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Volcanologie Jacques-Marie Bardintzeff 4 e édition

Volcanologie, 4e édition

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  • Volcanologie

    Jacques-Marie Bardintzeff

    4e dition

    554027-Livre Bardinteff.indb 1 10/01/11 07:52

  • Du mme auteur

    Volcans et magmas, Collection Sciences et dcouvertes, Le Rocher, Paris, Monaco, 1986. Lhomme et les volcans, Le Lopard dor, Paris, Musum de Lyon, ARPPAM, Lyon, 1991. Volcans et tremblements de terre, Collection Explorons, Rouge et or, Nathan, Paris, 1993. Volcans, Armand Colin, Paris, 1993. Volcans et sismes, Collection En Savoir plus, Hachette, Paris, 1995 (traduit en tawanais, 1997 et en chinois, 1999).

    Russir le capes et lagrgation des sciences de la vie et de la Terre (avec J.P. Dubacq et J.C. Baehr), 2e dition, Masson, Paris, 1998.

    Vocation volcanologue, Delachaux et Niestl, Lausanne, Paris, 2000. LABCdaire des Volcans, Flammarion, Paris, 2001 (traduit en italien, 2003). Connatre et dcouvrir les volcans, 2e dition, Minerva, Genve, Paris, 2004. Volcans (avec O. Grunewald), Le Chne, Paris, 2007 (traduit en allemand, 2009). Volcanologue. De la passion la vocation, Vuibert, Paris, 2009. Le grand livre des volcans du monde, sismes et tsunamis, Orphie, Chevagny-sur-Guye, 2010. Les volcans et leurs ruptions, Le Pommier, Paris, 2010.

    En couverture: ruption explosive au Tavurvur en Papouasie-Nouvelle-Guine Photo J.-M. Bardintzeff

    Dunod, Paris, 1991, 1998, 2006, 2011ISBN 978-2-10-056162-9

    Cet ouvrage a t traduit en anglais (USA) et adapt (avec A. R. McBirney), Jones & Bartlett, Sudburry, 2000; et en allemand F. Enke Verlag, Stuttgart, 1999, repris par Spektrum.

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  • III

    Dunod La photocopie non autorise est un dlit.

    Table des maTires

    Avant-propos 1

    Premire Partie

    Du manteau la chambre magmatique

    Chapitre 1. La fusion partielle du manteau 7

    1.1.Loriginemantelliquedesmagmas 7

    1.2.Laconstitutiondumanteauterrestre 9

    1.3.Mcanismedelafusionpartielle 14

    1.4.Lesmagmasprimaires 15

    Chapitre 2. La chambre magmatique : ralits et modlisations 18

    2.1.Lamontedumagmaprimaire 18

    2.2.LemassifduSkaergaard(Groenland) 19

    2.3.Lescomplexesannulaires 22

    2.4.Lachambremagmatique:systmeouvertouferm ? 24

    2.5.Versunemodlisationdeplusenplusprcise 26

    Chapitre 3. La cristallisation fractionne et la diffrenciation 28

    3.1.Ordredecristallisationetindicedediffrenciation 28

    3.2.Modlesquantitatifsdecristallisationfractionne 30

    3.3.LasriediffrenciedelachanedesPuys 32

    3.4.volutiondesparamtresthermodynamiquesaucoursdeladiffrenciation 39

    Chapitre 4. Leau et les autres fluides 41

    4.1.Importanceetoriginesdesfluides 41

    4.2.Leffetamphibole 43

    4.3.Teneurenfluidesetviscosit 45

    4.4.ruptibilitetvsiculation 48

    4.5.Pressiondesfluidesetruption 51

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  • Table des matires

    IV

    Chapitre 5. Les mlanges de magmas 53

    5.1.Miseenvidencedesmlanges 53

    5.2.Mlangedemagmas(mixing)laSoufriredeSaint-Vincent 54

    5.3.Mlangedemagmas (mingling)auCerroChiquito 60

    5.4.Lesmlanges:modalitsetconditionsthermodynamiques 64

    5.5.Mlangeetdclenchementdelruption 68

    5.6.Immiscibilit 69

    Chapitre 6. Le dclenchement de lruption 70

    6.1.Lecontrletectonique 70

    6.2.Ladiffrenciationmagmatique 74

    6.3.Lesmlangesdemagmas 75

    6.4.Leslmentsvolatils 75

    6.5.Larsistancelatraction 77

    6.6.Conjonctiondesdiffrentsfacteurs 77

    Deuxime Partie

    larrive Du magma en surface et les Dynamismes ruptifs

    Chapitre 7. Les ruptions laviques 83

    7.1.Lescoulesdelave 83

    7.2.Lesfontainesetlacsdelave 91

    7.3.Lesdmes 95

    7.4.Lesintrusions 102

    Chapitre 8. Les retombes 107

    8.1.Lagranulomtrie:cendreoubombe ? 107

    8.2.Lamorphologiedesdifices:lescnes 112

    8.3.Descendressurdegrandessurfaces 114

    8.4.paisseur,fragmentationetdispersiondesdpts 116

    8.5.Ponces,lithiques,cristaux 121

    8.6.Dbitmagmatiqueetcolonneruptive 123

    8.7.Indicedexplosivitvolcanique 127

    8.8.Cratresetcaldeiras 128

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  • Table des matires

    V

    Dunod La photocopie non autorise est un dlit.

    Chapitre 9. Les coulements pyroclastiques 132

    9.1.Lesnuesardentes:dptsetmiseenplace 132

    9.2.Lesnuesardentes:originesetclassifications 146

    9.3.Surges,avalanchesetblasts 149

    9.4.Lesignimbrites 152

    9.5.Leslahars 154

    Chapitre 10. Hydrovolcanisme et volcanisme sous-marin 158

    10.1.Hydrovolcanisme 158

    10.2.Levolcanismesous-marin 167

    Chapitre 11. Les produits volcaniques 175

    11.1.Leslavesetlestephra 175

    11.2.Lesverres 177

    11.3.Lesgaz 182

    11.4.Lesphaseshydrothermales 185

    Chapitre 12. Les volcans du monde dans leur contexte godynamique 190

    12.1.Desvolcansbiendiffrents 190

    12.2.Trapp,dorsaleetouvertureocanique 195

    12.3.Subduction,margecontinentaleetarcinsulaire 200

    12.4.Collision 202

    12.5.Pointschaudsetvolcanismeintraplaque 204

    12.6.Magmatismecrustal 212

    12.7.Volcanismeplantaire 212

    troisime Partie

    les volcans et lhomme

    Chapitre 13. Risques volcaniques et prvisions 221

    13.1.Volcansetcatastrophesnaturelles 221

    13.2.Lesseptrisquesvolcaniques 223

    13.3.Lestimationdesrisques 236

    13.4.Lesobservatoiresdesurveillance 243

    13.5.Laprotectioncivile 251

    13.6.lchelledelaplante:volcansetclimats 251

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  • Table des matires

    VI

    Chapitre 14. Le volcan utile 259

    14.1.Levolcan,sourcedematirespremiresutilesetnergtiques 259

    14.2.Levolcan,sourcedesantetdeloisirs 264

    Bibliographie 267

    Sites Internet 296

    Remerciements 297

    Crdits iconographiques 297

    Index 299

    Glossaire 311

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  • 1

    Dunod La photocopie non autorise est un dlit.

    avanT-propos

    L'exploration est le sport du savant. ProfesseurAugustePicard

    les enjeux de la volcanologieLes volcans ne laissent personne indiffrent: leur beaut et leurs dangers fasci-nent les hommes. Ce qui demeure vrai aujourdhui ltait sans doute davantage au cours de la Prhistoire ou de lAntiquit. Les premiers hommes, qui vivaient dans un contexte volcanique (Rift est-africain), ont d voir des ruptions. De mme, en France mtropolitaine, nos anctres ont assist lruption explosive majeure de la chane des Puys, il y a 8000ans environ. Les Grecs, puis les Romains, avaient fait des volcans le lieu de vie dHphastos, puis de Vulcain. Ce dieu du feu et du mtal avait t prcipit du haut de lOlympe par sa mre Hra (Junon). Fort laid et boiteux, il travailla alors dans ces gigantesques forges naturelles, aid par les Cyclopes. Il entrait dans des colres folles (ruptives!), quand, selon la lgende, il dcouvrait quAphrodite (Vnus), sa femme lgitime, le trompait. Volcan et beaut se trouvaient dj associs dans la mythologie.

    Progressivement, le volcan intresse les hommes desprit. Le pote lyrique grec Pindare signale une ruption de lEtna en 475av. J.-C. Empdocle, philosophe dAgrigente du vesicle av.J.-C. se retira sur lEtna. Il expliqua la production de laves et lmission deaux thermales par la prsence dun feu interne. La lgende raconte quil se donna la mort en se jetant dans le cratre du volcan, qui ne rejeta ensuite quune de ses sandales. La Torre del Filosofo, construite prs du sommet mais aujourdhui dtruite, perptuait sa mmoire. Au ivesicle av.J.-C., Platon, dcrivant la tragdie de lAtlantide, pourrait relater en fait une version dforme de lruption cataclysmale sur lle de Santorin au xvie-xviiesicle avant notre re.

    Lruption de 79 ap. J.-C. du Vsuve marque sans doute la naissance de la volca-nologie. Pline lAncien, auteur dune vaste Histoire naturelle, fait le premier des observations scientifiques mais prit lors de lruption. Son neveu, Pline le Jeune, relate les vnements dune faon tonnamment prcise dans sa correspondance avec Tacite. Loncle et le neveu mritent le titre de premiers volcanologues.

    La science volcanologique progresse lentement. Il faut attendre lanne 1752 pour que Guettard attribue de faon formelle une origine volcanique aux monts dAuvergne. En 1778, Barthlemy Faujas de Saint-Fond, premier professeur de gologie de France, publie ses Recherches sur les volcans teints du Vivarais et

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  • Avant-propos

    2

    du Velay. La querelle, qui oppose les Neptunistes (Werner et ceux qui pensent que tous les terrains proviennent de dpts dorigine marine) aux Plutonistes (Hutton et les partisans dun feu central et dune origine interne des roches), complique le dbat durant tout le xviiiesicle. Jusqu la dernire guerre mondiale, le volcan est considr comme anecdotique et le volcanisme relgu dans un maigre chapitre des traits de gologie.

    La comprhension de la dynamique globale de la plante Terre, dans les annes 1960, a montr le rle premier du volcanisme. Les interactions entre lhomme et les volcans sont multiples. Le volcan est trop souvent nuisible, responsable de catastrophes meurtrires. Les 25000 morts en novembre1985 en Colombie la suite de lruption du Nevado del Ruiz et les 1746 morts en aot1986 au Cameroun prs du lac Nyos dorigine volcanique, le rappellent douloureusement. Sans une vacua-tion pralable, le Pinatubo aux Philippines aurait tu encore plus en juin1991. Et la crise de la Soufrire de Montserrat aux Antilles, qui a dbut en juillet1995, ne semble plus devoir sarrter plus de quinze ans aprs! Au printemps 2010, le volcan islandais Eyjafjll a paralys pendant plusieurs jours le trafic arien europen. Des villes entires vivent sous la menace dun volcan. Ce dernier modifie parfois le climat lchelle plantaire. Mais le volcan peut aussi, paradoxalement, savrer fort utile car il est source de matires premires utiles (mtaux, matriaux de construction) ou ner-gtiques (gothermie).

    Figure 1 Le sommet du Vsuve en 1774 (in Fuchs, 1878).

    En ce dbut de millnaire, la rduction des risques naturels demeure une priorit. La prvision et la prvention des ruptions volcaniques sintgrent dans ce cadre.

