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MOTIFS DOSSIER ALTRAN Dans des conclusions déposées in limine litis, les avocats de Hubert MARTIGNY, de la société Altran Technologies, de Alexis KNIAZEFF et de Frédéric BONAN demandent au Tribunal de prononcer la nullité de l'ordonnance de renvoi en date du 29 novembre 2011. À l'audience du 15 janvier 2014, les avocats de Michel FRIEDLANDER, de Herbert MASSENET, de Alain ROUGAGNOU, de Jean-Michel MARTIN et de Christian DAUPRAT ont indiqué s'associer à cette demande. I - Les principes applicables : Il résulte de la combinaison des articles 184 et 385 du Code de Procédure Pénale que l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel doit mettre les prévenus en mesure de connaître, chacun en ce qui le concerne, d'une manière précise et détaillée, les faits et les qualifications légales qui leur sont reprochés. L'information précise et complète des faits imputés à chaque prévenu pris individuellement et de leur qualification juridique répond à l'exigence de motivation prévue par l'article 184 du Code de Procédure Pénale et est ainsi une condition essentielle de l'équité de la procédure et une condition nécessaire à la préparation utile de la défense de chacun des prévenus, au regard de l'article préliminaire du Code de Procédure Pénale et de l'article 6-3 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales. II - L'application de ces principes au cas d'espèce : A) Sur les faits de diffusion d'informations fausses ou trompeuses et de complicité de diffusion d'informations fausses ou trompeuses : Alexis KNIAZEFF, Hubert MARTIGNY et la personne morale Altran Technologies sont renvoyés pour avoir, à PARIS, courant 2001 et 2002, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non prescrit, commis le délit de diffusion d'informations fausses ou trompeuses sur les perspectives et la situation de sociétés du groupe Altran, notamment les sociétés Altior, Alplog, Lore, Asi, Segime et Altran Technologies, par l'amélioration du chiffre d'affaires de ces sociétés et la dissimulation de leur réelle situation financière. Herbert MASSENET, Alain ROUGAGNOU, Frédéric BONAN, Jean-Michel MARTIN, Michel FRIEDLANDER sont renvoyés pour s'être, à PARIS, courant 2001 et 2002, en tout cas sur le territoire national, rendu complice, par aide et assistance du délit, commis par Messieurs KNIAZEFF et MARTIGNY et la société Altran Technologies, de diffusion d'informations fausses ou trompeuses sur les perspectives et la situation de sociétés du groupe Altran, notamment les sociétés Altior, Alplog, Lore, Asi, Segime et Altran Technologies, par l'amélioration du chiffre d'affaires de ces sociétés et la dissimulation de leur réelle situation financière. Christian DAUPRAT est renvoyé pour s'être, à PARIS courant 2001 et 2002 , en tout cas sur le territoire national et depuis temps non prescrit, rendu complice, par aide et assistance, du délit, commis par Messieurs KNIAZEFF et MARTIGNY et la société Altran Technologies, de diffusion d'informations fausses ou trompeuses sur les perspectives et la situation de sociétés du groupe Altran, notamment les sociétés Sivan Consulting, Lore et Altran Technologies, par l'amélioration du chiffre d'affaires de ces sociétés et la dissimulation de leur réelle situation financière. Le Tribunal développe, en premier lieu, les observations suivantes : Hubert MARTIGNY avait été mis en examen des chefs de diffusion d'informations fausses ou trompeuses sur les perspectives et la situation des sociétés Sivan et Altran Technologies et de complicité de diffusion d'informations fausses ou trompeuses par aide ou assistance, notamment pour les sociétés Altior, Alplog, Lore, Asi, Segime, par l'amélioration du chiffre d'affaires de ces sociétés et la dissimulation de leur réelle situation financière. Or, comme le fait justement observer l'avocat de Hubert MARTIGNY dans ses conclusions déposées in limine litis, il est renvoyé comme auteur principal sans qu'aucun motif de requalification ait été développé. Par ailleurs, la société Sivan Consulting n'apparaît plus dans la liste des sociétés visées par le renvoi et ce sans qu'un non-lieu partiel soit intervenu. De même, la société Sivan Consulting n'apparaît plus dans la liste des sociétés visées par le renvoi concernant Messieurs Alexis KNIAZEFF, Frédéric BONAN, Jean-Michel MARTIN et Michel FRIEDLANDER alors qu'elle était pourtant expressément visée dans la mise en examen et ce, là encore, sans qu'un non-lieu soit intervenu.

