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MEMBRES DU GROUPE DE TRAVAIL SUR LASSURANCE-CHÔMAGE (AC) Daniel Barron Denis Latulippe Stella Ann Ménard Jim Murta Michel Rochette Jean Sasseville, président KERRY WORGAN T ABLE DES MATIÈRES 1.INTRODUCTION1 2.RÉSUMÉ1 3.HISTORIQUE4 4.SITUATION ACTUELLE6 5.ASSURANCE SOCIALE OU BIEN-ÊTRE SOCIAL8 6.COMPARAISON INTERNATIONALE12 7.RECOMMANDATIONS – COUVERTURE13 8.RECOMMANDATIONS – CONCEPTION DU PROGRAMME15 9.RECOMMANDATIONS – FINANCEMENT21 10.RÉAMÉNAGEMENT COMPLET23 11.CONCLUSIONS23 12.RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUX SUR L ’INSTITUT CANADIEN DES ACTUAIRES (ICA)23 BIBLIOGRAPHIE24 ANNEXE A – RÉGIMES PRIVÉS DASSURANCE-CHÔMAGE25 ANNEXE B – T ARIFICATION SELON LA STATISTIQUE27 ANNEXE C – COMPARAISON INTERNATIONALE31 ANNEXE D – REVUE HISTORIQUE DE LA FORMATION33 ANNEXE E – FIDUCIE ENREGISTRÉE DÉPARGNE-CHÔMAGE (FEÉC)37 ANNEXE F – MEMBRES DU GROUPE DE TRAVAIL SUR L ASSURANCE-CHÔMAGE (AC)39

Assurance-chômage au Canada: propositions de réforme

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Un rapport de recherche concernant des propositions de réforme au programme d'assurance-chômage au Canada. Le rapport date de quelques années mais les concepts sont toujours d'actualité.

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MEMBRES DU GROUPE DE TRAVAIL SUR L’ASSURANCE-CHÔMAGE (AC)Daniel Barron

Denis LatulippeStella Ann Ménard

Jim MurtaMichel Rochette

Jean Sasseville, présidentKERRY WORGAN

TABLE DES MATIÈRES

1.INTRODUCTION12.RÉSUMÉ13.HISTORIQUE44.SITUATION ACTUELLE65.ASSURANCE SOCIALE OU BIEN-ÊTRE SOCIAL86.COMPARAISON INTERNATIONALE127.RECOMMANDATIONS – COUVERTURE138.RECOMMANDATIONS – CONCEPTION DU PROGRAMME159.RECOMMANDATIONS – FINANCEMENT2110.RÉAMÉNAGEMENT COMPLET2311.CONCLUSIONS2312.RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUX SUR L’INSTITUT CANADIEN DES ACTUAIRES (ICA)23BIBLIOGRAPHIE24ANNEXE A – RÉGIMES PRIVÉS D’ASSURANCE-CHÔMAGE25ANNEXE B – TARIFICATION SELON LA STATISTIQUE27ANNEXE C – COMPARAISON INTERNATIONALE31ANNEXE D – REVUE HISTORIQUE DE LA FORMATION33ANNEXE E – FIDUCIE ENREGISTRÉE D’ÉPARGNE-CHÔMAGE (FEÉC)37ANNEXE F – MEMBRES DU GROUPE DE TRAVAIL SUR L’ASSURANCE-CHÔMAGE (AC)39

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RAPPORT DU GROUPE DE TRAVAIL SUR L’ASSURANCE-CHÔMAGE

1.INTRODUCTION

L’Institut Canadien des Actuaires (ICA) a mis sur pied un groupe de travail pour examiner le programme d’assurance-chômage (AC) et recommander des modifications pour en accroître l’efficacité. Ce rapport présente surtout les domaines où les actuaires ont jugé qu’ils pourraient contribuer le plus. La portée du rapport se limite au programme d’AC et n’examine pas d’autres aspects de la sécurité sociale comme le programme d’assistance publique. Il existe un grand nombre d’autres solutions de rechange valables aux recommandations précises présentées dans le rapport. Ainsi, il y aurait lieu de voir ces recommandations comme des suggestions et des exemples d’orientation possible du programme d’AC.

2.RÉSUMÉ

La première Loi sur l’AC a vu le jour en 1940, à la suite de la Grande dépression des années 30. Elle avait pour but initial de fournir une aide financière aux travailleurs des secteurs industriels et commerciaux en période de chômage temporaire. Entre 1940 et 1970, les concepts de base sont demeurés inchangés, sauf pour l’ajout de nouvelles catégories, particulièrement les travailleurs saisonniers de la pêche et de l’agriculture. En 1971, le régime couvrait 80 % des travailleurs rémunérés. Les prestations reposaient sur la durée de l’emploi assurable du prestataire : une semaine de prestation pour deux semaines d’emploi assurable pendant les 104 semaines précédant immédiatement la demande.La Loi sur l’AC de 1971 a fait l’objet d’une réforme en profondeur. Un des objectifs consistait à mettre en œuvre la quasi-universalité. Un deuxième objectif consistait à mieux coordonner les efforts avec les organismes qui ont pour mission d’accroître les possibilités d’emploi ou de fournir un soutien socioéconomique plus poussé. De même, on a remanié le régime de financement tripartite (salariés, employeurs et gouvernement fédéral) afin de confier au gouvernement fédéral la responsabilité du coût des prestations lorsque le taux de chômage dépasserait 4 %.Les modifications mises de l’avant depuis 1971 ont eu pour tendance de réduire la part des coûts d’AC du gouvernement, de diminuer les prestations disponibles aux chômeurs et d’accroître les prestations accordées dans les cas de maternité et de formation.Le programme actuel d’AC comporte quelques caractéristiques dignes de mention :●couverture presque universelle;●uniformité nationale; et●les coûts d’administration représentent une faible proportion du total des coûts.Divers points susceptibles d’amélioration doivent cependant être abordés, plus particulièrement :●l’universalité n’est pas totale;●les employeurs et les employés sont peu encouragés à diminuer le coût des prestations;●le programme laisse place à l’abus; et●le nombre important de réitérants.Le programme accepte non seulement les situations d’incapacité de trouver du

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travail mais aussi l’incapacité d’effectuer un travail pour raisons de maladie, de maternité ou de soins parentaux. Il y a d’autres situations où les prestataires n’ont pas à chercher du travail : travail partagé, création d’emplois, formation, travail autonome et assistance en cas de déplacement. Les prestations aux pêcheurs autonomes sont uniquement versées pendant la saison morte (c.-à-d., lorsqu’ils ne peuvent effectuer leur travail). Propre à l’assurance, le concept de remplacement d’un gain perdu s’applique mal à un bon nombre de ces situations.La différence la plus importante entre les principes de l’assurance et du bien-être social tient au fait que le droit au bien-être social et le montant des prestations de bien-être social reposent sur la situation du bénéficiaire, par exemple sa situation par rapport à son revenu et à sa situation familiale, plutôt que sur l’occurrence d’un événement imprévu bien défini et le bénéficiaire doit gagner un revenu avant la réalisation de cet événement.Les programmes de bien-être social ne sont habituellement pas restreints à des sous-groupes de la population et les prestations sont versées à tous les gens qui en ont réellement besoin. Le montant des prestations est peu élevé et affiche une corrélation négative avec les autres sources de revenu; les prestations de bien-être social sont versées uniquement aux gens qui ont des ressources financières limitées. Celles-ci proviennent habituellement des impôts généraux et ne font habituellement pas l’objet d’un fonds distinct. L’administration est plus difficile et plus coûteuse étant donné qu’il n’est pas facile d’établir un droit aux prestations et qu’il faut appliquer des contrôles plus rigoureux.Les prestations ordinaires représentent toujours la partie la plus importante de toutes les prestations versées. Cependant une part importante des prestations ordinaires sont versées pour satisfaire les objectifs de bien-être social en raison de la structure du programme d’AC, en particulier, les prestations complémentaires régionales.Au cours des ans, diverses études ont clairement souligné l’importance des demandes répétées faites par les travailleurs saisonniers et contractuels, qui bénéficient d’une source continuelle de supplément de revenu – le bien-être social – par l’intermédiaire des prestations ordinaires du programme d’AC.Malgré une augmentation du taux de chômage, les prestations ordinaires de chômage et de maladie représentent actuellement un pourcentage inférieur du coût total d’il y a 20 ans. En 1993, les prestations de chômage et de maladie sont intervenues pour près de 75 % de tous les coûts comparativement à près de 90 % en 1973. Le coût des prestations de maladie a toujours été marginal par rapport à celui des prestations ordinaires d’assurance-chômage. La plus grande partie de l’augmentation des coûts des prestations non ordinaires s’est produite au cours des cinq dernières années à la suite de l’introduction des prestations parentales et de formation et ses coûts afférents.Chaque recommandation est analysée dans le rapport. Les recommandations sont les suivantes :

RECOMMANDATION 1 : À notre avis, le programme d’AC devrait maintenir sa politique de ne pas couvrir de façon générale les travailleurs autonomes. Cependant, certaines catégories de travailleurs autonomes, par exemple les sous-traitants, devraient

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être couverts.RECOMMANDATION 2 : On devrait exiger des cotisations d’AC uniquement sur la rémunération qui dépasse la limite minimale d’assurabilité, cependant les prestations seraient quand même calculées d’après la rémunération totale, jusqu’au maximum hebdomadaire.RECOMMANDATION 3 : Il y aurait lieu de réviser et de faire reposer la formule de calcul du maximum de la rémunération cotisable sur la rémunération moyenne d’une période plus courte que la période actuelle, soit les huit dernières années.RECOMMANDATION 4 : On ne devrait pas étendre la couverture d’AC à un plus grand nombre de catégories de travailleurs à temps partiel. Il faudrait plutôt revoir le niveau actuel d’assurabilité minimale et peut-être augmenter légèrement la couverture, lorsqu’elle est nécessaire, réduisant ainsi le chevauchement entre le régime d’AC et celui du bien-être social.

RECOMMANDATION 5 : Étant donné que les prestataires en chômage qui trouvent du travail à temps partiel se trouvent, dans les faits, à verser intégralement l’impôt sur toute rémunération dépassant 25 % de leurs prestations d’AC, ils sont peu incités à trouver du travail supplémentaire. Il y aurait lieu de revoir la formule de calcul de la rémunération admissible des travailleurs à temps partiel afin de les inciter davantage à trouver du travail supplémentaire.RECOMMANDATION 6 : Il faudrait redonner au programme d’assurance-chômage sa capacité originelle de programme de protection du revenu strictement à l’égard du risque assurable de chômage et de protection contre les maladies non professionnelles. Les prestations suivantes, qui accaparent près d’un tiers de tous les coûts de l’AC, et qui ne sont pas des risques assurables, devraient être transférées au programme de bien-être social ou à d’autres secteurs appropriés :●la prolongation de la durée des prestations fondées sur le taux de chômage régional élevé;●les prestations de formation;●les prestations de pêcheurs; et●les prestations de maternité, parentales et d’adoption.RECOMMANDATION 7 : Du fait que les réitérants sont en grande partie des travailleurs saisonniers et contractuels pour qui l’AC est devenue une forme de supplément de revenu plutôt qu’un régime d’assurance pur, il y aurait lieu de diminuer leur taux de prestation ou d’augmenter le nombre de semaines pendant lesquelles ils doivent travailler pour devenir admissibles à des prestations.RECOMMANDATION 8 : Il y aurait lieu d’abolir la disposition de remboursement des prestations, du moins pour ceux qui réclament pour la première fois, et de la remplacer par d’autres caractéristiques du régime qui s’appliqueraient à tous les autres.RECOMMANDATION 9 : Tout déficit de l’assurance-chômage pourrait être

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comptabilisé comme un compte à recevoir dans le solde budgétaire du gouvernement. De cette manière, les résultats du programme d’assurance-chômage n’auraient aucune influence sur le déficit du gouvernement. Tout déficit de l’AC est automatiquement et entièrement remboursé par les employeurs et les travailleurs.RECOMMANDATION 10 : Une nouvelle loi sur l’AC devrait prévoir une analyse actuarielle du programme tous les cinq ans. Un actuaire continuerait de calculer chaque année le taux de cotisation prescrit par la loi, comme l’exigent les articles 48 et 49 de la Loi sur l’assurance-chômage, et proposerait divers taux de cotisation.RECOMMANDATION 11 : Le mécanisme de détermination des cotisations pourrait être amélioré de manière à inclure le calcul de réserves actuarielles.RECOMMANDATION 12 : La tarification selon la statistique ne devrait pas, pour l’instant, être mise en oeuvre, étant donné l’utilité plus grande accordée à d’autres modifications du programme d’AC.

