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« Lieux du livre et usages de lecteurs » BPI / ENSSIB Mardi 8 avril 2014 Page 1 sur 18 JOURNÉE D'ÉTUDE PROFESSIONNELLE BPI / ENSSIB MARDI 8 AVRIL 2014 LIEUX DU LIVRE ET USAGES DE LECTEURS La Bibliothèque publique d’information (Bpi) et l’Enssib organisent leur journée d’étude annuelle consacrée à l'actualité de la recherche sur la thématique « Lieux du livre et usages de lecteurs ». À partir des travaux d’élèves conservateurs de l’Enssib et de ceux menés avec le service Études et Recherches de la Bpi, il s’agit de s’interroger sur certains usages des lecteurs, et sur les lieux singuliers que sont les bibliothèques et les librairies. Ces lieux, dont on prédit la mort de façon régulière, résistent et même mieux : existent parce qu’ils proposent des services, des collections, un accueil, une implantation significatifs pour les usagers, les clients, les visiteurs ; d’autant plus significatifs qu’ils sont pensés et conçus pour cela. INTRODUCTION ANNE-MARIE BERTRAND (DIRECTRICE DE L' ENSSIB ) ET EMMANUEL AZIZA (DIRECTEUR DE LA BPI PAR INTÉRIM) Emmanuel Aziza. C’est une journée qui était déjà prévue l’année dernière. Plusieurs facettes de réflexion à la Bpi et à l’Enssib : les usages du numérique, la bibliothèque dans la cité, l’innovation concrète en termes de cohésion sociale, la sociologie de la lecture. Les lieux et les usages du livre en général, d’où le soutien du Ministère de la Culture pour effectuer des études nationales. Anne-Marie Bertrand. 3 e édition de la journée Bpi-Enssib autour de la restitution de travaux d’étude. 1 ère édition : image de la bibliothèque, 2 e édition : usages de lecture. Cette journée sert à rendre compte des travaux menés à l’Enssib et à la Bpi. Ouvrages sur l’architectur e des bibliothèques à l’occasion des 20 ans de l’Enssib. Réflexion sur bibliothèque et urbanité.

Lieux du livre et usages de lecteurs - 8 avril 2014

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Compte-rendu de la journée d'étude du mardi 8 avril à la BPI sur « Lieux du livre et usages de lecteurs ».

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« Lieux du livre et usages de lecteurs » BPI / ENSSIB – Mardi 8 avril 2014

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JOURNÉE D'ÉTUDE PROFESSIONNELLE

BPI / ENSSIB

MARDI 8 AVRIL 2014

LIEUX DU LIVRE ET USAGES DE LECTEURS

La Bibliothèque publique d’information (Bpi) et l’Enssib organisent leur journée d’étude

annuelle consacrée à l'actualité de la recherche sur la thématique « Lieux du livre et usages

de lecteurs ».

À partir des travaux d’élèves conservateurs de l’Enssib et de ceux menés avec le service

Études et Recherches de la Bpi, il s’agit de s’interroger sur certains usages des lecteurs, et

sur les lieux singuliers que sont les bibliothèques et les librairies. Ces lieux, dont on prédit la

mort de façon régulière, résistent et même mieux : existent parce qu’ils proposent des

services, des collections, un accueil, une implantation significatifs pour les usagers, les

clients, les visiteurs ; d’autant plus significatifs qu’ils sont pensés et conçus pour cela.

INTRODUCTION – ANNE-MARIE BERTRAND (DIRECTRICE DE L'ENSSIB) ET EMMANUEL

AZIZA (DIRECTEUR DE LA BPI PAR INTÉRIM)

Emmanuel Aziza. C’est une journée qui était déjà prévue l’année dernière. Plusieurs facettes

de réflexion à la Bpi et à l’Enssib : les usages du numérique, la bibliothèque dans la cité,

l’innovation concrète en termes de cohésion sociale, la sociologie de la lecture. Les lieux et

les usages du livre en général, d’où le soutien du Ministère de la Culture pour effectuer des

études nationales.

Anne-Marie Bertrand. 3e édition de la journée Bpi-Enssib autour de la restitution de travaux

d’étude. 1ère édition : image de la bibliothèque, 2e édition : usages de lecture. Cette journée

sert à rendre compte des travaux menés à l’Enssib et à la Bpi. Ouvrages sur l’architecture des

bibliothèques à l’occasion des 20 ans de l’Enssib. Réflexion sur bibliothèque et urbanité.

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« Lieux du livre et usages de lecteurs » BPI / ENSSIB – Mardi 8 avril 2014

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LE LECTEUR DE PRESSE PEOPLE EN BIBLIOTHÈQUE MUNICIPALE – MATHILDE PEYROU

(RESPONSABLE DU PÔLE LECTURE PUBLIQUE DE LA BIBLIOTHÈQUE MÉRIADECK,

BORDEAUX)

PEYROU Mathilde, « La presse people dans les bibliothèques municipales », mémoire d’étude

du Diplôme de conservateur des bibliothèques, sous la direction de MERKLEN Denis,

Villeurbanne, Enssib, janvier 2013.

[email protected]

Question iconoclaste : on rit quand on en parle. Mettre en résonnance les publics, les

collections et les professionnels des bibliothèques. Plus de 11 millions de lecteurs chaque

semaine, et pourtant cette presse n’est que peu présente dans les fonds des bibliothèques

municipales. Quelle place pour le lecteur de presse people dans les bibliothèques ?

QUELQUES CONSTATS

Peu d’écrits académiques sur la presse people, à l’inverse de la recherche anglo-saxonne sur

la celebrity culture. Cf. Nathalie Heinich : inhibition du monde académique. Questions de

l’offre et de la demande, de la désacralisation de la culture, les représentations symboliques

des bibliothèques du côté des usagers et des professionnels.

