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Annales de dermatologie et de vénéréologie (2013) 140, 221—223 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com CAS POUR DIAGNOSTIC Une plaque érythémato-atrophique de la conque An erythematous atrophic plaque on the conch M. Youssef a,, Y. Soua a , H. Belhadjali a , H. Akkari a , S. Mokni a , M. Mohamed a , A. Zakhama b , J. Zili a a Service de dermatologie, hôpital universitaire Fattouma Bourguiba, CHU de Monastir, avenue Farhat Hached, 5000 Monastir, Tunisie b Service d’anatomie pathologique, hôpital universitaire Fattouma Bourguiba, CHU de Monastir, avenue Farhat Hached, 5000 Monastir, Tunisie Rec ¸u le 2 octobre 2012 ; accepté le 5 d´ ecembre 2012 Disponible sur Internet le 9 janvier 2013 Observation Une patiente âgée de 37 ans, sans antécédents patholo- giques notables, consultait pour une plaque érythémateuse atrophique et bien limitée de la conque de l’oreille gauche faisant 0,5 cm de grand axe évoluant depuis quatre mois (Fig. 1). L’interrogatoire ne révélait pas d’hypersensibilité ou d’arthralgies. Le reste d’examen somatique était sans particularités. Auteur correspondant. Adresse e-mail : monia [email protected] (M. Youssef). Figure 1. Plaque érythémateuse atrophique et bien limitée de la conque de l’oreille gauche. Quel est votre diagnostic ? 0151-9638/$ — see front matter © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.annder.2012.12.004

Une plaque érythémato-atrophique de la conque

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Annales de dermatologie et de vénéréologie (2013) 140, 221—223

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une plaque érythémato-atrophique de la conque

An erythematous atrophic plaque on the conch

M. Youssefa,∗, Y. Souaa, H. Belhadjali a, H. Akkari a,S. Moknia, M. Mohameda, A. Zakhamab, J. Zili a

a Service de dermatologie, hôpital universitaire Fattouma Bourguiba, CHU de Monastir,avenue Farhat Hached, 5000 Monastir, Tunisieb Service d’anatomie pathologique, hôpital universitaire Fattouma Bourguiba, CHU deMonastir, avenue Farhat Hached, 5000 Monastir, Tunisie

Recu le 2 octobre 2012 ; accepté le 5 decembre 2012

janvier 2013 Disponible sur Internet le 9

Observation

Une patiente âgée de 37 ans, sans antécédents patholo-giques notables, consultait pour une plaque érythémateuseatrophique et bien limitée de la conque de l’oreille gauche

faisant 0,5 cm de grand axe évoluant depuis quatre mois(Fig. 1). L’interrogatoire ne révélait pas d’hypersensibilitéou d’arthralgies. Le reste d’examen somatique était sansparticularités.

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : monia [email protected] (M. Youssef).

Fc

0151-9638/$ — see front matter © 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droitshttp://dx.doi.org/10.1016/j.annder.2012.12.004

igure 1. Plaque érythémateuse atrophique et bien limitée de laonque de l’oreille gauche.

Quel est votre diagnostic ?

réservés.

222 M. Youssef et al.

Hypothèses du comité de rédaction

Les hypothèses du comité de rédaction étaient :• carcinome basocellulaire ;• lichen plan ;• trichoépithéliome desmoplastique ;• porokératose actinique ;• lupus érythémateux chronique (LEC).

Commentaires

Après exérèse totale de la lésion, l’étude histologique avaitmontré une couche granuleuse hyperplasique (Fig. 2) et descellules basales vacuolaires par endroits (Fig. 3). Le dermecomportait un infiltrat inflammatoire peu abondant fait delymphocytes et d’histiocytes (Fig. 2). L’immunofluorescencedirecte (IFD) a montré un dépôt linéaire d’IgG et de C3 auniveau de la membrane basale épidermique (Fig. 4). Ainsi lediagnostic de LEC était confirmé. La recherche des anticorpsantinucléaires était négative.

Le LEC est une affection auto-immune. Il s’agit d’uneforme généralement cutanée pure de la maladie lupique.

Figure 2. Hyperplasie de la couche granuleuse avec présenced’un infiltrat inflammatoire lymphohistiocytaire au niveau du derme(HE ×100).