Il faudrait évaluer soigneusement les répercussions d’une diminution des prestations de l’AC et tenir compte non seulement de l’impact sur les prestataires mais aussi de l’effet des programmes provinciaux d’assistance sociale. Rappelons-nous que l’accroissement du niveau de la pauvreté, la perte de l’estime de soi et l’isolement social chez le chômeur entraînent des coûts économiques et sociaux élevés autant pour les individus concernés que pour la société, notamment au chapitre des dépenses de santé, de la criminalité et de la mortalité.L’Institut estime qu’il y aurait lieu d’examiner sérieusement les modifications qu’il propose ici. Nous sommes disposés à offrir une aide supplémentaire, le cas échéant.

3.HISTORIQUE

«En rétrospective, la révision de 1971 a pu avoir fait preuve de naïveté en maintenant un objectif de chômage de 4 % et en introduisant des règles qui ont alimenté une culture de dépendance dans de nombreux domaines et déformé les rouages des marchés du travail – notamment en accordant des prestations généreuses après un nombre minimal de semaines de travail et des prestations de prolongation dans les régions à chômage élevé. Toutefois, elle a fait preuve de préscience en étendant la couverture à tous les travailleurs rémunérés, compte tenu de l’ampleur ultérieure du chômage, et en prévoyant une correction annuelle des paramètres financiers, compte tenu des taux élevés d’inflation qui ont suivi. Enfin, cette révision a innové en accordant des prestations de maladie et, anticipant les demandes des femmes, des prestations de maternité.»

Michel Bédard1

La première Loi sur l’AC a vu le jour en 1940, à la suite de la Grande dépression des années 30. Elle avait pour but initial de fournir une aide financière aux travailleurs des secteurs industriels et commerciaux en période de chômage temporaire. Entre 1940 et 1970, les concepts de base sont demeurés inchangés, sauf pour l’ajout de nouvelles catégories, particulièrement les travailleurs saisonniers de la pêche et de l’agriculture. En 1971, le régime couvrait 80 % des travailleurs rémunérés. Les prestations reposaient sur la durée de l’emploi assurable du prestataire : une semaine de prestation pour deux semaines d’emploi

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assurable pendant les 104 semaines précédant immédiatement la demande.La Loi sur l’AC de 1971 a fait l’objet d’une réforme en profondeur. Un des objectifs consistait à mettre en œuvre la quasi-universalité. Un deuxième objectif consistait à mieux coordonner les efforts avec les organismes qui ont pour mission d’accroître les possibilités d’emploi ou de fournir un soutien socioéconomique plus poussé. De même, on a remanié le régime de financement tripartite (salariés, employeurs et gouvernement fédéral) afin de confier au gouvernement fédéral la responsabilité du coût des prestations lorsque le taux de chômage dépasserait 4 %.Les modifications mises de l’avant depuis 1971 ont eu pour tendance de réduire la part des coûts d’AC du gouvernement, de diminuer les prestations disponibles aux chômeurs et d’accroître les prestations accordées dans les cas de maternité et de formation. La révision de 1990 a totalement éliminé la part des coûts de l’AC assumée par le gouvernement, qui représentaient entre 20 % et 25 % de l’ensemble des coûts dans les années 1980. Cette mesure a permis d’autofinancer le programme d’AC pour la première fois depuis son application en 1940. D’autres modifications importantes prévoyaient l’augmentation des prestations aux stagiaires ainsi qu’aux parents de nouveau-nés, tout en diminuant la disponibilité des prestations ordinaires.Au cours des 20 dernières années, on a constaté que le coût total de l’AC en pourcentage de la rémunération assurable avait eu tendance à augmenter. Cette augmentation s’explique par la hausse du taux de chômage et par l’introduction ou le perfectionnement de prestations secondaires.Même si le chômage est cyclique et qu’il fluctue largement d’une année à l’autre, le tableau 1 – taux de chômage moyen à chaque décennie depuis le début de la Seconde Guerre mondiale – indique une tendance fondamentale générale à l’augmentation du taux de chômage au Canada depuis les 40 dernières années. Le tableau 2 présente les répercussions de l’augmentation du taux de chômage entre 1974 et 1993 sur le coût des prestations de chômage. Les coûts rectifiés pour tenir compte de la fluctuation du taux de chômage – c’est-à-dire la normalisation des coûts – sont stables pour toute cette période.

TABLEAU 1TABLEAU 2

COÛTS DES PRESTATIONS DE CHÔMAGE

% Rémunération assurableAnnéeCoûts normalisésCoûts réels

Nota :Rajustement pour le taux de chômage seulement; pas de rajustement pour les modifications du programme.Comme l’indique le tableau 3, l’augmentation du coût total s’explique par la croissance particulière des prestations parentales et celles à des fins productives. En 1993, les prestations autres qu’ordinaires (y compris les fins productives) ont représenté 20 % de toutes les prestations versées par l’AC, c’est-à-dire 3,5 milliards de dollars.

TABLEAU 3COÛTS DES PRESTATIONS AUXILIAIRES

PêcheMaladie

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MPAFins productivesNota :1)MPA désigne les prestations de maternité, de paternité et d’adoption.

2)Les fins productives désignent le travail partagé, la création d’emploi, la formation, les frais et allocations de cours, la mobilité et le travail autonome.3)Le tableau ci-dessus représentent les données sous forme additive

4.SITUATION ACTUELLE

Le programme actuel d’AC comporte quelques caractéristiques dignes de mention :●couverture presque universelle;●uniformité nationale; et●les coûts d’administration représentent une faible proportion du total des coûts.Divers points susceptibles d’amélioration doivent cependant être abordés, plus particulièrement :●l’universalité n’est pas totale;●les employeurs et les employés sont peu encouragés à diminuer le coût des prestations;●le programme laisse place à l’abus; et●le nombre important de réitérants.Le programme accepte non seulement les situations d’incapacité de trouver du travail mais aussi l’incapacité d’effectuer un travail pour raisons de maladie, de maternité ou de soins parentaux. Il y a d’autres situations où les prestataires n’ont pas à chercher du travail : travail partagé, création d’emplois, formation, travail autonome et assistance en cas de déplacement. Les prestations aux pêcheurs autonomes sont uniquement versées pendant la saison morte (c.-à-d., lorsqu’ils ne peuvent effectuer leur travail). Propre à l’assurance, le concept de remplacement d’un gain perdu s’applique mal à un bon nombre de ces situations.Les caractéristiques des chômeurs ont changé avec le temps. En 1986, la Commission Forget dégageait trois tendances qui s’écartaient largement de la moyenne :●Les jeunes travailleurs ont une probabilité plus élevée de se retrouver en chômage mais ils le demeurent moins longtemps.●Les travailleurs actifs de longue date ont une probabilité moins élevée de devenir chômeur, mais ils épuiseront habituellement toutes leurs prestations ordinaires d’assurance-chômage, devenant de ce fait des chômeurs à long terme pour diverses raisons. ●Dans certaines industries, comme l’agriculture, la pêche et la construction, les travailleurs saisonniers ont tendance à devenir des travailleurs à temps partiel pour une longue période. Dans cette catégorie de travailleurs, 50 % des prestataires en 1991 s’étaient déjà retrouvés sur l’AC au moins une fois dans les deux années précédentes. Ce pourcentage s’établissait aussi à presque 50 % entre 1971 et 1974.Comme l’indique le tableau 4, le programme d’AC couvre un pourcentage de moins en moins élevé d’emplois. La proportion de travailleurs autonomes a progressé au cours des ans, et ceux-ci ne sont pas couverts par le programme d’AC.

TABLEAU 4COUVERTURE DE L’EMPLOI EN POURCENTAGE (%)

Il y a en ce moment un nombre croissant d’emplois à temps partiel et d’emplois

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cumulés à temps partiel que le programme ordinaire ne prend pas en compte. De fait, 60 % des nouveaux emplois créés en 1993 étaient à temps partiel. On note aussi un pourcentage accru d’emplois chez les petites entreprises où le risque de chômage est plus élevé.En 1976, les travailleurs de 45 ans ou plus ont demandé des prestations pendant 17 semaines en moyenne, tandis qu’en 1992, elles ont été versées en moyenne pendant 32 semaines chez ce même groupe d’âge. Au cours du plus récent cycle des affaires, l’expérience nous indique que l’incidence du chômage de longue durée augmente en flèche pendant une récession, mais qu’elle diminue plus lentement que le taux de chômage pendant la période d’expansion économique qui suit.Beaucoup d’études indiquent aussi que la répartition des prestations et des cotisations d’AC n’est pas uniforme entre les secteurs industriels et les régions. Le régime des prestations de prolongation fondées sur le taux de chômage régional accentue cette situation.

5.ASSURANCE SOCIALE OU BIEN-ÊTRE SOCIAL

A)Notions de baseLes programmes sociaux qui prévoient des prestations en espèces peuvent constituer des régimes d’assurance sociale ou des régimes de bien-être social (assistance social). Il existe à cette fin des régimes universels tels que la Pension de sécurité de vieillesse, le supplément de revenu garanti – test de gains exigés sans égard aux besoins ni à l’actif – et finalement des crédits d’impôts tels que les prestations fiscales pour enfants et reliées à la TPS. Bien que les régimes d’assurance sociale diffèrent largement par leur nature et leur contenu des régimes privés d’assurance, on peut aussi appliquer à l’assurance sociale quelques-uns des principes d’assurance qui définissent les régimes privés d’assurance. Le lecteur qui désire en connaître davantage sur ces concepts aurait avantage à lire l’annexe A du présent rapport et un document antérieur présenté par l’Institut Canadien des Actuaires.2 Ces principes font clairement ressortir les divergences entre les régimes d’assurance sociale et les programmes de bien-être social :●paiement d’une indemnité ou d’une prestation visant à compenser une perte découlant d’un événement imprévu bien défini qui échappe au contrôle du bénéficiaire;●non-paiement de prestations à moins que l’événement imprévu défini se soit produit, même s’il est possible de prouver l’existence d’un besoin financier;●établissement d’un barème précis des prestations, habituellement en pourcentage du traitement, qui ne repose pas sur les besoins particuliers du prestataire;●élimination ou diminution de l’antisélection qui, dans l’assurance-chômage, pourrait désigner les demandes répétées, par l’existence d’une période de référence convenable ou d’autres critères d’admissibilité;●établissement d’un groupe «semblable» qui, dans l’assurance-chômage, désigne les gens qui sont clairement des travailleurs permanents dans la population active;●prestations financées à même des cotisations spéciales versées habituellement par les employés couverts et les employeurs, et établies d’après des principes actuariels de manière que les rentrées et les sorties de fonds du régime s’équilibrent généralement;●maintien d’un fonds ou d’un compte distinct; et

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●examens périodiques impartiaux de la situation financière du régime.La différence la plus importante entre les principes de l’assurance et du bien-être social tient au fait que le droit au bien-être social et le montant des prestations de bien-être social reposent sur la situation du bénéficiaire, par exemple sa situation par rapport à son revenu et à sa situation familiale, plutôt que sur l’occurrence d’un événement imprévu bien défini et le bénéficiaire doit gagner un revenu avant la réalisation de cet événement.Les programmes de bien-être social ne sont habituellement pas restreints à des sous-groupes de la population et les prestations sont versées à tous les gens qui en ont réellement besoin. Le montant des prestations est peu élevé et affiche une corrélation négative avec les autres sources de revenu; les prestations de bien-être social sont versées uniquement aux gens qui ont des ressources financières limitées. Celles-ci proviennent habituellement des impôts généraux et ne font habituellement pas l’objet d’un fonds distinct. L’administration est plus difficile et plus coûteuse étant donné qu’il n’est pas facile d’établir un droit aux prestations et qu’il faut appliquer des contrôles plus rigoureux.Comme la section qui suit l’indique, le programme d’AC renferme un mélange de caractéristiques propres à l’assurance et au bien-être social. Nous aborderons ensuite l’évaluation du système actuel et présenterons des recommandations particulières.

B)Différence actuelle entre l’assurance et le bien-être socialLe programme d’AC a vu le jour en 1940. C’était à ce moment-là un programme exclusivement d’assurance sociale pure qui avait pour but d’aider les chômeurs entre deux emplois et qui visait uniquement le risque d’un chômage involontaire. Au cours des ans, comme l’indique le tableau 5, on a étendu le programme en offrant des prestations supplémentaires.

