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3 mars 2012 Spécial MODE Les tout-puissants Enquête sur les communicants du luxe Guinevere Van Seenus - 3 mars 2012 - N° 24 Le magazine M Le magazine du Monde. Supplément au Monde n° 20876 du samedi 3 mars 2012. Ne peut être vendu séparément. Disponible en France métropolitaine, Belgique et Luxembourg.

Le magazine du monde du 3-3-2012

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3 mars 2012

Spécial MODELes tout-puissants

Enquête sur les communicants du luxe

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Carte blancheà JuusoWesterlund.

Helsinki (Finlande), le 21 février 2012. « Cette photographie fait partie du projet “Crise de la quaran-taine de Westerlund”, dans lequel je suis l’existence d’un groupe d’amis de Laajasalo, la banlieue

d’Helsinki où j’ai grandi. Ils ont tous autour de 40 ans et, pour la plupart d’entre eux, la vie ne s’est pasvraiment déroulée comme ils l’avaient imaginée (l’est-elle jamais?). Cette fine équipe s’est baptisée

Roskasakki (« Trash gang »). Sur cette image, un mécanicien s’apprête à se baigner dans la mer gelée,en face de la plage d’Helsinki. Tout n’est peut-être pas idéal, mais il y va, quoi qu’il en soit. »

Juuso Westerlund, né à Helsinki en 1975, est un photographe documentariste free-lance. Ses photographies sont publiéespar les grands magazines et journaux de son pays. La plupart concernent ses concitoyens, comme par exemple leur relationparticulière, voire étrange, avec les chevaux ou le karaoké. Il a d’ailleurs publié un livre, en 2007, sur le karaoké en Finlande.Actuellement, il travaille à deux projets photographiques documentaires, en grand format, qui seront terminés en 2013-2014.

- 113 mars 2012 – Photo Juuso Westerlund pour M Le magazine du Monde

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Les chiffons et les programmes.Et si trop de com’ tuait la com’?A mesure que la campagne électorale s’avance,la question monte, lancinante. Car le spectacle de cette bataille présidentielleparaît réglé au millimètre jusque dans sa tension et dans ses dérapages. Dansce cru 2012, les gestes, les mots, les corps même, semblent plus que jamais misen scène par des spin doctors.Un terme américain employé à dessein tant lesconseillers en communication louchent vers les méthodes forcément nou-velles, modernes, performantes de leurs collègues d’outre-Atlantique.Aujourd’hui, ces professionnels de la politique ont trouvé des rivaux à leurmesure : les professionnels de la mode, dontMLemagazine duMonde décryptele pouvoir, l’influence et les habitudes pour ce numéro spécial. Les enjeux nesont pas les mêmes? Certes. Il n’y a rien de comparable entre les chiffons etles programmes.A la lecture de notre enquête,pourtant, le même phénomènesemble à l’œuvre. Car le secteur du luxe, avec son poids économique et sesbatailles stratégiques, est finalement devenu extrêmement politique. Il y estquestion du pouvoir financier des grands groupes et des marques et de la placede ses acteurs (magazines, créateurs, gestionnaires) sur l’échiquier. Et dans cecirque-là, ce sont les gourous de la com’, ces attachés de presse multitâches,quitirent les ficelles.La question de savoir si les couleurs pastel passeront l’été ou si le short peuts’imposer cet hiver est finalement secondaire… C’est la manière de le raconterqui est la plus importante.Moins de création,moins d’idées mais toujours plusde communication. Ça ne vous rappelle rien? Marie-Pierre Lannelongue

Au programme.

3 mars 2012 - 13

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Guinevere van SeenuSa été photoGraphiée

par cédric Buchet pourm le magazine du monde.

elle porte une veSteet une cravate en Soie,

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LA SEMAINEp. 25 La photo.

p. 26 poLitique. La bande-sonde l’élection présidentielle.

p. 28 Le buzz du Net. Obama lancel’opération « Narval ».

p. 30 eN couLisses. Charles Biétry,le meilleur ennemi de Canal+.

p. 31 face à face. Scrutin majoritairecontre proportionnelle.

p. 32 iLs foNt ça coMMe ça !Les DRH américains ont de drôlesde méthodes.

p. 34 décodage. Rupert Murdoch, le retour?

p. 36 j’y étais… au Salon de l’agricultureavec Jacques Cheminade.

p. 38 sport. Un moucharddans le manche.

p. 39 Le roMaN-photo de la bombeiranienne.

p. 40 jeux vidéo. PlayStation jouel’innovation face aux tablettes.

p. 42 qui est vraiMeNt Uggie ?

p. 43 MarketiNg. L’appât à tartiner.

p. 44 Les questioNs subsidiaires.

p. 46 La chroNiquede Christian Salmon.

LE MAGAZINEp. 49 des hérauts très discrets.

Leur notoriété ne dépasse pas le petitcercle de la mode mais leur influencey est immense. Enquête sur les seigneursde la communication.

p. 56 garde aLterNéeà hauteur d’hoMMes.Il y a dix ans une loi mettait en place lapossibilité de partager la garde de sesenfants. Aujourd’hui certains voudraientque l’alternance devienne la norme.

p. 62 Les jourNaListes poLitiquespasseNt à tabLe.Organisés en « groupes de déj », certainsjournalistes ont pris l’habitude d’inviterles politiques au restaurant. En ressor-tent des confidences off souvent utiles.

p. 66 soNatiNe voit cLairdaNs Le Noir.Cette petite maison d’édition regorgede pépites du polar dénichées par unduo qui ne manque pas de flair.

p. 70 M. tout-Le-MoNde N’est pas prèsde rouLer propre.Les modèles de voitures électriques semultiplient. Mais ces véhicules, chers etpeu autonomes, séduisent surtout lesentreprises en quête d’image.

p. 72 L’autre MoNdiaL du qatar.Ils accueillent la Coupe du Monde defoot en 2022. Mais la première passiondes Qataris, la fauconnerie, a elle aussidroit à son Mondial. En plein désert.

p. 78 aLber eLbaz, Le siNguLierde La Mode.Portrait du directeur artistiquede la maison Lanvin.

LE portfoLIop. 82 daNs L’ateLier de LuciaN freud.

Les images de l’assistant du célèbrepeintre, exposées à Londres, témoignentdu lien intime qui unissait l’artisteet ses modèles.

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- 153 mars 2012

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LE STYLEp. 93 24 HEURES

DANS LA VIE D’UNE FEMME.Série réalisée par AleksandraWoroniecka, photos Cédric Buchet.

p. 116 MODE. Quand la mode pianoteet réseaute.

p. 118 L’ICÔNE. Louise Brooks,femme au carré.

p. 119 FÉTICHE. A fleur de peau.

p. 120 TENDANCE. Bille en tête.

p. 121 D’OÙ ÇA SORT? La vague futuriste.

p. 122 CECI N’EST PAS… un crapaud.

p. 123 EST-CE BIEN RAISONNABLE…d’abuser du mot « dandy » ?

p. 124 EN VITRINE. La maille déctricotéepar Pièce d’anarchive.

p. 126 LA VILLE EST BELLE.Par Vahram Muratyan

p. 127 SOUS INFLUENCE. Un air de Broadway.

p. 128 TÊTE CHERCHEUSE.Marisol joue aux petits cheveux.

p. 130 MA VIE EN IMAGES. Nicola Formichetti.

p. 132 AUTO. Une coréenne bien élevée.

p. 134 L’ESPRIT... Ibiza bohème.

p. 136 VOYAGE. Le Vérone de Tim Parks.

p. 138 SPIRITUEUX. Les toqués du shaker.

p. 140 LA CHRONIQUE de JP Géné.

p. 141 LE RESTO.

LA CULTUREp. 142 LES 10 CHOIX DE LA RÉDACTION.

Expositions, polar, cinéma, CD, danse,photo, théâtre, BD.

p. 151 LA CHRONIQUE de Christophe Donner.

p. 152 LES JEUX.

p. 154 LE TOTEM. Le passeportde Maria Luisa Poumaillou.

80, bd Auguste-Blanqui,75707 Paris Cedex 13Tél. : 01-57-28-20-00/25-61Courriel de la rédaction :[email protected] des lecteurs :[email protected]

Président du directoire, directeurde la publication : Louis DreyfusDirecteur du Monde, membredu directoire, directeur desrédactions : Erik IzraelewiczSecrétaire généraledu groupe : Catherine SueurDirecteurs adjoints des rédactions :Serge Michel, Didier PourquerySecrétaire généralede la rédaction : Christine Laget

M LE MAGAZINE DU MONDERédactrice en chef :Marie-Pierre LannelongueDirecteur de création : Eric PillaultRédaction en chef adjointe :Béline Dolat, Jean-Michel Normand,Yann PlougastelAssistante : Christine DoreauRédaction : Samuel Blumenfeld,Bastien Bonnefous, Vicky Chahine,Annick Cojean, Louise Couvelaire,Emilie GrangerayResponsable mode :Aleksandra WoronieckaStyle: Fiona KhalifaChroniqueurs : Marc Beaugé,Christophe Donner, JP Géné,Frédéric Joignot, Christian SalmonRédactrice en chef technique :Sophie DemangeDirectrice artistique :Cécile Coutureau-MerinoGraphisme : Audrey Ravelli (chefde studio), Jean-Baptiste Talbourdet,Marielle Vandamme, avec AudeBlanchard-Dignac et Camille RoyPhoto : Lucy Conticello (directricede la photo), Cathy Remy (adjointe),Laurence Lagrange, Federica Rossi,avec Raphaëlle Brui-Boccacio etAlessandro ZuffiAssistante : Françoise DutechEdition : Camille Seeuws (chefd’édition), Agnès Gautheron (adjointe),Béatrice Boisserie, Xavier Delecroix,Valérie Gannon-Leclair, Catarina Mercuri,Maud ObelsCorrection : Michèle Barillot,Ninon Rosell, Claire LabatiDocumentation : Muriel Godeau

Photogravure : Fadi Fayed,Philippe Laure, avec Didier VinetInfographie : Le MondeChef de la fabrication :Jean-Marc MoreauFabrication : Alex MonnetCoordinatrice numérique(Internet et iPad) : Sylvie ChayetteDirecteur développementproduits Le Monde Interactif :Edouard AndrieuRéalisation iPad : Roland Donzelle,Catherine Mézenge, Christophe Quin-zoni/Agence Square (www.square.fr)

DIFFUSION ET PROMOTIONDirecteur délégué marketinget commercial : Michel SfeirDirecteur des ventesFrance : Hervé BonnaudDirectrice des abonnements :Pascale LatourDirectrice des ventes à l’internatio-nal : Marie-Dominique RenaudAbonnements : de France, 32-89(0,34 € TTC/min) ; de l’étranger(33) 1-76-26-32-89Promotion et communication :Brigitte Billiard, Marianne Bredard,Marlène Godet, Anne HartensteinDirecteur des produitsdérivés : Hervé LavergneResponsable de la logistique :Philippe BasmaisonModification de service, réassortspour marchands de journaux :Paris 0805-050-147, dépositairesbanlieue-province : 0805-050-146

M PUBLICITÉ80, bd Auguste-Blanqui,75707 Paris Cedex 13Tél. : 01-57-28-20-00/38-91Directrice générale : Corinne MrejenDirectrices déléguées : MichaëlleGoffaux, Tél. : 01-57-28-38-98(michaëlle.goffaux @mpublicite.fr)et Valérie Lafont, Tél. : 01-57-28-39-21([email protected])Directeur délégué digital :David Licoys, Tél. : 01-53-38-90-88([email protected])

M Le magazine du Monde est éditépar la Société éditrice du Monde(SA). Imprimé en France : Maury impri-meur SA, 45330 Malesherbes.Dépôt légal à parution. ISSN 0395-2037Commission paritaire 0712C81975.Distribution Presstalis. Routage Franceroutage.

Dans ce numéro, un encartbroché entre les pages 50 et51, abonnement Le Monde(France, Belgique, Luxem-bourg), et un encart GaleriesLafayette (Ile-de-France).

ALLERAUFONDDES SUJETS.LES MATINS S’INFORMER AUTREMENTMarc Voinchet sur France Cultureavec la rédaction et les chroniqueurs6h30 – 9h00, du lundi au vendrediChaque vendredi à 8h50 retrouvezla chronique de M Le magazine du Monde

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16 - 3 mars 2012

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Bastien Bonnefous est aujourd’huijournaliste pour M Le magazine du Monde etchroniqueur de polars pour « Le Monde deslivres », après avoir collaboré à Slate.fr, GQ,20 Minutes, France Soir et Libération. Pour cenuméro, il nous présente Sonatine (p. 66), unejeune maison d’édition de livres noirs. « C’estun véritable phénomène dans l’édition fran-çaise de ces dernières années, raconte-t-il, aupoint que les lecteurs connaissent souventmieux la marque Sonatine que le propre nomdes auteurs publiés. »

stéphane feugère est photographe.Après des études à l’Ecole nationale supé-rieure des arts décoratifs, à Paris, il décidede s’orienter vers la photographie demode et collabore notamment au maga-zineW. Sa rencontre avec Carine Roitfeldl’amène ensuite à devenir, à partir de2003, « l’œil » de Vogue France. Il se défi-nit comme un chroniqueur photo : « J’aitoujours été fasciné par les clichés degrands photographes montrant leurs amiscélèbres en vacances ou en soirée. DeHelmut Newton à Jean Pigozzi, je trouveleurs images très fortes, car moins forma-tées et plus dans le réel… » Dans les cou-lisses des derniers défilés à Milan, il saisit lespros de la com’ en plein « travail » (p. 49).

nicolas guiraud est photographe. Après uneprépa HEC, des études d’économie et de philoso-phie, il débute dans la photographie en collaborantavec l’agence Magnum Photos, dont il devient direc-teur de création de 2003 à 2007. Dans son travailphotographique et vidéo, il s’intéresse à la transitionentre fiction et réalité, c’est donc tout naturellementqu’il est allé à la rencontre des éditeurs de Sonatine(p. 66). Il collabore avec différents journaux et maga-zines : Stiletto, L’Express, Le Monde, Elle… et a exposéchez Colette, au festival de la photo à Arles, au Palaisde Tokyo ou à la galerie GZ à Paris. Il travaille actuel-lement sur une vaste série de portraits intitulée « OffFiction », consacrée aux figurants de cinéma.

Benjamin Barthe,journaliste au Monde, a étécorrespondant à Ramallah(Cisjordanie) pendant neufans. Il a rejoint cet été le deskProche-Orient. Il racontedans ce numéro l’« autreMondial » du Qatar : celui dela fauconnerie (p. 72).« Quand on débarqueau Qatar, on est happé pardeux choses : l’opulence dela population autochtone etla servilité de la main-d’œuvreimmigrée, raconte-t-il. J’avaisenvie de dépasser ce binôme,de raconter la société qatarieautrement que par l’angle del’argent et de la puissance.Ce festival de fauconnerieétait l’occasion parfaite.D’autant qu’ il me donnaitl’occasion de sortir de Dohaet de découvrir le désert. »

Ils ont participéà ce numéro.

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Dans un loft, sur un parking, dans un studio… Pendant deux joursà New York fin janvier, Guinevere van SeenuS a joué lesfemmes fatales pour M Le magazine du Monde, interprétant tourà tour des scènes de la vie quotidienne ou des moments plusposés et fantasmés. Américaine, d’origine néerlandaise, cetteblonde aux yeux bleus exerce le mannequinat depuis l’âge de20 ans. Elle en a aujourd’hui 34. Dans cette série mode, elle estphotographiée par cédric Buchet. D’origine franco-danoise,celui-ci a joué du noir et blanc et de la couleur pour raconter destemporalités différentes. Et organisé un casting de chiens pourcompléter la panoplie de la femme réelle…

48 h dans la vie d’une femmeà Brooklyn (New York).

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Goût. « Je suis d’accord avec Camille Labroquand elle affirme que la qualité du pain estd’abord liée à la qualité du pétrissage, à celle dela fermentation et enfin à celle de la cuisson(“Le pain reprend des couleurs”, numéro du18 février). Par contre, je m’élève contre l’affir-mation selon laquelle il n’y aurait de bon painqu’au levain. On trouve d’excellents pains àbase de levure de boulangerie (qui est un pro-duit naturel au même titre que le levain). Deplus, certains ont horreur du goût apporté à lamie par le levain. C’est beaucoup plus « in » dedire qu’on aime le pain au levain, et c’est biendommage car il s’agit d’abord, selon moi, d’unesimple affaire de mode. » Michel Doucement

Partial. « Jen’ai pas aimévotre page déco-dage “Sale tempssur la Sarkozie”(numéro du18 février), vrai-ment trop parti-sane. Aucune despersonnalitéscitées n’a jusqu’àprésent étéjugée. Chaquecamp a ses sup-posés délin-quants, pourquoitoujours pointerceux de la droitepour « plomberSarkozy » alorsque Hollandeserait vierge detoute proximitéavec les siens?C’est idiot dansun sens commedans l’autre. C’estl’individu qui estresponsable deses turpitudes, etnon le proche,jusqu’à preuve ducontraire. »H. Acquet

Engagement. « AngelinaJolie est une excellente actrice etune femme remarquable. Elle metsa notoriété, son énergie et sesconvictions au service de la paixdans le monde On applaudit, biensûr. Mais on s’interroge aussi. A lireses propos (numéro du 25 février)on se dit que la paix qu’elle défendn’est autre que la Pax americana.Elle devrait relire Macbeth. Elle yverrait que celui qui fait triompherle droit par la force, s’il n’y prendgarde, se condamne à devenir l’alliéde la force contre le droit. C’est lasituation actuelle et tragique desEtats-Unis, ils ne sont pas les alliésdu droit, mais les alliés de la force.Citoyenne américaine, approuvantles actions de son pays, AngelinaJolie est elle aussi, malgré qu’elleen ait, du côté de la force et celadiminue singulièrement la portéede son action en faveur de la paixdans le monde. » Denis Monod-Broca

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Pour nous écrire : M. Le magazine du Monde, courrier des lecteurs, 80, bd Auguste-Blanqui,75707 Paris Cedex 13, ou par mail : [email protected]

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Précision. Dans l’article « thomasLangmann, le nouveau nabab » (numéro du25 février), à la fin du premier paragraphe, ilfallait lire : « C’est parmi ses fantômes (et nonses fantasmes) qu’il joue des coudes. »

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La photo.27 février, Dakar (Sénégal).Devant la presse, le président sortant du Sénégal, AbdoulayeWade, reconnaît qu’il devra participer à un second tour lors del’élection présidentielle, face à son rival Macky Sall. Un échec pourcelui qui se prédisait une large victoire dès le premier tour. Laveille, seuls 60% des 5,1 millions d’électeurs inscrits se seraientdéplacés. Si elle est confirmée par la Commision électorale natio-nale autonome, la participation serait plus faible qu’en 2007. Sansdoute en raison des tensions préélectorales… Photo Joe Penney/Reuters

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/ Je ne pense qu’à ça! / J’y étais /L’objet / Le buzz du Net / La phrase / Ils font ça comme ça /

Décodage / Le chiffre / Les questions subsidiaires /

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La bande-sonde la présidentielle.Entre playlist de candidats et hymne de cam-pagne, la musique est de plus en plus utiliséepour suggérer des valeurs, une identité…

I nutile d’aller chercher bien loin celui qui les a inspirés.C’est dans le sillage de Barack obama que FrançoisHollande et Nicolas Sarkozy ont publié le 22 févrierleur playlist de campagne. le premier sur le blogSkeuds, l’autre sur le site d’écoute en ligne Deezer.

Ces deux bandes-son ne vont rien bouleverser. Alors quele président américain cultive ses valeurs sûres (BruceSpringsteen, Aretha Franklin, u2) mais instille aussi desimprévus (Arcade Fire, Florence and the Machine), lasélection des deux rivaux ne surprend guère. Parmi leschoix de musiques qui « l’accompagnent là où il va », le pré-sident sortant choisit Didier Barbelivien, Johnny Hallydayet – surprise ! – Carla Bruni. Suivent Julien Clerc, Calogero,Georges Brassens et, comme unique artiste étranger, elvisPresley. Dans le camp Hollande, aucune surprise non plus :Yannick Noah, léo Ferré, Jean-louis Aubert, Nolwennleroy, Benjamin Biolay… une sélection un peu plus

moderne mais franco-française, hormis la petite placeaccordée à l’Anglaise Adele.Cette nouveauté dans les us et coutumes préélectorauxne saurait toutefois se substituer au sacro-saint exercicede l’hymne de campagne. A cet égard, la cuvée 2012 appa-raît très moyenne, considère Michaël Boumendil, présidentde Sixième Son. Selon ce spécialiste de l’identité sonoreet du design musical, il y aurait dans les meetings deNicolas Sarkozy une bande-son « typiquement de droite ».Solennel, le thème musical qui accompagne l’entrée enscène du candidat « marque la force, l’ordre, l’autorité, lestatut. Elle dit : “le chef arrive”, et il ne cherche pas à fairel’unanimité », estime-t-il. Composée par laurent Ferlet,auteur de génériques télévisés (« une femme d’honneur »)cet hymne baptisé La France forte apparaît moins kitschque l’hymne Ensemble tout devient possible, signé olivierDassault il y a cinq ans. Pourtant, il ne trouve pas grâceaux yeux de Michaël Boumendil. « Trop riche, c’est unemusique désincarnée dont les multiples ruptures de rythmeen font une musique à écouter plutôt qu’à vivre. » Résultat :« On ne peut pas taper des mains en cadence alors que cedevrait être sa fonction. »la bande-son « qui tourne en boucle » dans le camp de Fran-çois Hollande ne convainc pas davantage notre spécialiste.Conçu par une agence de publicité, ce thème musicaldépourvu de refrain (des chœurs d’enfants répètent « lechangement, c’est maintenant » vingt fois pendant quatreminutes…) « fait appel au sens du collectif et à l’empathie »mais souffre « de son extrême pauvreté », soupire MichaëlBoumendil. Selon le président de Sixième Son, « les poli-tiques n’ont pas encore vraiment compris que la musique estaussi un moyen de faire comprendre leur projet ». il fautpourtant admettre que sont révolus les temps de l’inénar-rable Votez Jacques Chirac de 1981 ou des apparitionsd’edouard Balladur au son de The Final Countdown dugroupe europe. A moins que les prochains clips de la cam-pagne officielle ne nous réservent quelques pépites…Jean-Michel Normand

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Les Frenchies de “The Artist” agacent HollywoodMauvais perdants, les américains? le triomphe de The Artist aux oscars n’a pas été du goût de certainscommentateurs locaux, qui ont critiqué le comportement des Français durant la cérémonie, jugés tropexubérants et prétentieux. le site deadline, qui couvrait en direct l’événement, s’est fait l’écho d’un certainagacement de la profession outre-atlantique. sur twitter, Kaui hart hemmings, auteur du livre The Descen-dants – adapté à l’écran avec George clooney, battu aux oscars par Jean dujardin –, a par exemple raillél’équipe française: « Les gens de the artist étaient devant moi [sur le tapis rouge, ndlr] et maintenant je sensla cigarette et l’arrogance », a lâché la romancière. Plus tard, lorsque le film muet a reçu son deuxième oscar(pour la meilleure musique), nikki Finke, journaliste de deadline, a, elle, balancé: « J’en ai déjà assez desgrenouilles et de l’accent français»… B. Bo.

Yannick Noahdonne sa voixà François Hol-lande ; NicolasSarkozy entonneLa Marseillaise.

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trafic

A Rome, le Café de Parisne brasse plus d’argent sale.Longtemps entre les mains de lamafia, l’établissement, emblème dela « dolce vita », vient de renaître.

Le buzzdu NetObama lancel’opération“Narval”.

En 2008, les équipes de BarackObama avaient mobilisé aux Etats-Unis un nombre important devolontaires et su utiliser Internet

pour organiser les soutiens, recruter desbénévoles, cibler les électeurs à convaincreet engranger de nombreux dons.En 2012, la principale innovation de lacampagne du président américain pour saréélection sera la fusion de toutes cesbases différentes: la liste des donateurs,celle des volontaires et VoteBuilder, quirecense le comportement électoral de mil-lions d’électeurs. Pour ce projet, l’équiped’Obama a adopté le nom d’un animal à lacorne légendaire: le narval, cétacé del’Arctique. De la même manière que sadent transperce sa lèvre supérieure, leuroutil n’hésitera pas à percer n’importequelle base à la recherche de l’informationla plus précise possible sur chaque élec-teur pour l’encourager à voter.Le tout doit permettre de mieux gérer lescontacts grâce aux données engrangées(sexe, tranche d’âge, niveau d’engage-ment...) et d’éviter par exemple de deman-der de l’argent à un donateur ayant atteintle plafond de don, lui proposant plutôt des’engager physiquement dans la cam-pagne. Pour en savoir toujours plus sur lesélecteurs putatifs, la base de données vaaussi récupérer des informations grâce auxcomptes Facebook des sympathisants. Carces derniers pourront se connecter à laplate-forme de soutien de Barack Obamauniquement depuis Facebook. Toutes cesdonnées offriront une foule d’informationssur le comportement des électeurs. Pour,peut-être, voter un jour à leur place ?Alexandre Léchenet

vertes par des prête-noms… dontl’« honorable » Damiano. Les autori-tés finirent par découvrir son jeu etmirent sous séquestre le 22 juillet2009 le café de Paris. L’événementfit jaser : c’était une relique de la« dolce vita » qu’on osait mettre àmal. Le 22 juillet 2011, il fallut procé-der à un second séquestre. Entre-temps, les investigations desenquêteurs du fisc avaient fait degrands progrès. Dans la foulée,d’autres riches établissements debouche romains – en réalitépropriété du crime organisé – sontsimultanément tombés dans leursfilets. Danielle Rouard

A U CAFé DE PArIs, VIA

VEnETO à rOmE, unhaut lieu de la« dolce vita »autrefois fré-

quenté par federico fellini etfranck Sinatra, le présent dépassela fiction. cet établissement vient derenaître après des années passéessous le joug de la ‘Ndrangheta, lecrime organisé calabrais. Désor-mais, il propose, dans son somp-tueux décor, les produits de Liberaterra, une association antimafia.Don Luigi ciotti, un homme de belleprestance, fondateur de ce mouve-ment, savoure sa victoire : « Oui,revenez, ici, le local est entre debonnes mains ! » Depuisdécembre 2011, on y trouve l’huiled’olive calabraise, le vin centopassi,de corleone en Sicile, la mozzarellade bufala napolitaine… toutes cesdenrées proviennent de coopéra-tives qui gèrent les terrains agri-coles confisqués par l’Etat auxmafieux de diverses obédiences.Le café de Paris, aujourd’hui ensituation d’administration judiciaire,mais ouvert et toujours couru,revient de loin. En 2005, un barbiercalabrais de réputation modeste,Damiano Villari, l’avait acquis pour250000 euros, alors que sa valeurétait estimée à environ deux centsfois plus. ce n’était pas la seulebonne affaire qu’il avait faite, nonpas tant grâce à ses talents denégociateur qu’à la mainmise surl’établissement d’un chef de clan dela ‘Ndrangheta, Vincenzo alvaro,embauché alors comme… « aide-cuisinier ». En fait, le boss de la« cosca alvaro » recyclait ainsi l’ar-gent sale de son trafic d’armes et decocaïne. Un cerveau, plutôt qu’unartiste des casseroles, qui avaitorganisé ses affaires sous formed’un holding de douze sociétés cou- To

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ROBIN WRIGHT PAR PETER LINDBERGHGERARDDAREL.COM

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L a vengeance est un plat qui se

mange froid et Charles Biétry adécidé de passer à table. Lenouveau directeur des deuxchaînes sportives qu’Al-Jazira

compte lancer en France avant l’été tientenfin sa revanche. A 68 ans, ce Breton sur-nommé « le Menhir » pour sa tête dure, estrevenu avec fracas au centre du jeu média-tico-sportif français. Coup sur coup, leschaînes qataries et leur directeur NasserAl-Khelaifi, par ailleurs patron du PSG, ontraflé les droits de retransmission de laLigue des champions, du Championnat deFrance de Ligue 1 et de la Ligue Europa.Joli triplé. Avec, à chaque fois, un grandperdant dans l’affaire : Canal+, qui doit secontenter des restes.Entre Canal+ et Charles Biétry, c’est unevieille et tumultueuse histoire d’amourvache. L’ancien journaliste de l’AFP a été undes piliers de la chaîne cryptée de sa créa-tion en 1984 jusqu’en 1998. Avec le réalisa-teur Jean-Paul Jaud, il a révolutionné letraitement du sport à la télévision. Lesmatchs filmés à plusieurs caméras, les mul-tiplex ou les fameuses « statistiques », c’estnotamment lui qui les a inventés. Pendantses années Canal, Charles Biétry a régné surle foot français, à l’antenne comme sur les

En coulissesLe meilleur ennemide Canal+.En devenant directeur des chaînes sportivesd’Al-Jazira, Charles Biétry compte bien prendresa revanche sur son ancien employeur.

L’objet. Le ticket demétroc’est le piège classique d’une campagne électorale dans lequel est tombéeNkm. interrogée le 24 février par un auditeur d’europe 1 sur le prix duticket de métro à Paris, la porte-parole de Nicolas Sarkozy a répondu“4 euros et quelques” au lieu de 1,70 euro. “Quand on est ministre, onprend peu le métro…”, s’est-elle excusée.

terrains. Au point d’être choisi en 1998 parla chaîne cryptée, alors propriétaire duPSG, pour diriger le club de la capitale.Mais la greffe ne prendra pas et Biétry nerestera que quelques mois à la tête del’équipe parisienne. Un cuisant échec quece rancunier – il est resté fâché pendantplusieurs années avec son alter ego deCanal+, Michel Denisot – a mis longtemps àdigérer, estimant n’avoir pas été assez sou-tenu à l’époque par la chaîne payante. Lecoup est rude et après un passage peuconcluant sur France Télévisions, ce filsd’instituteur, engagé à gauche – il a adhéréau PS en 2008 –, entame une traversée dudésert, au point d’envisager un temps laretraite entre golf et tennis à Carnac, avantde rebondir en 2009 sur L’Equipe TV.de retour au premier plan, le champion d’Al-Jazira Sports a déclaré la guerre à Canal+.Outre les droits sportifs, le groupe qatari– qui, assure Biétry, ne « pratique pas lapolitique du carnet de chèques », même sila Ligue des champions a été acquise endoublant le prix, pour 61 millions d’euros –débauche à tout-va dans les équipes de lachaîne cryptée.Les journalistes Christophe Josse et DarrenTulett, les dirigeants Sophie Jordan ouThierry Schluck ont été recrutés. Et le

« mercato » ne fait que commencer. Aupoint que Canal+ crie à « l’impérialisme ».« On subit une attaque d’une agressivité etd’une violence absolument inouïes », a réagiCyril Linette, patron des sports de Canal+,qui a pour l’instant réussi à conserver lesstars de la chaîne Pierre Ménès et Chris-tophe Dugarry. « J’ai passé dix-huit ans àCanal+, c’est un peu mon bébé. Certainespersonnes ont éprouvé du mépris pour nous,maintenant elles savent qu’on existe », acommenté, bravache, Charles Biétry. L’an-cien gardien de but vient par ailleurs detrouver les futurs locaux de ses chaînes :l’immeuble La Factory à Boulogne-Billan-court (Hauts-de-Seine). A quelques cen-taines de mètres du siège de Canal+.Bastien Bonnefous

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Face à faceScrutin majoritairecontre proportionnel.La chasse aux électeurs des petits partis est ouverte. Parmi les appâts lancés à lafois par François Hollande et par Nicolas Sarkozy, l’introduction d’une dose deproportionnelle aux élections législatives. Une promesse qui n’a rien de nouveau.