LA PRESSE PEOPLE ET SON LECTORAT

Appétence française pour la presse magazine. Le multireading : on lit le même titre en

papier et en digital. Définition de Jean-Marie Charon de la presse people : « Des publications

dont le concept est centré sur la vie des célébrités (stars du spectacle, ou du petit écran, tops

models, têtes couronnées, ainsi que personnalités politiques ou du monde des affaires). »

Dénomination contemporaine pour une presse à la très longue histoire (almanachs,

chroniques mondaines). Feuilletons et connivence.

Presse people : 57 titres, 92% des hebdomadaires. 3e famille de revues en volume de ventes

(après les magazines de télévision et les féminins), dont ¼ des ventes est réalisé pendant la

période estivale. Une baisse des ventes comme dans la presse en général, mais elles restent

très importantes. Forte présence en lecture digitale. Une certaine sémiotique « people ».

Les titres choisis : les HISTORIQUES centrés sur l’actualité des stars françaises (Ici Paris,

France-Dimanche), les « HAUT DE GAMME » qui jouent sur la proximité (Point de Vue,

Paris-Match, Gala et le nouveau né Vanity Faire qui n’est pas dans l’enquête), les

« NOUVELLE GÉNÉRATION » pour les plus jeunes qui rendent les stars plus humaines

notamment par les défauts physiques avec des stars américaines ou de la téléréalité

française et une forte présence numérique (Voici, Public, Closer, Oops !).

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« Lieux du livre et usages de lecteurs » BPI / ENSSIB – Mardi 8 avril 2014

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Cibles privilégiées : les femmes trentenaires et les jeunes. Les jeunes et la presse magazine,

étude de la Bpi menée par Jean-François Barbier-Bouvet. Magazines comme modèles de vie

et outils de construction. Du « voyeurisme assumé » pour des magazines lus rapidement et

très partagés.

LA PRISE EN COMPTE ET LA PERCEPTION DE CES PRATIQUES AU SEIN DES

BIBLIOTHÈQUES MUNICIPALES

La presse people est à la fois présente et peu présente : c’est Paris-Match qui fausse la

donne. Sur un panel de 100 établissements : 71 présentent des abonnements à Paris-Match,

et sans ce magazine on retombe à 22 établissements. Il n’y a pas de rejet immédiat, mais un

certain embarras : pourquoi ? Méconnaissance de cette presse jugée vulgaire – comme les

« mauvais genres » qui sont la SF, la BD, la romance…

Enquête auprès de 21 personnes qui traduit un certain embarras : une seule bibliothécaire a

avoué lire Voilà. Problème de l’actualité vite datée, alors que ça s’applique aussi à d’autres

revues présentes dans les fonds (L’Équipe). Ca ne correspond pas à la définition d’acceptable

que l’on rechercherait dans les fonds… Et les abonnements numériques ? Quand on

s’abonne à Europress ou Lekiosk, on a des magazines people…

Quand on intègre les revues people dans les fonds, pourquoi ? Projet d’établissement qui

cherche à se décentrer et modifier les lignes établies. Élargir ou conquérir des publics.

Modifier l’image et la perception de la bibliothèque qui est souvent perçue comme

rattachée au monde de l’école et des études. La lecture de presse people est non-

discriminante, cf. l’enquête de 2008 d’Olivier Donnat. Exemples :

à la bibliothèque de Mulhouse, suite à une enquête sociologique de 2007 ils se sont

abonnés à des magazines people.

démarche participative que l’on peut retrouver sur internet à Plaine Commune lors

de l’ouverture de nouveaux établissements.

à Toulouse, système souple d’acquisition des revues qui leur permet de tester

rapidement les nouveaux titres mis à disposition.

QUELQUES PISTES AUTOUR DES ENJEUX DE CETTE PROBLÉMATIQUE

Relier à d’autres visions de la bibliothèque, comme la bibliothèque de plage ou d’autres

actions hors-les-murs (exemple : Chambéry).

Se pose la question de l’exclusion. Ce serait indiquer à une partie du public qu’il n’a pas sa

place en bibliothèque. La bibliothèque doit être un levier d’inclusion sociale. Les

bibliothèques participent à l’accomplissement en temps que citoyen des individus. Elle est le

seul endroit où l’on ne demande rien à l’usager, où c’est gratuit, chauffé et souvent ouvert.

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Proposer des collections hybrides et non-excluantes. Là ce serait une imposition de la culture

dominante alors que la presse people est non-discriminante. Les revues people ont toute

leur place dans la lutte contre l’illettrisme ou dans l’apprentissage du français.

CONCLUSION

Il faut quand même réfléchir à l’abonnement à des revues people. Elles sont pertinentes

pour compléter une offre qui ne satisfait pas une partie du public. Frilosité des

bibliothécaires qui ressemble à celle eue envers la littérature sentimentale par exemple.

Mais cette frilosité n’est pas justifiée face aux chiffres de fréquentation des bibliothèques. Il

faut réfléchir à nos pratiques et à la fonction de divertissement des bibliothèques.

Revendiquer un droit à l’expérimentation, en particulier dans les périodiques qui sont assez

souples. Martine Poulain : « toute proposition en bibliothèque est une tentative », c’est ce

qui fait des bibliothèques des lieux vivants. Keith Richards sur les bibliothèques.

DISCUSSION

QUESTION : La frilosité des bibliothécaires. Peut-on élargir la question sur la presse people

à d’autres types de presse : sportive, bricolage… Sachant que les bibliothécaires sont surtout

des femmes : des centres d’intérêt dits masculins leur sont étrangers.