TABLEAU 5AFFAIBLISSEMENT DES PRINCIPES D’ASSURANCE

1950Couverture restreinte des travailleurs saisonniers de la pêche et de l’agriculture (étendues en 1957)1955Les normes d’admissibilité, les taux des prestations et les durées ont été élargies1971Les normes d’admissibilité fixées à seulement huit semaines1971Les prestations de maternité accordées aux femmes assurés au moment de la conception (10 semaines requises entre la 30e et la 50e avant la date prévue de l’accouchement; cette condition fut abolie en 1984)1971Couverture des maladies non professionnelles1971Prestations de prolongation accordées aux personnes dans les régions en dépression économique1971Couverture étendue aux personnes en situation de maternité ou de retraite (cette dernière fut abolie en 1990)1977Fins productives de l’AC autorisées pour la formation, la création d’emplois et le travail partagé1984Institution des prestations d’adoption1987Introduction des prestations restreintes de paternité (les prestations ont été étendues en 1990 aux prestations parentales)

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1991Utilisations productives de l’AC autorisées pour la formation et ses coûts afférents et les allocations supplémentaires aux gens qui reçoivent des cours de formation approuvés1992Prestations supplémentaires pour encourager le travail autonome, la mobilité et le réemploi

Toutes ces prestations – sauf celles de maladie – ont été introduites au cours des ans pour répondre aux besoins particuliers de certains segments de la population. Elles ont accru considérablement l’élément de bien-être social du programme d’AC de la façon suivante :●permettre l’antisélection (le contrôle) sur les prestations (p. ex., versées à des travailleurs saisonniers);●étendre les prestations à des événements imprévus non assurables (p. ex., des prestations de maternité, parentales et d’adoption;●fournir des prestations plus longues aux bénéficiaires qui résident dans des régions où le taux de chômage est élevé, et exempter les bénéficiaires du critère de recherche d’emploi s’ils suivent des cours de formation approuvés, ou s’ils participent à un programme de travail partagé.Tel qu’indiqué aux tableaux 6 et 7, d’autres modifications apportées à la Loi sur l’AC et aux politiques administratives ont modifié l’élément de bien-être social/assurance du programme d’AC :

TABLEAU 6RENFORCEMENT DES PRINCIPES D’ASSURANCE

1977Introduction d’une norme d’admissibilité de 10 à 14 semaines en remplacement d’un critère général de 10 semaines1979Accroissement de la norme d’admissibilité dans le cas des réitérants, des nouveaux prestataires et des ré-entrants1985Tous les gains à la cessation d’emploi (y compris les prestations de départ et la paye de vacances) sont comptés aux fins des prestations d’AC1986Les pensions de retraite sont retranchées des prestations d’AC1990La norme d’admissibilité passe de 10-14 semaines à 10-20 semaines1990La période d’exclusion à la suite d’une démission volontaire, d’une inconduite ou d’un refus d’emploi passe à 7-12 semaines et est assortie d’un taux de prestation de 50 %1993Exclusion complète des prestations à la suite d’une démission volontaire, d’une inconduite ou d’un refus d’emploi1994La norme d’admissibilité passe à 12-20 semaines et on exige une plus grande durée d’emploi assurable pour le calcul des prestations totales1994Diminution des durées maximales des prestations, surtout dans les régions ayant un taux de chômage élevé

TABLEAU 7RENFORCEMENT DES ÉLÉMENTS DE BIEN-ÊTRE SOCIAL

1976Les conjoints de pêcheurs deviennent admissibles aux prestations1977Les prestations de départ ne sont pas comptées aux fins des prestations d’AC1977Les prestataires renvoyés à des cours de formation reçoivent des prestations d’AC

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1979Introduction de la disposition de remboursement des prestations de 30 %1982Les payes de vacances ne sont pas comptées aux fins des prestations d’AC1987Les prestations de maternité/paternité/adoption sont étendues à un an lorsque l’enfant est hospitalisé1990Les durées de prestations de maternité/parentales/adoption sont étendues de 15 à 25 semaines1994Barème de taux à deux volets : 60 % pour les prestataires dont la rémunération assurable est peu élevée et qui comptent des personnes à charge, et 55 % pour tous les autres prestataires

C)Répartition des prestationsLa répartition des coûts annuels des différents programmes est indiqué au tableau 8 :

TABLEAU 8RÉPARTITION DES PRESTATIONS

19931992(en milliers de dollars)

PrestationsOrdinaires14 273 58415 275 993Maternité795 861829 892Parentales486 561491 673Maladie416 920410 658Pêche257 061290 861Adoption4 9685 06816 234 95517 304 145

Programmes à des fins productivesTravail partagé51 691112 737Création d’emplois104 679112 043Formation – soutien au revenu926 595978 330Formation – coûts des cours et du programme489 407520 113Training – allocations supplémentaires81 74893 642Assistance au travail autonome – soutien au revenu83 02816 045Assistance au travail autonome – coûts des projets15 7414 597

1 752 8891 837 507Prestations brutes17 987 84419 141 652Moins : remboursements de prestations par les travailleurs à revenu supérieur15 71631 339

17 972 12819 110 313Les prestations ordinaires représentent toujours la partie la plus importante de toutes les prestations versées. Cependant, comme on le souligne précédemment, une part importante des prestations ordinaires sont versées pour satisfaire les objectifs de bien-être social en raison de la structure du programme d’AC, en particulier, les prestations complémentaires régionales.Au cours des ans, diverses études ont clairement souligné l’importance des demandes répétées faites par les travailleurs saisonniers et contractuels, qui

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bénéficient d’une source continuelle de supplément de revenu – le bien-être social – par l’intermédiaire des prestations ordinaires du programme d’AC.Miles Corak3 & 4 résume l’effet des réitérants sur le programme d’assurance-chômage.●Le nombre de tous les réitérants d’AC est important. En 1989, il y a eu presque 950 000 demandes d’AC faites par des hommes. Plus de 80 % de ces demandes ont été formulées par des individus qui avaient déjà présenté une autre demande à un moment donné depuis 1971.●En moyenne, on peut s’attendre qu’un homme qui a fait au moins une demande d’AC en présente au moins une autre tous les trois ou quatre ans par la suite.●Les facteurs saisonniers jouent un rôle très important pour déterminer la probabilité qu’un homme présente une autre demande dans les 14 semaines de la fin de la première demande.●La probabilité de répétition dans les cinq années qui suivent est la moins élevée dans le secteur des services et la plus élevée dans le secteur des industries primaires.●Les personnes qui connaissent une période relativement longue d’emploi continu – plus d’un an – sont moins susceptibles d’être des réitérants de l’AC que celles qui ont occupé des emplois intermittents de brève durée.Les caractéristiques changeantes de la population active contribuent à ce phénomène.Malgré une augmentation du taux de chômage, les prestations ordinaires de chômage et de maladie représentent actuellement un pourcentage inférieur du coût total d’il y a 20 ans. En 1993, les prestations de chômage et de maladie sont intervenues pour près de 75 % de tous les coûts comparativement à près de 90 % en 1973. Le coût des prestations de maladie a toujours été marginal par rapport à celui des prestations ordinaires d’assurance-chômage. La plus grande partie de l’augmentation des coûts des prestations non ordinaires s’est produite au cours des cinq dernières années à la suite de l’introduction des prestations parentales et des coûts de cours, des allocations et de la formation.Pour les cinq prochaines années, on prévoit que les prestations ordinaires demeureront autour de 15 milliards de dollars dans la mesure où le taux de chômage demeure à son niveau actuel et si le ratio de couverture demeure constant à près de 60-70 % (c.-à-d., le rapport du nombre de chômeurs pris en compte par l’AC par rapport à tous les chômeurs).La majeure partie de l’augmentation prévue du coût total au cours de cette période proviendra des crédits alloués aux «fin productives» – 2 milliards de dollars – ainsi qu’aux prestations de maternité et parentales qui, selon l’analyse précédente, font clairement parties des domaines des politiques de bien-être social et de ressources humaines.

6.COMPARAISON INTERNATIONALE

Toute comparaison avec les programmes menés dans d’autres pays est complexe et devrait se faire avec circonspection. La culture et les institutions y sont habituellement très différentes. Toutefois, il est intéressant de comparer quelques-unes des dispositions afin de comparer les caractéristiques semblables et divergentes de notre programme au Canada. L’annexe C donne un aperçu des

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programmes offerts dans certains pays influents.Ces programmes ont au moins quatre caractéristiques en commun :1)couverture quasi universelle;2)aucune tarification selon la statistique, sauf aux É.-U. (les cotisations fluctuent en Suède selon la catégorie de secteur industriel, mais non selon l’expérience de chaque employeur);3)bon nombre incitent à une retraite hâtive et prévoient une durée maximale prolongée des prestations à l’égard des travailleurs âgés; et4)les modifications apportées depuis dix ans ont eu tendance à raffermir la composante de l’assurance.Voici quelques exemples de ces modifications :●accroître la limite de la rémunération assurable (Autriche et Allemagne);●étendre la période d’admissibilité (Allemagne); et●augmenter le niveau de cotisation (Allemagne, Autriche et É.-U.).Bref, la composante du bien-être social des programmes européens est généralement très restreinte.

7.RECOMMANDATIONS – COUVERTURE

A)Couverture des travailleurs autonomesUn travailleur autonome est une personne qui exerce un contrôle sur ses conditions d’emploi. Elle peut ainsi décider de travailler à l’endroit, aux jours et aux heures qui lui plaisent; par conséquent, il n’y aucun lien officiel employeur/employé aux termes duquel l’employeur décide des conditions de travail de ses employés. C’est le même raisonnement qu’avait d’ailleurs fait la Commission Forget lorsqu’elle avait conclu que «le degré de danger moral que présente le travailleur autonome est incompatible avec l’AC».Les travailleurs autonomes représentent actuellement un pourcentage croissant du nombre total de travailleurs au Canada. En 1993, ils figuraient pour 16 % de la population active comparativement à 12 % en 1975.

RECOMMANDATION 1 : À notre avis, le programme d’AC devrait maintenir sa politique de ne pas couvrir de façon générale les travailleurs autonomes. Cependant, certaines catégories de travailleurs autonomes, par exemple les sous-traitants, devraient être couverts.

B)Rémunération assurableIl y a actuellement une contre-incitation pour les employeurs à accorder une 15e

heure de travail à leurs employés, afin d’éviter les cotisations d’AC sur la rémunération totale, outre les exigences administratives qui s’ensuivent (remboursements, rapports et relevés d’emploi lors d’une cessation d’emploi).En 1994, on peut calculer que la contribution supplémentaire imposée par les cotisations d’AC pour cette 15e heure de travail s’établit à 64 % pour l’employeur seul et à 111 % lorsqu’on tient également compte de la cotisation de l’employé. Par contraste, les cotisations au Régime de pensions du Canada sont uniquement exigibles sur la rémunération qui dépasse l’exemption de base.

RECOMMANDATION 2 : On devrait exiger des cotisations d’AC uniquement sur la rémunération qui dépasse la limite minimale d’assurabilité, cependant les prestations seraient quand même

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calculées d’après la rémunération totale, jusqu’au maximum hebdomadaire.

Cette recommandation favoriserait les employés à faible revenu et leur employeur, qui sont surtout de petites et moyennes entreprises. Les cotisations d’AC deviendraient une taxe progressive qui s’appliquerait jusqu’à un montant maximal de la rémunération hebdomadaire assurable. Plus que dans le système actuel, cette mesure encouragerait les employeurs à donner du travail à temps partiel à ceux qui en veulent et ensuite à étendre les heures de travail de leurs employés à temps partiel lorsqu’ils en auraient besoin pour des raisons d’affaires. Cette exemption diminuerait l’assiette des cotisations d’environ 20 %, obligeant à augmenter le taux des cotisations pour compenser le manque à gagner.

C)Maximum de la rémunération cotisableLe maximum de la rémunération cotisable augmente chaque année en fonction de la moyenne des augmentations salariales des huit dernières années. Cette formule sur huit ans prévoit une hausse progressive et prévisible, mais elle introduit cependant un décalage important. Il serait préférable d’avoir une période plus courte comme celle qui sert à déterminer les cotisations. À cause de la formule, le maximum des gains cotisables a augmenté plus rapidement que la rémunération moyenne (27 % de plus entre 1972 et 1994). Cela est causé par la formule et la moyenne sur huit ans. Une meilleure formule autocorrectrice prendrait comme point de départ le pourcentage de la rémunération hebdomadaire moyenne courante de chaque année plutôt que le maximum de la rémunération cotisable de l’année précédente.

RECOMMANDATION 3 : Il y aurait lieu de réviser et de faire reposer la formule de calcul du maximum de la rémunération cotisable sur la rémunération moyenne d’une période plus courte que la période actuelle, soit les huit dernières années.

D)Couverture des travailleurs à temps partielSelon la définition donnée dans l’enquête sur la population active qu’effectue tous les mois Statistique Canada, un travailleur à temps partiel est une personne qui travaille moins de 30 heures par semaines, tous emplois combinés. Le travail à temps partiel a connu une croissance constante au cours des ans, mais il est demeuré un phénomène secondaire dans l’ensemble. Ainsi, en 1993, les travailleurs à plein temps intervenaient toujours pour 92,5 % de toutes les heures travaillées au Canada. Même si 60 % de l’augmentation nette de l’emploi en 1993 est imputable aux travailleurs à temps partiel, seulement 14 % des heures de travail ajoutées appartiennent aux travailleurs à temps partiel.Comme le soulignait récemment Statistique Canada, la plupart des travailleurs à temps partiel préfèrent un emploi à temps partiel (près de 75 % en moyenne pendant les années 1980). Dans cette catégorie de gens qui cherchent à dénicher un travail à temps partiel pour augmenter leur revenu personnel ou le revenu de la famille, nous retrouvons, par exemple, les étudiants qui ont accès à un prêt ou à une bourse d’études, les travailleurs à la retraite qui touchent une pension de retraite de leur employeur ou d’un régime de retraite personnel, les personnes mariées dont le conjoint travaille déjà à plein temps et les travailleurs ayant un travail secondaire et qui ont déjà un autre emploi à plein temps.