Deux toursActuellement, le scrutin uninominal majoritaire à deux tours

est en vigueur dans les 577 circonscriptions législatives.S’il n’y a pas de majorité absolue au premier tour,le candidat arrivé en tête au second tour est élu.

La loi du plus fortLe scrutin majoritaire amplifie le

succès des grands partis et facilitela constitution d’une majorité forteau détriment des partis faibles ou

isolés. D’où l’idée d’instiller« à la marge » une « dose » de

proportionnelle en élisant certainsdéputés au scrutin de liste.

Une représentationplus fidèleLa proportionnelle traduit plusfidèlement le rapport de forcesissu des urnes. Pour éviter unéparpillement excessif, on fixe unseuil (5 %, par exemple) minimumpour obtenir des sièges.

Le choix desgrands partis

Les fondateurs de la Ve Répu-blique ont imposé le scrutinmajoritaire. Il a fallu attendre

les législatives de 1986 pour quela gauche instaure la proportion-nelle, mais la droite, victorieuse,

l’a aussitôt supprimée. Entreles deux tours de la présiden-tielle de 2007, c’est, cette fois,

Nicolas Sarkozy qui plaide pourl’introduction « d’un peu de

proportionnelle ». Une promessequ’il ne tiendra pas.

Un tourLa représentation proportionnelle est un mode de scrutinde liste généralement à un seul tour. Les électeurs votenten faveur d’une des listes de candidats en présence. Lessièges sont attribués en proportion des résultats obtenus.

Un geste attendupar les petits partisChacun a de bonnes raisons devouloir plus (ou moins) de propor-tionnelle. Soucieux de ménager sesalliés, le PS prévoit d’en instaurerune (légère) dose. Nicolas Sarkozy,quant à lui, cherche à s’attirer lesbonnes grâces des électeurs du FNet du centre. Victimes du « voteutile », les Verts comme le Front degauche la réclament afin de ne pasêtre dépendants du soutien du PS.Le MoDem de François Bayrou y estfavorable. Enfin, pour le FN, c’est leseul moyen d’avoir des députés.Jean-Michel Normand

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A utrefois, il suffisait d’un solide CV, d’unelettre de motivation bien sentie et d’unesérieuse préparation à l’entretien d’em-bauche pour décrocher un emploi.Aujourd’hui, aux Etats-Unis, les entre-

prises optent pour des méthodes de recrutement dites« extrêmes » qui relèvent plus de l’expérience psycholo-gique que de l’entretien d’embauche. Elles s’inspirent desémissions de télé-réalité, des jeux télévisés ou encore destechniques d’auditions d’acteurs afin de trouver la perlerare et mesurer son « QI social ». Les candidats-concur-rents peuvent être invités à dîner ou à boire un verre dansun bar, histoire de voir comment ils se dévorent entre eux– ou pas – et identifier les différents profils. Sympathique,parano, solidaire, carnivore, sans pitié… L’employeur peutégalement se contenter de donner carte blanche au postu-lant : « Divertissez-moi pendant cinq minutes, je ne dirai pasun mot. » D’autres encore exigent des candidats stagiairesqu’ils se « vendent » en treize tweets ou encore qu’ilspassent un entretien groupé sur le site de microblogging.La place revenant au plus réactif.Avec 12,8 millions d’Américains au chômage, lesemployeurs croulent sous les demandes et affirment qu’unentretien traditionnel n’y suffit plus pour départager lescandidats. Google, par exemple, reçoit plus d’un million deCV par an! En matière de stratégie d’embauche, l’entreprise

de Californie fait figure de pionnière. Ses questionnaires,que certains qualifient d’absurdes et de tordus, sont désor-mais aussi célèbres que redoutés. Exemples : « Un homme apoussé sa voiture jusqu’à l’hôtel et perdu toute sa fortune.Que s’est-il passé? », « Concevez un plan d’évacuation pourla ville de San Francisco », « Combien feriez-vous payer pourle nettoyage de l’ensemble des vitres de la ville de Seattle? »ou encore « Combien de balles de ping-pong peut contenirla mer Méditerranée? »… « Les études montrent que lesentretiens traditionnels n’en révèlent pas assez, affirme auTime William Poundstone, auteur de Are You Smart Enoughto Work at Google? (« Etes-vous assez intelligent pour tra-vailler chez Google? », éd. Little, Brown and Company,2012, non traduit). Ils balancent ce genre de questionsexcentriques pour savoir ce dont sont capables les candi-dats, s’ils sont créatifs, ouverts et flexibles. » Ces entretiensne sont plus exclusivement réservés aux geeks de la SiliconValley. Ils se sont répandus comme une traînée de poudredans tous les secteurs d’activité : la banque, le conseil,l’agroalimentaire, la distribution… Les précurseurs du genresont en réalité les Britanniques. Depuis plus de cent ans, lesétudiants aspirant à intégrer l’élite des universités d’Oxfordet de Cambridge doivent se soumettre au fameux testOxbridge, dont l’une des questions phare est devenue lamarque de fabrique : « Préféreriez-vous être une pomme ouune banane? » Louise Couvelaire

Ils font ça comme ça!Les DRH américainsont de drôlesde méthodes.Questionnaires absurdes, soirées dans des bars,courses de tweets… Pour départager les candi-dats à l’embauche, les recruteurs américainsutilisent des techniques peu conventionnelles.

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Lechiffre.

54,6C’est, en centimètres, lataille du nouvel hommele plus petit du monde,selon leGuiness Bookdes records. Agéde 72 ans, ChandraBahadur Dangi estnépalais. « Cettereconnaissancecompense desannées de souf-france », a réagicet orphelin, exposécomme phénomène defoire par sa familled’accueil durantson enfance.

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DécodageRupert Murdoch, le retour?Lemagnat australo-américain a connu une descente aux enfers en 2011.Investissements hasardeux, scandales, procès, son groupe est malmené.Mais l’énergique octogénaire n’a pas dit son dernier mot. Par Louise Couvelaire

Février 2012La contre-attaqueAlors qu’une nouvelleenquête sur des pra-

tiques de corruption depoliciers a donné lieu à

l’arrestation de dixjournalistes du Sun, letabloïd le plus vendu

du Royaume-Uni(2,6 millions d’exem-

plaires), et entraîné desrumeurs de fermeture,le magnat lance une

édition dominicale duSun pour remplacer lefeu News of the World.Le premier numéro du

Sun on Sunday est parule dimanche 26. Jugédécevant et tiède, il a

malgré tout étévendu à 3,2 mil-lions d’exem-

plaires.

2010. Citizen Murdoch au sommetLe groupe de Rupert Murdoch, News Corp, présent dans la presse écrite(il possède leWall Street Journal et le New York Post aux Etats-Unis, le

Times et le Sun au Royaume-Uni), le cinéma (avec les studios de la20th Century Fox), l’édition (HarperCollins), Internet (MySpace) etla télévision (Fox News aux USA, BskyB au Royaume-Uni), réaliseun chiffre d’affaires de 32,8 milliards de dollars et engrange2,5 milliards de dollars de bénéfices (1,7 milliard d’euros).

Février 2011Un pari risquéNews Corp débourse 30 millions de dollars(22 millions d’euros) pour lancer The Daily,un journal exclusivement numérique pourtablettes. Huit mois plus tard, avec80000 lecteurs payants, il est loindes 500000 abonnés nécessairesà son équilibre.

Juin 2011Un gouffreIl vend le réseau social MySpacepour un montant de 35 millions de

dollars (24,5 millions d’euros).En 2005, il l’avait acquis pour…

580 millions de dollars.

Juillet 2011 Le scandale fatalA la suite du scandale des écoutes téléphoniquesillégales, Rupert Murdoch ferme News of the

World. Le dernier numéro, vendu à 5 millionsd’exemplaires, paraît le dimanche 10 juillet.S’ensuivent des démissions en cascade,dont celle du chef de Scotland Yard. Enfermant le journal, Murdoch espéraitobtenir l’autorisation de racheter latotalité du bouquet satellite bri-tannique payant BskyB, dont ildétient déjà 39 %. Mauvaispari. Il est contraint derenoncer.

Octobre 2011Des pratiques douteusesLe quotidien économique américainWall Street Jour-

nal est à son tour dans la tourmente. Le journal, avecl’aide d’un cabinet de consultants néerlandais, aurait

gonflé la distribution de son édition européenne.

Janvier 2012De coûteuses transactionsNews Corp a indemnisé 37 victimes d’écoutes télépho-

niques, dont Jude Law, pour un montant de 150000 euros. Lafamille de Milly Dowler, une collégienne de 13 ans retrouvée

assassinée, a reçu 2,3 millions d’euros (auxquels s’ajoute un don d’unmillion de livres à des associations). Pendant l’enquête sur sa dispari-

tion, News of the World avait écouté la boîte vocale de la jeune fille.

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A l’écart des vaches et des moutons du salon

de l’agriculture, à Paris, Jacques Chemi-nade discute avec Xavier Beulin, le prési-dent de la FNSEA (Fédération nationaledes syndicats d’exploitants agricoles).

L’événement voit défiler tous les candidats à la présiden-tielle, alors pourquoi pas lui? Celui qui peut sans doute pré-tendre au titre de postulant le moins médiatique assureavoir rassemblé les 500 parrainages nécessaires. Alors que,ce dimanche 26 février, François Bayrou vient tout justed’effectuer son parcours imposé au Parc des expositions,porte de Versailles, Jacques Cheminade n’est pas du genreà prendre la pose pour caresser les vaches. Pas de dégus-

J’y étais… au Salonde l’agriculture avecJacques Cheminade.

Lemot.NomophobeC’est peut-être le futur mal du siècle. est nomophobe celui qui a peur d’être sans sontéléphone portable. Selon une étude anglaise, la nomophobie (no-mobilephobie) est une maladie en pleine croissance: 66% des britanniquesaffirment en effet souffrir d’une dépendance psychologique au portable.

tation de vin rouge ni de charcuterie pour le candidat deSolidarité et Progrès. Il est là pour se faire connaître auprèsdes grands acteurs du secteur agro-industriel. Et, forcé-ment, il a du pain sur la planche. C’est-à-dire des mains àserrer, celles des représentants professionnels – qu’il ren-contre avec son dossier «Agriculture» sous le bras –, sousle regard des cinq jeunes gens qui composent sa garderapprochée. A 70 ans, Jacques Cheminade en est à sa deu-xième campagne présidentielle. En 1995, celui qui se définitcomme «gaulliste de gauche»,mais que l’on peine à classersur l’échiquier politique, avait réuni 0,28 % des voix. L’ENA,HEC, l’administration publique : son parcours ressemble àcelui des autres candidats, mais son programme pas vrai-

ment. Il préconise, par exemple, l’industriali-sation de la Lune et mise notamment sur ledéveloppement de la «créativité humaine».Influencé par l’homme politique extrémisteaméricain Lyndon LaRouche, Cheminaden’a pas hésité à relayer ses saillies virulentescomparant la politique de santé d’Obama àla politique médicale des nazis…suivi par un groupe de journalistes réduit à sa

plus simple expression – une équipe de M6,pour l’essentiel –, le porte-drapeau de Soli-darité et Progrès hâte le pas vers le stand del’Office national des forêts sans chercher ànouer le contact avec les anonymes qu’ilcroise. Jacques Cheminade n’aborde per-sonne et ne parle qu’à ses conseillers. Arrivéen lisière d’une forêt miniaturisée, il s’entre-tient à voix basse avec un représentant del’ONF avant de filer vers le plateau de lachaîne de la TNT Terre d’infos. Il y évoquel’idée d’une chaîne de télévision qui expli-querait aux Français «comment on produit».«Il n’est pas très précis», peste un spectateurdans le public. «Justement, c’est aux élec-teurs de chercher pour mieux comprendre»,répond avec assurance Bertrand Buisson,membre du mouvement Solidarité et Pro-grès. Happé par Guy Vasseur, président del’Assemblée permanente des chambresd’agriculture, Jacques Cheminade acceptefinalement un petit verre de rouge et unetartine de chèvre. «Je ne connaissais pas lecandidat, avoue Guy Vasseur.Mais il a bienexprimé sa politique de la ruralité.» Ça valaitle coup de se déplacer. Une personne aumoins l’aura compris. mathilde Carton

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Le 23 février, ses talonsaiguilles n’ont pas claquéque sur le pavé de Lillequand Rachida Dati est

venue soutenir Nicolas Sarkozy.On a vu ses bottes rouge vif surcent sites Internet. On la croyaitsur la touche, écartée pour s’êtremis à dos la corporation desmagistrats puis opposée brutale-ment à François Fillon. Mais non,Rachida Dati n’est pas dans sespetits souliers. Une paire debottes et la voilà relancée dansles médias, tant une belle femmebatailleuse et le fétichisme de lachaussure ne laissent personneindifférent. Qu’a déclaréMmeDati, juchée sur ses bottes deluxe ? Que la gauche parlait « aunom des quartiers populairessans les connaître ». Que NicolasSarkozy était le « candidat dupeuple ». Le député UMP de laSomme Jérôme Bignon a surtoutvu « la people », il a tweeté qu’iln’était pas venu à Lille « pourécouter les vedettes américainesde Paris-7e ». Mais Mme Dati neporte pas que des bottes bling-bling dans cette campagne. Leurcliquetis rythmé doit faire reten-tir un autre air, délaissé parM. Sarkozy depuis quatre ans.Celui de la diversité. Où sontpassés les engagements de2008 sur la discrimination posi-tive, la création d’un commissa-riat à la diversité et à l’égalitédes chances? Depuis, le prési-dent-candidat chasse sur lesterres du FN, parle identiténationale, loi sur le voile, crimi-nalité des étrangers et laissel’austère Guéant appeler à laguerre des civilisations. Il faudraque Mme Dati, hier symboled’un gouvernement d’ouverture,claque fort ses talons rougespour faire oublier ces revire-ments.

JENEPENSEQU’ÀÇA !Frédéric Joignot

A PRÈS LE SMARTPHONE, bientôtla « smartracket ». Babo-lat, une entreprise fami-liale à qui l’on doitl’invention du cordage

pour raquettes de tennis en 1875, déve-loppe la première raquette à puce. Muniede capteurs intégrés dans le manche, quienregistreront un certain nombre de para-mètres, la raquette Play & Connect permet-tra aux joueurs de tennis d’obtenir unemultitude d’informations sur leur jeu. Les-quelles? Motus et bouche cousue du côtéde la PME lyonnaise, où le produit est enplein développement. « Tout est possible etrien n’est encore arrêté », affirme le PDGEric Babolat, arrière-arrière-petit-fils dufondateur de l’entreprise, Pierre Babolat.A priori, on peut tout de même deviner queces capteurs seront capables d’enregistrertout ce qui se passe pendant le jeu, lorsquel’on frappe la balle. En plus de son score etde son classement, le joueur pourraitconnaître le nombre de revers et de coupsdroits, la puissance de ses coups et savoir,par exemple, s’il a bien centré ses ballesdans le tamis.« EN DEHORS DES COURTS CENTRAUX, les matchssont rarement filmés et l’on ne dispose pastoujours de radars dans les clubs. Lesjoueurs disposent de peu d’informationsau-delà de leurs sensations. Ils manquentd’éléments pour analyser leur jeu et évaluerleur performance », explique Eric Babolat.« Play & Connect leur apportera une dimen-sion nouvelle : en leur fournissant des don-

nées statistiques, ils pourrontétudier leur propre progres-sion et comparer leur per-formance à celle d’autresjoueurs », ajoute-t-il. Dans

l’air du temps, la dimension communautaire,avec une plate-forme, n’a pas été oubliée.Mieux comprendre son jeu pour progresser :voilà l’objectif affiché par Babolat, quiplanche depuis cinq ans sur cette technolo-gie de pointe, en partenariat avec desindustriels, des laboratoires et des universi-tés qu’elle tient à garder anonymes, secretde fabrication oblige. « Ce sont les meilleursdans leur domaine », glisse Eric Babolat.Pour lui, « l’innovation ne vaut que si elle faitprogresser le tennis et profite au plus grandnombre ».Fabriquée en Chine, Play & Connect s’adres-sera tant aux joueurs professionnels qu’auxamateurs du dimanche. Un prototype de laraquette nouvelle génération sera présenté,en mai, lors du tournoi de Roland-Garros,devant un public restreint. Qui montera aufilet? Rafael Nadal ou Jo-Wilfried Tsonga,partenaires de la marque? Là encore,silence. La mise sur le marché n’est pasprévue avant 2013. Une phase de testsdémarrera en septembre auprès d’unecentaine de joueurs, y compris de niveaumoyen. Après tout, il n’y a pas que les starsqui peuvent faire progresser le tennis.Laurène Champalle

SPORT

Un moucharddans le manche.Une raquette de tennis qui renseignele joueur sur la qualité de ses coups:c’est la promesse d’une PME lyonnaise.

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Le roman-photode la bombeiranienne.La mise au ban de Téhéran n’estque le dernier épisode d’une sériede crises au sujet du programmenucléaire iranien, démarré autemps du chah.

1957. Les Etats-Unis initient l’Iran à l’atomeLe chah d’Iran signe avecWashington un programmede coopération nucléaire civile. Onze ans plus tard,Téhéran signe le traité de non-prolifération. Maisderrière le volet civil pointe déjà l’ambition militairede posséder, à terme, la bombe atomique.

1975. La France fournit l’uraniumParis et Téhéran deviennent partenaires au seindu consortium européen Eurodif. L’Iran prêtealors 1 milliard de dollars à la France pour laconstruction de l’usine d’enrichissement d’uraniumde Pierrelatte dans la Drôme, inaugurée en 1979,et acquiert en échange 10 % de la future productionannuelle du site.

1979. Khomeyni renverse les alliancesLe chah est renversé. L’ayatollah Khomeynidénonce les accords passés avec lesOccidentaux; Paris suspend les livraisonsd’uranium enrichi. S’ensuit un long conflitmarqué par une série d’attentats en Franceet la crise des otages au Liban, dont lalibération passera par un compromis surEurodif. Paris rembourse le prêt iranien etTéhéran se rapproche de l’URSS.

2005. Ahmadinejad joue la provocationCinq jours après l’élection de Mahmoud Ahmadinejad,l’Iran, accusé par GeorgeW. Bush d’être dans l’« axe duMal », reprend la conversion d’uranium dans une usined’Ispahan. Un an plus tard, le président iranien annonceque « l’Iran a rejoint le groupe des pays qui ont la tech-nologie nucléaire ».

2012. Israëlmenace de frapper.Confronté à la pré-sence d’une déléga-

tion de l’Agenceinternationale de

l’énergie atomiquedepuis le 20 février

pour enquêter sur sonprogramme, Téhéranrefuse de négocier à

propos de ses « activi-tés nucléaires ». Israël

menace l’Iran defrappes aériennes

pour détruire ses ins-tallations. AWashing-

ton, le présidentObama, en pleinecampagne pour sa

réélection, temporise.Bastien Bonnefous

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jeux vidéo

PlayStation jouel’innovationface aux tablettes.Avec la console Vita, Sony n’affronte passeulement son éternelle rivale Nintendo.Tablettes et smartphones sont en embuscade.

S ony va avoir fort à faire. Sa console vita,lancée le 22 février sur les marchés améri-cain et européen, doit trouver sa place nonseulement sur un secteur très disputé,notamment du fait des positions acquises

par son rival traditionnel Nintendo, mais aussi en raison dela concurrence nouvelle sur le secteur des smartphones etautres iPad. La vita peut, en tout état de cause, s’appuyersur une offre de lancement très riche. Les jeux d’aventuresuncharted, Golden Abyss ou le futuriste Wipe out, sortisen même temps, laissent deviner ses capacités techniques.d’importants éditeurs, tels electronic Arts, Sega ouCapcom, ont aussi répondu présents pour fournir des ver-sions adaptées de leur titre à succès. Sony promet mêmedu matériel de jeu innovant, avec des titres comme escapePlan, jeu de puzzle original, à l’esthétique en noir et blanc.Ce pari du jeu pour le jeu de la PlayStation vita peut-il réus-sir, et faire mieux que la PSP de Sony, qui s’est vendue àplus de 73 millions d’exemplaires dans le monde depuis2007? Le prix de la console peut constituer un premierfrein. elle est vendue 250 euros pour la version Wi-Fi et300 euros pour la 3G, mais l’utilisateur doit aussi acheterune carte mémoire (35 euros environ pour 8 giga). Pourl’heure, Sony a vendu 600000 consoles vita au japon,selon le site spécialisé vG Chartz. Après un démarrage dif-ficile, la grande concurrente directe de la vita, la Nintendo3dS, proposée aux alentours de 150 euros, semble sereprendre. Plus de 15 millions de consoles ont été écoulées,dont 5 millions au japon, près d’un an après sa sortie. Maisla concurrence ne vient plus seulement des consoles

rivales. depuis 2010, les tablettes numériques et les smart-phones prennent des parts de marché de plus en plussignificatives du jeu mobile. Avec son iPad 3, qu’Applepourrait dévoiler en mars, le groupe américain pourra rivali-ser avec la vita sur le plan technique. et les fabricants detablettes présentent de nouveaux modèles dans des délaisbeaucoup plus courts que le cycle de vie d’une console. Lesecteur des smartphones et des tablettes représente enfindes centaines de millions d’appareils, quand les acquéreursde consoles portables se comptent en dizaines de millionsdans le monde.Les pLates-formes de téLéchargement de type App Store ouAndroid Market modifient également le modèle économiquede cette industrie, en offrant toujours plus d’applicationsludiques, aux mécaniques certes plus rudimentaires, maisà bien moindre coût que des jeux vendus entre 30 et40 euros. Mais, si Apple peut proposer ce snack gaming(« jeu sur le pouce »), c’est parce que l’entreprise ne se rému-nère pas sur les services ou les contenus, mais sur les ventesde ses terminaux. Pour rompre cette « quadrature du pad »du jeu mobile, Sony devra évoluer vers la distribution imma-térielle de contenus (téléchargement en ligne…) et proposerdes jeux à très forte valeur ajoutée. Laurent Checola

La semaine.

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Chuck Norris fait le pont.Un nouveau pont, prochainement bâti en slovaquie, devrait prendre le nomde… chuck norris, la star de la série télévisée américaine « texas ranger »et idole des fans d’arts martiaux depuis son coup de pied circulaire utiliséface à Bruce Lee dans La Fureur du dragon (1972). consultés par voteélectronique, les slovaques ont plébiscité à 74 % l’acteur contre un misé-rable 8 % accordé à marie-thérèse, l’ancienne impératrice austro-hongroise.comme quoi le référendum n’est pas toujours une bonne solution… L’édi-fice, réservé aux piétons et aux cyclistes, enjambera la rivière morava, prèsde la ville de Bratislava. La décision est désormais du ressort de l’assembléerégionale slovaque, mais le gouverneur régional a déjà fait savoir qu’il sui-vrait la vox populi. a quand un obélisque Jean-claude van damme? B. Bo.

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Qui est vraimentUggie?C’est l’autre partenaire de Jean Dujardin dans “The Artist”. Etcomme son maître à l’écran, ce jack russell cumule les lauriers.

Museau virtuel.Après douze filmspour le cinéma etnombre de publici-tés, le héros caninde The Artist vadevenir le nouveau« museau » deNintendogs+Cats,un jeu vidéo quiconsiste à dresseret habiller desanimaux virtuels.

Œil vif.The Artist est ledernier film d’Uggie.L’œil toujours vif, ilva prendre saretraite à Hollywood,où il est né. Selon lalégende, son dres-seur, Omar VonMuller, l’auraitrecueilli tout petitalors qu’il était surle point d’être aban-donné.

Bête de concours.Après avoir poséavec un GoldenGlobe, il a reçu, le13 février à LosAngeles, un « Collierd’Or » couvert decristaux Swarovski,avec un pendentifen forme d’os, poursa prestation dansThe Artist et De l’Eaupour les éléphants.En 2011, il a décro-ché la Palm Dog duFestival de Cannes.

Coup de griffe.Martin Scorseseregrette le choix dujury du Collier d’or.Lui préfère les anti-héros. « Tandisqu’Uggie interprèteune petite mas-cotte », Blackie, ledoberman de sonfilm Hugo Cabret,« livre une perfor-mance sans conces-sions dans le rôled’un féroce chien degarde qui terroriseles enfants ».Jean-Michel Normand

Fine gueule.Ce jack russell peutfaire le mort, détalersur un skateboard,ronfler en dormantou danser en rythmesur ses pattesarrière. Sur le pla-teau, les dresseursde cette fine gueuleont toujoursdes morceauxde saucisse pleinles poches pourle récompenser.

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La semaine.

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Marketing

L’appâtà tartiner.Avec sa pâte Philadelphia au goût duMilka, le groupe Kraft va tenter deconcurrencer l’indétrônable Nutella.

La phrase.« Si je vous traite de sale con, ça va vous plaire?»

Henri Guaino, la « plume » de Nicolas Sarkozy, s’est légèrement emportélorsque son interlocuteur, Jérôme Guedj, le président socialiste du conseil général del’Essonne, a qualifié d’« indigne » et de « délétère » le débat sur l’identité natio-nale à l’émission « La voix est libre », le 25 février sur France 3 Ile-de-France.

L a guerre de la tartine au chocolat est déclarée.

en commercialisant sa « crème légère Phila-delphia au goût du Milka » mi-mars, kraftFoods tente de contester l’hégémonie deFerrero qui, avec nutella, domine le marché

de la pâte à tartiner au chocolat. Philadelphia et Milka sontdes marques phares du groupe américain (LU, Oreo, Milka,trident…) qui ne seront pas trop de deux pour tenter dedéstabiliser Ferrero qui, depuis quarante ans, impose saloi. revendiquant 84 % de parts de marché, le groupeitalien règne en maître sur ce segment dans l’Hexagone,premier consommateur mondial de nutella. Celle qui futd’abord appelée « la tartinoise » est fabriquée selon unerecette tenue secrète par la famille Ferrero, à base dechocolat, de noisettes, de lait, d’huile et d’émulsifiants.Un mélange auquel les Français sont complètementaccro : trois quarts des foyers en consomment et, endécembre, un livre de recettes à base de nutella s’est hissétout en haut du classement des livres les plus offertspendant les fêtes de noël.kraft espère-t-il détrôner ce grand classique des petitsdéjeuners et des goûters? « Non, Philadelphia avec Milka,ce n’est pas du tout le même produit », objecte Laura non-nenmacher, chargée de la communication du groupe enFrance. Certes, le nouveau venu est, lui, un « produit frais »,comme elle le fait valoir. Mais il s’agit bien d’une pâte à tar-tiner au chocolat. et, donc, directement concurrente denutella. en réalité, le challenger compte sur l’argument du

goût mais aussi sur un autre atout, qui saura capter l’atten-tion des parents : la diététique. en effet, kraft s’en tient à305 calories pour 100 grammes là où nutella crève leplafond à 530 calories. en effet, la fameuse pâte noisette-chocolat italienne plébiscitée par les enfants et les adoles-cents – et que certains aficionados adultes rêventd’acheter en pot de 5 kg, comme les professionnels – estdevenue sujet à controverse malgré (ou, peut-être, àcause) de son indiscutable succès planétaire. nutella estrégulièrement accusé de contribuer au développement del’obésité infantile par les nutritionnistes, dont Pierre Dukan,l’auteur du régime protéiné qui porte son nom.cette pâte contient entre 20 et 30 % d’huile de palme, uningrédient riche en acides gras saturés favorisant lesrisques de maladies cardio-vasculaires. « Environ 14 % desenfants sont obèses ou en surpoids : Ferrero constitue unacteur majeur et féroce qui va à l’encontre d’une bonnenutrition », s’emportait, en août 2011 dans Le Point, Olivierandrault, responsable de l’alimentation au sein de l’asso-ciation UFC-Que choisir. Chez Ferrero, on se défend de cesaccusations en affirmant que les obèses ou les personnesen surpoids ne sont pas particulièrement amateurs denutella. « Philadelphia avec Milka », dont le lancement estprévu le 15 mars, prévoit de séduire 3 millions de foyersfrançais au cours des deux prochaines années. Un objectifqui paraît ambitieux mais qui reste en fait modeste auregard des 105 millions de pots de nutella écoulés chaqueannée en France. Mathilde Carton

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La télépeut-elleluttercontre leracisme?Au Royaume-Uni, la chaîne Channel 4tente une expérience qui suscite la controverse.A mi-chemin entre le documentaire, la télé-réalitéet l’expérience de laboratoire, « Make BradfordBritish », une émission en deux parties (premièrepartie diffusée le 1er mars), met en scène huitpersonnages de nationalité britannique d’originesethniques et religieuses différentes. Ils ont étéchoisis parmi une centaine de candidats et ont encommun d’avoir échoué au test de citoyenneté.Ils ont vécu sous le même toit pendant quatrejours avant d’être divisés en paires et d’êtreenvoyés passer du temps dans la famille de leurbinôme. Bradford, dans le Yorkshire, est perçuecomme l’une des villes où les tensions ethniqueset raciales sont les plus préoccupantes. Lesproducteurs expliquent qu’ils cherchaient à savoirsi ces personnes si différentes pouvaient vivreensemble… Louise CouvelaireSte

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Les questionssubsidiaires

Combien coûteun village fantôme?330000 euros pour dix-neuf bâtiments, des ins-tallations sportives (terrain de tennis, piscine, boxpour chevaux…), mais pas un seul habitant. Lehameau de Courbefy, à Bussière-Galant (Haute-Vienne), situé à une quarantaine de kilomètresde Limoges, est à vendre. Habité jusque dansles années 1970, ce village s’est progressivementvidé de sa population sous l’effet de l’exoderural. Totalement abandonné depuis 2008, il estenvahi par la végétation. Le maire déléguéne trouvait aucun acheteur jusqu’à ce queLe Parisien lui consacre un article, le 21 février.Depuis, l’élu serait harcelé de propositionsvenues de France et du monde entier. Plusieursmédias anglo-saxons ont en effet relayé l’infor-mation – les chaînes de télévision CNN et SkyNews sont même venues faire un reportage – etle village intéresserait désormais des Anglais, desAméricains, des Suisses et même un acheteurdes Emirats arabes unis. Bastien Bonnefous

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Commentapaiser lestensionsgermano-grecques?

Le poidsréussit-ilauxjoueursderugby?