Motivations Altran

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Page 1: Motivations Altran

MOTIFS DOSSIER ALTRAN Dans des conclusions déposées in limine litis, les avocats de Hubert MARTIGNY, de la société Altran Technologies, de

Alexis KNIAZEFF et de Frédéric BONAN demandent au Tribunal de prononcer la nullité de l'ordonnance de renvoi en

date du 29 novembre 2011.

À l'audience du 15 janvier 2014, les avocats de Michel FRIEDLANDER, de Herbert MASSENET, de Alain

ROUGAGNOU, de Jean-Michel MARTIN et de Christian DAUPRAT ont indiqué s'associer à cette demande.

I - Les principes applicables :

Il résulte de la combinaison des articles 184 et 385 du Code de Procédure Pénale que l'ordonnance de renvoi devant le

tribunal correctionnel doit mettre les prévenus en mesure de connaître, chacun en ce qui le concerne, d'une manière

précise et détaillée, les faits et les qualifications légales qui leur sont reprochés.

L'information précise et complète des faits imputés à chaque prévenu pris individuellement et de leur qualification

juridique répond à l'exigence de motivation prévue par l'article 184 du Code de Procédure Pénale et est ainsi une

condition essentielle de l'équité de la procédure et une condition nécessaire à la préparation utile de la défense de chacun

des prévenus, au regard de l'article préliminaire du Code de Procédure Pénale et de l'article 6-3 de la Convention

Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales.

II - L'application de ces principes au cas d'espèce :

A) Sur les faits de diffusion d'informations fausses ou trompeuses et de complicité de diffusion d'informations

fausses ou trompeuses :

Alexis KNIAZEFF, Hubert MARTIGNY et la personne morale Altran Technologies sont renvoyés pour avoir, à PARIS,

courant 2001 et 2002, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non prescrit, commis le délit de diffusion

d'informations fausses ou trompeuses sur les perspectives et la situation de sociétés du groupe Altran, notamment les

sociétés Altior, Alplog, Lore, Asi, Segime et Altran Technologies, par l'amélioration du chiffre d'affaires de ces sociétés et

la dissimulation de leur réelle situation financière.

Herbert MASSENET, Alain ROUGAGNOU, Frédéric BONAN, Jean-Michel MARTIN, Michel FRIEDLANDER sont

renvoyés pour s'être, à PARIS, courant 2001 et 2002, en tout cas sur le territoire national, rendu complice, par aide et

assistance du délit, commis par Messieurs KNIAZEFF et MARTIGNY et la société Altran Technologies, de diffusion

d'informations fausses ou trompeuses sur les perspectives et la situation de sociétés du groupe Altran, notamment les

sociétés Altior, Alplog, Lore, Asi, Segime et Altran Technologies, par l'amélioration du chiffre d'affaires de ces sociétés et

la dissimulation de leur réelle situation financière.

Christian DAUPRAT est renvoyé pour s'être, à PARIS courant 2001 et 2002 , en tout cas sur le territoire national et

depuis temps non prescrit, rendu complice, par aide et assistance, du délit, commis par Messieurs KNIAZEFF et

MARTIGNY et la société Altran Technologies, de diffusion d'informations fausses ou trompeuses sur les perspectives et

la situation de sociétés du groupe Altran, notamment les sociétés Sivan Consulting, Lore et Altran Technologies, par

l'amélioration du chiffre d'affaires de ces sociétés et la dissimulation de leur réelle situation financière.

