Des photographies du “Majestic Hotel Hospital” montrent un personnel médical élégant, posant en uniformes amidonnés aux côtés d’hommes paraissant en voie de complète guérison.

De nombreuses aides-soignantes volontaires de l’hôpital étaient issues de l’aristocratie. L’une d’entre elles était la fille du comte de Rosslyn : Lady Angela St Clair-Erskine Forbes.

« à Dieppe, nous avons été accueillies par un ami de Sarah Wilson, qui nous a relaté les conditions d’accueil terribles des blessés français », écrivit-elle dans son livre Memories and base details. « Il faisait nuit noire quand nous sommes arrivés à Paris. Je suis allée à l’hôtel Majestic, où l’hôpital avait été installé et où je devais être hébergée. Un souper avait été préparé à notre attention et nous nous sommes faufilés jusqu’à la cantine du personnel à travers des passages à peine éclairés et imprégnés d’odeurs de chloroforme et de teinture d’iode. »

Une réalité semblable à celle que Toland découvrit lors sa première nuit au Majestic. « Nous venions à peine d’arriver quand une ambulance amena une demi-douzaine de blessés », écrit-il. « Je fus chargé de soutenir un officier prussien en plein délire, gravement blessé à la tête. » ll fait ensuite une description de l’incroyable ballet des médecins et infirmières se précipitant à travers les grands salons et salles à manger du Majestic pour soigner les blessés.

Laurence Binyon reprend la version de Toland dans son livre For dauntless France, qui raconte en détail l’aide apportée aux blessés en France par la Grande-Bretagne entre 1914 et 1918. « C’était une période cauchemardesque», décrit-il, « ce pays était soudainement appelé à se battre pour sa survie et, en même temps, à soigner ses blessés. Français, Anglais, Belges et Allemands étaient amenés sans distinction au Majestic, et le chirurgien en chef opérait fréquemment cinq ou six fois au cours de la nuit après avoir effectué une vingtaine d’opérations pendant la journée. »

La ville était attaquée sans relâche à une fréquence effrayante, et Toland raconte l’arrivée de la guerre aux portes mêmes du Majestic. « Quatre bombes ont été larguées sur Paris aujourd’hui à midi », écrit-il, « l’une d’entre elles a atterri sur l’avenue du Trocadéro, à moins de 300 mètres de l’hôpital et terriblement près de M. Herrick, l’ambassadeur américain. »

Après seulement six années d’activité, le Majestic était confronté à une période indéterminée de fermeture et de réquisition. L’argent investi dans les installations et la décoration n’avait encore produit aucun retour, et les très coûteux espaces communs se trouvaient malmenés par l’affreuse routine d’un hôpital en temps de guerre.

Une équipe du service de chirurgie du “Majestic Hotel Hospital”, en septembre 1914

1914

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étonnamment, le Majestic ne servit de refuge aux blessés que pendant cinq mois. En janvier 1915, il fut décidé que Paris disposait de suffisamment d’hôpitaux. Le Majestic fut vidé et nettoyé, puis les affaires reprirent au début de l’année 1916 malgré l’omniprésence de la guerre à ses portes et l’impact de celle-ci sur la vie des principaux acteurs. Une bonne partie du personnel de l’hôtel fut d’ailleurs mobilisée et envoyée au front, d’où beaucoup ne revinrent jamais.

Armand Sibien, l’architecte du Majestic, fut frappé par la guerre d’une manière particulièrement tragique. En 1914, Le Figaro rapporta que son fils Pierre Sibien, également architecte, avait connu « une mort glorieuse en Alsace ». La même année, son autre fils, Maurice, fut blessé et fait prisonnier par les Allemands. Armand lui-même, qui s’était si ardemment battu pour faire du rêve de Tauber une réalité, mourut en février 1918, neuf mois avant la fin de la guerre, alors que son seul fils encore en vie était toujours détenu par l’ennemi. Le 11 novembre 1918, la guerre prit fin et les propriétaires du Majestic purent espérer que l’hôtel allait retrouver sa prospérité d’avant-guerre. Le répit fut de courte durée. En janvier 1919, la propriété fut à nouveau réquisitionnée et son personnel jeté à la rue.

L’Allemagne ayant décidé de solliciter un armistice, des dispositions furent prises pour organiser une conférence de paix à Paris et les délégués britanniques prirent leurs quartiers au Majestic et à l’Astoria.

Ils vivaient, travaillaient et se divertissaient au Majestic. « Nous vivons dans la magnificence du bien nommé hôtel Majestic. Il est construit de très belles pierres et ses immenses chambres sont toutes grandioses. Nos bureaux sont situés juste en face, à l’hôtel La Pérouse. Nous sommes étroitement protégés par les hommes de Scotland

Les centaines de chambres de l’hôtel Majestic étaient

bondées, pleines de soldats blessés recevant les soins des

infirmières et des médecins

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Yard », écrivit Sir John Latham dans une lettre à sa femme Lady Ella, le 21 janvier 1919.

Steven Lehrer raconte dans son livre Wartime Sites in Paris l’ambiance qui régnait au Majestic à l’époque : « Les journalistes se bousculaient dans les couloirs à la recherche d’histoires à écrire, et les secrétaires se faufilaient en courant avec leurs piles de documents. Les diplomates de nombreux pays flânaient dans le hall d’entrée couvert d’ornements. Les hommes d’affaires essayaient de manœuvrer et jouaient des coudes pour tirer les marrons du feu. Les intrigues étaient si effrénées que des fonctionnaires britanniques se substituaient temporairement au personnel de l’hôtel afin de réduire les risques de fuites et d’espionnage. »

Augustus John et Sir William Orpen, les peintres officiels de la délégation britannique pendant la conférence, séjournèrent au Majestic où ils capturèrent de nombreuses scènes. Sir Maurice Hankey, Secrétaire de la délégation britannique, raconta à sa femme : « L’Hôtel Majestic est un endroit très animé… Toutes les dames les plus élégantes et les plus merveilleusement vêtues de la haute société semblent avoir été amenées ici par les différents ministères. J’ignore comment elles font leur travail, mais le soir elles dansent, chantent et jouent au bridge ! »

Ces fêtes extravagantes choquèrent de nombreux fonctionnaires britanniques. « Au Majestic, la nuit dernière, la danse était une affaire incroyable - une foule des plus cosmopolites - la touche finale fut l’arrivée de Lord Wimborne accompagné d’une armada de femmes sublimes », rapporta un membre de la délégation britannique en 1919. « Beaucoup n’apprécient guère cette invasion du Majestic le samedi soir et des mesures sont prises pour y mettre un terme avant que cela ne tourne au scandale. »

Dîners-spectacles, concerts et thés dansants se tenaient dans le hall de l’hôtel Majestic, ce qui, selon l’observateur officiel britannique Sisley Huddleston, « faisait du rétablissement de la paix un travail plutôt agréable. »

« C’était une délégation de l’Empire britannique », écrivit Margaret MacMillan dans son livre Les Artisans de la paix : Comment Lloyd George, Clémenceau et Wilson ont redessiné la carte du monde. « Comprenant plus de quatre cents fonctionnaires, conseillers spéciaux, greffiers et dactylographes, elle occupait cinq hôtels près de l’Arc de triomphe. Le plus grand, qui constituait le centre social de la délégation, était l’hôtel Majestic. C’était avant-guerre un favori des riches Brésiliennes qui venaient à Paris refaire leur garde-robe. »

Huddleston écrivit que les mesures de sécurité étaient des plus strictes pour « éviter tout risque de trahison de secrets. »

4e ANNEE (Z* Série]. â N° 274; MARDI 14 TANVIF.R ÎQ'Q,fO CENTIMES LE RIHRËRQ

RÊDACTIOH-ADMINISTRATION

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ice. TÊLÊSRAPHIQUI: Ntlpopal-Parte

DIRECTEUR POLITIQUE i

JEAN LONGUET

BÉDACTEUMN CHEF»

PAUL fc"AURE de Par Journal Socialiste du SoirL'Union des travailleurs fera

ta paix du monde.ANATOLE FRANCE

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TubHcltt aux Bureaux da Journal

DIRECTEUR LITTÉRAIRE:

HRNR1 RARRITSST?

LA GUERREcentre laRussie

Il nous revient de divers cotés que,dans les dépôts et formations du terri-

toire, il est demandé des volontaires

pour l'Orient. Souvent, lorsque personnene répond à l'appel, on menace de faire

Ses désignations d'office.

Ainsi, l'intervention en Russie se con-

tinue. Il n'y aura pas, pour le moment,

'd'expédition de grande envergure ; mais

cette idée n'est pas abandonnée et, en

attendant qu'on la réalise, on alimenteles premières expéditions.

Du reste, on ne s'en cache plus. Des

Communiqués officiels nous mettent,

parfois, au courant des opérations mili-taires, et les déclarations faites par le

gouvernement, au cours de la discussiondes derniers douzièmes, ne laissent au-cun doute à ce sujet.

M. Pichon a rappelé le plan d'actionInterallié. Il consiste à interdire aux bol-cheviks l'accès des régions Ukraine,Caucase, Sibérie occidentale, « qui leur6ont économiquement nécessaires pour'durer et où s'organisent des éléments'd'ordre russes ». Avec le blocus de la

Baltique, de la Côte mourmane et d'Ar-khangel, le plan interallié est l'encer-clement économique de la Russie bol-chevik, environ 80 millions d'habitantsafin de la réduire par la famine. M. Pi-chon a ajouté : « Il s'agit donc tout d'àbord de constituer et de maintenir unfront défensif en avant de ces régions eten particulier en Russie orientale. Si uneffort offensif est nécessaire pojr reduirele bolchevisme, il devra être exécuté

ultérieurement par les forces russes â¢>.

En attendant, les Alliés envoient auxContre-révolutionnaires de là-bas desmunitions, du matériel de guerre et de3techniciens. C'est, qu'on le veuille ounon, sans le consentement préalable du

, Parlement et du pays. Ig. guerre ouverteet déclarée au gouvernement de fait dela Russie. ;C est pour cela qu'on deman-de de3 volontaires « pour l'Orient », etc'est pourquoi, alors que rien ne justifiela présence de quatre à cinq millions deFrançais sous les drapeaux â les Alle-mands ayant libéré cent cinquante di-visions â. la démobilisation se fait avecune lenteur désespérante. Il faut biengarder des troupes pour l'expédition deRussie !

Le plus écoeurant est l'hypocrisie ap-portée par le gouvernement pour justi-fier cette aventure contre-révolution-naire. Il y a quelques semaines, M. Pi-chon nous déclarait : « Il n'y aura pas

. d'intervention militaire en Russie. Vousn'y pensez pas! Comment songerions-nous à imposer une nouvelle guerre ànos bravés soldats, qui ont fait des sacri-fices -inouïs pendant plus de quatre ans.'Vous.pouvez être rassurés ». Puis, le 29décembre, à la tribune de la Chambre,'il déclarait : « Les gouvernements alliésne veulent paai intervenir dans la poli-tique intérieure de la Russie ». Et, quel-ques phrases plus loin, il disait î « Lemoment peut être venu 3e nous substi-tuer aux Allemands par l'envoi de dé-tachements militaires, d'instructeurs etde missions, et de faciliter la créationd'une armée ukranienne indépendante,pour faire face aux bolcheviks ». ⢠â¢

'C'est ainsi que procédaient les Alle-

mands après la paix de Brest-Litovsk.Appelés par les blancs d'Ukraine», dePologne, des provinces baltes et de Fin-lande, ils envoyaient des détachementsmilitaires, des instructeurs et des mis-sions, sous prétexte de rétablir l'ordre.L'Entente a-t-elle assez crié contre cejésuitisme! Aujourd'hui, c'est elle quiestime que le moment est venu de sesubstituer aux Allemands, qui. depuis,ont assez à faire chez eux.5 Donc, trêve d'équivoque. Nous som-mes, bel et bien en guerre avec la Rus-sie révolutionnaire. Cinquante et unmois d'une guerre atroce, un millioncinq cent mille morts, autant de muti-lés, la force productrice de notre paysréduite d'un gros tiers, tout cela ne suf-fit point à la monomanie impérialiste dono3 dirigeants. La guerre avec l'Allema-gne étant virtuellement terminée, il faut

â¢une nouvelle guerre, pour donner uneraison d'être maintenus à tous ces offi-ciers qui ne veulent point abandonner les

prébendes du temps de guerre, et pourpermettre aux fournisseurs des armées dete'enrichir encore davantage sur les de-niers de l'Etat. Et tout cela, sous pré-texte de mettre l'ordre en Russie! En

-réalité pour sauver, des légitimes colèresd'un peuple si longtemps et si durement

opprimé, les privilèges d'une classe di-rigeante et capitaliste quit de l'avis de

En route pourl'Internationale

Est-ce que va continuer la comédie "durenvoi aux calendes grecques de la réu-nion de l'Internationale?

Voici qu'au moment où l'on pouvaitespérer que la conférence de Lausanneâ ou de quelques autre Ville suisse â>

allait aboutir, des socialistes belges de-mandent une réunion préalable desmembres alliés du Bureau socialiste in-

ternational.

Qu'est-ce iencore que cette histoire?

On nous donne comme raison qu'il y a

utilité à se concerter, pour savoir dans

quelles conditions on entend « travailler

à rétablir l'Internationale ouvrière ».

Je le demande : en quoi des conversa-

tions de personnalités socialistes, dont

quelques-unes ont été un peu défraî-chies par la guerre, c'est le moins qu'on

puisse dire, résoudront-elles ce pro-blème ?

C'est à Lausanne que la question sera

pesée et examinée sous toutes ses faces.Ce n'est pas entre alliés que nous de-

vons délibérer, mais entre socialistes.

Les socialistes n'ont jamais été des

belligérants, je suppose. Ils ont été vio-

lemment séparés par une guerre contre

laquelle ils s'étaient efforcés de mettreen garde les peuples et s'ils ne se sont

pas réunis plus tôt, même au plein des

batailles, cela sans doute tient à la vi-laine attitude de certains de leurs chefs,mais ce fut surtout le gouvernementfrançais qui, là comme ailleurs, exerçasa violence réactionnaire.

Aujourd'hui, il semble que nulle forceau monde ne saurait empêcher les orga-nisations socialistes de reprendre con-tact. Dépêchons-nous donc et écartonstoutes les causes de retard et toutes lesmanoeuvres. Ce n'est pas avec des Bel-

ges, des Anglais et d'autres socialistes« alliés » que nous voulons nous concer-

ter, mais avec les représentants de l'en-semble du Prolétariat mondial. Il est

possible que nous soyons davantage en; accord avec des camarades allemands ou

autrichiens qu'avec des socialistes mi-nistres ou anciens ministres dans des ca-binets bourgeois. On le Verra là-bas.

Paul FAURE.

Démobilisez !

LA-BAS, TOUT LA-BAS

Quelle est la situation et l'état d'Ame destroupes qui font partie du corps expédition-naire de Palestine et do Syrie, de la loin-

taine Syrie, où l'impérialisme de nos chau-vins effrénés jette son dévolu ? Un de nosamis d'un groupe de brancardiers de Bey-routh répond à ces questions :

« Les échos de la campagne socialistepour la démobilisation nous arrivent. Ilsnous réjouissent. Est-ce qu'on .va nous lais-ser pourrir dans ce pays, où le regret duciel de France taquine par moment nôtrecafard ?

Voilà plus de quatre mois que notre grou-pe n'a pas touché dé linge de corps. Nousavons des chemises en lambeaux.

â¢Lavie est chere, 'le ravitaillement inter-mittent et défectueux. Nous (manquons sou-vent de pain. Les biscuits, qui le rempla-cent, nous donnent des maux d'estomac.

Un petit fait assez typique : " U n'y a ici« qu'un dentiste militaire, qui travaille au« gré de ses caprices. J'ai dû avoir recours« à un dentiste civil pour la pose d'un den-» tier. Goût â¢<150 piastres. J'ai maintenantu.de quoi casser mes vieuxbiscuits et ma« pauvre bourse est à sec. »

Washington. â L'organisation des fer-miers américains a nommé une délégationde sept membres, qui se rendront à Paris.Ce voyage est en relation avec là Conférencede la Paix.

M. Franklin-Bouillon, représente à peineles 2 % de la population russe.

Nous ne saurions nous élever avec

trop de force contre cette aventure cri-minelle. Elle est une atteinte flagranteau principe du droit des peuples à dis-

poser d'eux-mêmes, pour lequel l'En-tente affirmait faire la guerre. Elle cons-

titue un danger certain pour notre pau-vre pays, qui, la paix rétablie, n'aura

pas trop de tous ses enfants pour relever

ses ruines et atténuer sa détresse. EHe

est enfin une honte pour une démocratie

fière de son passé révolutionnaire et de

ses luttes contre l'oppresseur, que de se

voir transformer à son tour en agent de

la contre-révolution.

Libre aux républicains à la manque

d'accepter d'un coeur léger que nos gou-vernants perpétuent la guerre et rava-

lent ainsi notre pays; nous socialistes,

nous sommes bien résolus à ne point le

permettre.-

/ Pau! MISTRAL»

depute du Bouches-du-Rhone

A BERLINEbert triomphe

Bdie, 13 janvier. â- On mande de Franc-fort, 12 janvier :

Découragés par la prise du Vorwaerts,

les Spartakistes qui occupaient l'imprime-rie Ullstein avaient essayé, eux aussi, de

négocier et avaient demandé de s'en alleravec leurs armes el réclamé la démissionde Scheidemann et d'Ebert.

Les gouvernementaux ayant exigé lareddition pure et 'simple, les Spartakistesont profité de l'obscurité pour s enfuir parles toits vers la Charlottenstrasse, perdantquelques prisonniers pendant cette manoeu-vre.

Quand les gouvernementaux ont pénétrédans le bâtiment, celui-ci était complète-ment évacué. Les Spartakistes occupant lebâtiment de l'agence Wolff ont essayé deposer les mêmes conditions ; ils ont fini parse rendre, eux aussi, purement et simpleâ¢ment. â (Havas.)

...MAIS EN PROVINCELA LUTTE N'EST PAS FINIE

Bitte; 13 janvier. â L'agitateur russede-k a adressé un appel aux Spartakistes al-lemands, leur annonçant qu'une armée rus.se- est en rouie pour Berlin.

D'autre part, de toutes les parties de l'Al-lemagne, des Spartakistes seraient en rouievers la capitale. A Hanovre, deux mille d'en-tre eux se sont emparés d'un train et fontroute vers Berlin.

LES MITRAILLEUSES A SPANDAU

Bâle, 13 janvier. â C'est avec deux piè-ces d'artillerie de siège que les gouverne-mentaux se sont emparés de l'Hôtel de Villede Spandau. Il y avait eu auparavant _uncombat de mitrailleuses. Les troupes d'as-saut se frayèrent ensuite un chemin à tra-vers la Préfecture de police, voisine de l'Hô-tel de Ville. Lés Spartaciens s'y défendirentavec un acharnement extrême, de sorte quel'assaut dut être recommencé plusieurs fois.

COMBATS A HULLE

Bdle 13 janvier. â Une dépêche de Hulle,du U

'janvier, dit qu'une 'manifestation

monstre a été .organisée, hier après midi,

pour protester contre la domination des

Spartakistes locaux. Des mutilés de la guer-re, en tête de la manifestation, poussaientdes, vivats en- l'honneur de Scheidemaun et.d'Ébert, Des soldats armés ont essayé d'em-

pêcher le cortège d'avancer. Une lutte avec

des grenades à main et des mitrailleusess'est engagée. Il y a eu des morts et dosblessés. i

Le mouvement ouvrieren Argentine

Buenos-Ayres, 10 janvier./â La grèvecontinue. Grand est lé malaise qui en ré-isuite. Seul un journal socialiste a pu pa-raître. On assure qu'il y a eu une centainede morts dans la collision qui s'est pro-duite hier.- Les tramways, les chemins defer. les voitures ont cessé totalement de cir-culer. Le commerce est entièrement para-

% nouvelles bagarres se sont produitesaujourd'hui ; il y a eu de nouvelles victi-mes.

LA CONFÉRENCEPRÉLIMINAIRE

LE PROGRAMME D'AUJOURD'HUI

La fournée d'hier n'a. suffi à épuiser le

programme ni du comité de guerre, ni dela Conférence préliminaire.

Ce matin, à dix heures, les délégués tech-

niques tiennent séance pour fixer définitive-ment les conditions de prolongation de l'ar-mistice A cette séance, les ministres fran-çais qui n'ont pu être entendus hier, MM.

klotz, Leygues, Loucheur, Clémentel, four-niront les rapports, qui leur ont été deman-dés.

Le Comité de guerre prendra séance àdeux heures eï demie, avec l'intention d'en

finir. En effet, le maréchal Foch a donnérendez-vous à M. Erzberger et à la commis-sion allemande d'armistice le 14 janvier, àTrêves. .

M est très probable qu'à cette séance

sera envisagée une éventualité militairede la plus haute importance : celle de

P assistance armée que (es puissancesde l'Entente se proposent de prêter à la

Pologne. -⢠â¢

Le hauî commandement interallié estime

indispensable que les deux divisions polo-naises qui seront transportées en Polognesoient appuyées d'un certain nombre de dé*ltachements alliés, qui leur permettent d'oc-

cuper militairement le chemin de fer de

Dantzig à Thorn et de maintenir ainsi lescommunications avec l'Occident,

Si le Comité de guerre s'achève assez tôt,l'examen de la procédure de la Conférencesera repris immédiatement. (Paris-Midi.]

LE RENOUVELLEMENTDE V ARMISTICE

Aucune décision, on le sait, n'a été prise

hier, au sujet des conditions auxquelles 1 ar-

mistice pourra être prolongé.

Après l'étude technique à laquelle les états,

majors interalliés procèdent ce matin, cesconditions ne seront arrêtées que cet après-midi par le Conseil supérieur.

Ces nouvelles conditions seront d'ordre

économique, financier et maritime.

UN CONSEIL DE GUERRE

BRITANNIQUE A PARIS

Pour la première fois, à Paris, se réunit,

aujourd'hui, à l'hôtel Majestic, le conseil de

guerre impérial britannique, en vue d exa-

miner les décisions qui vont être prises parle conseil de guerre interallié.