Pour tenter de freiner la surenchèredes insultes par médias interposés,le Conseil national de la télévision etde la radio grec vient de condamnerun journaliste de radio à 25000 eurosd’amende pour avoir traité AngelaMerkel de « sale pute de Berlin ». Celafait des mois que les tensions s’accen-tuent. Les Allemands reprochent auxGrecs d’avoir plongé l’Europe dans lacrise et les dépeignent en tricheursfainéants, tandis que les Grecs accu-sent les Allemands de les étrangler enleur imposant des plans d’austéritédrastiques et caricaturent la chance-lière en uniforme SS. Le coup d’envoiavait été lancé en 2010 par la « une »du magazine Focus représentant laVénus de Milo faisant un doigt d’hon-neur. Le lendemain, le quotidien grecde gauche I Nikis avait répondu parun drapeau nazi flottant sur Berlin. L. Ce

Oui, répond lascience. Selonune étude fran-çaise, publiée le21 février dans leBritish Journal ofSports Medicine,les joueurs deséquipes les plusperformantespèsent enmoyenne 2 kg deplus que leursadversaires deséquipes moinsefficaces etmesurent environ2 cm de plus. Al’image du deu-xième-ligne duXV de FrancePascal Papé– 115 kg pour1,96 m – lesjoueurs de rugbyont gagné plusde 6,6 kg et entre0,61 cm et 1,1 cmces vingt der-nières années.Mathilde Carton

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Pourquoiles auto–ritéschinoisesjouent-elles lesmarieuses?Avec sa politique del’enfant unique, l’empire duMilieu souffre d’un déséquilibre entrele nombre de garçons et le nombre defilles (120 garçons pour 100 filles). Lecommissariat de Chengdu, dans la pro-vince du Sichuan, a trouvé la parade etdécidé de prendre en main la vie amou-reuse de ses policiers en créant un sitede rencontres qui leur est exclusive-ment destiné, baptisé Sauvez un poli-cier célibataire. Pour l’instant, cinqhommes, âgés de 25 à 30 ans, se sontprêtés au jeu. En deux semaines, ilsavaient près de 40000 abonnés, etcertaines groupies se sont même direc-tement rendues au commissariat afinde rencontrer les agents, nouvellesstars du Web. Affublés de surnoms« virils » tels que « Ice » ou « Snake », ilsont également un compte Weibo(microblog chinois) afin de pouvoiréchanger avec leurs admiratrices.« Nous ne contrôlons pas leur vie, a pré-cisé le directeur adjoint de la police dudistrict. Nous demandons juste à cequ’ils nous tiennent au courant s’ils onttrouvé une petite amie. » L. Ce

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Quelques jours plustôt, elle chantait en-core « Paroles, pa-roles », de Dalida.Et là, soudaine-ment, elle s’est mu-

rée dans une protestation muette.Marine Le Pen a refusé de répondreaux questions de Jean-Luc Mélen-chon sur France 2, jeudi 23 février.Celui-ci eut beau la questionner surtous les tons. Peine perdue. Elle s’en-ferma dans un mutisme obstiné. Lenez plongé dans son journal, elle inau-gura devant les caméras une nouvelleforme de protestation politique : lebuzz du mutisme. Une situation iné-dite à la télévision. Un débatteur quine débat pas. Du jamais-vu. On en-tenddéjà les protestations des produc-teurs du spectacle politique. Capricede star! Certains vont invoquer la dé-fense des usagers pris en otage,d’autres exigeront un service mini-mum dans les débats publics. L’inci-dent ne mériterait pas qu’on s’y at-tarde s’il ne rendait visible une véritéqui n’est pas toujours aussi accessible.Dans les campagnes performatives

modernes, il s’agit moins de débattreque de capter l’attention.On fait cam-pagne en cercle restreint, avecquelques arguments, une cellule ri-poste, un agenda médiatique. Et c’està peu près tout.Pourquoi s’encombrerde citoyens, quand il s’agit de confierle pouvoir à des experts pilotés par desspin doctors?Ainsi la vie démocratiquerégresse vers toujours plus de gestionautoritaire et de spectacle. Le Frontnational n’en est pas exempt: à l’abride sa non-participation aux gouverne-ments de droite, il inspire depuistrente ans une entreprise de retourne-ment de l’idéal républicain: en crimi-nalisant l’immigration, en bâtissantdes murs aux frontières, en encadrantla liberté d’expression, en surcodantl’identité et la citoyenneté par lareligion.

L’AFFRONTEMENT ENTRE MARINE LE PEN

et Jean-Luc Mélenchon a donc valeurde symbole. Car M. Mélenchon, lui, àla différence de Mme Le Pen, madonemédiatique, fruit d’un croisementhasardeux entre Jeanne d’Arc etSarah Palin, fait de la politiqueà l’ancienne, celle qui, depuis lesGrecs, fait naître la « res publica » del’esprit de révolte et qui renaît en cetteannée 2012 sur les places publiquesd’Athènes et se propage de Tunisau Caire, de Madrid à Wall Street. Lapolitique considérée non pas commeune série télévisée, mais comme unmoment d’intense discussion. Car, onl’avait oublié, il n’y pas d’autre forme àla démocratie que l’attroupementspontané d’une foule en colère. C’estelle qui donne naissance au premierforum. C’est elle qui inaugure la

grande dispute citoyenne qui fonde ladémocratie.C’est le grandmérite de lacampagne de M. Mélenchon que derenouer avec ces sources de la démo-cratie. Elle opère un triple déplace-ment du débat public. De la scène dusouverain et de ses rivaux vers la scènedu forum, de la place publique. Ellemilite pour un changement socialmaisaussi pour un changement de percep-tion. Elle rend contagieux un certainétat d’esprit. Le renversement iro-nique du haut et du bas. L’esprit ducarnavalesquequiprésideauxpériodesde grand bouleversement.Loin des « éléments de langage » quisclérosent la parole politique,M. Mé-lenchon emploie une langue qui sesouvient de Rabelais, de Villon, mais

aussi de Brassens. Aux « ébahis de lacom’ » qui ne savent qu’imiter lescampagnes à l’américaine,M.Mélen-chon oppose l’histoire de France del’émancipation : « De La Boettiez auxphilosophes des Lumières, des “Maillo-tins” de Paris, courant plus vite que lesbourgeois, aux sans-culottes, Robespierre,fondateur de notre liberté, Olympe deGouges, notre remords, Gracchus Babeuf,

ceux de 1848 et les communards, le martyrdes résistants pour vaincre les nazis, lalutte pour la décolonisation. Tout, nousprenons tout. [...] Jean Jaurès et l’in-domptable Louise Michel. » Le revoilà,le citoyen qui avait disparu des cam-pagnes électorales soumises à la bêtisenarrative, celle qui nous fait choisir uncandidat commeunemarque,dans unmouvement de sympathie dévoyée.Le revoilà le peuple absent, le « peuplequimanque », disaitGillesDeleuze,unpeuple qui s’était détourné de lagauche… Car comme le rappelait lephilosophe allemandPeter Sloterdijk,« c’est leur colère synchrone contre l’arro-gance sans bornes des puissants qui a ap-pris aux petites gens qu’ils voulaient dé-sormais être des citoyens ».

Jean-Luc Mélenchon fait de lapolitique à l’ancienne, celle qui, depuis lesGrecs, fait naître la “res publica” de l’espritde révolte, celle qui renaît justement en2012, à Athènes et se propage de Tunis auCaire, de Madrid à Wall Street.

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“WAR ROOM”, LA CAMPAGNE PRÉSIDENTIELLE VUE PAR

Christian SalmonLoué soitMélenchon !

46 - 3 mars 2012

La semaine.

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ModeDes hérautstrès discrets.Leur notoriété ne dépasse pasle petit monde de la mode maisleur influence y est immense.L’Allemande Karla Otto, l’Améri-cain Ed Filipowski et le FrançaisPierre Rougier assurent lacommunication des marques lesplus prestigieuses de la planète.Enquête sur un trio tout-puissant.Par Samuel Loutaty/Photos Stéphane Feugère

A Milan, fin févrierà l’entrée du défiléautomne-hiver 2012-2013 d’ErmannoScervino.

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/ Portrait / Analyse /Reportage / Enquête / Portfolio /

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Karla Otto, fondatrice dubureau de presse qui porteson nom, avec RobertRabensteiner de L’UomoVogue (1), Jefferson Hackd’Another Magazine (2),Edward Enninful de WMagazine (3) ou l’extrava-gante Anna della Russo deVogue Japon (5).

6. Ed Filipowski, présidentde l’agence KCD Worldwide.7. A l’entrée d’un défilé.

4. Le RP indépendantAngelo Sensini prône lacommunication sur mesure.

8. Pierre Rougieret son alter ego, SylviePiquet Damesme,de PR Consulting.

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a « trahison » d’isabel Marant,

le mot n’est pas trop fort, a faitgrand bruit en 2009 dans lesrédactions de mode pari-siennes, souvent peuplées detragédiennes ou… d’his-

trionnes. Cette créatrice, connue pour son style« hippie chic » (dont la quintessence est sansdoute le t-shirt lâche qui, bien que neuf, a l’aird’avoir été déjà souvent porté), était couvée,avec les attentions d’une mère, par CatherineMiran, son attachée de presse depuis dix-huitans. Seulement voilà, quand la chouchoute desrédactrices de mode a voulu ouvrir ses propresboutiques à New York, conseillée par la trèspointue Emmanuelle Alt (devenue rédactriceen chef de Vogue France), elle a rejoint KCD,gargantuesquebureaudepresse américain,plusapte à lui assurer un développement à l’interna-tional. « Isabel Marant, c’était un peu l’histoired’Astérix contre les Romains, raconte une ré-dactrice de mode.La petite Française qui perceà New York avec les moyens du bord… Et puis,un jour, elle passe à l’ennemi, la “firme” KCD,dirigée par un “bouledogue”, Ed Filipowski, quihurle sur les rédactrices de mode. Forcément, ça afait du bruit…»Si l’on osait une comparaison, le passage d’Isa-belMarant chez KCD, ce serait un peu commesi, en son temps, pris d’une lubie, feu JulienGracq avait quitté les éditions Corti pour re-joindre l’ogre Gallimard. Ou comme si Sté-phane Hessel décidait de publier le tome 2d’Indignez-vous aux éditions Fixot en lieu etplace d’IndigènesEditions,qui a assuré sonpre-mier succès. Pour anecdotique qu’il soit, cetransfert est symptomatique du pouvoir d’at-traction-répulsion qu’exercent sur le milieu •••

Le nom(voirele simpleprénom)de cesseigneursde la com’suffit àprovoquerstupeuret tremble-mentschez lesrédactricesde modeà l’heuredes défilés…

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le magazine.

3 mars 2012 - Photos Stéphane Feugère pour M Le magazine du Monde

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secteur se développait à l’abri des groupescomme PPR ou LVMH, la communication aété prise en charge en interne. Prada, Vuitton,Gucci et les autres n’ont plus recours à cesagences qu’exceptionnellement. Ou, commec’est le cas pour KCD, pour assurer la logistiquedes défilés.La puissance des marques qu’ils représententnourrit la puissance de leur emprise sur les ma-gazines. Selon notre consultant dans le secteurdu luxe, « quand Karla Otto s’adresse à un ma-gazine de mode, sa rédactrice en chef sait qu’ellegère beaucoup de marques. Son influence est là.Difficile de refuser un sujet sur une marque s’il estproposé par un gros bureau de presse… ». Lamode est un univers très personnalisé, observeFrédéric Godart, sociologue et auteur de Penserla mode (IFM-éditions du Regard), « qui doits’incarner dans des marques, des tendances… Ettous les autres segments de la mode sont concernéspar cette personnalisation. Son journalisme a sesfigures – comme Suzy Menkes [la journalistemode du Herald Tribune, ndlr] –, sa communi-cation, les siennes… ». Le milieu de la modeprête donc à ce triumvirat des relations presse(et, c’est bien connu, on ne prête qu’aux riches)tous les pouvoirs. Celui de décrocher à un créa-teur qu’ils chérissent quatre pages dans Vanity

de la mode ces seigneurs de la communica-tion:Ed Filipowski,Karla Otto mais aussi PierreRougier, qui se partagent à eux trois la majeurepartie du gâteau des relations presse, laissantaux autres bureaux une portion importante maispas forcément la plus prestigieuse… Si leursnoms (voire leurs simples prénoms) suffisent àprovoquer stupeur et tremblements chez lesrédactrices de mode à l’heure des défilés, legrand public ne les connaît pas.A l’instar de Sté-phane Fouks, de Michel Calzaroni et d’AnneMéaux, qui conseillent à peu près tous les pa-trons du CAC 40 et les hommes politiques, ilsfont pourtant office de gourous. Rarement sym-pathiques. Souvent inquiétants. Et toujoursmystérieux. Pour avoir une idée de leur poidsdans la mode, le lecteur dont la bible ne seraitpas Vogue ou Numéro doit imaginer mises boutà bout les luxueuses avenues Montaigne à Paris,Bond Street à Londres et Rodeo Drive à LosAngeles. Ces artères chics suffiraient à peine àcontenir l’incroyable portefeuille de maisonsavec lesquelles ils collaborent. Jil Sander, NinaRicci, Proenza Schouler, Versace ou Vera Wangpour Pierre Rougier Consulting, Balmain, Gi-venchy, Gucci,Vuitton, Marc Jacobs, Isabel Ma-rant chez KCD et Marni,Pucci,Diane von Furs-tenberg, Viktor & Rolf du côté de chez KarlaOtto… Avec, à la clé, les millions de dollars oud’euros que représentent les budgets de com-munication de ces maisons parfois fastueuses.Impossible de savoir à combien émargent cespatrons de bureaux de presse. « Tout au pluspeut-on évaluer un budget de relations pressepour une moyenne marque de prêt-à-porter ins-tallée en France à environ 7000 euros par mois.Pour une maison de luxe aux visées internatio-nales, ces sommes s’envolent et peuvent être mul-tipliées par dix, voire beaucoup plus », nousconfie un consultant dans le domaine du luxe.Surtout que, depuis l’irruption de géantscomme Gap ou H&M sur le marché de lamode, la donne a changé. Des passerelles sontnées entre luxe ou création et très grande dis-tribution. De même que Karl Lagerfeld peutdiriger Chanel et dessiner une collection pourH&M, avec la « branchisation » des marquestrès grand public, Karla Otto peut récupérer,sans crainte de galvauder son image « cou-ture », des marques comme Levis ou Cos, etEd Filipowski, Gap. Grâce à la grande machineà laver de la com’, ces basiques grand publicdeviennent ainsi « casual chic » dans les maga-zines féminins peu avares d’anglicismes. Etenrichissent leurs bureaux de presse, qui asso-cient ainsi des marques très rémunératrices(même avec un chiffre d’affaires en baisse, Gapc’est près de 3000 magasins dans le monde etun chiffre d’affaires qui tutoie les 10 milliardsd’euros) à des marques plus branchées quicontinuent d’attirer les créateurs à fort poten-tiel d’image. L’arrivée de ces marques grandpublic dans les écuries de ces agences de com-munication compense aussi la « perte » desgrands noms du luxe. En effet, à mesure que le

Fair. Ou celui de refuser l’accès à un défilé àune journaliste par exemple, comme ce fut lecas, en 2010 chez Balenciaga, pour Carine Roit-feld (alors rédactrice en chef de Vogue) et sonéquipe. Ed Filipowski soupire devant ce genred’enfantillage: « L’obsession du paraître au dé-filé est “démodée” [il insiste en utilisant le motfrançais,ndlr].Avec la globalisation grandissantede la mode, tout ce cirque n’a plus autant d’im-portance qu’il y a une dizaine d’années. » Soit.

Courtisés etassaillis dedemandesde tous ordres,surtout en période de défilés, Karla Otto, EdFilipowski et Pierre Rougier aiment à cultiverune certaine distance chacun à leur façon. Ilexiste très peu de portraits d’eux dans la presse.Et la plupart des acteurs du milieu préfèrent seretrancher dans l’anonymat pour les évoquer…Bizarrement, un peu comme les créateurs dontils s’occupent et qu’ils protègent des médias,lorsque le contact est établi, par-delà les bar-rages inhérents à leurs agendas surbookés géréspar des assistants personnels, ils se révèlent àtout le moins normaux voire, au risque de frois-ser leur légende, aimables.Née à Bonn, Karla Otto est une beauté froide…et brune. Cet ancien mannequin a ouvert sapropre agence à Milan, en 1982, et doit son suc-cès à Jean Paul Gaultier qui, le premier, lui aconfié ses relations presse en Italie. Jil Sander,Miuccia Prada, Marni et Pucci suivront. Entreautres. Celle qui est capable de changer de te-nue six ou sept fois par jour pendant les défilés– elle a gardé sa taille mannequin, cela aide –snobe soigneusement les importuns. Ce qui luiréussit plutôt:elle est aujourd’hui à la tête d’uneentreprise internationale qui compte près de180 personnes et des bureaux à New York, LosAngeles, Paris, Londres et Hongkong. Sonmantra ressemble à celui d’une multinationale:« Think positive ! »Aussi rond que Karla Otto est mince, aussi amé-ricain qu’elle est allemande,Ed Filipowski n’enreste pas moins redoutable. Son succès depuisvingt-cinq ans, l’actuel coprésident de KCD ledoit à deux qualités essentielles. « Un flair sanspareil », explique un proche.Qu’il met en scèneen racontant cette anecdote : « J’ai commencédans les relations presse en envoyant des fleurs àKezia Keeble, la fondatrice de KCD. J’ai touchéjuste, c’était ses fleurs préférées. Le lendemain, ellem’a embauché. » Seconde qualité, un entregenttout aussi infaillible. Aidé en cela par son com-pagnon de longue date, Mark Lee, qui a été, de2004 à 2008, PDG de Gucci. « Evidemment, à ceniveau de responsabilités, si Ed n’avait pas de ta-lent, il n’aurait pas organisé les défilés Gucci aussilongtemps, mais quel coup de pouce ! », constatenon sans aigreur un concurrent. L’homme gardepourtant les pieds sur terre et son sens de l’hu-mour. « Je vous en prie, on ne parle que de vête-ments, après tout… », rappelle-t-il parfois.Face à ce duo, Pierre Rougier fait figure d’out-sider. D’abord, par la taille de son bureau depresse. Ce Français, installé à New York de-

Il existetrès peude portraitsd’eux dansla presse. Etla plupartdes acteursdu milieupréfèrentse retran-cher dansl’anonymatpour lesévoquer.

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En haut, Karla Otto à Milan, au dernier défilé Raf Simons pour Jil Sander.En bas, Pierre Rougier et Donatella Versace.

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1. Carine Roitfeld,ex-rédactrice en chef deVogue, et Txampi Diz, attachéde presse chez KCD.

5. Ed Filipowski avec VirginiaSmith (Vogue US).

8. Suzy Menkes, critique demode à l’InternationalHerald Tribune.

2. 3. 10. Pendant les défilésà Milan, fin février.

6. Le consultant AngeloSensini.

9. Pierre Rougier et DonatellaVersace.

7. Karla Otto au premier rangdu défilé Jil Sander.

4. Pierre-Yves Roussel (PDG dela division mode de LVMH) etKarla Otto.

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puis plus de quinze ans, préfère se concen-trer sur ses activités aux Etats-Unis plutôt qued’essaimer dans le monde entier (même s’il aouvert, il y a peu, une antenne à Paris). AvecSylvie PicquetDamesme, son associée, ils sonttrès complémentaires. « Pierre est plus souventdevant la scène que moi. Les jours de défilé, jepréfère lui laisser gérer les people et les invités…»,explique-t-elle. D’où, sans doute, son surnomde « Mr No » dans la presse américaine.Pierre Rougier élude : «Je ne tire aucun titre degloire de ce genre de choses. Quand je dis non àquelqu’un, ça n’est jamais gratuit mais c’est pourprotéger mon client. » L’homme invoque lachance qui a croisé son chemin à ses débuts :« J’ai ouvert mon bureau avec la première collec-tion très attendue de Narciso Rodriguez parcequ’il venait de dessiner la robe de mariée deCarolyn Bessette [la future femme de John JohnKennedy, ndlr]. »

L e point commun qui reliel’austère Allemande au géantfrançais et à l’Américainbouillonnant est d’avoiranticipé la professionnalisa-tion du métier de communi-

cant. « Pendant longtemps réservé aux filles debonne famille qui voulaient travailler, caricatureà peine un observateur, ce job consistait àchouchouter quelques journalistes en leur donnantdu “ma chérie” pour obtenir des parutionsélogieuses pour ses clients… Ou à jouer lesphysio : “Toi, je te prête des vêtements pour que tuen fasses des photos parce que ton magazineest assez chic pour la marque que je représente ;mais toi non…” » Or, la force de nos trois ri-vaux, analyse finement un ancien collaborateurde Karla Otto, est d’« avoir très vite mélangéune partie RP traditionnelle à une partie business.C’était visionnaire ». Petit à petit, eneffet, de simple interface entre la presse et lecréateur, l’attaché de presse est devenuconseiller, parfois négociateur, voire initiateurde nouvelles collaborations via les collections« capsules » (des séries limitées souvent si-gnées d’un créateur extérieur à lamarque). Syl-vie Picquet Damesme s’amuse ainsi des pre-miers balbutiements de PRConsulting dans lasalle àmanger new-yorkaise deRougier, quandle géant américain Procter & Gamble leur aconfié le sauvetage de lamarqueVidal Sassoon:« On devait d’un coup assurer des présentationsde stratégie de com’ à Cincinnati. Pour moi, quiavais été journaliste free lance et n’avais jamaisbossé dans un bureau, c’était une aventureincroyable !» Son alter ego confirme: « Ça nousa obligés à structurer notre pensée. On ne pouvaitpas se contenter de dire, comme avec les créatifsavec lesquels j’avais travaillé jusqu’ici, “on vafaire ça ou ça parce que je le sens bien”, il fallaitse justifier, expliquer, rationaliser…» D’autresattachées de presse qui ont parfois aussi écritl’histoire de la mode, comme Michèle Mon-

tagne avecHelmutLang,n’ont pas su ou vouluprendre ce virage et ont peu à peu perdu deleur superbe.L’importance du coaching, voire du babysittingdes créateurs, elle, reste intacte. Soumis à unepression intolérable à cause de lamultiplicationdes collections – unedizainepar an enmoyennepour unemaison de haute couture – et fragilisés(qu’on pense au suicide d’AlexanderMcQueenou à la dérive de John Galliano), ils sont enconstante demande d’attentions. Dans Le Jourd’avant, le documentaire deLoïcPrigent consa-cré à Donatella Versace (éditions Arte), on voitainsi Pierre Rougier annoncer à la créatrice –pourtant peu commode – après une répétitionqu’il aime bien le défilé mais que celui-ci perdde sa force en plein milieu. Quelques heuresavant l’événement, l’intéressée bouscule doncsans sourciller ni lever la voix l’ordre de passagedes mannequins... Et affirme de sa voix de fu-meuse: « Pierre, je ne te demanderai plus jamaiston avis! » dans un éclat de rire qui dément im-médiatement son propos. Cette confiance segagne au jour le jour, reconnaît Ed Filipowski,« par des conversations régulières, des visitesbackstage avant les défilés ou des réunions plus for-melles ».KarlaOtto ne dit pas autre chose quandelle parle d’« apprendre l’ADN d’une marque »pour mieux la défendre. Où trouvent-ils(encore) le temps de le faire?Lamodemondia-lisée implique de passer sa vie dans les avionspour passer d’une capitale à une autre.KarlaOtto avoue ainsi jusqu’à trente voyages endeux mois!Certains attachés de presse, tel Angelo Sensini,un Italien installé depuis près de vingt ans à Pa-ris, arrivent à créer une brèche dans la toute-puissance de ce triumvirat en proposant du« sur mesure ». Lui qui déteste le mot agencepréfère demeurer « cosy », avec ses huit em-ployés et sa quinzaine de clients qu’il chou-choute. Comme le créateur Rabih Kayrouz,dont il a fait « le plus français des couturiers li-banais ». Un travail d’orfèvre qui paye puisqueAngelo Sensini peut s’enorgueillir de compterparmi ses clients des labels aussi différents queBulgari, M Missoni, Valentino ou encore IndiaMahdavi.La concurrence?L’évoquer devant eux est unefaute de goût. « Karla », « Pierre » et « Ed » seconnaissent.Evidemment.Et se saluent quandils se croisent.Mais le patron de KCD affirme,avec ce sens de l’économie qui le caractérise :« Je ne pense jamais à eux. Jamais. »Pourtant, lapossibilité de voir un gros client s’échapper etpréférer un autre bureau de presse rôde, lanci-nante. Dixit un proche, « quand Karla Otto aperdu Prada après des années de collaboration,c’est comme si soudain tout ce qui avait fait l’es-sence de Karla Otto – et une grosse partie de sonchiffre d’affaires – disparaissait. Tout son talenta été de surmonter ce départ ».Longtemps aussi,le trio infernal « a regardé de haut, comme beau-coup d’autres gens dans la mode, les nouvellesmarques issues du Sentier comme Maje, Sandro

ou Paul &Joe. Parce que leur succès était très lié àla copie de modèles de créateurs originaux… queKCD ou Karla Otto représentent », s’amuse unattaché de presse parisien. Et sans doute, unpeu, par snobisme. Mais Maje et Sandro ontcommencé leur mue en cédant 51 % de leurcapital au groupe de luxe LVMH.Maje, déjà,est entré dans le portefeuille de PRConsultingpour ses relations presse aux Etats-Unis. Lesogres de la com’ ont encore faim.

De simpleinterfaceentre lapresse etle créateur,l’attachéde presseest devenuconseiller,négociateur,voireinitiateur denouvellescollabora-tions.

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Il y a dix ans, la loi offrait aux parents séparés la possibilitéde partager la garde de leurs enfants. Une victoire pourles pères… sur le papier. Dans la réalité, les enfants résidentencore plus souvent chez leur mère. Pour établir une vraieparité, des hommes demandent que l’alternance deviennela norme. Une fausse bonne idée?Par Célia Roger

Garde alternéeA hauteurd’hommes.

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La loi sur larésidencealternéea été trèsmollementsoutenuepar lesféministes,qui y ontvu unretour del’emprisedel’hommesur lecouple.

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L a décision du juge aux affairesfamiliales est tombée pendantl’été, quelques mois après leurdivorce : « résidence alternée ».Frédéric (1) se souvient d’un« immense soulagement » .Anne-Sophie d’un « coup demassue ». Frédéric, 40 ans, et

Anne-Sophie, 38 ans, se sont séparés au printemps2011,après quinze ans demariage. Ils ont eu ensembletrois garçons, aujourd’hui âgés de 14, 10 et 8 ans. Elleavait « demandé la garde ». Parce qu’il lui semblait« naturel » que les enfants restent avec leur mère ;qu’elle n’imaginait pas être éloignéeplusieurs jours deses enfants. Il avait demandé la résidence alternée.Parce que ce droit lui semblait « légitime » et « fonda-mental pour les enfants ». Le juge les a renvoyés versun service de médiation familiale pour qu’ils se met-tent d’accord sur les modalités de cette garde. Huitmois plus tard, Anne-Sophie trouve toujours « diffi-cile » de ne pas voir ses enfants une semaine sur deux.Pendant leur vie de couple, elle s’était consacrée àeux,délaissant sa carrière.Frédéric, sportif profession-nel, était « un père très attentionné mais souvent endéplacement ». Un nouvel équilibre parental homme-femme s’est redessiné autour de ce mode de garde.Anne-Sophie a relancé sa carrière. Frédéric a mis lasienne entre parenthèses. Il a appris, notamment, « àfaire du repassage ».Il y a dix ans, le 4 mars 2002, la ministre déléguée à lafamille,à l’enfanceet auxpersonneshandicapées,Ségo-lène Royal, faisait voter une loi qui permettait auxma-gistrats, en cas de séparation d’un couple,marié ou non,de pouvoir fixer la résidence alternée des enfants chezchacundesdeuxparents. Jusqu’alors, il n’existait qu’unmode de garde légal: l’un des deux parents (la mère,presque toujours)obtenait « la résidencehabituelle »del’enfant, l’autre (le père) « un droit de visite et d’héber-gement »,généralementfixéàunweek-endsurdeuxetà lamoitiédesvacances.Trenteansaprès la suppression,en 1970, de la notion de « puissance paternelle », quidonnait au seulpère l’autorité sur les enfants,et sa subs-titutionpar celle « d’autorité parentale »,qui reconnais-sait l’égalité des droits entre les deux parents, la loi demars 2002 sur la résidencealternéevisait à instaureruneforme effective de parité parentale.L’ambition égalitaire sonne juste en ce début des an-nées 2000.La France connaît alors un phénomène debaby-boom, dont la figure du « nouveau père » est lehéros.Cenouveaupère est changeur de couches,don-neur de biberons et délégué de parents d’élèves.Bref, •••

il s’investit dans undomaine encore souvent considérécommedévolu à lamère.L’air du temps est à la recon-naissance du partage. La loi sur la parité en politiqueet celle sur le congé de paternité viennent tout justed’être votées par les parlementaires. Ces deux textesont été défendus et portés haut par les mouvementsféministes. Ce ne sera pas le cas de la loi sur la rési-dence alternée, très mollement soutenue, et mêmecombattue par certaines, qui voient là un retour del’emprise de l’homme sur le couple. Un danger pourles femmes victimes de violences conjugales. Ou en-core une rupture de la spécificité du lienmère-enfant.La résidence alternée est donc devenue un sujetd’hommes. Et un combat de pères. Au point d’êtretotalement préempté par les très virulentes associa-tions de pères séparés.Notamment par la plus impor-tante d’entre elles, SOSpapa,pour qui la bataille pourla reconnaissance de l’égalité père-mère a pris des al-lures de «masculanisme »,pendantmasculin du fémi-nisme radical.Outrances sexistes comprises.Ces pèresse battent pour que la garde alternée devienne lanorme juridique par défaut et non plus une simplepossibilité laissée auxmagistrats.Un groupe de dépu-tés vient d’ailleurs de déposer une proposition de loiallant dans ce sens. Détail significatif, elle est portéepar deux hommes appartenant à la Droite populaire,la droite parlementaire la plus traditionaliste, au nom« de la nécessité pour les enfants d’être élevés par leursdeux parents ». Richard Mallié, député des Bouches-du-Rhône et l’un des deux co-auteurs du texte, n’estpas un franc militant de l’égalité hommes-femmes,mais il pense qu’il faut désormais « inverser la chargede la preuve », et « supprimer le quasi-droit de vetoaccordé aux mères » pour la garde des enfants.Danièle Ganancia, juge aux affaires familiales et vice-présidente duTGI de Paris, est « très partagée » : « Ilfaut comprendre le combat des associations de pères, quiont souvent vécu des situations injustes et violentes.Néanmoins, en réclamant l’égalité stricte, ils commettentune erreur, analyse-t-elle. Car la résidence alternée, c’estavant tout un esprit. Ce n’est pas de compter les jours,de dire “j’ai droit à”, c’est de reconnaître que l’enfant aaussi besoin de l’autre parent. Et d’organiser la gardeen fonction de ce besoin, pas forcément de façon égali-taire d’ailleurs. » Selon la journaliste Marta deTena,qui vient de publier La Garde alternée, du sur-mesurepour nos enfants (Ed. Jean-Claude Lattès, 211 pages,14,50 euros), il n’y a pas un modèle unique de gardealternée mais des solutions « sur mesure », « customi-sées » en fonction de l’âge des enfants,de leurs envies,de celles des parents,de leursmétiers…Des solutionsqui ne sont « surtout pas figées dans le temps ». Unenouvelle loi pourrait cependant, selonDanièleGanan-cia, « lever les dernières réticences ».

car la loi de 2002 n’a pas réellement changé la donne

dans le rendu des décisions de justice. Selon leschiffres du ministère de la justice, en 2003, les déci-sions fixant une résidence alternée représentaient10 % des enfants impliqués dans un divorce. En2009, cette proportion passait tout juste à 14 %. Larésidence alternée est accordée à presque tous lescouples qui la demandent conjointement.Mais elleest, en revanche, refusée dans les trois quarts desA

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“Les pèresse mettentune grossepressionpourmontrerqu’ils sontaptes às’occuperde leursenfants.”Jérôme Prévot,médiateur familial.

cas lorsqu’un des parents, la mère généralement,s’y oppose. « C’est certainement très inégal selon lestribunaux », tempère cependant la magistrate Da-nièle Ganancia. « Nous n’avons pas de statistiquesmais, à Paris, j’ai vu les mentalités évoluer de façontrès nette ces dernières années. Chez les parents et chezles magistrats. Pour moi, le désaccord des parents n’estplus un obstacle à une décision de résidence alternée. Acondition d’accompagner cette décision d’une médiationfamiliale, ce qui est encore insuffisamment pratiqué»,constate-t-elle. Ces chiffres masquent par ailleurs lenombre de gardes alternées mises en place en de-hors des décisions de justice, chez les couples nonmariés en particulier.Laméfiance à l’encontre d’unejustice encore trop frileuse sur le sujet n’y est pasétrangère.Pour obtenir la garde alternée de sa filleLéa (2), 5 ans,Stéphane, 39 ans, a jugé « plus sûr » de ne pas passerpar un tribunal.« Sa mère y était opposée et j’avais troppeur qu’un juge lui accorde la garde. Quand on est unpère, on n’est pas en position de force », regrette-t-il.Stéphane a négocié « pas à pas », avec l’impressionde marcher sur des œufs.Après la séparation, il a de-mandé, en plus des deux week-ends mensuels, lapossibilité de prendre leur fille le mercredi. Au boutde deux ans, il a réussi à convaincre son ex-épouse degarder Léa entre deux et quatre jours par semaine.Sans jamais prononcer l’expression « garde alter-née ». « Elle a vu que ça se passait bien. Que Léa ytrouvait son équilibre », explique-t-il. Stéphane a eu A

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Ségolène RoyalLa loi sur la gardealternée, c’est ellequi l’a fait voteralors qu’elle étaitministre de lafamille. Dix ansplus tard, elle endresse le bilan.