Mathilde Peyrou : Oui, par exemple les 3 magazines les plus vendus sont des magazines de

télévision et il est peu probable de les trouver en bibliothèque. On peut prendre l’exemple

de Causette qui est apparu très rapidement dans les fonds, parce que c’est un magazine qui

correspond au préjugés des bibliothécaires ! Il faut réfléchir sur nos propres réflexes autour

des acquisitions et essayer de se décentrer. C’est aussi une réflexion en réseau : dans les

médiathèques de Bordeaux, il était normal de supprimer 11 abonnements à Elle pour jouer

sur la complémentarité entre les établissements. Voir la gestion très souple de Toulouse

pour avoir un retour très rapide sur les titres proposés. Il faut développer des mesures de

satisfaction du public autour des collections.

QUESTION : une bibliothécaire d’Orléans en charge de l’accueil du public qui se confronte à

ses collègues des acquisitions entre périodes papier et ressources en ligne (ils sont abonnés

au Kiosk mais pas aux magazines people papier).

Mathilde Peyrou : les ressources électroniques sont sous-utilisées par le public et c’est

probablement à cause d’un manque de médiation. Il y a aussi le problème de ne pas avoir la

main sur les bouquets numériques. On est dans une période de transition où le modèle

économique des ressources électroniques n’est pas stabilisé. Les devis sont très différents

selon les bibliothèques. Il faut arrêter de faire comme si les abonnements numériques

n’existaient pas !

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« Lieux du livre et usages de lecteurs » BPI / ENSSIB – Mardi 8 avril 2014

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QUESTION : Est-ce que cette réflexion vous a incité à faire changer les choses dans votre

poste au quotidien ? Est-ce qu’on a des points de comparaison avec d’autres pays, avec les

bibliothèques publiques comme universitaires ? Comparaison avec les « mauvais genres » :

maintenant ils sont acceptés, le même avenir est-il possible pour la presse people ?

Mathilde Peyrou : Sur le réseau des 11 établissements de Bordeau, elle essaye d’amorcer

des changements même s’il faut convaincre certains collègues. La perception de ces revues

s’est quand même décomplexée. En plus par rapport au nombre de revues proposées, c’est

une goutte d’eau ! Il faut vraiment réfléchir à des complémentarités de collection entre les

bibliothèques du réseau.

A l’étranger, cf. son mémoire. Pas de complexe anglo-saxon sur les revues people. Idem pour

les bibliothèques espagnoles (selon les provinces : pas en pays basque, mais oui en

Andalousie) ou italiennes. En Finlande, on retrouve un des plus gros titres. Ca s’expliquerait

par une approche professionnelle différente de l’offre et de la demande. En France en a

encore des réflexes prescriptifs.

Arrivera-t-on à rendre noble la presse people… ? En regardant les témoignages, on trouve

une distanciation réelle des lecteurs : c’est une revue divertissante et parfois insolente mais

pas aliénante. Ces titres parlent à un public jeune (même si elle ne connaît parfois personne

en couverture). Il n’y a aucune académique sur ce type de presse, ce qui la rendrait peut-

être plus légitime.

QUESTION : Il est contradictoire d’acquérir de la presse people pour des bibliothèques hors-

les-murs, est-ce de la discrimination ?

Mathilde Peyrou : les titres étaient présents dans la bibliothèque aussi. A Chambéry, Voici

avait été acheté parce que ça correspondait à une demande très régulière et insistante du

public via le cahier de suggestions. Ces revues ont été amenées hors-les-murs dans des

résidences sociales ou à la maison d’arrêt parce que ce sont ces titres qui avaient été

demandés. Pas de stigmatisation non plus entre centrale et annexes.

QUESTION : Il y a aussi de la frilosité de la part des élus non ? Mettre une annexe dans un

quartier difficile c’est pour « rehausser le niveau » et ils donnent aux bibliothécaires la

mission de ne pas faire de la démagogie en collant « trop » aux attentes des lecteurs.

Difficile de savoir comment doser.

Mathilde Peyrou : elle n’a pas pu rencontrer d’élus dans le cadre de sa recherche, malgré ses

demandes. Certains élus, comme une partie du public, sont parfois plus traditionnalistes, sur

les revues people comme sur certains titres (nudité, violence). Néanmoins ce serait

dommage d’investir dans des bâtiments qui seraient des coquilles vides car les habitants du

quartier se diraient que ce n’est pas pour eux.

QUESTION : Inclure Vanity Fair dans le panier c’est « dangereux » : il correspond beaucoup

plus à la vision d’un magazine acceptable pour les bibliothèques, et pourtant il ne plairait pas

forcément à un lecteur de Oops !.

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Mathilde Peyrou : Oui en effet, même s’il rentre dans la typologie d’un magazine people. A

Toulouse, ça ne marche pas du tout ! Le public de la presse people n’accroche pas et ça fait

double-emploi avec Paris-Match. Au contraire, Oops ! marche très bien notamment avec les

adolescents.

QUESTION : Comparaison avec la presse sportive. Une revue sportive généraliste qui parlait

de tous les sports avec de longs reportages, qui plaisait aux bibliothécaires, n’avait pas

marché du tout ! Il vaut mieux aller directement au but plutôt que de tourner autour du pot

et donner bonne conscience aux bibliothécaires.

Mathilde Peyrou : Oui il y a des revues qui font partie intégrante de l’environnement familier

et de l’imaginaire, les personnes y sont attachées.