Boret viande chère

M. Boret, ministre du Ravitaillement et

possesseur d'une grosse maison de com-

merce de grains, qui, Pédantla guerre, a

marché comme en temps de paix, a éprouvéle besoin d'élever à Paris le prix de gros de

la viande.

Âu pavillon de gros des Halles, le prix du

veau, du porc et du mouton a monté de

cinquante centimes la livre, le prix du

boeuf h 30 centimes. Et' le pavillonse m<?t

à regorger d'arrivages.. Les étables se vi-

dent. , .M. Boret est content.

DEMOBILISEZ ! DEMOBILISEZ-:!

Ledifférends'aggraveentreleChilietlePérou

Londres, 13 janvier. â On télégraphie deLima au Times, à la date du ... janvier :

« Les Péruviens continuent à quitter le

Chili, en raison des outrages et de la persé-cution dont ils sont l'objet. 2.000 fugitifssont arrivés à Wollendo et. à Callao pendantles dernières quarante-huit heures. »

Une vingtaine de Péruviens sont arrivési à La Paz dans le courant de la semaine etdéclarent avoir été maltraités par la popu-lace chilienne.

Partout, au Chili, les maisons commer-ciales anglaises et américaines ont été for-cées de congédier ceux de leurs employésqui étaient d'origine péruvienne. Hier, plu.sieurs citoyens anglais et américains sontarrivés à Callao ; ils ont été forcés de quit-â ter le Chili, pour avoir exprimé leur sym-pathie à l'égard du Pérou.â A Arica, un magistrat péruvien, sa fem-me et ses enfants ont été jetés à l'eau etfrappés avec des gaffes. Cette famille faillitpérir tout entière avant d'être secourue etembarquée sur un steamer.

On dit que Tacna et Arica sont mainte-nant sous le contrôle absolu des autoritésmilitaires chiliennes. (Information.)

Peur la liberté

Nom avons déjà public sut le recent incident

do la réunion de la Ligue de» Droits de l'Homme

me communication des minoritaires et du citoyenBasch. Aujourd'hui, notre camarade Loriot nom

adresse la communication suivante :'

Les récents incidents de la Ligue des Droitsde l'Homme feront-ils comprendre aux prolétaires

qui fondent encore des espoirs sur la collaboration

des classes, quels sont les véritables sentiments del-t bourgoisie, même teintée de démocratisme àl'égard de la classe ouvrière ?

Le Comité central qui s'est rangé depuis 1914

parmi les adversaires les plus dangereux du prolé-tariat'socialiste, ceux qui donnent l'illusion de s'in-téresser à sa cause, est décidé à exclure de la Li-

gue les membres qui, au meeting de la Bellevilloi-

se, ont protesté contre le passage de l'ordre du jourde M. Basch affirmant que nos soldats étaientmortf pour la liberté.

Interprétant tendancieusement pour les besoins deleu cause les sentiments des interrupteurs, lesmembres du Comité feignent de s'indigner et deconsidérer le geste des protestataires comme une

marque d'hostilité envers les morts, une injure faiteà leur mémoire. .

S'il n'y avait eu à la « Bellevilloise » que des li-

gueurs, l'incident serait réduit aux proportions d'une

affaire d'ordre intérieur ; mais ce sont les mili-tants ouvriers qu'on avait conviés à venir applaudirBasch, ce sont ces militants qui ont manifesté leur

hostilité, et c'est bien eux, que, dans sa déconve-nue et derrière la minorité de la Ligue, le Comitécentral cherche à atteindre.

En fait d'injure, il n'y en eut d'autre que celled-. Basch au bon sens et h la vérité historique⢠Nul»en effet, n'a le droit d'assurer que nos soldats sontmorts pour la Liberté, car nul ne les a consultéset aucun d'eux, depuis quatre ans et demi, n'a puexprimer d'autre opinion que celle du pouvoir.

Les soldats n'ont connu de la vérité que ce quiétait favorable au gouvernement ou ce qu'il n'étaitpas possible de leur dissimuler, et, à aucun mo-ment, ils n'ont pu dire si la victoire de ceux qui lescontraignaient à prendre les armes se confondait

â dans leur esprit avec la victoire de la liberté.

/ Mais s'ils n'ont pu parler, M. le ministre desAffaires étrangères l'a fait pour eux. Avec uneautoritê renforcée par l'approbation de 385 'députésâ¢périmés, il a fait connaître au pays la raison pourlaquelle il considère que nos soldats sont morts :c'est pour m nouveau partage du monde au profitdu capitalisme des nations alliés. Nous n'en avionsjamais douté.

Dans la tragique lutte de classes qui continue laguerre des impérialismes et met en péril le capita-lisme mondial, la bourgeoisie dirigeante a un inté-rêt évident à tromper les masses et à présenter com-me un régime de liberté celui qui, en réalité, assa-'re et étend sa domination. Les démocrates-idéalisatei leur facilitent d'ailleurs singulièrement la là.,phe en répandant, sous le patronage de M.Wilson,l'idée qu'il suffit à une Société des Nations. dediscipliner les effets de l'anarchie capitaliste pourinaugurer une ère de paix et de liberté. -

Pour nous et très certainement pour les pertur-bateurs du meeting de la « Bellevilloise », la liber.té ne peut résulter que de rétablissement d'un or-dre social entièrement nouveau, basé sur la sup-pression de la propriété privée. Aussi longtempsqui cet ordre social n'existera pas chez nous et se-ra mis en péril par nos propres dirigeants là où ilexiste, nous nous refuserons à leurrer les masses enleur donnant l'Illusion que les bénéficiaires du ré-gime capitaliste sontcapables de leur donner IqLiberté.

F. LORIOT.

A NOS LECTEURS

Nous prions les groupes el nos amis quidésireraient nous passer de nouvelles com-mandes concernant le numéro spécial dulancement de CLARTE, de le faire très ra-pidement.

Le succès a dépassé toutes nos prévisions,il nous sera difficile, d'ici quelques jours,de leur donner satisfaction.

Adresser les commandes à VAdministra-teur, au. prix de 7 fr. 50 le 100, à nos bu-rcaux, 8 fr. 50 franco.

Nous nous excusons également auprès 'denos camarades de province de ne pouvoirrépondre favorablement à leur demanded'envoi de tracts annonçant CLARTE. Letirage en est épuisé depuis samedi malin.

Londres. â Les raids d'aéroplanes ou doZeppelins et les bombardements par voie demer oqt causé) en Grande-Bretagne les per-tes suivante» î

Civils : tués. 1.260 ; blessés, 3 -590. Sol-dats : tués, 310 ; blessés, 551.

Les femmes et les enfants figurent poul-ies chiffres suivants :

Tues. 708 ; blessés, 1.983,

POLITIQUE INTERNATIONALE

LES COBLENTZAISTpute une série de nouvelles intéres-

santes sont arrivées ces jours-ci au sujetde la Russie : d'abord la réponse de M.;Pichon à l'Angleterre, puis la note sèchejet catégorique de l'agence Reuter annon-çant que la Grande-Bretagne n'enverraitplus de soldats à Arkhangel ; puis la dis-cussion du Congrès américain sur le rôledes troupes de l'Union dans cette ville etaux alentours. Tout cela tendrait à prou*ver que les Alliés et associés de la France*y compris le Japon qui évacue la Sibé-rie, n'ont point l'intention de prendral'offensive plus avant contre le bolche-

visme. Enfin on nous a révélé queTchitcherine et Litvinof avaient essayé, 3maintes reprises, de négocier la pai*avec l'Entente et que, chaque fois, ils onïtrouvé porte close. Notre Quai d'Orsayest irréductible. Il couvre, inspire, exalta!les déclarations passionnées de M. Nou-lens.

En même temps ,il donne abri au*néo-Coblentzah.

Nous avons vu arriver un à un ces mes.sieurs. Tels jadis les Plignac, les Lam-balle et autres caudataires des comte?d'Artois et de Provence dans les seigneu-ries rhénanes, les représentants de laréaction petrogradoise affluent à Paria.,qui devient la capitale de la contre révo-lution universelle. Parmi ces émigrés, î!en est de l'ancien régime et du nouveauâ des hommes qui n'étaient passés annouveau que pour mieux l'étouffer etlpour rétablir plus aisément l'ancien â«

Séparés en apparence par les barricadesde mars 1917, les uns et les autres seisont bien vite réconcilisés et ils tien-nent en réserve quelque grand-duc, qu'ilsacclameraient tsar demain.

'Ils ont estimé qu'ils seraient bien plusforts s'ils se coalisaient. Nous auronsainsi la Fédération des Coblentzais dontles grands metteurs en scène seront MM.Isvolski et le prince Lvof. L'ex-ambassa-deur de Nicolas II et le premier président!du conseil de la Révolution ont battu lïfrappel de tous les fuyards, et ils -ontmême incité quelques gros personnagesqui étaient restés en Russie à rejoindrece singulier corps expéditionnaire. Etlvoilà pourquoi M. Sasonof â l'homme

qui a négocié l'affaire de Constantinopleâ est convié à quitter Ekatérinodar. IIfaut croire que sa présence n'y était pasbien utile.

Les agences annoncent bruyamment Uconstitution d'un comité russe de Paris,qui probablement représenterait la Rus.sie à titre officiel devant la Conférence dala Paix.

Nous savons quels éléments compose-ront ce comité. Nous savons par suite!qu'il ne mérite aucun crédit. C'est un

conciliabule de figurants, de personnagescomiques, les capitaines de Koepenik oùles faux Dimitri de la Russie actuelle.Laissons-les dire, jouer leur rôle, prendrede grands airs. L'histoire s'écrit ailleurs,;

par la volonté des masses.PHEDON,

P. S. â Surveillons les affaires de Po-

logne. Les articles du Temps nous incitatif

à ne point nous départir de notre vigi.lance.

Xa Seine baisse

MAIS LA CRISE DU PAIN MONTE

La Seine a baissé de 75 centimètres «n

deux jours. Les rues qu'elle avait inondéesdans la traversée de Paris vont redevenir

praticables, si toutefois, après une embellied'un jour le fleuve ne remonte pas sous la

pluie abondante qui recommence à tomberet fait mentir les prévisions des hydrogra-phes officiels. : -

La ligne du chemin de fer d Orsay n est

Elusinondée qu'aux abords du pont Mira-

eau. On active, sur la rive gauche, les tra,vaux de réparation destinés à rendre l'élec-tricité aux habitants de ce quartier de Pa<ris. â¢â¢

La situation devient aussi meilleure dan»la banlieue.' : â " '

j -c' -

DISONS LÀ VERITE

La crise des inondations s'atténue, maiâla crise du pain, qui résulte en partie de la

première^ ne s'améliore" pas.De nombreuses boulangeries, dans plu-

sieurs arrondissements, ont fermé hier,après neuf heures du matin, pour no' rou-vrir que dans la soirée, sans pouvoir toute,fois donner du pain à volonté.

L'Intendance nous fait savoir qu'elle Sjusqu'à présent, à grand renfort de camion-nage militaire, distribué aux boulangeries100.000 kilos de pain fabriqué dami ses four-nils. Cent mille kilos, mais 'il y a h Paris,à l'heure présente, plus de i millions depersonnes. Son aide serait plus efficace en-core, si la ville et la banlieue avaient le ré-gime de l'autonomie communale, oui per-mettrait aux municipalités de réquisitionnerla farine et de fabriquer du pain. En atten-sant que ce régime s'institue dans le gâchismilitaire actuel, nous disons, nous : « "Vive;la Commune !»

La question est de savoir s'il y a de Ia£farine, de la bonne farine en assez grandequantité. « Craignez-, nous disait un meu-nier, de voir bientôt reparaître le temps oules Parisiens étaient obligés de manger unaffreux mélange qui délabrait les estomacsdébiles. » Si le meunier dit. la vérité, c'estque M. Boret cache la sienne. Ce n'est pealô première fois que cela lui arrive. â¢â¢â¢

1919

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Le service de presse des Alliés, immortalisé par le peintre Sir William OpenLes livres de MacMillan étayent cette affirmation : « La sécurité

était presque une obsession pour les Britanniques... les épouses étaient autorisées à prendre leurs repas au Majestic, mais ne pouvaient pas y séjourner. Tous les résidents de l’hôtel se voyaient remettre un livre entier de règles à respecter. Les repas se prenaient à heures fixes et chacun devait régler ses consommations, à l’exception - ce qui fut la source de commentaires acerbes - de ceux qui venaient de l’un des dominions ou bien d’Inde, auquel cas le gouvernement britannique payait la note. »

MacMillan rappelle dans son livre que les Britanniques allèrent jusqu’à remplacer l’intégralité des équipes françaises du Majestic par du personnel hôtelier anglais. « La nourriture devint celle d’un respectable hôtel de gare : du porridge, des œufs et du bacon le matin, beaucoup de viande et de légumes au déjeuner et au dîner, et du mauvais café toute la journée. » « Le sacrifice était vain », s’indignèrent Harold Nicolson et ses collègues, « étant donné que tous les bureaux, remplis de documents confidentiels, se situaient à l’hôtel Astoria où le personnel était toujours français. »

La fête diplomatique dura six mois, avant que les riches clients habitués ne reprennent discrètement possession des lieux.

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C’est dans le cadre d’une salle à manger privée de l’hôtel Majestic que l’écrivain britannique Sydney Schiff et sa femme Violet, mondaine férue d’art et de littérature, organisèrent le célèbre dîner qui fait désormais figure d’apogée du modernisme européen. L’exceptionnelle qualité de ses invités valut en effet à cette soirée sa place dans

l’Histoire, et la présence de Proust au Majestic devint un de ces moments symboliques qui offrirent à Paris son rang de capitale culturelle

La réception du 18 mai 1922 fut organisée pour fêter la première du Renard de Stravinsky, interprété par les Ballets russes de Diaghilev. Mais ce sont les participants qui firent de cette soirée un événement unique dans l’histoire du XXe siècle.

Richard Davenport-Hines fait allusion à cette fameuse soirée dans son livre Proust au Majestic (publié en 2006 sous le titre A Night at the Majestic). L’éditeur et biographe déclare que la rencontre entre James Joyce et son confrère romancier Marcel Proust aurait à elle seule suffi à faire passer le dîner au 19, avenue Kléber à la postérité. Mais la présence de Sergueï Diaghilev, d’Igor Stravinsky et de Pablo Picasso le rendit tout simplement légendaire.

Dans le cadre d’une vaste étude sur la vie de Proust à Paris, l’auteur raconte en détail le fameux dîner. Picasso, venu à contrecœur, ressemblait à un pirate avec un foulard catalan entortillé et noué sur la tête. Ce qu’il a pu dire pendant l’exceptionnelle soirée ne fut malheureusement pas rapporté. Proust, semi-reclus

Au cours de l’ère de frivolité que constitua l’entre-deux-guerres, l’hôtel Majestic

joua le rôle de plaque tournante pour un impressionnant aréopage d’écrivains,

de musiciens et de figures du Tout-Paris.

MAJESTIC

FOLLESannées du

Les

Marcel Proust

James Joyce

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Dessin à l’aquarelle du costume du Renard

déguisé en nonne, par Mikhail Larionov.

Collection George Chaffée, 1949

Igor Stravinsky

Les premières notes de la partition du Renard de Stravinsky

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depuis une dizaine d’années, fit une entrée remarquée, vêtu d’un manteau de fourrure et de gants blancs. L’histoire raconte qu’il essaya d’engager une conversation sur Beethoven avec Stravinsky, ce à quoi le compositeur rétorqua: « Je déteste Beethoven ! » James Joyce, visiblement en état d’ébriété dès son arrivée, s’effondra sur une table et se mit à ronfler, réellement endormi ou bien faisant semblant. Une autre version dépeint le romancier hypocondriaque en pleine comparaison de maux physiques, Joyce se lamentant de sa mauvaise vue : « Mes yeux ne sont pas très bons » et Proust se plaignant de soucis gastriques : « Mon pauvre estomac, il me rend la vie impossible. »

Si l’on en croit le livre de Davenport-Hines, le menu fut composé pour plaire à la fois aux invités russes et aux Proustiens au sein du groupe. « Schiff et les chefs du Majestic voulaient saluer la présence de nombreux Russes exilés parmi les convives, en servant des zakouski, du caviar et d’autres spécialités de leur pays... Les viandes, judicieusement choisies pour le plaisir des Proustiens, incluaient des plats inspirés des pages de ses romans - bœuf en gelée et gigot de mouton » et, bien entendu, comme le souligne Davenport-Hines, des asperges en abondance, « un légume que Proust avait aussi magnifiquement que malicieusement décrit dans son livre et dont c’était la saison au moment de la soirée. »

Les pâtissiers du Majestic préparèrent des desserts somptueux : salade d’ananas aux truffes, cake aux amandes, glace à la pistache et au café avec mousse de fraises et pour couronner le tout un pudding à la façon de Nesselrode, un gâteau crémeux aux châtaignes recouvert de glace à la vanille et parfumé au kirsch, une eau-de-vie distillée à partir de cerises griottes.

Cette soirée allait être la dernière pour Proust, qui mourut six mois après cette fameuse nuit au Majestic.

Notre personnalité sociale est une création de la pensée des autres. Marcel Proust, A la recherche du temps perdu

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Les Années Folles à Paris

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Sylvia Beach & James Joyce

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u N A M É r I C A I N à PA r I S

Si le flux des voyageurs américains à Paris avait déjà commencé plusieurs décennies avant la Première Guerre mondiale, les années 1920 les virent y déferler. Artistes, écrivains, musiciens, fils et filles de riches entrepreneurs réservaient en masse des places sur les paquebots transatlantiques à destination de la Normandie, d’où ils prenaient le train vers la capitale française.

Profitant de la prospérité du nouveau continent et de la force du dollar par rapport au franc français, les Américains imprimaient leur marque dans les hôtels de luxe de la rive droite. Comme ces milliers de touristes qui affluaient à Paris, les expatriés anglophones arrivaient en nombre.

« Si vous avez eu la chance de vivre à Paris dans votre jeunesse, le souvenir vous accompagnera partout pour le reste de votre vie, car Paris est une fête, » écrivait Ernest Hemingway dans son récit autobiographique, Paris est une fête, publié à titre posthume en 1964. En 1922, Hemingway et sa première femme, Hadley, s’étaient installés dans un deux-pièces près de la Sorbonne. Il passait son temps à la librairie Shakespeare & Company, près du Jardin du Luxembourg, où il venait emprunter les livres de Tourgueniev ou de Tolstoï. Elle appartenait à Sylvia Beach, une figure emblématique de la communauté expatriée et devint un carrefour pour les Américains à Paris.

C’était une période passionnante pour la littérature à Paris, avec des écrivains comme T.S. Eliot, James Joyce, Sherwood Anderson, Samuel Beckett, Francis Scott Fitzgerald ou Ezra Pound qui, tout comme Hemingway, trouvaient leur inspiration au cœur de la Ville Lumière. Pendant l’entre-deux-guerres, le bouillonnement des expatriés connut son apogée. L’écrivaine Gertrude Stein les baptisa La Génération Perdue – « des jeunes hommes et femmes qui se sentaient déphasés après avoir vécu les ravages de la guerre en Europe. »Sylvia Beach & James Joyce

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La littérature n’était pas l’unique univers artistique en plein essor dans la capitale. Un autre auteur trouva l’inspiration dans la Ville Lumière et captura l’essence des années folles à Paris, exubérantes et imprégnées de jazz.

La période s’avéra en effet constituer le cadre idéal pour Un Américain à Paris, le poème symphonique de George Gershwin. Le compositeur en écrivit une bonne partie au printemps 1928 pendant son séjour au Majestic, où son frère Ira et la femme de celui-ci, Leonore, ainsi que la sœur de Gershwin, Frances, l’avaient accompagné pour son cinquième voyage en Europe. Ira racontera plus tard que toute la section « blues » de la pièce fut composée au Majestic, les autres parties ayant été écrites à New York, à Vienne et dans une ferme du Connecticut.

C’est en effet bien Paris que Gershwin décrit d’une manière picturale dans ce qu’il se plaisait à nommer son « ballet rhapsodique ». Il écrivit à propos de sa composition : « Mon but ici est de dépeindre les impressions d’un visiteur américain lorsqu’il se promène dans Paris, s’imprégnant des différents bruits de la rue et absorbant l’ambiance française. »

Il parle de la vitalité, de l’énergie et de l’effervescence des cafés, des trottoirs et des rues et, selon ses propres mots, « après une crise de nostalgie, la joie d’être un visiteur flânant dans Paris. »

Selon sa propre description de la composition, « l’Américain retrouve son enthousiasme à l’air frais, dès qu’il quitte le café où il se laissait aller à la mélancolie et redevient un spectateur attentif de la vie parisienne. à la fin, le bruit de la rue et l’ambiance française sont triomphants. »

George Gershwin et le thème principal de son poème symphonique Un Américain à Paris

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Assis dans sa chambre au Majestic, Gershwin pouvait entendre la cacophonie des klaxons des taxis. Le livre Americans in Paris raconte l’étrange requête du compositeur lors de son séjour à l’hôtel : « Il voulait acquérir (pour son usage personnel) ces klaxons dont le son si particulier imprégnait Paris. » Gershwin les dénicha avenue de la Grande Armée, où se trouvaient de nombreux magasins de pièces automobiles. Il les ramena dans ses quartiers du Majestic et les plaça sur quelques tables de jeux, près du piano. Ses visiteurs le questionnèrent bientôt sur cet étalage de klaxons. « Je suis à la recherche du klaxon à la bonne tonalité pour la scène de rue d’un ballet que j’écris », leur répondit-il, « ça s’appelle Un Américain à Paris, c’est très amusant. Je pense que je tiens quelque chose. Je viens de terminer l’esquisse du mouvement lent : The Homesickness Blues. » Gershwin espérait ainsi évoquer les sons de la circulation parisienne en utilisant de véritables avertisseurs dans son ballet, mais le livre ne mentionne pas comment les autres clients du Majestic réagirent à leur tonitruante présence à l’intérieur de l’hôtel.

