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Lettre ouverte du Bâtonnier du Barreau de Mons au Premier Ministre - 08 06 2012 1 LETTRE OUVERTE DES AVOCATS DU BARREAU DE MONS A MONSIEUR LE PREMIER MINISTRE ELIO DI RUPO Mons, le 8 juin 2012. Monsieur le Premier Ministre, Le Barreau de Mons prend l’initiative de vous écrire pour vous faire part des revendications formulées depuis de nombreux mois par l’Ordre des Barreaux francophones et germanophone à Madame Annemie TURTELBOOM, Ministre de la Justice. La question essentielle qui nous préoccupe est celle de l’organisation de l’aide juridique dans notre royaume. La Belgique est un des pays européens qui consacre le budget le plus faible au défraiement des avocats qui travaillent au bénéfice des citoyens les plus défavorisés. Le nombre de dossiers ne cesse d’augmenter car les plafonds d’accessibilité à l’aide juridique n’ont cessé également d’être relevés et, si c’est une bonne chose pour le citoyen de pouvoir être défendu, c’est aussi un droit légitime pour l’avocat d’être correctement défrayé. Aujourd’hui, l’avocat est indemnisé en moyenne deux ans après sa première intervention. Or cette indemnité vient d’être réduite de 26,91€ par point à 24,03€ puisqu’elle se fait dans le cadre d’une enveloppe fermée dont la gestion est confiée au Ministère de la Justice.

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La barreau de Mons s'adresse à M. Di Rupo à propos de la grève de l'aide juridique

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Lettre ouverte du Bâtonnier du Barreau de Mons au Premier Ministre - 08 06 2012

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LETTRE OUVERTE DES AVOCATS DU BARREAU DE MONS A MONSIEUR LE PREMIER MINISTRE ELIO DI RUPO

Mons, le 8 juin 2012.

Monsieur le Premier Ministre, Le Barreau de Mons prend l’initiative de vous écrire pour vous faire part des revendications formulées depuis de nombreux mois par l’Ordre des Barreaux francophones et germanophone à Madame Annemie TURTELBOOM, Ministre de la Justice. La question essentielle qui nous préoccupe est celle de l’organisation de l’aide juridique dans notre royaume. La Belgique est un des pays européens qui consacre le budget le plus faible au défraiement des avocats qui travaillent au bénéfice des citoyens les plus défavorisés. Le nombre de dossiers ne cesse d’augmenter car les plafonds d’accessibilité à l’aide juridique n’ont cessé également d’être relevés et, si c’est une bonne chose pour le citoyen de pouvoir être défendu, c’est aussi un droit légitime pour l’avocat d’être correctement défrayé. Aujourd’hui, l’avocat est indemnisé en moyenne deux ans après sa première intervention. Or cette indemnité vient d’être réduite de 26,91€ par point à 24,03€ puisqu’elle se fait dans le cadre d’une enveloppe fermée dont la gestion est confiée au Ministère de la Justice.

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Cette réduction est contraire aux engagements formels pris par son prédécesseur, Monsieur le Ministre Stefaan DE CLERCQ, ce qui nous a surpris et choqué dans un état de droit. Sur deux ans, le nombre de désignations a augmenté de 25% et pour l’instant, le point est redescendu de 13% et ce phénomène ne pourra que s’accentuer à l’avenir. Les avocats demandent que l’ensemble de l’organisation de l’aide juridique soit revue et repensée. Les avocats ont déjà mis sur la table de nombreuses pistes pour recalculer les barèmes, les nomenclatures, les seuils d’accès au bénéfice de l’aide juridique, au mode de calcul des prestations, à l’intervention d’un ticket modérateur, à l’ouverture d’une couverture protection juridique mutualisée, etc, etc. Madame Annemie TURTELBOOM a marqué son accord sur le principe de l’ouverture de ce chantier et elle vient de marquer son accord tant dans sa lettre du 24 mai 2012 que devant le Sénat pour défendre le maintien de la valorisation de l’indemnité B.A.J. à 26,91€ par point pour les prestations de l’année 2010-2011 lors du conclave budgétaire fixé à la mi juillet. Nous demandons aujourd’hui au Gouvernement, de nous donner les garanties d’une acceptation de ces deux revendications fondamentales. L’augmentation du budget de l’aide juridique est d’environ 9 millions d’€ pour assurer le maintien de la valeur du point à 26,91€. La question de la fiscalité applicable aux indemnités perçues est également fondamentale. Nous avons interpellé Monsieur le Ministre des Finances car la Cour de Cassation a modifié le régime taxatoire de ces sommes. Celles-ci étaient antérieurement taxées sous forme d’arriérés taxables distinctement et dès lors les 60 millions d’€ qui étaient distribués n’entraînaient moyennement qu’une faible taxation. Depuis l’arrêt de la Cour de Cassation du 23 avril 2010, les montants versés s’ajoutent au montant des revenus professionnels de l’avocat.