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LA BIBLIOTHÈQUE EST SUR LA PLAGE : LES CONSÉQUENCES SUR L’IMAGE DE LA

BIBLIOTHÈQUE DE L’OUVERTURE SAISONNIÈRE DES BIBLIOTHÈQUES DE PLAGE –

BRIGITTE GROLEAU (DIRECTRICE DE LA LECTURE PUBLIQUE, RÉSEAU DES

BIBLIOTHÈQUES SAUMUR AGGLO)

GROLEAU Brigitte, « Sous les galets, la page : Enquête de terrain sur les bibliothèques de plage

en Seine-Maritime », mémoire d’étude du Diplôme de conservateur des bibliothèques, sous

la direction de EVANS Christophe, Villeurbanne, Enssib, janvier 2013.

Structure du mémoire : d’abord un vade mecum sur les bibliothèques de plage à partir de 11

exemples, puis en enquête de terrain en Seine-Maritime avec l’opération Lire à la Plage en

juillet 2012 (où il pleuvait, ça a joué sur les résultats).

¼ de vente de presse people se fait l’été : une incidence sur les bibliothèques de plage ? ;)

Dominique Lahary, lors du congrès ABF 2011 : « Pouvons-nous dissoudre l’image des

bibliothèques et en fabriquer une autre ? » Pourquoi s’intéresser aux bibliothèques de

plage ? Ses collègues du Finistère lui avaient dit que c’était purement marketing. Est-ce que

l’implantation dans un lieu insolite peut aider ? Se délocaliser à la plage, est-ce que ça

change l’image ?

PLAGES, VACANCES, TOURISTES

La plage a un aspect « cool ». Les vacances c’est la période sans travail. Le tourisme est le

cauchemar (méconnaissance du public) et l’aubaine (établissement immuable comme la

piscine) des établissements culturels. Les touristes peuvent faire pression sur les élus : par

exemple, le service de bibliothèque de plage de Biscarosse.

Chiffres. La moitié des Français passe ses vacances d’été sur la plage. Claude Poissenot : il

faut « être présent là où tous nos contemporains se rendent ».

UNE BIBLIOTHÈQUE DE PLAGE, ÇA RESSEMBLE À QUOI ?

Souvent une cabane en dur, très colorée avec du mobilier de jardin, en bord de mer ou de

lac et une signalétique très importante. Souvent, ce ne sont pas des bibliothécaires qui s’en

occupent, mais plutôt des vacataires.

Rapports différents, moins institutionnels entre les bibliothécaires et les publics. Le rapport

de médiation peut s’établir plus facilement et cela semble apprécié.

EST-CE VRAIMENT UNE BIBLIOTHÈQUE ? EST-CE L’ANARCHIE ?

C’est gratuit et ce n’est pas évident pour le public ! Horaires élargis (de 28h à 63h par

semaine). Il n’y a pas de paperasse.

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« Lieux du livre et usages de lecteurs » BPI / ENSSIB – Mardi 8 avril 2014

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En fait, personne ne dit que ce sont des bibliothèques. Image très locale de la bibliothèque.

« Changer l’image de la bibliothèque » c’est la raison la plus invoquée.

Pourquoi est-ce que ça ne fait pas bibliothèque ? On n’appelle pas ça « bibliothèque », en

Seine-Maritime on dit « Lire à la plage ». Le terme « bibliothèque » n’est utilisé qu’à Anglet.

On est habitué à la signalétique éphémère pour les offices de tourisme. On croit que c’est

des toilettes au départ. « Ca ne fait pas bibliothèque ». Les gens ne font pas le lien entre la

bibliothèque municipale et la bibliothèque de plage : problème d’identité et d’identification.

Achat de livres neufs : on les prend pour une librairie. Cf. les 6 fonctions de la librairie par

Sonja Kellenberger (voir plus loin).

Beaucoup se sont posé la question de la politique documentaire : que lit-on à la plage, que

lit-on en 30 minutes, que lit-on l’été ? On choisit des best-sellers, des revues, des romans

sentimentaux : des choses qui se feuillettent, des livres sur la région…

Pourquoi n’ont-ils pas pensé à une bibliothèque ? Une vraie bibliothèque c’est plus grand, on

n’y fait pas que lire, on y vient avec la classe, on peut aller sur internet, il y a des revues, on

peut emprunter. Discours négatif : une vraie bibliothèque c’est contraignant, on ne pas faire

de bruit, on doit donner des papiers, c’est jamais ouvert, c’est poussiéreux, les livres sont

vieux et abîmés et les bibliothécaires sont des stéréotypes.

UNE ENQUÊTE QUI APPREND L’HUMILITÉ

Quand on est accueillant, ouvert, gratuit, avec des collections neuves, dans des lieux

agréables : on est une librairie, pas une bibliothèque. Il faut réfléchir à ces éléments :

importance du lieu de pause, collections de qualité et adéquates, mobilier et assises, vue sur

le paysage, personnel identifiable… Sortir de ses préjugés sur une bibliothèque.

Les bibliothèques de plage sont vraiment utiles. Elles ne changent peut-être pas l’image des

bibliothèques, mais est-ce vraiment le plus important ?

DISCUSSION

QUESTION : Il n’est pas vraiment question d’animation à la bibliothèque de plage, ça

s’arrête aux documents ? De plus, le livre reste dans un périmètre clôt : le livre ne va pas

vers celui qui est sur la serviette.

Brigitte Groleau : il y a des animations en Seine-Maritime, mais elles n’étaient pas très

médiatisées et souvent annulées. La politique d’animation était plus un à-côté mais elle

n’était pas très réfléchie. La cabane « Lire à la plage » était un lieu de ralliement pour se

retrouver, sans forcément utiliser les services. Le directeur départemental du tourisme

voulait exploiter plus en avant la marque « Lire à la plage » pour sortir du livre. C’est une

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volonté qui est née du président du conseil général de Seine-Maritime : lutte contre

l’illettrisme et promotion de la lecture. C’est peut-être pour cela qu’ils sont coincés avec

juste des livres, par cette volonté d’élu.