Le Tribunal développe, en premier lieu, les observations suivantes :

Hubert MARTIGNY avait été mis en examen des chefs de diffusion d'informations fausses ou trompeuses sur les

perspectives et la situation des sociétés Sivan et Altran Technologies et de complicité de diffusion d'informations fausses

ou trompeuses par aide ou assistance, notamment pour les sociétés Altior, Alplog, Lore, Asi, Segime, par l'amélioration

du chiffre d'affaires de ces sociétés et la dissimulation de leur réelle situation financière.

Or, comme le fait justement observer l'avocat de Hubert MARTIGNY dans ses conclusions déposées in limine litis, il est

renvoyé comme auteur principal sans qu'aucun motif de requalification ait été développé. Par ailleurs, la société Sivan

Consulting n'apparaît plus dans la liste des sociétés visées par le renvoi et ce sans qu'un non-lieu partiel soit intervenu.

De même, la société Sivan Consulting n'apparaît plus dans la liste des sociétés visées par le renvoi concernant Messieurs

Alexis KNIAZEFF, Frédéric BONAN, Jean-Michel MARTIN et Michel FRIEDLANDER alors qu'elle était pourtant

expressément visée dans la mise en examen et ce, là encore, sans qu'un non-lieu soit intervenu.

Page 2: Motivations Altran

En outre, la société Altran Technologies, qui avait été également mise en examen pour des faits commis courant

2000, n'est pas renvoyée pour des faits commis durant cette année et ce, une fois de plus, sans qu'aucun non-lieu soit

intervenu.

Christian DAUPRAT est enfin renvoyé en qualité de complice de 3 auteurs principaux (Alexis KNIAZEFF, Hubert

MARTIGNY et la société Altran Technologies) et de faits concernant, en particulier, la société Sivan Consulting, faits

pour lesquels les trois auteurs principaux ne sont nullement renvoyés devant la juridiction correctionnelle.

Le Tribunal observe, en second lieu, que, ainsi que le font justement observer les avocats de Hubert MARTIGNY, de la

société Altran Technologies et d'Alexis KNIAZEFF dans leurs conclusions déposées in limine litis, l'ordonnance de

renvoi n'énumère, à aucun moment, ni dans ses motifs, ni dans son dispositif, les divers supports ayant servi à répandre,

au sein du public, ces informations fausses ou trompeuses.

L'ordonnance de renvoi du 29 novembre 2011 ayant adopté les entiers motifs du réquisitoire définitif du 29 juin 2011, le

Tribunal doit se référer à ce réquisitoire pour constater que, dans ses motifs, sont visés, au titre du délit de diffusion

d'informations fausses ou trompeuses :

- l'annonce, à l'assemblée générale du 18 juin 2002 par Michel FRIEDLANDER d'un taux d'intercontrat de 5 % au sein

du groupe Altran, annonce confirmée dans un communiqué de presse établi par ses soins et diffusé par Altran le 10

octobre 2002, en réaction à la publication de l'article du Monde ;

- le communiqué du groupe Altran du 9 avril 2002 présentant les résultats au 31 décembre 2001, émanant de Michel

FRIEDLANDER, dans sa partie relative au montant du cash-flow, à la capacité d'autofinancement du groupe et à ses

besoins en fonds de roulement dont le contenu était très largement inexact dans la mesure où Altran n'avait pas mentionné

des cessions de créances professionnelles de l'ordre de 53 M €.

Or, dans le dispositif de l'ordonnance de renvoi, il est indiqué que le caractère faux ou trompeur des informations

diffusées portait sur le chiffre d'affaires et la réelle situation financière de certaines sociétés du groupe Altran.