Avec l’arrivée de la Grande Dépression de 1929, l’ambiance parisienne s’assombrit, mais pour l’avant-garde artistique et les intellectuels libres-penseurs, la Ville Lumière ne perdit rien de son attrait ni de sa fantaisie. A l’aube des années 30, une nouvelle vague d’artistes, d’écrivains et d’aristocrates vint rejoindre les expatriés des années 20.

Dans les salons, cafés et galeries de la ville magique, des personnalités comme Anaïs Nin, Coco Chanel, Salvador Dalí, Katherine Anne Porter ou Henry Miller se mirent à battre la mesure des nuits parisiennes. Le jazz était omniprésent, le surréalisme florissant et la haute couture en pleine métamorphose.

Ces innovateurs et libres-penseurs portèrent le flambeau qui continuait à éclairer la révolution créatrice, symbole de cette ère des expatriés à Paris. Une époque extravagante, excessive, qui débuta dans une ambiance de bacchanale pleine de promesses et allait bientôt connaître un sinistre terme avec l’imminente chute de Paris.

L A F I N d ’ u N e É P O Q u e

En 1936, l’étoile du Majestic cessa brusquement de briller sur le paysage hôtelier parisien, lorsque le bâtiment fut acheté par l’Etat français pour y installer la direction des services d’approvisionnement de la Défense.

Bien qu’on continuât à l’appeler le Majestic, les salons et salles de bal de l’hôtel n’étaient plus destinés à de luxueuses réceptions et le mobilier incompatible avec sa nouvelle vocation fut liquidé. Le grand orgue de la salle de bal, construit en 1923 par Rieger en République tchèque et qui fut à l’origine installé dans l’un des salons de l’hôtel, fut cédé à la paroisse Saint-Michel, dans le 17e arrondissement, où on peut encore l’entendre aujourd’hui.

Quatre ans plus tard, le rôle que jouait le bâtiment dans la planification de la défense allait prendre un tournant radical lorsque l’armée allemande lança son offensive contre la France. 1936

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L’armée allemande ayant envahi une bonne partie de la France, Paris fut déclarée «ville ouverte» en juin 1940, épargnant combats et destructions à la capitale française, alors que l’ennemi pénétrait dans la ville. Durant les quatre années de l’Occupation,

les plus grands hôtels de l’entre-deux-guerres, comme le Majestic, le Ritz, le Lutétia, le Crillon, le Meurice, l’Ambassadeur et le Continental, ainsi que les principaux bâtiments officiels de Paris furent réquisitionnés pour servir les objectifs administratifs et militaires de l’Allemagne nazie, et ce jusqu’à la Libération en août 1944.

Alors que croix gammées et uniformes militaires allemands s’affichaient partout en ville, l’ex-Majestic devint le siège du Haut Commandement militaire allemand en France (Militärbefehlshaber in Frankreich ou MBF), cheville ouvrière des politiques d’ordre et de sécurité en zone occupée.

Le 26 août 1944, le Général de Gaulle raviva sous l’Arc de triomphe, à deux pas du Majestic, la flamme du soldat inconnu. Puis, à la tête des troupes et des citoyens qui défilaient pour célébrer la victoire, il descendit ensuite les Champs-Elysées jusqu’à Notre-Dame. Un second défilé accueillit les soldats américains sur la plus belle avenue du monde. Paris fêtait sa libération.

A travers les aléas des sept décennies suivantes, l’Hôtel Majestic joua à Paris un

rôle déterminant dans les relations internationales et le maintien de la paix.

RENAISSANCE

POLITIQUE,diplomatie et

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Les soldats américains jouissent du spectacle offert par le drapeau tricolore flottant sur la tour Eiffel

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L’ u N e S C O A u M A j e S T I C

Le Majestic fut réaménagé de fond en comble, à peine ses portes franchies par le dernier soldat de la Wehrmacht. Un an après, l’Organisation des Nations unies naissante fonda un certain nombre d’institutions et organisations, en particulier l’UNESCO (Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture) dont le siège s’établit à Paris.

Les Nations unies choisirent le Majestic comme résidence temporaire de l’UNESCO lorsque sa Commission préparatoire fut déplacée de Londres à Paris le 16 septembre 1946. Dans son préambule, l’Acte constitutif de l’UNESCO proclamait que « les guerres prenant naissance dans l’esprit des hommes, c’est dans l’esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la paix. » Ces nobles objectifs contribuèrent à atténuer le douloureux souvenir qu’avait laissé l’occupation de l’ancien hôtel par les Allemands.

Les conditions de travail n’étaient cependant pas idéales. Quelques-unes des plus grandes chambres de l’hôtel furent allouées aux secrétaires, qui archivaient les dossiers dans les penderies. Les cadres travaillaient dans les salles de bain et stockaient d’importants documents dans les baignoires. Le séjour « temporaire » de l’UNESCO au Majestic dura 12 ans.

Le 3 novembre 1958, l’organisation inaugura « l’étoile à trois branches » place de Fontenoy, son nouveau siège sur mesure du 7e arrondissement, un édifice bien connu des Parisiens pour son extravagante architecture en Y.

Peu après le départ de l’UNESCO, le Majestic accueillit ses nouveaux hôtes,

L’UNESCO et le Centre de conférences internationales

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destinés à être les derniers locataires du bâtiment. Devenu le Centre de conférences internationales du ministère des Affaires étrangères, celui-ci fut pendant les cinq décennies qui suivirent, jusqu’en 2009, le théâtre de grandes réunions et d’événements historiques.

Les pourparlers qui débutèrent le 13 mai 1968 constituèrent l’une des séquences les plus marquantes de cette période, « sous les lustres de cristal de l’ancien hôtel Majestic », comme le décrit Larry Berman dans son livre No Peace, No Honor: Nixon, Kissinger, and Betrayal in Vietnam.

Après 12 jours d’âpres tractations, la fin de la guerre et le rétablissement de la paix au Vietnam furent entérinés le 27 janvier 1973 par la signature des Accords de paix de Paris dans le décor feutré d’un salon orné de boiseries de chêne, attenant au lobby du Majestic et devenu depuis le Bar Kléber. Négociés par Henry Kissinger, les accords furent paraphés par les représentants des quatre protagonistes du conflit : les états-Unis, le Sud et le Nord-Vietnam ainsi que le Front national de Libération du Sud-Viêtnam (FNL, ou Vietcong).

Près de 20 ans plus tard, l’ancien hôtel Majestic accueillit à nouveau des négociations de paix. Les Accords de Paris de 1991 y mirent en effet un terme officiel à la guerre Cambodge-Vietnam. Les textes furent ratifiés le 23 octobre à l’occasion de la Conférence de Paris, qui réunit les quatre partis cambodgiens et de nombreux participants internationaux, dont 19 gouvernements. La signature fut historique, non seulement en raison de la résolution du conflit, mais aussi parce pour la première fois, la tutelle de l’ONU se substitua au gouvernement d’un état.

La signature des Accords de paix de Paris à l’ancien hôtel Majestic, le 27 janvier 1973

1973

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L A r e N A I S S A N C e d e L A G R A N D E D A M E D E PA R I S

Au fil des années, le centre de conférences commença à perdre de sa superbe. Vint le temps pour le gouvernement français de s’en dessaisir et, en 2007, l’immeuble haussmannien de l’avenue Kléber fut cédé à la société hôtelière qatarie Katara Hospitality. Au début de l’année 2009, The Hongkong and Shanghai Hotels, Limited (HSH) annonça la conclusion d’un accord de partenariat avec Katara Hospitality en vue de la transformation du bâtiment en hôtel Peninsula, le premier établissement européen du Groupe HSH. La démolition de l’intérieur de l’édifice débuta à la fin de l’année 2009 et s’acheva en mars 2010, ouvrant la voie aux travaux de restauration qui démarrèrent immédiatement.

Quatre années d’un travail passionné furent nécessaires pour rendre à ce bâtiment historique sa gloire d’autrefois. Dès le départ, l’ambition de préserver l’esprit de ce lieu unique imposa aux architectes l’interdiction de modifier le patrimoine extérieur de l’édifice et l’engagement de garder intacts l’authenticité et le caractère de ses aménagements intérieurs. Au même titre que les vastes volumes des chambres et des espaces publics, les éléments originaux disparus ou gravement endommagés purent être recréés à la suite de recherches approfondies, et le décor inauguré en 1908 retrouva tout son éclat.

Marbres, stucs, mosaïques, céramiques, boiseries, maçonneries, dorures, peintures, ainsi qu’une myriade d’autres éléments furent préservés avec dévotion et restaurés minutieusement par les entreprises familiales les plus respectées de France. L’ensemble des talents et experts mobilisés représentait de longues lignées de maîtres artisans remontant à plusieurs générations et jouissait des références les plus prestigieuses, la plupart d’entre eux ayant déjà travaillé sur des chantiers patrimoniaux comme le Louvre ou le château de Versailles.

L’ensemble des savoir-faire et des matériaux déployés furent mis au service de la restauration et de la préservation de l’intégrité architecturale et du style du bâtiment original. Simultanément, les standards les plus modernes et les plus innovants en matière de design, de luxe et de confort vinrent harmonieusement s’y intégrer, donnant ainsi naissance à un véritable palace parisien d’aujourd’hui.

A peine plus d’un siècle après l’arrivée des premiers clients à l’hôtel Majestic de Léonard Tauber, The Peninsula Paris a ouvert ses portes le 1er août 2014.

Une fois encore, ce que l’on appelait alors la Grande Dame de Paris est ressuscité.

2014

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Le making

of...

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La Renaissance d’une “Grande Dame”

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Alors que la construction de l’éminent grand hôtel parisien n’avait réclamé

que deux ans, quatre longues années furent nécessaires pour le restaurer et

le réinventer. Les éléments originaux furent préservés avec passion, ou parfois

méticuleusement reconstitués, par les maîtres artisans français les plus

renommés, qui transformèrent cet emblème parisien en un luxueux havre

de paix pour les voyageurs les plus exigeants du XXIe siècle.

La Renaissance d’une “Grande Dame”

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Entrez au Peninsula Paris. Prenez un moment et prêtez l’oreille. Les murs se font l’écho des jours glorieux de ce symbole du glamour qui ouvrit ses portes en 1908. La “Grande Dame” fut la star du Paris de la Belle époque, puis des Années folles, une inspiratrice pour le compositeur George Gershwin, ainsi que le théâtre d’un légendaire dîner au cours

duquel le romancier James Joyce et son rival Marcel Proust se retrouvèrent à la même table que Pablo Picasso et Igor Stravinsky.

Prise dans les flots tumultueux de l’Histoire, qui la conduisirent à la décrépitude et au délabrement, la “Grande Dame” changea plusieurs fois de personnalité au cours des deux grandes guerres. Elle ouvrit ses bras aux soldats blessés de la Première Guerre mondiale en se transformant en hôpital, puis hébergea la délégation britannique lors des négociations du Traité de Versailles, qui mit fin à la “Der des Ders”. Pendant la Seconde Guerre mondiale, le quartier général militaire de la France occupée s’appropria l’édifice qui a finalement accueilli tour à tour le siège de l’UNESCO et le Centre de conférences internationales du ministère des Affaires étrangères. Aujourd’hui, sa renaissance sous la forme du Peninsula Paris est devenue source de fierté pour de nombreux Parisiens, en particulier au sein de la nouvelle génération d’artisans issus de traditions familiales séculaires, qui lui ont restitué toute sa fraîcheur.

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Clément Kwok, Chief Executive Officer de The Hongkong and Shanghai Hotels, raconte comment le destin a réuni la “Grande Dame” et le Peninsula : « Le groupe cherchait depuis quinze ans un emplacement dans Paris. Les instructions étaient très simples, mais strictes : le bâtiment devait posséder une importance historique, être en mesure d’accueillir un minimum de 200 chambres et se situer au meilleur emplacement possible. »

La propriété de sept étages au 19, avenue Kléber correspondait parfaitement à cette description. « Quand nous avons pénétré pour la première fois dans le bâtiment, bien qu’il fût très abîmé et totalement décrépi, nous avions tout de suite ressenti sa splendeur d’autrefois, nous pouvions presque entendre jouer la musique », ajoute Peter Borer, Chief Operating Officer. Le seul problème résidait dans son état avancé de délabrement. D’importants travaux étaient requis. Pendant quatre ans, quelques-uns des artisans les plus réputés de France entreprirent une attentive restauration de ce magnifique joyau architectural. De la façade aux éléments intérieurs - marbres délicats, précieuses boiseries ou finitions à la feuille d’or, le résultat témoigne de la pérennité du savoir-faire français.

« Aujourd’hui comme hier, une véritable poésie se dégage de ce bâtiment, de son histoire et de son architecture », affirme James Mercer, qui fut chargé de diriger les travaux. Familier des projets de cette ampleur sur des monuments historiques, Mercer a notamment supervisé la remise à neuf d’un autre illustre palace parisien, le Four Seasons - George V, situé non loin du Peninsula Paris.

Fresques et peintures murales de l’actuel

Lounge Kléber

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L’équipe de restauration a découvert la couleur blanche originale du Lobby sous de multiples couches de peinture verte

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Bien que la construction de l’hôtel original n’ait duré que deux ans, de 1906 à 1908, sa restauration traîna en longueur. Il fallait à tout prix préserver l’héritage, l’authenticité et l’esprit de l’édifice, ainsi que les généreux volumes des salles et des espaces publics, les éléments originaux manquants ou trop endommagés ayant dû être recréés à la suite de recherches approfondies. C’est Richard Martinet, du cabinet d’architecture et de décoration intérieure Affine, qui dirigea l’ensemble du projet, en collaboration avec les équipes Peninsula. Il se remémore sa première rencontre avec le bâtiment décrépi : « Quand nous préparons une rénovation, nous commençons toujours par tout dégager afin de retrouver la structure, la couche originale, et pendant cette phase du projet, nous trouvons à chaque fois quelque chose d’intéressant. Ici, nous avons découvert, sous des couches de béton et de peinture, des parties du décor original toujours présentes », raconte-t-il. « Il est très romantique de contempler un bâtiment pratiquement en ruine et, avec un peu d’imagination, de se le représenter dans son état d’origine. On ne peut que faire appel à sa créativité, car on travaille à partir de quelques éléments épars ».

Même avec beaucoup d’imagination et de romantisme, la tâche à accomplir restait titanesque. « Deux des salons avaient été transformés en locaux techniques et séparés par une dalle de béton. Nous ne disposions que de la partie supérieure, la partie inférieure était complètement détruite », dit-il. « Les salles de bains étaient toujours dans les chambres, mais dissimulées par des cloisons, et quand nous les avons démontées, nous avons trouvé des carrelages originaux. Ce sont des dégâts que l’on trouve souvent dans ce genre d’édifices, sans aucune considération pour les talents mobilisés lors de la création du décor de l’époque. »

Des fenêtres obstruées furent également découvertes derrière quelques placards dans une galerie. « Les fenêtres avaient été conçues en 1908 par l’architecte du bâtiment, Armand Sibien, de manière à apporter au centre du lobby une très douce lumière naturelle, filtrée par la dimension des fenêtres. C’était très ingénieux et traduisait une intense réflexion et de grandes compétences. »

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Avenue Kléber, les Parisiens pouvaient suivre pas à pas l'évolution des travaux

r e L e V e r L e S d É F I S

De nombreux défis techniques se présentèrent dès le début du projet, l’un des plus contraignants ayant été la dégradation de la structure même du bâtiment. Comme le précise James Mercer, « des travaux techniques et d’ingénierie de grande envergure se révélaient nécessaires pour reconstruire et renforcer l’ensemble de l’édifice. Nous devions à la fois consolider un immeuble ancien et nous assurer de pouvoir y installer les technologies du XXIe siècle ». Les règles de conservation du patrimoine historique ajoutaient des contraintes supplémentaires. Les architectes en charge de la restauration ne pouvaient modifier la façade classique d’aucune manière et devaient se plier à d’autres exigences pour l’intérieur, notamment l’impératif de travailler avec des matériaux rigoureusement identiques à ceux employés un siècle auparavant.

La paternité de l’essentiel du style architectural parisien que nous connaissons aujourd’hui doit être attribuée au préfet de la Seine du milieu du XIXe siècle, le baron Georges-Eugène Haussmann, qui établit des règles d’urbanisme précises visant à uniformiser l’apparence des façades des immeubles. L’intention de The Peninsula Paris était d’associer l’intégrité architecturale et stylistique du bâtiment original à la mise en place des équipements contemporains, des technologies modernes et des luxueux aménagements d’un hôtel du XXIe siècle.

« Quand nous avons pris les commandes, nous avons dû restaurer tous les éléments historiques et nous plier aux règles locales de conservation, à l’intérieur comme à l’extérieur », explique Mercer. Montrant les moulures originales situées au sommet des murs du lobby, il poursuit : « Au tout début, quand nous avons fait le tour des lieux, elles paraissaient hors d’âge et tombaient en morceaux. Chacune d’entre elles ayant été créée dans un matériau appelé stuc, nous avons dû effectuer des moulages de l’ensemble pour les reproduire ensuite suivant les techniques d’origine. »

Bruno Rondet, de FOE Stuc et Staff, l’entreprise chargée de cette réhabilitation, décrit le processus : « Nous avons d’abord déterminé les couleurs exactes, puis cherché les pigments originaux. Ce que vous voyez aujourd’hui est en tous points identique à ce qu’on pouvait admirer il y a cent ans. »

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UNE FAÇADE RESPLENDISSANTE

Restituer sa gloire d’autrefois à la magnifique façade néoclassique nécessita un travail rigoureux et passionné, ainsi qu’une totale maîtrise technique.

Le caractère et l’esprit du vénérable hôtel sont étroitement liés au style typiquement haussmannien de sa construction, ainsi qu’à son emplacement exceptionnel. Le défi était donc double : préserver son âme parisienne tout en respectant son patrimoine architectural unique.

Bien que la restauration se déroulât au début du XXIe siècle, chaque intervenant fut conscient du fait qu’à l’époque de la construction de l’édifice, entre 1906 et 1908, Paris était l’une des villes les plus riches et les plus élégantes du monde. Au début du XXe siècle, l’opulence et le prestige de la Ville Lumière se traduisaient non seulement par la majesté de ses bâtiments, mais également à travers les façades minutieusement détaillées, dont les fresques délicatement ciselées, les statues de pierre et les ardoises étaient réalisées par les meilleurs artisans de France.

La longue période de déclin et de dégradation qu’avaient traversé les lieux entraînait toutefois deux défis majeurs : recréer la splendeur esthétique de ses glorieuses années, mais également assurer son intégrité structurale. Pour atteindre ces objectifs, l’équipe de restauration du Peninsula travailla en étroite collaboration avec les trois principales institutions du patrimoine français : les architectes des Bâtiments de France, les Monuments Historiques et la Commission du Vieux Paris.

L’accomplissement de la mission de sécurisation de la structure exigea des prouesses de la part des ingénieurs. « Le bâtiment fut l’un des premiers à Paris à utiliser du béton armé, ce qui était très novateur à l’époque et donc d’un grand intérêt historique », commente le responsable du projet, James Mercer. Cela constituait toujours un défi un siècle plus tard.

Il fallut reconstruire entièrement l’hôtel sur une charpente métallique et les fondations durent être étayées. La masse totale d’acier utilisée équivaut à celle de cinq TGV, et 30 000 tonnes de béton furent coulées, soit environ trois fois le poids de la tour Eiffel.

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Après avoir nettoyé en profondeur la poussière et la saleté accumulées sur la façade pendant des décennies de négligence, les choses sérieuses commencèrent. The Peninsula fit appel aux talents de vingt artisans maçons des ateliers Degaine, spécialistes des monuments historiques, pour prendre en charge la restauration des 10 000 m2 de la façade, avec ses fleurs, nœuds et rubans finement sculptés. Trois types de pierres calcaires furent mis à contribution, provenant des mêmes carrières que la construction originale, à St Leu-la-Forêt, Chauvigny et Comblanchien.

Chaque fois que possible, on répara les dégâts en reconstituant à la main les parties manquantes, sculptées dans un mortier de poussière de pierre. Lorsque les bas-reliefs se révélaient trop endommagés, toute la section était remplacée par une nouvelle pierre, entièrement sculptée à la main, avec de simples photos pour unique référence. Chaque cascade de fleurs se traduisait par trois semaines de travail pour un tailleur de pierre, quand douze heures étaient nécessaires pour un petit ruban.

Les solins et les cadres en zinc des fenêtres furent tous martelés, pressés et finis à la main, afin de conserver un aspect artisanal similaire à celui obtenu lors de la construction.

Le toit de l’hôtel exigea également une attention particulière. Il fut entièrement reconstruit à la main suivant des techniques traditionnelles et à l’aide de poutres de chêne français et de solins de zinc.

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100 000 ardoises des carrières de Trélazé, près d’Angers, d’où provenaient celles de l’édifice original, ont été utilisées pour créer la nouvelle couverture. Exploitée par une société centenaire, Les Ardoisières d’Angers-Trélazé, la mine est désormais fermée, car ses veines sont épuisées. Quelques-unes, particulièrement importantes, ont cependant été maintenues en activité et réservées exclusivement aux monuments historiques officiels. The Peninsula Paris est donc l’un des derniers bâtiments à bénéficier d’ardoises de cette provenance prestigieuse.

A l’origine, trois tours se faisaient face au sommet de la cour intérieure de l’édifice. L’une d’elles fut déplacée et une quatrième installée, afin de créer une symétrie. Pour refaire les toitures des tours, des ardoises en “écailles de poisson” furent utilisées. Elles furent d’abord découpées à la machine en pièces rectangulaires, puis façonnées à la main en forme d’écailles de poisson. Outre les compétences nécessaires pour mettre les ardoises en forme, leur courbure obligea les couvreurs à déployer une exceptionnelle dextérité pour les poser.