    La connaissance des volcans et des magmas a fait des progrs immenses au cours des dernires annes, que le prsent livre se propose de reflter: par exemple, les chambres magmatiques sont maintenant bien connues voire modlises, les quantits de matriaux et dnergie mises en jeu lors druptions actuelles ou anciennes sont

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  • Avant-propos

    3

    Dunod La photocopie non autorise est un dlit.

    parfaitement quantifies. La volcanologie, science typiquement interdisciplinaire, sappuie sur plusieurs domaines : ptrographie et minralogie (tude des roches et de leurs constituants), sdimentologie (agencements des dpts), gochimie (analyse des phases solides et fluides), tectonique globale (situation des volcans dans les diffrents contextes gologiques), gophysique (mesure physique des para-mtres), plantologie (reconnaissance des volcans extraterrestres). Il est bien vident que lensemble ne peut tre trait dans un manuel denviron 300 pages! Le lecteur intress par tel ou tel aspect particulier se reportera aux livres spcialiss. En parti-culier, la tectonique des plaques est suppose connue, la gochimie des lments en trace et des isotopes, marqueurs du manteau et des magmas et la thermodynamique minralogique ne seront quabordes. Le magma, de sa production son mission, nous servira de fil conducteur. On insistera sur laspect dynamique des phnomnes, profonds et superficiels: un voyage de 100km entre manteau et crote terrestres!

    Lorsque, au cours dun beau printemps, je mengageais remettre lditeur mon manuscrit pour le dbut du mois de mai de lanne suivante, plus prcisment le jour de la Saint-Jacques, je ne me doutais pas vraiment du chemin parcourir.

    Jespre simplement avoir rsolu davantage de problmes, que je nen ai poss!

    Jacques-Marie Bardintzeff

    Jacques-Marie Bardintzeff est lauteur de 350 contributions scientifiques et dune quinzaine de livres, traduits en cinq langues, rfrences dans les pages web:

    www.lave-volcans.com/bardintzeff.htmlhttp://44.svt.free.fr/jpg/bardintzeff.htm

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  • Premirepartie

    Du manteau la chambre magmatique

    Figure 1.0 Les bombes volcaniques renferment parfois une enclave (nodule) de pridotite, fragment du manteau terrestre.

    chantillon prlev au puy Beaunit dans la chane des Puys (photo D. decobecq).

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  • 7

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    1la Fusion parTielle du manTeau

    Felix qui potuit rerum cognoscere causas. Virgile

    1.1. lorigine manTellique des magmasLes magmas, liquides silicats, qui spanchent la surface du globe, provien-nent bien videmment de lintrieur de la Terre. On a longtemps cru, et lide reste encore rpandue auprs du grand public, que lintrieur de la plante, sige dun feu central, tait constitu de matires en fusion, qui montaient lors des ruptions volcaniques. Il est vrai que les tempratures rgnant au centre de la Terre ont t estimes 5100C, valeur bien suprieure celle de la fusion des roches (800-1200C) en surface. Mais cest oublier qu de telles profondeurs, et donc de telles pressions (4106 atm =4105 MPa au centre de la Terre), les tempratures de fusion augmentent considrablement. Les enregistrements des ondes sismiques ont montr que la grande majorit du globe (la crote superficielle, le manteau sous-jacent limit 2900km de profondeur par la discontinuit de Gutenberg, et le noyau interne, de 5100 jusqu 6370km, centre de la Terre) reste solide (Fig.1.1). Seul le noyau externe entre2900 et5100km serait dans un tat proche de celui dun liquide car il ne transmet pas les ondes sismiques transversales. Il nest cependant pas en relation directe avec la surface. La naissance dun magma implique donc un processus de fusion un niveau de profondeur donn du globe.

    Une zone particulire de quelques kilomtres dpaisseur, repre au sein du manteau suprieur, une profondeur moyenne de 100 250km sous les continents et de 70km sous les ocans (et de lordre de quelques dizaines de kilomtres seule-ment sous les dorsales ou dans certaines rgions particulires), ralentit sensiblement les vitesses sismiques, do son nom de zone moindre vitesse ou low velocity zone (LVZ). Cette zone spare la lithosphre, constitue de la crote continentale ou ocanique et dune partie du manteau suprieur, de lasthnosphre sous-jacente, constitue du reste du manteau suprieur. Par ailleurs, la Terre produit de la chaleur (4,21013 W) : une partie (1/5), originelle, date de laccrtion de la plante et se dissipe depuis, tandis que lautre partie (4/5) provient de la dsintgration des isotopes radioactifs (K, Th, U) contenus dans le globe. Cette chaleur ne peut pas svacuer par un simple processus de conduction thermique. Elle entrane, en se

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  • Premire partie Du manteau la chambre magmatique

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    dissipant, des mouvements de convection de lasthnosphre dont ltat solide reste nanmoins plastique.

    Figure 1.1 Coupe schmatique de la Terre. Leschellesverticalesnesontpasrespectes:lespaisseursdescrotesocaniqueetcontinentale,delalithosphreetdelasthnosphresontexagres.

    La LVZ tmoignerait dune fusion trs limite du manteau ce niveau, de lordre de 1% (cest--dire 10g de magma pour 1kg de manteau solide !). Les effets contraires de la pression et de la temprature sur la fusion squilibrent presque et la temprature, voisine de 1300C, se rapproche du point de fusion de loli-vine, minral constituant principal du manteau. Une faible modification locale des paramtres thermodynamiques peut augmenter sensiblement le taux de fusion du manteau. La LVZ et la zone sus-jacente apparaissent comme les lieux privilgis de formation des magmas, qui, dans leur trs grande majorit, prennent naissance au sein du manteau suprieur. Des tudes sismologiques de lObservatoire volca-nologique dHawaii ont en effet montr que des sismes prcdant les ruptions se produisent environ 60km au-dessous du Kilauea, ce qui suggre une origine du magma ce niveau (Eaton et Murata, 1960). De fait, la grande majorit des magmas prennent naissance entre 50 et 250km de profondeur. Certains magmas, cependant, se forment encore plus profondment dans le manteau (certains volcans remontent des fragments nodules de 400km de profondeur), voire mme au niveau de la limite manteau-noyau. Dautres magmas, au contraire, naissent plus superficiellement, aux dpens de la crote terrestre (20-30km de profondeur) mais ils constituent une minorit (chapitre 12). Pour les magmas mantelliques, deux ques-tions principales se posent: quelle est la constitution du manteau terrestre? et quels sont les processus de fusion?

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  • Chapitre 1 La fusion partielle du manteau

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    Dunod La ph

    otocopie non autorise est un dlit.

    1.2. la consTiTuTion du manTeau TerresTre

    La nature pridotitique du manteau

    La roche, longtemps reste nigmatique, qui constitue le manteau suprieur terrestre, fut baptise pyrolite, abrviation signifiant pierre (lithos) en pyroxnes et olivines, dorigine profonde (pyros = feu). Trois types principaux dapproche permirent sa connaissance. Des bombes volcaniques tout dabord, qui remontent, loccasion dexplosions particulirement violentes, des nodules de pridotite verte (Fig. 1.0), constitue en grande majorit de pridots (olivine), dorigine profonde. Par ailleurs, certains grands accidents tectoniques (Lherz dans les Pyrnes, Lanzo en Italie, Bni Boussera au Maroc), qui affectent le manteau, mettent jour des massifs de pridotite. Enfin, certaines mtorites, appeles chondrites, issues de la ceinture dastrodes situe entre Mars et Jupiter, qui tombent sur la Terre, ont une compo-sition suppose trs proche de celle de la Terre primitive. Des calculs permettent alors de retrouver la constitution du manteau (tableau1.1). Ces trois observations, distinctes, prouvent que le manteau a une constitution trs voisine de celle dune pridotite (photo couleur hors texte 32a) de type lherzolite (assemblage dune majo-rit dolivines avec des clinopyroxnes et des orthopyroxnes). Ringwood (1966) en a calcul la composition chimique, en supposant un mlange de 3/4 de pridotite et de 1/4 de basalte (tableau1.1).

    Green et Ringwood (1967a), partir de travaux exprimentaux, reconstiturent les assemblages de minraux en quilibre dans le manteau (Fig.1.2).

    Figure 1.2 Fusion de la pyrolite (daprs green et ringwood, 1967a, modifi).Champsrespectifsdelapyroliteplagioclase(pyr.pl.),delapyrolitepyroxne(pyr.px.)etdelapyrolitegrenat.Legothermeocaniqueetlegothermedesboucliersprcambrienssonttracs,legothermemoyensesituantentrelesdeux.Alorsquelesolidusdelapyrolitesche(traitplein)sesitueau-dessusdeceux-ci,celuidelapyrolitehydrate(pointill)recoupelegothermeentre100et150kmdeprofondeur,autorisantainsiunefusionpartielle.

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  • Premire partie Du manteau la chambre magmatique

    10

    Tableau 1.1 Analyses chimiques reprsentatives et normes CIPW de chondrite, de pyrolite et pridotite mantelliques et de basaltes primaires . (*) signifie que lensemble du fer a t analys, selon les cas, sous forme de FeO ou de Fe2O3.

    1 2 3 4 5 6 7

    Analyse en % en poids doxydes

    SiO2 48,00 45,16 44,59 48,28 45,70 42,00 49,78

    TiO2 0,13 0,71 0,06 0,22 0,05 4,23 0,68

    Al2O3 3,00 3,54 2,98 4,91 1,60 12,50 15,69

    Cr2O3 0,55 0,43 0,26 0,25 0,41

    Fe2O3 0 0,46 1,68 0 0,77 *14,33 2,73

    FeO *13,00 8,04 6,83 *9,95 5,21 0 9,20

    MnO 0,40 0,14 0,17 0,14 0,09 0,19 0,35

    MgO 31,00 37,47 41,10 32,53 42,80 9,59 7,79

    CaO 2,30 3,08 2,22 2,99 0,70 11,13 11,93

    Na2O 1,10 0,57 0,22 0,66 0,09 2,47 1,21

    K2O 0,13 0,13 0,05 0,07 0,04 0,93 0,29

    NiO 0,20 0,26

    P2O5 0,34 0,06 0,01 0,01 0,66 0,07

    H2O+ 0,09 1,28 1,11

    H2O 0,00 0,28

    total 99,95 99,99 100,26 100,00 99,29 99,14 99,72

    Norme CIPW

    quartz 0 0 0 0 0 0 2,12

    orthose 0,77 0,77 0,30 0,41 0,24 5,50 1,71

    albite 9,31 4,82 1,86 5,58 0,76 10,94 10,24

    anorthite 2,86 6,72 7,00 10,23 3,41 20,27 36,52

    nphline 0 0 0 0 0 5,40 0

    clinopyroxne

    *Ca 2,73 3,43 1,65 1,92 0 12,97 9,29

    *Mg 1,99 2,72 1,31 1,47 0 8,16 4,92

    *Fe 0,49 0,32 0,15 0,25 0 4,00 4,09

    orthopyroxne

    *Mg 29,01 16,32 16,64 31,92 30,61 0 14,48

    *Fe 7,15 1,94 1,97 5,54 2,44 0 12,03

    olivine

    *Mg 32,38 52,06 59,15 33,38 53,25 11,02 0

    *Fe 8,79 6,83 7,70 6,38 4,67 5,96 0

    magntite 3,14 2,04 2,02 2,41 1,43 3,12 2,82

    ilmnite 0,25 1,35 0,11 0,42 0,09 8,03 1,29

    apatite 0,74 0,13 0,02 0 0,02 1,44 0,15

    corindon 0,16

    TouteslesnormesonttcalculesensupposantunrapportFe3+/(Fe2++Fe3+)gal0,15.Onremarquelarichesseenolivinesetenpyroxnesnormatifsdesroches15,trsprochesdumanteauterrestre.

    (Voirlgendesdescolonnesdutableau1.1ci-contre.)