Dix ans après la loi sur la rési-dence alternée, les chiffres duministère de la justice montrentqu’il n’y a pas eu de haussesignificative du nombre de rési-dences alternées décidées parles juges aux affaires familiales.Comment l’expliquez-vous?Les divorces sont souventconflictuels. Il est difficile pourles parents, au moment de laséparation, de surmonter leursgriefs respectifs. Très souvent,l’enfant est l’enjeu d’un chantageou d’une consolation. Or, pourmettre en place une résidencealternée, il faut qu’elle soit accro-chée à un accord commun entrele père et la mère. Ce sont dessituations complexes qu’un jugepeut difficilement trancher sansl’entente des parents. Il étaitprévu une large intervention dela médiation familiale. Mais, dansles faits, on manque cruellementde médiateurs. C’est un frein à larésidence alternée.La polémique autour de la sup-posée nocivité de ce mode degarde a-t-elle, selon vous, nui àson développement?Un peu, oui. L’idée pernicieusequi s’est installée est que lesparents faisaient ainsi passerleur propre intérêt avant celui del’enfant. Effectivement, la rési-dence alternée fait des enfantsitinérants. C’est à eux que l’ondemande de cavaler, de s’adap-ter alors qu’ils subissent la sépa-ration de leurs parents. Cela peutêtre déstabilisant. Idéalement, ilfaudrait que ce soit aux parentsde s’adapter, de déménager, enlaissant l’enfant au domicile. Maisc’est irréalisable. Il faut donctrouver des solutions, les pluséquilibrantes pour l’enfant.Que pensez-vous de la proposi-tion de loi des députés Mallié etDecool qui vise à imposer cemode de garde par défaut?Je ne la trouve pas bonne. Letexte propose d’inverser la

charge de la preuve. Ce quiveut dire que celui qui s’opposeà la garde alternée va devoirse justifier. Je crains que cesoient les femmes qui en soientles victimes. Car, souvent, cesont les hommes qui partent,pour une autre femme qui plusest. La femme quittée est meur-trie dans son rôle d’épouse, ellene veut pas l’être dans son rôlede mère. Cette proposition sentle règlement de comptes enversles mères. Ce n’est pas parcequ’il existe des cas de mèresqui se conduisent mal aumoment des divorces qu’il fautgénéraliser.La résidence alternée avait pourobjectif de favoriser la paritéparentale. Lorsque vous avezdéfendu votre projet de loi,vous avez été peu soutenue parles mouvements féministes…Elles ont considéré que l’onreprenait un droit aux mères.C’est compliqué de demandercette parité. Car même si leschoses évoluent, elle n’existepas dans le partage des tâchesà la maison, ni dans le mondeprofessionnel. Pour autant, jepense que la société a évoluésur ces questions. Les famillesrecomposées sont très répandues.Beaucoup de mères ont psycho-logiquement du mal à accepterle principe de la résidencealternée…La loi ne peut pas grand-chose àcela. Les femmes se sentent des-saisies dans leur rôle de mère.C’est elles qui ont porté l’enfant,qui l’ont mis au monde. Elles,souvent aussi, qui ont assumél’essentiel de l’éducation, qui ontfait le sacrifice de leur vie profes-sionnelle. Elles ont le sentimentd’être dépossédées par l’idée departager la garde. Et si une nou-velle compagne arrive auprès dupère, c’est encore plus compli-qué pour elles.Vous avez été personnellementconfrontée à une séparationfamiliale, avez-vous profité de laloi que vous avez mise en place?Non, car mes enfants étaientdéjà grands. Ils sont restés avecmoi. Mais j’ai eu le souci de main-tenir le lien entre mes enfants etleur père. C’est souvent auxmères de maintenir ce lien...Propos recueillis par Cé. R.

le sentiment d’avoir dû faire ses preuves. Il a réor-ganisé son emploi du temps professionnel pour êtreplus disponible pendant les périodes où il a sa fille.Architecte installé en libéral à Lyon, il a trouvé quec’était « finalement assez facile ».

Pour d’autres, la mise en place pratiquede la garde alternée est parfois pluscompliquée. Patrice et son anciennefemme, parents d’une fille de 5 ans etd’un garçon de 9 ans, se sont mis d’ac-

cord deux ans après leur séparation. « Elle voulait at-tendre que la plus petite ait 5 ans. Je trouvais ça bien. J’aiattendu », dit-il. Sixmois avant la rentrée scolaire 2011,Patrice,chef deproduit dansune sociétéd’agroalimen-taire,a demandé à travailler à 80%du temps,pourpou-voir prendre sesmercredis.« A la DRH, c’est bien passé.On a des accords internes qui valorisent l’égalité parentale,ils étaient presque contents d’avoir trouvé le seul homme àvouloir en profiter. Mais, remarque-t-il, dans mon équipe,ce choix est très, très mal perçu, particulièrement chez leshommes. » Le fait qu’il lâche un peu de son temps detravail était une condition imposée par la mère de sesenfants,enseignante:« Elle me met la pression, parce quecette garde est pour elle une concession. » Patrice avouequ’il lui ment « un peu » sur l’heure à laquelle il rentrerelayer la baby-sitter et le nombre de fois où sa mèrevient lui donneruncoupdemain à lamaison.Dans leurex-couple,malgré la garde alternée, il reconnaît que lepartage des tâches demeure « encore un peu déséquili-bré ». Les rendez-vous chez le médecin, le coiffeur oul’achat de vêtements restent du domaine exclusif de lamère.« Elle ne me laisse pas vraiment faire », se défendPatrice. Une étude menée par la Caisse d’allocationsfamiliales, en 2008, sur les familles pratiquant la rési-dence alternée, souligne cette persistance d’inégalitésentre les hommes et les femmes. « La répartition parpostes de dépenses montre que le modèle de la femme mater-nante et pourvoyeuse de soins reste ancré dans les esprits etinscrit dans les pratiques », note le rapport.Jérôme Prévot,médiateur familial à Nancy (Meurthe-et-Moselle) et représentant de la Fédération nationalede la médiation et des espaces familiaux voit, chaqueannée,des dizaines de couples envoyés par le juge auxaffaires familiales,ou,parfois,venusd’eux-mêmes,pourorganiser leurs résidences alternées. La réticence desmères est, selon lui, très prégnante. Presque uneconstante.Même lorsqu’elles se montrent favorablesau principe de la résidence alternée, « elles en souf-frent », « se montrent très exigeantes à l’égard du père »,observe-t-il.«Les pères, de leur côté, se mettent une énormepression pour montrer leur détermination et démontrerqu’ils sont aptes à s’occuper de leurs enfants. »Deplus enplus, remarque ce médiateur, les pères amènent aveceux des attestations de leurs employeurs expliquantqu’ils vont pouvoir aménager leur temps de travail.« Ilarrive même parfois qu’on s’aperçoive, en discutant, que cen’est pas vraiment ce qu’ils désirent. Mais qu’ils ont peurde passer pour un mauvais père en ne se battant pas pourcette garde », conclut-il.(1) Les patronymes des parents interrogés n’ont pas été précisés à leurdemande.(2) Le prénom a été changé.

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Lesjournalistespolitiquespassenta table.

I l y a des gens qui disaient que jamais Mitterrand ne pourraitgagner : c’est Giscard qui apparaissait comme charismatique.Puis on disait : “Jamais Chirac ne sera élu.” Idem pour Sarko-zy, jugé trop petit, trop nerveux… Raffarin, par exemple, n’ycroyait pas. Pour le charisme, il faut attendre. » C’était endécembre dernier. François Hollande déjeunait avec septjournalistes qui pouvaient noter sur leur carnet :« Le charismeapparaît quand les électeurs vous ont choisi. »

Entrez glisser un œil dans la salle à manger de chez Tante Marguerite,dans le 7e arrondissement de Paris, ou Chez Françoise, aux Invalides, etvous les verrez. Une dizaine de personnes autour d’une table, des blocs-notes à la place des ronds de serviette.Un invité politique qui parle quandla table griffonne. C’est la pleine saison des « groupes de déj’ » (pourgroupes de déjeuner), ces petites bandes de journalistes politiques demédias différents qui se donnent rendez-vous régulièrement pour inviterdes politiques à leur table.« Quand je suis arrivée en politique, je trouvais ça délirant, c’était tout ce queje n’aimais pas », se souvient Hélène Jouan, de France Inter, qui y a en-suite figuré régulièrement. Le groupe de déj’, auquel les journalistes

C’est une tradition très française, qui alimente l’idée déjà bienancrée de deux mondes connivents : pour faire parler lespolitiques de manière informelle, des journalistes réunis en« groupes de déj’ » ont pris l’habitude de les inviter au restaurant.A table, presque tout ce qui se dit est off. Mais ces déjeuneursprofessionnels tirent profit de ces confidences bien autrement…Par Guillemette Faure / Photos Frédéric Lebain

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disent souvent se contraindre mais dont bien peu se passeraient, estun exercice paradoxal. On travaille en mangeant,mais il faut que ce soitsympa.C’est off – confidentiel –mais ça peut, ça doit, être recyclé.Sinon,il ne fallait pas venir parler devant des journalistes.

Legroupe s’imposed’abordparsaforcedefrappe.Si quatre ou cinqmédiasse déplacent, le politique prendra le temps de leur parler.Et pour encoreplus d’efficacité, autant prendre la même bande à chaque fois. Côtécasting, l’idéal est de rassembler des gens avec qui on aurait plaisir àdéjeuner de toute façon – en ces temps de campagne, certains groupespeuvent se retrouver plusieurs fois par semaine. On peut même, ex-plique la journaliste d’Europe 1Anissa El Jabri, faire partie de plusieursgroupes à la fois : « J’en ai un pour la gauche constitué depuis longtemps, etun autre pour la droite. » « Quand je suis devenu journaliste politique, onm’a tout de suite conseillé de me trouver un groupe de déj’ pour rencontrerrapidement des politiques », raconte Sylvain Courage, du Nouvel Obser-vateur dont le groupe stakhanoviste peut en aligner quatre par semaine.« Il faut trouver un groupe qui veuille bien t’accepter. Ceux qui avaient plusde bouteille ne voulaient pas de nous », se souvientAlexandraAckoun, deFrance Inter. Pas la peine d’insister pour rejoindre Michèle Cotta ouArlette Chabot dans le groupe de Catherine Nay, qui tranche : « Ontrouve que sept, c’est un bon chiffre. »Une radio, un quotidien, un hebdomadaire, une télé… On mélange lestypes demédias pour éviter de se concurrencer.Certains tournent depuisplus dedix ans.D’où les difficultés dupetit nouveau,qui préférera parfoiscréer le sien. Qu’il se rassure, les tables des barons sont composées desjuniors d’hier.Audébut des années 1990, la journalisteValérieTrierweiler,

••• qui n’était pas encore la compagne de François Hollande, faisait partied’un groupe baptisé « les bébés en politique » parce qu’il ne comptaitque des jeunes journalistes. « On arrivait à avoir des gens parce qu’elleest jolie », se souvient un membre de son groupe, qui comptait entreautresThomas Legrand,Emmanuel Faux et Frédéric Gerschel.Reste à inviter le bon interlocuteur… « Je préfère déjeuner avec unconseiller, explique un journaliste. Ce n’est pas Hollande qui va me parlerdes brouilles internes au PS. » Manuel Valls, Pierre Moscovici, MichelSapin, Benoît Hamon le feront plus facilement. Les cotes varient. Celledes ex-proches de Martine Aubry a fondu. Le strauss-kahnien Jean-Jacques Urvoas « n’est pas une pièce maîtresse, mais c’est un bon observa-teur et bon commentateur avec un paquet de bonnes infos ».Dans les rangs de la majorité, les groupes de déj’ aiment ceux qui sont« proches du réacteur mais n’en font plus partie », tels Jean-FrançoisCopéou Jean-Pierre Raffarin. Ils savent comment la machine fonctionne.« Rachida Dati, évidemment, parce qu’elle a du mal à se mettre une bar-rière… », s’amuse un déjeuneur. Sa cote a progressé depuis qu’elle n’estplus au gouvernement. Avant, « elle ne donnait rien ». Le politique quipasse par une « frustration momentanée » est toujours très recherché. Ilest davantage susceptible de s’épancher. Guillaume Peltier, chargé desétudes d’opinion et des sondages à l’UMP,est également apprécié« pourvoir les éléments de langage que Sarkozy veut faire monter. Comme il nemaîtrise pas encore l’exercice, il y a encore un élément de fraîcheur ». Peuconnu du grand public, Jean-Christophe Lagarde, du Nouveau Centre,est un artiste du déjeuner et grand pourvoyeur de formules assassines.Le pic des groupes de déj’ se produit les mardis et mercredis, jours deséances de questions à l’Assemblée.La table est choisie dans un triangle

64 - 3 mars 2012 – Photos Frédéric Lebain pour M Le magazine du Monde

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d’or autour de l’Assemblée, entre la rue de l’Université (pour qui suit lePS), le boulevard Saint-Germain et les Invalides. Le Bourbon ou le Sol-férino (surtout prisés pour les petits-déjeuners) ont des noms qui vousévitent de demander où ils se trouvent. Au Père Claude (apprécié deJacques Chirac pour sa tête de veau), au Bistrot de Paris, rue de l’Univer-sité,Chez Françoise aux Invalides, l’entrée d’un visage politique ne pro-voquera pas de torticolis chez les convives. Sous prétexte de vouloir être« un peu au calme », on s’installe à une table à l’écart. ChezTante Mar-guerite, où Ségolène Royal déjeunait avec la presse à l’étage, le groupedeCatherineNay s’installe dans la petite salle àmanger.Dubar-tabac del’Assemblée au Café de l’Alma, on briefe et complote dans les étages.

Quandarrive lemenu, les journalistes de radio qui se sont levés à 4 heuresdu matin et en sont à leur troisième repas n’ont pas encore faim. « Onfait entrée-plat ou plat-dessert? »Penser pratique.Personne ne prend leslangoustines, ça ne laisse pas de place pour le stylo. Les invités sontraisonnables, en général. On rigole encore du politique qui s’était com-mandé un plateau de fruits demer.« Il était venu bouffer sur le compte denos rédactions… »Quant à celui qui a commandé une bouteille à 90 eu-ros, qu’il sache que, des années après,Alba Ventura, de RTL, ne l’a pasoublié. Aujourd’hui, on commande plus souvent des bouteilles d’eau– « une plate et une gazeuse ». L’amour de la bonne chère façon IVe Ré-publique est un peu passé. « S’ils prennent un verre de vin, on les accom-pagne. Ça ne nuit pas au fait qu’ils se lâchent un peu… », confie tout demême un journaliste.« Alors, comment vous sentez les choses? » C’est souvent l’invité qui poseles premières questions. Il flatte un peu les journalistes, glisse quelquesremarques pourmontrer qu’il est au fait de la vie des rédactions.« Mélen-chon n’a pas arrêté de nous passer la brosse à reluire… Il nous a dit quejournaliste était un métier formidable, qu’il nous enviait ! », se souvientAlexandra Ackoun. On en arrive ainsi à l’actualité. Les carnets sont desortie, ils fontmoins peur que lesmicros, bannis.C’est clair, on est quandmême là pour ça.Mais il y a des élus,moins habitués,qu’il ne faudrait paseffrayer. « L’un plonge délicatement sa main dans la poche de son costumepour récupérer son carnet, l’autre tente d’étouffer le bruit du bouchon de sonfeutre pour commencer à noter. Ne pas effrayer l’orateur, ne pas le couperalors qu’il se révèle », écrit sur son blog Caroline Roux, de Canal+.« Quand la discussion devient intéressante, explique-t-elle, l’invité dira“Bien entendu, tout ça c’est entre nous”. Les journalistes politiques répon-dront en chœur “Bien entendu”, et expliqueront que les carnets sont là parcequ’ils n’ont pas de mémoire. » Bien entendu, tout cela sera utilisé. « Ceque signifie “entre nous”, c’est : vous pouvez l’utiliser, mais ne dites pas quec’est moi. Quand ils ne veulent vraiment pas être identifiés, ils insistent :“Ça, c’est triple off!” »Ou,à l’inverse, ils revendiquent unepetite phrase.Tel BriceHortefeux, invité à déjeuner à l’étage du bar-tabac de l’Assem-blée,qui accuse le candidat socialiste de volte-face:« Le truc de Hollande,c’est la pirouette, lance-t-il.Et pirouette-cacahuète, cela ne marche pas. »Avant d’ajouter, fièrement: « Celle-là, vous pouvez la citer. »Tout est dans la frontière subtile entre le on et le off, les propos assumésou non, un flou entretenu que personne ne gagnerait à éclaircir. Certainsse croient obligés d’appeler après le rendez-vous pour savoir ce qu’ilspeuvent utiliser. « Je n’ai pas le souvenir d’un truc que j’ai voulu“dé-offer” et qu’on m’ait dit non », assure Julien Martin, de l’Obs. Oui,dans ce monde-là, « dé-offer » est devenu un verbe et « dé-offable » unadjectif. Il arrive que quelqu’un brise le tabou du off,mais cela se produitplus souvent dans les déjeuners de groupe (commedébut janvier, quandFrançois Hollande a parlé de « sale mec » à propos de Nicolas Sarkozy)que dans les groupes de déj’, qui ont l’habitude de travailler ensemble.Mais quelle est la valeur de ce qui s’est dit? « Les politiques te confientrarement des trucs qu’ils ne veulent pas dire », résume Hélène Jouan.Imaginer qu’ils vont se laisser aller? « Il faudrait que l’invité ait des pro-blèmes de mémoire pour oublier qu’il est face à quatre journalistes »,résume Eric Mandonnet, de L’Express. Personne n’attend de se voirconfier un gros scoop au dessert. « S’ils en ont un, ils savent par

quel journaliste le faire passer. Ils ne vont pas attendre un groupe de déj’. »Alors, qu’est-ce que les journalistes tirent de ces déjeuners? Pour EricMandonnet, c’est un moment où on pourra prendre le temps : « On estlà pour deux heures, il y a moins de coups de fil, on a les moyens de ne pasaller droit au but… » Et des réponses anodines en disent parfois long.C’est à un groupe de déj’ que Brice Hortefeux, interrogé sur ce qui em-pêche une alliance avec Marine Le Pen, répond: « L’euro. Elle veut ensortir… » – sans un mot sur l’immigration. Les journalistes déjeunentdonc pour comprendre les manœuvres, l’état d’esprit d’un état-majorpolitique.Face à un groupe de déj’,FrançoisHollande détaille commentil veut incarner l’espoir quand Nicolas Sarkozy va jouer sur la peur. Onécoute les gens d’un même camp parler les uns des autres. « Tu sens lesgens qui ne s’aiment pas, les points de crispation. » « C’est lors d’un déj’que j’ai compris comment Hollande avait reculé sur le quotient familial »,résume un journaliste.C’est à table que l’on découvre des personnalités,qu’on s’aperçoit que Nathalie Kosciusko-Morizet, malgré son image deharpiste botticellienne, jure comme un charretier.Parfois, la conversation dévie. Un groupe attablé avec Benoît Hamons’embarque dans une grande discussion sur le sommeil des enfants. Onn’en tire rien, sinon des liens.Mélange des genres.« La chose est mal vuepar une partie de ma profession qui pense que, pour bien connaître la classepolitique, il vaut mieux ne pas la fréquenter », railleFranz-OlivierGiesbertdans son livreM. Le Président (Flammarion,avril 2011,285 p.,19 €), avantde détailler la taille de la truffe qu’il va servir à Nicolas Sarkozy.

déjeunern’est pasdîner, répète-t-on face aux soupçons de connivence.Onest là sur son temps de travail, pas dans l’abandon d’une soirée. « Engroupe et sous l’œil des confrères, ça apporte le minimum de convivialité enprotégeant de la complicité », assureThomas Legrand, éditorialiste poli-tique à France Inter.On trace une dernière ligne blanche avec les cartesbleues quand arrive le rituel de l’addition, que l’invité peut proposer departager, sachant qu’il ne paiera pas.A Odéon, devant le resto Les Editeurs, un groupe piétine après un dé-jeuner avec Pierre Moscovici. Un débriefing s’improvise sur le trottoir.« Qu’est-ce que tu en as pensé? » Petit vertige de l’après-off. Si une infor-mation nouvelle a sauté aux yeux de tous, on semet d’accord.On ouvreles cahiers pour comparer ses notes. « On ne se fait aucun mauvais coupentre nous, l’ancienneté permet la confiance », note Eric Mandonnet, deL’Express, dont le groupe de déj’ a déjà plus d’une dizaine d’années.« De toute façon, il est rare qu’une info mérite qu’on se déchire. »La conclu-sion est tirée par un journaliste d’un hebdomadaire : « Plus tu avances,plus tu sais qu’il n’y a rien à en tirer, mais plus tu es obligé d’en faire. »

«En groupeet sous l’œildes confrères,ça protège dela complicité »Thomas Legrand (France Inter)

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François Verdoux etArnaud Hofmarcher,les fondateursde Sonatine.

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Sonatine voitclair dans le noir.

cancre – «un bac merveilleusement raté » – n’apprécie guère. Il se souvientencore d’un « déjeuner surréaliste » avec le gratin des éditeurs pendantlequel il n’a « pas entendu une seule fois prononcé le mot “livre” ou “lecteur”,ça ne causait que marketing ou droits numériques, c’était fascinant de niaise-rie ».De quoi se faire encore des amis…

àl’origine, rienne prédisposait cesdeux-làà faire fortunedans le thriller.

Au début des années 2000, François Verdoux croiseArnaudHofmarcheraux Editions du Cherche-Midi. Le premier est alors chargé des droitsaudiovisuels de l’éditeur; le second, après avoir développé la collectiond’humour grand public des « Pensées » (de Coluche, de Philippe Bou-vard ou de Michel Galabru notamment), vient d’y lancer, avec l’éditeurClaro,« Lot 49 », laboratoire de littérature étrangère pointuequi publiera,entre autres, Richard Powers etWilliamVollmann. Coup de foudre ami-cal.A l’époque, François Verdoux s’ennuie. L’ancien prof de tennis pourcomités d’entreprise – «un boulot de jeunesse sans aucun intérêt », rigole-t-il – travaille depuis une quinzaine d’années dans le cinéma grâce à uncoup de main du producteur Alain Sarde, un « copain de raquette ». As-sistant de production sur plusieurs films, il lui est même arrivé de fairel’acteur pour rendre service – « le type qui joue au tennis pendant troissecondes avec Bernard Blier dans Pétrole! Pétrole! [de Christian Gion],c’est moi !». Mais le septième art et son « financement pathétique par deschaînes de télévision incultes » ne l’excitent plus.En 2008,«sans business plan » et avec l’aide d’unmécène, le bibliophileGuy Martinolle – «citez-le, sans lui, on ne serait pas là », nous ordonneVerdoux –, qui leur avance 300 000 euros, et de quelques noms amis ducinéma comme l’agent Dominique Besnehard, le duo décide de créerSonatine « pour voir si on en était capables ». A Verdoux, la gestion dubusiness depuis Paris. A Hofmarcher, lecteur insatiable, surnommé« Guerlain » par son acolyte pour son flair exceptionnel, la ruée vers lesmanuscrits depuis… Saumur, Maine-et-Loire, où vit l’ancien étudianten philosophie. Hofmarcher passe d’ailleurs si peu de temps à Parisqu’une légende commence rapidement à naître : l’éditeur n’existeraitpas et derrière ce pseudo se cacherait un poids lourd du secteur. Lesdeux complices en rient toujours…« Guerlain » a saméthode. Il traque,sur les sites Internet américains et dans les librairies à l’étranger, lesromans inconnus non encore traduits ou tombés dans l’oubli. « Ellory,je l’ai découvert par hasard à Londres, se souvient Arnaud Hofmarcher.Son quatrième roman venait de paraître en Angleterre. Je l’ai lu, adoré

I nutile dechercher leur plaquedans saint-germain-des-prés.

Ils ont choisi de s’exiler du côté de la porte Maillot, dansun hôtel particulier appartenant à une société de conseilfinancier coincé entre le Palais des Sports et le périphé-rique. Pour le Paris intello et les fantômes tutélaires deslettres françaises, on repassera… C’est ici, dans deuxpièces toutes blanches envahies de livres et demanuscrits,que s’opère depuis cinq ans le miracle Sonatine. Un mi-racle qui combine tirages de best-sellers et romans noirsde qualité. L’anti-Mary Higgins Clark ou Harlan Coben,

en somme.En à peine une soixantaine de titres, la maison au nom tiré du chef-d’œuvre deTakeshi Kitano est devenue incontournable dans le mondedu polar: R. J. Ellory, Shane Stevens, Jesse Kellerman, S. J.Watson… onne compte plus les pépites dénichées par Sonatine et leurs dizaines demilliers de livres vendus. Sans auteur locomotive au départ et alors queles tables des libraires dégueulent de collections noires,Sonatine a réussià créer unemarquede fabrique,avec ses couvertures ultravisuelles à rabatet ses romans à nuits blanches garanties.Désormais, les lecteurs, fidèles,s’enquièrent du « dernier Sonatine » paru et, sur les foires du livre deFrancfort oudeLondres, les autres éditeurs français réclament aux agentsdes romans « à la Sonatine ». Ce succès critique et public fulgurant faitdésormais pousser des ailes à la maison, qui lance en ce début d’annéeune collection « blanche » (lire page suivante). Une réussite qui nemanque pas également de nourrir les jalousies chez la concurrence,raillant, sous couvert d’anonymat, un « éditeur commercial » dont la pro-duction commencerait à « s’essouffler ».Il faut dire que FrançoisVerdoux etArnaudHofmarcher, les deux fonda-teurs,ne font rien comme les autres.« Onn’a qu’une seule ligne de conduite:publier ce que l’on aime », expliquent-ils d’une même voix, l’un finissantd’ailleurs souvent la phrase commencée par l’autre. « On ne se dit jamaisqu’on doit prendre tel ou tel livre parce qu’il est dans l’air du temps. On aime,on prend, point, qu’importe si le livre est sorti il y a vingt ans. Et si çamarche,ce n’est que du bonus », décrypte, presque timide,Hofmarcher, quadra auphysiqued’éternel adolescent tendancenounours.« Onne fait partie d’au-cune chapelle, on ne choisit pas un auteur parce qu’il est le beau-frère de lacousine de la femme deménage de bidule qui est tout-puissant dans l’édition »,précise Verdoux, grande et belle gueule de quinqua tout droit sorti d’unfilm de Sautet. Un coup de patte au petit milieu littéraire que cet ancien

Pas de Mary Higgins Clark ni d’Harlan Cobendans le catalogue de cette petite maisond’édition, mais des pépites du polar dénichéespar un duo au flair digne des plus grandsenquêteurs de la littérature noire. Créée il y a àpeine quatre ans, Sonatine multiplie les succès,tant publics que critiques. Par BastienBonnefous/Photos Nicolas Guiraud

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le magazine.

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et on a tout de suite acheté les droits de ses quatre premiers livres. »De-puis, l’auteur de Seul le silence (350 000 ventes), dont le nouveau roman,Les Anges de New York, sort ce mois-ci, est devenu la star de Sonatine etpart en vacances avec ses pygmalions français…

Très viTe, le bouche-à-oreille foncTionne à plein régime, amplifié par l’ac-cueil enthousiaste des libraires et des critiques dithyrambiques.Au-delàdu mal, le coup de poing littéraire très noir écrit dans les années 1970 parun certain Shane Stevens, auteurmystère disparu depuismais vénéré parJames Ellroy et Thomas Harris, fait un carton (150 000 ventes). Dans lafoulée, Sonatine publie Tout est sous contrôle, roman écrit en 1996 par undénomméHughLaurie.Le livre paraît alors que l’auteur, devenu entre-temps le célèbre « DrHouse »,est le nouveau roi des séries télé. Jackpot :plus de 500 000 exemplaires vendus, le record à ce jour de lamaison pourun de ses titres les moins littéraires…Verdoux et Hofmarcher rembour-sent au centimeprès leurs créanciers et peuvent voir venir.« Aujourd’hui,on est très très très rentables. D’autant qu’on a peu de frais, à part la locationdes bureaux et un abonnement taxi pour les auteurs », plaisante FrançoisVerdoux.Des auteurs qui vantent souventunemaison« à taille humaine ».«Ce sont lesmeilleurs, tout simplement », assène JacquesExpert,qui a signéchez eux en octobre son quatrième roman, Adieu, après trois premierslivres remarqués chezAnneCarrière.« Ils sont la romanée-conti du polar:une maison avec de petites cuvées mais toujours de grands millésimes », filel’amateur de vin et premier auteur français publié par Sonatine.Car malgré le succès, le duoVerdoux-Hofmarcher n’a qu’une obsession:ne pas changer une formule qui marche. Pas plus de vingt livres par an,« sinon on ne pourrait pas avoir la même exigence éditoriale », expliqueHofmarcher, quatre salariés en tout et pour tout, eux deux compris, ethors de question de « débaucher » des auteurs d’autres maisons – «on nefait pas à notre prochain ce que, etc. », psalmodie Verdoux. Le couple atoujours en travers de la bibliothèque le départ d’un de ses poulains,l’Américain Jesse Kellerman, découvert en 2009 avec le formidable LesVisages (400 000 ventes) et passé depuis à la concurrence. « Il voulait“élargir son public”, va comprendre!, s’en étrangle encore son ancienéditeur.On n’a même pas pu faire de contre-proposition, alors on a chialépendant deux heures et on s’est vite reconcentrés sur l’avenir. »Etpour eux,l’avenir s’appelleRobert Pobi,un inconnu (encore un!), auteur d’un pre-mier roman,L’Invisible, à paraître enmai,et qu’ils présentent déjà commeleur « nouvelle révélation ».« C’est une histoire de serial killer qui revisitede manière géniale tous les clichés du genre, explique, gourmand,ArnaudHofmarcher.Un peu comme une purée de pommes de terre, mais qui seraitpréparée par Robuchon!» On en salive d’avance.

