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Grèce. Vous entrez ici à vos risques et périls. Danger de mort aux portes de l'Europe

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Rapport public Index AI : EUR 25/007/2013, publié le 9 juillet 2013

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Amnesty International Juillet 2013 Index : EUR 25/007/2013

Le 15 décembre 2012, un bateau s'est renversé après son départ de Çanakkale,en Turquie, alors qu'il tentait de rejoindre l'île grecque de Lesbos ; 27 de sespassagers se sont noyés. Le seul survivant, un adolescent afghan de 16 ans, a raconté :

« Quand je me suis réveillé à l'hôpital, j'ai demandé à aller à la morgue. Je voulaisjuste savoir s'ils avaient retrouvé les corps de mes amis. Et je les ai vus. Ça a ététrès dur. Je n'ai pas réussi à dormir ni à manger pendant plusieurs jours. »

Ci-dessus : papiers d'une femme somalienne

trouvés sur la plage de Ferogia, sur l'île

grecque de Lesbos, dans la mer Égée,

août 2008.

Couverture : lors d'une patrouille nocturne,

des gardes-côtes grecs repèrent un bateau de

migrants originaires d'Afghanistan, de Somalie

et de Palestine tentant de rejoindre la Grèce

par la mer depuis la Turquie, juin 2009.

© Angelos Tzortzinis

© Giorgos M

outafis

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Index : EUR 25/007/2013 Amnesty International Juillet 2013

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L'une des principales voies d'entrée pourles migrants et les réfugiés qui espèrenttrouver la sécurité ou une vie meilleuredans l'Union européenne (UE) est lafrontière entre la Turquie et la Grèce : par laterre dans la région d'Evros, au nord, et parla mer Égée au sud. En 2012 cette frontièrea vu plus de passages irréguliers que toutesles autres frontières extérieures de l'Unioneuropéenne. Beaucoup venaient de paysravagés par des conflits, commel'Afghanistan et la Syrie.

Ces dernières années, la Grèce, avec l'aidede l'UE, a investi plusieurs millions d'eurospour empêcher les migrants d'entrer. En2012, elle a achevé la construction d'uneclôture de 10,5 km le long de la partie laplus utilisée de sa frontière avec la Turquie,et elle a déployé près de 2 000 gardes-frontières supplémentaires. La détention –souvent dans des conditions effroyables –est généralement le sort qui attend ceux quiarrivent irrégulièrement en Grèce.

Cependant, parmi tous ceux qui veulententrer dans ce pays, beaucoup n'arriventjamais à destination. Depuis août 2012, au moins 101 hommes, femmes et enfants,principalement syriens et afghans, onttrouvé la mort en tentant d'atteindre les îles

grecques par la mer. Des cas de renvoisforcés (« push back ») (pratique illégale etsouvent dangereuse consistant à renvoyeren Turquie les migrants interceptés) sontsouvent signalés.

Il est du ressort du gouvernement grec de contrôler les entrées et les séjours desétrangers sur le territoire grec, et l'Unioneuropéenne peut aider ses États membresdans leurs activités légitimes de contrôledes frontières. Toutefois, les méthodesutilisées à la frontière gréco-turque ont donnélieu à de graves violations des droits humains.

Les autres États membres semblent biencontents que la Grèce se charge de garderpour eux les portes de l'Europe, mais lespolitiques et les pratiques utilisées le long dela frontière grecque ne font pas uniquementla honte de la Grèce. Elles déshonorentaussi l'ensemble de l’Union européenne.Elles révèlent l'amère ironie de la positiondes pays européens, qui font pression pourla paix à l'étranger mais n'hésitent pas àrefuser l'asile à ceux qui fuient les conflits ni à mettre leur vie en danger.

Les témoignages recueillis par AmnestyInternational auprès de migrants et deréfugiés ayant été personnellement renvoyés

de force de Grèce en Turquie montrentqu'au moins 39 opérations différentes derefoulement ont eu lieu entre août 2012 etmai 2013. Ces gens disent n'avoir jamais eula possibilité d'expliquer leur situation ni decontester leur expulsion. Tous avaient déjàparcouru un long chemin pour atteindre lafrontière puisqu'ils venaient de Syrie, duSoudan, d'Afghanistan, de Palestine, d'Érythrée,d'Iran, d'Irak, de Somalie et du Cameroun.