Figure 3. Les cellules basales ont un aspect vacuolaire parendroits (HE ×200).

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igure 4. Dépôt linéaire d’IgG et de C3 au niveau de la membraneasale épidermique.

a prédominance féminine au cours du LEC est admise para plupart des auteurs avec un sex-ratio variant de 1,5 à

[1]. Le LEC atteint électivement les sujets jeunes, âgésntre 20 et 30 ans [1,2]. Le lupus discoïde constitue uneorme clinique du LEC. Il se présente comme une plaquerythémateuse bien limitée recouverte rapidement par uneyperkératose qui prédomine au niveau des orifices folli-ulaires, donnant un aspect blanc râpeux. Une atrophieicatricielle est secondairement associée. Le LEC affecteabituellement les zones photoexposées (visage, cuir che-elu). L’atteinte des oreilles est notée surtout au niveau desurlets vu leur exposition au soleil [3]. L’effet délétère desVA et UVB dans l’induction et l’exacerbation des lésions estien établi chez les patients atteints de lupus érythémateux4].

Notre observation est particulière par son mode de révé-ation. En effet, la conque de l’oreille constitue une zoneelativement cachée non directement exposée au soleil.ette atteinte isolée reste exceptionnelle. Elle n’a pas étéapportée dans la littérature. D’autres localisations photo-rotégées ont été décrites telle que l’atteinte des paupières5]. Dans ces localisations atypiques, la confirmation diag-ostique est apportée par l’étude histologique aidée par’IFD positive dans 90 % des cas.

La prise en charge thérapeutique du LEC repose sur la cor-icothérapie locale en cas de lésions peu étendues, récentest non atrophiques. L’évolution du LEC se fait par pousséesurtout estivales. La photoprotection est indispensable.Nousvons prescrit pour notre patiente un écran solaire et nousvons insisté sur les conseils de photoprotection. Trois moislus tard, elle a développé de nouvelles lésions cutanéesypiques de LEC au niveau du visage, confirmé par l’étudenatomopathologiques et l’IFD sans récidive des lésions de laonque. Cela démontre l’intérêt de la surveillance cliniquet biologique au long cours de LEC, afin de détecter une

ouvelle poussée, l’évolution vers une forme systémique etlus rarement une transformation maligne des lésions pré-xistantes. En effet, la dégénérescence en un carcinomepinocellulaire a été rapportée [6]. Le risque d’évolutionicatricielle des lésions cutanées en cas d’un traitementardif met en jeu le pronostic esthétique.

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Une plaque érythémato-atrophique de la conque

Déclaration d’intérêts

Les auteurs n’ont pas transmis de déclaration de conflitsd’intérêts.

Références

[1] Le Bozec P, Le Guyadec T, Crickx B, Grossin M, Belaïch S.Place du lupus érythémateux chronique au sein de la mala-

die lupique. Étude rétrospective de 136 patients. Presse Med1994;23:1598—602.

[2] Kyriakis KP, Michailides C, Palamaras I, Terzoudi S, EvangelouG, Damoulaki E. Lifetime prevalence distribution of chronic

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discoid lupus erythematosus. J Eur Acad Dermatol Venereol2007;21:1108—9.

3] Lipsker D, Saurat JH. Signes cutanés du lupus érythémateux. In:Saurat JH, Lachapelle JM, Lipsker D, Thomas L, editors. Derma-tologie et infections sexuellement transmissibles. 5e ed. Paris:Masson; 2009. p. 346.

4] Orteu CH, Sontheimer RD, Dutz JP. The pathophysiology ofphotosensitivity in lupus erythematosus. Photodermatol Pho-toimmunol Photomed 2001;17:95—113.

5] Mseddi M, Marrekchi S, Meziou TJ, Sellami D, Kammoun B, FrekiJ, et al. Lupus érythémateux discoïde : une série de 9 malades.

J Fr Ophtalmol 2007;30:247—9.

6] Simpson JK, Medina-Flores R, Deng JS. Squamous cell carcinomaarising in discoid lupus erythematosus lesions of the ears infec-ted with human papillomavirus. Cutis 2010;86:195—8.