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  • Chapitre 1 La fusion partielle du manteau

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    Dunod La photocopie non autorise est un dlit.

    1. Compositionchimiquecalculedumanteauterrestre.Celle-ciestobtenuepartirde lanalysedunemtoritechondritiquemoyenne(quivalentlaterreprimitive),laquelleonasoustraitparcalcul32%dunemassecorrespondantaunoyauterrestrericheenFe,Ni,FeS(inMcBirney,1993).

    2. Pyrolitecalcule(3/4pridotite+1/4basalte)(ringwooD,1966).3. Pridotiteenenclavedansdubasalte,Itinome-gata,Japon(KushiroetKuno,1963).4. Pridotite(lherzolitespinel)enenclavedanslestufsdeSaltLakeCrater,Hawaii,utilisepourlestravaux

    exprimentauxdeKushiro(1973).5. Pridotite(lherzolitegrenat)deWesseltonMine,AfriqueduSud,utilisepourlestravauxdemysenet

    boettcher (1975).6. Basaltealcalinprsentantdescaractresprimaires,Mururoa,Polynsiefranaise(barDintzeffet al.,1986).7. Basaltetholiitique(moyennedetroischantillons)prsentantdescaractresprimaires, Japon(Kuno,

    1960).

    Ainsi on observe successivement: jusqu 10kbar (environ 30km), une pyrolite plagioclase (assemblage doli-vine, ortho et clinopyroxne et plagioclase);

    de 10 20-30kbar (jusqu 60-100km), une pyrolite pyroxne (olivine, ortho et clinopyroxne alumineux, spinelle). En effet, les plagioclases (ples albite et anorthite) ragissent avec lolivine selon des ractions du type:

    NaAlSi3O8 + Mg2SiO4 NaAlSi2O6 + 2 MgSiO3 (1) albite forstrite jadite enstatite

    CaAl2Si2O8 + Mg2SiO4 CaAl2SiO6 + 2 MgSiO3 (2) anorthite forstrite molcule de enstatite Tschermak

    au-dessous, pour une pression suprieure 20-30 kbar (plus de 100km), une pyrolite grenat (olivine, ortho et clinopyroxne, grenat). Lapparition du grenat (pyrope) rsulte de deux types de ractions chimiques possibles:

    MgAl2O4 + 4 MgSiO3 Mg3Al2Si3O12 + Mg2SiO4 (3) spinelle enstatite pyrope forstrite

    m MgSiO3 . n MgAl2SiO6 Mg3Al2Si3O12 solution solide denstatite pyrope alumineuse + (m 2) MgSiO3 . (n 1) MgAl2SiO6 (4) solution solide denstatite

    La raction (3) de formation du grenat aux dpens du spinelle a lieu entre 21kbar ( 1100C) et 24 kbar ( 1300C), la raction (4) entre 24 kbar ( 1300C) et 31kbar ( 1500C).

    Le modle prcdent est celui dun manteau anhydre thorique. En fait, une trs lgre hydratation de celui-ci autorise lexistence de phases hydroxyles, amphibole et mica phlogopite. Lamphibole reste stable jusqu 30 kbar, pression au-del de laquelle elle se transforme en pyroxne, grenat et eau. Le CO2, galement prsent en faible quantit, disparat au-del de 100km de profondeur. Apparaissent alors la magnsite (MgCO3) qui succde la dolomite (CaMg (CO3)2), le diamant (C) qui

    554027-Livre Bardinteff.indb 11 10/01/11 07:52

  • Premire partie Du manteau la chambre magmatique

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    remplace le graphite et mme du mthane (CH4). Dans le manteau profond, on a tabli une corrlation entre les transitions de phases minralogiques majeures et les discontinuits sismiques. Ainsi 400km, lolivine change en une structure de type spinelle. 670km (manteau infrieur), le spinelle se dcompose et lassemblage magnsio-wustite (Mg, Fe)O provskite (Mg, Fe) SiO3 minraux alumino-calciques se trouve en quilibre avec les pressions suprieures 240 kbar.

    Un manteau htrogne

    Le modle dun manteau terrestre en couches uniformes et homognes, par opposition une crote complexe et varie, reste trop simplificateur. Des donnes ptrologiques (diffrents types denclaves) et gochimiques (lments en traces, isotopes) dmon-trent lhtrognit horizontale du manteau. En outre, celui-ci est localement plus ou moins modifi par laction de fluides (phnomne de mtasomatose).

    En effet, certaines parties du manteau semblent enrichies en alcalins (K, Rb, Cs) et en terres rares lgres (lanthanides jusqu leuropium inclus) alors que dautres sont appauvries des degrs divers. Le manteau primitif, de type chondrite soppose au manteau appauvri, qui a donn naissance des liquides basaltiques. Le manteau suprieur passe alors dune composition lherzolitique (pri-dotite olivine, clinopyroxne, orthopyroxne) harzburgitique (pridotite olivine et orthopyroxne mais absence de clinopyroxne). Cette htrognit est confirme par ltude gochimique compare de diffrentes pridotites. Elle se manifeste aussi bien grande chelle (celle dun ocan, soit plus de 1000km) qu petite chelle (de lordre de 10m et parfois jusquau niveau du minral). Ainsi, une htrognit du manteau trs tendue, avec une signature anormale en Sr, Nd et Pb (anomalie Dupal ; Dupr et Allgre, 1983), occupe une grande partie de lhmisphre sud, entre lquateur et le 60e parallle sud.

    Les htrognits peuvent se former au cours de diffrents processus: forma-tion de la lithosphre ocanique, croissance de la crote continentale au dtriment du manteau, injection de sdiments dans les zones de subduction ; parfois elles subsistent depuis la diffrenciation primitive noyau-manteau-crote. Certaines htrognits du manteau rsultent de lassimilation incomplte de fragments de crote ocanique loccasion dune subduction. Ceux-ci, tirs, samincissent. Le manteau prendrait alors laspect de certains gteaux marbrs (marble cake; Allgre et Turcotte, 1986). La formation de telles htrognits ncessite, par ailleurs, une priode dun milliard dannes au moins (Allgre, 1987). Inversement, elles tendent tre gommes par le phnomne de convection mantellique et, dans une moindre mesure, par celui de diffusion, pour une chelle de temps galement de lordre du milliard dannes. Une sorte de comptition sinstaure entre les deux processus de formation et de disparition dune htrognit. Le problme reste pos entre une htrognit initiale qui aurait subsist jusqu aujourdhui, ou bien une ht-rognit cre par un processus gologique partir dun manteau prcambrien homogne. Les variations des rapports 129Xe/130Xe au sein du manteau, comme la mise en vidence dune migration de Pb du manteau vers le noyau, semble soutenir la premire hypothse. Mais lanalyse isotopique des chondrites dates de plus dun milliard dannes prouverait plutt linverse.

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  • Chapitre 1 La fusion partielle du manteau

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    Dunod La photocopie non autorise est un dlit.

    Un premier modle simple, deux ples, dun manteau stratifi verticalement a t propos par Schilling (1973). Un manteau suprieur, sige de mouvements de convections (Fig.1.1), appauvri en lments incompatibles et dgaz, soppose un manteau profond, vierge, voire mme enrichi en lments incompatibles. Une discontinuit sismique, situe 670km, limite les deux units. ce niveau, une limite thermique se dveloppe, due un transfert de chaleur de zones sous-jacentes.

    Figure 1.3 Modle mantellique plusieurs ples de Zindler et harT (1986). Lesanalysesisotopiques(nodymeetplombpourlexemplechoisi)debasaltesdles ocaniques (Aores, Hawaii, Kerguelen, Tahiti, etc.) (en sombre sur leschma) et deMORB (enpointill)montrent une largedispersion. Ils rsulte-raientdelafusionpartielledeplusieursplesmantelliques(DMMA,DMMB,EM1,EM2,HIMU)enproportionvarie.Les lignesdemlangepossiblesonttraces.Lemanteauleplusrpandu(PREMA)etlemanteausuprieurprimitif(PUM)sontgalementsitus(voirtexte).

    Le modle, plus complexe, de Zindler et Hart (1986; Fig.1.3), tabli partir dana-lyses isotopiques de basaltes ocaniques, met en vidence quatre ples mantelliques:

    un ple appauvri (DMM pour depleted mantle), mixte (DMMA et DMMB), source des basaltes de ride ocanique (MORB =Mid Ocean Ridge Basalt);

    un premier ple enrichi (EM1 pour enriched mantle), tmoin peut-tre du manteau primitif (exemple de Kerguelen);

    un deuxime ple enrichi (EM2), rsultant peut-tre de sdiments rinjects (exemple de larchipel de la Socit, Polynsie franaise);

    enfin un ple HIMU (rapport =238U/204Pb lev) encore plus nigmatique, reprsent dans quelques les seulement, Sainte-Hlne et en Polynsie fran-aise en particulier. Il pourrait sagir de fragments de lithosphre subducte do ont t extraits certains lments mobiles.

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  • Premire partie Du manteau la chambre magmatique

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    Le type de manteau le plus rpandu (PREMA =prevalent mantle, exemple dHawaii) correspond un mlange de ces quatre ples. Mais comme le prouvent les grandes variations chimiques des basaltes ocaniques, de nombreux magmas peuvent provenir de la fusion de certains de ces ples en proportion varie. On retrouve galement des tmoins du manteau suprieur primitif (PUM =primitive upper mantle), homog-nis la suite dune convection rapide due au fort flux gothermique rgnant alors, et prsentant des analogies avec les chondrites.

    1.3. mcanisme de la Fusion parTielleLes magmas prsentent une grande varit chimique et ils diffrent tous sensi-blement du manteau. On ne peut donc raisonnablement pas invoquer une fusion totale de ce dernier, qui ne donnerait que quelques types de magmas chimisme de pridotite. Le mcanisme gnrateur est en fait une fusion partielle. Seule une fraction du manteau fond, dans laquelle entrent prfrentiellement les lments hygromagmatophiles, qui ont une attirance pour les phases fluides magmatiques ou hydrates. Ces lments sont les alcalins (K, Rb, Cs), le lanthane et les lanthanides, Zr, Hf, Nb, Ta, U, Th et, dans une moindre mesure, les alcalino-terreux (Sr, Ba). Ils se concentrent dans la phase fluide, alors que tous les autres y entrent en proportion variable et relativement faible (Fig.1.4). Les lments hygromagmatophiles, qui ont, inversement, peu daffinit pour les minraux, sont galement appels incompatibles. Le taux de fusion (quantit de la phase liquide magmatique finale/quantit de la phase solide mantellique initiale) conditionne la composition chimique du magma.

    lmenthygromagmatophile

    X = taux de fusion

    magma

    rsidu

    manteausuprieur

    Figure 1.4 Schma de la fusion partielle du manteau suprieur donnant naissance un magma primaire .

    X=tauxdefusion=quantitdemagmafinal/quantitdemanteau initial.Unlmenthygromagmatophile thoriqueparfait (carrnoir)passe intgralementdanslaphasefluideensyconcentrant1/Xfois.

    Un faible taux de fusion donnera un magma trs enrichi en lments hygromagma-tophiles et chimisme alcalin. Au contraire, ces mmes lments seront davantage dilus dans un magma issu dun taux de fusion plus lev. On comprend donc pour-quoi le manteau peut donner naissance une grande quantit de magmas diffrents.

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  • Chapitre 1 La fusion partielle du manteau

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    Dunod La photocopie non autorise est un dlit.

    Le dosage des lments hygromagmatophiles dans une pridotite tmoin du manteau et dans une lave tmoin dun magma permet de calculer le taux de fusion. Celui-ci atteint au maximum 20 voire 30% pour les sries volcaniques actuelles. Les koma-tiites, laves anciennes trs magnsiennes (MgO >20%), connues essentiellement dans les boucliers prcambriens, correspondent sans doute un taux de fusion de lordre de 40% ou plus. Mais cette poque, les csonditions thermodynamiques lintrieur de la plante et la godynamique globale taient bien diffrentes.