Il ressort des pièces du dossier que ces informations, relatives au chiffre d'affaires et à la situation financière du groupe

Altran, ont été diffusées, non par l'annonce et les communiqués susvisés portant sur le taux d'activité des consultants et

les besoins en fonds de roulement du groupe au 31 décembre 2001, mais par des communiqués faisant référence au

chiffre d'affaires et aux taux de croissance, ne correspondant pas à la réalité en raison de l'existence de pratiques visant à

augmenter artificiellement le chiffre d'affaires et le résultat du groupe Altran :

- communiqué du 5 février 2002 sur le chiffre d'affaires au 31 décembre 2001 ;

- lettre aux actionnaires n°3 de février 2002 reprenant le communiqué du 5 février 2002 ;

- communiqué du 9 avril 2002 sur le résultat net au 31 décembre 2001 ;

- communiqué du 14 mai 2002 sur le chiffre d'affaires au 1er semestre 2002 ;

- lettre aux actionnaires n°4 du 14 mai 2002 reprenant le communiqué du 14 mai 2002 ;

- communiqué du 23 juillet 2002 sur le chiffre d'affaires du premier semestre 2002.

Il convient également de constater que Herbert MASSENET et Christian DAUPRAT n'ont pour leur part jamais été

interrogés par le magistrat instructeur sur l'annonce relative au taux d'inter-contrat et sur le communiqué relatif aux

besoins en fonds de roulement du groupe Altran au 31 décembre 2001. Jean-Michel MARTIN n'a, quant à lui, jamais été

interrogé par le magistrat instructeur sur le communiqué relatif aux besoins en fonds de roulement.

Il résulte de l'ensemble de ces observations et spécialement de la contradiction existant entre les motifs du réquisitoire

définitif auxquels se réfère l'ordonnance de renvoi et le dispositif de cette dernière que les prévenus n'étaient pas en

mesure de connaître, de manière précise et détaillée, les faits qui leur étaient reprochés puisqu'ils ne pouvaient pas savoir

s'ils devaient s'expliquer sur des faits relatifs à la diffusion d'informations fausses ou trompeuses concernant le taux

d'intercontrat et les besoins en fonds de roulement du groupe Altran ou sur des faits relatifs à la diffusion d'informations

fausses ou trompeuses concernant le taux de croissance du chiffre d'affaires et du résultat du groupe Altran.

Cette incertitude les mettait nécessairement dans l'impossibilité de préparer utilement leur défense au regard de la

prévention de diffusion d'informations fausses ou trompeuses et de celle de complicité de diffusion d'informations fausses

ou trompeuses.

B) Sur les faits de faux et d'usage de faux et de complicité de ces délits :

Page 3: Motivations Altran

Herbert MASSENET, Alain ROUGAGNOU, Frédéric BONAN, Alexis KNIAZEFF, Hubert MARTIGNY, Jean-Michel

MARTIN, Michel FRIEDLANDER et la société Altran Technologies sont renvoyés pour avoir, à PARIS, courant 2001 et

2002, en tous cas sur le territoire national et depuis temps non prescrit, par quelque moyen que ce soit, altéré

frauduleusement la vérité dans un écrit ou tout autre support de la pensée destiné à établir la preuve d'un droit ou d'un fait

ayant des conséquences juridiques, en l'espèce en créant de fausses factures à établir et de fausses pièces justificatives

afin d'améliorer le chiffre d'affaires et le résultat de sociétés du groupe Altran, notamment les sociétés Altior, Alplog,

Lore, Asi, Segime et Altran Technologies et d'avoir fait usage desdits faux.

Christian DAUPRAT est pour sa part renvoyé pour s'être, à PARIS courant 2001 et 2002, en tous cas sur le territoire

national et depuis temps non prescrit, rendu complice des délits de faux et d'usage de faux commis par la société Altran

Technologies, Messieurs ROUGAGNOU, MASSENET, MARTIN, BONAN, KNIAZEFF, MARTIGNY et

FRIEDLANDER, par aide et assistance, en l'espèce la régularisation de faux courriers, de contrats, de faux bons de

commande et de faux accusés de réception antidatés.