A Boulogne-sur-Mer les livres avaient le droit de sortir, mais il fallait une pièce d’identité. A

Anglet ils faisaient des prêts pour la semaine en enregistrant les lecteurs (sans pièce

d’identité). Mais sinon les collections étaient petites et autoriser les livres à sortir affaiblit

l’offre et c’était plus simple de rester dans la lecture sur place.

QUESTION : Bibliothécaire de Rennes. La bibliothèque de plage de Biscarosse serait le

contre-exemple de ce qui existe en Seine-Maritime car tout est dehors, il y a la signalétique

dans les rues de la ville, ça s’appelle « Bibliothèque : vue sur la mer ». En Seine-Maritime, ils

ne seraient pas allés au bout de la démarche ?

Brigitte Groleau : A Biscarosse c’est un projet différent. Une bibliothèque doit être utile aux

touristes. Ce n’était pas une demande de leur élu, qui ne voyait même pas l’utilité d’une

bibliothèque. Il s’agissait de montrer aux élus et aux décideurs l’intérêt d’une bibliothèque et

en quoi ça pouvait toucher le public touristique. En Seine-Maritime, risque de la

boboïsation : le mobilier n’est pas prévu ni pour les personnes âgées, ni pour les groupes.

Biscarosse au contraire, car ils n’ont fait tous seuls avec un budget serré, ils ont un mobilier

disparate et simple mais divers : parasols, canapés… Mais image forte en Seine-Maritime : 12

cabanes sur le département, bonne fréquentation.

Bibliothécaire de Rennes : Biscarosse c’est vraiment une réussite dans ce lieu très touristique

et marketing. Ils ont affiché le mot « bibliothèque » et c’est à la fois étonnant et agréable. En

revanche ils avaient invité un écrivain et ça ne marchait pas.

Brigitte Groleau : le directeur départemental a raison, il faut sortir du côté lecture.

QUESTION : Bibliothécaire à Boulogne-sur-Mer en charge des bibliothèques de plage. S’ils

font office de tourisme, ça vient de l’emplacement stratégique : ils sont sur la digue, alors

que l’office de tourisme est beaucoup plus en retrait. Ils mettent en place des animations et

ne sont pas très satisfaits des heures du conte ou des jeux de société, car ils sont en

concurrence avec d'autres animations : maquillage, ballons gonflables, mer… Ils vont plutôt

aller vers de la lecture à la carte en proposant aux enfants présents. Ils travaillent désormais

avec des saisonniers en binôme avec les bibliothécaires, sélectionnés selon des critères

précis : une volonté d’être des médiateurs du livre, car quelques bibliothécaires ne sont pas

partisans de la bibliothèque à la plage. Service mis en place il y a 7 ans, qui commence à

avoir une certaine réputation et les chiffres montrent une augmentation qui dépend de la

météo. C’était à la base un projet non pas de rencontrer les tourismes, mais d’aller là où sont

les habitants de Boulogne-sur-Mer et de changer l’image de la bibliothèque comme lieu

savant. Ils travaillent avec la BDP Pas-de-Calais pour un projet « module de plage » avec

l’association Art Connexion en 2015.

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« Lieux du livre et usages de lecteurs » BPI / ENSSIB – Mardi 8 avril 2014

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Brigitte Groleau : ce qui était intéressant à Boulogne-sur-Mer c’est que la plage est

considérée comme un quartier. C’est donc le public de ce quartier qui va là, on touche

vraiment les habitants de la ville.

QUESTION : Et les bateaux-livres ? Vision différente quand on est sur l’eau.

Brigitte Groleau : Non, ce n’était pas l’objet de l’enquête. Il y en a un à Bordeaux.

Réaction : Oui, Biblio-bateau, avec un bateau amarré le long de la Garonne. Ciblé jeux vidéos

et bornes d’écoute. Ils ont fait aussi Biblio-sport sous une tente. Et projet Biblio-plage dans le

nord de Bordeaux autour d’un plan d’eau artificiel.

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DE L’ESPACE DU LIVRE AU LIEU DE VIE : USAGES ET REPRÉSENTATIONS DES LIBRAIRIES

INDÉPENDANTES DANS LA VILLE – CHRISTOPHE EVANS (CHARGÉ D'ÉTUDES À LA BPI),

ENQUÊTE BPI PAR SONJA KELLENBERGER ET FABRICE RAFFIN

KELLENBERGER Sonja et RAFFIN Fabrice, De l’espace livre au lieu de vie : usages et

représentations des librairies indépendantes dans la ville, étude réalisée à la demande et

avec le concours de la Direction du livre et de la lecture du Ministère de la Culture et de la

Communication, mai 2011.

Les librairies sont comme les bibliothèques des lieux singuliers. Jérôme Lindon, au milieu des

années 1980, publie dans Le Monde une analyse sur le succès commercial de La salle de

bain, le premier roman de Jean-Philippe Toussaint paru en 1985. Quel rôle de la librairie

traditionnelle par rapport aux grandes surfaces culturelles spécialisées, la Fnac en

particulier ? Il distingue une phase de mise en place (office), une phase de lancement et une

phase d’exploitation. Il définit la création puis l’amplification du son. La librairie

traditionnelle a un rôle extrêmement important.

Cette spécificité de la librairie indépendante est placée au cœur du dispositif de l’enquête,

du côté des usagers et du territoire. Il y a un manque de données sur les comportements, les

attentes et les représentations des clients dans l’utilisation et la fréquentation de ces

espaces de commercialisation du livre. Enquête réalisée en 2007-2008 et publiée en 2011.

Problématique de l’enquête : s’intéresser à la façon dont les librairies territorialisent le

culturel dans l’espace urbain, comment elles s’inscrivent dans un territoire urbain, ce

qu’elles reçoivent de ce territoire et ce qu’elles produisent sur ce territoire.