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La croissance récente du travail involontaire à temps partiel, lequel est passé à près de 35 % de tout le travail à temps partiel en 1993, est largement liée à la récente récession. Un phénomène du même genre s’est produit au début des années 1980.Actuellement, lorsqu’un travailleur perd son emploi, tous les autres emplois qu’il cumulait servent à calculer ses prestations d’AC (pourvu qu’il s’agissait dans chaque cas d’un emploi assurable, c’est-à-dire auquel la personne consacrait au moins 15 heures par semaine et qui lui procurait une rémunération d’au moins 156 $). À cet égard, Statistique Canada a indiqué que des quelque 628 000 travailleurs (ou 6 % de l’effectif) qui cumulaient plus d’un emploi en 1993, seuls la moitié ont combiné un travail rémunéré à un autre travail rémunéré potentiellement assurable, l’autre moitié étant autrement à son compte. Il est encore plus surprenant de voir que près de 90 % des personnes cumulant plus d’un emploi avaient travaillé assez longtemps pour retirer des prestation d’AC au moins de leur emploi principal.Lorsqu’on examine la couverture actuelle d’AC des travailleurs à temps partiel y compris celle des personnes que cumulent plus d’un emploi, on peut conclure qu’elle est sans doute aussi complète qu’on peut le vouloir. On peut évaluer à près de 30 % de tous les travailleurs à temps partiel ceux qui ne sont pas déjà couverts, mais ceux-ci figurent pour moins de 1 % de toutes les heures travaillées au Canada et ils comptent en moyenne entre sept et huit heures de travail par semaine. À ces faibles niveaux de rémunération, même lorsqu’on tient compte des règles actuelles d’exclusion, tous les travailleurs qui auraient ainsi largement besoin d’un soutien du revenu devront probablement faire appel au bien-être social, ce qui entraîne un chevauchement des procédures administratives.

RECOMMANDATION 4 : On ne devrait pas étendre la couverture d’AC à un plus grand nombre de catégories de travailleurs à temps partiel. Il faudrait plutôt revoir le niveau actuel d’assurabilité minimale et peut-être augmenter légèrement la couverture, lorsqu’elle est nécessaire, réduisant ainsi le chevauchement entre le régime d’AC et celui du bien-être social.

8.RECOMMANDATIONS – CONCEPTION DU PROGRAMME

A)Encouragements à retourner au travailLes prestataires d’AC sont autorisés à conserver une faible part de toute rémunération qu’ils touchent pendant qu’ils reçoivent des prestations d’AC. Ce montant est fixé à 25 % de leurs prestations hebdomadaires. Toute rémunération en sus de ce montant est retranchée, dollar pour dollar, de leurs prestations d’AC.Avec un taux général de prestation de 55 %, la rémunération ainsi admissible correspond à seulement 13 3/4 % de la rémunération moyenne antérieure. En 1972, la portion admissible était de 21 % plus élevée, c’est-à-dire un quart de 66 2/3 %.Cet impôt de 100 % sur la rémunération au-delà de la partie admissible décourage fortement les travailleurs à augmenter leurs heures de travail. Il semblerait souhaitable d’adopter une formule plus progressive, par exemple :●aucune déduction sur la première tranche de 15 % des prestations;●déduction de 1/3 de la rémunération sur la tranche suivante de 30 % – permettant ainsi l’équivalent d’une tranche supplémentaire de 20 % des prestations;●déduction des 2/3 de la rémunération sur la tranche suivante de 30 % – permettant ainsi une autre tranche de 10 %; et

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●déduction complète de toute rémunération supplémentaire.Ainsi, si un bénéficiaire obtient un travail à temps partiel représentant 75 % de ses prestations hebdomadaires, cette personne pourrait conserver l’équivalent de 45 % de celles-ci. L’autre 30 % réduirait d’autant les prestations payées par l’AC. Par exemple, un bibliothécaire qui gagnait 600 $ par semaine aurait droit à des prestations de 330 $. Ce bénéficiaire ne peut recevoir maintenant que 83 $ (25 % des prestations) d’un emploi à temps partiel, le reste étant déduit dollar pour dollar. Selon la proposition mentionnée précédemment, le bibliothécaire en chômage aurait la possibilité de gagner jusqu’à trois fois plus, soit jusqu’à 248 $ (75 % des prestations); son revenu total hebdomadaire serait de 479 $ dont 231 $ de l’AC (le 330 $ de prestation hebdomadaire étant réduit de 30 %) et le reste provenant de son propre emploi.D’autres formules pourraient être envisagées.

RECOMMANDATION 5 : Étant donné que les prestataires en chômage qui trouvent du travail à temps partiel se trouvent, dans les faits, à verser intégralement l’impôt sur toute rémunération dépassant 25 % de leurs prestations d’AC, ils sont peu incités à trouver du travail supplémentaire. Il y aurait lieu de revoir la formule de calcul de la rémunération admissible des travailleurs à temps partiel afin de les inciter davantage à trouver du travail supplémentaire.

B)Transfert des prestations de bien-être social«Les régimes d’assurance sociale ne sont pas des programmes d’assistance sociale. Ainsi, ni les régimes d’assurance, ni les régimes d’assistance ne constituent un meilleur moyen d’atteindre l’objectif fondamental de la sécurité sociale qu’est la sécurité du revenu. Chacun a une place et une fonction qui lui sont propres; de fait, ils sont complémentaires. Ce serait une grave erreur que d’essayer d’étendre l’un ou l’autre au-delà de leur sphère respective.»

A.D. Watson9

Aux sections 3 et 4, nous avons examiné l’évolution du programme d’AC au cours des années. Nous avons aussi abordé son objectif fondamental. Nous avons classé chaque type de prestations par catégorie selon qu’il s’agissait d’une «prestation d’assurance» ou d’une «prestation de bien-être social». Pour accroître l’efficacité, nous recommandons maintenant de conserver certaines prestations dans le programme d’AC et d’en transférer d’autres.On peut considérer l’assurance-chômage comme un moyen positif de satisfaire les objectifs du bien-être social que sont le supplément et le soutien du revenu, étant donné qu’il est facile d’établir les critères d’admissibilité et le montant des prestations. En revanche, il y a des lacunes importantes à utiliser l’AC comme véhicule de bien-être social puisque pour l’AC :●la couverture n’est pas universelle, mais repose plutôt sur la durée du travail;●les critères d’admissibilité ne sont pas liés au revenu ni aux besoins;●les chômeurs à long terme ne sont pas protégés;●il y a un lien positif entre la rémunération et les prestations de sorte que ceux qui touchent un revenu élevé sont ceux qui en ont le moins besoin;●il est nécessaire que les personnes perdent leur emploi afin de pouvoir recevoir

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des prestations ordinaires de chômage; et●une dépendance accrue est créée en établissant un droit aux prestations d’après une courte période de travail et en étendant ces conditions aux réitérants. (À cet égard, l’AC n’est pas vraiment coordonnée avec les autres programmes de main-d’oeuvre et peut même s’opposer à l’occasion à d’autres objectifs des politiques d’emploi.)

RECOMMANDATION 6 : Il faudrait redonner au programme d’assurance-chômage sa capacité originelle de programme de protection du revenu strictement à l’égard du risque assurable de chômage et de protection contre les maladies non professionnelles. Les prestations suivantes, qui accaparent près d’un tiers de tous les coûts de l’AC, et qui ne sont pas des risques assurables, devraient être transférées au programme de bien-être social ou à d’autres secteurs appropriés :●la prolongation de la durée des prestations fondées sur le taux de chômage régional élevé;●les prestations de formation;●les prestations de pêcheurs; et●les prestations de maternité, parentales et d’adoption.

Ce genre de recommandation n’est pas nouveau. Nombre d’études l’ont préconisée depuis des années, notamment la Commission Forget qui, en 1986, précisait que le «rôle de l’assurance-chômage consisterait strictement à remplacer le revenu perdu. Le supplément du revenu et les autres aspects du programme actuel seraient transférés à des programmes conçus précisément à cette fin.» Toutefois, cela demeure une question fondamentale afin de réaliser toute réforme en profondeur.1)Prolongation de la période des prestations pour tenir compte d’un taux régional élevé de chômage

Pour redéfinir le programme d’AC comme un régime d’assurance sociale, il y aurait lieu de faire reposer principalement la période de prestation sur la durée de l’emploi assurable. On trouvera ci-après quelques exemples de solutions de rechange possibles :

SOLUTION 1 : La période de prestations pourrait correspondre à une semaine de prestations pour chaque tranche de deux semaines d’emploi assurable.La période d’emploi assurable serait restreinte à 104 semaines, comprenant un minimum de 12 semaines. Une formule similaire était en place avant 1971.SOLUTION 2 : Semblable à la solution 1, sauf que l’emploi assurable pourrait être étendu à 208 semaines dans le cas des prestataires de plus de 54 ans.SOLUTION 3 : Un cinquième du nombre de jours de cotisations au cours des cinq années précédant la demande, moins un tiers du nombre de jours de prestations dans les trois ans précédant la demande.SOLUTION 4 : Une semaine de prestations pour chaque tranche de deux semaines d’emploi assurable.

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Le coût global est intimement lié au niveau de la durée maximale des prestations. Le tableau 9 démontre que les deux tiers de la diminution des coûts générée par les modifications annoncées au budget fédéral de 1994 proviendront d’une réduction de la période maximale de prestations :

TABLEAU 9BUDGET FÉDÉRAL 1994

Taux de prestation ramené de 57 % à 55 % (ou 60 %)400 millions $La norme minimale d’admissibilité passe de 10 à 12 semaines400 millions $Réduction de la période maximale de prestations1 600 millions $Épargne totale2 400 millions $

Les tableaux 11 et 12 présentent l’impact de cette diminution de la période maximale de prestations.

2)FormationIl est hautement souhaitable de se doter d’un programme de formation efficace. Cependant, le programme sera plus efficace s’il est séparé du programme d’AC afin d’éviter le chevauchement avec les autres programmes. En outre, seules les personnes occupant un emploi sont admissibles à des prestations de formation de l’AC.L’annexe C examine la longue liste des programmes de formation depuis 80 ans. Beaucoup de lecteurs se demanderont, après avoir lu cette annexe, comment un nouveau programme de formation pourrait durer plus longtemps. Le tableau ci-après présente la croissance exponentielle des prestations d’assurance-chômage versées à d’autres fins que le chômage ordinaire. Les dépenses de formation interviennent principalement pour cette hausse importante, comme l’illustre le tableau 10.

TABLEAU 10Prestations d’AC versées pour d’autres raisons

que le chômage ordinaire – 1972 à 1993Pourcentage des prestations non ordinaires (échelle de gauche)Valeurs normalisées de 1993 (échelle de droite)

Nous n’avons pu trouver aucune étude ayant évalué l’efficacité de ces dépenses. Avant de décider d’augmenter davantage les dépenses de formation, nous croyons qu’il est essentiel d’effectuer une analyse fiable coûts-avantages. Nous sommes ravis que le gouvernement se soit fixé comme objectif d’évaluer à long terme les répercussions des politiques et des programmes. Il semble prioritaire de se pencher sérieusement sur les effets de la formation. À l’heure actuelle, les coûts par habitant peuvent être élevés; 55 %/60 % de la rémunération assurable peuvent être versés pour une période maximale de trois ans, outre le remboursement des frais d’éducation. Notre recommandation d’éliminer les prestations de formation du programme d’AC ne signifie pas qu’il soit souhaitable de sabrer largement dans les dépenses de formation. Même si les programmes de formation ne conduisent pas aux emplois immédiatement disponibles, ils peuvent diminuer le chômage de longue durée et accroître l’adaptabilité du travailleur. La formation peut empêcher le travailleur de perdre l’estime de soi et prévenir ce sentiment d’isolement social que beaucoup de

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chômeurs connaissent. En éliminant la formation du programme d’assurance-chômage, on se donnerait alors plus de moyens de créer un nouveau programme mieux adapté aux besoins des chômeurs. On pourrait augmenter l’efficacité en accroissant la synergie entre les parties (employés, employeurs, organisations syndicales, établissements d’enseignement et gouvernements). L’expérience de certains pays est présentée à l’annexe C.

