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1 LA MESURE DU DEVELOPPEMENT DURABLE Ezzeddine M’BAREK Statisticien économiste et enseignant à l’INTES INTRODUCTION Le développement est une notion très discutée par les économistes des pays en voie de développement durant la seconde moitié du siècle passé et ce après l’indépendance de la plupart des pays colonisés. Les nouveaux pouvoirs en place cherchaient une stratégie miracle qui pourrait aboutir très vite à une croissance économique en multipliant les expériences qui n’arrivaient guère à une solution satisfaisante et surtout durable. Les pays occidentaux après deux grandes guerres meurtrières et destructives cherchaient à développer leurs économies en se basant sur une industrialisation à outrance qui gaspillent beaucoup de ressources naturelles tout en mettant la vie humaine sur terre en danger à cause de la pollution, des déchets toxiques et de l’effet de serre. Le développement qui dépasse la notion de croissance économique (variation du PIB) et englobe entre autres le naturel, l’humain, le culturel, l’écologique et le social se trouve menacé dans sa durabilité. Les instances internationales et l’ensemble des pays du globe ont mis des stratégies visant à remédier à cette situation inquiétante pour sauver le développement et pérenniser une vie agréable sur la planète terre. Les études et les recherches reviennent en force à partir des années 80 du siècle passé pour mesurer le développent qualifié de durable en s’appuyant soit sur des indicateurs et des indices, soit sur l’évaluation du contenu de ses composantes en capitaux à savoir l’approche par capitaux.

La mesure du developpement durable ezzeddine mbarek 2014

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LA MESURE DU DEVELOPPEMENT DURABLE

Ezzeddine M’BAREK

Statisticien économiste et enseignant à l’INTES

INTRODUCTION

Le développement est une notion très discutée par les économistes des

pays en voie de développement durant la seconde moitié du siècle

passé et ce après l’indépendance de la plupart des pays colonisés.

Les nouveaux pouvoirs en place cherchaient une stratégie miracle qui

pourrait aboutir très vite à une croissance économique en multipliant

les expériences qui n’arrivaient guère à une solution satisfaisante et

surtout durable.

Les pays occidentaux après deux grandes guerres meurtrières et

destructives cherchaient à développer leurs économies en se basant sur

une industrialisation à outrance qui gaspillent beaucoup de ressources

naturelles tout en mettant la vie humaine sur terre en danger à cause de

la pollution, des déchets toxiques et de l’effet de serre.

Le développement qui dépasse la notion de croissance économique

(variation du PIB) et englobe entre autres le naturel, l’humain, le

culturel, l’écologique et le social se trouve menacé dans sa durabilité.

Les instances internationales et l’ensemble des pays du globe ont mis

des stratégies visant à remédier à cette situation inquiétante pour

sauver le développement et pérenniser une vie agréable sur la planète

terre.

Les études et les recherches reviennent en force à partir des années 80

du siècle passé pour mesurer le développent qualifié de durable en

s’appuyant soit sur des indicateurs et des indices, soit sur l’évaluation

du contenu de ses composantes en capitaux à savoir l’approche par

capitaux.

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1. CONCEPT DU DEVELOPPEMENT DURABLE

Le développent durable est un développement qui dépasse la notion de

la croissance économique (mesurée par le PIB) en intégrant ce qu’on

appelle le bien- être. C’est un développement qui assure la durabilité

de la richesse d’un pays donné tout en augmentant et améliorant le

bien-être social de la population actuelle et dans le futur en conservant

au mieux les ressources disponibles.

Le développement durable se distance actuellement de la vision

purement écologique et environnementale pour contenir de nouveaux

concepts tels que le capital social, le capital humain, le capital

environnemental, le capital naturel, le capital physique, la richesse

nationale, le bien-être social, etc.

Philippe HERTIG (2011) montre que le développement durable a

pour objectif ‘’ d’assurer une production de richesse permettant de

satisfaire les besoins de la population, tout en réduisant les inégalités

sociales et en évitant de dégrader l’environnement’’ et que c’est un

projet multidimensionnel et un concept discuté. En effet d’après le

même auteur le développement durable apparait comme ‘’ la

résultante de la combinaison de plusieurs champs de réflexions à la

fois complémentaires et contradictoires’’.