Le Tribunal développe, en premier lieu, les observations suivantes :

Dans la liste des sociétés visées au moment de la mise en examen pour ce chef de prévention de Frédéric BONAN, Alexis

KNIAZEFF, Hubert MARTIGNY, Jean-Michel MARTIN et Michel FRIEDLANDER, était mentionnée la société Sivan

Consulting. Cette société ne figure plus dans la liste visée par les qualifications de renvoi concernant les prévenus précités

et ce sans qu'un non lieu soit intervenu.

De plus, la personne morale Altran Technologies a été mise en examen pour des faits de faux et usage de faux commis en

2000, 2001 et 2002 alors qu'elle est renvoyée pour des faits commis en 2001 et 2002 et ce sans qu'un non-lieu soit

intervenu s'agissant des faits commis en 2000.

De même, Christian DAUPRAT a été mis en examen des chefs de complicité de faux et d'usage de faux, mais également

de faux et d'usage de faux et est renvoyé du seul chef de complicité de faux et d'usage de faux sans qu'une mesure de

requalification ou un non-lieu soit intervenu.

Le Tribunal observe, en second lieu, que le magistrat instructeur a indiqué, conformément d'ailleurs aux réquisitions du

Parquet, dans les motifs de l'ordonnance de renvoi et au sein d'un paragraphe intitulé "REQUALIFICATION", s'agissant

des "faux et usage de faux courant 2001" :

« compte tenu de ce que les faits qualifiés de présentation de comptes infidèles, commis courant 2001, recouvrent

matériellement les faits de faux et d'usage de faux commis au cours de cette même période, lesquels avaient notamment

pour objet de permettre la commission du premier délit, il convient de requalifier les faits poursuivis sous les

qualifications de faux et d'usage de faux pour ce qui concerne ladite période, en faits de présentation de comptes

infidèles,

QUALIFIONS en ce sens ; »

Or, le magistrat instructeur a toutefois renvoyé les prévenus pour des faits de faux et d'usage de faux et de complicité de

ces faits commis en 2001.

Il existe, là encore, ainsi que le fait justement observer l'avocat de Hubert MARTIGNY dans ses conclusions déposées in

limine litis, une contradiction entre les motifs de l'ordonnance de renvoi et son dispositif qui mettait les prévenus dans

l'impossibilité de savoir s'ils allaient devoir s'expliquer sur la création de fausses factures à établir et de fausses pièces

justificatives au sein des sociétés Altior, Alplog, Lore, Asi, Segime et Altran Technologies et sur l'usage de ces faux en

2001 et 2002 ou seulement au cours de l'année 2002. Cette incertitude les mettait nécessairement dans l'impossibilité de

préparer utilement leur défense s'agissant des préventions de faux et d'usage de faux et de complicité de ces délits.

C) Sur les faits de présentation de comptes infidèles et de complicité de présentation de comptes infidèles :

Alain ROUGAGNOU et Hubert MARTIGNY sont renvoyés pour avoir, à PARIS, courant 2001 et 2002, en tous cas sur le

territoire national et depuis temps non prescrit, étant administrateur de la société Altran Technologies, sciemment présenté

aux actionnaires des comptes annuels ne donnant pas une image fidèle du résultat des opérations de l'exercice, de la

situation financière et du patrimoine à l'expiration de cette période, en l'espèce en présentant des comptes infidèles pour

les exercices clos au 31 décembre 2001 des sociétés Segime, Altior, Altran Technologies, Lore, Sivan Consulting et Asi,

notamment par comptabilisation de fausses factures à établir altérant le chiffre d'affaires et le résultat des sociétés

concernées.

Page 4: Motivations Altran

Frédéric BONAN et Michel FRIEDLANDER sont pour leur part renvoyés pour les mêmes faits en leur qualité de

directeur général de la société Altran technologies.

Alexis KNIAZEFF est quant à lui renvoyé pour les mêmes faits en qualité de président de la société Altran technologies.