TABLEAU 11TABLEAU DES SEMAINES DE PRESTATIONS

DEMANDES SOUMISES AVANT LE 4 AVRIL 1994Taux de chômage régional

Sem.6 %6 %7 %8 %9 %10 %11 %12 %13 %14 %15 %plusdeetàààààààààdetravailmoins7 %8 %9 %10 %11 %12 %13 %14 %15 %16 %16 %10373911363840123537394113343638404214333537394143153034363840424416273135373941434517242832363840424446182125293337394143454719192226303438404244464820172023273135394143454749211821242832364042444648502219222529333741434547495023202326303438424446485050242124273135394345474950502522252832364044464850505026222528323640444648505050272326293337414547495050502823262933374145475050505029242730343842464850505050302427303438424648505050503125283135394347495050505032252831353943474950505050332629323640444850505050503426293236404448505050505035273033374145495050505050362730333741454950505050503728313438424650505050505038283134384246505050505050392932353943475050505050504029323539434750505050505041303336404448505050505050

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4230333640444850505050505043313437414549505050505050443134374145495050505050504532353842465050505050505046323538424650505050505050473336394347505050505050504833363943475050505050505049343740444850505050505050503437404448505050505050505135384145495050505050505052353841454950505050505050TABLEAU 12

TABLEAU DE SEMAINES DE PRESTATIONS

DEMANDES SOUMISES APRÈS LE 3 AVRIL 1994Taux de chômage régional

Sem.6 %6 %7 %8 %9 %10 %11 %12 %13 %14 %15 %plusdeetààààààààààdetravailmoins7 %8 %9 %10 %11 %12 %13 %14 %15 %16 %16 %122628303213242628303214232527293133152124252729313316202224262830323417182022242628303234181719212325272931333519151719212325272931333520141618202224262830323436211416182022242628303234362215171921232527293133353723151719212325272931333537241618202224262830323436382516182022242628303234363826171921232527293133353739271719212325272931333537392818202224262830323436384029182022242628303234363840301921232527293133353739413119212325272931333537394132202224262830323436384042332022242628303234363840423421232527293133353739414335212325272931333537394143362224262830323436384042443722242628303234363840424438232527293133353739414345

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3924252729313335373941434540242628303234363840424446412527293133353739414345474226283032343638404244464843272931333537394143454749442830323436384042444648504529313335373941434547495046303234363840424446485050473133353739414345474950504832343638404244464850505049333537394143454749505050503436384042444648505050505135373941434547495050505052363840424446485050505050C)Réitérants

Comme on l’a vu à la section 5.C), les réitérants interviennent pour une large part du coût total.

RECOMMANDATION 7 : Du fait que les réitérants sont en grande partie des travailleurs saisonniers et contractuels pour qui l’AC est devenue une forme de supplément de revenu plutôt qu’un régime d’assurance pur, il y aurait lieu de diminuer leur taux de prestation ou d’augmenter le nombre de semaines pendant lesquelles ils doivent travailler pour devenir admissibles à des prestations.

D)Disposition de remboursement des prestationsPour des raisons d’équité et pour renforcer les principes d’assurance, il semblerait souhaitable d’abolir la disposition actuelle de remboursement des prestations. Il est injuste d’exiger des primes élevées de la part des travailleurs à revenu supérieur, afin d’accroître essentiellement leur protection contre une perte d’emploi, tout en leur refusant des prestations complètes lorsqu’ils tombent réellement en chômage. On pourrait défendre, d’une certaine façon, une diminution des prestations dans le cas des réitérants ou des prestataires saisonniers, mais non pour des personnes qui se retrouvent en chômage pour la première fois après une longue période de travail continu.En outre, la disposition actuelle de remboursement de 30 % des prestations est mal structurée. Il peut arriver que des personnes soient toujours en chômage lorsque vient le moment de rembourser. La période comptable annuelle est artificielle. Elle peut avoir des répercussions négatives et différentes sur les chômeurs selon le début de leur période de chômage. Cette disposition est fort mal conçue, même pour les travailleurs saisonniers, puisqu’elle récupère moins de 0,2 % des prestations ordinaires versées.

RECOMMANDATION 8 : Il y aurait lieu d’abolir la disposition de remboursement des prestations, du moins pour ceux qui réclament pour la première fois, et de la remplacer par d’autres caractéristiques du régime qui s’appliqueraient à tous les autres.

9.RECOMMANDATIONS – FINANCEMENT

A)Compte d’AC

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Il n’y a pas de fonds d’AC comme tel. Le compte d’AC est un compte de tenue de livres. Des excédents ou déficits temporaires peuvent survenir lorsque les cotisations des employeurs et des employés sont supérieures ou inférieures au coût total du programme. Ces sommes portent intérêt au taux actuel jusqu’à ce qu’elles soient liquidées. Le déficit ou l’excédent annuel de l’AC fait partie du solde budgétaire du gouvernement. Étant donné que le programme d’AC est entièrement autofinancé, le mécanisme actuel fausse les résultats budgétaires du gouvernement.

RECOMMANDATION 9 : Tout déficit de l’assurance-chômage pourrait être comptabilisé comme un compte à recevoir dans le solde budgétaire du gouvernement. De cette manière, les résultats du programme d’assurance-chômage n’auraient aucune influence sur le déficit du gouvernement. Tout déficit de l’AC est automatiquement et entièrement remboursé par les employeurs et les travailleurs.

B)Révision actuarielleOn ne semble pas tenir compte explicitement des tendances à long terme. Bien que ce genre d’exercice soit secondaire au moment de déterminer les taux, il pourrait largement aider à d’autres fins (par exemple, pour décider du type et du niveau des prestations). En effet, il est très difficile de prévoir les tendances à long terme du chômage et encore plus difficile de prévoir les cycles économiques. En revanche, il est beaucoup plus facile de prédire d’autres variables, comme les tendances démographiques.Le vieillissement de la population active et les augmentations possibles de l’âge normal de la retraite aux fins du Régime de pensions du Canada et du Régime des rentes du Québec représentent d’importants facteurs d’influence qu’il faudrait analyser avant que leurs répercussions se fassent sentir. Une telle analyse actuarielle à long terme pourrait aider les responsables de l’élaboration des politiques publiques. Par exemple, devant le vieillissement de la population active, il deviendra encore plus essentiel de réintégrer sur le marché du travail les personnes âgées en chômage.

RECOMMANDATION 10 : Une nouvelle loi sur l’AC devrait prévoir une analyse actuarielle du programme tous les cinq ans. Un actuaire continuerait de calculer chaque année le taux de cotisation prescrit par la loi, comme l’exigent les articles 48 et 49 de la Loi sur l’assurance-chômage, et proposerait divers taux de cotisation.

C)Mécanisme de détermination des cotisationsLa Loi sur l’AC prévoit l’établissement d’un taux minimal de cotisations si l’on prévoit un déficit accumulé, et un taux maximal si l’on s’attend à un excédent accumulé. Le taux est fixé à un niveau plus (moins) élevé que le taux minimal (maximal) de façon à éliminer le déficit (excédent) sur un nombre défini d’années. Depuis 22 ans, le programme a affiché un excédent 40 % du temps. Le déficit accumulé de 6 milliards de dollars à la fin de 1993 (30 % du coût annuel) n’est pas si onéreux lorsqu’on tient compte de la grave récession qui nous a frappés. Un déficit plus élevé est survenu pendant la récession de 1982-1983 et qui a été éliminé en 1988.Les prestations sont comptabilisées en fonction des prestations versées plutôt que

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réalisées, car il faudrait alors calculer des réserves, même à l’égard de ceux qui ont déjà mis fin à un emploi sans toutefois avoir présenté de demande de prestations. Cette méthode mesure les coûts réels et répond beaucoup mieux à l’objectif d’appariement des coûts et des recettes. Les programmes privés d’assurance fonctionnent de cette façon. Étant donné que le programme d’AC n’a pas pour but de faire l’équilibre entre les recettes et les coûts sur une base annuelle mais plutôt sur une période rétroactive de quelques années, il n’est pas nécessaire de calculer des réserves actuarielles. D’un autre côté, cela permettrait d’évaluer les coûts d’une façon plus précise.

RECOMMANDATION 11 : Le mécanisme de détermination des cotisations pourrait être amélioré de manière à inclure le calcul de réserves actuarielles.

D)Tarification selon la statistiqueÀ l’heure actuelle, tous les employeurs payent le même taux de cotisation. La tarification selon la statistique est une méthode qui fait varier les taux de cotisation d’après le montant des prestations attribuable à chaque employeur. Selon la méthode la plus souvent mentionnée, seuls les employeurs ont des taux différents. D’autres proposent aussi un taux de cotisation variable pour l’employé. D’autres encore proposent que tous les employeurs du même secteur industriel soient assujettis au même taux. La Loi sur l’AC de 1971 prévoyait la tarification selon la statistique. Or, ces dispositions n’ont jamais été mises en vigueur et elles ont par la suite été abrogées. Il y a eu des débats sur l’utilité de la tarification selon la statistique. Par exemple, la Commission MacDonald recommandait cette méthode à l’encontre, cependant, de la Commission Forget.La méthode la plus valable, qui est analysée à l’annexe B, est celle d’un taux de cotisation variable pour chaque employeur. Même si nous y avons rapidement trouvé des avantages, nous avons aussi trouvé de plus en plus d’inconvénients à mesure que nous en avons analysé en profondeur les répercussions. Selon nous, la relation coût-avantage des autres recommandations du rapport est beaucoup plus attrayant que la tarification selon la statistique.

RECOMMANDATION 12 : La tarification selon la statistique ne devrait pas, pour l’instant, être mise en oeuvre, étant donné l’utilité plus grande accordée à d’autres modifications du programme d’AC.

10.RÉAMÉNAGEMENT COMPLET

Au moins deux propositions indiquent qu’il faudrait remplacer en totalité ou en partie le programme d’AC par des régimes complètement différents. D’aucuns ont suggéré de remplacer le programme actuel par un programme d’épargne. On trouvera à l’annexe E une description de la façon dont cela pourrait se faire. Cette analyse est préliminaire et une recherche plus approfondie est nécessaire avant d’en évaluer les avantages.

11.CONCLUSIONS

Il faudrait évaluer soigneusement les répercussions d’une diminution des prestations de l’AC et tenir compte non seulement de l’impact sur les prestataires mais aussi de l’effet des programmes provinciaux d’assistance sociale. Rappelons-nous que l’accroissement du niveau de la pauvreté, la perte de l’estime de soi et l’isolement social chez le chômeur entraînent des coûts économiques et sociaux

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élevés autant pour les individus concernés que pour la société, notamment au chapitre des dépenses de santé, de la criminalité et de la mortalité.L’Institut estime qu’il y aurait lieu d’examiner sérieusement les modifications qu’il propose ici. Nous sommes disposés à offrir une aide supplémentaire, le cas échéant.

12.RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUX SUR L’INSTITUT CANADIEN DES ACTUAIRES (ICA)●Les actuaires sont des spécialistes des affaires qui, grâce à leur formation dans le domaine de la probabilité, de la théorie des risques et de la statistique, appliquent leurs connaissances à résoudre des problèmes qui engendrent une incertitude financière future.●On associe souvent de telles incertitudes à l’assurance incendie, accidents et risques divers et l’assurance-vie, aux régimes de rentes et de pensions, aux régimes d’avantages sociaux ou aux programmes de sécurité sociale.●L’Institut Canadien des Actuaires a été constitué par une loi du Parlement le 18 mars 1965.●L’Institut Canadien des Actuaires est l’organisme professionnel qui regroupe les actuaires au Canada. Il dessert le public en se faisant le porte-parole sur les questions qui ont une importance actuarielle. Il dispose aussi d’un processus d’examen et de discipline, il entretient des relations avec les administrations publiques, d’autres spécialistes et organismes et enfin il favorise la recherche actuarielle.●En septembre 1994, on comptait 1 881 actuaires agréés ou «Fellows» et 1 222 étudiants qui avaient subi avec succès au moins 50 % des examens actuariels.L’adresse de l’ICA et les noms des membres du groupe de travail qui a rédigé le présent rapport se trouvent à l’annexe F.

BIBLIOGRAPHIE1BÉDARD, MICHEL Y., actuaire en chef, DRHC, «Canadian Unemployment Insurance», Notes d’études no 561-22-94 de la Society of Actuaries, 1994.2INSTITUT CANADIEN DES ACTUAIRES, Mémoire à la Commission d’enquête sur l’assurance-chômage (Commission Forget), 1986.3CORAK, MILES, Recours répétés à l’assurance-chômage, L’observateur économique canadien, Statistique Canada, janvier 1992.4CORAK, MILES, Assurance-chômage, mises à pied temporaires et prévisions de rappel, L’observateur économique canadien, Statistique Canada, mai 1994.5GEORGE, DENIS R.J., «Experience Rating Unemployment Insurance», Délibérations de l’Institut Canadien des Actuaires, 1973-1974.6HUNTER, JOHN, L’emploi, un défi : politiques et programmes d’emploi fédéraux, 1900-1990, Gouvernement du Canada, 1993.7KARAGIANNIS, ELIAS, «Experience Rating UI Premiums», Employment and Immigration Canada, 1986.8KESSELMAN, JONATHAN R., «Financing Canadian Unemployment Insurance», Fondation canadienne de la fiscalité, Communication no 73, 1983.9WATSON, A.D., conseiller actuariel pour le ministère de l’Assurance du Canada lors de la première Loi sur l’AC en 1940, «Miscellaneous Notes on Actuarial Procedure in the Field of Unemployment Insurance», 1945.