Le goût dela « blanche».c’est l’histoire d’un malen-tendu. celui d’une maisond’édition à ce point étiquetéethriller et polar que tout lereste de son catalogue en passequasiment inaperçu. « De la lit-térature “blanche”, on en faitdepuis le départ, mais personnene s’en rend compte », souritfrançois verdoux. en cinq ans,sonatine a publié des livressur le cinéma (martin scorsese,David lynch, Tim burton) oula musique (phil spector, Keithrichards), des enquêtes (LeCasse du siècle, sur la financeaméricaine, par le journalistemichael lewis) et de formi-dables romans tout courtcomme La Religion, de TimWillocks. mais qui le saitvraiment? pour déjouer lamalédiction, l’éditeur a décidéde « marquer le coup » en lan-çant une collection « blanche »qui comptera quatre romanspar an. pas vraiment de révolu-tion à prévoir : format et chartegraphique restent pratiquementinchangés, comme la ligne.« On garde le même esprit quedans le noir », rassure Arnaudhofmarcher. D’un côté, deslivres jamais traduits, ou alorsil y a très longtemps, que sona-tine veut faire (re)découvrir. cesera le cas avec Homeboy, deseth morgan, dernier petit amide Janis Joplin et auteur de ceseul roman sur la contre-cultureaméricaine paru en 1990aux etats-unis, quelques joursaprès sa mort accidentelle.De l’autre, des romans contem-porains « qui se démarquent,par leur style et leur travail surla langue », précise verdoux.Dans cette veine, vient de sortiren février US!, premier romande chris bachelder : un road-book déjanté racontant la che-vauchée d’activistes américainsqui ont ressuscité le romancierupton sinclair, mort en 1968et considéré comme le « Zolaaméricain ». egalement auprogramme, deux romans dechuck palahniuk, l’auteurdu génial Fight Club : un surl’industrie du porno (Snuff),l’autre sur l’enfer (Damnés)…B. Bo.

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Parmi cesmanuscrits quis’entassent dansles bureaux dela porte Maillotoccupés parSonatine, com-bien bénéficie-ront du « label »Sonatine ?

68 - Photos Nicolas Guiraud pour M Le magazine du Monde - 3 mars 2012

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Design★Bronx(Paris).DR.Photo©Bettmann/Corbis.

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Combien, cette année? », fait-il valoir. Prudem-ment, il n’a pour l’heure passé commande qued’une seule camionnette, confiée à un chefd’équipe qui habite un pavillon. Ce dernierpourra donc recharger la voiture chaque nuitdans son garage.L’autonomieduKangooZEestsuffisante pour l’usage qui en sera fait et saconduite ne pose pas de difficulté particulière.« J’ai quand même prévenu qu’au volant d’unevoiture aussi silencieuse, il faut seméfier des piétons,notamment des enfants », insiste JeanNijdam.RouleR en électRique est aussi un enjeu d’image.

En général, on orne la modeste camionnetted’adhésifs et de slogans écolo un peu nouilles,pour bien mettre en valeur le « geste pour l’en-vironnement » que constitue un tel investisse-ment. Jean-Manuel Marin, fondateur de L’IleO’ crêpes, une chaîne de restauration rapide quise lance dans la livraison à domicile, fera roulerses livreurs à bord d’unTwizy, le drôle de petitquadricycle électrique que Renault commercia-lisera lemois prochain:«Lorsqu’on le livre chez leclient à bord d’un engin comme celui-là, le produitn’a plus la même image que si l’on débarquait avecune Mobylette ou un scooter. »Parmi les premiers acquéreurs de voitures élec-triques, on finit par trouver une poignée de par-ticuliers.« Je suis mal à l’aise avec le pilotage d’undeux-roues et en butte à des difficultés pour passermonpermis de conduire, alors j’ai réservé la versionaccessible sans permis du Twizy », expliqueMaxime Hinglais, 20 ans, qui dit avoir « hâte depouvoir l’utiliser ». Yoann Nussbaumer, 28 ans,s’est lui offert uneLeaf, laNissan tout électriquecommercialisée depuis septembre.Une acquisi-

tion projetée de longue date par ce développeurde sites Internet, qui se dit « passionné par l’au-tomobile, les nouvelles technologies et les questionsd’environnement ». « C’est la voiture électrique laplus aboutie. Avec mon iPhone, je peux même pro-grammer la climatisation pendant qu’elle est encharge.Enplus, c’est un vrai plaisir de la conduire,et je n’ai besoin de la recharger que tous les deuxjours. »Le jeunehomme,qui traverseStrasbourgchaque jour pour se rendre à son bureau, raconteavoir rencontré bien des difficultés pour obtenirl’autorisationde tirerune ligneélectrique jusqu’àla place de parking de son immeuble. Et admet

R enault a RepRis pied suR l’île se-

guin.Vingt ans après avoir fermél’usine qui fut son berceau, leconstructeur a réinvesti les lieuxpour y aménager une piste d’es-

sais, destinée à ceux qui souhaitent découvrir sagammedevéhicules électriques.Ence froidma-tin de février s’organise un ballet de voitures,dont le déplacement ne produit qu’un léger sif-flement. Une fois quelques boucles effectuéessur le circuit, la clientèle est accueillie de l’autrecôté de la Seine, dans le salon « ZE », com-prendre: « zéro émission ». Bois clair et sofas, letout baignant dans un décor bleu, la couleurécolo en langage automobile (le vert est tropchargé de symbolique politique). Autour d’uncafé,desmessieursunpeuengoncéspar leur cra-vate devisent par petits groupes.Ambiance très«pro ».Le futurpropriétaired’uneRenault élec-trique ne vient pas en famille. Les pionniers dela voiture ultrapropre gèrent des flottes d’entre-prise. Ce sont des livreurs, représentants ou ins-pecteurs qui seront derrière le volant, en atten-dant que les cadres acceptent d’en faire leurvéhicule de fonction.Rien de surprenant: roulerpropre n’est pas donné. Une camionnette Kan-goo électrique est facturée quelque 20 000 euros– prime de l’Etat incluse – pour une autonomied’une petite centaine de kilomètres, alors que laversiondiesel vaut 14800euros et peutparcourirplus de 600 kilomètres entre deux pleins. Sanscompter la location des batteries de la voiture(100 euros par mois). Pour la Renault FluenceZE,grosseberline « électrifiée », il en coûte toutcompris 20 900 euros nets. Dans quelques se-

maines, on attend la Zoé, qui sera dévoilée le8mars auSalonde l’automobile deGenève.Pro-duit à Flins, ce modèle, destiné à M. Tout-le-Monde,sera venduauprix d’uneClio (autour de18 000 euros), location des batteries en sus.Jean Nijdam, responsable de la flotte de véhi-cules de la société de nettoyageLustranet, a faitses comptes. Le Kangoo électrique dont il estvenu prendre livraison ce matin lui impose unsurcoût de 25% à l’achat,mais il estime pouvoiramortir cette dépense en deux ans. « L’an der-nier, la hausse du gazole a représenté un budgetsupplémentaire de 50 000 euros pour l’entreprise.

M. Tout-le-Monde n’est pasprès de rouler propre.Dans la famille voitures électriques, chacun y va de sonmodèle. La petite dernière sera d’ailleurs présentée au Salonde Genève dans quelques jours. Encore chers et peuautonomes, ces véhicules peinent à trouver leur marché,séduisant surtout des entreprises en quête d’image.Par Jean-Michel Normand /Illustration Jean-Baptiste Talbourdet

que « le facteur économique n’est pas entré encompte » dans ses motivations d’achat. La Leaf,en effet, est proposée 30 990 euros, prime gou-vernementale de 5 000 euros comprise.Hors deprix,mêmepour une berline tout confort propo-sant quatre vraies places. Son autonomie, appré-ciable (150kilomètresmais aprèsunedemi-dou-zaine d’heures de recharge), ne suffit pas à fairede la Leaf une voiture à tout faire.« Pour partiren vacances, nous avons une seconde auto »,préciseYoannNussbaumer…N’en déplaise au souci de rationalité affiché parles uns et à l’enthousiasmedes autres, l’avenir dela voiture électrique inspire une certaine per-plexité. Ce que les chiffres viennent confirmer.En France, les immatriculations de véhicules« zéro émission » ont certes plus que décuplé– passant de 184 à 2 630 entre 2010 et 2011 –,mais elles représentent à peine plus d’un mil-lième du marché. En six mois, Nissan France avendu 92 exemplaires de la Leaf. Renault, dontle PDG Carlos Ghosn assure que les véhiculesélectriques pèseront 10% des ventes totales en2020, refuse obstinément d’afficher des objectifsprécis pour la Zoé ou leTwizy. Hormis les mar-chéspublics (administrationsetentreprisesnatio-nales se sont engagées à commander 15637Kan-goo ZE sur quatre ans), la visibilité commercialen’est pas des plus nettes.Olivier Paturet, respon-sable de la commercialisation de la Leaf chezNissan France, ne dit pas le contraire : « Nousavons séduit les plus enthousiastes. Pour faire bascu-ler l’opinion, nous allons faire des efforts, mais ilfaudra aussi que se multiplient les bornes de re-charge. »Et que soient pérennisées les – impor-tantes – primes à l’achat, ce qui n’est pas forcé-ment dans l’air du temps budgétaire.quelques indices suggèRent pouRtant que cer-tains obstacles pourraient être aplanis. De quoifaciliter le passage à l’acte et faire décoller lesventes de la voiture électrique, qui pourrait finirpar retenir l’attention des 80% d’automobilistesqui parcourent moins de 80 kilomètres par jour.Ainsi, laZoépourrait finalement voir son autono-mie portée de 160 à 200 kilomètres et Nissandevrait bientôt baisser –modérément,certes – leprix de la Leaf.Le catalogue desmodèles « zéroémission », aujourd’hui réduit, promet aussi des’élargir, ce qui devrait forcément nourrir la de-mande. Fait encourageant, même les marquesles plus attachées auxmécaniques classiques s’ymettent. Telle BMW, qui commercialisera fin2013 la i3, sa première voiture 100% électrique.Depuis juillet, un décret établit un droit à l’ins-tallation de prises électriques dans les parkingsdes logements et bâtiments neufs. La mise enroute d’Autolib, malgré ses déboires, va égale-ment faire découvrir à des milliers de conduc-teurs la conduite d’une électrique. A moyenterme, certains facteurs extérieurs pourraientaussi faire le lit des véhicules propres. Commela montée en régime des plans d’améliorationde la qualité de l’air en ville,qui pourrait aboutirà écarter des centres urbains une bonne partiedes voitures à moteur classique.Je

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- 713 mars 2012

le magazine.

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Le festivals’achève avecle concours debeauté. Lesoiseaux, mas-qués, sont placéssur des perchoirsen marbre, appe-lés « blocs ».

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L’autre MondialduQatar.

Vu de l’Hexagone, on pourrait croire que l’émirat,propriétaire du PSG et organisateur de la Coupe

du monde en 2022, ne jure que par le ballonrond. C’est méconnaître la passion ancestrale

des Qataris pour la fauconnerie. En plein désert,son festival international attire les foules

et les plus beaux spécimens.Par Benjamin Barthe/

Photos Marthe Amanda Vannebo

Le magazine.

- 733 mars 2012

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D ésert du Qatar, début février. Une tempêtede sable gris jaune aplatit l’horizon.Une co-lonne de 4×4 climatisés dévore l’étenduedésolée.Après une demi-heure de bosses etde bourrasques, la silhouette d’un immensechapiteaublanc apparaît.Puis des tentes,desrangées deprojecteurs et d’immenses écransde télévision. C’est le site du 3e Festival in-

ternational de fauconnerie du Qatar. Un village de toile ultramodernedans un paysage quasi lunaire. Des centaines de spécialistes de la disci-pline sont présents, appâtés par lesToyota LandCruiser et les chèques àsix chiffres promis aux vainqueurs. Au programme: chasse au vol, pour-suite sur leurre mécanique, course de lévriers et puis le clou du festival,le concours de beauté pour faucons. « On trouve ici quelques-uns des oi-seaux les plus chers de la planète, prévient Abdelaziz Nasser, un colossebarbu, qui a plusieurs bêtes en compétition. Les prix peuvent monterjusqu’à 500000 riyals (100000 euros). Ce festival, c’est comme le cham-pionnat du monde de fauconnerie. »

Voilà donc l’autre « Mondial » du Qatar, cet émirat à l’opulence tapa-geuse, qui est accusé de « racheter » les capitales duVieuxContinent etqui a décroché à la stupéfaction générale l’organisation de la Coupe dumonde de football de 2022. Un « Mondial » sans carton rouge, sansmascotte et sans canettes de bière, mais nimbé de la même mystiqueque celle qui entoure le ballon rond. Car, si la fauconnerie est un sportde niche dans les pays occidentaux, exercé par une poignée de gentle-men-farmers un peu excentriques, dans le golfe Arabo-Persique cettepratique ancestrale est comme une seconde religion. Vénéré pour samajesté, son regard perçant et ses piqués foudroyants, le faucon confèreà son maître une étoffe aristocratique, prisée tant par l’élite des pétro-monarchies duGolfe que par les classesmoyennes, en quête de distinc-tion sociale. « Je traite mon faucon comme mon enfant, dit Hmaidi Al-Enazi, un sergent à la retraite de la garde nationale saoudienne.C’est unsigne de noblesse. »La chasse au vol s’est répandue dans la péninsule Arabique, il y a plu-sieurs milliers d’années, par l’entremise de tribus bédouines venuesd’Iran.Moyen de subsistance essentiel dans les zones arides, cette pra-

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Vénéré poursa majesté,son regardperçant etses piquésfoudroyants,le fauconconfère àson maîtreune étoffearistocra-tique.

Les fauconsparticipant aufestival peuventvaloir jusqu’à100000 euros.

Des propriétairesattendent d’enre-gistrer leurs vola-tiles grâce à unepuce placée sous

le plumage.

tique s’est perpétuée en dépit de la sédentarisation des populations.« Pendant l’hiver, nos grands-parents allaient vivre dans le désert, raconteHamed Al-Jameela, un Qatari. Le faucon leur permettait d’attraper deslapins ou bien des outardes houbara [un échassier qui est la proie préféréedes rapaces]. C’est ainsi qu’ils parvenaient à nourrir leur famille. Maispour nous aujourd’hui, qui vivons toute l’année à Doha, la fauconnerie estun simple hobby. »

Les adeptes Les pLus fortunés se fournissent auprès de chasseurs venusd’Iran, duKazakhstan ou deMongolie, des pays de steppes où vivent lesplus beaux spécimens. Les autres se contentent du marché de Doha oude ceux d’Arabie saoudite. Signe dumariage des vieilles traditions et dela technologie la plus avancée, la capitale qatarie abrite un hôpital pourfaucons et un incubateur à fauconneaux. « A chacun ses lubies, résumeAbdelaziz Nasser, un ancien pilote d’hélicoptère de l’armée qatarie, for-mé àMarseille.En Europe, vous vous ruinez pour des peintures. Au Qa-tar, on met des fortunes dans des oiseaux. »Des fauconniers sont assis l’un à côté de l’autre sur une banquette amé-

nagée sous une tente bédouine. Figés dans leur dishdasha, la tuniqueblanche des Arabes de la péninsule, le collier de barbe finement taillé,ils ont le port altier et le regard fixe, commeparmimétisme avec l’oiseaucramponné à leur gant. A tour de rôle, ils se lèvent et enregistrent leurvolatile au concours de beauté. Grâce à un stylet électronique, qui dé-tecte la puce greffée sous le plumage de l’animal, le jury connaît aussitôtson âge et le nom de son maître. Les prédateurs les plus précieux sontaussi équipés d’un transmetteur, qui permet de les suivre jusqu’à trentekilomètres à la ronde. « Il y a quelques années, j’ai perdu un faucon quin’était pas suffisamment entraîné à revenir, dit Moubarak Al-Boenin, unconcurrent saoudien.Après un mois, un pêcheur l’a récupéré sur une petiteîle, au large du Qatar. Il l’a amené à un vétérinaire et grâce à la puce élec-tronique, ils ont réussi à me contacter. »Après enregistrement, les faucons sont conduits sous le chapiteau blancoù se déroule le concours. La moquette bleu pétrole est moelleusecommeun tapis demousse et les gradins aussi vastes que dans une halledes sports. Les faucons sont déposés sur de petits perchoirs en marbrerecouverts d’un tapis de gazon synthétique –un « bloc » dans le •••

- 753 mars 2012

Le magazine.

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Dans unpays com-posé à 85 %d’expatriés,la promotiondu folkloreautochtoneest unenécessitépolitique.

Le public estvenu en familleassister auxépreuves dechasse aupigeon(ci-dessous).

Pendant leconcours debeauté, lesfaucons sontsurtout jugéssur leur plu-mage, qui doitêtre le plusblanc et soyeuxpossible(à droite).

jargon de la fauconnerie. Pour éviter qu’ils ne s’envolent, leur têteest couverte d’un chaperon,petit masque de cuir.La tribune du jury estaménagée en surplomb, juste en dessous d’un écran géant relié à unebatterie d’ordinateurs, où seront affichées les notes obtenues par chaqueconcurrent.« On note sur 320 points », explique le juge SalahAl-Kuwari,58 ans. « Chaque partie du corps de l’oiseau est prise en considération. Leplus important, c’est le plumage. Plus il est blanc et soyeux, mieux c’est. Maison évalue aussi le cou, le bec, le dégradé de la nuque, le regard, et la taille despattes. Et puis aussi le ventre, il faut qu’il soit dodu », ajoute-t-il en dési-gnant une photo de faucon de trois mètres de haut, qui tapisse tous lesflancs du chapiteau: « C’est le lauréat de l’année passée. »

La grand-messe a sa zone commerciaLe. Une rangée de kiosques en bois,où l’on vend du matériel de fauconnerie. Un marchand français, Man-fred Maugasc, a fait le voyage jusqu’à Doha. En veste de lin blanc, lesRay-Ban remontées sur le front, il fait la promo de son produit-phare,

« un chaperon orné d’une pierre Swarovski ». Il montre également ses« chaperons fantaisie », peints aux couleurs du Qatar et des Emirats, oubien version « camouflage ». « Ce n’est pas un grand succès », admet-il,avant d’aller faire la queue à la cafétéria de fortune, tenue par des cuisi-nières népalaises.Dans un préfabriqué voisin, le déjeuner des VIP s’achève. Al-Gannas,l’association de fauconnerie qatarie, a invité le gratin de l’IAF,Associa-tion internationale de la fauconnerie et de protection des oiseaux deproie. Il y a son président, l’Américain Franck Bond, en jean, bottes decuir et Stetson ; un Tchèque, habillé d’un costume vert pomme qu’ondirait tout droit sorti d’un conte tyrolien, et un Ouzbek coiffé d’un drôlede tricorne couleur crème.Tous semblent complètement sidérés par lamaestria de leur hôte. « Nous n’avons pas toutes ces compétitions en Oc-cident, reconnaissait la veilleFranckBond,dans une conférencedepresseorganisée au siège d’Al-Gannas.Cette relation symbiotique entre l’homme,le lévrier et le faucon, on ne la trouve que dans cette région. »

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Le fauconvainqueur del’épreuve dechasse permet àson maître derepartir avec unLand Cruiser.

Les autorités duQatar veillent sur ce patrimoine avec un soinmaniaque.C’est d’ailleurs Joaan, l’undes fils de l’émirHamadBenKhalifaAl-Thani,qui patronne l’événement.Dans unpays dont la population est composéeà 85% d’expatriés –Pakistanais, Philippins ou Indiens qui sont policiers,chauffeurs de taxi ou caissiers de supermarchés– la promotion du folkloreautochtone et sa mise en scène à grands renforts de campagne de com-munication sont une nécessité politique. D’autant que la perspectived’accueillir le Mondial 2022, avec son cortège de supporteurs éméchés,inquiète une bonne partie de la population, souvent plus conservatriceque la famille dirigeante. « Beaucoup de gens ne sont pas rassurés par ladirection que prend leur pays, explique un entrepreneur étranger installéà Doha. Ils ont tendance à vouloir se protéger et à se replier sur leurs ra-cines. C’est naturel. » Outre les très consensuels festivals de chevaux oude dhows (les boutres du golfe Arabo-Persique), les actions de défensede l’identité qatarie comprennent la décision d’arabiser tous les ensei-gnements à l’Université duQatar àDoha,dès la rentrée 2012.« Ils se sont

rendu compte que leurs enfants, qui sont élevés par des nounous étrangèresqui leur parlent anglais, avaient un mauvais niveau d’arabe, poursuitl’expatrié. Ils prennent leurs distances avec le modèle anglo-saxon. »

Soudain, deS criS de joie retentiSSent danS leS tribuneS. Un faucon vientd’attraper un pigeon en plein vol. Spectaculaire, la scène réveille un publicfrigorifié, qui s’escrime depuis deux heures à suivre les évolutions desfaucons, souvent brouillées par le vent du désert. « Mash’Allah, Mash’Al-lah » (expression religieuse, que l’on peut traduire par « fantastique »),s’égosille le speaker.Lepropriétairede l’heureux rapacebalance son turbanen l’air.Il est sacrévainqueurde l’épreuveet rentrera chez lui auvolantd’unLand Cruiser. « J’ai entraîné mon oiseau pendant un mois, dit-il.Mais c’estDieu qui m’a aidé. »Lanuit tombe sur la coursede lévriers.Les spectateursconvergent vers le chapiteau,pour l’ultimeépreuve, le concours debeauté.Lescamérasqui retransmettent l’événementendirect sontenplace.L’élec-tion deMister Faucon peut commencer.

- 773 mars 2012

le magazine.

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Alber Elbaz, le singulier de la mode.

ne le laissent imaginer.« Je veux travailler avecdes gens que j’aime et faire des choses quej’adore » : voilà le programme! Les histoires demode qu’il raconte ont précisément une alluredifférente de celles des concurrents français ouitaliens qui partagent, avec Lanvin, le trottoirde la rue du Faubourg-Saint-Honoré, à Paris.Ici, point de sacs rutilants – ces fameux it-bagspièges à chiffre d’affaires – que des créaturesaux corps photoshopés brandissent dans lesimages publicitaires. Comme un chiffon rougedestiné à attirer les riches clientes.Au lieu de cela, des filles et des garçons (man-nequins tout de même) qui improvisent unechorégraphie hilarante dans un petit film réali-sé, comme la campagne pour l’hiver 2012, parle photographe Steven Meisel. Les sacs, leschaussures, les bijoux, les robes sont là et Elbazaussi, qui apparaît au final, jouant une fois deplus de l’autodérision pour mettre en scène sasilhouette ronde et bondissante, si peu fré-quente dans un monde où il ne s’agit pas sim-plement de maigrir, mais de « s’assécher ». Ceclip a fait un tabac sur YouTube et a amusé laToile bien au-delà des gens qui ont les moyensde s’offrir du Lanvin.

V ous m’avez énervé

tout à l’heure »…

C’est ainsi qu’AlberElbaz, le directeurartistique de la mai-son Lanvin, conclutl’entretien qu’il

donne pour parler du livre (ou plutôt de l’objet)imaginé avec l’éditeur Steidl à l’occasion de sesdix ans à la tête de la griffe.Un label dont il a faitl’un des plus importants du secteur du luxe.Loin derrière les mastodontes Vuitton ou Cha-nel, certes,mais suffisamment performant pourque le nombre de boutiques ait été multiplié,que les lignes se développent (homme, femme,enfant,mariage,etc.) et que le nomd’Elbaz soitévoqué à propos de la succession de tel ou teldans une grande maison.Mais tout cela l’énerve. Il ne veut pas parler dusystème de la mode, il n’aime pas se compareraux autres.« Je dis ce que je veux faire. Je ne suispas un idéologue ou un homme politique que l’onvient chercher sur ses promesses », explique-t-ilavec un léger agacement. Il déteste qu’on leforce à quitter le chemin qu’il a tracé avec plusdedéterminationque sesmanières bonhommes

Dans cet univers uniformisé et secret,il détonne par son franc-parler et sasilhouette en rondeurs. En dix ans àla tête de Lanvin, il a fait de cette maisoncentenaire l’une des plus importantesdu secteur du luxe. C’est cette histoirede travail, de spectacles et d’amitiésqu’il raconte dans un livre-objet.Par Marie-Pierre Lannelongue

Un humour revendiqué. Une certaine pudeurdans la façon de montrer le corps. Un vocabu-laire du vêtement où la suggestion remplace lesrecettes du sexy si souvent appliquées ailleurs.Une poésie dans la mise en scène des défilésdont l’émotion semble être la seule feuille deroute. Une succession, année après année, derobes de soie ou de satin qui effleurent plusqu’elles ne révèlent. Et au final, vingt saisonssouvent acclamées par une presse extatique,toujours un peu les mêmes mais toujours à partdu reste de la meute. Différentes… On tourneautour du mot dans une tentative de lui fairethéoriser son altérité à la façon d’un manifeste.Mais il se dérobe encore. Jusqu’à s’agacer.Et ledire. Ce qui est une façon de signifier sa singu-larité dans ce milieu si policé, où la flagorneriede surface cache des concours de langue de vi-pères. Où peu de choses, finalement, se disent.« Je sais que ce n’est pas bien vu de le dire maisj’aime les gens de la mode. Notre milieu n’est pasmoins intéressant que celui de la danse ou du ci-néma : il est composé du même lot de gens hysté-riques et passionnés. Et il n’y a pas tant de rivalité.Nous nous comprenons car nous partageons lamême vie. Au moment des collections, nous •••

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« Avec ce livre,je ne voulais pasune rétrospective parcequ’on dresse un bilanquand on se retire. Jevoulais un reality-show,le show de la réalité deces modélistes, de cestailleurs, de ces stylistesqui viennent tous lesjours en métro réaliserdes robes si chères. »

1, 4, 5. Le 5 octobre2008, Alber Elbazprésente la collectionLanvin durant laFashion Week de Paris.

2. Le 1er octobre 2010,durant le défilé Lanvinde prêt-à-porterprintemps-été 2011.

3. A New York,le 18 novembre 2010,le créateur préparele défilé Lanvin pourH&M.

6. Le 4 mars 2011, àParis, les modèlesportent la collectionautomne-hiver 2012.

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sommes un petit groupe à nous donner dessignes de soutien. Karl Lagerfeld envoie des fleurs,Stella McCartney des ballons, moi, desmacarons. »Alber Elbaz, donc, entend qu’on le laisse dérou-ler son personnage de rondouillard élégant etrêveur, foulard de soie autour du cou et pieds nusdans des derbys de cuir. Il n’a pas de coach, detatouage et de muscles huilés. Il aime manger.Trop.Dans ses kilos, il y a aussi le poids du douteet de l’anxiété qui ne l’ont jamais quitté. « Sanscela, on ne fait rien », dit-il. Il n’avoue qu’une ja-lousie: « Les gens plus minces. » Il raconte d’unevoix douce et traînante, à la fois cotonneuse etlégèrement inquiète. Il faut l’entendre murmu-rer « je suis Alber. Alber de chez Lanvin ». Toutconcourt à faire fondre l’interlocuteur.Mais l’œilderrière les lunettes cerclées de noir,version mo-derne de celles d’Aristote Onassis, se révèle vitevif et scrutateur. Intelligent. Redoutablement.Certains disent qu’il est un faux gentil. Lui, sansqu’on lui pose la question, prévient:« Je suis exi-geant avec moi. Donc exigeant avec les autres. »Pourtant l’équipe qu’il a formée est restée stabledepuis les débuts,« malgré les chasseurs de tête quirôdent ». « On ne m’a pas beaucoup quitté », ditcelui qui ne cherche qu’à « être aimé ».Il s’empare volontiers d’un carnet pour redessi-ner les robes d’une collection ancienne maisc’est aussi un homme de mots. Qu’il délivredans un impeccable français tout en s’excusantavec des airs de coquette de ses – rares – fautes.« Normal »… il est né à Casablanca, a grandi àTel-Aviv, où il a accompli son service militaireavant de faire ses armes à New York au côté ducouturier Geoffrey Beene, un monument de labonne société américaine. Quand il est arrivéchez Saint Laurent à la fin des années 1990,choisi par Pierre Bergé [actionnaire du Monde]pour dessiner le prêt-à-porter alors qu’« Yves »se consacrait à la haute couture, il avait déclarévouloir faire des « robes pour que les femmespuissent reprendre du dessert ». Depuis, il acommis des centaines de saillies, ce qui le placedans la catégorie « créateur qui parle », à mi-chemin entre le fiévreux Yves Saint Laurent etle cinglant Karl Lagerfeld. Moins tourmentéque le premier et moins méchant que le second.Un éditeur devrait songer à réunir les meilleuresformules d’Alber Elbaz. Comme celle-ci : « Jesuis un genre de médecin. Le médecin prescrit auxfemmes du Tylenol [un analgésique].Moi, je leurdonne une robe rouge. » Ou encore: « J’aime lesvieilles, les jeunes, les ridées, les rondes. Pas seu-lement celles qui collectionnent les injections deBotox et dont la poitrine va d’ici [chez Lanvin,au 22, rue du Faubourg-Saint-Honoré] à laplace Vendôme. » Soit 500 mètres, au bas mot.