Jean-Michel MARTIN est en outre renvoyé pour s'être, à PARIS, courant 2001 et 2002, en tous cas sur le territoire

national et depuis temps non prescrit, rendu complice, par aide et assistance, du délit de présentation de comptes infidèles

commis par Messieurs ROUGAGNOU, BONAN, KNIAZEFF, MARTIGNY et FRIEDLANDER, pour les exercices clos

au 31 décembre 2001 des sociétés Segime, Altior, Altran Technologies , Lore, Sivan Consulting et Asi, notamment par

comptabilisation de fausses factures à établir altérant le chiffre d'affaires et le résultat des sociétés concernées.

Christian DAUPRAT est enfin renvoyé pour s'être, à PARIS, courant 2001 et 2002, en tous cas sur le territoire national et

depuis temps non prescrit, rendu complice, par aide et assistance, du délit de présentation de comptes infidèles commis

par Messieurs ROUGAGNOU, BONAN, KNIAZEFF, MARTIGNY et FRIEDLANDER, en l'espèce, en émettant des

fausses factures sur la société Ilyad Value pour un montant total de 6 045 100,92 euros.

Le Tribunal développe ici les observations suivantes :

Hubert MARTIGNY, qui avait été mis en examen pour complicité de présentation de comptes infidèles par aide et

assistance pour les exercices clos au 31 décembre 2001 des sociétés Segime, Altior, Lore, Asi, est renvoyé, s'agissant

également de ces sociétés, comme auteur principal sans que, comme le fait justement observer son avocat, aucun motif de

requalification ait été préalablement développé.

De même, Michel FRIEDLANDER avait été mis en examen du chef du chef de complicité de présentation de comptes

infidèles concernant les sociétés Altior, Altran Technologies, Lore, Sivan Consulting et Asi et est également renvoyé,

s'agissant également de ces sociétés, en qualité d'auteur principal sans qu'aucun motif de requalification ait été

préalablement développé.

En outre, dans la qualification de renvoi concernant Christian DAUPRAT, il est fait référence aux fausses factures émises

sur la société Ilyad Value par Messieurs ROUGAGNOU, BONAN, KNIAZEFF, MARTIGNY et FRIEDLANDER -

auteurs principaux du délit de présentation de comptes infidèles - alors que ces fausses factures n'apparaissent pas dans la

qualification développée concernant chacun des intéressés et relative à ce délit de présentation de comptes infidèles.

Dans les motifs du réquisitoire définitif auxquels fait référence l'ordonnance de renvoi, il est de plus indiqué que les faits

de cessions de créances fictives à des sociétés tierces dans le but d'éviter d'avoir à les provisionner - et donc de minorer

les résultats - seront inclus dans la qualification de présentation de comptes infidèles. Le Tribunal en déduit qu'il s'agit

donc de la cession des titres Ysidro et de la cession de la créance détenue sur E.C.G. Il apparaît que ces irrégularités, qui

ont consisté à dissimuler des pertes subies, ont affecté la sincérité comptes consolidés du groupe Altran pour 2001. Force

est de constater que Jean-Michel MARTIN n'a jamais été interrogé sur ces cessions de créances fictives.

Or, dans le dispositif de l'ordonnance de renvoi relatif à la présentation de comptes infidèles concernant les auteurs

principaux (Alain ROUGAGNOU, Hubert MARTIGNY, Frédéric BONAN, Michel FRIEDLANDER, Alexis

KNIAZEFF) et concernant Jean-Michel MARTIN en qualité de complice, il est mentionné que la présentation de comptes

infidèles concerne la comptabilisation de fausses factures à établir altérant le chiffre d'affaires et le résultat des sociétés

Segime, Altior, Altran Technologies, Lore, Sivan Consulting et Asi.