Le nombre inquiétant de témoignagesrecueillis par Amnesty International àpropos de ces opérations donne à penserque ces pratiques sont courammentutilisées par les gardes-frontières et lesgardes-côtes grecs et que de nombreuxréfugiés et demandeurs d'asile se voientrefuser de façon systématique l'entrée enGrèce et l'accès à une protection. En avril,le Haut-Commissariat des Nations uniesaux réfugiés (HCR) a aussi signalé qu'ilavait reçu des témoignages de Syriensmentionnant des renvois forcés informels(refoulements) en Turquie ou des tentativesde refoulement.

T U R K E Y

B U L G A R I A

G R E E C E

A E G E A NS E A

B L A C KS E A

Athens

Istanbul

Edirne

Orestiada

Alexandroupoli

Çanakkale

Aydin

Izmir

Samothraki

River EvrosEvrosRegion

Limnos

Lesvos

Chios

Samos

Dans cette zone, la frontière entre la Grèce et la Turquie ne

Une clôture de 10,5 km protège maintenant cette partie de la frontière gréco-turque, qui était l'un des principaux points

Le refoulement consiste à renvoyer de forceune personne dans un pays où elle risque desubir de graves violations des droitshumains. Le droit international et le droiteuropéen interdisent de renvoyer des réfugiéset des demandeurs d’asile dans le pays qu’ilsont fui ou de les renvoyer de force à lafrontière. Les États ont l'obligationd'identifier les personnes qui sont menacéesde refoulement et qui ont donc besoin d'uneprotection internationale en leur proposantdes procédures équitables et efficaces.

Par ailleurs, les expulsions collectives sontexplicitement interdites par le droit européen.On parle d’expulsion collective lorsqu’ungroupe de personnes est expulsé sans que lasituation particulière de chacune despersonnes de ce groupe ait fait l’objet d’unexamen individuel. Toute personne doit êtreprotégée des expulsions collectives, y comprisles migrants en situation irrégulière.

Les opérations de renvoi forcé menées par la Grèce privent les personnes du droitd'expliquer leur situation individuelle etd'invoquer une quelconque protection oud'autres préoccupations. Elles sont donccontraires aux obligations de la Grèce auxtermes du droit international et européen.

LES RENVOIS FORCÉS ET LE DROIT INTERNATIONAL

© Amne

sty Internationa

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LES RENVOIS FORCÉS METTENTDES VIES EN DANGERAmnesty International a rencontré despersonnes qui racontent avoir été mis endanger par les actions de la police desfrontières et des gardes-côtes grecs.

Certains réfugiés et migrants qui naviguaientsur la mer Égée dans de petits canots encaoutchouc surchargés ont raconté qu'ilsavaient d'abord été soulagés de voir arriver lesbateaux des gardes-côtes. Cependant, ilsont vite découvert que l'opération desauvetage qu'ils espéraient était en fait uneopération destinée à les renvoyer d'où ilsvenaient. Certains ont raconté avoirdélibérément sabordé leurs embarcationsquand ils ont vu les gardes-côtes dans l'espoird'être secourus et emmenés en Grèce.

À gauche : des gardes-côtes grecs interceptent

un bateau transportant 25 migrants près de

l'île de Samos, novembre 2009.

Au centre : traces de pas laissées par des

migrants sur les rives du fleuve Evros à Lagyna

(région d'Evros, Grèce), février 2011.

À droite : groupe de migrants se dirigeant vers

le village de Nea Vissa, dans la région d'Evros

(Grèce), octobre 2010.

En mars 2013, B., jeune Afghan de 17 ans,était détenu en Turquie près de la côte de lamer Égée, dans un centre de détention d’où ildevait être renvoyé. Il se trouvait là avec sesdeux sœurs, âgées de 15 et 16 ans, ainsiqu'avec les enfants de sa sœur aînée décédée– deux garçons âgés de sept et trois ans et unefille âgée de cinq ans.