Mais il y a beaucoup plus d’images que de motsdans le livre de ces dix ans chez Lanvin. Unpeu plus en réalité, puisqu’il a signé le 12 sep-tembre 2001, appelé par Mme Shaw-LanWang, la propriétaire taïwanaise de la maison.« Je suis arrivé en pensant que c’était la fin dumonde. Le premier jour, c’était un dimanche, je mesuis enfermé dans les archives pour voir les robesde Jeanne Lanvin, certaines datant des années1910, l’époque où elle régnait sur la mode. Je mesuis dit que si j’avais été une femmemince, j’auraisaimé porter ça », dit-il.La couverture de l’ouvrage est recouverte dugros-grain qui rappelle les « tics » stylistiques dela maison (avec les rubans et le zip apparent, re-pris partout),dessinantune couture moderneet confortable. Poé-tique pour les innom-brables fans ; chichi-t e u s e p o u r l e squelques-uns qu’ellelaisse froids. Dans lelivre, il y a aussi despages blanches carc’est par elles que toutcommence. Et des di-zaines de photos quidisent le travail, de lacollection d’hiver enl’occurrence: les mainsdes dames ou des mes-sieurs de l’atelier, lesphotocopieuses, lespoubelles qui débor-dent de capsules decafé… « Je ne voulaispas une rétrospective parce qu’on dresse un bilanquand on se retire, dit-il. Je voulais un reality-show, le show de la réalité de ces modélistes, de cestailleurs, de ces stylistes qui viennent tous les joursen métro réaliser des robes si chères. Leur prix est àla mesure du travail de recherche et de coupe. Noussommes aussi une des dernières maisons, avec Cha-nel et Hermès, à fabriquer en France. » Même s’ilavoue ensuite que certaines broderies sont,comme souvent, réalisées en Inde.« Quand le travail est fini, la robe me quitte.Mais je reste sa mère. » La mère. Et pas le père.Il y tient.Ainsi il se souvient d’un voyage à NewYork. « Nous allions présenter une collection. Lesvêtements étaient emballés dans des boîtes mais lesformulaires n’étaient pas remplis correctement.Nous voilà bloqués à la douane de l’aéroportJFK avec nos soixante boîtes. La responsable netarde pas à arriver et me demande qui je suis unpeu sèchement. Je lui réponds : “Je suis la mère detoutes ces boîtes.” Elle nous a laissés passer. »Une réaction de maman. La maternité reste songrand sujet. Quand sa mère adorée est morte, ily a quatre ans, il se souvient avoir fait une col-lection autour du ruban.« C’était le fil, le lien, lecordon. » Alber Elbaz ne compte plus ses an-nées d’analyse.Lanvin, d’Alber Elbaz, Steidldangin, 688 p., 320 €

Il s’emparevolontiers d’uncarnet de dessinsmais c’est aussi unhomme de mots,qu’il délivre dansun français parfait.

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- 813 mars 2012

Le magazine.

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Dansl’atelierde LucianFreud.Pendant vingt ans, David Dawsonfut l’assistant du peintre décédéen juillet dernier. De ces annéesde fidélité, il a tiré des photogra-phies actuellement exposées àLondres, témoignage artistique ethumain du lien intime qui unissaitl’artiste et ses modèles.Par Emmanuelle Lequeux/Photos David Dawson

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I l se dit, dans le london arty,que cer-tains des modèles de Lucian Freudétaient véritablement accros auxlongues séances que leur imposaitle peintre.Qu’ils y revenaient,mal-gré les souffrances endurées,

comme d’autres vers un paradis artificiel. Da-vidDawson est-il de cette espèce-là?Assistantde Freud, il lui a souvent servi demodèle au filde leurs vingt années de dialogue. Il dévoileaujourd’hui, dans des photographies actuelle-ment exposées àLondres, toute l’ambiguïté dela relation du peintre à sa proie.Décédé en juillet 2011,celui que certains consi-dèrent comme le derniermonstre de la peinturecontemporaine aurait-il apprécié que ces pansd’intimité lui échappent ainsi? Jamais on ne lesaura.MaisDawson n’aurait pas trahi son grandami qui, au moment de sa mort, était uneénième fois en train de le peindre en compagniede son lévrier Eli.Cette pose-là dura quatre anset malgré l’acharnement de Freud à le finir, leportrait deDavid etEli reste inachevé.Et pour-tant, tant fut donné de part et d’autre…C’est cet engagement que révèlent les clichésde Dawson : chaque jour, préparer l’atelieravant que n’y surgisse le maître, et demeurer

attentif au moindre frémissement de pinceau.Les moments secrets de ce lieu que Dawson,photographe « amateur » au sens de « celui quiaime », décrit comme « très, très privé » sontdévoilés ici. Le studio de Notting Hill, dont laporte était « fermée aumonde », s’ouvre soudainà notre regard. A commencer par ce fouillis dechiffons beigeasses, avec lesquels Freud net-toyait son pinceau et qui devinrent une dessignatures de ses toiles ; mais aussi ces grandesbaies vitrées qui laissent passer la lumière dontil aimait recouvrir les peaux ; et surtout sondéfilé de modèles, que Freud épuisaitlittéralement.

on voit dans ces images tous ceux à qui il a faitrendre âme: son acolyte britannique, le peintreDavidHockney, qui a l’air presque désemparé,saisi par l’objectif à côté de la toile représentantson visage rougeaud. Ou sa gironde modèleRia,que l’on découvre ici en plein processus detravail. Mais aussi la mannequin Kate Moss,tendrement alitée aux côtés du grand Lucian,qui livra d’elle un portrait en raccourci, éton-namment bien en chair. Seule la reine d’Angle-terre, autre célèbre victime de ce serial-painter,reste sur ses gardes. Sur ces clichés, les autres

modèles se laissent aller sur un divan, ou parterre, reprenant les poses des tableaux. Ils selivrent sans fierté au regard cruel du peintre.De la même manière que les autoportraits del’artiste saisissent particulièrement le regard, cesont les photographies représentant Freud quise révèlent ici les plus troublantes. Commecette image de 2006 qui le montre se rasant, leregard perdu dans le vague: lemonstre devientsoudain un vieil homme fragile, guère prêt àaffronter la mort qui approche. Surtout, ilsemble préparer sa propre peau au feu du pin-ceau, lui qui, depuis la fin des années 1950,s’est plu à montrer tous les épidermes commedes volcans prêts à exploser.Une autre image est encore plus frappante.Freud y apparaît la nuit, en démiurge affolé.Les pinceaux sont dressés comme une armée,la palette aux abois ; le corps de l’artiste, avecses rides sèches, apparaît lui-même comme unpinceau, irradiant dans l’obscurité, attrapé enplein mouvement. Alors semble se dévoiler lesecret de Freud: c’est avec tout son corps qu’ilpeignait.

« David Dawson:Working with Lucian Freud », à la PallantHouse Gallery, 9 North Pallant, Chichester. Jusqu’au 20 mai.Tél.: 00441-243-77-45-57. www.pallant.org.uk

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le portfolio.

3 mars 2012

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Lucian Shaving, 2006.

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Lucian Freud andDavid Hockney, 2002.

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Le portfolio.

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Studio Wall, 2006.

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Painters Gardenwith Eli, 2006.

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Le portfolio.

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Dav

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Working at Night,2005.

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Le portfolio.

3 mars 2012

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Lucian and Katein Bed, 2010.

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©Carole

Peyrot

www.am-vintage.com

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La caravane de la modevient de s’installer à Paris,

après avoir fait escale à New York, Londres et Milan :

aumenu,les collections de prêt-à-porter de l’hiver 2013.

Cette saison, le rituel des défilésest quelque peu troublé par les allers-retours

à la tête des maisons.Et les mille et une rumeurs qui les accompagnent.

Jil Sander réintègre donc le label qui porte son nom, remplaçant Raf Simons,dont on dit qu’il pourrait arriver chez Dior. Mais c’est surtout le départ de Stefano Pilati

officialisé une semaine avantsa dernière présentation chez YSL

et son remplacement probable par Hedi Slimane

qui créent l’évenement.Twitter et les réseaux sociaux ont littéralement

court-circuité la communication de la maison…La preuve que la mode, comme le reste, se fait aujourd’hui sur Internet.

La série de ce numéro spécial,pour l’été qui s’annonce,

est pourtant faite de chair,construite autour

de la personnalité étrangedumannequinGuinevereVanSeenus

et ses quinze ans de carrière.Une fois de plus nous avons fait le choix de mettre en scène une femme

plutôt que d’aligner les tendances sur une fille porte-manteau.

Lamode, c’estaussiunehistoiredeparti pris.

Héloïse Tristan

- 933 mars 2012

LeStyle/ Mode / Beauté / Design / Auto /

/ High-tech / Voyage / Gastronomie / Culture /

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Robe en maillede viscose,AlAïA. collantRésille, FAlKE.chaussuRes enveau velouRs,CélINE.

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Le chic n’a plus d’horaires. La tenue de soirée s’affiche en pleinejournée et le jean joue les révélateurs de féminité. En toutes cir-constances, la femme du xxie siècle revêt les atours d’une vampenvoûtante. Un modus vivendi à la fois excitant et tyrannique.Photos Cédric Buchet/Stylisme Aleksandra Woroniecka

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à droite :Chemise endenim, SANDRO.Jean levi’s 501vintage, ChezkiliwAtch.

Ci-Contre :Brassièrepaillettes etCulotte enlyCra, DOlcE &GABBANA.Collant enrésille, FAlkE.

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Visière en cuir etmaille, BALEN-CIAGA pAr NICo-LAs GhEsquIèrE.top natté decoton, ChANEL.

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à droite :Veste et Jeanen denim,LEVI’S. tee-shirt,HILFIGER DENIM.

ci-contre :maillot de bainen Jersey etcaftan en soie,GUCCI.

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à droite :Chemise en soie,MAJE. Culottetaille haute ensatin stretCh,CADOLLE.Chaussures enveau velours,CéLINE.

Ci-Contre : vesteet Cravateen soie, RALPHLAURENCOLLECTION.

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Top en chiffoneT jupe ensablée, PRADA.ceinTure en cuirperforé, ALAïA.chaussures ensaTin, ROBERTCLERGERIE.

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à gauche : Pullen mousseline,VALENTINO.JuPe en coton,BURBERRY.collant résille,FALKE. Bouclesd’oreilles enmétal doré,MOSCHINO.chaussures enveau velours,CéLINE.

à droite :chemise en soied’organza,CHRISTIAN DIOR.culottetaille hautePaillettes,CADOLLE.collant enrésille, FALKE.

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à droite : trenchen vinyle pied-de-poule, WEEKEND BY MAXMARA.Bouclesd’oreilles enmétal doré,MOSCHINO.Gants en soieinterlock impri-mée, HERMèS.comBinaison enrésille, REPETTO.culotte, ERèS.chaussures enveau velours,CéLINE.

ci-contre :haut en popelinede soie, CHLOé.

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blouson ensatin, BLK DNM.soutien-gorgeen lycra,ANDRÉS SARDÀ.Pantalon ensoie, EMPORIOARMANI.bracelet enmétal et verresoufflé, CHANEL.

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à droite :robe en cuir,organza et soie,LOUIS VUITTON.

ci-contre :top et Jupeen natté decoton, CHANEL.gants en soieinterlock impri-mée, HERMèS.

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Chemise enCoton, GéRARDDAREL. top enCuir effet vinyleet Ceinture enCuir, le toutCéLINE. Guêpièreen tulle, FIFICHACHNIL. Bas,FALKE. Chaus-sures en veauvelours, CéLINE.Voir coordonnées p.150

mannequin :Guinevere vanseenus.mise en Beauté :romy soleimani@ manaGement +artist.Coiffure : DaviDvon Cannonpour @streetersnew york.Coloriste : mau-riCio BermuDez@ ion stuDio nyC.manuCure : meG@ susan priCe.DéCor : philipphaemmerle.assistante réali-sation : alineDe BeauClaire.proDuCtion :nex9 proDuC-tions. remerCie-ments à rio.

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Quandlamodepianote etréseaute.Défilé en streaming, f-commerce,géolocalisation: pas une marque de modequi ne voie dans les réseaux sociauxet les outils d’Internet un moyen d’accroîtrele lien affectif avec ses fans.

I love lacoste », écrivent cette Koweïtienne etcette Mexicaine ; « Lacoste ♥ », répondcette Française sur le mur Facebook de lamarque, à quelques heures de la diffusion,en streaming et en direct, du défilé

automne-hiver 2012-2013. Dans la salle, à NewYork, plusieurs centaines d’invités triés sur levolet ; devant leur ordinateur, aux quatre coins dumonde, 10000 internautes. S’il y a encorequelques années les marques déléguaient volon-tiers l’animation dilettante de leur page Facebook

au stagiaire geek, rares sont celles qui s’interro-gent encore aujourd’hui sur l’intérêt d’investir lesréseaux sociaux. « Pour animer les six plates-formes sur lesquelles Lacoste est présent, nousavons une équipe de cinq personnes à Paris, ainsique des antennes aux Etats-Unis, en Corée, auJapon, en Turquie…», explique Laetitia Laplace,directrice adjointe de la publicité et d’Internet.L’historique crocodile n’a pas raté le coche dunouveau millénaire et balade habilement sesécailles sur Facebook mais également sur Twitter,

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YouTube, Flickr ou encore Google+. Un investisse-ment humain considérable. « Notre force? Lesnombreuses facettes de Lacoste : le lien affectif, lecôté luxe, les valeurs sportives… Ces différentesproblématiques nous permettent de segmenternos actions digitales », poursuit-elle. Une applica-tion Facebook My Croc pour personnaliserl’humeur de son crocodile, une photo exclusived’un golfeur sur Twitter, une vidéo des coulissesdu défilé sur YouTube. La stratégie paie : enseptembre 2010, Lacoste compte 1,6 million defans, en février 2012 plus de 8 millions, soit autantde potentiels relais d’information. Elle caracoledésormais en tête des marques de mode fran-çaises les plus suivies, selon le site Socialbakers.com. « C’est une croissance organique, naturelle.Chaque fan devient un prescripteur de qualité.Notre mission n’est pas de vendre mais d’entrete-nir la considération pour la marque et la faire évo-luer », assure-t-elle.

également très présent sur le net, l’italien gucci achoisi une stratégie différente, misant sur lef-commerce (qui utilise les réseaux sociauxcomme canal de vente). Huit plates-formes autotal, dont un magazine baptisé Gucci Style pouriPhone et iPad (déjà téléchargé plus d’un millionet demi de fois) qui offre la possibilité d’acquérir,en quelques clics, presque tout ce que l’on voit.« Le digital nous permet d’atteindre un large publicavec nos plates-formes, qui possèdent toutesun lien pour acheter en ligne, raconte RobertTriefus, directeur de la communication monde.Pour nos plus jeunes fans, nous sommes unesource d’inspiration ; pour un public plus âgé, quiconstitue notre clientèle, une source d’informationdivertissante proposant du contenu exclusif surFrida Giannini, notre directrice artistique, lescoulisses de la maison et les dernières éditionslimitées. » Et le compteur s’affole vite sur le Net.Presque 261 000 followers sur Twitter, quelque30 000 en plus rien que pour le mois de janvier.« Les cibles varient selon la plate-forme, chacune aun contenu et un design spécifiques. On utiliseTwitter en temps réel pendant les événements etles défilés, Facebook comme blog et Gucci Stylesur iPad et iPhone comme un magazine. »Lors de la conférence « Mode & Réseauxsociaux », organisée le 7 décembre 2011 par laFédération française du prêt-à-porter féminin,son président, Jean-Pierre Mocho, affirmait que« la communication virale, en multipliant lessources d’information, a modifié considérablementla relation que les marques entretenaient avec lesconsommatrices ». Et les dernières tendancesdans le domaine des réseaux sociaux ouvrent denouvelles pistes d’exploration. Par exemple, laplate-forme Pinterest permet de créer son moodboard, une page sur laquelle les internautesépinglent virtuellement leurs coups de cœur.Burberry, qui incarne sans conteste l’une des plusbelles réussites digitales (déjà récompensée en2010 par le Digital Innovation Award des BritishFashion Awards), propose sur sa page Pinterest

des détails de défilés, des accessoires, des looksque l’on peut « repiner », c’est-à-dire ajouter surson mur en un seul clic. Une mine lorsque l’on saitqu’Internet est devenu la deuxième source deconfiance des consommateurs (derrière l’avis deses amis, selon une enquête Nielsen).

autre outil en vogue: les plates-formes de géolocali-

sation comme Foursquare qui permettent auxinscrits d’informer leurs amis qu’ils viennent d’en-trer, par exemple, dans la nouvelle boutiqueGucci. « Ces outils permettent de contrôler la stra-tégie de communication sans passer par la presse.D’autant que les magazines comptent, au mieux,quelques millions de lecteurs alors que les plates-formes peuvent générer plus de 5 millions de fansqui choisissent volontairement d’établir une rela-tion directe avec la marque », analyse VéroniqueValcu, associée de L2, un think tank new-yorkaisspécialisé dans l’innovation digitale. Un vecteurde communication qui permet également deconnaître l’opinion des consommateurs en tempsréel. Mais le retour sur investissement va plus loin :L2 a remarqué qu’il existait même une relationpositive entre présence digitale et résultats finan-ciers. Des outils incontournables donc,à manier tout de même avec précaution pourdiffuser intelligemment le message, animer sacommunauté, créer des passerelles entre plates-formes sans saturer les fans. Car sur Facebook,s’il suffit d’une fraction de seconde pour aimerune page, il n’en faut pas plus pour cliquer sur« Je n’aime plus ». Vicky Chahine

- 1173 mars 2012 – Illustrations La Tigre pour M Le magazine du Monde

le style.

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Boutique

Denim de luxe.La griffe italienne de jeans Diesel monte engamme avec de nouvelles boutiques qui présen-tent les collections classiques ainsi que la ligneplus couture Diesel Black Gold, signée parla créatrice Sophia Kokosalaki. Dernier en date,le magasin parisien inauguré le 2 mars dansle Marais avec façade d’époque, vitrines en ferforgé et grande verrière (photo). V. Ch.www.diesel.com

LeB.A.-BA…du plissésoleil.Ce pliage de matière bon genreet rétro fait son grand retoursur des jupes pas toujoursaustères. Voici tout ce qu’ilfaut savoir pour ne pas resterdans l’ombre.

Les versionsModèles années 1950 pastelchez Prada (photo), version cuir(psycho-)rigide chez Célineou baba rock en mousselinefleurie et rehauts de cuir vernichez Roberto Cavalli. Il s’agitd’entretenir un délicieux malen-tendu sur le degré d’innocencede la fille sous le plissé.

L’associationPréférer un simple tee-shirtaux petits hauts vintageredondants. Des souliersoriginaux et/ou design achève-ront d’équilibrer l’esprit dela silhouette.

La conditionUne taille marquée, saufpour celles qui ont envie deressembler à l’un de ces petitsparasols pour cocktails fluo,ambiance Miami Vice. D. Pa.

L’ICÔNeLouise Brooks, femme au carré.« Il n’y a pas de Garbo, il n’y a pas de Dietrich: il n’y a que Louise Brooks », disait HenriLanglois, figure incontournable du septième art. La star du cinéma muet a marquéson époque avec son – toujours inspirant – carré graphique noir corbeau façoncasque, ses traits délicats, son teint de porcelaine et ses fines lèvres foncées. uneicône Art déco à l’allure moderne, qui savait jouer avec les codes de la féminité. V. Ch.

Les boucLesd’oreiLLes.En argent, AlessiDomenico, 472 €.Yoox.com

La manchette.En métal argentéet cristaux Swa-rovski, PhilippeAudibert, 270 €.Philippeaudibert.com

La robeAsymétrique ensoie imprimée,Gucci, 2 000 €.Net-a-porter.com

118 - 3 mars 2012

Le style.

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Fétiche

A fleur de peau.De plus en plus de marques font appel à des personnalitésextérieures pour imaginer une ou plusieurs pièces de leurscollections. Le tanneur a, lui, choisi de s’adresser à la rédac-trice de mode parisienne Marie Lichtenberg. elle a conçu cemodèle qui reprend la forme historique du sac seau resserrépar un lien de cuir. Le chèvre velours très doux, la bandoulièretissée agrémentée de pompons et la couleur ocre le rendentà la fois pratique, moderne et un brin ethnique. V. Ch.sac Marie lichtenberg, le tanneur, 480 €. www.letanneur.coM

119Photo Philippe Jarrigeon pour M le magazine du Monde

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tendance

Bille en tête.Son apparition a révolutionné notre quotidien, aupoint de nous faire renoncer aux pleins et déliés carac-téristiques de la plume. Rapide et efficace, la bille adémocratisé l’utilisation du stylo. Véritable emblèmedu xxe siècle, il sait aussi faire le grand écart entreobjet ordinaire et pièce précieuse, façon totem.V. Ch.de haut en bas : stylo bille élysée, modèle laque noire, attributspalladium, st dupont, 250 €. tél. : 01-45-61-08-39. stylo bille ingenuitylaqué noir et bagues en métal, parker, 160 €. www.stylo-parker.frstylo bille diabolo décor lignes de chevrons finition palladiée, cartier,480 €. tél. : 01-42-18-43-83. stylo bille rnX-316 black, caran d’ache, 282 €.www.carandache.com

120 photo philippe Jarrigeon pour m le magazine du monde

Page 121: Le magazine du monde du 3-3-2012

électriques contenues dansla base de l’objet. L’idée estde consommer autrement,surtout quand on sait que l’effetde satiété passe beaucouppar l’odorat… Ainsi, on mangemoins. » On est bien loin destendances rétro et nostalgiques.Spécialiste de ces questions,l’agence Nelly Rodi avaitprévu ce revirement dans soncahier d’inspirations « YesFuture », arguant du fait queles modes trop longtempsmaîtrisées par les commerciauxpour des raisons de rentabilitébrimaient la créativité, etfinissaient même par engendrerl’ennui. Côté style, chez lesleaders d’opinion commechez les consommateurs,le désir est là : une envie follede regarder au-delà de lacrise et de cesser d’êtreuniquement dans une quêtede réassurance pour sejeter dans le rêve d’après,le futurisme.Catherine Maliszewski

R echerche desmatières, virtuositétechnique, maîtrisedes formes, le prin-temps 2012 regarde

résolument vers le futur »,déclare Maria Luisa Poumaillou(voir p. 154) pour présenterl’opération « Visions Couture »,qui se déroule jusqu’au 24 marsau Printemps Haussmann.La consultante mode du grandmagasin parisien y souligne« l’insolence graphique de

Gareth Pugh» ou « l’urban-chicd’Alexander Wang». Avec Balen-ciaga par Nicolas Ghesquièreet Thierry Mugler revisité parNicola Formichetti, ces griffessont les fers de lance d’un styleaux frontières du réel et de lascience-fiction, avec des lignesinnovantes, des découpes laserultranettes, des effets métal-liques acérés ou miroitants…Qu’elles utilisent des matièrestraditionnelles (coton, soie)ou d’autres bien plus techniques

(Néoprène, caoutchouc) – oules deux ensemble, au gré decontrecollages –, la rechercheet développement est au cœurde ce phénomène. Il suffit, pours’en convaincre, de jeter un œilà la démarche de R3iLab(Réseau Innovation immatériellepour l’industrie). Cette plate-forme de savoir-faire et d’idéesexposait en janvier, lors duSalon Maison & Objet, ses créa-tions « Tech & Design » commela lampe aux ampoules fluo-compactes imaginée parMathieu Lehanneur avec lefabricant de parapluies LeVéritable Cherbourg. DavidEdwards et Marc Brétillot, eux,commercialisent le Whaf, unrécipient avant-gardiste destinéà faire inhaler les saveurs d’unerecette. « Il suffit d’un fond desauce, de bouillon ou de touteautre recette rendue liquide,explique Marc Brétillot. Versédans le Whaf, il est transforméen nuage de senteurs grâceà un système de petites ailettes

Donner à sentir les ali-ments avant leur dégusta-tion, c’est le principe duWhaf imaginé par DavidEdwards et Marc Brétillot.

Silhouettegraphiquesemblant venird’un autremonde chezGareth Pugh.

Impression lunaireavec cette lampeà ampoulesfluocompactes deMathieu Lehanneur.

Catwalking.com.M

athieuLehanneur.PhaseOnePhotography

D’oùçasort?La vague futuriste.De la mode au design, l’ambiance està la science-fiction, grâce à desmaté-riaux high-tech venus de l’industrie.

- 1213 mars 2012

Le style.

Page 122: Le magazine du monde du 3-3-2012

CeCi n’est pas…un crapaud.Ou plutôt ceci ne l’est plus. Avant de passer entreles mains des taxidermistes et des maroquiniersde la maison Kobja, ce crapaud buffle coassait enOcéanie. Autrefois importée d’Amérique du Sudpour détruire les coléoptères, la bestiole a mécham-ment muté. Devenue nocive, elle s’est retrouvée surla liste des créatures à occire. Les défenseurs del’équilibre écologique ne sont pas les seuls à vouloirsa peau: la créatrice Monika Jarosz a décidé de lerecycler en accessoire. Loin du sac en peau decroco, le porte-monnaie Kobja évoque l’antre d’unesorcière ou autre magicienne maniant la crapau-dine. Au Moyen Age, cette pierre fossile censée pro-venir de la tête d’un crapaud servait à détecter lespoisons en changeant de couleur au contact d’unesubstance toxique. En 2012, la chimie et la méde-cine ont supplanté la superstition, mais le crapaudconserve une aura diabolique assez séduisante.La mode qui tend à transformer le laid en beau nerelève-t-elle pas, au fond, de la sorcellerie? D. Pa.POrtE-MOnnAiE CrAPAuD KObJA, 215 €. www.KObJA.COM

Kobja

122 - 3 mars 2012

Le style.

Page 123: Le magazine du monde du 3-3-2012

Sur le même modèle que la loi deGodwin – selon laquelle une discus-sion en ligne finit presque toujourspar faire référence au nazisme – il

serait judicieux de mettre au point un sys-tème permettant de mesurer la propensiondes uns et des autres à évoquer le dan-dysme. Car, à entendre les conversations,en ce moment, il semblerait que le dan-dysme soit partout, et les dandys légion.Ainsi, le terme se retrouve-t-il régulière-ment accolé à une tripotée de célébritésmâles. Citons, sans souci d’exhaustivité eten restant à l’intérieur de nos frontières,Frédéric Beigbeder, Nicolas Bedos,Thomas Dutronc, Ali Baddou, MichelDenisot, Benjamin Biolay, Jean Dujardin,Edouard Baer, Ariel Wizman ou GuillaumeCanet, tous placés sous l’égide du dandyabsolu: entre ici, Serge Gainsbourg. De lamême façon, le mot « dandy » faitaujourd’hui l’objet, dans la presse, de mul-tiples déclinaisons conceptuelles. Outrele très usité « dandy cool », dont la réfé-rence disco fait certainement le piquant,citons les « dandy bobo », « dandyultime », « dandy rebelle », « dandyvintage », « dandy raté » ou « dandycéleste ». Avant, peut-être, bientôt, un trèsmalin « dandymanché ». Voire un « dan-dyarrhée » qui pourrait parfaitement résu-mer un dossier sur l’art de gérer, avecélégance, ses allers-retours aux toilettes.Transformé en gadget éditorial, le terme« dandy » n’a donc plus guère de sens etcertainement plus la moindre valeur. Au

vrai, il semble que chaque homme puissedésormais prétendre à ce statut, dès lorsqu’il ne se trimbale pas en permanence vêtud’un bas de survêtement gris chiné et d’unmarcel taché de sauce samouraï. Car, d’unpur point de vue stylistique, c’est bien leseul mérite commun que l’on puisse recon-naître aux personnalités citées plus haut.Mais, au-delà de la dégradation de l’exi-gence vestimentaire qu’elle sous-tend, lanouvelle acceptation du terme « dandy »trahit surtout son effroyable rétrécissement.Car si le doute demeure sur l’origine du moten lui-même (fait-il référence au dandy prat,une monnaie utilisée au xviie siècle en

Angleterre ou apparaît-il d’abord, à la findu xviiie siècle, dans la chanson américaineYankee Doodle?), on sait, depuis que Barbeyd’Aurevilly et Baudelaire se sont penchéssur la question, que le dandysme est davan-tage une manière d’être que de paraître.Ainsi, contrairement à ses imposteursdu moment, le vrai dandy n’est jamais àla mode. Il n’aime pas, ne travaille pas,ne se montre pas, ne brûle pas de billet de500 francs à la télévision et joue certaine-ment très mal de la guitare manouche.Autant dire que le vrai dandy est mort etqu’il doit aujourd’hui se retourner danssa tombe, le pauvre.

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Est-cE biEnraisonnablE...d’abuser du mot “dandy”?Par Marc Beaugé, illustration Bob London

accessoires

La poupée qui minaude.Version nocturne du sac, cette boîte compartimentée a été imaginéedans les années 1930 par Van cleef and arpels pour contenir lesindispensables féminins (le poudrier, le rouge à lèvres, le fume-cigarette…). a l’origine oblongue et plate pour une prise en mainfacile, elle se prête désormais à toutes les fantaisies. comme chezJudith Leiber, la marque américaine créée en 1963, qui déclinela minaudière sous forme de carrousel, de cupcake ou encore depoupée russe en cristal. V. Ch.www.judithleiber.com.

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Page 124: Le magazine du monde du 3-3-2012

envitrine…La maille détricotéepar Pièce d’anarchive.

Pour leur première collection,les trois jeunes femmes qui secachent derrière la nouvellemarque Pièce d’anarchive ont

savamment revisité les codes de lamaille en s’inspirant des parures detribus africaines. Le minutieux mélangede fils et de points, l’impeccable factureet la fabrication made in France en fontdéjà des pièces très remarquées. V. Ch.http://piecedanarchive.com

Gilles

Commaille

x3.J

&W

2.

3.

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Le short damier« Ce short illustre biennotre style, à la foisbasé sur les archivesmais dans une démarcheanarchique! La mailledeux fils avec un effetbrillant de Lurex a ététravaillée selon undamier irrégulier. Nouspréférons des couleursneutres pour atténuer larichesse de la texture etdu métissage despoints.» 600 €.

La robe dentelée«Cette robe mélange les textures et les reliefs. Unematière qui rappelle le papier bulle, des lignes ajou-rées pour casser l’opacité et des contours dont lepoint est inspiré des colliers de dents animales. Lataille haute est marquée, le bas reste évasé.»1 590 €.

Le sweat scarifié« Avec un point issu desbrocarts traditionnels,ce sweat de luxe en maillenous a été inspiré par lesscarifications des tribus afri-caines lors des cérémonies.Les épaules désarticuléesrévèlent un coin de peauet le décalage sur le col estdevenu une signature de lamaison.» 885 €.

En quelques années, Karim Rashid a su imposer un univers pop et régressifdans le monde souvent austère du mobilier contemporain. A la demande, plutôtsurprenante, du très sage fabricant danois BoConcept, le designer d’origineégyptienne a (un peu) abandonné son excentricité pour concocter une gamme quiopère la synthèse entre lignes organiques (la chaise Ottawa en forme de feuille)et style années 1970 (suspension en verre blanc et orange ou suspension chromée).Un mariage osé qui permet à la marque de pimenter son image bon teint. M. Go.Chaise Ottawa à partir de 369 €, suspension Ottawa en verre: 649 €, suspension en chrome Ball: 89 €. www.boconcept.fr

mOBiLiER

Coup de chaud sur le design scandinave.

124 - 3 mars 2012

Le style.