L’hôtel original était l’un des très rares établissements parisiens à disposer d’un jardin sur le toit, et ces jardins suspendus sont toujours rares dans la capitale. The Peninsula Paris a recréé cinq jardins en terrasse, dont l’accès est réservé à la Suite Katara et aux suites terrasse, qui disposent chacune d’un escalier privé pour les rejoindre. Deux autres petits jardins se trouvent dans la cour, au rez-de-chaussée, alors que les toits et la Terrasse Kléber jouissent également d’une décoration végétale saisonnière. Touche décorative supplémentaire, les terrasses sont désormais bordées de balustrades réalisées par la Fonderie GHM, la compagnie à laquelle Paris doit les édicules Art nouveau en fer forgé qui ornent les bouches de métro les plus typiques de la ville.

La construction du restaurant

L’Oiseau Blanc

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M A r I e r H I S T O I r e e T M O d e r N I T É

Si la restitution de la beauté intemporelle de l’extérieur du bâtiment imposait de relever de nombreux défis, d’autres prouesses techniques furent nécessaires pour moderniser les intérieurs, afin d’offrir aux clients un cadre et un confort contemporains dignes d’un hôtel de luxe de classe internationale. Cet objectif réclamait plus d’espace, et une ambitieuse excavation du sous-sol de l’hôtel permit d’y créer trois niveaux supplémentaires.

« A un moment, près de 2 000 étais soutenaient la construction », dit Mercer, qui ajoute que le bâtiment tenait debout dans un équilibre instable, un peu comme « un château de cartes. » Les trois niveaux supplémentaires procurèrent le volume nécessaire à l’implantation d’équipements modernes, dont un spa, une piscine de 20 mètres de longueur, un espace bien-être, ainsi qu’un parking privé de 57 places avec accès direct par ascenseur aux étages réservés à la clientèle.

De vastes zones de service, réservées au personnel, furent également installées, parmi lesquelles se trouvent des cuisines haut de gamme, une cave à vin, des vestiaires, ainsi qu’un élégant restaurant du personnel, le 19.

La reception de l’hôtel se situe sur le côté, dans la discrète avenue des Portugais

Le creusement de trois niveaux des sous-sols libéra le volume nécessaire à la création d’un espace bien-être disposant d’une piscine de 20 mètres de longueur, d'un parking privé et de zones de service

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L’architecte Richard Martinet détermina une autre évolution importante : l’hôtel dispose désormais de deux entrées. La première est située sur l’avenue Kléber, où une volée de marches mène à un vaste café en terrasse, puis au somptueux restaurant The Lobby, un emblème de la tradition Peninsula. Une seconde entrée, plus discrète, accueille les clients au coin de la rue, sur l’avenue des Portugais.

« L’ancienne entrée était une porte cochère et son espace est désormais reconverti en boutique. C’était une entrée couverte par laquelle les calèches et les voitures pouvaient accéder à une cour intérieure. Aujourd’hui, l’entrée principale est ouverte sur la ville. La Terrasse Kléber rend l’accès à l’hôtel moins intimidant pour les visiteurs. La deuxième entrée est plus discrète, afin que les clients puissent arriver dans un lieu plus tranquille », explique Martinet.

Les hôtes qui viennent aujourd’hui dîner sur la Terrasse Kléber jouissent du même spectacle urbain que leurs aïeux au début du XXe siècle. Mais, de la même manière qu’autrefois, des mesures ont dû être prises pour protéger les visiteurs des intempéries.

« Nous savions que la couverture de l’époque était constituée d’un immense auvent de toile. Nous pouvions revenir à l’original ou bien concevoir quelque chose d’entièrement différent. Nous avons préféré adopter une approche contemporaine », explique Martinet.

Une des options envisagées était de couvrir la terrasse de façon permanente, mais les restrictions en matière d’urbanisme l’interdisaient. Depuis le milieu du XIXe siècle, le code de l’urbanisme de Paris impose en effet des proportions précises pour chaque rue et une terrasse close aurait été considérée comme une extension de la superficie de l’hôtel.

L'entrée principale de l'hôtel au 19, avenue Kléber, une adresse privilégiée du Tout-Paris

La Terrasse Kléber, à l’abri de sa désormais

fameuse marquise, est la seule terrasse de palace parisien à s’ouvrir sur la ville

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Martinet envisagea également une structure mobile sculpturale, rétractable et modulable, créée par l’artiste américain Chris Haberman, mais le coût était prohibitif. C’est finalement une marquise très moderne, en forme d’origami de verre et d’acier, qui surplombe aujourd’hui l’entrée de l’hôtel, une réalisation aisément reconnaissable, immédiatement devenue emblématique du Peninsula Paris.

En contrebas, deux impressionnants lions de pierre accueillent les visiteurs. Ces sculptures, d’un mètre soixante-dix de haut, pèsent près de cinq tonnes chacune. Elles rendent hommage à la tradition chinoise des hôtels Peninsula, qui veut que des couples de lions protecteurs gardent l’entrée des palais, des temples et des édifices de premier plan. Le mâle se dresse fièrement, une patte posée sur une boule symbolisant la suprématie sur le monde, la femelle protégeant de son côté son lionceau, pour représenter l’éducation.

Les lions chinois, qui protègent les lieux des esprits malfaisants, tiennent une place de premier plan dans la tradition Peninsula.

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C’est cette association de traditions intemporelles, d’architecture magistrale et de service hôtelier de classe internationale qui définissent The Peninsula Paris. En séjournant ici, on peut ressentir les échos du passé de l’ancien grand hôtel parisien, mais surtout incarner un personnage de son présent et de son avenir, devenir partie intégrante de ce nouvel épisode de la légende du 19, avenue Kléber.

A l’occasion d’un séjour ou d’une visite à l’hôtel, « prenez le temps d’apprécier les lieux à leur juste valeur », conseille Martinet. « Vous pourrez progressivement y percevoir, murmurées au cœur des antichambres, vestibules, galeries et passages, les anecdotes, histoires et légendes qui ont forgé sa personnalité. »

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A chaque fois qu’il découvre un nouvel endroit, Henry Leung cherche à en saisir l’âme. Il se promène dans les rues à la recherche du moindre détail qui pourrait venir embellir un restaurant, une suite ou une chambre. Son talent à appréhender un nouvel environnement lui permet d’incorporer ses trouvailles dans son processus créatif.

C’est ainsi que le designer de CAP Atelier Limited (anciennement Chhada, Siembieda & Leung), aborda sa mission pour l’hôtel The Peninsula Paris. Il flana parmi les boutiques de haute couture autour des Champs-élysées, étudia les perspectives arborées de l’avenue Kléber et apprécia un spectacle à l’Opéra Garnier. Il s’imprégna du meilleur de ce que Paris peut offrir et le combina avec l’expérience accumulée au cours de sa collaboration de plus de dix ans avec The Peninsula Hotels.

« Travailler avec The Peninsula Hotels est très différent d’autres projets hôteliers. Le groupe est très attaché au respect de l’Histoire et met un point d’honneur à toujours préserver le lien entre l’hôtel, son passé et son environnement », explique Leung. « Les racines historiques du groupe ont une grande influence sur les attentes de ses dirigeants en matière de design, car ils sont également animés par un fort désir de modernité. L’idée est de créer un facteur d’émerveillement, d’offrir aux clients quelque chose qui va les marquer. » Il travailla en étroite collaboration avec Richard Martinet, l’architecte responsable du projet. Selon Leung, il est essentiel de fixer un point de référence pour commencer la mise en place d’un design. « En tant que styliste d’intérieur, on ne doit jamais rien envisager qui puisse entrer en conflit avec l’architecture. L’intérieur et l’extérieur doivent toujours se trouver en harmonie. »

L’architecte d'intérieur hongkongais

Henry Leung s’est immergé dans la culture,

les traditions et les perspectives architecturales

parisiennes pour réinventer les élégants intérieurs du Peninsula Paris.

Inspiré par la Ville Lumière

L’Opéra Garnier constitue un parfait

exemple du style haussmannien en

vogue sous le Second Empire, désormais

emblématique de l’architecture

parisienne

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Dans la mesure où il s’agissait de la première propriété du groupe The Peninsula Hotels en Europe, il était « d’autant plus important que mon équipe se tienne constamment à l’écoute des commentaires de l’équipe de Paris», dit Leung. « Une confiance réciproque s’est développée naturellement entre nos deux cultures, l’équipe de Paris respectant les idées de l’équipe de Hong Kong et vice versa. »

En ce qui concerne les chambres, le consensus fut immédiat entre l’équipe française et celle de Leung, sur l’adoption d’un style contemporain qui intègre l’élégance inhérente au cadre parisien.

C’est à la suite d’une promenade le long de l’avenue Montaigne, à deux pas des Champs-élysées, que l’idée vint à Leung d’intégrer une touche de haute couture parisienne dans les chambres. « Je voulais capturer l’essence du raffinement parisien, créer un sentiment d’appartenance au luxueux monde de la mode, mais de manière très subtile, en employant du cristal français, les cuirs les plus fins, du cousu main, ainsi que tout ce qui se trouve en relation avec l’esprit d’innovation et le style parisiens. »

Leung resta fidèle à cette optique. L’influence de traits distinctifs locaux est manifeste dans le dessin du mobilier des chambres et des suites, réalisé en exclusivité pour The Peninsula Paris par quelques-uns des concepteurs français les plus en vue, notamment les chaises et ottomanes de chez Rosello, ou les canapés et cadres de lit de la maison Laval.

Une impressionante assemblée de talents internationaux, réunis autour de l’Honorable Sir Michael Kadoorie en mai 2014

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u N e V I S I O N d e PA r I S

Inspiré par les feuilles tombant des platanes qui longent l’avenue Kléber, Leung imagina les Dancing Leaves pour la décoration du lobby, une installation d’art plutôt qu’une traditionnelle sculpture ou fontaine. « Les “feuilles dansantes” descendraient du plafond en virevoltant, avant de tomber au sol... », dit Leung, se remémorant sa vision.

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C’est toutefois la création d’un restaurant cantonais qui offrit à Leung l’opportunité de laisser libre cours à son imagination. Pour LiLi, situé à l’emplacement de l’ancienne salle à manger de l’hôtel Majestic, il choisit comme thème de la décoration intérieure la passion commune des cultures française et chinoise pour l’opéra. Une diva imaginaire des années 20 y invite les visiteurs à dîner dans le plus pur style parisien.

« Nos conversations démontraient que The Peninsula Paris constituait la scène idéale pour faire dialoguer nos cultures et mettre en avant nos talents réciproques. LiLi apparaissait comme un aboutissement de tout ce que nous avions déjà réalisé », conclut Leung.

Le concept repose sur l’association d’éléments chinois à l’Art déco de la fin des années 20. Un portrait de trois mètres de hauteur, réalisé en fibres optiques et représentant la cantatrice chinoise LiLi, accueille les clients à l’entrée du restaurant. Un splendide dôme, inspiré de l’installation acoustique d’une scène d’opéra de Shanghai, domine le décor théâtral. « La décoration de l’ensemble de l’hôtel est sobre et intemporelle, sa discrète élégance crée un sentiment de confort intime qui contraste avec les riches ornements architecturaux du bâtiment », résume Leung.

D’un décor Belle époque délabré est né un chef d’œuvre d'élégance franco-chinoise

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Pour les suites thématiques, Leung se représenta le mode de vie et les attentes des différents clients. « La Suite Katara constitue un parfait exemple de loft urbain. J’ai imaginé un couple vivant dans le sud de la France et venant à Paris pour le week-end : ils veulent faire du shopping, profiter de la vie et jouir de la beauté de cette ville sublime », explique Leung. « La chambre possède un thème artistique qui fait allusion aux visites répétées que ferait le couple dans le but d’acquérir des objets d’art qu’ils exposeraient dans leur refuge du week-end comme une collection privée. »

L’attention au détail, les heures de discussion, les rêves, l’imagination ainsi que les longues promenades d’Henry Leung dans la Ville Lumière ont trouvé leur aboutissement dans la création d’un lieu qui réunit les cultures orientale et occidentale, tout en rendant un vibrant hommage à la nature profonde de Paris.

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Avec ses vastes espaces extérieurs,

dont une terrasse et un jardin privé

suspendu qui jouissent de vues

spectaculaires sur les monuments les

plus célèbres de Paris, la Suite Katara

offre le meilleur du style de vie

Peninsula, associé au glamour parisien

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L es ateliers Duchemin ont perpétué l’art du vitrail depuis le XIXe

siècle. La demande des hôtels Peninsula les a entraînés dans une aventure hors du commun, au cœur du XXIe siècle.

Après avoir étudié les techniques du verre coloré à l’école nationale supérieure des métiers d’art, Claude Duchemin rejoignit l’atelier Bony, où il rencontra Henri Matisse et Georges Rouault. Puis il décida de créer son propre atelier de vitrail afin de participer à la reconstruction des édifices détruits ou endommagés au cours de la Seconde Guerre mondiale.

Soixante ans plus tard, les services de son entreprise furent requis au 19, avenue Kléber. Des puits de lumière en vitraux venaient d’y être découverts à l’aplomb d’une série de petits salons, par l’équipe chargée d’enlever les faux plafonds qui en dissimulaient les ornements.

Claude Duchemin débuta sa carrière au sein des ateliers du célèbre Jacques Grüber, spécialiste de

la verrerie Art nouveau, puis ouvrit les Ateliers Duchemin en 1950

Une talentueuse équipe de maîtres d’art experts en restauration a consacré son

savoir-faire traditionnel à faire revivre toute la splendeur du majestueux hôtel.

Perpétuer la tradition

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Perpétuer la tradition

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Chaque “lumière” d’un vitrail fait l’objet d’un dessin à taille réelle, divisé ensuite en un patchwork qui sert de gabarit pour les petites pièces de verre. La position exacte du guide qui tient le verre en place est soigneusement notée, car elle participe à l’effet visuel. Les verres sont ensuite sélectionnés en fonction de la couleur désirée, découpés selon le modèle, colorés et enfin assemblés.

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La Rotonde avant sa restauration par les ateliers Duchemin

« Il y avait deux puits de lumière dans les galeries », raconte Marie Rousvoal, la petite-fille de Claude Duchemin, qui travaille avec sa sœur Charlotte et son père Gilles Rousvoal, peintre verrier, au sein de l’entreprise familiale dirigée par sa mère, Dominique Duchemin. Lorsque l’équipe commença à démanteler les faux plafonds, elle constata que la structure qui tenait les vitraux en place était restée intacte grâce aux poutres de bois qui les protégeaient. « Au moment de la dépose, ils ont constaté que les vitraux étaient en parfait état. Nous pouvions donc restaurer la verrerie, ainsi que réutiliser la structure originale. »

Dominique Duchemin et son équipe entreprirent de restaurer la verrière et d’en remplacer une deuxième dans le petit salon. Deux autres furent commandées pour être assorties aux premières. Avec la passion de l’art verrier profondément ancrée au cœur de leur patrimoine génétique, les experts du petit atelier parisien se lancèrent dans l’étude des vitraux d’origine, en déterminèrent les cotes précises et entreprirent des recherches approfondies sur leur histoire.

« Nous n’avons pas pu retrouver exactement le même matériau qu’en 1908, nous avons donc dû nous procurer un verre d’un grain très proche, après avoir examiné de près ce qui restait des pièces originales », explique Duchemin.

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Les ateliers Duchemin sont également réputés pour leurs créations originales de vitraux et de coupoles, notamment celles du musée d’Orsay et du théâtre Antoine, à Paris. « Les coupoles sont des composantes primordiales de l’architecture haussmannienne, car elles influent à la fois sur le décor et sur la lumière », précise Marie Rousvoal. Deux ans de travail furent nécessaires aux ateliers Duchemin pour réaliser la nouvelle coupole de la Rotonde destinée à rétablir la splendeur emblématique de l’hôtel du début du XXe siècle. « Nous nous sommes inspirés des motifs présents sur les panneaux du salon », révèle Marie Rousvoal.

Elle montre quelques croquis de la coupole sur l’écran de son ordinateur. Ils ressemblent à des plans architecturaux. Elle explique que de nouvelles techniques furent utilisées pour l’ébauche des premières phases de la restauration. Mais le savoir-faire requis pour le travail artisanal du vitrail en lui-même demeure un art intemporel. Pour la première fois, Duchemin eut recours à une nouvelle technique de peinture à la main sur un support de verre blanc texturé.

La combinaison de techniques de restauration traditionnelles et modernes constitua pour l’entreprise familiale, comme le souligne la sœur de Marie, Charlotte, « non seulement un défi, mais également une opportunité d’appartenir à l’histoire de Paris, passée, présente et future. »

Deux années furent nécessaires à la réalisation de la nouvelle verrière en dôme de la Rotonde, à l’aide d’une technique de peinture manuelle sur verre blanc texturé, une première pour les ateliers Duchemin.

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u N T r I O d ’ AT e L I e r S

Si les murs du Peninsula Paris pouvaient parler, les noms de trois ateliers qui consacrèrent leur exceptionnel talent à sa préservation se trouveraient sans aucun doute au centre des conversations. Ils murmureraient le nom de Thomas Fancelli, représentant de la quatrième génération de l’atelier familial. Sa société, Fancelli Paneling, restaura en effet un millier de panneaux de boiserie et les réinstalla à l’endroit précis où ils furent initialement posés en 1908.

Les murs évoqueraient également Baptiste Gohard, le fils trentenaire du fondateur des ateliers Gohard, qui prit la tête d’une équipe de 22 doreurs et peintres en décor, afin de rénover, voire parfois de recréer, les finitions artistiques propres à l’esprit flamboyant de la Belle époque.

Ils se rappelleraient également le dévouement de Bruno Rondet, président de SOE Stuc et Staff, qui s’assura que la composition des plâtres et matériaux en stuc soit exactement la même qu’au début du siècle.

A l’image de la haute couture parisienne, ce type de restauration historique rassemble un cercle restreint de maîtres artisans, tous déterminés à préserver l’âme d’un édifice.

« Nous n’avons pas la même mentalité que dans le monde des affaires. Même si nous sommes des entreprises, avec des objectifs économiques, nous partageons un esprit de tradition qui crée une solidarité et sur lequel nous nous rejoignons tous », résume Thomas Fancelli.

“Nous avons d’abord déterminé les couleurs exactes, puis cherché les pigments originaux. Ce que vous voyez aujourd’hui est en tous points identique à ce qu’on pouvait admirer il y a cent ans.”

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Des centaines d’heures de restauration furent nécessaires pour rendre toute sa splendeur à la fresque qui surplombe The Lobby, très endommagée

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Le restaurateur des boiseries explique que les différents corps de métiers sont souvent amenés à travailler ensemble. Il raconte par exemple une anecdote intervenue pendant la rénovation : « Bruno (Rondet) m’a demandé si je connaissais un sculpteur, car il en cherchait un pour une partie des travaux qu’effectuait S.O.E. Je lui ai répondu que nous avions une collaboratrice qui pourrait faire l’affaire. » Fancelli lui présenta sa propre mère, Albertina. Elle rejoignit l’équipe de S.O.E. et réalisa pour eux un grand nombre des motifs qui ornent le plafond de la grande salle de réception, devenue aujourd’hui le restaurant The Lobby. Fancelli et Gohard sont des amis d’enfance, depuis toujours liés par le dévouement de leurs ancêtres à l’artisanat français. Ils connaissaient également Rondet pour avoir collaboré avec lui sur de précédents chantiers de restauration.

« C’est dans notre sang, dans notre ADN », explique Gohard. « Tout est gravé dans ma mémoire », ajoute Fancelli. Les deux hommes se remémorent l’époque où le père de Gohard et le grand-père de Fancelli travaillaient ensemble à la rénovation du dôme des Invalides.

« Je suis né deux étages au-dessus de l’atelier », dit Fancelli. « J’y ai vécu tous les jours jusqu’à l’âge de 10 ans et je travaille toujours avec mon père. » Gohard a lui aussi été formé par son père, le fondateur des ateliers Gohard en 1962.

“Ces techniques ont passé

l’épreuve du temps et

elles resteront pour des

générations.”

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u N P r O j e T Q u I C H A N G e L A d O N N e

Les experts s’accordent à reconnaître que l’envergure du chantier de rénovation était tout à fait exceptionnelle. Pour cette nouvelle génération de maîtres d’art, The Peninsula Paris a constitué une étape décisive dans l’évolution de leurs métiers. La portée du projet exigeait que chaque atelier évolue, adopte de nouvelles méthodes de travail plus productives et développe de nouvelles techniques.

Les ateliers Fancelli devaient par exemple répertorier toutes les boiseries endommagées. Plus de mille panneaux de bois précieux furent démontés et stockés, pour être ensuite décapés, réparés, restaurés ou remplacés. « Chaque panneau a été déposé, numéroté individuellement, protégé, puis stocké jusqu’à ce que nous soyons prêts à commencer le processus », raconte Fancelli.

Chaque panneau fut étiqueté selon son état. La plupart des pièces étaient en condition satisfaisante, mais certaines nécessitaient d’être restaurées, sur place ou dans les ateliers Fancelli. Le plus gros travail eut lieu dans le restaurant The Lobby, où 370 sections devaient être réparées, tout comme 130 sections du Bar Kléber. En dépit des difficultés, chaque section fut réinstallée à l’endroit précis où elle se trouvait initialement, « pratiquement au millimètre près », précise Fancelli.

Experts en dorures et leur restauration, les ateliers Gohard furent tout aussi méticuleux au cours de l’application à la main de 20 000 feuilles d’or de 8 cm2 chacune. Ils réalisèrent également les peintures décoratives. « Le projet du Peninsula constitua la première expérience des ateliers Gohard en matière de peinture décorative, » avoue Baptiste. « Nous avons acquis énormément d’expérience. En 2013, nous avons doublé nos effectifs en raison des travaux de peinture s’ajoutant à la restauration. »

Une équipe de vingt-deux doreurs et peintres en décor redonna vie aux boiseries Belle époque

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Thomas Fancelli et son équipe ont restauré et remplacé mille panneaux de boiserie et se sont assurés que chacun d’entre eux était replacé exactement à la même place qu’en 1908.