Il a expliqué que ses parents et sa sœur aînéeavaient été tués dans l'explosion d'une bombeà Ghazni, en Afghanistan. Craignant pour savie et celle des cinq enfants dont il avait lacharge, B. a quitté l'Afghanistan en septembre2012 avec ses sœurs, ses neveux et sa nièce. Il est resté cinq mois en Iran avant de gagnerla Turquie. Il est arrivé à Izmir, grande villecôtière où embarquent la plupart des réfugiéset des migrants pour traverser la mer Égée. Il a négocié avec des passeurs son transport et celui de sa famille vers la Grèce. Ils ontembarqué à bord d'un canot en caoutchoucavec 36 autres personnes originaires de Syrie,du Soudan et d'Iran. Les passeurs leur ont ditde se diriger vers les lumières qu'on voyait auloin, qui étaient celles d'une île grecque.

« Nous avons quitté le rivage à 23 h 15. C'étaitfin février 2013. Mais nous n'avons pas réussi àatteindre l'île. Nous avons navigué pendant troisheures et demie. Puis le bateau de la policegrecque nous a trouvés. Ils nous ont pris sur leurbateau. Ils nous ont frappé très violemment etils nous pris tout notre argent, nos téléphonesportables, nos vêtements. Tout ce que nousavions. Ils ont tellement frappé ma sœur qu'elleest couverte de bleus maintenant. […] Noussommes restés sur le bateau grec pendant troisheures. Vers 6 heures, ils nous ont ramenésdans les eaux turques ; ils nous ont remis dansnotre bateau, ils ont tailladé l'un des boudins,ont abîmé notre canot et nous ont pris le moteur,avant de nous abandonner en pleine mer. Entout, nous étions 42, dont trois jeunes enfants :ma nièce et mes neveux. Il y avait aussi d'autresenfants, mais ils étaient plus âgés […] Ils nousont laissés en pleine mer, sans rien d'autrequ'un bateau endommagé. »

B. explique que tous les passagers del'embarcation ont ensuite été sauvés par desgardes-côtes turcs. Ils ont ensuite été placésdans un centre de rétention, où les migrants ensituation irrégulière attendent leur expulsion.

L'HISTOIRE DE B. ET DE SA FAMILLE

© Giorgos M

outafis

© Giovanni C

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L'histoire de B. et les témoignages d'autresréfugiés et migrants montrent le méprisflagrant pour la vie humaine affiché par lesgardes-côtes grecs lors des opérations derenvoi forcé menées sur la mer Égée.D'autres personnes interrogées parAmnesty International ont dit que leurscanots gonflables avaient été emboutis oulacérés au couteau. Certains ont failli seretourner quand un bateau des gardes-côtes grecs leur a tourné autour ou les aremorqués. Plusieurs ont été privés de leurmoteur et de leurs rames et laissés enpleine mer dans des embarcations quin'étaient plus en état de naviguer.

Des pratiques dangereuses du même typeont été signalées par ceux qui ont tentéde franchir l'Evros. N., originaire duDarfour, a raconté avoir été renvoyéillégalement en Turquie par l'Evros findécembre 2012.

« Vers 21 heures, les policiers grecs nousont attaché les mains dans le dos avec desliens en plastique. Je les ai vu jeter nossacs à la poubelle, puis ils nous ontramenés sur les bords du fleuve dans unminibus. Deux bateaux nous attendaientsur la berge. Ils ont délié les mains d'unedes femmes nigérianes ; elle avait l'airmalade. Puis ils nous ont fait monter deforce dans les embarcations. J'avais peur

de tomber à l'eau avec les mains attachées.Arrivés sur une petite île au milieu dufleuve, ils nous ont dit de descendre, et ilssont partis. Ils ne nous ont même pasdétaché les mains, ils nous ont laisséscomme ça au milieu du fleuve. La policeturque nous a trouvés environ 40 minutesplus tard. »

MAUVAIS TRAITEMENTSPENDANT LES OPÉRATIONS DERENVOIS FORCÉSLa quasi-totalité de ceux qui ont racontéavoir été renvoyés de force, que ce soit surterre ou en mer, ont dit avoir subi ou vudes violences ou d'autres mauvaistraitements. Certains ont expliqué avoir étégiflés, frappés et malmenés. Tous oupresque affirment avoir été fouillés etdépouillés de leurs téléphones portables,de leur argent, de leurs bijoux, des sacscontenant leurs vêtements et de leursphotos de famille, qui ont parfois été jetésà la mer. Dans un cas, deux personnes ontraconté avoir été entièrement déshabillées.