Description du terrain d’étude : librairie La Galerne au Havre, Folies d’encre à Montreuil,

L’atelier 9 dans le 9e arrondissement de Paris et 2 autres terrains complémentaires, une

librairie à Castel-Sarrazin et sa voisine.

LES SIX FONCTIONS D’UNE LIBRAIRIE

Les auteurs de l’enquête ont proposé une typologie d’usages de la librairie qui dépassent les

aspects convenus de ce qu’on attend d’une librairie : acheter des livres ou écouter un

auteur.

1. APPROVISIONNEMENT EN LIVRE. Cette fonction concerne les lecteurs mais

aussi les non-lecteurs qui ont besoin d’acheter des livres notamment pour des

cadeaux.

2. L’expérience du livre : LA LIBRAIRIE COMME UN FEUILLETOIRE GÉANT.

3. LE CABINET DE LECTURE : un lieu où on lit sur place. Souvent on amorce des

lectures dans les libraires. L’enquête montre que ces amorces vont parfois un

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« Lieux du livre et usages de lecteurs » BPI / ENSSIB – Mardi 8 avril 2014

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peu plus loin : on reconnaît lire des livres entiers dans les librairies, c’est plus

facile avec les BD. Certains vont lire en librairie. Certains vont chercher des

informations, par exemple au rayon voyages – et ils n’ont pas l’idée d’aller le

faire à la bibliothèque.

4. LIEU DE SOCIABILITÉ ainsi que de socialisation au livre et aux pratiques de

lecture. On fait visiter la librairie à ses amis.

5. FONCTION PROTECTRICE, de passage et de pause. La librairie matricielle qui

protège du monde tout en vous ouvrant au monde.

6. RESSOURCEMENT CULTUREL. On peut fréquenter les librairies sans passer par

la caisse : aller humer les nouveautés éditoriales. Faire une action culturelle sans

se déplacer dans un lieu culturel au sens fort comme un musée. Organisation de

l’espace non-standardisée.

7. On peut ajouter une 7e : LA FONCTION SYMBOLIQUE. Ca relève d’une

fréquentation militante de la librairie. « Je viens ici pour soutenir le libraire de

mon quartier ».

CONCLUSION

La librairie indépendante donne du relief à la ville, elle inscrit le culturel dans le territoire.

Tout un imaginaire autour du livre, pas seulement la vente. Inscription aussi dans la

temporalité des villes. Les vitrines sont décisives : interface entre le dedans et le dehors, tout

le monde s’arrête devant les vitrines de l’Atelier 9. La librairie, plus que les grandes surfaces,

plus que les bibliothèques, est celle qui présente le plus le livre dans l’espace quotidien de la

ville. Dimension culturelle de la librairie, appuyée par l’élu à la culture.

DISCUSSION

QUESTION : à propos de La Galerne au Havre, le maire du Havre revendique sa librairie

comme sa bibliothèque comme dépendant de sa politique de lecture, cf. la fierté municipale.

Les discours d’élus ne sont plus seulement sur le métier de libraire. Il y a aussi la question de

l’accueil : prépondérante dans la librairie autant que dans la bibliothèque.

Christophe Evans : certains clients témoignent d’une proximité forte avec les libraires, « mon

libraire ». Il n’y a pas d’équivalent en bibliothèque. Cependant certains aussi témoignent de

l’envie qu’on leur fiche complètement la paix dans la librairie.

QUESTION : bibliothécaire en Franche-Comté, la vision des élus sur leur librairie. De plus en

plus on rencontre des élus qui prennent en considération la vision que leurs habitants ont de

la qualité du commerce en centre-ville, dont la librairie fait partie à leurs yeux. Des maires

qui sont allés jusqu’à racheter des murs pour proposer à un libraire des tarifs de loyer voire

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« Lieux du livre et usages de lecteurs » BPI / ENSSIB – Mardi 8 avril 2014

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faire pour eux des travaux. Ca tient peut-être aussi au renforcement de la crise de la

librairie ?

Christophe Evans : oui, exemple de la librairie Les Mots Passants à Aubervilliers.

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« Lieux du livre et usages de lecteurs » BPI / ENSSIB – Mardi 8 avril 2014

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LES « DÉCROCHEURS » : ENQUÊTE SUR LA NON-RÉINSCRIPTION EN BIBLIOTHÈQUE À

LIMOGES ET À SAINT-ETIENNE – CÉLINE DUCROUX (DIRECTRICE ADJOINTE DE LA

BIBLIOTHÈQUE DÉPARTEMENTALE DU VAL D'OISE)

DUCROUX Céline, « Les « décrocheurs » : enquête sur la non-réinscription en bibliothèque à

Limoges et à Saint-Etienne », mémoire d’étude du Diplôme de conservateur des

bibliothèques, sous la direction de LE GOFF Daniel, Villeurbanne, Enssib, janvier 2013.

Document complémentaire de présentation du mémoire.

REMARQUES PRÉLIMINAIRES

Le terme « décrocheur ». Terme proposé par Daniel Le Goff, directeur de la médiathèque de

Limoges. Terme utilisé dans le terme scolaire : des élèves qui manquent d’assiduité. Difficile

alors de faire un parallèle avec les bibliothèques car leur fréquentation n’est pas obligatoire.

Un décrocheur scolaire qui dit : « Je te quitte car tu n’as su ni me plaire, ni me retenir. »

Choix de Limoges et Saint-Etienne : c’est Daniel Le Goff qui a proposé le sujet d’étude car il

avait l’impression qu’il y avait un phénomène de non-réinscription important et qu’il voulait

tenter de le comprendre. Pour valider l’analyse il a proposé à d’autres bibliothèques de

travailler, et Saint-Etienne était un modèle assez proche.