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L’entreprise continue à mettre en œuvre une technique ancestrale d’application des feuilles d’or, qui consiste à enduire le bois restauré d’un apprêt traditionnel de colle de peau de lapin, une recette qui remonte au Moyen Âge. « Ce travail est très spécifique et la plupart des artisans de notre équipe sont avec nous depuis très longtemps, ils ont reçu une formation d’experts en dorure traditionnelle », dit Gohard, qui envisage de créer une école destinée à l’enseignement des techniques traditionnelles de dorure et de peinture décorative. L’atelier forme ses propres apprentis, et deux de leurs meilleurs élèves qui travaillent avec les ateliers depuis une dizaine d’années ont participé au chantier du Peninsula Paris.

20 000 feuilles d'or ont été appliquées pour rendre sa majesté à la “Grande Dame”

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Les racines de S.O.E. Stuc et Staff sont assez différentes de la tradition familiale générationnelle de Fancelli et Gohard. Environ un an avant que Tauber ne commence à déblayer la terre pour construire son grand hôtel à Paris, un petit groupe de Creusois créa une compagnie de sept artisans plâtriers stucateurs. « C’était une coopérative », dit Rondet, « de nombreux immeubles haussmanniens avaient besoin d’être restaurés. La compagnie n’a pas été fondée dans un but commercial à proprement parler, ses membres voulaient essentiellement s’assurer de la pérennité de ce délicat savoir-faire. »

Chaque année, S.O.E Stuc et Staff réévalue les compétences particulières de chaque membre de l’équipe. « Si nous constatons que nous manquons de compétences dans certains domaines, éventuellement parce que quelqu’un a pris sa retraite, nous

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commençons à former de nouvelles personnes pour nous assurer que le savoir-faire ne disparaîtra jamais. »

S.O.E a restauré les plâtres et les moulures de plus de cent chambres de l’hôtel, des restaurants LiLi et The Lobby, du Bar Kléber et du Salon Adam. Fidèle à ses racines, la société emploie des matériaux identiques à ceux d’il y a un siècle. « La composition est exactement la même et le savoir-faire n’a pas changé. » Des recherches approfondies ont été effectuées pour déterminer les couleurs et pigments d’origine, afin de donner aux espaces publics d’aujourd’hui une apparence parfaitement similaire à celle de 1908. « Tout est naturel, rien n’est synthétique », souligne Rondet.

Depuis plus d’un siècle, la compagnie n’avait rien changé à ses méthodes de travail. Le projet du Peninsula Paris l’amena incidemment à adapter son approche. Au stade des plans, Rondet avoue n’avoir pas pris toute la mesure de l’envergure des travaux. Il réalisa

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alors que sa manière de préparer les matériaux risquait de retarder l’ensemble du chantier. « Habituellement, nous préparons les matériaux et la base avant de les apporter sur le site. Mais cette fois-ci, cette approche de toujours n’aurait pas fonctionné. » Rondet se mit à la recherche d’un mélangeur qui garantirait la préservation des secrets de fabrication de l’atelier, tout en permettant l’accélération des travaux. Il découvrit un atelier en Belgique. « J’étais très heureux que S.O.E. soit en mesure de faire travailler cette société », dit-il. Un accord de confidentialité sur la composition du mélange fut signé. « C’est notre recette maison, toute notre activité en dépend », insiste Rondet.

Une autre évolution se révéla nécessaire : la mécanisation. L’ampleur des volumes imposa à Rondet de trouver un moyen de couvrir des surfaces murales plus importantes et surtout plus rapidement. Il dénicha une machine qui projette le mélange sur les parois deux fois plus vite qu’à la main.

« Le Peninsula Paris nous a fait grandir en quelque sorte. Un projet de ce genre vous force à remettre en question vos habitudes de travail.Vous déterminez ce dont vous avez besoin pour terminer le projet, et cela vous rend intraitable sur le maintien de la qualité », conclut Rondet. « Quand c’est terminé, vous pouvez regarder votre travail en étant convaincu d’avoir construit quelque chose fait pour durer. »

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L e S A r T I S A N S d u M É TA L

L’entreprise Rémy Garnier, fondée à Paris en 1832 et spécialisée dans la ferronnerie d’art et la serrurerie sur mesure, eut pour tâche de créer et de restaurer des pièces d’exception pour le Peninsula Paris.

A l’heure où la plupart des ateliers du boulevard de la Bastille ferment leurs portes, l’atelier Rémy Garnier se transforme en studio d’artistes. Les mêmes employés qui dans la journée s’affairaient à redorer des crémones en laiton de la Belle époque ou à recréer des poignées de porte en nickel satiné Louis XVI, s’emploient le soir à tourner et sculpter des pièces de métal, à seule fin de satisfaire leur plaisir personnel.

« Beaucoup de nos ouvriers seraient artistes à temps complet s’ils le pouvaient. Ce sont de véritables artisans », explique éric Chassagnon, le directeur de la société Rémy Garnier, rachetée en 2001 par son père, Christian. « L’atelier reste ouvert toutes les nuits après les horaires de travail afin que les salariés qui le souhaitent puissent rester et laisser libre cours à leurs ardeurs créatrices. »

Dans l’atelier original fondé par Rémy Garnier en 1832, tourneurs, polisseurs, serruriers et ciseleurs travaillent le métal, jouent avec les pigments et fabriquent toutes sortes d’ornements de portes et fenêtres sur mesure. Près de 600 pièces ont ainsi été reproduites ou restaurées pour The Peninsula Paris : grands cadres de miroirs, poignées de porte, boutons d’armoires et de tiroirs, trous de serrure et leurs caches, crémones, espagnolettes (système d’ouverture et de fermeture composé d’une tringle qu’on hausse ou baisse par l’intermédiaire d’une poignée) et charnières invisibles, ainsi que 1000 nouvelles poignées de fenêtre finies et polies à la main pour les chambres et les suites.

Il fallut adopter une nouvelle approche pour chaque style. « Le Lobby est de style Art déco tandis que dans la galerie, c’est du Louis XIV », explique Chassagnon. De surcroît, des modifications furent nécessaires pour certaines serrures et verrous, qui ne devaient pas seulement être décoratifs, mais également satisfaire aux critères modernes de sécurité.

Chassagnon nous conduit à travers un étroit couloir jusqu’à un atelier où deux hommes se tiennent penchés sur des cuves. Des éléments décoratifs sont suspendus à de minces crochets métalliques et les ouvriers plongent précautionneusement des pièces de bronze dans un bain de nitrate d’or, d’argent ou de nickel, afin de leur donner un fini brillant. Un autre employé actionne un tour sur lequel il lisse un objet avec une polisseuse.

Plus de 600 ornementations métalliques furent reproduites ou restaurées pour le Peninsula Paris

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L’art de fondre les métaux et de les mettre en forme à la main, puis de les embellir à l’aide de ciseaux, gouges et poinçons

Au deuxième étage de l’atelier, des tiroirs sont remplis de pièces de métal anciennes. Chassagnon sort une poignée en argent fondue en forme de sirène. D’un autre tiroir, il extrait un bouton de porte en or, « de style Empire », précise-t-il à propos de cette pièce rare, très sobre en dépit de l’éclosion d’une fleur en son centre.

Non loin de là, on peut consulter un épais catalogue composé au siècle dernier. Il répertorie la totalité des pièces produites par les ateliers et les montre à taille réelle. Le livre contient plus de 6000 entrées, continuellement mises à jour. « C’est un outil de référence inestimable lorsque nous devons façonner une nouvelle pièce à partir d’un ancien modèle, ou pour répondre à la demande particulière d’un client », commente Chassagnon.

Bien que Rémy Garnier conserve naturellement ses racines au cœur des arts décoratifs manuels, les Chassagnon ont su élargir leurs activités à travers l’ouverture d’un atelier supplémentaire à Chelles, à l’est de Paris, et d’une fonderie à Château-Renault qui dispose de bains d’immersion à eau propre et recyclée. Depuis qu’éric Chassagnon en a repris les rênes, la main d’œuvre de la société a connu une importante croissance, passant de 20 à 200 employés.

Raccompagnant un client de l’atelier jusqu’au boulevard, éric s’arrête pour admirer les rues du quartier de la Bastille. « Nous sommes l’un des derniers de notre espèce en ces lieux historiques. Nous sommes en fait les seuls toujours réellement en activité, alors qu’il y a environ cinquante ans, ce quartier regorgeait de producteurs de bronze », regrette-t-il.

Alors que les fabricants industriels peuvent produire à tour de bras des poignées et boutons de porte modernes en des temps record, les artisans spécialisés comme Rémy Garnier continuent à préserver les savoir-faire ancestraux. « Ce que nous faisons ici requiert de véritables compétences. Il s’agit d’un métier manuel, qui ne pourra jamais être remplacé par une machine », ajoute Chassagnon.

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Les bronzes et ferronneries d’art du grand escalier d’honneur ont été réalisés par Schwartz et Meurer, l’entreprise qui construisit la tour Eiffel, en collaboration avec Rémy Garnier, démontrant tout son savoir-faire

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d e S S O L S d e T O u T e B e A u T É

Au Peninsula Paris, chaque élément a été choisi sciemment de façon à maintenir une élégance inspirée par la mode et la haute couture parisiennes. Jusque sous nos pieds, où les somptueux tapis de Tai Ping, tissés à la main, présentent chacun un motif unique.

« Il est très rare en Europe qu’un hôtel soit équipé exclusivement de tapis faits main », commente Catherine Vergez, directrice des opérations Europe et Moyen-Orient de la société Tai Ping. « La qualité requise pour le Peninsula Paris correspondait plus à ce qu’on rencontre dans un projet de maison privée que pour un hôtel ». Les détails des revêtements de sol devaient être coordonnés aux spécificités de chaque chambre, puis ajustés pour convenir à un éclairage naturel et artificiel. « Pour la plupart des projets hôteliers, l’éclairage naturel n’est même pas pris en compte », rappelle-t-elle.

Tai Ping n’est sans doute pas très connue du grand public, mais la marque est vénérée par les plus grands décorateurs d’intérieur de la planète. Les tapis de Tai Ping habillent les sols de palaces parisiens, de plusieurs ambassades de France, du palais de Buckingham, du Vatican et de la Maison-Blanche. La présence de la prestigieuse marque de Hong Kong s’imposait donc au Peninsula Paris, non seulement pour la qualité de ses pièces, mais également en raison de ses racines communes avec l’hôtel.

En 1956, ses administrateurs fondateurs comprenaient en effet les frères Kadoorie de The Hongkong and Shanghai Hotels Limited, la société mère des hôtels Peninsula. Lawrence (futur Lord Kadoorie) et Horace (futur Sir Horace Kadoorie) s’étaient en effet associés à quelques vieux amis et hommes d’affaires de Shanghai rencontrés avant-guerre. Lawrence Kadoorie fut le premier président de l’entreprise et, comme le souligne Vergez, ses motivations n’étaient pas uniquement lucratives : « La famille Kadoorie était très impliquée dans la communauté de Hong Kong et Lawrence Kadoorie voulait donner du travail aux gens. Il voulait que les artisans au chômage en Chine et immigrant à Hong Kong disposent d’un endroit où reprendre leur métier. »

Le premier atelier de fortune fut établi en 1956 à Tuen Mun. Il employait 32 travailleurs et un responsable. Une expansion rapide des activités fut rendue possible par l’installation d’une grande tente, immortalisée depuis sur le logo de Tai Ping.

Alors que les affaires devenaient florissantes, le temps nécessaire à la fabrication traditionnelle des tapis constituait un frein. Lawrence Kadoorie rencontra alors un jeune ingénieur chinois du nom d’Anthony Yeh, fraîchement diplômé du prestigieux MIT à Boston. Il lui confia la tâche de trouver un moyen de produire des tapis d’une manière plus

Le cabinet de travail de la Suite Peninsula La salle à manger de la Suite Katara

Le gouverneur de Hong Kong Sir Alexander Grantham s’essaye à la fabrication de tapis à l’aide de l’aiguille à poils coupés développée par Anthony Yeh, en 1957

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Chaque pièce du Peninsula Paris est décorée d’un tapis fait main

et au motif unique, comme ci-dessous dans le Salon étoile

rapide, tout en conservant la technique artisanale. Yeh développa l’aiguille à poils coupés, ancêtre de la machine à tufter à la main employée de nos jours. Avec cet outil ingénieux, les travailleurs de Tai Ping se convertirent rapidement à la création de tapis tuftés.

Le premier showroom de la marque fut inauguré en 1957 au sein du bâtiment The Peninsula Court, situé juste derrière l’hôtel de Hong Kong. Un an plus tard, John D. Rockefeller commanda un gigantesque tapis pour le Chinese Theatre à Hollywood. La popularité de Tai Ping alla croissant, tout comme les commandes en provenance de grandes entreprises américaines.

Le respect de Tai Ping envers la tradition demeure intact, la laine qui lui sert de matière première continue par exemple à être en grande partie teintée à la main. La marque a toutefois su s’adapter au XXIe siècle. Ses ateliers parisiens ont lancé en 2002 une collection conçue en collaboration avec un artiste invité, un principe qui se poursuit aujourd’hui. En 2009, Tai Ping a introduit la fabrication de dalles de moquette 100 % pure laine à base de matériaux recyclés et, un an plus tard, la société a repris les Manufactures Cogolin, un artisan français fabricant de tapis jacquard tissés à la main en Provence.

En 2014, Tai Ping retourna à ses racines chinoises avec l’ouverture d’un showroom à Shanghai et fit son entrée dans l’histoire de la Ville Lumière avec l’ouverture du Peninsula Paris. « Au moment de la conception des tapis pour The Peninsula Paris, nous avons ressenti une émotion particulière. Nous étions tous conscients de travailler sur un projet unique. L’édifice, au même titre que tous les hôtels Peninsula, possède une riche histoire et la rencontre de ces différents héritages fait du Peninsula Paris un endroit exceptionnel, non seulement aujourd’hui, mais pour les siècles à venir », conclut Vergez.

Sir Horace Kadoorie faisant la démonstration

du tissage à la main à l’occasion de la visite du gouverneur Sir Alexander

Grantham à Tai Ping Carpets en 1957

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L A PA S S e M e N T e r I e O u L’ A r T d u d É TA I L

Recréer le raffinement délicat qui définit les intérieurs classiques français constituait une autre pièce complexe du puzzle. Henry Leung voulait accessoiriser les chambres avec des passementeries et des embrasses à glands, mais lorsqu’il entra dans un certain showroom du 1er arrondissement évoquant un musée rempli de galons, d’embrasses, d’apprêts et de boutons, il réalisa à quel point il était possible d’étendre le répertoire.

C’est ici qu’entre en scène Declercq Passementiers. Si le restaurant LiLi et la Suite Historique peuvent aujourd’hui s’enorgueillir d’exceptionnelles ornementations de passementeries originales faites à la main, ils le doivent à la maîtrise de cet art centenaire que Jérôme Declercq et sa sœur Elisa se sont donné pour mission de préserver.

Comme beaucoup d’éléments dans la rénovation du Peninsula Paris, l’intervention de Jérôme Declercq fut inespérée. Declercq appartient à cette nouvelle génération d’artisans qui préservent les savoir-faire des métiers rares. Avec sa sœur Elisa, ils incarnent la sixième génération d’une dynastie de maîtres passementiers et continuent à employer les techniques artisanales traditionnelles inaugurées au 34, rue Quincampoix lors de la création de l’atelier familial en 1852. Parmi les trésors précieusement conservés par Declercq figurent des passementeries datant de l’époque de Louis XIV et le travail de la société révèle toute son ampleur au sein des châteaux de Fontainebleau, Compiègne et Versailles. Declerq réalisa en 1870 les passementeries originales de l’Opéra Garnier et de la Mairie de Paris. « Tout le travail de passementerie de l’Opéra Garnier fut produit à la main, un exploit qui nécessita trois mille heures de travail. Aujourd’hui, nous continuons à tisser les mêmes éléments de décor que par le passé, comme la passementerie Marie-Antoinette ou les galons Empire de Fontainebleau », explique Declercq.

« J’ai été stupéfait par leur collection », avoue Henry Leung. Parmi les milliers de franges, galons et pompons anciens préservés comme des trophées derrière une vitre du showroom évoquant un magasin d’antiquités, un élément en particulier attira l’attention de Leung. La passementerie possédait une allure « très chinoise », dit-il, et apportait à ses yeux la touche finale au projet stylistique du restaurant cantonais de l’hôtel, LiLi.

Declercq écouta attentivement Leung expliquer sa fascination pour la pièce d’inspiration chinoise et les deux hommes s’accordèrent sur la nécessité d’une création originale qui soit à la hauteur de l’ampleur du décor. « Nous pensions qu’il fallait imaginer quelque chose qui s’harmonise pleinement à la décoration spectaculaire du LiLi », explique Leung.

Collection de passementeries anciennes au showroom Declercq

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Declercq Passementiers fut chargé de créer quatre incroyables embrasses d’un mètre soixante. C’était la première fois que Declercq recevait une commande pour des embrasses aussi gigantesques. Chacune d’entre elles est constituée de quinze kilos de pure soie bleue et de quarante kilos de ganse carrée. Leur réalisation demanda plus de 2000 heures de travail. « Nous avons dû adapter nos techniques. Être en mesure de fabriquer une telle passementerie ne suffisait pas, il fallait également s’assurer qu’elle soit d’une élégance exemplaire », précise Declercq.

La fabrication des passementeries est complexe et plusieurs processus techniques sont sollicités pour chaque pièce. De grands moules en bois durent être sculptés pour s’assurer que chaque embrasse soit réellement unique et l’équipe de Declercq, composée d’une trentaine de tisserands, de retordeurs et de petites mains façonna, broda et tissa pour créer les galons, franges, rosettes, cartisanes et autres passementeries décoratives. 80 % du travail fut effectué à la main, le reste ayant été fabriqué à l’aide d’un métier à tisser mécanique en bois.

Des passementeries Declercq décorent également la Suite Historique. Pour parfaire les ornementations, Declercq employa une technique de teinture spéciale, afin de garantir l’exacte concordance des couleurs avec celles, ivoire et aubergine, des tissus d’ameublement fournis par la Manufacture Prelle, une entreprise familiale produisant depuis cinq générations de sublimes draperies.

Tout en restant passionnément fidèle à la tradition, Declerq se consacre également à la faire évoluer. En partenariat avec Design Percept, le duo de créatrices qui a réalisé le portait de LiLi, il a en particulier développé une nouvelle génération de passementeries lumineuses, tissées de fibres optiques.

« Nous adaptons des modèles existants, mais déclinés selon des styles plus actuels, à l’aide de nouvelles couleurs et de nouveaux matériaux. Nous conservons notre tradition, mais c’est une façon pour notre activité de continuer son expansion, au sein du monde moderne », conclut-il.

Les exceptionnelles passementeries de Declercq illustrent la rencontre des cultures française et chinoise au restaurant LiLi

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Jérôme Declercq

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Depuis toujours, Paris a inspiré les artistes du monde entier et The Peninsula Paris a constitué une impressionnante collection d’œuvres d’art, qui réunit traditions classiques et tendances contemporaines. Sabrina Fung, de la galerie hongkongaise Sabrina Fung Fine Arts,

à l’origine des programmes artistiques des hôtels Peninsula de Hong Kong et de Shanghai, explique que la constitution de la collection d’œuvres d’art du Peninsula Paris réclamait une approche légèrement différente. La collection de l’hôtel comprend en effet 1379 pièces, dont 150 exposées dans les espaces publics et les suites thématiques. Pratiquement deux années furent nécessaires pour les réunir. « L’hôtel est chargé d’histoire, mais plutôt que de pièces classiques, la collection est composée d’œuvres contemporaines très vivantes, reflétant le caractère cosmopolite de Paris. Lorsque vous avez affaire à un bâtiment historique comme The Peninsula Paris, il est important de prendre en compte son environnement, car cela ouvre des perspectives très intéressantes » explique Sabrina Fung.

Plus de mille œuvres abstraites - des éditions limitées

et des commandes spéciales - embellissent les espaces publics, chambres

et suites du Peninsula Paris. Cette collection d’art moderne contraste

harmonieusement avec le splendide décor classique.

éloge à l’art intemporel

Oxyde, peinture sur toile de l’artiste parisienne Patricia

Erbelding, dont des œuvres

sont exposées dans chacune des

chambres de l’hôtel

Bronze et aluminium brossé, par Nathalie Decoster

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« Constituer une collection d’art pour un hôtel se révèle très différent de l’organisation d’une exposition pour un musée ou une galerie » précise-t-elle, « il s’agit d’une collection destinée à l’un des hôtels Peninsula, les clients devaient donc ressentir l’impression de pénétrer dans la maison d’un collectionneur d’art. Contrairement à une exposition dans une galerie, il n’y a pas forcément de thème. Vous devriez être en mesure d’apprécier la qualité des œuvres sans qu’elles ne deviennent envahissantes. »

En juxtaposant les ornementations classiques et les dorures à l’ancienne de l’hôtel à des œuvres contemporaines abstraites, réalisées par des artistes du monde entier, la collection réaffirme l’élégance éclectique de l’hôtel. Parmi les artistes européens, asiatiques et américains, les Français figurent en bonne place. Des œuvres mixtes de Patricia Erbelding sont exposées dans chaque chambre, des sculptures de la Parisienne Nathalie Decoster, en bronze et aluminium, figurent dans la Suite Katara, la Suite Historique et les suites terrasse. Un tableau de Michel Alexis décore la Galerie Kléber, et des peintures à l’huile jumelles de Deçan viennent ajouter une touche d’élégance supplémentaire à la Suite Historique.