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Il s’en suit nécessairement que le budget de 69 millions d’euros que l’Etat devrait affecter pour le maintien de la valeur du point entraînera ensuite la perception d’un impôt beaucoup plus élevé. Sur le plan budgétaire global, la recette sera au moins équivalente à la dépense des 9 millions d’€ complémentaires. Pour ne pas avoir été entendu depuis des mois par notre Ministre de la Justice, le Barreau est exaspéré. Pour travailler depuis des années dans le cadre de l’aide légale sans recevoir en retour la garantie d’un défraiement décent, le Barreau se mobilise. Pour contribuer gracieusement à l’œuvre de justice en siégeant quotidiennement comme juges suppléants dans toutes les juridictions du royaume et ne retirer aucune considération, le Barreau se mobilise. Pour siéger au sein de multiples commissions juridictionnelles sans rémunération décente et sans considération, le Barreau se mobilise. Depuis le 9 mai 2012, l’organisation de l’aide juridique est suspendue sans réaction constructive et rassurante de la Ministre de la Justice. Le Barreau ne peut tolérer davantage de mépris non seulement à son égard mais également à l’égard des justiciables les plus défavorisés et le moment est d’ailleurs venu d’envisager d’autres moyens d’action. A partir de ce lundi 11 juin 2012, les mesures suivantes sont décidées :

- Les avocats qui siègent en qualité de juges suppléants dans toutes les juridictions quelles qu’elles soient ne siègeront plus.

- Les avocats qui siègent au sein des commissions de défense sociale et de probation ne siègeront plus.

- Les avocats qui sont invités à participer aux élections communales et provinciales d’octobre 2012 ne participeront plus en qualité de président de bureau ou président de bureau de dépouillement.

- Une pétition va être mise sur pied au niveau fédéral. - Une action judiciaire sera introduite contre l’Etat.

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Nous espérons très sincèrement que ces mesures entraîneront une réaction immédiate et rassurante de votre Gouvernement bien avant le conclave budgétaire. La détermination de tous les avocats est manifeste et grandit d’ailleurs de jour en jour vu l’absence totale de garantie qui nous est donnée par notre Ministre de la Justice depuis de nombreux mois. C’est le respect de notre Constitution, de la loi sur l’aide juridique et des conventions internationales qui est en jeu bien au-delà de la valeur du point qui constitue notre revendication symbolique. Si l’honorabilité de notre profession n’est pas reconnue par votre Gouvernement, c’est tout le fonctionnement de la justice qui pourra être paralysé par les mesures ci-dessus décrites. Nous sommes à votre disposition pour vous rencontrer et nous viendrons en nombre ce lundi 11 juin 2012 vers 9h30 déposer cette lettre en votre domicile de la rue du Onze Novembre à Mons. Croyez, Monsieur le Premier Ministre, en l’assurance de notre grande considération et du respect que tout le Barreau porte à la fonction que vous incarnez. Bernard MAIRIAUX, Bâtonnier de l’Ordre