Le thème du décrochage en bibliothèque est un sujet traité à la marge par les études sur la

fréquentation des bibliothèques. C’est une hypothèse qui peut être un peu crispante, car on

part de l’hypothèse que si on ne se réinscrit pas c’est qu’on est déçu par le service. Mais

donc il y a peu de données sur la question.

Objectifs de l’enquête :

Mesurer le phénomène : combien de décrocheurs ?

Analyse : qui sont les décrocheurs et pourquoi décrochent-ils ?

« Raccrocher » : que faire pour enrayer ce phénomène, est-ce normal ?

MÉTHODOLOGIE

Mélange de plusieurs approches pour une vision la plus complète possible.

D’abord, construire un cadre de référence nationale, à partir des données collectées par

l’Observatoire de la Lecture Publique. Y a-t-il une moyenne du décrochage à laquelle

comparer Limoges et Saint-Etienne ? Décrocheurs = nombre d’usagers inactifs encore

comptabilisés dans les SIGB des bibliothèques (définition en creux par rapport à la

définition des usagers actifs). Mais ça ne rend pas compte par exemple de l’usage familial

d’une carte.

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« Lieux du livre et usages de lecteurs » BPI / ENSSIB – Mardi 8 avril 2014

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Ensuite, échelon plus local : cibler les publics identifiés comme décrocheurs dans les bases

des 2 bibliothèques, puis questionnaires envoyés à ces personnes. Faire un portrait des

décrocheurs.

A ce niveau là, ils ont rapproché les décrocheurs des primo-arrivants. Ca permet de vérifier

l’hypothèse que les attentes des nouveaux inscrits correspondent aux déceptions des

décrocheurs. Au total : 723 questionnaires.

Enfin, des entretiens de groupes.

QU’EST-CE QUE ÇA DONNE ?

Taux moyen de décrochage dans les BMVR : 32%. Limoges est à 29% et Saint-Etienne est à

25%. Les professionnels estiment un taux « normal » de décrochage de 20%, de l’ordre du

ressenti : ce ne sont pas des chiffres validés.

Critères choisis au cas où ça ait un rapport avec le décrochage : l’âge, le sexe, les CSP, le lieu

de résidence et donc la distance par rapport à la bibliothèque. Autres éléments : la taille de

la bibliothèque, le type d’abonnement…

Ca tient beaucoup aux horaires de la bibliothèque : la bibliothèque n’est pas ouverte aux

moments où cette population est disponible. Ca tient à l’implantation de la bibliothèque et à

son accessibilité.

LES RAISONS DU DÉCROCHAGE

40% de RAISONS EXOGÈNES, c'est-à-dire qui sont extérieures à la bibliothèque : j’ai

déménagé, c’est compliqué de se garer, je lis trop peu…

10% de RAISONS CONCURRENTES : je préfère acheter mes livres, je suis inscrit à une autre

bibliothèque.

20% D’INADVERTANCE : j’ai oublié de renouveler mon abonnement (si c’est gratuit, faut-il

vraiment se réinscrire à la bibliothèque ?).

20% D’EFFET BIBLIOTHÈQUE : c’est trop cher, les durées ne sont pas adaptées, les horaires

ne conviennent pas, accueil désagréable, je m’y perds, je n’aime pas l’ambiance…

LES MOTIVATIONS DE LA PREMIÈRE INSCRIPTION

30% parce que c’est GRATUIT ou peu cher, 60% pour les SERVICES, 3% pour les

RENCONTRES, 7% pour les ANIMATIONS CULTURELLES.

Ils ont aussi demandé : qu’attendez-vous de la bibliothèque, et qu’est-ce que la bibliothèque

pourrait faire pour maintenir cet intérêt ?

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« Lieux du livre et usages de lecteurs » BPI / ENSSIB – Mardi 8 avril 2014

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QUELQUES ÉLÉMENTS D’ANALYSE

Les décrocheurs ne sont pas perdus : 49% des nouveaux inscrits sont des décrocheurs

repentis. Les décrocheurs ne sont pas tous déçus : 19% seulement font des reproches à la

bibliothèque.

Que faire ?

ACCÉDER : horaires, transports en commun, parking.

ACCUEILLIR : aménagement du lieu, convivialité et pouvoir y passer du temps,

développement des collections, plus d’exemplaires, le sourire et un accueil personnalisé

(tout en gardant son autonomie), surprendre les usagers (être l’invité de la bibliothèque,

sortir du routinier).

COMMUNIQUER : lutter contre l’inadvertance, rappeler la fin de l’abonnement, faire

connaître les services de la bibliothèque, revoir les données d’évaluation (quantifier les

usages des séjournants).

DISCUSSION

QUESTION : Parmi les décrocheurs, peut-être qu’il y a des gens qui fréquentent la

bibliothèque sans être inscrits parce qu’ils n’empruntent plus.

Cécile Ducroux : non, généralement ils ne fréquentent plus la bibliothèque. Un seul n’utilisait

que les services à distance. Mais bon, ça existe probablement ! Biais méthodologiques.

Parce que si on continue sur cette idée là, il y a les inscrits emprunteurs, les inscrits non-

emprunteurs, les non-inscrits fréquentants… Les décrocheurs, par rapport à ces derniers,

faut-il se focaliser sur eux ? Il faudrait peut-être plus se pencher sur les séjournants…

Cécile Ducroux : à Bordeaux une étude est en court sur les séjourneurs de l’espace presse, et

sur pourquoi la carte ne donne plus suffisamment de privilèges.

QUESTION : quels sont les critères sur lesquels ont été établis les inscrits à la bibliothèque ?

Il faut se méfier des statistiques !