ANNEXE A

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RÉGIMES PRIVÉS D’ASSURANCE-CHÔMAGE

Il serait sans doute intéressant, au moment d’évaluer l’application des principes d’assurance à l’assurance-chômage, d’envisager certaines caractéristiques des programmes privés d’assurance-chômage au Canada.L’assurance en cas de perte d’emploi, ou assurance-chômage involontaire (ACI) de son nom plus courant, n’est habituellement pas offerte telle quelle, mais est presque toujours liée à une forme quelconque de prêt. On l’offre habituellement de concert avec de l’assurance crédit, par exemple celle relié à l’assurance-vie et à l’assurance invalidité. La principale raison vient du potentiel d’antisélection élevée de la part de l’assuré. Cependant, dans le cas de l’assurance crédit, la portion de l’assurance est secondaire à l’emprunt. De même, les exigences de la souscription par l’institution financière à l’égard des emprunts atténuent dans une certaine mesure le risque d’antisélection, même si quelques assureurs ont subi des pertes élevées avec ce genre de produit.Il est intéressant de souligner que l’assurance crédit protège non seulement l’emprunteur, mais aussi le prêteur d’une défaillance découlant d’une perte de revenu de l’emprunteur. Pour cette raison, il n’est pas rare de trouver aux É.-U. un régime «général» de couverture de l’ACI où tous les emprunteurs sont pris en compte par le régime et l’institution financière acquitte la prime. Au Canada, les programmes d’ACI ont tendance à être volontaires et que la prime d’assurance est versée par l’emprunteur.L’ACI s’applique le plus souvent au solde non réglé des cartes de crédit. Dans ce cas, la prestation correspond habituellement au paiement mensuel minimal. On peut aussi la trouver à l’égard des prêts à tempérament, des prêts hypothécaires, des prêts automobiles et, plus récemment, dans plusieurs programmes de vente immobilière où la prestation sera égale à la totalité ou à une partie du paiement mensuel fixe.Voici quelques caractéristiques clés qui distinguent les programmes privés d’assurance-chômage des programmes publics :●Admissibilité : Il arrivera souvent qu’un programme privé exige comme condition préalable l’admissibilité à l’AC, toutefois il existe un nombre important de distinctions entre les programmes privés et les programmes publics. Les programmes privés n’ont jamais couvert le chômage volontaire, les démissions ou les retraites, car il s’agit d’événements non assurables. L’assurance-chômage a maintenant adopté cette approche. Les programmes privés excluent également la perte d’emploi dont l’assuré avait été informé avant son inscription au régime (ou, situation encore plus onéreuse, sans connaissance préalable de la perte d’emploi). En outre, aucun travailleur autonome n’est couvert. Il y a aussi des restrictions en fonction de l’âge (p. ex., entre 18 et 65 ans).

Plus importante est l’exigence générale qu’un assuré ait travaillé de façon continuelle (30 heures par semaine) pendant les 12 mois précédant immédiatement le début de la couverture et qu’il n’ait pas changé d’employeur plus d’une fois au cours de cette période. En tant que tel, l’exigence liée à l’emploi est plus sévère que l’assurance-chômage. Le critère de 12 mois écarte donc un pourcentage élevé des personnes admissibles à l’assurance-chômage, surtout les travailleurs saisonniers et les jeunes qui changent d’emploi plus

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souvent.●Période de prestations : La période de prestations est fixe peu importe le nombre de semaines travaillées, la région géographique ou le taux de chômage. Habituellement, la période de prestations s’étendra sur six ou 12 mois. Il est estimé que la majorité des prestataires retourneront au travail avant la fin de la période de prestations. Les autres auront suffisamment de temps pour rajuster et restructurer leurs emprunts ou pour vendre leurs biens, et sans doute la résidence principale, si nécessaire.●Période d’exclusion : Il y a habituellement une période d’exclusion de sept à 60 jours. Les prestations peuvent aussi être rétroactives au premier jour du chômage. Cependant, on trouve plus souvent des périodes de prestations non rétroactives de 30 et 60 jours. L’effet de la période d’exclusion est semblable à celui de l’assurance invalidité.●Période initiale de non-prestation : À cause du risque d’antisélection découlant d’une connaissance préalable ou d’une perte d’emploi soupçonnée, certains programmes comportent une période d’attente pouvant aller jusqu’à quatre mois pendant laquelle l’assuré n’est pas couvert.●Prestation maximale : Le montant maximal de la prestation sera égal au moindre du paiement mensuel et d’un montant fixe. Habituellement, la prestation n’a aucun lien direct avec le besoin ou le revenu de l’assuré. Toutefois, elle sera toujours beaucoup moins importante que le revenu de l’assuré étant donné que le montant d’emprunt qu’une personne peut contracter est fondé sur son revenu. Lorsqu’il s’agit d’assurer deux emprunteurs, la prestation est souvent établie au prorata selon le niveau de revenu. Dans certains cas, on pourra verser une prestation complète, mais cela peut déboucher sur une antisélection vu que le travailleur à revenu moins élevé peut toucher un revenu net inférieur au montant de l’emprunt.●Primes : Comme pour tous les autres genres de prestation, les primes sont calculées d’avance selon ce que le marché peut absorber tout en étant justifiées actuariellement, sans, toutefois, tenir compte des déficits antérieurs. Ces primes peuvent fluctuer selon la région géographique mais non en fonction d’autres facteurs comme l’âge ou le sexe, comme on le voit souvent dans d’autres genres d’assurance. Les primes par tranche de 100 $ de prestations mensuelles sont habituellement moins élevées que celles de l’assurance-chômage à cause des restrictions plus rigoureuses dont on a parlé précédemment.●Prestation viagère maximale à vie : Certains programmes comportent une prestation maximale à vie établie à 12 ou 24 mois par exemple, qui a pour but de décourager les réitérants et de restreindre le coût des prestations.

ANNEXE BTARIFICATION SELON LA STATISTIQUE

Une des fonctions importantes de tout régime financier d’assurance-chômage est de répartir les écarts de coût entre les emplois qui génèrent les coûts en question. Les secteurs industriels et les professions/régions, que les variations saisonnières ou cycliques influencent de façon inhabituelle, représentent nos principales préoccupations. Si l’on associe un type d’emploi à un chômage supérieur à la moyenne, compte tenu des produits qu’il génère, il devrait assumer les coûts supplémentaires de la protection de l’AC. Inversement, les types d’emploi qui

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affichent une plus grande stabilité que la moyenne devraient jouir d’un fardeau financier moins lourd.

Jonathan R. Kesselman8

Que l’on soit pour ou contre la tarification selon la statistique semble dépendre des réponses données à plusieurs questions. Lorsque les réponses ne sont pas toutes positives ou négatives, cela dépend de la pondération attribuée à chaque réponse. Voici ces questions :●L’AC renferme-t-elle un nombre suffisant d’éléments d’«assurance» qui lui permettent d’être considérée et évaluée comme un régime d’assurance?●Si l’AC n’est pas un régime d’assurance, la tarification selon la statistique peut-elle servir à changer le comportement des parties de manière qu’elles aient moins tendance à présenter des demandes inutiles?●Si l’on utilise la tarification selon la statistique pour répartir plus équitablement les coûts entre les parties, cette nouvelle répartition est-elle susceptible de favoriser en général l’économie dans son ensemble?

Régime d’assuranceLe document rédigé par l’Institut Canadien des Actuaires2 précise certains principes d’assurance qui pourraient s’appliquer à un régime d’assurance sociale. Nous avons donné un aperçu de ces principes à la section 5.Tout bien considéré, il semble que le programme d’AC soit susceptible de satisfaire quelques-uns des principes d’assurance une partie du temps, mais c’est certainement beaucoup moins que, par exemple, le programme d’indemnisation des accidents du travail, qui sert souvent de point de comparaison. De fait, bon nombre d’experts qualifient le programme d’AC comme un système de paiements de transferts sociaux, dont le premier principe est celui d’acheminer ceux-ci à ceux qui en ont le plus besoin. Le deuxième principe prévoit que, en retour de l’assistance qui leur est accordée, les prestataires doivent s’inscrire à des programmes convenables de recyclage, de perfectionnement et de déplacement ou, à défaut de tout cela, s’engager dans des travaux publics et des oeuvres sociales.

Modification du comportementLorsqu’on cherche à savoir si la tarification selon la statistique est susceptible de changer le comportement des parties en cause, il est utile d’examiner l’expérience aux États-Unis où la tarification selon la statistique existe depuis le début des années 1980. Parmi les objectifs qui ont mené à l’introduction de cette pratique, mentionnons :●encourager l’employeur à régulariser son emploi et, partant, à diminuer le chômage;●attribuer à chaque employeur ses propres coûts de production, lesquels comprennent tous les coûts de chômage selon le concept de la libre entreprise de l’économie de marché; et●faire participer l’employeur à l’administration du programme afin de diminuer le nombre de demandes de prestations frauduleuses ou inutiles.Le premier de ces objectifs a été mis de l’avant à une époque fort différente de celle qu’on connaît aujourd’hui. En effet, il était prévu et même habituel de travailler en permanence pour un employeur. Il n’est donc pas surprenant que les études effectuées depuis cette date n’aient pas permis de constater une corrélation entre la

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stratégie d’un employeur sur le plan des ressources humaines et le coût ou l’épargne découlant de la tarification selon la statistique de l’AC.Le deuxième objectif tente de répartir plus également les coûts entre les employeurs. Cependant, même s’il est méritoire en surface, cet objectif suscite de nombreux problèmes d’application. Les employés les moins qualifiés et les plus susceptibles de se retrouver en chômage ont tendance à passer d’un employeur à l’autre et pas toujours au sein du même secteur industriel. Les systèmes de tarification selon la statistique, qui attribuent le coût des prestations versées à un individu à son dernier employeur, ont uniquement comme conséquence de dissuader l’employeur d’embaucher cette personne au départ.Le chômage est souvent attribuable moins aux activités de l’employeur qu’à l’industrie ou à l’économie en général. En conséquence, l’employeur qui peut le moins survivre à une crise financière constatera que la méthode de tarification selon la statistique fera augmenter ses coûts d’emploi à la suite d’une réduction des effectifs. Aux États-Unis, cette situation a eu pour effet d’obliger de nombreux États à modifier leur programme de tarification selon la statistique afin d’éliminer certaines prestations ou de plafonner les coûts transférés aux employeurs.Le dernier objectif, qui est la participation des employeurs à l’administration, présente aussi des difficultés. La participation des employeurs a largement pour but de contrôler le niveau des prestations. Même si les programmes d’indemnisation des accidents du travail ont connu des résultats encourageants grâce à leurs systèmes de tarification selon la statistique, qui incitent les employeurs à aménager des lieux de travail plus sécuritaires et à participer davantage aux programmes de réadaptation et de recyclage de leurs employés, on ne peut prétendre qu’un programme d’assurance-chômage assorti d’un système de tarification selon la statistique connaîtrait des résultats aussi heureux.Il est habituellement reconnu que la durée des prestations dépend davantage de l’activité économique en général que des pratiques d’emploi d’un employeur. Cependant, un employeur exerce un plus grand contrôle sur la fréquence des prestations que sur leur durée. Pour contenir leurs coûts, les employeurs devraient veiller à mettre à pied les travailleurs les moins admissibles à toucher des prestations de prolongation et à éviter d’embaucher quiconque risque d’être congédié dans l’avenir. Un employeur y gagnerait en utilisant le temps supplémentaire pour absorber une charge de travail plus lourde au lieu d’embaucher des travailleurs à temps partiel ou temporaires. Cela semble d’ailleurs contredire les besoins économiques actuels.

Répartition plus justeConcernant la dernière question, l’argument le plus persuasif en faveur d’une tarification selon la statistique vient des statistiques qui laissent entrevoir un écart important et constant dans les coûts de l’AC entre les divers segments de l’économie. L’administration publique a produit de nombreuses statistiques qui révèlent que les paiements de prestations en pourcentage des salaires et traitements cotisables sont très faibles dans le secteur des finances et de l’assurance et très élevés dans l’industrie des forêts, de la pêche et de la chasse. Denis George signale une similitude aux États-Unis :L’idéologie de base qui sous-tend la répartition des coûts de l’assurance-chômage

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entre chaque employeur repose sur le fait qu’il est équitable pour un employeur type dans une industrie à risque élevé de payer des cotisations plus élevées qu’un employeur type dans une industrie à risque faible... aux États-Unis, ce principe découle d’une idéologie qui autorise les forces du marché dans une économie de libre entreprise à régir la répartition des coûts au moment de déterminer les prix.