Quand nous l'avons rencontré, U.,demandeur d'asile afghan de 18 ans, setrouvait depuis trois mois au centre derétention d'Erdine, en Turquie, après avoirété renvoyé illégalement en Turquie par lapolice grecque fin novembre 2012.

« Nous avons traversé le fleuve de nuit etmarché pendant presque une journée.Alors que nous arrivions à proximité d'uneville grecque, la police nous a attrapés. Ilsont appelé un fourgon qui nous a ramenésau fleuve. Il y avait déjà une vingtaine depersonnes dans le fourgon quand nousy sommes montés – que des Afghans. Une foisarrivés au bord du fleuve, nous sommes restésenfermés dans le fourgon pendant trois heures.C'était très dur car nous étions entassés etl'odeur était insoutenable. Pendant cetemps, mon ami a appelé l'ONU et d'autresorganisations pour leur demander de l'aide.Peu après, les policiers ont ouvert le fourgon etont demandé qui avait appelé les organisations.Ils nous ont pris un par un pour nous posercette question. Je suppose que quelqu'un leura dit qui avait téléphoné car ils ont emmenémon ami et l'ont frappé à coups de matraque.Puis ils nous ont pris nos téléphones et nosceintures et ils nous ont renvoyés en Turquie. »

X., originaire de Palestine, a raconté que, le 6 mars 2013, il se trouvait dans un bateausur la mer Égée, près d'une île grecque,avec 11 autres personnes palestinienneset syriennes, dont un bébé de deux mois.Les gardes-côtes grecs les ont remorquésjusqu'aux eaux territoriales turques. « Nousavons demandé de l'eau aux policiers grecs,mais ils se sont moqués de nous et nous ontdit que nous n'étions que des chiens. »

Index : EUR 25/007/2013 Amnesty International Juillet 2013

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Amnesty International Juillet 2013 Index : EUR 25/007/2013

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DES ARRESTATIONS SYSTÉMATIQUESSUIVIES DE RENVOIS FORCÉS

Ceux qui viennent de franchir la frontièrene sont pas les seuls à être renvoyés enTurquie : les renvois concernent aussi desgens qui vivent en Grèce depuis desannées et y ont établi des liens familiaux.En effet, en août 2012, les autoritésgrecques ne se sont pas contentées de

durcir les contrôles à la frontière dans larégion d'Evros, elles ont aussi intensifié les opérations d'arrestations de migrants en situation irrégulière dans les zonesurbaines.

D., qui vivait en Grèce depuis 2008, a raconté avoir été arrêté par la police dansle centre de lavage de voitures où il travaillaiten août 2012. Il a précisé à AmnestyInternational qu'il était enregistré commedemandeur d'asile en Grèce mais qu'il avaitlaissé sa carte chez lui le jour où il a étéarrêté. « J'ai dit aux policiers que j'avais cettecarte rouge chez moi [la carte de demandeurd'asile] et que j'avais une femme et un enfantici, mais ils ne m'ont pas écouté ; ils m'ontdonné un coup de poing dans le ventre etm'ont poussé dans un bus. Nous étionsenviron 25 dans ce bus – des Soudanais, desSénégalais, des Bangladais… Nous avonsroulé pendant environ huit heures. Ensuite,ils nous ont enfermés dans un lieu affreux.Puis, à une heure du matin, ils nous ontconduits dans de petites voitures au fleuvequi sert de frontière avec la Turquie. Je les aisuppliés de ne pas m'envoyer en Turquie ; jeleur ai parlé de mon attestation, de mafemme et de mon enfant ; je leur ai demandéde vérifier dans leurs ordinateurs. Mais ilsm'ont dit de me taire. »

LA DÉTENTION

« Au nom de quelle loi nousgarde-t-on ici depuis un an ? Jene suis pas un meurtrier, ni uncriminel. Je ne suis qu'unmigrant. Je suis juste venu icipour avoir une vie meilleure. » Un jeune Afghan détenu au centre de rétention de Filakio.