L’artiste américain Ryan McGinness a créé cette broderie sur soie spécialement pour The Peninsula Paris

Les peintures à l’huile jumelles de Deçan dans la Suite Historique

Une sculpture circulaire en

aluminium et bronze de Nathalie Decoster,

devant une huile sur toile de Deçan

‹ Synesthesia 15, de Michel Alexis, exposé dans la Galerie Kléber

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Les deux tiers de la collection ont été spécialement réalisés pour le Peninsula Paris. Ce fut le cas de la pièce verte en soie tissée réalisée par l’artiste américain Ryan McGinness, qui orne le hall des ascenseurs principaux. « Le rendu est très différent de celui des toiles que peint habituellement cet artiste, car il s’agit d’une broderie sur soie spécialement exécutée. »

C H e F S d ’ Œ u V r e d ’ A u j O u r d ’ H u I e T d e d e M A I N

La collection d’art du Peninsula Paris comprend des chefs-d’œuvre soigneusement sélectionnés pour séduire les clients aujourd’hui, mais également dans le futur. « Elle est moderne, mais pas avant-gardiste », commente Sabrina Fung, « les pièces sont intemporelles, en aucun cas de ces modes instantanées qui risqueraient de perdre leur attrait éphémère au fil du temps. »

L’une des pièces les plus remarquables de la collection est la sculpture de marbre de trois mètres de hauteur intitulée Moon River. D’inspiration zen, il s’agit d’une tour formée de douze pierres de différentes tailles, faisant office de piédestal à un grand et mince disque de marbre symbolisant la lune. Elle est l’œuvre de Xavier Corberó, largement considéré comme le plus grand sculpteur espagnol vivant. L’artiste explique avoir puisé son inspiration dans l’environnement même de Paris :

Xavier Corberó

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« Je voulais une pièce rafraîchissante, qui apporterait la douce brise des bords de Seine. Paris ne serait rien sans son fleuve, ni sans le mystère de la pleine lune. »

L’emplacement de l’œuvre, à l’extrémité de la Galerie des Portugais, fut également dicté par la nature. Elle a été placée « à proximité d’une fenêtre, afin que la sculpture soit baignée d’une lumière naturelle qui souligne sa gracieuse présence et permette aux visiteurs d’admirer l’exquise qualité de son marbre et la dense opacité de ses pierres », commente Sabrina Fung.

Une gigantesque installation de cristal, représentant la coiffe traditionnelle d’une cantatrice chinoise, accueille les clients à l’intérieur du restaurant cantonais LiLi. L’artiste coréenne basée à New York Ran Hwang a créé ce scintillant chef-d’œuvre en hommage à l’opéra chinois. Il est composé de 32 831 cristaux montés sur broches et insérés dans une base de plexiglas.

LiLi expose également un triptyque réalisé par l’artiste taïwanais Jam Wu. Il est composé de panneaux de papier découpé dans des pages de dictionnaires anciens français-chinois pour représenter les liens entre les cultures française et chinoise. L’artiste, qui a voyagé de l’Arctique à la campagne suisse pour étudier les traditions folkloriques du papier découpé, tire avant tout son inspiration de l’art matriarcal traditionnel de l’Empire du Milieu.

L’artiste coréenne Ran Hwang a rendu à l’opéra chinois un scintillant hommage à l’aide de près de 33 000 perles de cristal

L’artiste taïwanais Jam Wu a réalisé cet incroyable triptyque, exposé au restaurant LiLi, avec du papier découpé provenant de sept dictionnaires anciens

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Œuvre de l’artiste autrichien Otto Zitko,

une peinture synthétique émaillée appliquée sur

une plaque d’aluminium, exposée dans

la Galerie Pérouse

Pour cette commande, Wu dut explorer les librairies anciennes de Taïwan pendant près d’un an, avant de dénicher les sept dictionnaires désormais métamorphosés en dentelles de papier. Les trois panneaux dépeignent l’architecture, les paysages et les personnages d’opéra de la culture traditionnelle chinoise. « Cette œuvre procède d’une approche très intéressante de la technique traditionnelle du papier découpé, car elle est interprétée de manière très contemporaine », remarque Sabrina Fung.

Ce thème littéraire se prolonge plus loin avec la sculpture murale de l’artiste américaine Simeen Farhat. Exposée dans la Galerie Pérouse, elle est constituée de bandes de pages arrachées de recueils de poèmes français, enchâssées dans une gangue de résine pigmentée. L’œuvre abstraite de l’artiste autrichien Otto Zitko, réalisée avec une peinture synthétique émaillée appliquée sur une plaque d’aluminium, illumine la Galerie Pérouse. Sabrina Fung, qui l’a localisée après d’intenses recherches, raconte : « J’ai eu l’occasion de visiter une exposition de l’artiste. Elle comprenait une immense installation de panneaux d’aluminium, que j’ai adorée. J’ai pensé que ça irait superbement à l’hôtel. J’ai finalement réussi à la retrouver en Espagne. »

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Une monumentale installation sculpturale, The World Belongs to Me (Le monde m’appartient) de Ben Jakober et Yannick Vu, trône dans la cour intérieure, en contrebas de la reproduction du biplan L’Oiseau Blanc. Le dôme d’acier de 800 kilos imaginé par les artistes majorquins est encadré d’un arc-en-ciel circulaire. Il agit comme un miroir convexe qui reflète l’image de l’ensemble de la cour du Peninsula Paris, offrant ainsi au visiteur un point de vue unique sur les lieux.

« Cette œuvre est métaphorique, car The Peninsula incarne des valeurs traditionnelles rehaussées d’une touche de modernité. Le miroir convexe est utilisé dans l’art depuis des siècles, mais nous lui avons donné une nouvelle vie », explique Jakober.

C’est la troisième fois que le couple travaille avec The Peninsula Hotels. The Void, une installation de torsades métalliques enveloppées d’un éclairage de fibres optiques, habille un immense espace de 70 mètres de hauteur au cœur du Peninsula Tokyo et Curl, une sculpture en spirale haute de six mètres et recouverte de plus de 2000 perles de cristal Swarovski, surplombe l’escalier de la grande salle de réception du Peninsula Shanghai.

The World Belongs to Me, de Ben Jakober et Yannick Vu, une déclinaison moderne du miroir convexe, un classique de la création artistique depuis des siècles

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L ’installation féérique Dancing Leaves, pièce maîtresse du lobby, évoque les racines shanghaiennes de la société mère des hôtels Peninsula, The Hongkong and Shanghai Hotels, Limited (HSH), tout en sublimant l’essence parisienne de l’hôtel.

L’ancienne concession française de Shanghai, avec ses rues ombragées par de magnifiques platanes, est l’un des quartiers les plus pittoresques pour se promener en ville. En 1849, le consul de France en Chine signa un accord de constitution d’une concession destinée à installer des hommes d’affaires et commerçants français. Les mêmes platanes qui furent d’abord plantés le long des rues de Paris sous les ordres de Napoléon, afin de procurer de l’ombre aux troupes et aux voyageurs, furent importés à Shanghai et mis en terre dans la concession française.

Le styliste Henry Leung établit dès le début du projet de restauration une forte connexion visuelle avec les platanes, au cours de ses promenades dans les rues de Paris. « En admirant les alignements de platanes qui bordent les deux côtés de l’avenue des Champs-Élysées et de l’avenue Kléber, j’ai commencé à me représenter les feuilles de ces arbres comme une sorte de cadeau de bienvenue fait aux clients de l’hôtel et qui représenterait autant la France que le quartier et la rencontre des cultures. »

Il suggéra alors l’idée à l’équipe d’architectes qui travaillaient sur le projet du Peninsula Paris. « Je pensais que cela symboliserait avec pertinence le dialogue amical

Lasvit, fondée en 2007 par Leon Jakimič, réinterprète la tradition du cristal de Bohême et la fait entrer dans le nouveau millénaire

Les traces de plus d’un siècle d’histoire imprègnent la substance du Peninsula

Paris. Deux installations de verrerie d’art contemporaine symbolisent à la fois

les origines des hôtels Peninsula et l’élégant héritage esthétique de Paris.

L’art lumineux de la verrerie

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L’art lumineux de la verrerie

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L’équipe de Lasvit accroche précautionneusement les 800 feuilles abstraites de Dancing Leaves, la sculpture de cristal de Bohême soufflé à la bouche, réalisée par Ludĕk Hroch

qui s’était d’ores et déjà institué entre nos deux cultures : entre nos collaborateurs qui imaginaient l’hôtel depuis Hong Kong et les équipes avec lesquelles nous travaillions à Paris », raconte Leung. « Nous avions tous la volonté de préserver le contexte asiatique du groupe Peninsula tout en respectant l’authentique héritage français du lieu. »

L’idée de Leung était de créer une installation vivante pour le lobby plutôt que de dominer l’espace avec un lustre ou une fontaine. « Je voulais que les ‘Dancing Leaves’ descendent du plafond en virevoltant, avant de tomber au sol », dit-il. Mais pour que cette vision prenne corps, et de la plus belle des manières, « nous devions trouver la bonne personne pour réaliser le projet », ajoute-t-il.

C’est là qu’entrèrent en scène les ateliers Lasvit de Leon Jakimič. Cette société tchèque, qui avait déjà honoré plusieurs commandes spéciales des hôtels Peninsula, est réputée pour sa maîtrise des traditions de la cristallerie de Bohême, alliée à une constante innovation en matière de design et de techniques. En 2011, Lasvit a ainsi conçu une installation lumineuse, inspirée de la forme dynamique d’un tourbillon, pour l’entrée du Restaurant Verandah, au Peninsula Hong Kong, ainsi que la sculpture lumineuse de 10 mètres de long, Bird Flocks, qui orne le salon principal de sa Suite Peninsula. Composée de spirales de verre soufflées à la main, la sculpture aux multiples nuances de couleur représente la verrerie d’art moderne dans son expression la plus élégante.

« Les réalisations artistiques pour des projets hôteliers réclament une approche plus collaborative que les commandes de collectionneurs et les projets à destination de musées ou d’espaces publics », observe Jakimič. « Dans ce cas précis, Henry Leung avait développé un concept de feuilles de verre que le souffle du vent ferait s’engouffrer à l’intérieur du lobby, avant de circuler dans les espaces publics de l’hôtel. »

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u N A r T I S A N AT r Ay O N N A N T

Le choix de Jakimič s’arrêta sur un de ses artistes maison, Luděk Hroch, un maître verrier au style particulièrement pur, dont l’approche, pensait-il, serait à la mesure des attentes visionnaires d’Henry Leung. L’installation de verrerie d’art qui résulte de leur collaboration, Dancing Leaves, mesure huit mètres de haut, et sa mise en place mobilisa une équipe de cinq hommes pendant près de deux semaines. Elle comprend 800 feuilles de platane stylisées, réalisées en verre soufflé à la bouche, certaines transparentes, d’autres contenant des paillettes d’argent.

Les 800 feuilles ont toutes été créées de manière artisanale sur une période de deux mois et demi par le même maître souffleur de verre, qui travaille avec l’équipe Lasvit depuis 20 ans. 1000 feuilles supplémentaires ont été spécialement réalisées pour être offertes en cadeau lors d’occasions spéciales.

« Nous avons décidé de faire appel à notre meilleur maître verrier pour mener ce projet à bien, afin de nous assurer de la pureté esthétique des feuilles de platane et pour respecter un équilibre parfait entre leur réalisme et leur côté abstrait », explique Jakimič.

Les ateliers Lasvit prirent également en charge une autre commande spéciale du Peninsula Paris, une œuvre que Jakimič estime absolument unique. Sous le dôme de verre de la Rotonde est suspendu un époustouflant chef-d’œuvre de verre et de lumière : Diamond Necklace (“collier de diamants“), composé de trois anneaux ovales de différentes tailles prenant chacun la forme d’un collier serti de diamants.

« Avec cette pièce, nous avons disposé d’un peu plus de liberté pour proposer ce qui, selon nous, s’accorderait parfaitement à l’espace de la Rotonde », précise Jakimič.

Cette sculpture unique, élégante et féminine, a été réalisée par les ateliers Lasvit à l’aide d’altuglas, d’acier inoxydable et de 90 000 perles de cristal lumineuses. Ses trois rangs de perles s’inspirent des bijoux tchèques du XIXe siècle et adoptent la forme d’un collier épousant gracieusement le cou d’une femme. L’œuvre incrustée de joyaux, suspendue juste au-dessous du dôme, évoque également l’architecture baroque de la Rotonde avec ses lignes arrondies, ses moulures et ses corniches décoratives.

« Ces deux œuvres sont de styles très différents », commente Jakimič. « Diamond Necklace est plus ornementale, plus proche d’une pièce de joaillerie, alors que Dancing Leaves, l’installation du lobby, est plus fondamentale, plus naturelle. »

L’équipe de Lasvit devait trouver un moyen de suspendre la sculpture lumineuse à un point central, car le statut historique de l’intérieur du bâtiment interdisait de percer à travers le dôme ou dans les murs. Lasvit conçut alors une plaque comportant seize points de fixation qui supportent des câbles d’acier émanant d’hémisphères métalliques. La sculpture est parfaitement symétrique et reste stable grâce à son contrepoids.

A quelques pas de là, les portes s’ouvrent, un coup de vent s’engouffre au cœur du lobby et l’imaginaire s’envole. Les feuilles de platanes suspendues semblent rassemblées par le vent à l’aplomb d’une pièce d’eau, évoquée par la sculpture de pierres du Bhoutan sur laquelle elles se posent.

La rencontre des cultures, le rêve parisien d’Henry Leung, se réalise pleinement.

Le défi technique que représentait la suspension de Diamond Necklace a laissé place à l’émerveillement

devant l'étincelance de l’œuvre de cristal

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La réalisation du portrait de LiLi, l’irréelle cantatrice qui personnifie le restaurant cantonais du Peninsula Paris, s’avère être une histoire passionnante. Le personnage est imaginaire, mais LiLi symbolise parfaitement la fascination exercée par les stars de la scène au cœur du Paris des années 20. Son visage poudré apparaît tel un reflet dans un miroir, comme si elle se préparait en coulisses à une apparition sur la scène de l’Opéra de Paris ou sur celle

d’un théâtre lyrique chinois.

Le portrait de LiLi est une œuvre d’art, mais pas un tableau, ni une lithographie ou une photographie. Il s’agit d’une installation artistique. L’image est imprimée sur un étincelant voilage tissé de fibres optiques, qui génère un rendu fluide et lumineux totalement inédit.

L’œuvre est le fruit de la combinaison des idées créatives d’Henry Leung, de Jérôme Declercq et de l’architecte Vincent Pellegri du cabinet parisien RMA, qui confièrent ensemble leurs idées aux deux associées du studio français Design Percept, la conceptrice de mode Françoise Mamert et la designer industrielle Clémentine Chambon.

Imprimé sur un rideau tissé de fibres optiques ultra-fines alimentées par des LEDs, le visage de LiLi est mis en valeur par l’installation, qui le révèle sous une pluie de passementeries lumineuses dessinant les contours d’une porte en forme de lune. Composée de 2000 perles de bois recouvertes de fils noirs et enfilées sur des câbles, celle-ci est surmontée d’une frange lumineuse de passementeries et fibres optiques, qui apporte grâce et mystère au portrait.

« Tissu et passementeries résultent d’un concept autant que d’une technologie, ils sont les éléments essentiels de l’installation LiLi », résume Clémentine Chambon.

L’apparition de cette fabuleuse star de l’opéra chinois des années 1920

émane d’une exceptionnelle synergie d’innovations en matière de design

et de technologies d’avant-garde.

La naissance de LiLi

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Françoise Mamert ajoute : « Nous considérons LiLi comme une expérience hors du commun, et il n’est pas étonnant qu’elle se soit épanouie dans un environnement comme celui du Peninsula Paris. Il s’agissait d’un projet de design textile, mais également d’une installation artistique, d’un décor de théâtre, ainsi que de l’avènement de nouvelles techniques que nous n’avions encore jamais appliquées, comme ces passementeries lumineuses que nous avons fabriquées avec Jérôme Declercq. »

C’est chez ce même Jérôme Declercq que jaillit l’étincelle initiale. Le maître artisan avait déjà travaillé avec Design Percept sur un projet de passementerie illuminée et, comme le dit Clémentine Chambon, le déclic a été immédiat.

« Je suis allée voir Henry Leung avec des modèles de grandes embrasses pour le restaurant, auxquelles j’avais joint quelques franges de fibres optiques. Il m’a dit qu’avec un tel matériau, nous devrions faire quelque chose de radicalement différent. Je suis rentré à Paris très enthousiaste », raconte Declercq.

« J’aime l’idée d’un objet qui raconte une histoire, plutôt que d'être simplement conçu pour lui-même », dit Clémentine Chambon, qui a travaillé avec Marc Newson, de 2003 à 2006, sur l’aménagement intérieur de l’Airbus A380 de la compagnie Qantas.Depuis, elle est fascinée par les tissus de fibres optiques. « Cette technologie renferme une sorte de poésie, vous disposez d’un textile très basique pour habiller une fenêtre de sa beauté simple et translucide, et en un tournemain vous jouissez d’une source de lumière », ajoute-t-elle.

Design Percept avait également travaillé avec Cédric Brochier. La société de ce dernier, Brochier Technologies, a été l’un des précurseurs dans le développement du tissage des fibres optiques, mis en œuvre dans la composition des éclairages de la nouvelle ambassade de France à Pékin, inaugurée en 2011. Les fondatrices du studio suggérèrent donc à Declercq d’approcher Brochier pour la confection de la passementerie lumineuse destinée à LiLi.

« Nous avions déjà conçu et réalisé un ensemble de huit rideaux translucides générateurs de lumière, intitulé “Fugue en huit parties”», détaille Clémentine Chambon. Son design prend la forme d’un écran diaphane composé d’un tissage de fibres optiques et de fil de soie que parcourt, le long de son impressionnante hauteur de sept mètres, un dégradé de couleurs du blanc au noir à travers diverses nuances de gris, de violet et d’indigo.

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« Ces projets, à la fois poétiques et techniquement innovants, annoncent une nouvelle génération de produits lumineux créatifs », constate Françoise Mamert. « Ils constituent des prototypes en vue d’une utilisation nouvelle de la lumière, dans l’architecture et dans la vie de tous les jours. »

Toutefois, le concept proposé ne consistait pas seulement à présenter un portrait sublimé par son éclairage, il s’agissait également de mettre en place une scénographie. La création devait suggérer une scène de théâtre et fut logée au sein d’un cadre de bois surdimensionné au fini noir mat.

« Il s’agit d’une métaphore de l’opéra chinois », explique Clémentine Chambon. « On lui a gardé un peu de distance pour la rendre plus mystérieuse. Les visiteurs découvrent l’image en parcourant la galerie et, au fur et à mesure qu’ils s’en approchent, LiLi les attire de plus en plus. »

Le tandem de créatrices raconte d’une même voix le mémorable moment où LiLi fut prête, tous les intervenants travaillant simultanément sur leur partie de l’installation, dans la galerie du Peninsula Paris. « Lorsque nous avons réuni les trois fabricants et assemblé ce que nous avions créé, la naissance de LiLi a été très émouvante », se souvient Françoise Mamert.

Le duo se tient devant le portrait, un peu comme si elles l’examinaient pour la première fois. Habillée de lumière par son tissu de fibres optiques et parée de ses perles chatoyantes, LiLi rayonne à travers la galerie.

Clémentine Chambon et Françoise Mamert se délectent du fruit de leur travail. « Nous ne l’avions pas revue depuis le jour où elle a été installée » commente Françoise. En admiration devant leur création, elles arborent un sourire aussi lumineux que le portrait lui-même.

Les yeux de LiLi dansent, ses lèvres brillent. Ombre d’une époque révolue, mais ranimée par la lumière moderne, elle devient le reflet vivant de la passion d’une équipe au service d’une idée, l’aboutissement d’une vision.

Clémentine Chambon et Françoise Mamert, la rencontre du design industriel et de la mode

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L e spécialiste de l’histoire de l’aéronautique Bernard Decré sort de sa poche une petite boîte de peinture, trempe son pinceau dans un verre d’eau, puis, en cadeau de bienvenue, esquisse rapidement la silhouette d’un avion sur la couverture intérieure de son livre L’Oiseau Blanc.

Faisant office de signature personnelle et constituant le symbole de ces six dernières années, le dessin, proche de la perfection, représente le biplan français Levasseur PL.8, l’Oiseau Blanc, qui tenta dans les années 20 d’effectuer le premier vol transatlantique sans escale entre Paris et New York. L’appareil se volatilisa.

C’est un reportage sur Bernard Decré qui attira l’attention de Sir Michael Kadoorie, le président du groupe The Peninsula Hotels et fervent amateur d’aviation. Quelques mois après l’émission de télévision, le “chercheur d’avion” reçut un coup de téléphone à son bureau. On lui annonça : « Vous avez un appel en provenance de Hong Kong, c’est un Anglais mordu d’aviation qui souhaite vous parler. »

à la recherche de l’Oiseau Blanc

Le restaurant situé sur la terrasse du Peninsula Paris rend hommage

à la passionnante quête d’un féru d'aviation qui s’est donné

pour exaltante mission de prouver que deux aviateurs français ont bien

traversé l’Atlantique avant Lindbergh.

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à la recherche de l’Oiseau Blanc

Les deux hommes eurent une longue conversation. « Il voulait en savoir plus sur ma quête, car il était à la recherche d’une belle histoire à raconter pour le restaurant de l’hôtel The Peninsula Paris, et celle de l’Oiseau Blanc en est une... », explique Decré. « C’est une magnifique histoire d’aventure franco-américaine. »

« Le 8 mai 1927, les deux aviateurs français Charles Nungesser et François Coli décollèrent de l’aéroport du Bourget et tentèrent de traverser l’Atlantique à bord d’un vieil avion », raconte Decré. L’aéroplane de 9,5 mètres de longueur, essentiellement constitué de bois et de toile, embarquait 3800 litres de carburant.

« Le plan de vol prévoyait de franchir la Manche et de survoler une partie de l’Angleterre et de l’Irlande, avant de traverser l’Atlantique. Après avoir laissé Terre-Neuve, la Nouvelle-Écosse et Boston derrière eux, ils se voyaient entrer dans l’Histoire en amerrissant symboliquement près de la Statue de la Liberté », précise Decré.

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Deux semaines plus tard, Charles Lindbergh effectuait avec succès le premier voyage aérien de New York à Paris aux commandes du célèbre Spirit of St Louis, devenant ainsi le premier aviateur de l’Histoire à traverser l’Atlantique.

Improvisé porte-parole des aviateurs disparus, Bernard Decré est désormais mondialement connu pour ses recherches assidues des restes de l’avion, en particulier de son moteur.