    Pourquoi le manteau solide fond-il partiellement certains endroits? Ceci peut rsulter dune augmentation de temprature dans une zone dtermine, de taille variable parfois relativement rduite (ainsi au niveau des points chauds ou hotspots, zones danomalie thermique positive, dun diamtre de quelques centaines de kilo-mtres, encore mal connues; chapitre 12, 5). Une baisse de pression (ouverture ocanique et remonte du manteau) peut conduire au mme rsultat. En effet, lors dune remonte rapide, la vitesse de quelques centimtres par an au niveau dune ouverture ocanique, le manteau na pas le temps de se refroidir par conduction ther-mique. Selon le modle de White et McKenzie (1989), un manteau ascendant dune temprature moyenne gale 1340C commencerait fondre en atteignant 50km de profondeur et en parvenant la surface, 25% de la roche serait ltat liquide. Green et al. (2001) pensent que la fusion partielle du manteau se fait plutt aux alentours de 1430 C, quel que soit le contexte godynamique.

    Les fluides jouent par ailleurs un rle majeur en abaissant le point de fusion. La figure 1.2 montre que le solidus1 de la pyrolite sche reste constamment au-dessus du gotherme2. Toute fusion reste alors impossible. Pour une pridotite hydrate, le solidus sabaisse considrablement. Il recoupe alors le gotherme entre 100 et 150km. Une fusion, partielle, devient possible.

    Le liquide magmatique, intercristallin, peut se rassembler localement si les pores communiquent, un peu comme ceux dune ponge.

    1.4. les magmas primairesOn appelle magma primaire un liquide directement issu du manteau suprieur par fusion partielle, qui na pas encore subi de modifications, soit par cristallisation de minraux, soit par contamination (OHara, 1965). Mais en gnral, les processus ptrogntiques modifient trs rapidement ces magmas primaires, qui sont donc difficiles apprhender. Il sagit de liquides basiques, riches en Mg (8-12% MgO), Ca, Fe et aussi en Al, Cr, Ni. Un rapport 100Mg/Mg +Fe2+proche de 70 tmoigne du caractre primaire dun liquide magmatique. Green et al. (1974) ont en effet calcul ce rapport thorique pour un magma issu de la fusion partielle dune prido-tite contenant des olivines trs magnsiennes (Fo 88-90).

    Plusieurs types de magmas prennent naissance partir du manteau selon les conditions thermodynamiques (temprature, pression cest--dire la profondeur de gense) qui y rgnent et qui conditionnent le degr de fusion partielle. Les travaux de

    1. Solidus = limite thermique au-dessus de laquelle le matriel fond en partie.2. Gotherme = augmentation de la temprature terrestre avec la profondeur.

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  • Premire partie Du manteau la chambre magmatique

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    Kuno (1960), de Kushiro et Kuno (1963) et de Green et Ringwood (1967b) en parti-culier ont port sur cet aspect. Kushiro (1972) a insist sur linfluence des fluides, puis Mysen et Boettcher (1975 a et b) ont mis en vidence les rles respectifs de H2O et CO2. Cl et F sont galement prsents.

    Les donnes exprimentales montrent quen fonction de ces paramtres, trois types principaux de magmas primaires, tous de chimisme basique, peuvent prendre naissance:

    en contexte douverture ocanique, la LVZ remonte sous la dorsale, la pression devient moyenne faible (< 20 kbar, souvent moins). La remonte adiabatique3 du manteau suffit expliquer sa fusion partielle. Les MORB (Mid Ocean Ridge Basalt = basalte tholiitique) prennent naissance au dtriment dun manteau appauvri en lments incompatibles par un fort taux de fusion partielle (20%). Le rapport XH2O =H2O/CO2 reste intermdiaire: 0,4-0,6 soit 40 60% H2O et donc 60-40% CO2;

    en contexte intraplaque (ocanique ou continental), des basaltes se forment grande profondeur et forte pression (> 20 kbar), grce une anomalie thermique locale (point chaud) souvent favorise par une distension associe. Le taux de fusion, variable selon les cas, conduit aux basaltes alcalins et aux basanites (taux faible de lordre de 5%), plus rarement aux tholiites (taux plus lev, jusqu 20%). Ainsi dans les les ocaniques on distingue les OIB (Ocean Island Basalt =basalte alcalin) et les OIT (Ocean Island Tholeiite = basalte tholiitique). Parfois la transition entre les deux sobserve (Hawaii, Macdonald et Katsura, 1964; Fangataufa, Guillou et al., 1990; discussion in Bardintzeff et al., 1994). Le rapport XH2O est relativement faible, 0,2-0,4 pour les basaltes alcalins et 0,5 pour les basanites;

    enfin les basaltes andsitiques (andsites s.l.), rsultant dun taux de fusion de lordre de 10%, prennent naissance en contexte de subduction. Les processus ptrog-ntiques y sont trs complexes, la crote intervient parfois. Les fluides jouent un rle majeur. Le rapport H2O/CO2 reste lev (XH2O =0,6-0,75). Des tholites peuvent galement se former en de tels contextes.Mais il apparat, partir des donnes isotopiques du thorium en particulier

    (Allgre et Condomines, 1982), que la gense de tel ou tel magma dpend autant des diffrentes conditions thermodynamiques et du degr de fusion partielle que des diffrences de composition de la source mantellique. Les OIB pourraient provenir danciens fragments de lithosphre ocanique stocks la limite ther-mique manteau suprieur-manteau infrieur (voire selon certains auteurs limite manteau-noyau) puis remonts 1 ou 2milliards dannes aprs sous forme diapi-rique et fondus partiellement dans un niveau plus superficiel du manteau suprieur (Ringwood, 1982). Selon une autre hypothse, ces fragments resteraient parpills diffrentes profondeurs au sein du manteau suprieur avant de remonter et de fondre. Quoi quil en soit, la situation de ces htrognits correspondrait celle des points chauds.

    3. Remonte adiabatique = sans change de chaleur, dnergie et de matire.

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  • Chapitre 1 La fusion partielle du manteau

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    Dunod La photocopie non autorise est un dlit.

    Plus rarement, des magmas primaires, intermdiaires diffrencis (hawaiite, mugarite, benmorite, chapitre 3, 3), peuvent prendre naissance par fusion partielle du manteau (Green et al., 1974). Enfin, dans des cas exceptionnels, un taux de fusion trs faible du manteau (moins de 0,3%) en prsence de CO2 est invoqu pour expliquer la gense de magmas particuliers (nphlinites trs pauvres en silice) lorigine de certaines carbonatites, laves carbonates (chapitre 5, 6; revue in Bell, 1989; Woolley et Kjarsgaard, 2008; Fischer et al., 2009; n spcial J. Af. Earth Sc., 25, 1, 1997 et J. Asian Earth Sc., 18, 2, 2000).

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    2 la chambre magmaTique : raliTs eT modlisaTions

    Il nest dsir plus naturel que le dsir de connaissance. Nous essayons tous les moyens qui nous y peuvent mener. Quand la raison nous faut, nous y employons lexprience.

    Montaigne, Les Essais

    Ce qui est simple est toujours faux, Ce qui ne lest pas est inutilisable.

    PaulValry

    2.1. la monTe du magma primaireUn magma (analyse tableau1.1) est un liquide silicat contenant une dizaine dautres lments majeurs (Al, Ti, Fe, Mg, Mn, Ca, Na, K, P) et quantit dlments en trace (teneur infrieure 0,1%, souvent beaucoup moins). Il contient galement des fluides en solution, de leau essentiellement. Trois paramtres influencent ses proprits: sa temprature, sa pression et sa composition chimique. Sa viscosit et sa densit, qui conditionnent son comportement, en dcoulent.

    Les gouttelettes de liquide magmatique scoulent le long des artes des grains dolivine du manteau ou peuvent se dplacer travers la structure mme de lolivine par un mcanisme continu de dissolution et cristallisation du minral hte comme lont dmontr Schiano et al. (2006). Elles se rassemblent peu peu pour former un magma primaire, de composition basaltique s.l., de densit (2,9 environ) infrieure celle du manteau encaissant (densit moyenne de 3,3). Ce magma va donc monter, sous forme dune bulle lgre, un peu la faon dun diapir de sel. En fait, le rsidu mantellique devient lui aussi plus lger, en particulier cause de la fusion du grenat. Il remonte donc pro parte avec le magma avant de se sparer plus haut (McBirney, 1993). Notons qu ce stade, les fluides, ltat dissous dans le magma, ne jouent aucun rle dans sa monte.

    un niveau structural suprieur, rigide et cassant, les conditions mcaniques changent. Dans un contexte localement distensif et la faveur de fractures, le magma

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  • Chapitre 2 La chambre magmatique : ralits et modlisations

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    Dunod La photocopie non autorise est un dlit.

    pourra continuer son ascension vers la surface. Dans la majorit des cas, lascen-sion sarrte en cours de route pour des raisons diverses (modification tectonique ou thermique locale, variation du taux de production magmatique, augmentation de la densit relative magma/encaissant qui limite la pousse dArchimde). Cet arrt a souvent lieu la limite entre le manteau et la crote (30km de profondeur environ) ou bien au sein mme de celle-ci (entre 30 et 10km). Le magma stagne dans un rseau de fractures. Aprs un laps de temps donn (quelques sicles ou millnaires), les fractures sanastomosent. Une poche, remplie de magma, se forme puis sagrandit par effondrements. laplomb des volcans importants, dun ge de plusieurs centaines de milliers dannes, existe une vritable chambre magmatique dun volume de lordre de plusieurs dizaines ou centaines dekm3.

    Dans cette chambre, le magma sjourne parfois plusieurs sicles ou millnaires. Il y subit des transformations importantes avant de reprendre son ascension lors dune ruption. Souvent le magma ne peut jaillir immdiatement, par exemple cause dun bouchon volcanique. Il stagne sous ldifice faible profondeur (quelques kilomtres au maximum) dans un rservoir de petite taille, constitu souvent dun rseau de fractures communicantes. Il sagit de la dernire tape avant lruption (chapitre 6).

    Dans certains cas assez rares de volcanismes fissuraux, aucun obstacle ne semble sopposer une monte directe du magma du manteau la surface, quil peut atteindre sans subir de modifications majeures. Les magmas, mis succes-sivement par le mme volcan, ont alors un chimisme trs proche lun de lautre. Certains difices volcaniques (Devs, Etna) sont ainsi connus pour luniformit de leurs laves. Le volcanisme fissural du Devs semblerait tmoigner de labsence de chambre magmatique profonde. Dans le cas de lEtna, plus complexe, lexistence dune telle chambre nest pas exclue mais le magma ny resterait que durant un laps de temps trs court.

    Des chambres magmatiques profondes ont t mises en vidence par sismique. Les nouvelles mthodes de tomographie sismique, permettant dobtenir des images en trois dimensions, donne une premire bonne ide de la forme des chambres magma-tiques actuelles et du pourcentage de matriel fondu quelles renferment. Dautres chambres, anciennes, ont cristallis en profondeur sous forme dun massif de roches plutoniques, grenues, essentiellement des gabbros, plus ou moins stratifies (layered intrusions; Cawthorn, 1996). Lrosion ultrieure a pu les porter laffleurement. Les chambres magmatiques fossiles ainsi mises jour restent cependant rares. On en connat deux, datant de lre tertiaire, lune au Groenland (complexe du Skaergaard), lautre en cosse (complexe de Rhum). Dautres existent, notamment pour des priodes plus anciennes, mais la plupart ont subi postrieurement des dformations.