L'usage généralisé de la détention delongue durée est l'un des piliers de lapolitique grecque d'immigration. Auxtermes du droit grec, les migrants ensituation irrégulière et les demandeursd’asile peuvent être maintenus endétention pendant une durée pouvantaller jusqu’à dix-huit mois.

Dans l'un des plus grands centres dedétention de la région d'Evros, un Guinéena déclaré : « Je suis là depuis neuf mois, ilsdisent qu'ils peuvent me garder le double.Ensuite, ils me donneront un papierm'ordonnant de quitter la Grèce dans lessept jours. Comment puis-je m'organiserpour quitter la Grèce en sept jours ? Ici jene peux même pas téléphoner. Ils meréarrêteront, c'est tout. »

© Angelos Tzortzinis

© Angelos Tzortzinis

Ci-dessus : des policiers arrêtent des

migrants dans le centre d'Athènes (Grèce)

pour contrôler leurs permis de résidence.

Les vastes opérations d'arrestations menées

par la police depuis août 2012 ont abouti

à de nombreux placements en détention.

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Index : EUR 25/007/2013 Amnesty International Juillet 2013

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LES MAUVAISES CONDITIONS DE DÉTENTION

En avril 2013, Amnesty International s'estrendue dans plusieurs centres où sontdétenus des migrants en situationirrégulière et des demandeurs d'asile enGrèce : huit près de la frontière avec laTurquie et un sur l'île de Lesbos.

Bien que les détenus – principalement desjeunes hommes, mais aussi quelquesfemmes et même des mineurs nonaccompagnés – y restent souvent pendantdes mois, certains centres sont dépourvusd'espace extérieur permettant de prendrel'air et de faire de l'exercice. Dans lescentres qui disposent d'un tel espace, lesdétenus se sont plaints de ne pas êtresouvent autorisés à s'y rendre.

La communication avec le monde extérieurest strictement limitée. Les téléphonesportables sont interdits dans presque tousles centres et, avec les téléphones publics,le coût des appels vers l'étranger est trèsélevé. De nombreux détenus ne peuventplus parler à leurs familles depuis des moiscar ils n'ont plus d'argent.

La saleté était visible dans certains centreset les détenus se sont plaints du manque

de produits d'hygiène de base, comme le savon et le shampoing, et du fait qu'ildevaient dormir dans les draps quin'avaient pas été lavés depuis des mois.Dans deux centres, ils se sont plaints dedevoir appeler les gardiens à chaque foisqu'ils avaient besoin de se soulager, car il n'y avait pas de toilettes dans leurscellules. Ils ont raconté que, comme leursappels restaient souvent sans réponsependant des heures, ils devaient urinerdans des bouteilles.

LA DÉTENTION DES MINEURS

Les mineurs n'échappent pas à cesconditions difficiles en Grèce. Trois jeunesgarçons afghans non accompagnés étaientdétenus au poste-frontière de Souflidepuis plus de trois mois lors de la visited'Amnesty International. Les examensmédicaux avaient confirmé que l'un d'euxétait mineur, et les deux autres attendaientles résultats. Ils partageaient une petitecellule sans beaucoup de place pourbouger. Bien que l'établissement disposed'une cour clôturée, les garçons ontexpliqué qu'ils n'avaient pas le droit desortir tous les jours faire de l'exercice enplein air car il faisait trop froid.