Denis George5

On peut examiner cette répartition des coûts selon trois niveaux : par région ou province, par secteur industriel et par employeur.

Répartition par région ou provinceLe programme actuel d’AC procède à une répartition des fonds de l’Ontario et des Prairies vers la Colombie-Britannique, le Québec et les provinces de l’Atlantique. La situation s’explique en partie par la prédominance des industries qui représentent, typiquement, un montant plus élevé de prestations dans certaines provinces que dans d’autres. Cependant, la situation s’explique aussi par la situation économique des régions, la taille des employeurs dans la province (généralement, les gros employeurs connaissent beaucoup moins de prestations que les petits), le degré de diversification industrielle et divers autres facteurs qui se prêtent moins à une analyse statistique. Le système actuel de répartition se traduit par un interfinancement d’où le Québec et les provinces de l’Atlantique ressortent clairement gagnants. Si l’on introduit la tarification selon la statistique au niveau de l’employeur, il faudra alors examiner si l’équilibre des coûts s’est fait en fonction de l’expérience de la région, du secteur industriel ou de l’ensemble des employeurs au Canada.Si l’on décide d’équilibrer les prestations en fonction de celles de la région tout en maintenant la répartition actuelle des coûts, un employeur, connaissant un montant peu élevé de prestations dans les provinces de l’Atlantique pourrait en fait verser une cotisation d’AC inférieure à celle d’un employeur des Prairies qui se trouverait dans une situation semblable. Ou bien, un employeur faisant face à un montant élevé de prestations au Québec pourrait en fait verser la même cotisation qu’un employeur semblable en Ontario qui aurait connu une bien meilleure expérience à ce titre mais qui serait quand même élevée par rapport à celle des autres dans cette dernière province.

Répartition par secteur industrielDu point de vue du secteur industriel, le programme actuel d’AC se traduit aussi par un interfinancement. Les transports, le commerce, les finances, les services socio-communautaires et l’administration publique de même que l’industrie minière ont tendance à subventionner l’agriculture, les forêts, la pêche, la chasse, la fabrication et la construction. La plupart des industries du groupe de subventionnement sont des services tandis que celles du groupe subventionné sont des industries de production ou de fabrication à caractère souvent saisonnier.Les subdivisions des secteurs industriels qui renferment de grosses entreprises ont tendance à subventionner celles qui renferment de petites ou moyennes entreprises. La méthode de la tarification selon la statistique modifierait la répartition des coûts de manière à mieux refléter l’expérience de l’employeur et du secteur industriel. Nos services auraient aussi tendance à devenir plus concurrentiels, mais nos industries de production et de fabrication le deviendraient moins.

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Répartition par employeur«Un tel système (de tarification selon la statistique) équivaut à mettre sur pied un fonds distinct pour chaque entreprise et à laisser le gouvernement établir et appliquer les règles et fournir des services de comptabilité à l’entreprise. La répartition des coûts différentiels exige de l’administration publique qu’elle établisse pour chaque entreprise un compte auquel seraient imputés les crédits (cotisations d’AC) et les débits (prestations d’AC). Par analogie, il faudrait instaurer le même système à l’égard des employés afin de tenir compte des cessations d’emploi qui leur sont attribuables.»

Elias Karagiannis7

Au niveau de l’employeur, la question est de connaître le pourcentage des prestations qu’il faudrait à juste titre attribuer au dernier employeur. Parmi les arguments militant en faveur de la tarification selon la statistique, mentionnons qu’elle assurerait la répartition du coût des prestations entre les employeurs et les secteurs industriels causant pour le plus grand nombre de chômeurs. Ces coûts seraient récupérés soit par une diminution de la marge bénéficiaire, soit par une augmentation du prix des biens ou services produits et inciteraient en quelque sorte les employeurs à modérer certains comportements indésirables comme les mises à pied.Les opposants à la tarification selon la statistique estiment que la plus grande partie du comportement qu’on essaie d’éviter échappe au contrôle de l’employeur. En effet, les mises à pied sont souvent le fait des résultats du secteur industriel et non des employeurs individuels. Dans la pratique, la tarification selon la statistique ne servirait alors qu’à restreindre l’embauche de jeunes travailleurs sans expérience qui ont besoin de dénicher un emploi temporaire pour acquérir une certaine formation.La tarification selon la statistique pourrait aussi devenir une charge sociale ciblée et, de ce fait, réduire l’emploi global. Karagiannis7 a calculé que la tarification selon la statistique diminuerait de 0,2 % le PNB réel. On pourrait s’attendre aujourd’hui à une diminution en pourcentage plus importante étant donné que la proportion de travailleurs à temps partiel et de petites entreprises dans l’économie (tous les deux contribuent aux taux élevés de demandes de prestations) a augmenté considérablement depuis l’étude en question.La complexité des procédures administratives liées à la tarification selon la statistique entraînerait des coûts supplémentaires pour l’administration publique et les employeurs. Beaucoup d’autres arguments justifient la tarification selon la statistique, notamment :●la méthode suscite chez l’employeur un plus grand intérêt au programme d’AC;●elle encourage les employeurs à réduire au minimum les mises à pied temporaires (les experts prétendent souvent que les mises à pied sont le fruit d’une décision conjointe des employeurs et des travailleurs et aussi de l’influence du programme d’AC lui-même4);●elle diminue l’interfinancement.Les faits présentés précédemment nous poussent à recommander, pour l’instant, de ne pas mettre de l’avant la tarification selon la statistique.

ANNEXE C

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COMPARAISON INTERNATIONALE

1)Comparaison globaleNous avons souligné à la section 6 quelques caractéristiques communes à des programmes offerts dans certains pays. Le tableau à la page suivante présente d’autres renseignements. Il ne faudrait toutefois pas sous-estimer le nombre de distinctions qui ressortent entre les pays. Le présent rapport n’a pas pour but de présenter une énumération complète de ces distinctions. Cependant, un exemple pourrait être instructif : l’effet du chômage élevé sur les régimes de retraite et d’invalidité est abordé de façon fort différente en Amérique du Nord, comparativement aux pays d’Europe. En effet, la plupart de ces derniers pays ont réagi en prolongeant l’admissibilité aux termes des programmes conçus pour les retraités ou les handicapés, de manière à atténuer le chômage. Les É.-U. ont adopté une méthode d’approche plus classique, c’est-à-dire qu’ils ont mis en œuvre des remèdes distincts pour aider les chômeurs de longue durée et rejeté les options de programme destinées à étendre l’admissibilité aux régimes publics de retraite ou d’invalidité. Les É.-U. ont plutôt eu pour tendance, dans le passé, de prolonger temporairement la durée des prestations d’AC.

2)FormationMême si le coût global de la formation au Canada est semblable à celui de beaucoup d’autres pays, l’angle d’approche est bien différent au Canada. La plus grande partie des coûts de formation est destinée à un soutien passif, alors que c’est l’opposé en Europe. Le centre d’aide aux travailleurs de Suède compte un plus grand nombre d’agents de placement qu’au Canada, même si la population du Canada est trois fois plus importante. Le Canada compte presque 34 fois plus de prestataires. En Europe, la formation perfectionnée est mieux ciblée et elle s’adresse principalement aux travailleurs âgés.Le système d’apprentissage a aidé l’Allemagne à combiner une puissante économie de marché à un État-providence généreux. Ce qui fonctionne pour une économie à dominance manufacturière comme celle de l’Allemagne ne donnerait pas nécessairement les mêmes résultats dans une économie de services comme celle du Canada. Le régime en Allemagne repose aussi sur un ensemble de relations sociales inexistant au Canada. De plus, le système allemand connaît actuellement quelques difficultés dont certaines à court terme : avec l’unification, une population massive d’Allemands de l’Est mal formés entre actuellement dans le régime et, avec la récession, il y pénurie d’emplois. Mais d’autres problèmes sont plus endémiques :●les stages d’apprentissage n’offrent aucune souplesse et sont désuets (ils sont bons pour produire des travailleurs qualifiés de l’automobile, mais ils le sont beaucoup moins pour des programmeurs informatiques);●production de spécialistes à champs de compétence restreints – les techniques modernes de fabrication exigent des généralistes de plus en plus flexibles;●laisse peu de place au recyclage (ce système suppose que les travailleurs demeureront dans le même emploi toute leur vie); et●dépend d’une collaboration des syndicats ouvriers, notamment une représentation des travailleurs au conseil d’administration des entreprises, et d’une entente salariale d’envergure nationale.

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Le système japonais repose sur une garantie d’emploi à vie dans l’entreprise et sur la volonté de l’employé de se sacrifier complètement pour le bien de l’entreprise. Des observateurs ont fait remarquer que ce système devrait être modifié compte tenu de l’individualisme croissant chez les jeunes.En deux mots, il ne serait pas possible d’appliquer les systèmes de formation de l’Allemagne et du Japon au Canada sans leur apporter des modifications radicales.

ANNEXE DREVUE HISTORIQUE DE LA FORMATION

L’efficience industrielle est fondamentale au développement du Dominion ainsi qu’à la promotion du commerce intérieur et étranger du Canada par rapport aux autres pays et elle ne saurait être mieux servie que si l’on adoptait au Canada les systèmes et les méthodes de formation dans l’industrie et d’enseignement technique les plus perfectionnés.

Commission royale sur l’enseignement industriel et technique, Décret du 1er juin 1910

Quatre-vingt-quatre ans plus tard, ce message est toujours d’actualité. Pour livrer concurrence sur la scène internationale, le Canada doit se doter d’une main-d’oeuvre de qualité. On trouvera ci-après une brève description des différents programmes mis en oeuvre au cours de cette période. La plupart des renseignements proviennent d’un ouvrage de M. John Hunter publié par le gouvernement du Canada.6

En 1910, le gouvernement libéral de Wilfrid Laurier, sur la recommandation de Mackenzie King, alors ministre du Travail, annonçait une Commission royale sur l’enseignement professionnel. Depuis dix ans, le milieu des affaires et les organisations syndicales favorisaient de telles mesures. Adoptée en 1913, la Loi sur l’instruction agricole prévoyait des subventions de 10 millions de dollars à répartir sur une période de dix ans entre les provinces pour favoriser l’instruction dans le domaine de l’agriculture. La guerre a convaincu la plupart des gens que le gouvernement fédéral devait prendre une part beaucoup plus active sur le marché du travail. Le 7 juillet 1919, il adoptait la Loi sur l’enseignement technique, un programme de dix ans assorti de crédits de 10 millions de dollars. Le gouvernement fédéral absorbait 50 % du coût des dépenses provinciales approuvées à ce titre.Des progrès énormes sont survenus pendant cette période. Le nombre de municipalités offrant des cours de formation professionnelle de jour est passé de 32 à 89 et le nombre de places offertes aux étudiants, de 60 546 à 121 252. Dans une large mesure, ces programmes reposaient sur la disponibilité des crédits fédéraux. Lorsque les largesses du gouvernement central s’épuisaient, les programmes prenaient habituellement fin. Les provinces qui ont choisi de continuer les programmes ont critiqué le gouvernement fédéral de les avoir attirées dans de nouveaux programmes permanents pour ensuite leur en laisser le financement.Des pressions énormes continuaient d’être exercées pour que le gouvernement fédéral poursuive son assistance. Cependant, Mackenzie King, premier ministre de l’époque, annonçait que son gouvernement ne prolongerait pas son assistance. Cette décision faisait suite aux recommandations de la Commission royale qui avait proposé un programme de dix ans comme mesure temporaire visant à aider les