    2.2. le massiF du skaergaard (groenland)

    Gologie et minralogie

    Le massif du Skaergaard se situe dans la pninsule du mme nom, sur la cte est du Groenland. Il doit sa clbrit ltude dtaille de Wager et Deer (1939). Il sagit

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  • Premire partie Du manteau la chambre magmatique

    20

    dun complexe de roches grenues, de forme elliptique (117km, correspondant une superficie denviron 50km2 et un volume estim 500km3, soit une taille relativement modeste). Sa mise en place date du Palocne, il y a 55Ma (millions dannes) environ, durant lpisode magmatique associ louverture de lAtlan-tique nord. Le magma du Skaergaard a peut-tre atteint la surface cette poque par un cratre ou une caldeira rod depuis. Lensemble grenu, intrusif dans un encais-sant constitu de roches mtamorphiques (gneiss prcambriens et amphibolites), de quelques sdiments snoniens, dimportantes coules et scories basaltiques, est recoup de filons intrusifs (sills et dykes; chapitre 7, 4) basiques. Une bordure fige, de 1m dpaisseur environ, constitue de roches structure microgrenue, entoure le massif au contact de lencaissant. Sa constitution reflte celle de len-semble de lintrusion, gabbroque tendance tholiitique.

    Figure 2.1 Le massif grenu du Skaergaard (Groenland), chambre magmatique fossile : coupe schmatique E-W (vue vers le Sud)

    (daprs McBirney, 1993, modifi).

    Le relief glaciaire accident ne rvle le pluton quen partie mais permet nanmoins de ltudier sur 3,5km dpaisseur. On distingue quatre parties (Fig.2.1): (1) une srie stratifie, qui a cristallis partir du bas, (2) une srie de bordure suprieure, qui a cristallis partir du toit, (3) une srie de bordure latrale, qui a cristallis partir des murs et enfin (4) une partie cache, qui naffleure pas mais dont on a une ide daprs des donnes gophysiques. La srie stratifie et la srie de bordure suprieure convergent en un horizon sandwich, o se solidifie le dernier magma. Le massif, en forme dentonnoir dissymtrique, prsente une stratification densemble nette. En effet, se succdent du sommet la base (Wager et Brown, 1967):

    la srie de bordure suprieure, dune paisseur de 1000m, constitue de gabbros et de ferrodiorites, recoupe de filons (dykes et sills) de granophyres et contenant de nombreuses enclaves gneissiques (xnolithes) issues de lencaissant;

    la srie stratifie:

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  • Chapitre 2 La chambre magmatique : ralits et modlisations

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    la zone suprieure (920m dpaisseur) avec des ferrogabbros olivine ferreuse et quelques filons de granophyre;

    la zone mdiane (780m) avec des gabbros sans olivine; la zone infrieure (800m) avec des gabbros olivine magnsienne; la zone cache probablement forme de roches basiques ultrabasiques.

    Paralllement, les minraux montrent une volution chimique. Lolivine subit les variations les plus spectaculaires depuis une composition assez magnsienne (fors-trite 67) la base de la srie stratifie de la fayalite pure (ferreuse) au niveau de lhorizon sandwich. De mme, les clinopyroxnes senrichissent en fer (dune teneur en ferrosilite de lordre de Fs20 jusquau ple pur hedenbergite, la teneur en wollas-tonite restant comprise entre Wo35 et Wo40), ainsi que les orthopyroxnes de type pigeonite (Fs18 Fs45) alors que les plagioclases senrichissent en sodium (An66 An30). Enfin le quartz modal apparat dans la partie suprieure. Les rles relatifs de lenrichissement en fer et/ou en silice restent discuts (McBirney, 1989; Hunter et Sparks, 1987, 1990). Ces volutions chimiques se sont produites au cours des dix ou vingt milliers dannes de refroidissement et de solidification du magma.

    La stratification est un fait qui sobserve dans tous les plutons de ce type. diff-rentes chelles, il convient de distinguer la stratification rythmique, bien visible par lalternance des lits plus ou moins sombres (mlanocrates) et la stratification cryptique, invisible, reflet de lvolution chimique et minralogique progressive de la base au sommet de lintrusion. En outre, une zonation latrale, tant chimique que minralogique, se surimpose la zonation verticale. Les parties marginales senrichissent en FeO, TiO2, K2O et P2O5, avec des plagioclases plus albitiques et fortement zons et des minraux mafiques plus riches en fer (McBirney, 1989).

    Processus ptrogntique

    La mise en place dun tel pluton a t longuement discute. On saccorde mainte-nant sur la monte dun magma basaltique en une seule phase, dplaant vers le haut une partie de lencaissant. La bordure fige, priphrique, tmoigne du chimisme de lensemble. Lanalogie avec une chambre magmatique apparat.

    Les processus de cristallisation et de sdimentation restent davantage discuts. Le phnomne de cumulation a t longuement retenu: au fur et mesure de leur cristallisation, les minraux saccumulent diffrents niveaux selon leur densit respective. La densit des roches dcrot de la base (3,36) au sommet (3,05). Les figures de litage (variation rythmique) semblent en effet tmoigner dune sdi-mentation magmatique, dans laquelle le facteur gravit, entre autres, joue un rle important. La variation cryptique tmoigne de lvolution du liquide rsiduel, qui entre pour 20% dans la constitution des roches.

    Ce mcanisme, simple, a t critiqu par McBirney et Noyes (1979). En effet, comment expliquer la prsence de nombreux plagioclases relativement lgers la base du complexe et celle de minraux ferromagnsiens denses son sommet? Il convient plutt de considrer une cristallisation in situ de lensemble. Le front de cristallisation, partir des bords, du fond ou du toit, avance plus vite que la vitesse de chute ou de remonte des cristaux forms. Par ailleurs, la formation de cristaux

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  • Premire partie Du manteau la chambre magmatique

    22

    est lorigine de modification rhologique du magma, qui passe dun tat newto-nien, faible viscosit, celui dun liquide non newtonien, puis dun solide lastique pour une grande proportion de cristaux. La stratification tmoigne alors de vitesse relative de diffusions chimique et thermique en cours de refroidissement. La gravit joue nanmoins un rle dans la formation des nombreux lits secondaires (variation rythmique). Enfin, une redistribution tardive de certains composants, par circulation des liquides magmatiques interstitiels et des fluides, conduit aux variations latrales observes. En dfinitive, la stratification du massif dpend autant de processus dyna-miques (circulation de magmas) que non dynamiques (compaction, nuclation et croissance des cristaux) (McBirney, 1995; McBirney et Nicolas, 1997).

    Le massif du Skaergaard peut donc tre considr comme une chambre magmatique fige. Son volume, sa forme, sa composition chimique nous clairent sur les processus, qui se droulent en profondeur. Il apparat en fait que les chambres magmatiques prsentent des variations importantes de volume et de forme, celle-ci parfois aplatie (discode, plus large que haute), voire concave dans la partie infrieure (Fig.2.2).

    Figure 2.2 Relations entre chambre magmatique, complexe annulaire et caldeira.

    Leschellesverticaleethorizontalesontidentiques(Bonin,1986).

    2.3. les complexes annulairesLa prsence dune chambre magmatique contenant un liquide, au sein de la lithos-phre solide, cre une zone de faiblesse. La lithosphre cassante sus-jacente peut seffondrer partiellement selon des fractures en forme de cloches. Le magma, qui remplit ces espaces, y cristallise en roches grenues et forme des filons courbes (ring-dyke), dune centaine de mtres dpaisseur. Le processus se reproduit plusieurs fois pour aboutir la formation dun vritable complexe annulaire (revue in Bonin,

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  • Chapitre 2 La chambre magmatique : ralits et modlisations

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    Dunod La photocopie non autorise est un dlit.

    1986). La composition chimique des filons (gabbro, granite) reflte celle des liquides des diffrents niveaux de la chambre magmatique.

    Leffet des effondrements peut se rpercuter jusquen surface o apparat une structure circulaire typique: une caldeira (chapitre 8, 8). Le diamtre de la caldeira comme celui du complexe annulaire, correspond une dizaine de kilomtres environ (Fig.2.2). Une rosion de plusieurs kilomtres peut mettre ultrieurement le complexe laffleurement. De nombreux cas sont dcrits dans le monde (Corse, Afrique, etc.).

    Lexemple de Tahiti met bien en vidence les relations plutonisme/volcanisme dune part et complexe annulaire/laves et tephra dautre part (Fig. 2.3a et b ; Bardintzeff et al., 1988; Bonin et Bardintzeff, 1989).

    Figure 2.3 Le massif grenu de la caldeira de Tahiti-Nui (bardinTZeFF et al., 1988).

    (a)Cartegologique.(b)Coupeinterprtativeschmatique.chelleshorizontaleetverticaleidentiquesentreellesetcelledelacartea.

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  • Premire partie Du manteau la chambre magmatique

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    Tahiti est constitue de deux grands volcans jumeaux, Tahiti-Nui et Taiarapu, auxquels il convient dajouter un troisime, Taravao, situ au niveau de listhme joignant les deux presqules (Lotot et al., 1990). Un stade de formations de caldeiras a eu lieu il y a un million dannes environ et lactivit volcanique semble stre termine il y a 200000 ans environ.

    Le massif plutonique elliptique dAhititera, dune superficie de 2,1km2 se situe au sein de la caldeira centrale (diamtre 8km) de la presqule de Tahiti-Nui. Son alti-tude (759m) reste bien infrieure au point culminant de lle, lOrohena (2241m) en bordure de caldeira.

    Deux lignes de roches grenues (plutoniques) se distinguent. La ligne fortement sous-sature conduit des thralites (43%) aux essexites (4,8%) et aux synites nphliniques (3,1%; syenite-ne sur la figure 2.3) et renferme une paragense sympto-matique feldspathodes exprims. La ligne lgrement sous-sature est constitue de gabbros (35%) de monzonites (11,6%) et de synites (1,3%). En outre, des cumulats de pyroxnites, correspondant aux roches cumulatives les plus lourdes, se retrouvent en faible quantit (1,2%).

    Une coupe de lensemble (Fig.2.3b) montre que ce massif correspond au toit de deux units annulaires. La srie faiblement sous-sature gabbroque, en position stratigraphique infrieure, sest mise en place en premier puis a subi une rtromor-phose (prsence dune paragense pidote) lors de la mise en place ultrieure de la srie fortement sous-sature thralitique. Les synites et synites nphliniques apparaissent sous forme de filons tardifs recoupant lensemble. Les cumulats de pyroxnites se retrouvent la base de chaque unit.

    La composition chimique moyenne du massif grenu (45% SiO2 et 7% de nph-line normative) sidentifie tout fait celle des coules de basalte de lle. Les laves de Tahiti voluent, pour la plus grande majorit dentre elles, vers un ple sous-satur (tphrite et phonolite, quivalents laviques des essexites et des synites nphliniques). La srie sature, rduite, sarrte au stade mugarite (quivalent des monzonites) alors que les rhyolites, quivalentes des synites, manquent.

    partir de ces donnes de terrain, une modlisation devient possible.

    2.4. la chambre magmaTique : sysTme ouverT ou Ferm ?

    Le magma, sil stagne suffisamment longtemps dans la chambre magmatique, va subir des modifications importantes car tous les paramtres thermodynamiques vont varier.

    Les atomes migrent sous linfluence de la gravit. Une vritable stratification magmatique peut stablir, par densit dcroissante, de la base au sommet de la chambre. Le massif plutonique du Skaergaard illustre parfaitement ces processus. Par ailleurs, la temprature de la chambre magmatique sabaisse en raison des phnomnes de conduction au contact de lencaissant. Le liquidus de certains min-raux va tre atteint. Les premiers cristaux se forment alors aux dpens du liquide magmatique. Selon leur densit, ils vont soit saccumuler dans le fond de la chambre (phnomne de cumulation), soit migrer vers la partie suprieure (phnomne de flottation). Les minraux sombres (mlanocrates), basiques (riches en Mg, Ca, Fe),

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  • Chapitre 2 La chambre magmatique : ralits et modlisations

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    Dunod La photocopie non autorise est un dlit.

    denses, entrent dans la premire catgorie. Ils ont un comportement bien diffrent des minraux clairs (leucocrates), alcalins (riches en Na, K) et plus lgers. Les min-raux (phase solide) incorporant prfrentiellement tel ou tel lment, il sensuit une modification de la composition chimique de la phase liquide initiale.