Cette nouvelle contradiction entre les motifs du réquisitoire définitif auquel se réfère l'ordonnance de renvoi et le

dispositif de l'ordonnance de renvoi plaçait les prévenus dans l'impossibilité de savoir s'ils allaient devoir s'expliquer à

l'audience sur les faits relatifs à la cession de titres Ysidro et à celle de créances détenues sur E.C.G. Il est donc patent

qu'une telle incertitude les mettait nécessairement dans l'impossibilité de préparer utilement leur défense sur cette partie

de la prévention.

De plus, il ressort également des motifs du réquisitoire définitif expressément adoptés par l'ordonnance de renvoi que les

faits relatifs à l'opération Ilyad Value sont inclus dans le délit de présentation de comptes infidèles et il apparaît que cette

opération a consisté, pour les sociétés Sivan Consulting, Lore et Altran Technologies, à émettre, en 2001, des fausses

factures à destination de la société Ilyad Value.

Christian DAUPRAT est renvoyé comme complice du délit de présentation de comptes infidèles commis par Messieurs

ROUGAGNOU, BONAN, KNIAZEFF, MARTIGNY et FRIEDLANDER au titre de ces fausses factures. Or, ces auteurs

principaux ne sont nullement renvoyés au titre de la comptabilisation de fausses factures émises à destination de la

société Ilyad Value mais seulement pour la comptabilisation de fausses factures à établir.

Page 5: Motivations Altran

Il ressort par ailleurs des motifs du réquisitoire définitif expressément adoptés par l'ordonnance de renvoi qu'au sein de la

société Altior, ce ne sont pas des fausses factures à établir qui ont été comptabilisées mais des fausses factures ordinaires.

En conséquence, il existe, là encore, une contradiction entre les motifs du réquisitoire définitif auxquels se réfère

l'ordonnance de renvoi et le dispositif de cette dernière qui plaçait les prévenus dans l'impossibilité de savoir s'ils allaient

devoir s'expliquer sur les faits relatifs à la comptabilisation des fausses factures émises à destination de la société Ilyad

Value mais également des fausses factures Altior.

Cette incertitude les mettait nécessairement dans l'impossibilité de préparer utilement leur défense sur cette partie de la

prévention.

III - Les autres irrégularités :

À la suite de la notification du réquisitoire définitif à l'avocat de la société Altran Technologies, ce dernier a présenté, le 4

novembre 2011, des observations intitulées "note aux fins de non-lieu avec question préjudicielle". Il était formellement

demandé au magistrat instructeur de constater l'extinction de l'action publique s'agissant des faits ayant déjà fait l'objet de

sanction administrative sur le fondement de l'article L625-1 du Code Monétaire et Financier en application de la règle

"non bis in idem" reconnue tant par les stipulations de l'article 50 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union

Européenne du 7 décembre 2000 que par celles de l'article 4 du protocole additionnel n° 7 de la Convention Européenne

de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales du 4 novembre 1950.

En cas de refus de faire droit à cette demande de constatation de l'extinction de l'action publique, il était expressément

demandé au magistrat instructeur de solliciter de la Cour de Justice de l'Union Européenne que celle-ci se prononce, à

titre de question préjudicielle, sur l'application du principe "non bis in idem", s'agissant de la possible poursuite pénale de

faits ayant déjà donné lieu à sanction administrative conformément aux dispositions de l'article 621-15 du Code

Monétaire et Financier à l’encontre de la société Altran Technologies.

Force est de constater que le magistrat instructeur n'a aucunement répondu à ces observations.

✶ ✶ ✶

L'ensemble des irrégularités et insuffisances de l'ordonnance de renvoi sus-mentionnées conduit par suite le Tribunal à

faire application des dispositions de l'article 385 alinéa 2 du Code de Procédure Pénale et à renvoyer la procédure au

Ministère public afin que celui-ci saisisse à nouveau le juge d'instruction aux fins de régularisation de l'ordonnance de

renvoi.

PAR CES MOTIFS

RENVOIE la procédure au Ministère Public, aux fins de renvoi au juge d'instruction pour régularisation de

l'ordonnance de renvoi.