C’est un cadeau de Noël que lui offrit sa fille, le livre The Sea Hunters du romancier Clive Cussler, qui fut à l’origine de la passion de Decré. Une vingtaine de pages du roman faisaient allusion à la mystérieuse aventure de l’Oiseau Blanc, une énigme de l’histoire aéronautique qui seule pouvait rivaliser avec l'étrange disparition d’Amelia Earhart.

Suite à cette lecture, l’intrépide navigateur qu'est Bernard Decré, fondateur du Tour de France à la voile, voulut en savoir plus. « C’est à partir de là qu’a commencée ma quête. Je suis parti à Washington, DC où j’ai fouillé les archives. Je suis allé en Nouvelle-Angleterre. Je suis allé à Saint-Pierre », dit-il.

L’historien commença à accumuler les indices qui venaient étayer sa théorie selon laquelle Nungesser et Coli auraient bien atteint l’autre côté de l’Atlantique, comme ce télégramme du 18 août 1927, dans lequel les gardes-côtes américains déclaraient avoir repêché deux ailes superposées, à 300 kilomètres de New York et 800 kilomètres de Saint-Pierre. Pour Decré, ces ailes qui « pourraient être celles de l’avion français » sont toujours en possession des gardes-côtes, et il tente inlassablement de les localiser.

La presse quotidienne française annonce la victoire de Nungesser et Coli

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Du fond des archives de la presse bostonienne, il exhuma l’histoire d’un pêcheur de homards qui déclarait en 1966 avoir trouvé un morceau d’épave correspondant à la description de l'avion. Decré trouva également les procès-verbaux de treize dépositions de témoins ayant vu ou entendu, dans la matinée du 9 mai 1927, un avion se dirigeant vers le sud, le long de la côte est de Terre-Neuve. Enfin, il découvrit des rapports ultérieurs attestant de la présence de débris dans cette zone.

D’après Decré, il est probable qu’un orage força Nungesser et Coli à dévier de leur cap et que les deux aviateurs durent tenter un amerrissage dans les eaux de la petite île de St-Pierre, située à presque 20 kilomètres au large de la côte sud de Terre-Neuve, leur objectif.

Il défend de longue date sa théorie selon laquelle le contexte de la disparition de l’Oiseau Blanc pourrait bien avoir été dissimulé par les autorités américaines et françaises de l’époque, pour ne pas éclipser l’exploit de Lindbergh. « Nous sommes désormais certains qu’ils y sont parvenus, qu’ils ont été les premiers à traverser l’Atlantique d’est en ouest à bord d’un avion », affirme-t-il.

Decré a déjà entrepris quatre expéditions à la recherche des restes de l’avion, dans l’espoir qu’une découverte permettrait de rectifier les manuels d’Histoire. La compagnie aéronautique Safran, propriétaire de Lorraine-Dietrich, l’entreprise à qui l’on doit la fabrication du moteur de l’Oiseau Blanc, un 12 cylindres de 450 chevaux, a tissé un partenariat avec l’explorateur, à qui elle a fourni un sonar et un magnétomètre pour concourir à la localisation du fameux moteur, partie intégrante de son patrimoine.

Aquarelles de Bernard Decré :

le tournage de La Recherche de

l'Oiseau Blanc

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Que Decré réussisse ou non à apporter des preuves concrètes à l’appui de sa théorie, l’aventure des deux aviateurs français est désormais exaltée sur les toits du Peninsula Paris. Les convives du restau-rant peuvent y respirer un parfum d’histoire, en admirant la reproduction à l’identique du moteur du biplan, le fameux Lorraine-Dietrich de 1927. Il constitue la pièce centrale d’un décor aéronautique riche d’objets souvenirs des pilotes, ainsi que de dessins originaux retraçant leurs exploits.

Mais le véritable chef-d’œuvre “vole” de l’autre côté des baies vitrées du restaurant. Deux “pilotes” y fendent l’espace aérien parisien à bord d’une réplique spectaculaire de l’Oiseau Blanc spécialement réalisée pour The Peninsula Paris par Gateguard UK Ltd. à Newquay, en Cornouailles.

L’appareil est une reproduction aux trois quarts de l’avion original, présentant une envergure de 11 mètres. Il est suspendu dans les airs et semble en plein vol en direction de la tour Eiffel, éternelle pièce maîtresse du spectaculaire panorama offert par L’Oiseau Blanc.

L’hommage rendu à l’avion se retrouve jusque sur les porcelaines réalisées par la maison française Bernardaud, qui arborent un dessin original de la directrice de collections, Catherine Bergen

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T H e P e N I N S u L A PA r I S

Aujourd’hui... et pour le

siècle à venir

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Aujourd’hui... et pour le

siècle à venir

L’hôtel The Peninsula Paris a ouvert ses portes le 1er août

2014 après quatre années d’un travail passionné. Mythique

hôtel chargé d’histoire, régénéré dans un style moderne

et sophistiqué, l’établissement combine l’art de vivre à la

française avec les discrets éléments asiatiques qui constituent

la marque de fabrique de la tradition Peninsula.

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Ayant précieusement restauré les aspects culturels et architecturaux du bâtiment, les hôtels Peninsula ont également compris que le service et le confort se devaient de respecter l’exigence parisienne d’élégance et de raffinement.

Nicolas Béliard, Directeur Général du Peninsula Paris, souligne que l’établissement a su combiner le professionnalisme et l’exigence de l’hôtellerie française et la subtilité de l’accueil asiatique.

« En Asie, les gens sont sincèrement heureux de vous voir, alors nous avons allié cet aspect au parfait savoir-faire européen en matière de service », dit-il. « Oui, c’est un magnifique bâtiment et nos chambres sont superbes, mais si vous éprouvez quelque chose en tant que client, une émotion, c’est cela qui compte. Il existe de nombreux très beaux hôtels dans cette ville, mais ce qui fera revenir un client, ce sont les petites attentions de notre personnel, le fait d’avoir su l’émerveiller.»

Pour le premier établissement des hôtels Peninsula

en Europe, une attention particulière a été portée à l’un

des atouts majeurs de ce grand hôtel : ses équipes.

Fidèle à la tradition

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I N S u F F L e r L’ e S P r I T P e N I N S u L A

Pour s’assurer que l’exemplarité des standards de service « Peninsula » est maintenue, The Peninsula Paris a mis en place le programme d’Ambassadeurs. Introduit pour la première fois au Peninsula Tokyo en vue de l’ouverture de l’hôtel en 2007, plus tard renouvelé pour l’ouverture du Peninsula Shanghai en 2009, le programme a prouvé son efficacité à favoriser la compréhension et l’appréciation des traditions du plus ancien groupe hôtelier d’Asie.

« Chaque fois que nous ouvrons un nouvel hôtel, nous sélectionnons des membres du personnel local dans différents services et nous leur permettons de poursuivre leur formation dans l’un de nos établissements en Asie », explique Vincent Pimont, le directeur de l’hôtel. « L’essence des métiers de l’hôtellerie est de prendre soin des gens, c’est-à-dire de chacun », dit-il, « nous avons réfléchi à tout ce que nous voulions offrir à nos clients, mais nous avons aussi appliqué cette manière de penser à notre personnel. »

Un groupe interdisciplinaire de huit jeunes cadres français, comprenant le directeur du restaurant cantonais LiLi, le directeur de l’accueil et le directeur des ventes “Groupes et événements”, a passé un mois au Peninsula Hong Kong. La formation qu’ils ont reçue couvrait plusieurs aspects des opérations hôtelières, dont les services d’accueil, la restauration et le service d’entretien. à leur retour, les huit nouvelles recrues ont partagé les éléments clés de leur formation avec leurs équipes et continuent à ce jour à agir en mentors auprès de leurs équipes pour s’assurer que chaque client bénéficie des standards de service exemplaires.

« Quand des clients séjournent dans l’un des hôtels Peninsula, leurs attentes sont très grandes. Pour tous ceux d’entre nous qui avons pu en faire l’expérience au cours de notre formation à Hong Kong, nous pouvons ramener un peu du patrimoine et de l’esprit Peninsula pour le partager à Paris », confie Christophe Wong, responsable du restaurant LiLi.

La vie en coulisses, endroit rarement dévoilé aux clients, est cruciale pour encourager le personnel dans ses efforts quotidiens. Au Peninsula Paris, des aménagements offrent au personnel un confort sur mesure. Des pièces de détente permettent aux employés de reposer corps et esprit dans une atmosphère relaxante. Plutôt qu’une cantine, The Peninsula Paris a créé un restaurant à part entière destiné au personnel, le 19, où un chef dédié prépare un menu quotidien qui peut aisément rivaliser avec de nombreux restaurants parisiens.

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Le personnel du Peninsula Paris au grand complet avec les dirigeants de The Hongkong and Shanghai Hotels, réunis lors de l’ouverture le 1er août

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Quand il fut question d’une offre gastronomique capable d’impressionner les clients du Peninsula Paris, il était clair que les restaurants devraient mettre en valeur le meilleur de la France et du Peninsula. Même dans une ville comme Paris, les clients ne devraient éprouver aucune nécessité à quitter l’établissement pour goûter une cuisine de haut niveau créée par des maîtres-chefs venus de toute la France et du monde entier.

Jean-Edern Hurstel, Chef exécutif du Peninsula Paris, dirige et met en œuvre avec fierté la philosophie gastronomique de l’hôtel : « Des produits exceptionnels provenant des meilleurs terroirs et à la bonne saison sont essentiels. Je vais constamment au marché pour choisir les plus frais et parler avec les producteurs locaux », explique-t-il.

La constance dans l’excellence est le credo du Chef Hurstel. Il goûte tout ce qui est préparé dans les trois restaurants de l’hôtel, The Lobby, LiLi et L’Oiseau Blanc, dans les deux restaurants en terrasse, mais aussi les plats destinés au service en chambre et les préparations pour les banquets et le restaurant du personnel. Ce dévouement à la perfection culinaire confirme que la restauration est indissociable de l’expérience globale de l’hôtel.

Les restaurants et terrasses du Peninsula Paris

proposent des expériences gourmandes dignes de la Ville Lumière,

réputée pour être l’une des capitales gastronomiques du monde.

Une nouvelle dimension culinaire

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T H e L O B B y

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T H e L O B B y

Au cœur de chaque hôtel Peninsula, The Lobby propose tout au long de la journée une gastronomie internationale dans un cadre raffiné. Situé dans la grande salle à manger d’origine, le restaurant a conservé ses hauts plafonds ornés de panneaux méticuleusement restaurés à la feuille d’or, de moulures et de peintures, qui reflètent la gloire de la Belle époque. Les panneaux contemporains avec leurs dorures et leurs miroirs, les meubles élégants et le trio de jazz créent une atmosphère à la fois classique et moderne qui accueille les clients arrivant par l’entrée avenue Kleber.

« Ce restaurant peut servir ses clients à toute heure de la journée, au petit déjeuner, au déjeuner, à l’heure du thé et au dîner jusque tard dans la soirée. C’est pourquoi il nous fallait créer un menu très varié », confie Thomas Vaucouleur de Ville d’Avray, directeur adjoint de l’hôtel, en charge de la restauration.

« L’ Heure du Thé » est un moment privilégié des clients dans les hôtels Peninsula depuis l’ouverture de l’établissement de Hong Kong en 1928.The Peninsula Paris poursuit cette tradition – une adaptation créative des Peninsula Afternoon Tea où l’on déguste des scones, des amuse-bouches et une sélection de savoureux desserts et pâtisseries.

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Lieu unique parmi les hôtels de luxe de la capitale, la Terrasse Kléber offre la plus grande terrasse de café à Paris d’où l’on peut contempler l’avenue Kléber et ses platanes tout en restant à l’abri des regards. Les clients peuvent y savourer leurs petit-déjeuner et déjeuner grâce à la carte du restaurant The Lobby, ou encore y déguster une sélection de dim sum grâce à la proximité du restaurant cantonais LiLi, offrant lui aussi un accès direct à la Terrasse Kléber.

Confortablement installés sous la marquise de verre et d’acier, d’ores et déjà emblématique de l’hôtel, les clients peuvent se détendre et s’adonner, comme leurs aïeux il y a un siècle, au passe-temps préféré des Parisiens : regarder les passants.

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Inspiré de l’emblématique restaurant chinois Spring Moon du Peninsula Hong Kong, ainsi que des restaurants Hei Fung Terrace au Peninsula Tokyo et Yi Long Court au Peninsula Shanghai, LiLi propose une authentique cuisine cantonaise, préparée par des chefs étoilés de Hong Kong et servie dans le cadre splendide d’une salle évoquant la dramaturgie des opéras chinois et français.

Ambassadeur de la gastronomie cantonaise raffinée à Paris, le LiLi propose un menu où se distinguent le délicat dim sum et les fruits de mer de saison, la volaille et les viandes agrémentées de sauces maison, de soupes et de bouillons. Les desserts traditionnels cantonais, telles la crème de mangue et les tartelettes aux œufs, augmentent encore le plaisir d’une authentique fête gastronomique.

La Table du Chef invite à passer un moment unique pour découvrir l’univers de la gastronomie chinoise. Une pièce dédiée donnant sur les cuisines, dont les mosaïques bleues et blanches rappellent les anciennes céramiques chinoises, a été spécialement aménagée pour accueillir jusqu’à huit convives. On peut ainsi observer de près la maîtrise des techniques du wok et l’esprit d’équipe, essentiels à la préparation de la délicieuse cuisine cantonaise du LiLi.

Pour compléter la liste des 20 thés chinois proposés par le LiLi, la sélection des boissons a été spécialement élaborée pour mettre en valeur les saveurs délicates et complexes des mets. La carte des vins est divisée en plusieurs sections illustrées par des symboles chinois : le Jade – un symbole de finesse, de raffinement et d’élégance ; le Dragon – pour les vins structurés et d’intensités distinctes ; la Fleur de Prunus – pour les vins provenant des meilleurs vignobles français et européens ; et le Ba – qui représente le chiffre 8 en langue cantonaise, symbole de richesse et de succès. Les vins dans cette section de la carte sont tous des millésimes se terminant par “8”, parmi lesquels on trouve un millésime spécial de 1908, mis en bouteille l’année de l’ouverture du grand hôtel de l’époque.

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Le restaurant panoramique situé sur le toit de l’établissement est inspiré des aventures de deux pilotes pionniers de la Première Guerre mondiale, Charles Nungesser et François Coli, réputés pour leur tentative de traversée de l’Atlantique avant Charles Lindbergh. Les deux aviateurs décollèrent du Bourget le 8 mai 1927 sur un biplan français nommé L’Oiseau Blanc dans le but de réaliser le premier vol transatlantique sans escale entre Paris et New York. Ils disparurent sans laisser de traces.

Situé au sixième étage de l’hôtel, L’Oiseau Blanc leur rend hommage à travers une étonnante collection d’objets dédiés à l’aviation, dont une réplique de l’Oiseau Blanc suspendue au-dessus de la cour, comme si l’avion volait vers la tour Eiffel.Poursuivant la longue histoire qui l’unit aux hôtels Peninsula, la célèbre manufacture Bernardaud a spécialement créé dans ses ateliers de Limoges des porcelaines décorées d’un dessin de l’avion par Catherine Bergen, qui réalisa également les porcelaines du restaurant Gaddi’s au Peninsula de Hong Kong. L’Oiseau Blanc propose des mets traditionnels français enrichis d’une touche subtile et contemporaine. Le menu inspiré du terroir privilégie les ingrédients de saison d’origines locale et régionale, choisis pour leur fraîcheur et leur saveur, agrémentés d’une carte de vins fins provenant des caves du Peninsula Paris.

En harmonie avec l’esprit aventurier de L’Oiseau Blanc, les vins sont divisés non pas par région, mais selon leur personnalité, en six catégories nommées Opulence, Intensité, Structure, Elégance, Audace et Unicité. Nombre d’entre eux ont été choisis pour honorer le vol Paris/New York, avec une sélection de viognier, de chardonnay, de pinot noir et de cabernet sauvignon provenant à la fois de France et des états-Unis.

Au magnifique décor intérieur aéronautique vient s’ajouter la terrasse de L’Oiseau Blanc, d’où l’on jouit d’une vue panoramique sur les plus célèbres édifices et monuments parisiens, offrant aux convives l’éblouissant spectacle de la Ville Lumière.

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Entrez dans le Bar Kléber, boiseries de chêne massif, moulures dorées, hauts plafonds et miroirs majestueux y murmurent les multiples légendes de ce lieu mythique. Nous sommes dans la salle où furent négociés par Henry Kissinger les accords de paix qui mirent fin à la guerre du Vietnam en 1973. Tout comme au Lobby, les clients peuvent poursuivre leur conversation à l’air libre et déguster un verre en profitant de la magnifique vue panoramique de la Terrasse Kléber.

La cave à vin du Peninsula Paris renferme un trésor qui ne figure pas au menu : une collection intemporelle de plus de 15 000 bouteilles. Les clients souhaitant marquer une occasion particulière peuvent s’informer sur certains des millésimes d’exception. On trouve par exemple parmi les vins acquis spécialement pour l’hôtel un Château Pichon-Longueville Baron Bordeaux de 1973, qui commémore l’année des Accords de paix de Paris, alors qu’un Mouton-Rothschild de 1973, dont l’étiquette fut dessinée par Pablo Picasso, rend hommage à deux événements distincts : la signature des Accords de paix et la visite du maître espagnol à l’ancien grand hôtel en 1922.

Egalement proposé au Bar Kléber, le champagne Deutz cuvée Peninsula, servi en exlusivité dans les hôtels Peninsula depuis 1988. Le Peninsula Paris est le seul hôtel du pays à servir ce label privé exceptionnel.

« Le dénominateur commun entre le champagne Deutz et les hôtels Peninsula est cette obsession de la qualité », souligne Fabrice Rosset, Président Directeur Général de la maison Deutz, qui fut fondée en 1838 et figure parmi les plus anciens membres des prestigieuses Grandes Marques de la région champenoise.

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Remarquable en vertu de ses boiseries d’époque et de ses parquets polis, ce salon intime offre un cadre historique propice à la tranquille dégustation d’un cigare autour d’un verre, ainsi qu’un exceptionnel cabinet de conservation en cèdre, destiné à accueillir les cigares des clients réguliers.

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Soigneusement protégées par un faux plafond high-tech transparent, deux fresques représentant la musique, les sciences et la géographie offrent leur beauté fascinante aux visiteurs de ce fumoir. Ressuscitées par Cinza Pasquali, ces œuvres viennent s’ajouter à la liste impressionnante de ses réalisations, parmi lesquelles la restauration de tableaux de Leonard de Vinci au Louvre et de plusieurs chefs d’œuvres du château de Versailles.

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Inspiré à la fois par l’histoire récente du 19 avenue Kléber, qui fut utilisé comme centre

de conférences internationales par le ministère des Affaires étrangères, ainsi que par

son propre héritage chinois, The Peninsula Hotels rend hommage aux trois diplomates

français qui ont œuvré à la construction de relations bilatérales avec la Chine.

Réunir hospitalité et diplomatie

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Trois salons de conférence du Peninsula Paris portent aujourd’hui le nom de ces illustres ambassadeurs : Auguste Boppe, qui promut activement le programme Travail-Etudes en 1919, Lucien Paye, qui fut aux avant-postes de la reconnaissance de la République populaire de Chine par la France en 1964, et Claude Chayet, acteur-clé de l’accord franco-chinois de coopération nucléaire en 1982.

AUGUSTE BOPPE (1917-1921)Auguste Boppe, grand-père de l’ancien Président Directeur Général de The Hongkong and Shanghai Hotels Pierre Boppe, fut ministre plénipotentiaire à Pékin de 1917 à 1921. Convaincu qu’une meilleure compréhension réciproque des héritages culturels de chacun des deux pays devait constituer le point d’ancrage d’une union plus étroite, il fit des relations culturelles entre la France et la Chine le cœur de son action. A la fin de la Première Guerre mondiale, Auguste Boppe relança le programme Travail-Etudes au bénéfice de plusieurs milliers de jeunes Chinois, au sein desquels figuraient des acteurs centraux du développement de la Chine moderne, comme Deng Xiaoping et Zhou Enlai, ainsi que de nombreux cadres du ministère des Affaires étrangères chinois, qui œuvrèrent au rapprochement avec la France.

LUCIEN PAYE (1964-1969)Le 27 janvier 1964, la France fut le premier grand pays occidental à reconnaître officiellement la Chine communiste, démontrant ainsi sa volonté de mener, en pleine période de guerre froide, une politique extérieure indépendante et proactive. Lucien Paye fut le premier ambassadeur de France en Chine populaire, de 1964 à 1969, et son action fut essentielle dans le développement des solides relations culturelles et économiques qui existent aujourd’hui.

CLAUDE CHAYET (1979-1982)Au début des années 80, la coopération franco-chinoise dans le domaine de l’énergie nucléaire, fer de lance d’un partenariat industriel de long terme, symbolisa l’ouverture de la Chine aux investissements étrangers. Elle débuta avec la signature, en 1982, d’un accord largement facilité par CLP Holdings, la société d’électricité de Hong Kong dont la famille Kadoorie est le principal actionnaire. Son président, Lord Lawrence Kadoorie, soutint alors le choix des technologies françaises pour la réalisation de la première centrale nucléaire en Chine.Claude Chayet, ambassadeur de France à Pékin de 1979 à 1982, fut l’un des artisans de la coopération avec cette Chine où il passa de 1927 à 1933 une partie de son enfance et où il assista même à l’arrivée, à Pékin, de la Croisière jaune, célèbre odyssée automobile de deux conducteurs français le long de la Route de la Soie.

Chargé d’affaires de 1964 à 1966, il fut le premier diplomate français à arriver officiellement en Chine pour y ouvrir l’ambassade de France, suite à la reprise des relations diplomatiques entre la France et la Chine.

Les participants au programme

Travail-Etudes avant leur départ pour la

France, avec Cai Yuanpei (président de l'université de Pékin) et Auguste Boppe (au

deuxième rang, 9e

et 10e à partir de la gauche), le 30 juin

1919, à Pékin

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L’art de recevoir avec style

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Idéalement situé sur l’avenue Kléber, The Peninsula Paris dispose de 200 chambres au style raffiné, dont 34 suites somptueuses, cinq d’entre elles possédant un jardin suspendu privé offrant une vue saisissante sur la capitale. Réalisées pour répondre à chaque besoin, mais aussi pour dépasser les attentes du voyageur moderne et exigeant, les chambres du Peninsula Paris figurent parmi

les plus spacieuses de Paris et les plus avancées au monde sur le plan technologique.