Amnesty International s'est aussientretenue avec deux garçons nonaccompagnés âgés de 16 et 17 ans auposte de police de Iasmos. Ils étaientdétenus dans deux cellules contiguës,dormant sur des matelas posés à même lesol en ciment. H., un jeune Afghan, avaitété détenu huit mois à Komotini avec desadultes avant d'être reconnu commemineur et transféré à Iasmos. Le centre deKomotini ne disposait d'aucun espaced'exercice ou de détente extérieur niintérieur. H. était arrivé à Iasmos environun mois auparavant ; l'autre garçon,originaire de Côte d'Ivoire, était arrivédepuis quelques semaines. Ni l'un nil'autre ne savait combien de temps ilsresteraient en détention en attendantqu'une place se libère dans un foyer pourmineurs. Ils étaient visiblementdésemparés et semblaient avoir besoind'un soutien psychologique.

En haut à gauche : migrants dans un centre

de détention sur l'île de Samos, juin 2009.

Ci-dessus : le centre de rétention de Filakio,

dans la région grecque d’Evros. (CC BY-SA 3.0)

© Georgios G

iannopoulos

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Amnesty International est un mouvement mondial regroupant 3 millions desympathisants, membres et militants, qui se mobilisent dans plus de 150 pays etterritoires pour mettre un terme aux violations des droits humains.

La vision d’Amnesty International est celle d’un monde où chacun peut se prévaloir detous les droits énoncés dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et dansd’autres textes internationaux.

Essentiellement financée par ses membres et les dons de particuliers, AmnestyInternational est indépendante de tout gouvernement, de toute tendance politique, detoute puissance économique et de tout groupement religieux.

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Juillet 2013

Amnesty InternationalInternational SecretariatPeter Benenson House1 Easton StreetLondon WC1X 0DWRoyume-Uni

amnesty.org

PASSEZ À L'ACTION !Les temps sont durs en Grèce, ainsi que

pour des millions de personnes dans toute

l'Europe. Toutefois, rien ne peut excuser ce

qui se passe aux frontières sud-est de l'UE.

Joignez votre voix à celles qui réclament

des politiques d'asile et d'immigration

respectueuses des droits humains et de la

dignité humaine.

Appelez le ministre grec de l'Ordre public et de la

Protection du citoyen à :

n cesser immédiatement les renvois

forcés illégaux des migrants et des réfugiés

à la frontière gréco-turque, enquêter sur les

allégations d'expulsions systématiques et

de mauvais traitements, et poursuivre les

responsables de ces agissements ;

n veiller à ce que toute personne

interceptée sur la mer Égée ou

appréhendée à la frontière terrestre avec

la Turquie puisse bénéficier de procédures

individualisées lui permettant de demander

une protection internationale et ait

véritablement la possibilité de contester

toute décision d'expulsion ;

n mettre fin à la détention systématique

et de longue durée des migrants et des

demandeurs d’asile et utiliser des

alternatives à la détention.

Participez à la campagne sur notre site

www.whenyoudontexist.eu.

© Amnesty International

Ci-dessus : arrivée d'un bateau au Parlement européen à Bruxelles (Belgique), avril 2013. Les

militants ont remis au Parlement plus de 70 000 signatures lui demandant de protéger les droits

des migrants, des demandeurs d’asile et des réfugiés aux frontières de l’Europe.

CONCLUSIONEn tant que frontière extérieure de l'UE, laGrèce doit gérer un afflux massif demigrants et de réfugiés qui, pour la plupart,ne souhaitent pas rester en Grèce maisveulent poursuivre leur voyage plus àl'ouest, vers d'autres États européens. C'estune responsabilité particulièrement lourdepour ce pays, qui est l'État membre de l'UEle plus touché par la crise économique.

L'Union européenne et ses États membresdoivent soutenir le gouvernement grec engarantissant les droits de tous les migrantset les réfugiés, indépendamment ducaractère régulier de leur séjour, et trouverde nouveaux moyens de partager avec laGrèce la responsabilité de la gestion desflux migratoires. Plutôt que de chercher àfermer hermétiquement les frontièresextérieures de l'UE, la politique européennedevrait s'attacher à améliorer les capacitéset les conditions d'accueil des demandeursd'asile, des réfugiés et des autres migrantsvulnérables. Il faudrait également améliorerles capacités d'identification de ceux quiont besoin d'une protection internationaleaux frontières de la Grèce.

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