Page 125: Le magazine du monde du 3-3-2012

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Sous le signe des couleurs – printemps 2012

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Page 126: Le magazine du monde du 3-3-2012

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La ville est belle

La surface accessible.Par Vahram Muratyan

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sous influenceunair de broadway.Jambes nues et costumes scintillants: ledéfilé Dolce & Gabbana célèbre le glamourdes comédies musicales américaines.

Peu de chose séparent le culte de la ron-deur sensuelle à l’italienne de la culturepin-up américaine. Le show printemps-été 2012 du duo Dolce & Gabbanaillustre idéalement la filiation. Pour clô-

turer d’une pirouette un défilé de beautés rétromûries sous le soleil de Sicile comme les légumesimprimés sur les robes, les créateurs ont puisédans la mythologie du sex-appeal hollywoodien.Leur tableau final, comme une photo de classemannequin, rassemblait les filles en maillots debain fifties, sourire aux lèvres rubis sur fond dedécor de théâtre. Un glamour plein d’innocence,qui rend hommage à la comédie musicale ZiegfeldFollies, coréalisée en 1946 par Vincente Minnelli.Cette succession épique de tableaux dansés etchantés célébrait l’œuvre de Florenz Ziegfeld,légende de Broadway au début du xxe siècle, dontles spectacles à succès s’inspiraient des Folies-Bergères parisiennes. Devant l’objectif défilaientles plus grands noms de cette discipline cinémato-graphique à part: Fred Astraire, Judy Garland,

Gene Kelly, Cyd Charisse ou encore EstherWilliams. On y glorifiait une joie de vivre communi-cative à coup de pas de danse, sautillant en duoavec des filles carrossées comme un dessin deVargas, en beaucoup moins contondant. C’est cetesprit d’innocence qu’invoquent les deux Italiens,cette féminité éclatante à chair rose que l’on veutregarder. Mais pas toucher. Les courbes rebondiesincarnent la plénitude d’une société en pleinerenaissance, celle de l’après-guerre, une périoded’abondance dont la nostalgie se fait cruellementsentir dans un monde économiquement et politi-quement torturé. La mise en scène illustre aussi unpoint de vue lucide sur la mode, désormais spec-tacle collectif global, abondamment diffusé surInternet. Dans cette nouvelle société du spectaclevestimentaire, les modèles tiennent le rôle deshow-girls, capables de danser et de jouer lacomédie à la commande. Tout pour donner uneforme plus vivante et convaincante aux fantasmesde designers-réalisateurs. Qui restent seuls augénérique. Antoine Marcolli

Sur le tournagede Ziegfeld Follies,comédie musicalecoréalisée parVincente Minellien 1946.

Le film a fortementinspiré le défilé prin-temps-été des deuxcouturiers italiens.

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Marisol joueaux petitscheveux.Derrière la vitrine, des badauds s’arrêtent, intri-gués par l’atelier de perruques couleur pastel. Ilfaut dire que le studio Marisol tient plus de lagalerie d’art que du bar à brushing. récemmentouvert dans le Marais, l’espace décline le cheveusous toutes ses formes : bibis en tresses blondes,rideaux capillaires pour éclipser les regardscurieux, couronnes de nattes surdimensionnées,objets non identifiés en fibre auburn. Forméechez Jean-Marc Maniatis, ex-directrice artistiquede tony and Guy pendant dix ans, la coiffeuseMarisol (photo en haut à droite), égalementdécoratrice du lieu, a toujours été fascinée par laflexibilité du cheveu. une matière qu’elle se met àtricoter comme de la laine au hasard d’unconcours de coiffure. « J’ai été repérée grâce à degrandes perruques mousseuses et je ne me suisplus arrêtée », raconte la jeune femme au blondsubtilement patiné. De commandes spécialespour la presse (Wallpaper, Vogue Italie…) à l’ex-position « crazy hair », organisée en 2010 à l’ini-tiative du Musée Vitra et du centre GeorgesPompidou, Marisol poursuit son exploration artytout en s’occupant de quelques chanceuses dansson ancien atelier privé du canal saint-Martin.car son talent s’exprime aussi dans ses coupessur cheveux secs. « Une technique qui permet derespecter les épis et de montrer ce que la coiffuresera vraiment sans brushing », dit-elle. Quant aucôté morbide du cheveu? « Pour moi, ça n’a riend’angoissant. Au contraire c’est un hommage,comme ces cadres du xviie siècle, dans lesquels onconservait les mèches des défunts. » L. B.-C.Studio Marisol, 33 ter, rue des Tournelles, Paris-3e.Tél. : 01-44-61-18-34. De 90 € à 150 € la coupe, de 350 € à 15000 €la perruque. www.studiomarisol.com

horloGerIe

Escher hypnotise les cadrans.Riche de plus de deux cent cinquante ans d’histoire, Vacheron Constantin n’ajamais perdu de vue la valeur des savoir-faire artisanaux. Depuis 1992, lamaison leur rend même un hommage appuyé à travers la collection « Métiersd’art », initiée avec des montres de poche émaillées. Depuis, elle ne cessed’offrir à ses cadrans de nouveaux visages, puisés dans le champ de l’histoireet de la culture: expéditions des grands explorateurs, masques d’Afrique oud’Indonésie, reproductions du plafond de l’Opéra de Paris… Pour sa nouvellesérie, baptisée « Les univers infinis », Vacheron Constantin s’est inspiré dutravail de Maurits Cornelis Escher, graveur et dessinateur hollandais duxxe siècle, connu pour ses œuvres juxtaposant des motifs figuratifs dansd’hypnotiques compositions. La technique du pavage périodique utilisée par

l’artiste est ainsi reprise surtrois modèles : Colombe, Pois-son et Coquillage, véritablekaléidoscope marin. Desdécors d’une rare virtuosité,rendus possibles grâce à l’as-sociation de plusieurs savoir-faire : gravure, guillochage,émail champlevé ou cloi-sonné. Autant de métiersaujourd’hui maîtrisés par lamanufacture, qui transformela lecture de l’heure en purplaisir des yeux. J. D.Série « Les univers infinis »,dans la collection « Métiers d’art »,Vacheron Constantin.Tél.: 01-58-18-14-40. K

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Mavieen iMagesNicolaFormichetti.Cet Italo-Japonais multiplie les casquettes : directeurmode de Vogue Hommes Japon et d’Uniqlo, collabo-rateur régulier de V Magazine et de Dazed & Confusedmais surtout directeur artistique de Thierry Mugler.Depuis septembre 2010, il réveille les collections decette maison française en imaginant une silhouettemoderne et pointue. Un travail presque aussiremarqué que les tenues extrêmes qu’il crée pourla diva américaine Lady Gaga. V. Ch.

2- « Mon petit frère et moi avonsgrandi entre Rome et Tokyo.Ici, en 1985, avec ma mère,japonaise, sur la place Boccadella Verità, à Rome. »

3- « Dans les coulisses du shootingde la couverture deVogueHommes Japon avec TerryRichardson, en février. »

4- « Avec la styliste Katy England,mon mentor. C’est elle qui m’aintroduit dans le milieu de lamode. »

5- « Avec le mannequin canadienZombie Boy et Lady Gaga, enmars 2011, qui venaient de défilerpour Thierry Mugler. »

6- « Je passe mon temps dansles boutiques de vêtements vintage.Ici à New York dans l’un demes magasins préférés, Search& Destroy. »

7- « Aux British Fashion Awardsen 2010, avec Daphné Guinnesset mon trophée Isabella BlowAward for Fashion Creator. »

8- « Je suis obsédé par les pandas,au point que mes amis m’ontsurnommé Nicopanda. J’ai finipar imaginer ce personnage,que je décline sur des figurineset des vêtements. »

9- « Avec Lady Gaga. Noustravaillons ensemble depuis troisans sur beaucoup de projets, c’estune véritable amie. Nous sommesprésents l’un pour l’autre et nousnous amusons beaucoup. »

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1- « Séance photo réalisée pour lanouvelle version russe du magazineInterview, en novembre 2011,et inspirée par le Japon, le punk etles pandas. »

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Kia

Le consommateur avant-gardiste prêteune oreille à la pop coréenne, dissertesur le cinéma ou s’adonne aux jeuxvidéo coréens. Rouler en coréenne, enrevanche, pouvait jusqu’à il y a peu sus-

citer quelques réticences. Depuis leur arrivée– timide – au début des années 1990 sur la scèneeuropéenne, les voitures du pays du Matin-Calmetraînaient une réputation de modèles bas degamme. Silhouette lisse comme une savonnetteet qualité de fabrication aléatoire. Les choses ontchangé et en bien. Dernier exemple : la nouvellegénération de la Kia Cee’d. Fabriquée en Slo-vaquie, cette berline moyenne qui sera dévoiléele 8 mars au Salon de l’automobile de Genèvese présente sans complexe comme une alterna-tive à la Golf. Certes, la comparaison est un peuprésomptueuse. Mais pas si exagérée. Son alluretrès européenne – le patron du design, PeterSchreyer, est un ancien d’Audi – ne déborde pasd’originalité mais capte le regard. Propre surelle et bénéficiant d’une garantie de sept ans,la Cee’d, appellation amphigourique qui associela lettre C, désignant le segment des voituresmoyennes, et les initiales ED pour european

design, se conforme à un cahier des charges trèscarré. Une voiture bien élevée, bien équipée,bien motorisée , les clients de ce genre de modèlene cherchent pas autre chose.il n’est plus temps de considérer avec condescendance

la production automobile coréenne. Le groupeHyundai-Kia vient de doubler Toyota en Europeet talonne Honda aux Etats-Unis. En France, cesdeux marques ont réalisé en 2011 une croissance àdeux chiffres dans un marché en berne. Leurréussite tient à des modèles sages sans êtreennuyeux, pas toujours bon marché mais avec unbon rapport qualité-prix. Et puis, la productioncoréenne – la chose est nouvelle – s’autorise aussiquelques voitures sortant du lot, voire légèrementfoldingues. L’exotique Kia Soul, par exemple,et ses formes anguleuses. Ou le tout récent Hyun-dai Veloster et sa structure asymétrique (deuxportes côté passager mais une seule côté conduc-teur). Les esthètes évoqueront aussi le Genesis,un coupé « à l’ancienne » signé Hyundai et dotéd’un épatant moteur V6. Des modèles qui sont loinde faire l’essentiel des ventes mais qui donnentdu caractère, comme un léger goût de ginseng, àl’offre coréenne. Jean-Michel Normand

AUTO

Une Coréenne bien élevée.Alternative à la Golf, la Kia Cee’d est à l’image de la nouvelleproduction automobile sud-coréenne: efficace et sans prétention.

un profil étiré.plus long et plus bas quele précédent, ce modèleadopte une ceinture de caisseabaissée afin de préserverla surface vitrée. la lignede toit, étirée, doit donnerde la fluidité au profil.

des finitions soignées.Afin de soutenir lacomparaison avec lesconstructeurs européens– et surtout allemands –Kia soigne la précisiond’assemblage des élé-ments de carrosserie.

une Allure européenne.son capot plongeant, dans leprolongement du pare-brisetrès incliné, lui donne des airsde voiture européenne. lesprojecteurs soulignés par desphares diurnes à led rappel-lent ceux des Citroën.

des Airs sAuvAges.signe distinctifdes modèles de lagamme Kia, la Cee’darbore à l’extrémitéde son capot unecalandre dite« en nez de tigre ».

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de Luchino Visconti11 - 18 mai La Chambre du fils de Nanni Moretti12 - 25 mai Hammett de Wim Wenders13 - 1er juin Le Sauvage de Jean-Paul Rappeneau14 - 8 juin L’Argent de la vieille de Luigi Comencini15 - 15 juin Le jour se lève de Marcel Carné

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L’esprit… IbIza bohème.Cette île de l’archipel des Baléares est médiatisée pourses fêtes estivales délirantes qui attirent les clubbersdu monde entier et les DJ les plus renommés (DavidGuetta en tête). Mais Ibiza vaut surtout le détour lereste de l’année lorsque se côtoient les locaux adeptesde son rythme alangui et les touristes venus pour sabeauté sauvage. Elle redevient alors une terre hippie,celle qui a accueilli les artistes réfugiés du franquismepuis les bohèmes des années 1960, parmi lesquelsfiguraient Bob Dylan et Joni Mitchell. De ces annéesrestent une convivialité et un art de vivre bohème chictoujours aussi séduisants. Par Vicky Chahine / Stylisme Fiona Khalifa

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Carnet d’adresses

Hôtel Giri Residence,le spa des déessesDans une ancienne ferme du centre de l’île, cethôtel chic abrite l’un des plus jolis spas d’Ibiza.En plus des soins du visage prodigués avec lesproduits anglais bio Ren, la carte propose unpackage « Déesse Tanit » avec gommage à basede sel de l’île puis bain, enveloppement et mas-sage avec l’aloe vera local bio, réputé pourses propriétés régénératrices et hydratantes.Calle Principal 3-5, San Juan. www.spa.thegiri.com

Maison d’hôtes Can Xuxu,le refuge raffinéA quelques encablures de laville de San José et à une ving-taine de minutes du centred’Ibiza, cette finca (ferme tra-ditionnelle) du xixe siècle estl’ancienne résidence familialed’Alexandre Narakas. Le Fran-çais l’a transformée en maisond’hôtes cosy et raffinée.Mobilier importé de Bali, petit-déjeuner autour de la piscineet service bienveillant sousl’œil attentif des chiens dupropriétaire.Chambre double à partir de 150 € (avec lepetit-déjeuner).Tél.: (00-34) 971-80-15-84.www.canxuxu.com

Marché Las Dalias,le mythe incarnéChaque samedi, de 10 heures à20 heures, les locaux bohèmesà l’âme commerciale et les tou-ristes en quête du mythe se ren-dent au marché hippie de LasDalias, à l’entrée de Santa Eula-ria Des Riu. Bracelets ethniques,vêtements bariolés et autresparéos en batik ne sont pas tou-jours du meilleur goût, maisl’ambiance dans les bars et lesstands de tapas vaut le détour.www.lasdalias.es

Bar Croissant Show, la pause sucrée-saléeTenu par des Français qui maîtrisent les secretsde la viennoiserie, ce salon de thé-bar ouvertsans interruption donne sur le marché du centre-ville d’Ibiza. On y vient aussi bien pour le cafecon leche du matin, le pan con tomate (painavec tomates) du midi, le hierbas (la liqueurmallorquine à base d’anis, de romarin et de thym)de l’apéritif ou le petit-déjeuner post-fiesta.Plaça De La Constitucion, Ibiza.

Resto La Paloma, l’italien boboUn restaurant à l’entrée du petitvillage de San Lorenzo, tenupar une famille installée sur l’îledepuis une dizaine d’années.Cette ancienne finca est deve-nue un établissement de charme,à la décoration hippie chic, avecmurs bleu ciel décorés de fleurset d’oiseaux peints à la main. Lachef propose une cuisine inspi-rée de sa Toscane natale avecdes produits de saison, du painmaison et une divine mozzarellafaite sur l’île par un Italien.San Lorenzo. www.palomaibiza.com

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Avant de partirOffice espagnol du tourisme:00-800-10-10-50-50et www.spain.info/fr

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L’écrivain anglais, auteur d’une douzaine deromans et de sept essais, vit dans la cité italienne.Auteur parmi les plus talentueux et originauxde sa génération, il est aussi traducteur d’italienet enseignant en littérature. Actes Sud a publiéses romans, ainsi que son récit Le Calmeretrouvé, qui vient de paraître.Propos recueillis par Emilie Grangeray

S’évader dans les minérales arènes« Il est difficile de parler de Vérone sans mentionner cette vastestructure de pierre qui repose en son cœur. Tous les touristes s’yrendent pour écouter un opéra là où, autrefois, les gladiateurss’affrontaient jusqu’à la mort. Les soirs d’été, la musique s’enéchappe et parvient aux oreilles des gens qui boivent un verresur l’esplanade à côté. Il peut s’agir aussi bien d’une sopranocélèbre que d’une rock star comme Bob Dylan ou Joan Baez.Sa large terrasse de pierre est une magnifique oasis oùl’on peut se reposer et méditer, en plein cœur de la ville. »

Choisir son camp au stade Bentegodi« Vérone est une cité réservée, catholique et calme, et le dangerqui la guette est la morosité. Mais ce n’est pas quelque chosequi menace le Bentegodi. Deux équipes y jouent : la ChievoVerona, qui a remporté récemment quelques succès et dont lessupporteurs sont renommés pour leur bonne conduite, et laHellas Verona, plus ancienne et réputée pour l’exact contraire.Cette polarité entre les pieux bourgeois et les classes populairesblasphématoires sous-tend toute discussion à Vérone. J’ai tou-jours été un supporteur de la Hellas, et certains des meilleursmoments de ma vie, des plus sauvages aussi, se sont déroulésdans les travées de la courbe sud. »

Contempler les palazzi au bord de l’Adige« La meilleure distraction que peut offrir Vérone, c’est de faire dubateau sur l’Adige et pagayer à bord d’une petite embarcation parmiles monuments et les palazzi de la vieille ville. Et le lieu qui est à la foisle plus pittoresque et le plus amusant, c’est Ponte Pietra : en aval de cepont romain, bâti dans un affleurement rocheux, il y a un petit rapideavec des vagues et des remous. C’est aussi un endroit parfait pour faireune petite halte et profiter de la fraîcheur du fleuve. »

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Le Véronede Tim Parks.

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Photos Filippo Massellani pour M Le magazine du Monde - 3 mars 2012

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CARNET PRATIQUE1/ Ponte Pietrawww.verona.com/it/guida-verona/ponte-pietra2/ ArènesPiazza Bra, 13/ Stade BentegodiPiazzale Olimpia, 24/ Piazza delle ErbeRestaurant Maffei ,Piazza delle Erbe, 38Tél. : (00-39) 045/801-00-15.5/ Pilotonwww.associazioneduevalli.it

Se sentir chez soi sur la place delle Erbe« Les plus belles constructions de Vérone se situent à l’extérieurde la ville, et la plus magnifique d’entre elles est la piazzadelle Erbe. Elle a exactement la dimension, la profondeuret la longueur qu’il faut pour procurer la sensation de setrouver chez soi et en plein air à la fois. On s’assiéra à unetable pour observer l’activité du marché et admirer les fresquesbachiques qui s’estompent lentement sur les hautes façades(photo ci-dessus), ainsi que les nobles statues au sommetde Palazzo Maffei, le lion vénitien sur sa colonne ou encore,en plein centre, une fontaine du xive siècle soutenant uneélégante statue romaine. »

Saluer l’antique Piloton« D’un pas tranquille ou alerte, je suis passé prèsde cette colonne de pierre blanche bien plus de foisque je ne puis m’en souvenir. Haute de 3 mètres etlarge d’un, elle date de l’Antiquité romaine, époqueà laquelle, semble-t-il, elle était deux fois plusgrande. Mais au Moyen Age, on a ajouté à sonsommet un crucifix de fer, qui fut un jour frappépar la foudre : de manière tout à fait catholique,cette colonne païenne et phallique s’est alors brisée.Située au pied des collines et près de notre maison,juste à la sortie de Vérone, c’est un endroit magiqueoù s’asseoir et se reposer. »

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Boire, c’est mauvais pour la santé, alorsautant que ce soit bon. » Tel est le motd’ordre du trio qui a lancé, il y a cinqans, la mode des bars à cocktails àParis. Avant que Romée de Goriainoff,

Olivier Bon et Pierre-Charles Cros ouvrent l’Expe-rimental Cocktail Club en 2007 (puis le CurioParlor, le Prescription et bientôt le Beef Club), lecocktail était l’apanage quasi exclusif des barsd’hôtels chic de la capitale. Autrement dit, réservéà une élite. « La tendance est à la démocratisation,se réjouissent Thierry Daniel et Eric Fossard, fon-dateurs de l’agence Liquid Liquid et organisateursdu salon professionnel Cocktails Spirits. Même sinous avons plusieurs années de retard sur lesAnglo-Saxons, de plus en plus d’établissementsproposent des cocktails de qualité dans uneambiance décontractée, à des prix abordables… »Finie l’ère du mojito aqueux ou du banal vodka-orange, les cocktails tendance sont désormaisconfectionnés de manière artisanale, par desserveurs dont la créativité et la notoriété sont

Au Candelaria,tous les cock-tails sontfaits maison.

Le Curio Parlorpropose desalcools confec-tionnés de façonartisanale, à desprix abordables.

A L’Entrée desArtistes, certains

cocktails sontvieillis en fûts jusqu’à

douze semaines.

SPiRiTuEux

Les toquésdu shaker.C’est le grand retour du cocktail. Et passeulement dans les bars des palaces.Depuis quelques années, Paris se peuplede lieux où déguster des breuvagesraffinés mixant ingrédients de qualitéet recettes à l’ancienne.

138 - Photos Julie Balagué pour M Le magazine du Monde - 3 mars 2012

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A L’Hôtel, potionsaussi délicatesqu’explosives ensaveurs (photosci-dessous).

comparables à celles des chefs de haute volée.« Avant, Paris manquait cruellement de barmenqui fassent un vrai travail de recherche culinaire »,assure Carina Soto Velasquez, qui a ouvert Can-delaria l’année dernière avec deux associés. Enquelques jours, leur lounge-bar planqué derrièreune taqueria (tacos et vins) mexicaine, façonspeakeasy (bar clandestin) latino, devenait lacoqueluche du tout-Paris noctambule. Ici, tous les« mixeurs » sont faits maison. « On commence àsortir de l’emprise des spiritueux standard, dessirops préfabriqués, de tout ce tas de sucre ! », sefélicite Carlos Madriz, barman de L’Hôtel, dans lequartier de Saint-Germain-des-Prés. Commebeaucoup de ses confrères, Madriz refuse qu’onl’appelle mixologiste, « trop intello et préten-tieux ». Il préfère être barman, « celui qui sait vousgarder près du bar ». Originaire du Venezuela,Madriz concocte des potions aussi délicatesqu’explosives en saveurs, basées sur ses propresinfusions, bitters ou liqueurs, comme le CitrusMist (rhum, verveine, yuzu, amande), ou le PiscoHoneymoon (pisco, ananas confit au miel, fruit dela passion, poivre long d’Indonésie). « Je passesouvent mes journées en cuisine », confie cetautodidacte, qui joue également avec l’huiled’olive, le raifort ou le jus de coquillages.Centrée sur la qualité des produits et les reCettes

anCiennes, la démarche est on ne peut plus « bis-tronomique ». Même si la technique est très pré-sente, on est loin des cocktails moléculairesgélifiés ou fumants d’azote. « Il y a une très fortetendance vintage revival, analyse Eric Fossard.Les barmen explorent leur héritage, l’histoire deces boissons, qui remonte au xixe siècle, l’âge d’ordu cocktail en Amérique. » Parmi les classiquesrétro, le Martinez (l’ancêtre du martini, vers 1860)et le Manhattan (1870), revisités aux goûtscontemporains. Côté décor, on réinvente lesAnnées folles, celles où les Américains fuyaient laProhibition pour venir s’encanailler à Paris. Pen-dant deux mois, il sera ainsi possible de se glisserdans l’imaginaire des années 1920, selon le créa-teur Alexis Mabille, qui a conçu le salon éphémèreCointreau Privé (inscriptions sur www.cointreau-prive.fr). Le mythique restaurant Lapérouse vientégalement de réhabiliter son bar, tout de veloursrouge et boiseries sculptées, et met l’absinthe,alcool longtemps jeté aux oubliettes, à l’honneur.Sans oublier l’ouverture, en avril, du bar façonspeakeasy Art déco L’Etage, au-dessus d’un res-taurant du même nom.Summum de la tendance vintage: le cocktailvieilli. A Londres, la star des bars, Tony Conigliaro(barman du 69 Colebrooke Row), va jusqu’àembouteiller ses concoctions pendantsix mois à cinq ans. « Le processus apporte unegrande complexité et de nouvelles harmonies »,témoigne Thierry Daniel. A Paris, le vieillissementen fûts est pratiqué par quelques établissements,comme l’Entrée des Artistes : le classique VieuxCarré (bitters, vermouth, cognac, rye whisky) estservi avec six à douze semaines de maturation.Inaugurée en septembre dernier, cette petite

« cave à manger » propose des cocktails déto-nants aux côtés d’un menu bistro et d’une cartede vins nature. « Notre idée n’est pas d’associercocktails et nourriture, explique Fabien Lombardi,copropriétaire et bartender. Mais simplement decréer un lieu où l’on a envie de rester, parce quel’on peut boire et manger à sa guise. » PourThierry Daniel et Eric Fossard, l’offre culinaire estle nouveau défi du bar à cocktails. « On ne rem-placera jamais le vin au repas, affirment-ils. Enrevanche, nous croyons beaucoup à l’idée du snac-king, des petites portions qui permettent d’avoirune consommation responsable, de boire moinsmais mieux. » Camille Labro

Carnet d’adressesl’Hôtel, 13, rue des Beaux-Arts, Paris-6e.Candelaria, 52, rue de Saintonge, Paris-3e.l’entrée des artistes, 8, rue de Crussol, Paris-11e.la Conserverie, 37 bis, rue du Sentier, Paris-2e.experimental Cocktail Club, 37, rue Saint-Sauveur, Paris-2e.Curio parlor, 16, rue des Bernardins, Paris-5e.l’etage, 14, rue des Capucines, Paris-1er. Ouverture en avril.prescription Cocktail Club, 23, rue Mazarine, Paris-6e.l’antiquaire, 20, rue Hyppolyte-Flandrin, Lyon-1er.papadoble, 6, rue du Petit-Scel, Montpellier.

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accompagnées d’une vraie sauceNan-tua au beurre d’écrevisse avecquelques queues du même crustacéen garniture.Elles restent mes préférées avec lesouvenir de celles de Gérard Nan-dron,fils de Joannès.Ce chef lyonnaisles préparait jadis sur les quais duRhône sans panade,uniquement avecde la chair de brochet finement ha-chée, montée doucement sur glace àla crème fraîche « comme une mayon-naise » et servies gratinées « saupou-drées de bon gruyère râpé » avec unebéchamel « très crémée ». J’en ai encorel’eau à la bouche. Sinon, vous pouvezen acheter et en manger chez Girau-det, en activité depuis 1910, dans sesmagasins et bars à quenelles aux goûtset aux sauces multiples (autour de 2 €la quenelle). [email protected]

La fermeture définitive du res-taurantAlain Chapel àMion-nay (Ain), aux portes deLyon, peut provoquer des

dommages collatéraux: en apprenantcette bien triste nouvelle, je fus prisd’une soudaine envie de quenelles.J’aurais pu être saisi d’un désir-trans-fert de poularde en vessie ou de tarteaux pralines. Non, c’était la quenelle.La lyonnaise, la vraie, au brochet et àla sauce Nantua. Peut-être parcequ’elle est née dans la Dombes, voi-sine de chez Chapel, dont les étangsregorgeaient jadis de poissons aux-quels il fallait bien faire un sort.Depuis les Romains, quenelle, pa-nade et autre godiveau apparaissentrégulièrement dans l’histoire des cui-sinesmais la lyonnaise serait née dansles années 1830 des mains de Charles

Morateur, pâtissier de la région, quidécida de mettre de la chair de bro-chet dans de la pâte à choux et d’en-fourner. Dans son Dictionnaire uni-versel de cuisine pratique (1890)JosephFavre signale une recette com-posée de 500 gr de brochet, 250 gr de« graisse et moelle de bœuf », 250 gr depâte à choux et « un décilitre de coulisd’écrevisse ». Elle se distingue desautres par la juxtaposition d’éléments« maigre » (le brochet) et « gras » (lagraisse de bœuf ou de rognon).

CETTE SPÉCIFICITÉ RESTERA JUSQU’AU

DÉBUT DU XXe SIÈCLE puisque MathieuVarille dans la Cuisine lyonnaise (1928)affirme que cette version est la seule« vraie quenelle lyonnaise ». Pourtant,dès la fin de la guerre de 1914-1918,JosephMoyne, fils de charcutier dansla Dombes, imagine une recette plusfine et plus digeste, en remplaçant lagraisse de bœuf par du beurre et encuisant plus longtemps la panade.Plus molle, se roulant plus difficile-ment, il doit la mouler à la cuillère etobtient cette forme pointue aux deuxextrémités que nous lui connaissons.Il la vend sous le nom de « quenelle derégime ». C’est à peu de chose prèscelle d’aujourd’hui.La quenelle, c’est d’abord une his-toire de panade:de l’eau ou du lait,dela farine ou de la semoule de blé duret dubeurre, salés,poivrés, chauffés ettravaillés à la spatule dans une casse-role durant cinq à sixminutes.La pré-paration doit ensuite refroidir, reposeret s’assécher. Le lendemain, le bro-chet est haché cru, mixé avec la pa-nade et du beurre en morceaux, puisles œufs sont ajoutés un à un danscette farce travaillée à la main et pas-

sée au tamis.Ne reste plus qu’à mou-ler délicatement à la cuillère pour fa-çonner les quenelles (8-12 cm delongueur pour 80-100 gr), et les po-cher dans l’eau frémissante quinze àtrente minutes selon leur grosseur.Elles sont alors passées brièvementsous l’eau froide, égouttées et serviesnappées de sauce. L’autre façonconsiste à les retirer de l’eau dèsqu’elles remontent à la surface et à lespasser au four avec la sauce choisieune vingtaine de minutes.Dans son livre (Les Secrets de la mèreBrazier, Ed. Solar), la mère Brazier re-marque avec son bon sens habituelque « la farce à quenelles est presque ma-tériellement impossible à réaliser dans unménage qui ne dispose pas des machinesnécessaires » et que « le plus simple est deles acheter, truffées ou non, dans une très

bonne maison spécialisée ». On ne peutque lui donner raison, le plus simpleétant d’aller les déguster au restau-rant. Aux Lyonnais, un des bistrotsparisiens d’Alain Ducasse, FrédéricThévenet en propose d’excellentes àbase de sandre (24 €). Deux pièces,brûlantes dans leur ravier en fonteémaillée,moelleuses,bien gonflées et

JP GénéDésir de quenelles.

La quenelle, c’est d’abord une histoirede panade: de l’eau ou du lait, de lafarine ou de la semoule de blé dur etdu beurre, salés, poivrés, chauffés ettravaillés à la spatule dans une casseroledurant cinq à six minutes.

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Le carnet d’adressesAUX LYONNAIS32, rue Saint-Marc, Paris-2e.Tél. : 01-42-96-65-04.Fermé samedi midi, dimanche etlundi. Menu 30 € déjeuner. Comp-ter 50 € à la carte sans les vins.

BARS À SOUPES ET QUENELLESGIRAUDET, À PARIS5, rue Princesse, Paris-6e.Tél. : 01-43-25-44-44.16, rue Mabillon, Paris-6e.Tél. : 01-43-25-53-00.6, rue du Pas-de-la-Mule, Paris-3e.Tél. : 01-42-78-71-62.www.giraudet.fr

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Le style.