Outre la chambre à coucher, le salon et la salle de bain, chaque chambre dispose d’un espace dressing indépendant et d’une entrée, d’un coffre-fort électronique, d’un porte-bagages pouvant recevoir deux valises, de la radio par internet et de l’affichage de la météo.

Inspirées par la longue

tradition du “sur

mesure” de la haute

couture parisienne,

les chambres et suites

du Peninsula Paris

associent la richesse

du patrimoine culturel

français à un confort

moderne et des

équipements high-tech.

The Peninsula Suite

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L A S u I T e P e N I N S u L A

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En règle générale, les équipements électroniques des chambres du Peninsula sont réalisés en interne et assemblés à partir de composants fabriqués sur mesure. Les tablettes numériques personnalisées, disposées sur les tables de chevet et les bureaux, peuvent être préréglées dans l’une des 11 langues disponibles. Toutes les fonctionnalités à disposition dans la chambre sont accessibles d’une pression du doigt et permettent d’accéder aux menus des restaurants, aux différents services de l’hôtel ou aux chaînes de télévision. Parmi les caractéristiques exclusives du Peninsula, on trouve le grand valet box pour la collecte et la livraison discrètes du linge et des chaussures cirées.

Les chambres et les suites ont été conçues par l’architecte Henry Leung de l’Atelier CAP en collaboration avec l’équipe interne des hôtels Peninsula.

Le meilleur de l’artisanat a été mobilisé au service de la vision stylistique de Henry Leung. Le mobilier fait main a été réalisé par des artisans à la réputation internationale, exclusivement pour le Peninsula Paris. Les chaises et les ottomanes ont été créées par Rosello, les canapés et cadres de lit par Laval, deux entreprises françaises. Les secrétaires et tables de chevet ont été créés par le designer autrichien Robert Wolte, les tables basses par l’Italien Cassina et les tapis par Tai Ping, de Hong Kong.

Helen Amy Murray, une autre figure de l’Artisanat Nouveau basée à Londres, s’est inspirée des dômes du Grand Palais à Paris pour créer les œuvres destinées aux espaces muraux en tête de lit. Ses sculptures, réalisées avec une précision d’orfèvre en taillant le cuir de manière à créer un effet en trois dimensions, font appel à des techniques manuelles rigoureuses et précises, comme la broderie et la juxtaposition de diverses matières pour donner un effet de relief. L’ouvrage qui en résulte est ensuite tendu sur un panneau ou directement sur le mur. « Ce qui est magique, c’est que même s’il existe une constante dans la thématique des créations, aucun panneau, aucune chambre n’est identique », souligne Helen Amy Murray.

A l’intérieur des chambres, les courbes inspirées du Grand Palais sont teintées de motifs Art Nouveau et d’influences architecturales parisiennes, la Suite Peninsula met en valeur des motifs Art Déco abstraits, et les œuvres murales qui décorent la Suite Katara présentent des formes abstraites aux plissages géométriques.

La Suite Peninsula

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L A S u I T e K ATA r A

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L A S u I T e K ATA r A

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La Suite Historique

La mosaïque dans la salle de bain de la

Suite Historique a été créée avec des carreaux d’origine découverts au cours de la restauration

Jean-Baptiste Chavance des Ateliers de France a pleinement conscience du caractère unique de chaque chambre. Ses équipes ont réalisé la plus grande partie de la restauration des chambres et supervisé la décoration des suites. « L’intégration technique, la restauration et la décoration ont été accomplies en gardant constamment à l’esprit le respect de l’origine et de la tradition liées aux matériaux utilisés », précise-t-il. Il souligne en particulier le remarquable travail du marbre dans chaque salle de bain. « Les pièces de marbre ont été choisies une par une dans les carrières de Carrare. Toutes ont été patiemment assemblées pour assurer la continuité des veines et des motifs dans chaque chambre ».

Les plus éminents créateurs spécialistes du patrimoine en France ont contribué à rendre tout son éclat à l’espace intérieur du glorieux hôtel. Les soies et brocarts qui ornent les suites sont tous brodés à la main et réalisés à partir de soies spécialement sélectionnées par Prelle, la célèbre enseigne familiale fondée à Lyon en 1752. La soie a également été mise à contribution pour la confection des embrasses des rideaux de chaque chambre, créées par la Maison Declercq Passementiers, fondée en 1852. C’est ce même artisan, créateur des passementeries pour le restaurant LiLi, qui est à l’origine de l’installation artistique emblématique située à l’entrée du restaurant.

Une autre enseigne familiale réputée pour son remarquable savoir-faire est l’Atelier Rémy Garnier, expert en matière de ferronnerie ornementale, fondé en 1832. Ses artisans se sont consacrés à la restauration de nombreux éléments historiques d’origine en recréant les cadres des miroirs, les poignées des portes et des armoires, les serrures et paumelles décoratives de toutes les chambres et suites. Les trois suites thématiques, la Suite Katara, la Suite Peninsula et la Suite Historique, représentent le nec plus ultra du style, du confort et de la sophistication. Pour orchestrer le projet de rénovation, les équipes créatives ont passé au crible de nombreuses photos anciennes afin de recréer chaque détail de l’établissement d’origine. Dans la Suite Historique, par exemple, des photos en sépia ont permis d’assurer le replacement des claustras et des cheminées à l’endroit même où ils se trouvaient il y a un siècle, et de reproduire fidèlement la salle à manger avec ses fameux treillis décoratifs.

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L A S u I T e H I S T O r I Q u e

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S u I T e T e r r A S S e

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S u I T e P r e M I e r

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C H A M B r e d e L u x e

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La technologie révolutionnaire dont dispose chaque chambre ne se limite pas à la mise en valeur de l’élégance des nouveaux intérieurs, mais impose également de nouveaux standards de personnalisation.

Toujours plus créatives et innovantes, les caractéristiques du confort sur mesure des chambres comprennent des tablettes de chevet et panneaux muraux électroniques totalement interactifs avec préréglages en 11 langues (anglais, français, chinois traditionnel ou simplifié, espagnol, allemand, arabe, coréen, russe, japonais et portugais) de manière à ce que toutes les commandes et informations s’affichent partout dans la chambre selon les préférences du client.

Toutes les fonctionnalités sont à portée de main et permettent d’accéder aux menus des restaurants, aux différents services de l’hôtel, aux visites guidées virtuelles “PenCities”, à un bouquet de chaînes de télévision hertziennes ou numériques, à la radio internet, à l’éclairage d’ambiance, aux rideaux, à la consultation météo, l’appel du valet de chambre, le thermostat, les langues et au mode “ne pas déranger”.

Par ailleurs, les salles de bain emblématiques disposent d’écrans LED tactiles pour commander télévision et radios numériques et l’éclairage modulable propose une gamme de réglages d’ambiance “Spa”, le mariage du son et de la lumière ainsi produit invitant à la plus voluptueuse relaxation.

Depuis longtemps réputé pionnier de la recherche et du développement dans

les technologies innovantes appliquées aux chambres d’hôtel, The Peninsula

Hotels présente les plus sophistiquées de la planète au Peninsula Paris.

La chambre la plus personnalisée au monde

The Opéra Garnier perfectly reflects the Haussmannian style

under the second Empire, which is now part of Paris'

signature.

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Parmi les divertissements disponibles, la chambre comprend un centre audiovisuel haut de gamme avec téléviseur à écran plat LED, Blu-ray et tablettes tactiles donnant accès à 90 chaînes de télévision hertziennes et numériques, câble et satellite, à 460 radios internet, à des films en HD disponibles gratuitement. Il comprend des stations d’accueil iPod et iPad, des lecteurs de cartes mémoire et un système d’enceintes restituant un son spatial. Par ailleurs, la connexion sans fil aux divers équipements électroniques personnels ainsi qu’à l’imprimante/copieur/fax/ scanner tout-en-un, ainsi que de multiples adaptateurs et chargeurs offrent toutes les fonctionnalités d’un bureau personnel.

L’accès offert à l’internet haut débit, avec ou sans fil, autorise les appels internationaux gratuits via VoIP (réseaux numériques) dans les chambres, de même que l’accès WiFi gratuit et les appels locaux restent accessibles lors des déplacements à bord de la Rolls Royce ou d’une MINI de la flotte de l’hôtel.

Ces systèmes ont tous été développés en interne par le service “Recherche & Technologie” (R&T) des hôtels Peninsula, à la pointe des technologies innovantes dans l’industrie hôtelière.

The Peninsula Hotels est la seule compagnie hôtelière au monde à posséder sa propre structure de recherche et développement à même de concevoir, fabriquer et personnaliser tous les équipements destinés à l’usage des clients du groupe. Les autres enseignes acquièrent et installent les technologies standard disponibles. The Peninsula Hotels est proprétaire de toutes les technologies des équipements disponibles dans ses établissements qui ne sont jamais cédées à d’autres entreprises. Ces systèmes sont créés puis testés jusqu’à la perfection par l’équipe R&T, qui comprend 27 ingénieurs dans les domaines de l’électronique, des logiciels et des matériels informatiques, capables de répondre au moindre besoin des clients à travers l’observation, l’innovation et le savoir-faire technologique.

Basée à Aberdeen, au sud de l’île de Hong Kong, l’équipe d’ingénieurs en blouse blanche s’efforce de fournir une technologie intuitive et facile à utiliser, à la hauteur des attentes d’une clientèle toujours plus exigeante et sophistiquée. En voyage d’affaires ou d’agrément, cette technologie favorise d’autant mieux le sentiment de confort et l’expérience globale de l’hôtel qu’elle assiste le client dans son travail ou simplement dans son besoin de détente, dans un espace qui devient une sorte de sanctuaire.

Depuis sa création en 1985, l’équipe R&T conçoit, réalise et développe des aménagements de pointe dans les chambres des dix hôtels du groupe, travaillant par ailleurs en étroite collaboration avec les fabricants de matériels de série tels que les téléviseurs, pour repenser et produire des télécommandes aussi simples et conviviales que possible. Bien que chaque hôtel possède sa propre équipe R&T sur place, les techniciens peuvent aussi contrôler à distance le matériel de chaque chambre, où qu’elle soit dans le monde, à partir du panneau de contrôle qui se trouve au laboratoire du QG.

L’objectif est de garantir une expérience sur mesure au client, qui pourra choisir lui-même la manière dont il accède aux différents services de l’hôtel. Les technologies, mais aussi les attentes des clients, ne cessant d’évoluer à grande vitesse, l’équipe R&T ne doit pas seulement suivre, mais surtout anticiper les attentes.

Chargées de fournir ce que les clients désirent avant même qu’ils n’en soient conscients ou en ressentent le besoin, les équipes R&T suivent une double devise : “la technologie est au service de l’humain” et “pas besoin d’y penser, c’est là”. Source d’inventivité, le

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processus de pensée et de développement des idées se nourrit de sources très variées, à commencer par un travail d’observation minutieux lors de voyages (dans les hôtels Peninsula ou d’autres) des comportements des clients et des actions du personnel.

Chaque élément répond aux besoins du client afin de l’aider à se détendre et se maintenir connecté, informé et en pleine forme. Fondamentalement, le souci reste celui d’une évolution permanente dans l’invention, à travers deux questions : « comment cela fonctionne-t-il ? » et « que pouvons-nous améliorer ? ». « L’innovation est, et a toujours été, une partie intégrante du patrimoine génétique des hôtels Peninsula », constate Peter Borer, Chief Operating Officer de The Hongkong and Shanghai Hotels. « Nos technologies sont centrées sur l’expérience du client, elles élèvent la qualité de son séjour à un niveau de luxe totalement nouveau qui fera référence, et nous croyons fermement que nos chambres à Paris sont les plus évoluées et les plus personnalisées au monde. »

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Le Spa du Peninsula Paris est une oasis de calme où les clients peuvent profiter d’une série de traitements exclusifs qui marient les philosophies ayurvédiques, asiatiques et européennes, les espaces de relaxation de type hammam, des saunas secs, des bains de vapeur aromatiques et de luxueuses cabines de soins. Les traitements personnalisés incluent la collection ESPA, ainsi que les produits Biologique Recherche, une marque française dont le siège se situe

non loin du Peninsula sur les Champs-Elysées.

Le Spa comprend une des plus grandes piscines d’hôtel de Paris. Son impressionnante cascade murale en mosaïque procure tout au long de l’année une toile de fond d’inspiration zen pour un moment de sérénité.

Une sensation de bien-être

Le Spa du Peninsula Paris est un luxueux refuge où les lumières

tamisées, le son relaxant de la musique asiatique et le parfum

du bois de cèdre et de l’eucalyptus engendrent une atmosphère

de profonde sérénité et de détente.

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L e S PA

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L A P I S C I N e

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Dans les profondeurs du sous-sol du Peninsula Paris, la porte du garage se lève lentement. L’apparition est réellement spectaculaire : restaurée et immaculée, une authentique Rolls-Royce Phantom II de 1934, jumelle de celles des hôtels Peninsula de Hong Kong, Shanghai et Tokyo. Elle est l’incontestable star de la précieuse flotte automobile

de l’hôtel, l’une des marques les plus prestigieuses du grand luxe automobile dans le monde depuis près d’un siècle, le choix préféré des princes, des chefs d’état, des célébrités et des VIP.

Partenaires d’excellence depuis plus de 40 ans, Rolls-Royce et The Peninsula Hotels battent un record de longévité avec une alliance qui a commencé dans les années 70 à travers une première commande de sept Silver Shadow. Cette unique Rolls-Royce d’époque a cependant nécessité une restauration complète pour faire honneur à la splendeur et au patrimoine de l’hôtel et pour inviter à un voyage dans une époque révolue.

« Sir Michael Kadoorie s’est particulièrement intéressé à cette voiture », se souvient Martin Oxley, responsable de la flotte de Rolls-Royce pour laquelle les hôtels Peninsula ont acquis une renommée internationale. Oxley, qui fut apprenti mécanicien chez Rolls-Royce Motor Cars à Londres et ensuite à la tête de la flotte des limousines Rolls-Royce et Bentley de la famille royale britannique, est depuis 1995 le directeur du parc de véhicules des hôtels Peninsula.

Le Peninsula Paris est le seul hôtel de la capitale

à posséder sa propre flotte automobile

personnalisée, où trône une exceptionnelle

Rolls-Royce Phantom II de 1934.

Ready to Rolls

“Efforcez-vous d’atteindre la perfection dans tout ce que vous faites.Prenez le meilleur de ce qui existe et améliorez-le.Si cela n’existe pas, créez-le” Henry Royce (env. 1905)

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La classique limousine de luxe, uniquement disponible sur réservation et pour les grandes occasions, est un véhicule complexe à restaurer, car chaque modèle d’origine était personnalisé pour répondre aux besoins spécifiques de son propriétaire. Avec plus d’options que n’importe quel autre modèle de Rolls-Royce, se procurer des pièces détachées n’est pas toujours évident. « Il a fallu y mettre tout notre cœur », avoue Sir Michael.

Quatre années au sein des ateliers de restauration de véhicules anciens Ashton Keynes, que dirige Keith Bowley dans le Wiltshire, en Angleterre, furent nécessaires pour qu’une équipe de maîtres artisans spécialisés accomplissent la délicate tâche de rénovation et de rééquipement complet de cette légende de la route. « Il n'existe pas deux modèles identiques de la Phantom II », souligne Bowley. « Tout dépend de la façon dont la voiture a été entretenue. A l'époque où ces automobiles ont été produites, elles avaient en général un chauffeur qui en prenait soin et les conduisait. Mais au fil des années, cette attention passionnée que leur portait leur chauffeur dont elle faisait la joie et la fierté, a peu à peu disparu. »

étant donné son ancienneté et le fait qu’elle fut conçue pour un environnement automobile beaucoup plus tranquille, la capacité de son système de freinage, de sa boîte de vitesses et de son circuit de refroidissement à affronter la circulation parisienne moderne témoigne des remarquables compétences de ses créateurs.

L'attention au détail étant une marque de fabrique que partagent The Peninsula et Rolls-Royce, un grand nombre de fonctions ont été développées pour garantir à la Phantom II une adaptation parfaite aux conditions routières d'aujourd'hui.

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La préservation de la fraîcheur intérieure en été a fait l’objet d’un soin de premier ordre. L’air conditionné a été installé, avec des ventilateurs frontaux pour le chauffeur et intégrés au plafond de l’habitacle pour les passagers. Un réfrigérateur et un compartiment à cocktails ont été ajoutés, ainsi qu'un téléphone multifonction directement relié à un opérateur, le WiFi gratuit, une connexion Bluetooth et des ports USB.

Des cuirs de la maison Connolly garnissent les sièges et les portières, alors que des tissus traditionnels de l’ouest de l’Angleterre ont été choisis pour le revêtement des plafonds.

De retour au sous-sol de l’hôtel, où un garage accueillant 57 véhicules a fraîchement été aménagé, Oxley décrit les nombreuses fonctions de l’atelier automobile conçu exclusivement pour assurer la longévité de la Phantom II. « Nous disposons de multiples pièces de rechange, des outils et de tout l’équipement nécessaire, un mécanicien est à disposition. Si un travail de réparation est requis, tout peut être effectué ici », assure Oxley. « Travailler sur la Phantom II a été très gratifiant », ajoute-t-il, « il y a quelque chose de tout simplement spectaculaire concernant l’histoire de cette voiture qui ne peut qu'enchanter les clients du Peninsula Paris. »

u N C O N F O r T S u r M e S u r e

L’emblématique Phantom II attire tous les regards le long des boulevards de la capitale, tout comme les autres véhicules de la collection automobile du Peninsula Paris. Ils arborent tous la livrée vert foncé, signature du groupe Peninsula, et bénéficient de nombreuses modifications effectuées pour optimiser le confort des passagers.

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Outre la Phantom II de 1934, une Phantom récente à empattement allongé comprend, elle aussi, un certain nombre de modifications exclusives, tel que le remaniement du système d’éclairage environnant qui favorise une illumination optimale pour les passagers qui montent ou descendent du véhicule. Les plus petits détails ont fait l’objet d’une minutieuse attention, des modèles modifiés de vis à tête fraisée ont par exemple été conçus pour le coffre élargi accueillant les bagages, afin d’éliminer le moindre risque de rayure.

Les finitions du reste du véhicule répondent aux standards les plus élevés. Le placage en ronce de noyer a été choisi pour sa remarquable qualité et sa beauté naturelle. Il provient d’un seul et même arbre, afin de garantir que la couleur et le grain soient parfaitement assortis à l’intérieur du véhicule.

Sir Michael et Oxley ont également travaillé avec les ingénieurs et les concepteurs de chez MINI au développement de deux modèles personnalisés MINI Cooper S Clubman Edition Peninsula : une version agrandie du modèle classique à toit rigide, parfaite pour évoluer élégamment à travers les rues étroites de la capitale.

« Chaque MINI possède un coffre sur mesure monté sur le toit pour pouvoir pleinement profiter d’un shopping effréné rue du Faubourg Saint-Honoré » indique Oxley. Les clients séjournant dans l’une des suites de l’établissement peuvent utiliser gracieusement une MINI avec chauffeur qui arbore un logo éclairé Peninsula sur les marchepieds et des finitions de la meilleure qualité qui soit.

Un parc de dix BMW série 7, berlines à empattement allongé, répond également aux standards les plus avancés. La Série 7 est le modèle vedette de BMW. Elle présente un design somptueux et une ergonomie parfaite, auxquels s'ajoutent de nombreuses caractéristiques propres au groupe Peninsula.

Pour conclure, une authentique fourgonnette Citroën 2CV vient enrichir la tradition Peninsula de proposer à ses hôtes un choix de véhicules emblématiques, comme le tuk-tuk au Peninsula Bangkok, un hélicoptère pour un vol panoramique au Peninsula Hong Kong, des bubble cars au Peninsula Pékin et un luxueux yacht de rivière au Peninsula Shanghai.

Offrant aux rues de Paris un facétieux hommage à l’histoire automobile française, la fourgonnette 2CV, datant de 1955, a fait l’objet d’une restauration méticuleuse dans un atelier spécialisé de Grasse et conserve le volant et les finitions cuir d'origine. Elle est utilisée pour des livraisons à travers Paris et pour effectuer des courses pour les clients.

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Tous les éléments du projet de restauration, de rénovation et de création de l’hôtel The Peninsula Paris ont été méticuleusement assemblés pour procurer à ses clients la plus inoubliable des expériences Peninsula, aujourd’hui et pour le siècle à venir. Grâce aux contributions de tous les artisans et experts mentionnés dans cet ouvrage, ce splendide hôtel historique au cœur de la capitale française connaît une magnifique renaissance dans le style d’un XXIe siècle moderne et sophistiqué et avec un ensemble de services et de ressources de classe internationale.

Ainsi conclut Sir Michael Kadoorie : « Nos hôtes recherchent une authentique expérience parisienne associée à l’éminente hospitalité qui fait la réputation des hôtels Peninsula. Nous souhaitons que chacun de nos clients reparte avec des souvenirs exceptionnels. »

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PrésidentRenaud [email protected]

Rédacteur en chefChristophe [email protected]

Directrice artistiqueCaroline Laleta [email protected]

The Peninsula Paris - La Création d’un Chef-d’œuvre Parisien est édité par International Publishing Concepts Asia Ltd.Unit B 10/F Lee May Building788-790 Nathan RoadMongkok KL Hong Kong

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© Copyright 2015 par The Peninsula Hotels. Tous droits réservés. La reproduction ou transmission d'un extrait quelconque de ce livre, par quelque procédé que ce soit, est interdite sans l'autorisation écrite de l'éditeur.

PhotographesXavier Béjot, Antony Crook, éric Cuvillier, Fabrice Dunou, William Furniss, Fabrice Rambert, Antonio Saba, Jam Wu

Ont participé à la rédaction de ce livreChristophe Chommeloux, Daniel Jeffreys, Michelle Solomon

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