    Les fluides, ltat dissous dans le magma, ne peuvent pas le rester si le seuil de solubilit est modifi par les variations des diffrents paramtres. On assiste alors un phnomne de vsiculation: des petites bulles prennent naissance puis grossissent par coalescence et se rassemblent dans la partie suprieure de la chambre. Ce processus prsente certaines similitudes avec celui de la cristallisation car certaines phases se soustraient lensemble.

    Les densits et viscosits sont modifies et des gradients verticaux apparaissent dans la chambre. Les interactions entre tous ces paramtres thermodynamiques apparaissent multiples comme le montre la figure 2.4a.

    Figure 2.4 Les interactions thermodynamiques au sein dune chambre magmatique (bardinTZeFF, 1988).

    (a)Chambre assimile un systme ferm (T= temprature ; P=pression).(b)Chambreassimileunsystmeouvertentremanteauetcrote.

    La chambre magmatique peut sassimiler en premire approximation un systme ferm tant que lensemble volcanique reste inactif. En fait, si les changes de matire sont absents, les changes thermiques existent dj.

    Lors de chaque crise, profonde ou superficielle, le systme souvre (Fig.2.4b). loccasion dune ruption, la chambre se vidange en partie seulement, au maximum au 1/10 de son volume. Inversement, une alimentation par un magma primaire dorigine mantellique compense ce dpart pro parte. Une partie du liquide magmatique cristallise sous forme de roches plutoniques. Des changes de fluides ont lieu, en liaison ventuelle, au niveau superficiel, avec un champ gother-mique. Ceci se traduit galement par un transfert de chaleur de type convectif, qui sajoute au simple processus de conduction. Priodiquement, la chambre magma-tique se comporte en systme ouvert entre manteau et crote.

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  • Premire partie Du manteau la chambre magmatique

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    2.5. vers une modlisaTion de plus en plus prcise la lumire des observations de terrains, des tentatives de modlisation dune chambre magmatique, ont t faites par expriences et par calculs. Comme pour toute exprience de ce type, se pose le problme de la rduction de chaque facteur (diff-rence de temprature, viscosit) en proportion avec la taille et la forme du modle. Il sagit aussi de favoriser les observations en choisissant des liquides colors ou indices de rfraction bien diffrents.

    Les travaux de A.R. McBirney (1980) luniversit de lOregon, apparaissent exemplaires. Il utilise des rservoirs transparents (Fig.2.5), par exemple dune taille de quelques dizaines de centimtres, de formes varies pouvant ventuellement rappeler celle de lintrusion du Skaergaard. Un systme de circulation deau froide permet den refroidir le sommet et de crer ainsi un gradient vertical de temp-rature dcroissant partir de la base. Le liquide choisi est une solution aqueuse de carbonate de sodium (Na2CO3) proche de la saturation. En effet, ce sel forme un systme binaire simple avec leau, avec la prsence dun eutectique 2,1C pour 6% de sel dans leau. Dans une solution de dpart plus riche en Na2CO3 que leutectique, la cristallisation de sel de carbonate de sodium va laisser un liquide plus lger. Au contraire, dans une solution plus dilue, aprs prcipitation des cris-taux de glace, le liquide devient plus dense. Le premier cas se rapproche dune chambre magmatique calco-alcaline, le second dune chambre de type tholiitique tel le Skaergaard.

    Figure 2.5 Exprience de modlisation de chambres magmatiques. (a)Rservoirtransparentde604010cm,mimantunechambredetypecalco-alcalin, contenant une solution saturede carbonatede sodium.Un systmerfrigrantpermetdenrefroidirlapartiesuprieure.Rapidement,unezonestable(z.s.)de8cmdpaisseursurmonteunezoneconvective (voir texte) (daprsMcBirney,1980).(b)Modle(554510cm)simulant,parsaforme,lecomplexeduSkaergaard (chambrede type tholiitique) selonunecoupeest-ouest (voirFig.2.1).Unecouchedeglace,plaquecontrelesparoissuprieureet latralesreprsentelencaissantgneissique.Troiszonessediffrencientaucoursdelex-prience:unezonesuprieure liquiderelativement instable,unezonemdianefortementconvectiveetunezone infrieuredaccumulation (daprsMcBirney,1993).

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  • Chapitre 2 La chambre magmatique : ralits et modlisations

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    Par transparence, il est possible de noter et denregistrer toute prcipitation de cristaux, les variations dindice de rfraction du liquide, tmoins de contraste de densits et dobserver les ventuelles figures de stratification et les mouvements deconvection dont il pourrait tre le sige. Des prlvements permettent de mesurer certains paramtres (temprature, densit) diffrents niveaux.

    Lexemple de la figure 2.5a correspond une chambre calco-alcaline. Entre 20C, temprature ambiante du dbut de lexprience, et 8C, temprature locale la plus basse atteinte, la solubilit du sel dans leau dcrot de 17% 10% (cest--dire que des cristaux de sel prcipitent) et la densit de la solution diminue de 1,20 1,10. Peu de temps aprs le dbut de lexprience, des cristaux prcipitent au contact des parois suprieures froides. Certains tombent au fond du rservoir mais la plupart restent contre les parois et forment une couche allant spaississant. Paralllement, un liquide relativement peu dense, issu de cette zone de cristaux, se rassemble dans la partie suprieure du rservoir. Aprs trois heures, un niveau bien visible spare deux zones. La partie suprieure de 8cm dpaisseur, lgre et stable, se caractrise par un gradient rgulier et croissant de haut en bas de temprature et de densit. La partie infrieure, sige de mouvements de convection, a une temprature et une densit constante.

    Huppert et Turner (1981) ont modlis le processus de remplissage dune chambre magmatique par sa base et les effets qui en dcoulent. Ils utilisent une solution, temprature leve, de KNO3, surmonte par du NaNO3 ou du K2CO3. En se refroi-dissant, la solution de KNO3 devient plus lgre par prcipitation de KNO3 et se mlange aux liquides du dessus en provoquant de forts mouvements de convection. De mme, un magma basique dense, qui sinjecte dans une chambre magmatique remplie de liquide plus lger, peut induire, dans certaines conditions, un mlange convectif puissant. Inversement, des couches stagnantes peuvent se former la base dune chambre convective et se soustraire ainsi tout mlange (Jaupart et al., 1984).

    Les implications gologiques de ces modles sont immdiates. Par simple refroi-dissement de ses parois, lorigine de la cristallisation de phases minrales, une chambre magmatique devient le sige de mouvements convectifs. Au niveau des bords de la chambre, les effets de la diffusion thermique rapide et de la diffu-sion chimique relativement lente se combinent dans des sens diffrents selon les contextes. La couche limite acquiert un comportement propre. Dans le cas dune chambre calco-alcaline, le magma situ prs du bord a tendance monter, alors quau contraire il descend vers le fond dune chambre tholiitique (McBirney et al., 1985). Par ailleurs, deux liquides au moins peuvent se sparer: lun lger (riche en silice) surmonte lautre, basique, plus dense. Des estimations de transferts de masse montrent quune chambre magmatique peut devenir stratifie en lespace de quelques milliers dannes. Parfois, deux chambres magmatiques, situes des profondeurs diffrentes, sont mises en vidence, compliquant encore toute tentative de modle (Fig.5.3).

    Quoi quil en soit, les liquides, qui sjournent parfois longuement dans la chambre magmatique, sont le sige de phnomnes complexes, qui vont faire lobjet dtudes dtailles dans les chapitres suivants.

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  • 28

    3 la crisTallisaTion FracTionne eT la diFFrenciaTion

    Le volcan steignit, et le feu prissant Voulut en vain y rendre un combat impuissant ;

    llment vainqueur il cda le cratre, Et sortit en fumant des veines de la Terre.

    AlfreddeVigny,Le Dluge

    La vrit ne triomphe jamais mais ses ennemis finissent par mourir.

    3.1. ordre de crisTallisaTion eT indice de diFFrenciaTion

    Un liquide magmatique, qui se refroidit, ne se comporte pas comme un corps pur, qui devient solide une temprature donne. Au contraire, il se solidifie dans un intervalle de tempratures. la temprature t1, le liquidus est atteint et les premiers cristaux apparaissent au sein du magma. Leur proportion augmente jusqu la temp-rature t2 (infrieure t1), niveau du solidus, o tout le matriel est ltat solide.

    Le liquidus et le solidus peuvent tre reprsents sur un diagramme binaire par deux courbes limites, qui dpendent de la composition chimique du magma et des conditions thermodynamiques (exemple de solidus, Fig. 1.2). Dans le domaine limit par ces deux courbes, du magma, liquide, et des cristaux, solides, coexistent. Leurs compositions voluent constamment.

    Dans une roche volcanique, on distingue classiquement les phnocristaux, visibles lil nu, dune taille suprieure 0,1mm et pouvant atteindre plusieurs centimtres, des microlites nettement plus petits (chapitre 11, 1). Les premiers ont cristallis en profondeur, souvent dans la chambre magmatique, des pressions de plusieurs kilobars. Leur forme gomtrique (cristaux automorphes) tmoigne dune croissance progressive, dans le milieu liquide. Les microlites, en forme de baguette le plus souvent, sont apparus plus tardivement, lors du refroidissement occasionn par la monte du magma en surface. Le reste de la lave fige en un verre intersti-tiel, qui rvle frquemment une structure cryptocristalline, primaire ou secondaire

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  • Chapitre 3 La cristallisation fractionne et la diffrenciation

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    Dunod La photocopie non autorise est un dlit.

    (recristallisation), aux rayons X.Les microlites et le verre constituent la msostase de la lave.

    Les premiers cristaux apparatre dans le magma ont une composition chimique diffrente de celui-ci. Il sagit, en gnral, de minraux basiques, ferro-magnsiens (mafiques ; riches en magnsium et fer), tels lolivine et le pyroxne. Cette nouvelle phase solide contenant certains lments en proportion plus importante que le magma, on comprend aisment que la phase liquide rsiduelle va sappauvrir rela-tivement en ces mmes lments. Quune sgrgation entre les deux phases sopre et un nouveau magma est ainsi cr, voluant ensuite pour son propre compte. Le mme processus peut se reproduire plusieurs fois, lorigine de plusieurs liquides. Ainsi apparaissent les notions de diffrenciation magmatique (liquides magmatiques successifs, diffrents les uns des autres et diffrents du magma pre primaire) et de srie magmatique (les magmas cogntiques font partie dune mme famille). loccasion des ruptions volcaniques, qui purgent la chambre intervalles de temps varis, les diffrents liquides vont spancher et donner autant de produits volcaniques. Bien videmment, la nature ne respecte pas lordre chro-nologique thorique prsent ici. Le type de matriel mis dpend, chaque fois, du degr dvolution du liquide au sein de la chambre. Seule une tude densemble permet de retrouver la logique de la srie.