Cécile Ducroux : A Limoges le nettoyage datait de 5 ans, à Saint-Etienne de 3 ans.

QUESTION : décrocheurs et monde scolaire, qui a la connotation « échec ». Comment les

avez-vous appelés quand vous les avez rencontrés en présentiel ?

Cécile Ducroux : Elle a parlé du « phénomène de non-réinscription, aussi appelé

décrochage ». Beaucoup disaient aussi que la bibliothèque était très importante, même si ça

ne correspondait pas à leurs besoins.

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« Lieux du livre et usages de lecteurs » BPI / ENSSIB – Mardi 8 avril 2014

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EN TEMPS DE CRISE, QUELS USAGES DES BIBLIOTHÈQUES ET QUELLES ATTENTES DES

CITOYENS ? – THIERRY FOUILLET (ÉLÈVE CONSERVATEUR PROMOTION DCB 22)

FOUILLET Thierry, « La crise vue de la bibliothèque : exploration de la notion de crise à partir

des bibliothèques publiques », mémoire d’étude du Diplôme de conservateur des

bibliothèques, sous la direction de EVANS Christophe, Villeurbanne, Enssib, janvier 2014.

[email protected]

En 2009, Jean-Luc Gautier-Gentès se félicitait de la crise pour les bibliothèques ! Sources :

entretien de Nordine, usager de la BPI, sur France culture + des entretiens micro-trottoir à

Lyon avec 125 personnes pour une enquête avec d’autres élèves de l’Enssib + une étude de

l’OCLC de 2010 sur la perception de la bibliothèque par les usagers en temps de crise + une

enquête de 2013 sur la perception de l’informatique en bibliothèque.

LE CONTEXTE DE LA CRISE

Sujet extrêmement d’actualité. La crise dont on parle a commencé au 3e trimestre 2007,

faillite de la banque le 15 septembre 2008. A l’été 2013, les traders ont récupéré tout ce

qu’ils avaient perdu : la crise financière est terminée. Les pays perdent de leur bonne

notation et ne peuvent plus emprunter : la crise de la dette, qui n’est pas terminée. Cf. le

film Margin Call.

LA BIBLIOTHÈQUE EST ENCORE UN LIEU, QUI PLUS EST UN LIEU DE SOCIABILITÉ

Selon les chiffres de l’Observatoire, la fréquentation augmente et le nombre d’inscrits

diminue comme d’habitude. Le taux d’emprunt est une courbe assez lisse. Cependant depuis

2007 les dépenses d’investissement des collectivités diminuent largement, même si par

ailleurs les dépenses totales sont assez stables. Mais ça cache la hausse du coût de la vie et

le gel des salaires des fonctionnaires…

HABITER LES COLLECTIONS

Surtout : les bibliothèques sont des lieux où l’on trouve des livres. La question de l’attente

sociale est assez faible. Cependant le coût et la donnée économique est très présente.

SE REMETTRE À NIVEAU, LA FORMATION TOUT AU LONG DE LA VIE

Aider quelqu'un à trouver son chemin, on ne vient pas à la bibliothèque pour trouver un

emploi. Autonomie dans la formation. En Europe : 7% des usagers l’utilisent pour trouver du

travail, 20% utilisent les ordinateurs pour trouver des informations sur leur secteur

d’activité. Lieu alternatif à Pôle Emploi.

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« Lieux du livre et usages de lecteurs » BPI / ENSSIB – Mardi 8 avril 2014

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LE REGARD PORTÉ SUR LES USAGERS N’EST PAS BIZARRE, UNE RELATION

D’AUTONOMIE ET UN LIEU OÙ ON REPREND CONFIANCE

L’avantage en bibliothèque c’est que les personnes ne sont pas identifiées comme

chômeurs. « N’ajoutons pas de stigmates à nos actions. » Intervenant social « doux », il faut

rester dans une certaine neutralité. 13% des bibliothèques coopèrent avec des services

sociaux selon la récente enquête du Ministère de la Culture.

Enquête de l’OCLC : être impacté par la crise aux USA est un facteur de fréquentation de la

bibliothèque.

Quelle légitimité des bibliothèques à travailler avec les partenaires sociaux de la ville ?

CONCLUSION

Gardons la crise à distance. Le problème n’est pas la difficulté immédiate de la crise (comme

la crise de 1929) mais la ruine des projets d’avenir. Fabrice Chambon, le rôle social des

bibliothèques et Vincent Chevallier et les sans-abris. Raphaëlle Bats : si la bibliothèque n’est

utile qu’en temps de crise, est-ce que ça veut dire que sans crise elle ne sert à rien ? Toto 30

ans de Samuel Lévêque. Localtis.info. Pourquoi brûle-t-on des bibliothèques ? de Denis

Merklen et La démocratie des crédules de Gérald Bronner sur le rôle démocratique es

bibliothèques.

DISCUSSION

QUESTION : Exemple de Pittsburgh, très touchée par la crise. Ils ont dû fermer des services.

Les bibliothécaires ont convaincu le maire de faire un référendum et à 83% les gens ont

décidé de payer plus d’impôts pour garder les bibliothèques.

Thierry Fouillet : Dialogue assez cynique entre l’élu et les usagers qui ne voulaient pas d’une

bibliothèque de bénévoles. Autre exemple : après Katrina la bibliothèque a joué un rôle

prépondérant pour venir en aide aux populations. En Grèce, les fonctionnaires ne sont pas

remplacés, leurs salaires diminuent, certains sont licenciés. Les bibliothécaires doivent

prendre un deuxième métier. Les gens viennent se chauffer à la bibliothèque car chez eux le

chauffage est coupé.

FIN DE LA JOURNÉE

Les contributions seront disponibles sous formes audio sur le site de la Bpi.