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Le restoTable lumineuse.Esther et François Morabito ont une idée pré-cise de leur métier de restaurateur. Ils veulentune cuisine saine, naturelle et gourmande, quirespecte les saisons et privilégie la productionlocale. Plus facile à dire qu’à faire! Mais recon-naissons qu’ils y sont parvenus dans ce lieulumineux beige et orange, au comptoir ouvertet à table d’hôte. Au déjeuner, formules à29 € (entrée, plat, dessert) ou 23 € (2 plats),le menu de saison étant à 36 € et la cartecourte (4 entrées, 4 plats, 4 desserts). Vapeurd’huîtres creuses aux perles végétales(14,50 €), cordon bleu de féra du lac Léman,navets jaunes écrasés à la fourchette, can-coillotte filante (27 €), citron de Mentonà la coque, mouillette feuilletée (9 €), avecun riesling Kantzlerberg de Sylvie Spielmann(29,50 € les 50 cl). Une cuisine sagementsurprenante et une adresse en plein centre,le genre de table qui crée des fidélités. JPGL’Atelier du goût, 17, rue des Tonneliers, Strasbourg (Bas-Rhin).Tél. : 03-88-21-01-01. www.atelier-du-gout.fr

rendez-vous

Fêtes bacchantesen Bordelais.Cet événement a lieu dansquelques mois mais est à noterd’ores et déjà dans les agendas : lanouvelle édition de Bordeaux fêtele vin se déroulera du jeudi 28 juinau dimanche 1er juillet. Cette bien-nale grand public se déroule aubord de la Garonne, sur deux kilo-mètres, au cœur du patrimoinemondial de l’unesco. des pavillonsde dégustation permettront dedécouvrir 80 appellations de Bor-deaux et d’Aquitaine, de 11 heuresà minuit. Lors de l’édition 2010, pasmoins de 500000 amateurss’y étaient donné rendez-vous… L.G.www.bordeaux-fete-le-vin.com

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Pages réalisées par Béline Dolat avec Lily Barbery-Coulon, Marc Beaugé, Vicky Chahine, Julia Dubreuil, Laure Gasparotto, J.-P. Géné,Marie Godfrain, Emilie Grangeray, Fiona Khalifa (stylisme), Camille Labro, Catherine Maliszewski, Antoine Marcolli, Vahram Muratyan,Jean-Michel Normand, Maud Noyon et Delphine Paillard.

Côtes du JuraPoulsard 2011de G. et Ch. WiCky

l’originalArômesexpressifs ettendres quirappellent desnotes de gro-seille. un vinnet et pur, trèsaxé sur le côtéfruité, peualcoolisé. unrégal harmo-nieux, horsdes sentiersbattus.Tél.: 03- 84-25-10-96.6,50 €.

uva arbosiana 2011du domainede la tournelle

le francun vin qu’onapprécie poursa franchise.ses arômesprofonds sontceux d’unmonde quin’appartientqu’au Jura. Latexture estsouple et lafinale sur desnotes de noix.Tél.: 03-84-66-25-76.7, 50 €.

Côtes du JuraGrains de Poulsard2009 de b. badoz

le respectueuxune visionjeune etmoderne dupoulsard, maisqui le respectenéanmoins.on retrouveles arômesd’épicesdouces(safran) carac-téristiques.un vin soigné,minéral etdroit.Tél.: 03-84-37-11-85.6, 70 €.

arbois PuPillinCôte de Feule 2009d’huGhes béGuet

le savantIl joue la cartede la séduc-tion avec sesnotes fuméesdues à l’éle-vage. Maisce vin savantva plus loinque son appa-rence. Ildevientcomplexe,avec des notesanimales etépicées. Beau-coup de plaisir.Tél.: 03-84-66-26-39.13 €.

bancd’essaiPoulsard du Jura.hors des sentiers battus,le poulsard, ce cépage duJura qui donne des vinsvermeils, s’adresse àceux dont le palais neconnaît pas d’a priori.Peu alcoolisés, voici desvins fruités, désaltérantscomme autrefois ! adécouvrir avec une sau-cisse de morteau,mais aussi avec un foiegras poêlé, ou toute bellepièce de viande rouge.Laure Gasparotto

Poulsard 2010 dudomaine de l’aiGleà deux têtes

le désaltérantun vin d’autre-fois : désalté-rant ! sonoriginalité tientaussi à safaible teneuren alcool(10°) : pas dechaptalisation.Étonnantesnotesd’agrumes etd’épices, touten harmonie etfinesse.Tél.: 06-08-09-81-68.13,50 €.

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Exposition. BoB Dylan

Aux sourcesde la légende

Bob Dylan est une des figures légendaires de la culture populaire, au point que seschansons sont désormais utilisées jusque dans des publicités pour voiture. Entre 1961et 1966, ce garçon à la voix nasillarde a inventé une nouvelle façon de raconter lemonde, à coup de poésie énigmatique, de propos contestataires et de rock lyrique.pas moins de sept albums témoignent de ce foisonnement créatif. En se penchant surcette période, la Cité de la musique à paris explore un des grands mythes de notreépoque. on pourra découvrir dans l’exposition qu’elle lui consacre les photos deDaniel Kramer qui, de 1963 à 1966, a accompagné Dylan dans ses métamorphoses.Et suivre les premiers pas du compositeur de Like A Rolling Stone à paris, aux côtésd’Hugues Auffray, Françoise Hardy ou Johnny Hallyday… Des concerts, des confé-rences et des projections de films complètent cette exposition. Y. P.« BoB dylan, l’explosion rock 61-66 », à la cité de la Musique, 221, avenue Jean-Jaurès, paris-19e. tél. : 01-44-84-44-84. du Mardiau saMedi de 12 heures à 18 heures, nocturne le vendredi Jusqu’à 22 heures, diManche de 10 heures à 18 heures du 6 Mars au15 Juillet. entrée : de 5 à 8 €. prograMMe des concerts sur www.citedelaMusique.fr d

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Polar. « La beLLe vie »

L’enfer du décorinitialement publié en 2002, High Life, traduit en françaispar La Belle Vie, de Matthew Stokoe est sans doutele roman le plus cru écrit sur Hollywood. Dans sapréface, l’écrivain Dennis Cooper, dont les livres n’ontpas froid aux yeux non plus, le compare à Fight Clubde Palahniuk et à American Psycho d’ellis. autant direque la violence, la perversion et la noirceur absolue sontau rendez-vous de cette plongée terrifiante dans la facecachée du rêve hollywoodien. il faut s’accrocher pour lireles aventures de Jack, qui rêve de côtoyer les stars, maisvit dans un studio de troisième zone à venice. Pour s’ensortir, il ne va pas hésiter à passer au-delà des limites,tutoyant les dingueries les plus ultimes. il y arrivera àcette belle vie chérie, mais le prix à payer sera élevé.On sort de ce livre sonné et atterré devant une telledescente aux enfers. Y. P.La beLLe vie, de Matthew Stokoe, traduit de l’anglaiS (ÉtatS-uniS) par antoineChainaS, SÉrie noire, 449 p., 23,50 €.

Cinéma. « OSLO, 31 aOût »

Oslo en soloVoilà un de ces films rares quihante longtemps le specta-teur…Oslo, 31 août, deuxièmelong-métrage de JoachimTrier, raconte les dernièresvingt-quatre heures d’un tren-tenaire qui, après une cure dedésintoxication, tente deretrouver du boulot et derenouer avec ses anciens amisdans un Oslo à la fois désertet lumineux. Libre adaptationdu roman de DrieuLa Rochelle Le Feu follet, déjàporté au cinéma en 1963 parLouis Malle, avec MauriceRonet, ce film bouleversantdécrit avec intelligence etsubtilité la quête de rédemp-tion d’un garçon qui n’arriveplus à ressentir les plaisirs dela vie. Admirablement inter-prété par Anders DanielsenLie, aujourd’hui médecin, on levoit par exemple écouter, seul,dans un restaurant baignéde lumière, les conversationsdes autres tables où tournoiela banalité du quotidien.Oslo, 31 août est une bellemétaphore sur le libre arbitreet la solitude. Y. P.OsLO, 31 aOût, filM norvÉgien de JoaChiM trier. aveC anderSdanielSen lie, hanS olav Brenner, ingrid olava (1 h 36).

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Exposition. Picasso-Duncan

L’artisteet son miroirDavid Douglas Duncan est un aventurier comme le xxe siècle ena connu quelques-uns. Après avoir participé à la guerre du paci-fique, ce natif de Kansas City (Missouri) revient à l’activité qu’ilavait commencé à pratiquer dès son adolescence, la photo. ilsaisit les visages des célébrités. puis, en 1950 et 1951, témoignedes abominations de la guerre de Corée, ce qui fait de lui l’undes photoreporters les plus connus du moment, juste derrièreson ami Robert Capa. Lequel lui conseille un jour d’aller rendrevisite à picasso à Cannes. Conseil suivi en 1956: Duncan arrive àl’improviste, convainc Jacqueline de le laisser entrer etdécouvre picasso dans sa baignoire. s’en suivent une amitiésingulière et cinq années pendant lesquelles Duncan est dansles ateliers de picasso comme chez lui, prenant toutes lesimages qu’il veut, observant l’artiste au travail, mais aussi jouantavec ses enfants ou recevant Cocteau. La liberté dont il jouit estproportionnelle à la confiance que lui accorde picasso: totale.Ces images ont été publiées dès la fin des années 1950 dansdes livres qui ont assuré la célébrité de Duncan et grandementcontribué à répandre la figure d’un picasso vieillard blagueuret infatigable. Elles sont aujourd’hui exposées en compagnied’œuvres du maître, beaucoup de céramiques et de quelquestoiles datant de ces années. C’est un moment de grand plaisir.Et une leçon pour les artistes d’aujourd’hui sur la meilleuremanière de construire son image publique. Ph. D.« PicASSo à l’œuvre DAnS l’objectiF De DAviD DouGlAS DuncAn », lA PiScine - MuSée D’Art etD’inDuStrie AnDré-DiliGent, 23, rue De l’eSPérAnce, roubAix (norD). tél. : 03-20-69-23-60. DuMArDi Au jeuDi De 11 heureS à 18 heureS, venDreDi De 11 heureS à 20 heureS, SAMeDi et DiMAncheDe 13 heureS à 18 heureS. De 4,50 € à 7 €. juSqu’Au 20 MAi.

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Picasso a accueilliDuncan (à sescôtés ci-contre)dans sa villala californie àcannes à la fin desannées 1950, alorsqu’il travaillaità des œuvrescomme Naturemorte aux troispoissons ouLes Baigneurssur la plage de LaGaroupe (en haut).le photographe asaisi des momentsde grâce del’artiste en liberté.ci-dessus : Picassodansant ; ci-contreà droite : Kahnwei-ler, Picasso etClaude déguisésen clown ;en dessous : Auto-portrait en hibou.

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CD. « I thought I was an alIen »

Echos de la planète SokoFarouche ou caractérielle? Indomptée ou capricieuse? Fragileou complaisante? le cœur balance à l’écoute de soko, chanteuseau tempérament d’actrice (et inversement) dont le folk frêle faitl’éloge du vagabondage et de l’instabilité émotive. Révélée, il y aquatre ans, par les réseaux sociaux, la Bordelaise d’origine polo-naise avait conquis une multitude internationale de fans en fredon-nant au ukulélé des comptines trash – I’ll Kill Her, I Think I’mPregnant –, qu’elle a depuis reniées. sans arrêt repoussé pourcause de tournages, d’inspiration pléthorique ou contrariée, sonpremier album, I Thought I Was an Alien (« Je pensais être uneextraterrestre »), expose une stéphanie sokolinski plus à l’aise sur saplanète que dans la vraie vie. son goût du bricolage égocentriquepeut agacer, mais engendrer aussi une grâce à vif, une délicatesseenfantine, en petite sœur de Cat Power et Jeffrey lewis. S. D.I ThoughT I Was an alIen de Soko, 1 Cd BeCauSe/Warner.Soko en ConCert au Café de la danSe, 5, paSSage louiS-philippe, pariS-11e. tél. : 01-47-00-57-59.le 5 marS à 19h30. de 16,80 à 19,30 €. à la Coopérative de mai, à Clermont-ferrand, le 6 marS ;au roCk SChool BarBey, à Bordeaux, le 7 ; au Connexion Café, à toulouSe, le 8 ; au marChégare, à lyon, le 13 ; à l’aéronef, à lille, le 14 ; à la laiterie, à StraSBourg, le 15.

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5.Exposition. lIvIa vaJda

NocesbarbaresLivia Vajda était d’ori-gine hongroise. Etpeintre. Elle vivait à Parisaprès avoir été déportéeà Auschwitz puis à Birke-nau. Mais de ça, elle neparlait pas. Elle est morteprès du canal de l’Ourcq,le 18 janvier 2011, renver-sée par un camion. Elleallait avoir 90 ans. Sespeintures chatoyantes(ci-contre : Le Bordel)ressemblent à des fêtesgalantes, où de jeunesmariés perdus au milieud’une étrange perspec-tive semblent sourire àdes fantômes. MoniqueGehler, sa fille, anciennejournaliste et égalementpeintre, revient dans unlivre sur les mystèresd’une femme qui nevoulait exister que parsa peinture. Elle expliqueses propres difficultés àgrandir sans jamais vrai-ment connaître l’histoirede sa famille. Y. P.expoSition livia vajda, à la mairie du 19e arrondiSSement,plaCe armand-Carrel, pariS-19e, du lundi au vendredi de8h30 à 17h30, noCturne jeudi juSqu’à 19h30. juSqu’au14 marS. liviavajda.Comun 27 janvIer, de monique gehler, éditionS du mauConduit,192 p., 16 €.

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7. Danse. « Solaire »

La lumièreen partenaireUn coup de chaud pour appeler le prin-temps, un coup de pinceau pour illuminerla soirée, le spectacle bien nomméSolaire, chorégraphié par Fabrice Lam-bert, annonce la couleur. Féru de spec-tacles proches d’installations plastiquesdans lesquelles la lumière devientmatière, au même rang que les corps desdanseurs ou la scénographie, FabriceLambert s’appuie pour cette pièce surl’éclairagiste Philippe Gladieux. Ensemble,ils ont mis au point une partition pourcinq danseurs dont le partenairecommun est la lumière. De quoi relancerle débat du geste et de la danse en luioffrant des enjeux lumineux, graphiques,immatériels et pourtant rudementprésents. R. BuSolaire, de Fabrice Lambert, au théâtre des abbesses, 31, rue des abbesses, Paris-18e.téL. : 01-42-74-22-77. du 5 au 10 mars à 20 h 30. entrée : de 14 à 25 €.

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Photo. Berenice ABBott

L’ode à New York« La photographie doit marcher seule », assénait l’AméricaineBerenice Abbott (1898-1991), qui voulait débarrasser son art desinfluences de la peinture. Le musée du Jeu de paume à Parisoffre une rétrospective à cette grande classique de la photo-graphie – on sait le rôle majeur qu’elle a eu pour promouvoirEugène Atget, photographe du vieux Paris, qu’elle a immortalisédans un portrait saisissant juste avant sa mort. Mais c’est surtoutson portrait de la ville de New York, Changing New York (1935),qui sera son grand œuvre: la photographe montre le vieux et leneuf qui se télescopent, avec des plans larges qui disent l’im-mensité de la ville avec ses humains minuscules. Dans l’exposi-tion, on découvre que Berenice Abbott a aussi parcouru lesEtats-Unis, qu’elle s’est plongée dans la photo de science, avecl’idée que la photo pouvait conjuguer le document et l’art. Cl. G.« Berenice ABBott (1898-1991), PhotogrAPhies », Au Musée du Jeu de PAuMe, 1, PlAcede lA concorde, PAris-8e. tél. : 01-47-03-12-50. Jusqu’Au 24 Avril. MArdi de 11 heures à 21 heures.du Mercredi Au diMAnche de 11 heures à 19 heures. entrée : 5,50 à 8,50 €. Jusqu’Au 29 Avril.

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8.

théâtrE. « Les trois sœurs »

Tchekhov? Da ! Da !A Moscou! A Moscou! A Moscou! Qu’il est déchirant,l’espoir brisé des trois sœurs, olga, Macha et irina, etqu’ils sont chers à nos cœurs, leurs rêves en fuite, leursvies mort-nées dans un fond de province russe. Heureuxceux qui pourront voir à Lyon la pièce de tchekhov vuepar le grand metteur en scène de saint-Pétersbourg LevDodine, un maître incontesté qui a déjà présenté enFrance Platonov et Oncle Vania avec ses acteurs excep-tionnels, qui donnent au mot humanité toute sa profon-deur, lavée de tous les clichés. La vie et rien d’autre,comme elle s’incarne rarement au théâtre. F. Da.Les Trois sœurs, d’Anton tchekhov. Mise en scène : lev dodine. théâtredes célestins, 4, rue chArles-dullin, lyon. tél. : 04-72-77-40-00. du 7 Au 10 MArsà 20 heures. durée : 3h 15. de 15 à 34 €. www.celestins-lyon.org

9.

la Bourse, le Flatiron Building, laville de nuit… dansles années 1930,Abbott a contribuéà forger l’image denew york.

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La culture.

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Pages réalisées par Yann Plougastel, avec Rosita Boisseau, Philippe Dagen,Fabienne Darge, Stéphane Davet, Claire Guillot et Frédéric Potet.

10.BD. « Une vie dans les marges »

Confessionsd’un mangakaQue l’on ait vu ou pas le film d’EricKhoo qui en a été tiré (Tatsumi), ilfaut absolument lire Une vie dans lesmarges, le récit autobiographique deYoshihiro Tatsumi. Né à Osaka en1935, ce dernier est un des grandsmaîtres du manga destiné à unpublic adulte. De l’immédiat après-guerre jusqu’au début des années1960, l’auteur décrit la mutation duJapon en retraçant sa carrière dedessinateur dont le tournant restesa rencontre avec Osamu Tezuka,le « Dieu du manga ». Limpide ettouchante, cette somme néoréalisteen deux tomes – Tatsumi travailleactuellement sur le troisième –a reçu le prix Regards sur le mondeau dernier Festival d’Angoulême. F. P.Une vie dans les marges, dE YOShIhIRO TaTSUmI. TOmE 1 (453 p.) ET TOmE 2 (432 p.). édITIONSCORNéLIUS, 33 € ChaCUN.

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0123HORS-SÉRIE

GUERRED’ALGERIEMEMOIRESPARALLELES

Cinquante ans après les accordsd’Evian et le cessez-le-feu,la guerre d’Algérie reste une plaieouverte. La réconciliationentre les deux pays paraît encorelointaine, tant le cloisonnementdes mémoires et le ressentimentrestent forts.

Le Monde vous invite à découvrirla réalité de cette guerre au traversdes travaux des historiens,des témoignages des protagonistesdes deux pays, des portfolioset des documents inédits.

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24 heures dans la vied’une femme. Les coordonnées.CHANEL01-44-50-66-00FALKE01-40-13-80-97CéLINE01-56-89-07-91ALAIA01-42-72-30-69MAJE01-42-36-26-36CADOLLE01-42-60-94-94LIU JO01-58-62-41-02SANDRO01-40-39-90-21KILIwAtCH01-42-21-17-37GUCCI01-56-68-80-80CHLOé01-47-23-00-08wEEK END BY MAX MARA01-47-20-61-13MOSCHINO01-42-68-34-48HERMèS01-40-17-47-17REPEttOwww.repetto.frERES01-55-90-52-90VALENtINO01-53-43-16-16BURBERRY01-40-07-77-77PRADA01-53-23-99-40ROBERt CLERGERIEwww.robertclergerie.comBLK DNMwww.us.blkdnm.com chez colette 01-55-35-33-90ANDRES SARDA01-49-26-06-05EMPORIO ARMANI01-53-63-33-50BALENCIAGA01-56-52-17-32.RALPH LAUREN COLLECtION01-44-77-53-50DOLCE & GABBANA01-42-25-68-78CHRIStIAN DIOR01-40-73-73-73GéRARD DAREL01-45-48-50-85FIFI CHACHNIL01-42-61-21-83HILFIGER DENIM01-45-61-54-54LOUIS VUIttON09-77-40-40-77LEVIS01-45-08-40-32

Page 151: Le magazine du monde du 3-3-2012

Sur iPad, découvrezune vidéo exclusive.

V endredi 10 févr ie r,14 heures, place de laConcorde, au pied dela grande roue, un dra-

peau corsaire en signe de ralliement,planté devant un autocar affrété parInvader dans lequel une cinquan-taine de journalistes sont invités àmonter pour une excursion pari-sienne,un « Space InvaderTour », enprésence d’Invader en personne.Deux heures de safari urbain à la re-cherche de ses œuvres, ses « spaceinvaders » (petites mosaïques colléesaux coins des rues). Intéressant? Je nesais pas. Ma femme en est folle, elleles guette, se réjouit d’en repérer denouvelles à chacune de nos prome-nades dans Paris. Elle n’a pourtantjamais joué à ces jeux vidéo qui fai-

saient fureur dans les années 1980.Alors quoi, qu’est-ce qui l’excite là-dedans? Je voulais savoir.

LE CAR EST PLEIN, ONATTEND, AU CHAUD,

et il arrive enfin, avec son masque etson bonnet de ski, car Invader ne peutpas montrer son visage. A-t-il vrai-ment peur d’être arrêté par la police?Sérieusement, non. Il n’y aurait pasbeaucoup d’efforts à faire pour savoirqui se cache derrière cemasque et cesinstallations urbaines.Quand lamaré-chaussée le surprend, la nuit, en trainde coller ses mosaïques, les gensd’armes lui demandent simplementde descendre de son échelle, de rem-baller son matériel, et très polimentlui disent : « A la prochaine ,M. Invader. »

Car Invader n’est pas un vandale ordi-naire, un tagueur de portes cochères,un bombeur de banquettes de métro,c’est un artiste et, encore plus chicque ça: un street artist. Depuis plus dedix ans qu’il pratique nuitamment cetart de coller des mosaïques dans larue, il s’est fait des potes dans la po-lice,« de véritables fans qui adorent ce queje fais ».Donc, lemasque, c’est pour lefolklore, le fun, la presse.

Quand le car démarre et prend la rueRoyale, Invader s’est déjà emparéd’un micro, et tout en nous parlant deson travail, de l’impact qu’il a déjàsur la foule, ses fans à travers lemonde,sur le Net surtout, et déjà un peu surle marché de l’art, il nous montre, àdroite, à gauche, ses réalisations accro-chées ici et là. L’une des toutespremières fut exécutée au-dessus dumagasin Colette, on sent l’émotionque ça lui procure,douze ans plus tard.Un peu plus loin, place Colette (pas lamême), en passant devant l’œuvremétropolitaine de Jean-Michel Otho-niel, Invader nous rappelle combienles nouveautés ont toujours été malaccueillies dans l’histoire de l’art. Sanscomplexe, il évoque les difficultés desimpressionnistes, les railleries qu’ontdû subir les cubistes, eh bien, les dé-boires du street art s’inscrivent danscette lignée victimaire!En effet, que seraient ces grandesaventures stylistiques sans les indi-gnations qu’elles ont suscitées? Desimpasses parmi d’autres, au fond des-quelles leur beauté singulière se seraitendormie. Depuis longtemps, la vin-dicte des bourgeois indignés aiguise lasusceptibilité des artistes, encourageles collectionneurs, les haines éclai-rent, révèlent et désignent lesœuvresaux historiens, la censure rend ungrand service au marché de l’art quitrouve là le meilleur outil pour sonéchelle de valeurs.Depuis les temps les plus anciens,l’esprit de provocation est actif chezles peintres et les écrivains, mais ils’est considérablement développé aucours du xixe siècle, jusqu’à constituerau début du siècle dernier une véri-table propédeutique de l’art, suscitant

la vocation d’artistes de plus en plusjeunes,et dont on a cru pouvoirmesu-rer le génie à leur capacité de révolte,à leur aptitude au scandale.La transgression s’imposant dans lagrammaire contemporaine, les étu-diants sont sortis des universités, lesartistes des galeries, et tous se sontretrouvés dans la rue,à la recherchedenouveaux champs d’intolérance.Qua-rante ans après les pionniers deMai 68, Invader réussit son invasiondes villes, il est rentable et produit desalias vendus en galeries et acquis parles musées internationaux. Il est entrain de conquérir les médias, ported’entrée de la conscience collectivedes masses globalisées. De l’art d’en-vahir les cerveaux, et celui de mafemme. L’invasion en tant que stylepropre,un courant du street artqui em-porterait tout et auquel personne nesonge encore à résister.

Christophe DonnerL’envahisseurcontemporain.

A lireINVASION DE PARIS 2.0/PROLIFÉRATION, d’Invader.Edition bilingue franco-anglaise, Ed. Franck Slama, 25 €.A paraître en mars.

Produits dérivésinvader sur www.space-invaders.com

Invader est rentable, il produit des aliasvendus en galerie et acquis par les muséesinternationaux. Il est en train de conquérirles médias, porte d’entrée de la consciencecollective des masses globalisées.

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- 1513 mars 2012

La culture.

Page 152: Le magazine du monde du 3-3-2012

Compléter toutela grille avec deschiffres allant de 1à 9. Chacun ne doitêtre utilisé qu’uneseule fois par ligne,par colonne et parcarré de neuf cases.

SudokuYan Georget http://yangeorget.blogspot.com/2009/12/sudokus.html

N°24 - difficile

Horizontalement 1 Leurs coups tournent à la bagarre. Son coup ne peut pas faire de mal.2 La dame du parc.Gagnée d’un trait.3Dame rangée. Sympathiques s’ils ne deviennent pascollants.4Déposé pour protéger.Romain très familier.Assure la liaison.5Sortie du lot.Montésprovisoirement. Enfant d’Harmonie. 6 Dans un suaire. Souverain. Arrivées chez nous. 7 Amis la pâtée à Pélée.Démonstratif.8 Préparer l’avenir. Rend des comptes à B.Obama.Formede pouvoir. Interjection. 9 Suivis de près. Partenaire social. Mis en bière quand il est faux.Panier plat. 10 S’accroche par le haut. Présentent bien. 11 Firent descendre bien bas. De 5 à7 avec Varda. 12Tout va plus mal quand elle gagne du terrain. Paresseux. Pour un petit bain.13 Tenues gauloises. Ses fleurs blanches embaument au jardin. 14 En vaut un autre dansl’échange. Risque de tout faire exploser.15 Sa place est à l’office. Laissés sur place.

Verticalement 1Leurs coups se font entendre.Son coup rend bizarre.2 Impose la fermeture.Bien construits. 3Touffue. Ferait perdre un temps précieux. 4 Peuvent faire de beaux bou-quets. Pour les amateurs d’images grand format.5Attire l’attention. Frétille en Méditerranée.Ramassée sur le tapis. 6 Participe au maintien de la dune.Aux bouts de l’arsenal. Napoléonset autres marmottes. 7 Sans la moindre bavure. Devenu électronique pour ne pas perdre devue. Quatorzième chez les Grecs.8 Précepte sanskrit. Conjonction. Pas constant.9A présentà l’esprit. Vieille caisse. Enzyme. 10 Assure une bonne gelée. Stocké en barres. Dada de lapremière heure. 11 Dame aux grandes oreilles. Rien ne devrait les déranger. 12 Couche enl’air. Protège le chevalier. Lettres de Toulouse. Paquet de lustres.13 Donné pour être suivi.Ouverture sur les côtes nippones. En Asie du Sud-Est. 14 Suisse sur Aar. Fait ses coups endouce.15Condamnés à Ephèse. Risquent de blesser l’animal.

Solution de la grille n° 23Horizontalement 1Arrosoir. Sapins. 2 Poupardes. Lucie. 3 Eutocie.Acier. 4 Responsables. Ma. 5 Ce.Ac.Main. Mat. 6Anhéla. Varon. 7Anaérobie. Grip. 8 Lynx. Sbires. Bar. 9 Eau.Té. Li. Aalto. 10 Otite. Cistude.11 Potentat. Etoupe.12Alertement.As.13Rl. Cari. Oursins.14Dame. Robustesse.15 Shetlands.Trous.Verticalement 1Aperçu.Léopards.2Rouée.Ayatollah.3Ruts.Annuité.Me.4Opopanax.Tercet.5 Sacoche.Tenta. 6 Orin. Erse.Terra. 7 Ides. Lob. Camion. 8 Rê.Amabilité. BD. 9 Saba. Iris. Nous. 10 Clivée.Têtus.11Aliéna.Saut.RTT.12Pues.Rg.Adosser.13 Icr (cri).Morbleu.Iso.14Ni.Maniât.Pansu.15Sénat.Prouesses.

Mots croisésPhilippe Dupuis

Grille N°24

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

12

13

14

15

Solutionde la grille précédente

152 - 3 mars 2012

Les jeux.

Page 153: Le magazine du monde du 3-3-2012

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Page 154: Le magazine du monde du 3-3-2012

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Le passeportde Maria LuisaPoumaillou.

Cette dénicheuse de talents arpente les FashionWeeks de la planète depuis vingt-cinq ans. Elley sélectionne des créateurs qu’elle présente dansson espace du Printemps Haussmann, à Paris, ungrand magasin pour lequel elle officie aussi entant que consultante mode pour les achats deprêt-à-porter et d’accessoires. Paradoxal pourune femme qui affirme ne jamais s’attacheraux objets. La seule exception: son passeport.

”“ Je ne sors jamais sans lunettes, sans

maquillage, sans boucles d’oreilles.Je les égare tout le temps et j’en

rachète. Du coup, je ne porte plus rien de valeuret mon mari a renoncé à m’offrir des bijoux.J’ai même perdu le solitaire de sa mère ! Le seulobjet qui me soit vraiment essentiel, c’est monpasseport. Le jour où il y a eu le feu chez moi, jeme suis demandé dans la précipitation : qu’est-ceque j’emporte? Et c’est mon passeport que j’aimis dans ma poche avant de partir. Sans douteparce que je suis une exilée dans l’âme. Monpère était un homme politique et j’ai quitté le

Venezuela dans l’urgence, suite à l’une de cesrévolutions que l’Amérique latine a tant connues.J’avais 7 ans et je me souviens d’avoir pris l’avionen chemise de nuit. Je laissais derrière moi tousles cadeaux reçus, la veille, pour mon anniver-saire. Depuis, j’ai toujours été extrêmement peuattachée aux choses. Le passeport est le seulobjet à m’avoir manqué quand je l’ai perdu. C’étaiten 2011. Quelques années plus tôt, mariée depuistrente ans à un Français et habitant Paris, j’avaisdécidé de troquer ma carte de résidente véné-zuélienne pour la nationalité française. Je suisensuite tombée gravement malade et j’ai laisséles démarches en plan. Résultat : l’an dernier,quand j’ai perdu mon passeport vénézuélien,je me suis retrouvée sans papiers. D’un côté,l’ambassade du Venezuela me considérait commefrançaise ; de l’autre, l’administration françaiseavait un dossier incomplet. J’ai dû attendredes mois pour obtenir un passeport français.Et je n’ai pas pu assister aux FashionWeeks de Londres ni de New York.»Propos recueillis par Catherine Maliszewski

154 -

Le totem.

3 mars 2012

Page 155: Le magazine du monde du 3-3-2012

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Page 156: Le magazine du monde du 3-3-2012

Un seul voyage peut changer le cours d’une vie.Cambodge, mai 2011.

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