    La sparation des minraux au sein du liquide peut se faire par simple diffrence de densit. Les minraux, dune densit suprieure ou gale 2,9, tombent au fond de la chambre magmatique. On parle de cumulation et les minraux denses sgrgs peuvent se retrouver ultrieurement sous forme de cumulat au sein des produits volcaniques. Les cumulats sont des roches constitues en trs grande majorit de minraux daccumulation, souvent de grande taille. Dans le cas le plus typique, celui des orthocumulats (Wager et Wadsworth, 1960), tous les cristaux prsentent un aspect quasi automorphe. Le matriel intergranulaire (intercumulus) peut ne reprsenter quun faible pourcentage. Citons, par exemple, en contexte volcanique basique, les ocanites, laves trs riches en phnocristaux dolivine et les ankara-mites, trs riches en clinopyroxnes. De nombreuses enclaves grenues ont galement une origine cumulative.

    Ds 1928, Bowen, en tudiant les agencements des minraux et la structure des roches volcaniques, avait mis en vidence lexistence dun ordre de cristallisation quasi systmatique. Les minraux les plus basiques (contenant Mg, Fe et/ou Ca) cris-tallisent en premier, des tempratures relativement leves (1100C environ) et les minraux les plus alcalins en dernier, des tempratures plus basses (infrieures 900C). Les suites de cristallisation de Bowen sont maintenant universellement reconnues. On peut distinguer schmatiquement deux lignes majeures voluant paralllement (Fig. 3.1) : la ligne discontinue des minraux ferromagnsiens sombres (olivine, pyroxne, amphibole, mica biotite) et la ligne continue des plagio-clases, conduisant de lanorthite, calcique et basique, lalbite, sodique et alcaline. La fin de lvolution est caractrise par lapparition de minraux blancs: feldspath potassique, quartz ou feldspathode (nphline sodique, leucite potassique). Ce modle, qui a une valeur statistique, souffre certaines exceptions: par exemple, pour certaines rhyolites agpatiques (hyperalcalines), le quartz, parfaitement automorphe,

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  • Premire partie Du manteau la chambre magmatique

    30

    a cristallis en premier. Pour insister sur ce mode de cristallisation, par tapes, on parle de cristallisation fractionne.

    olivines

    pyroxnes

    amphiboles

    biotites

    feld

    spat

    hs K

    quar

    tz

    plagioclases Ca

    plagioclases Na

    tempratures leves

    tempratures basses

    Figure 3.1 Les lignes de cristallisation (dfinies par Bowen, 1928). Cemodlerestebienvidemmentschmatique.Serfrerpourcomparaisonlafigure3.2.

    Labondance de ces minraux blancs symptomatise parfaitement le degr de diffrenciation magmatique dune lave. Thornton et Tuttle (1960) ont eu lide de les utiliser pour tablir un paramtre chiffr, appel indice de diffrenciation (DI pour differentiation index). Il faut bien garder lesprit que le verre interstitiel parfois abondant dans les laves, ou entrant dans la constitution des cendres, contient poten-tiellement de nombreux minraux blancs. Leur quantit peut tre calcule par le biais de la norme CIPW (initiales des auteurs amricains Cross, Iddings, Pirssons et Washington; la norme, composition minralogique virtuelle, soppose au mode, composition minralogique relle). En dfinitive, le DI est la somme des minraux blancs normatifs, lexception de lanorthite basique.

    DI =(quartz +orthose +albite +nphline +leucite) normatifs

    Bien videmment, il y a toujours un ou plusieurs de ces termes nuls car, par exemple, le quartz et les feldspathodes normatifs ne peuvent pas coexister. Le DI peut thoriquement varier de 0 100 mais pratiquement il schelonne entre 20 et 90.

    La cristallisation fractionne se traduit chimiquement par une diminution de la concentration en lments basiques et par une augmentation en lments alcalins dans les produits volcaniques au cours de la diffrenciation.

    3.2. modles quanTiTaTiFs de crisTallisaTion FracTionne

    Le modle de Wright et Doherty (1970) permet de soustraire par calcul un ou plusieurs minraux (en pourcentage) un liquide de dpart (pre) et dobtenir un liquide fils. Ce calcul ne se fait classiquement que pour les lments majeurs. Deux exemples simples de calcul sont prsents dans le tableau 3.1. Les traitements

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  • Chapitre 3 La cristallisation fractionne et la diffrenciation

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    Dunod La photocopie non autorise est un dlit.

    informatiques permettent dintgrer un plus grand nombre dinconnues mais on doit aussi se fixer certains paramtres. Par exemple on estime connus les liquides de dpart et darrive (analyses chimiques des laves correspondantes) et la composition des minraux cristallisant (supposs identiques aux phnocristaux contenus dans la premire lave). Un calcul par itrations fournit le pourcentage de chaque phase prcipitant et le liquide obtenu, qui doit tre le plus prs possible du liquide darrive suppos. Une somme des rsidus au carr infrieure 1 tmoigne de la validit dun tel modle, alors quun rsidu lev montre son impossibilit. Il faut bien garder prsent lesprit le fait que le premier cas signifie que le modle est possible mais nullement certain. On procde ainsi dtape en tape avec les laves de plus en plus diffrencies pour tenter de reconstituer un modle global.

    Tableau 3.1 Exemples de calculs de cristallisation fractionne ( partir des donnes de maury et al., 1980, pour la chane des Puys).

    a SiO2 TiO2 Al2O3 *FeO MnO MgO CaO Na2O K2O total

    MP 48,09 2,29 16,13 11,06 0,17 6,74 10,04 3,77 1,71 100

    Ol 38,05 0 0,11 20,54 0,56 40,52 0,22 0 0 100

    MF 49,22 2,54 17,91 10,01 0,13 2,97 11,13 4,19 1,90 100

    b quantit (%) % MgO

    MP 100 6,74

    olivine 4 40,52

    clinopyroxne 10 12,04

    magntite 2 3,54

    plagioclase 9 0

    MF 75 5,13

    (a) MP reprsente unmagmapre basaltique (lensemble du fer est calcul sous formede *FeO et laproportiondechaqueoxydeestrecalculepourobteniruntotalde100).Olreprsenteunphnocristaldolivinecristallisantauseindecemagma.Delacristallisationde10%enpoidsdolivineauxdpensdumagmapre,rsultelaformationde90%demagmafils(MF).Celui-ciapparatappauvrienMgetFerelativementaumagmapremaisilcontientlesautreslmentsenplusgrandeproportion.Pourlecalculdelateneur(T)enMgOdumagmafils,onpartdelgalitsuivante:

    (6,74100)= (40,5210)+ (T90) magmapre olivine magmafils

    SoitT=2,97 . Uncalculquivalentseraitensuiteeffectupourchaqueoxyde.

    (b)partirdummemagmapre(MP),cristallisentenproportionsvariesquatretypesdephnocristaux(25%au total),dont les teneursenMgOsont connuesparanalyse. Lemagmafils (MF)obtenunereprsenteplusque75%delaquantitinitiale.SateneurenMgO(T)peuttrecalcule:

    (6,74100)= (40,524)+ (12,0410)+ (3,542)+ (09)+ (T75) magmapre olivine clinopyroxne magntite plagioclasemagmafils

    SoitT=5,13.

    Les lments en traces permettent galement une approche quantitative de ces types de processus ptrographiques. Les lments hygromagmatophiles sont carac-triss par un coefficient de rpartition (partage) solide-liquide trs faible (D

  • Premire partie Du manteau la chambre magmatique

    32

    (Large Ionic Lithophile Elements, tels K, Rb, Sr, Cs, Ba, Th, les terres rares lgres), qui ont un grand rayon ionique et sont peu chargs, et dautre part les HFSE (High Field Strength Elements, tels Zr, Nb, Hf, Ta, U, les terres rares moyennes et lourdes) dun rayon ionique plus petit mais prsentant une trs forte lectrongativit.

    Le phnomne de cristallisation fractionne sassimile une distillation obis-sant la loi de Rayleigh:

    C =Ci . f D1

    (C =concentration de llment considr, Ci =concentration initiale, f = quan-tit relative de liquide restant (f

  • Chapitre 3 La cristallisation fractionne et la diffrenciation

    33

    Dunod La photocopie non autorise est un dlit.

    donnes minralogiques (observations de lames minces couples des analyses de minraux la microsonde lectronique) et chimiques (analyses des laves en lments majeurs et en traces) permet de retracer lvolution de la srie.

    Tableau 3.2 Analyse chimique de sept laves reprsentatives de la chane des Puys (lments majeurs, maury et al., 1980 ; lments en traces et terres rares, villemanT

    et al., 1980).

    CP1 CP2 CP3 CP4 CP5 CP6 CP7

    Analyse en % en poids doxydes

    SiO2 47,25 48,50 52,20 53,21 57,10 60,20 69,35

    TiO2 2,25 2,16 1,81 1,49 1,12 0,83 0,39

    Al2O3 15,85 16,56 16,90 17,60 17,89 17,90 15,55

    Fe2O3 *12,08 *11,86 *9,84 *11,75 *6,83 *4,69 *2,38

    MnO 0,17 0,18 0,20 0,20 0,19 0,22 0,18

    MgO 6,62 5,28 3,89 2,48 1,94 1,07 0,36

    CaO 9,86 9,21 7,55 5,89 4,53 3,10 1,25

    Na2O 3,70 3,92 4,45 5,00 5,42 5,58 5,60

    K2O 1,68 1,80 2,47 2,71 3,40 3,82 4,88

    P2O5 0,61 0,72 0,73 0,31 0,55 0,31 0,09

    P.F. 0,44 0,33 0,42 0,45 0,05 0,77 0,08

    total 99,63 99,86 99,62 100,19 98,92 98,49 100,11

    Norme CIPW

    quartz 3,77 14,53

    orthose 10,02 10,72 14,71 16,07 20,42 23,19 28,88

    albite 20,01 25,71 35,95 38,66 46,60 48,49 47,44

    anorthite 21,89 22,46 19,00 17,65 14,69 12,87 2,90

    nphline 6,28 4,18 1,08 2,05

    clinopyroxne

    *Ca 9,80 7,87 5,82 4,03 1,88 0,36 1,14

    *Mg 5,44 4,02 2,82 1,34 0,76 0,13 0,30

    *Fe 3,98 3,66 2,90 2,81 1,14 0,24 0,90

    orthopyroxne

    *Mg 2,88 2,61 0,60

    *Fe 4,32 4,95 1,84

    olivine

    *Mg 7,85 6,47 4,86 3,40 0,89

    *Fe 6,34 6,48 5,52 7,88 1,47

    magntite 2,65 2,60 2,16 2,56 1,50 1,04 0,52

    ilmnite 4,31 4,14 3,47 2,84 2,16 1,62 0,74

    apatite 1,46 1,72 1,74 0,74 1,33 0,76 0,21

    DI 36,31 40,61 51,74 56,78 67,01 75,45 90,86

    (*)indiquequeleferatrecalculsousformeFe2O3,cequiexpliqueuneperteaufeu(P.F.=H2O++H2O)parfoisngative.LesnormesCIPWonttcalculesavec15%duferenFe2O3et85%enFeO.

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  • Premire partie Du manteau la chambre magmatique

    34

    CP1 CP2 CP3 CP4 CP5 CP6 CP7

    lments en traces et terres rares en p.p.m.

    U 1,35 1,69 2,30 3,10 3,62 4,0 5,8

    Th 5,19 6,86 9,04 11,49 13,46 16,69 22,60

    Zr 228 288 351 422 470 521 441

    Hf 5,1 5,8 7,7 8,9 10,2 11,3 11,2

    Ta 4,35 5,41 6,74 7,69 8,34 9,91 12,27

    Ba 488 619 791 933 1042 1092 932

    Sr 782 734 772 838 735 569 185

    Cs 0,59 0,58 0,34 0,34 0,62 0,89 1,66

    Rb 37,5 51 57 76 93 110 152

    Sb 0,14 0,15 0,17 0,16 0,18 0,30 0,28

    Cr 207 128 73 76 63 85 76

    Co 37,1 34,0 17,7 14,9 6,50 3,91 0,76

    Ni 68 30 3 4 10)apparaissentenoutredanslescumulats;enfinlesaugites(Ca10)sontreconnuesdanstouslestypesdedpts(diffrentsblocs[V2E,V2F,V1S]etmatricedenue,cumulats,dmesde1971etde1979).Chaquetypedepyroxnetmoignedunniveaustructuraldiffrent(barDintzeff,1984a,1985a).