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provinces à absorber les coûts de démarrage. Le gouvernement King faisait cependant une concession : les provinces qui n’avaient pas dépensé tous les crédits qui leur étaient attribuables en 1929 (toutes les provinces sauf l’Ontario) pourraient continuer de recevoir des fonds du gouvernement fédéral. La dernière province à épuiser ses crédits a été le Manitoba en 1948.L’une des promesses électorales du Parti conservateur, qui est revenu au pouvoir en août 1930, était de renouveler l’aide à l’éducation technique. En mai 1931, il adoptait la Loi sur l’éducation professionnelle qui prévoyait des subventions annuelles totales de 750 000 $ aux provinces sur une période de 15 ans.La situation exceptionnelle de la Dépression et l’absence d’assurance-chômage au Canada ont obligé le gouvernement de Mackenzie King, après son retour au pouvoir en 1935, à accorder des subventions et des prêts aux provinces pour les aider à faire face aux coûts de bien-être social et autres dépenses du genre.Plusieurs initiatives de formation entreprises pendant la Dépression se sont poursuivies dans les années 40. Quelques programmes ont été adaptés aux besoins de la guerre. La Loi sur la coordination de la formation professionnelle, adoptée en août 1942, abrogeait la Loi sur l’éducation professionnelle de 1931. À l’encontre des lois antérieures, celle-ci ne prévoyait aucun financement particulier. Les principales ententes fédérales-provinciales conclues aux termes de cette loi comprenaient :●Entente sur la formation d’apprentissage (1944), qui s’est poursuivie pendant 20 ans;●Entente sur la formation de rétablissement (1945), qui a pris fin en 1948 à cause du faible taux d’inscription; et●Entente d’aide aux écoles professionnelles (1945), qui a accordé 2 millions de dollars par année pendant dix ans tout en offrant une autre tranche de 10 millions de dollars sur une période de trois ans aux fins des coûts en capital. Les provinces devaient cependant fournir une contrepartie égale. L’entente a par la suite été prolongée jusqu’en 1957.Entre 1948 et 1953, les inscriptions dans les écoles professionnelles ont doublé, passant de 125 000 à 250 000. À première vue, le Canada semblait connaître le succès. Cependant, bon nombre des ressources se sont dirigées vers les cours commerciaux et d’économie domestique dont les dépenses d’enseignement étaient peu élevées. Les provinces ont eu aussi tendance à concentrer les dépenses sur les écoles professionnelles secondaires et à s’attarder très peu aux instituts, c’est-à-dire les centres de formation conçus pour dispenser les compétences pratiques et les connaissances nécessaires pour entrer directement sur le marché du travail. C’est d’ailleurs ce genre de centres de formation qui avaient impressionné la Commission royale pendant son séjour en Europe. Dans son rapport de 1913, la Commission royale avait vivement recommandé au Canada qu’il prenne des mesures immédiates afin de créer quelques instituts de ce genre.En janvier 1957, la Commission royale d’enquête sur les perceptives économiques du Canada (la Commission Gordon) publiait son rapport préliminaire dans lequel elle recommandait de corriger une pénurie prévue de main-d’oeuvre qualifiée, d’agrandir les écoles techniques et professionnelles de niveau secondaire et d’en créer de nouvelles et de mettre sur pied des écoles techniques postsecondaires. Plus

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tard en 1957, deux mesures ont été prises. En premier lieu, on remaniait l’Entente d’aide aux écoles professionnelles. Cette entente mettait l’accent sur la formation des gens de métiers et des techniciens et offrait aux provinces 40 millions sur cinq ans au lieu de 30 millions sur dix ans. En deuxième lieu, elle aidait à créer un Comité consultatif national sur le changement technologique. Même si les dépenses augmentaient, le pays n’était toujours pas en mesure de produire suffisamment de travailleurs qualifiés pour répondre aux besoins du marché du travail. C’est par l’immigration qu’on a réussi à satisfaire la demande. Les Canadiens éprouvaient des difficultés à obtenir la formation nécessaire pour entrer sur le marché du travail ou le réintégrer si leurs compétences ou leurs connaissances devenaient désuètes. La création du Programme du sceau rouge a constitué un autre jalon important. Aux termes de cette initiative, il était plus facile pour les travailleurs spécialisés dans les métiers réglementés de trouver des emplois dans d’autres régions du pays.Le chômage élevé au début des années 60 a entraîné une vaste augmentation des dépenses au chapitre de la formation professionnelle. Pour la plus grande partie des années 50, le gouvernement fédéral avait dépensé en moyenne 4 millions de dollars chaque année. En 1959-1960, ses dépenses passaient à 8 millions de dollars. Même en doublant les dépenses, il était apparent que le Canada avait besoin de dispenser une formation professionnelle beaucoup plus abondante que dans le passé.En novembre 1960, on adoptait la Loi sur la coordination de la formation professionnelle. Michael Starr, ministre du Travail, a souligné que la loi pourrait augmenter sensiblement les fonds fédéraux acheminés aux provinces et espérait, en retour, que celles-ci seraient plus sensibilisées aux préoccupations du gouvernement fédéral. La loi prévoyait quelques encouragements monétaires pratiques conçus pour inciter les provinces à prendre des mesures en ce sens. Par exemple, la part du gouvernement fédéral passerait de 50 % à 75 % pour la formation des travailleurs en chômage si la province dépassait un ratio correspondant au nombre de jours de formation dispensée par rapport à la taille de la population active. La loi éliminait les attributions provinciales de sorte que les provinces pouvaient, dans les faits, se faire l’une l’autre concurrence pour obtenir les deniers que le ministère du Travail pouvait arracher du Conseil du Trésor. Ces encouragements monétaires ont eu des répercussions très profondes.Le 20 décembre 1960, la Loi sur l’assistance à la formation technique et professionnelle venait remplacer la Loi sur la coordination de la formation professionnelle. L’aide financière et les autres formes de soutien des programmes de formation se sont poursuivies mais non la répartition des anciens contingents dans chaque province. On étendait aussi la portée de la loi. Le nombre de travailleurs recevant une formation est passé de quelques milliers à la fin des années 50 à 27 000 en 1961-1962, à presque 50 000 en 1962-1963 et à près de 100 000 en 1965-1966.La plus grande partie des cours de formation financés par le gouvernement du Canada étaient dispensés en établissement plutôt que dans l’industrie. De fait, 95 % des dépenses, sauf en ce qui concerne les stages d’apprentissage, ont profité à la formation institutionnelle, par opposition aux États-Unis où 80 % des subventions

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de l’État ont été dirigées vers la formation dans l’industrie. Avec l’adoption de la Loi sur la formation professionnelle des adultes en avril 1967, la formation en cours d’emploi commençait à prendre de l’importance. Il était possible de verser des allocations aux stagiaires qui avaient été sur le marché du travail pour au moins trois ans ou qui avaient des personnes à leur charge. Au cours des quelques années qui ont suivi, les dépenses annuelles à ce titre ont atteint en moyenne 300 millions de dollars. La période du début des années 70 a été témoin de nombreux programmes innovateurs : Formation en cours d’emploi pour contrer la pénurie de travailleurs qualifiés (FEPTQ), Formation en cours d’emploi pour des travailleurs défavorisés (FETD), Programme d’adaptation au travail (PAT), Programme de formation préparatoire à l’emploi (PFPE) et Programme de perfectionnement de la formation (PPF).Le Programme de formation et d’expérience professionnelles (PFEP), mis de l’avant en septembre 1977, était destiné aux chômeurs de moins de 25 ans qui avaient laissé l’école depuis trois à 24 mois. On a rapidement démantelé le programme puisqu’on a eu l’impression qu’un pourcentage important des jeunes auraient bien pu avoir été embauchés sans aucune subvention salariale.Au milieu des années 70, le sous-ministre Allan Gotlieb procédait à un vaste examen des programmes de formation. Plusieurs spécialistes ont passé en revue ces programmes. Une étude, celle de Morley Gunderson, était typique. Elle louangeait la souplesse et l’adaptabilité aux nouveaux besoins et aux techniques de formation que les programmes avaient révélés, mais se demandait si la société et l’économie recevaient des bénéfices correspondant aux coûts importants qui étaient engagés. L’étude terminait en précisant le besoin de dispenser plus de formation dans certains secteurs de pénurie, surtout auprès des cols bleus. On a alors créé en 1979 la Formation dans les métiers en pénurie de main-d’oeuvre spécialisée (FMPMS).Au début des années 80 étaient créés deux groupes de travail. Le Rapport Dodge concluait que l’enthousiasme manifesté à l’égard de la formation au cours des années 60 et 70 avait en grande partie disparu. Si la formation pouvait répondre à certains besoins du marché du travail, les différentes politiques d’emploi permettaient de mieux satisfaire à d’autres besoins. Le Rapport Allmand ne partageait pas l’opinion du Rapport Dodge puisqu’il aurait maintenu ou même étendu les activités de formation.De 1979-1980 à 1984-1985, les dépenses de formation augmentaient de 61 %. Presque tous les crédits ont été consacrés à la formation générale en 1979-1980, tandis que ce pourcentage baissait à seulement 35 % dès 1984-1985, la principale modification au cours de cette période étant le remplacement de la Loi sur la formation professionnelle des adultes par la Loi nationale sur la formation en 1982. Cette dernière loi conservait la formation institutionnelle et industrielle mais y ajoutait le Fonds d’accroissement des compétences professionnelles (FACP). Le FACP avait pour but de moderniser et d’étendre les installations de formation. En un sens, on retournait à la philosophie du début des années 60. Le FACP a été mis au rancart en 1984-1985.Bon nombre de rapports ont vu le jour dans les années qui ont suivi. Le Rapport Nielsen, tout comme le Rapport Dodge, était sceptique au sujet de la valeur de

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certains types de formation professionnelle. Les autres rapports (Commission royale MacDonald, la Commission de la Chambre et la Commission Forget), bien que plus optimistes au sujet de la valeur de la formation, voulaient toujours qu’elle soit plus adaptée aux besoins du marché du travail. Il est intéressant de souligner qu’aucun des rapports n’a considéré la formation comme une des principales solutions aux niveaux élevés de chômage.«Tout est mouvement, rien ne reste immobile.»

Héraclite, VIe siècle, av. J.-C.ANNEXE E

FIDUCIE ENREGISTRÉE D’ÉPARGNE-CHÔMAGE (FEÉC)Un régime d’assurance-chômage bien conçu encouragerait et récompenserait la participation au marché du travail. Un programme d’accumulation du capital accomplirait ce rôle. Dans un tel programme, les cotisations des employeurs et des travailleurs seraient déposées dans un compte d’une fiducie enregistrée d’épargne-chômage (FEÉC). Ce compte serait à l’abri de l’impôt et les placements seraient faits à la seule discrétion du travailleur, tout comme dans un REÉR collectif. Ce programme serait obligatoire pour tous les travailleurs et remplacerait le programme actuel d’AC.Les travailleurs qui perdraient leur emploi pourraient effectuer des retraits entièrement imposables de leur propre compte FEÉC, dans les limites prévues par la loi. Le taux de cotisation au FEÉC pourrait correspondre au départ au taux actuel de l’assurance-chômage (4,2 % de la rémunération assurable pour l’employeur et 3,0 % pour les travailleurs). Par ailleurs, le taux de cotisation pourrait être établi au taux actuel puis rectifié à la baisse sur une période de trois à cinq ans afin de devenir un taux stable à long terme (p. ex., 3,5 % de la rémunération assurable pour l’employeur et 2,5 % pour les travailleurs).

AVANTAGES

●Encouragement à trouver rapidement un nouvel emploi afin de ne pas diminuer l’actif personnel accumulé.●Les travailleurs ayant une longue durée d’emploi jouiront d’un important capital au moment de la retraite.●Administration très réduite.●Aucune répercussion financière pour le gouvernement.●Le compte FEÉC favorise les changements et le recyclage en cours de carrière.●Élimine l’encouragement financier que les réitérants trouvent dans l’assurance-chômage.●Permet la couverture des travailleurs autonomes et des travailleurs à temps partiel.

Nous avons comparé le nombre de semaines de prestations maximales auxquelles aurait droit une personne de 25 ans qui n’effectue aucun prélèvement dans son compte FEÉC, et une autre personne du même âge qui perçoit des prestations maximales tous les deux ans aux termes du programme actuel d’AC et du projet de régime FEÉC.

Nombre prévu de semaines de prestations – aucune demandeAnnéeProgramme actuel d’ACProgramme FEÉC

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150,07,1250,014,4350,022,1450,030,0550,038,21050,084,41550,0140,12050,0207,53050,0387,04050,0648,8

Nombre prévu de semaines de prestations – réitérants tous les deux ans

AnnéeProgramme actuel d’ACProgramme FEÉC150,012,6250,012,6350,012,6450,012,6550,012,61050,012,61550,012,62050,012,63050,012,64050,012,6

AUTRES FACTEURS À CONSIDÉRER

●Coordination avec le RPC/RRQ – ce programme pourrait être coordonné avec le régime de pensions du Canada et le Régime de rentes du Québec afin d’accroître la sécurité du revenu au moment de la retraite.●Souplesse – l’existence d’un compte d’épargne favoriserait la création de nombreux programmes spéciaux faisant appel à ce genre de capitaux (p.ex., un régime d’accession à la propriété).●Marché financier – l’épargne accumulée représenterait une source importante de fonds qui pourrait satisfaire les besoins du marché public et privé.●Habilitation des individus – le programme permettrait aux travailleurs de retirer de leur compte des sommes pour répondre à leurs propres besoins et à ceux de leur famille (p.ex., congé de maladie, congé de maternité/paternité, formation).

ANNEXE F

Des copies supplémentaires sont disponibles. Veuillez communiquer avec :L’Institut Canadien des Actuaires

360, rue Albert, bureau 820Ottawa (Ontario)

K1R 7X7OÙ

Téléphone : (613) 236-8196

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Télécopieur : (613) 233-4552