    De nombreux verres volcaniques ont galement t analyss (Bardintzeff, 1983 ; Devine et Sigurdsson, 1983). Plusieurs types se distinguent : inclusions vitreuses dans les cristaux, microponces dans la fraction cendreuse ou verres de msostase des laves (chapitre 3, 1). Ces verres montrent une trs grande varit chimique, de 51,5 76% de SiO2 (tableau5.1; Fig.5.2) Trois types sidentifient: (1) des verres de composition dandsite basaltique (51,5-56,8% SiO2) en posi-tion intercumulus dans les cumulats et galement en inclusion dans les diopsides chromifres et les plagioclases An 90 des nues ardentes ; (2) des verres de composition andsito-dacitique (57,8-67,8% SiO2), inclus dans les augites, les orthopyroxnes, les plagioclases An 60-70 et se trouvant aussi ltat de micro-ponce dans les dpts de nue ardente; (3) des verres rhyolitiques (jusqu 76% de SiO2) en inclusions volues (une partie du liquide pig a cristallis) dans les pyroxnes et dans les msostases des blocs de nue et des dmes. Une lacune nette de composition chimique sobserve entre les groupes (1) et (2) pour 57-58% SiO2 (Fig.5.2).

    Tandis que les verres de type (3) rsultent de lvolution dun liquide rsiduel, les types (1) et (2) peuvent tre considrs comme des tmoins de magmas vritables.

    554027-Livre Bardinteff.indb 57 10/01/11 07:52

  • Premire partie Du manteau la chambre magmatique

    58

    Si le type (1) sapparente chimiquement au magma de composition dandsite basaltique mis en grande quantit au cours de la crise ruptive de 1979, le type (2) nest pas connu grande chelle. Un second liquide magmatique, de composition andsito-dacitique est ainsi mis en vidence mais en faible quantit. Ce magma rela-tivement lger et riche en lments fluides devait surmonter le premier, plus dense dans la chambre magmatique suprieure (Fig.5.3). Signalons par ailleurs, que deux types de verres (un verre gris avec 65,9% SiO2 et un verre sombre avec 57,9% SiO2) avaient t trouvs dans les premires cendres retombes sur lle Barbade (Shepherd et al., 1979) bien quultrieurement, Graham et Thirwall (1981) aient remis en question cette bimodalit.

    Figure 5.2 Diagramme de frquence des verres de la Soufrire de Saint-Vincent en fonction de leur teneur en silice (N = nombre danalyses).

    Verresdecumulats(ennoir) ;verresdelamatricecendreusedelanue, inclusdans lesdiopsides (trianglepleinbarre infrieure),dans lesaugites (triangleplein),dans lesorthopyroxnes (triangleplein invers),dans lesplagioclases(trianglevide),enborduredaugite(croixoblique),enmicroponce(engris);verresdelamsostasedesblocsetdesdmes(enblanc).Silesverresdemsostasenereprsententpasunmagmavritable,larpartitiondesautres,bimodale,montreunmlangedunmagmaandsito-basaltique (SiO2=53-55%)etdunmagmaandsito-dacitique(SiO2=58-65%).Lesdeuxgroupessontsparsparunelacunenette57-58%desilice(barDintzeff,1983).

    En tenant compte de lensemble des donnes chimiques relatives aux min-raux (plusieurs paragenses) et aux verres (existence dune lacune chimique), unprocessus de mlange dun magma andsito-basaltique et dun magma and-sito-dacitique a t propos (Bardintzeff 1983, 1984a, 1985a) (Fig.5.3). Le magma

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  • Chapitre 5 Les mlanges de magmas

    59

    Dunod La photocopie non autorise est un dlit.

    Figure 5.3 Interprtation volcanologique de lruption de 1979 de la Soufrire de Saint-Vincent.

    Danslachambresuprieure,unliquidemagmatiqueacidedacitiquesediff-rencieenfaiblequantitpartirdunliquidebasiqueandsito-basaltiqueetsensparepardensit.Unralimentationparunmagmaissudelachambreinfrieureprovoqueunbrassagedelensemble.Cemlangedemagmasinduitdebrusquesvariationsdes conditions thermodynamiques loriginedunephase ruptiveviolemmentexplosive(barDintzeff,1983,1984a,1985a,1986).

    554027-Livre Bardinteff.indb 59 10/01/11 07:52

  • Premire partie Du manteau la chambre magmatique

    60

    principal, basique, sjournant dans la chambre suprieure, a eu le temps de se diffrencier. Une fraction de magma plus acide sest ainsi forme. Ultrieurement, une ralimentation magmatique, issue de la chambre infrieure, a provoqu un ds-quilibre de cette stratification magmatique, lorigine dun mlange de magma. Il sagit dun mlange intime (mixing) de deux magmas drivant lun de lautre (origine cogntique).

    Par ailleurs ce dsquilibre soudain et ce mlange ont provoqu de brusques modifications des conditions thermodynamiques, qui peuvent expliquer le dclen-chement de la phase ruptive violemment explosive.

    5.3. mlange de magmas (mingling) au cerro chiquiTo

    Le Cerro Chiquito se situe sur le flanc nord du volcan Pacaya, actuellement actif, au Guatemala. Il sagit dun dme quaternaire (Eggers, 1975) constitu de dacite claire (62,5-67,1% SiO2), localement ponceuse et contenant 20% (voire 30% par endroit) denclaves andsito-basaltiques (54,9-55,3% SiO2) (tableau 5.3) (Bardintzeff, 1985a; Bardintzeff et Deniel, 1992). Ces enclaves apparaissent plus sombres et plus denses que la lave-hte. Elles ont une forme arrondie et une taille comprise entre quelques centimtres et un dcimtre.

    La roche-hte dacitique prsente un aspect porphyrique avec de grands phnocris-taux de plagioclases, jusqu un centimtre, dans une pte trs finement cristallise. Les enclaves contiennent des phnocristaux plus petits mais des microlites rela-tivement plus importants, lensemble formant une structure de type dolritique (plagioclases en lattes, appuyes les unes contre les autres et mnageant des inters-tices occups par la msostase). Lobservation microscopique rvle des contacts hte-enclave dcoups, indiquant un mlange de deux liquides (Fig.5.4). Labsence de bordure fige (verre tremp au niveau du contact) suggre une cristallisation proche de lquilibre thermique.

    La composition minralogique des deux termes du mlange montre des diff-rences notables. Tous les deux contiennent de lolivine, de lorthopyroxne et du clinopyroxne, du plagioclase, de la magntite, de lamphibole et de la tridymite. Mais la dacite contient en outre de lilmnite et de la biotite; lolivine et lorthopy-roxne y sont plus magnsiens que dans landsite basaltique; lamphibole est de la magnsio-hornblende. Landsite basaltique contient des augites subcalciques; les amphiboles sont des hastingsites magnsiennes et des tschermakites. En outre la msostase vitreuse apparat plutt sodique dans la dacite (2,5-5,6% Na2O et 3,2-5,1% K2O) et relativement potassique dans landsite basaltique (2,3-3,9% Na2O et 4,5-5,9% K2O) pour une teneur en silice quivalente (71-78% SiO2) (tableau5.3).

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  • Chapitre 5 Les mlanges de magmas

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    Dunod La photocopie non autorise est un dlit.

    Tableau 5.3 Analyses chimiques de produits du dme du Cerro Chiquito (Guatemala) ; normes CIPW calcules en supposant un rapport Fe3+/(Fe2+ + Fe3+) gal 0,15.

    1 2 3 4

    Analyse en % en poids doxydes

    SiO2 62,50 54,86 71,02 75,73

    TiO2 0,49 0,93 0,08 0,54Al2O3 16,02 18,67 14,63 11,16Fe2O3 0,81 4,95FeO 2,81 3,18 0,78 1,62MnO 0,13 0,17 0 0MgO 1,56 3,02 0,04 0,10CaO 5,70 8,99 1,35 0,34Na2O 4,89 3,72 5,61 2,68K2O 2,80 1,12 3,19 5,09P2O5 0,18 0,30H2O+ 0,61 0,47H2O 0,26 0,27

    total 98,76 100,65 96,70 97,26

    Norme CIPW

    quartz 10,30 4,15 23,35 39,60

    orthose 16,55 6,62 18,85 30,08albite 41,38 31,48 47,47 22,68anorthite 13,49 30,94 5,32 1,69corindon 0,62clinopyroxne*Ca 5,73 4,97 0,58*Mg 2,64 2,17 0,06*Fe 3,04 2,79 0,58orthopyroxne*Mg 1,24 5,35 0,04 0,25*Fe 1,43 6,86 0,40 1,41magntite 0,86 1,85 0,19 0,39ilmnite 0,93 1,77 0,15 1,03

    apatite 0,39 0,66

    lments en traces en p.p.m.

    U 2,26 0,66

    Th 6,01 1,74Zr 180 106Nb 6 4Y 22 20Ba 835 415Sr 329 554

    Rb 71 19

    1=lavehtedacitique,2=enclaveandsito-basaltique,3=verrerhyolitiquedelamsostasedelaroche(1),4=verrerhyolitiquedelamsostasedelaroche(2)(barDintzeff,1985a,barDintzeffetDeniel,1992).(Rochestotales1et2:lmentsmajeurs,analysesR.Coquet,traces,C.Pin,F.cantagrel,S.couturi,C.Deniel;verres3et4,analysesJ.-M.barDintzeff).

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  • Premire partie Du manteau la chambre magmatique

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    Figure 5.4 La lave dacitique constitutive du dme du Cerro Chiquito, Guatemala et ses enclaves andsito-basaltiques, illustration

    dun mlange imparfait (mingling).

    (Haut) Lchelle de lchantillon montre des enclaves pluricentimtriques.(Bas)Lchelledelalamemincemontreuncontactsinueuxentrelesdeuxphases:dacite porphyrique (au-dessus) et enclave andsito-basaltique dolritique (endessous).(Photo(haut)J.-M.barDintzeff,(bas)J.-M.barDintzeffetB.platevoet).

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  • Chapitre 5 Les mlanges de magmas

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    Dunod La photocopie non autorise est un dlit.

    Les compositions chimiques des deux laves et de leurs msostases respectives ne peuvent sexpliquer aisment par un modle de cristallisation fractionne. Deux hypothses ont t proposes pour expliquer de telles observations (Bardintzeff, 1985a; Deniel et Bardintzeff, 1989; Bardintzeff et Deniel, 1992; Fig.5.5). La premire suppose la production indpendante de deux magmas partir du manteau. Ultrieurement une communication entre les deux chambres magmatiques pour-rait stablir, la faveur de failles. La seconde hypothse suppose que le liquide andsito-basaltique provient de la refusion, dans la chambre dacitique, de cumulats renfermant des amphiboles. Dans les deux hypothses, un processus de mlange de magmas intervient.

    Figure 5.5 Interprtations volcanologiques de la mise en place du dme du Cerro Chiquito.

    (a)Modledeuxchambresmagmatiques. (b)Modleuneseulechambreetrefusiondecumulatsamphiboles.Les deux hypothses font intervenir lemlange imparfait de deux liquidesmagmatiques. (barDintzeff, 1985a,Deniel et barDintzeff, 1989, barDintzeff etDeniel,1992).

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  • Premire partie Du manteau la chambre magmatique

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    5.4. les mlanges : modaliTs eT condiTions Thermodynamiques

    Htrognit, volume et chimismeLe rsultat dun mlange peut apparatre relativement homogne ( mixing) ou au contraire rester trs htrogn