La définition du développement durable trouve son origine dans le

(rapport Brundtland, 1987) et a été formalisée à l’occasion du

sommet de la terre à Rio de Janeiro (Brésil) en 1992 ‘’ le

développement durable est un développement qui répond aux besoins

du présent sans compromettre la capacité des générations futures de

répondre aux leurs’’.

Pour Audigrer, Bugnard et Hertig (2011), le développement durable se

situe à l’intersection de trois cercles représentant l’économie,

l’environnement et le social. Le développement durable est devenu

alors un processus économiquement efficace, socialement équitable et

écologiquement soutenable.

Le développent durable a une histoire et a passé par plusieurs étapes

avant de se concrétiser dans les faits et avoir une certaine autonomie

scientifique :

- 1968 : Le Club de Rome est créé, proposition d’un modèle de

développement plus orienté vers le coté social et environnemental.

3

- 1972 : La Conférence des Nations Unies sur l’Environnement

(UNCHD), à Stockholm, la naissance du premier programme onusien

sur l’environnement (UNEP) et l’approbation de la Déclaration sur

l’Environnement Humain.

- 1987 : La Commission Mondiale pour l’Environnement et le

Développement (commission Brundtland), publie un rapport sur le

développement durable avec une première définition.

-1990 : Le Conseil International pour les Initiatives

Environnementales Locales (ICLEI), participe à la rédaction du

chapitre 28 de l’Agenda 21 de Rio.

- 1992 : La Conférence des NU sur l’Environnement et le

Développement (UNCED), Sommet de la terre à Rio, approbation de

la Déclaration de Rio et l’Agenda 21, la Commission des Nations

Unies pour le Développement Durable (UNCSD) est instituée.

-1997 : Le sommet de la terre +5 à New York, 3ème

Conférence des

Parties à Kyoto, le Protocole de Kyoto.

-2000 : 3ème

Conférence européenne des villes durables à Hannover,

Le Sommet du Millénaire des Nations Unies à New York

2002 : 1er

World Urban Forum à Nairobi, Sommet Mondial pour le

Développement à Johannesburg, approbation de la Déclaration du

Développement Durable et de son Plan d’action.

-2003 : Conférence sur la Gouvernance Environnementale et la

Société Civile à Bruxelles, 3ème

Forum Mondial sur l’Eau à Kyoto,

2ème

Conférence des Gouvernements Régionaux pour le

Développement Durable à Sébastien, 3ème

Conférence des

Gouvernements Régionaux pour le Développement Durable à Perth,

Congrès Mondial sur l’Action 21 Locale à Athènes.

-2004 : Conférences Européenne sur les Energies Renouvelables à

Berlin, 19ème

session du Forum Global sur la Biodiversité à Kuala

Lumpur, Conférence Mondiale sur les Energies Renouvelables à

Bonn.

2. MESURE DU DEVELOPPEMENT DURABLE

Pour rendre le concept du développement durable opérationnel dans

les pratiques des politiques publiques il est nécessaire de passer par

l’étape de mesure de ses composantes.

En effet, le concept du développement durable comme le montre

Candice STEVENS (2006) ‘’…englobe trois dimensions du bien-être

-économique, environnementale et sociale- unies par un jeu de

4

synergies et d’arbitrages complexes’’ mettant en relief des interactions

réciproques à travers des variables d’états. On peut citer entre autres :

- les effets de l’activité économique sur l’environnement :

utilisation des ressources, rejets des déchets,….

- Les services apportés à l’économie par l’environnement :

ressources naturelles, contributions à l’efficience économique et

à l’emploi,…

- Les services apportés à la société par l’environnement : accès

aux ressources, contributions à la santé et aux conditions de vie

et de travail.

- Les effets des variables sociales sur l’environnement :

changements démographiques, modes de consommation,

éducation,….

- Les effets des variables sociales sur l’économie : structure de la

main-d’œuvre, de la population et des ménages, éducation et

formation, niveaux de consommation,…

- Les effets de l’activité économique sur la société : niveaux de

revenu, équité, emploi.

La mesure du développement durable constitue pour les chercheurs un

grand défi au même titre que les pouvoirs publics et les instances

internationales et régionales car elle implique un programme de

grande ampleur et un besoin d’informations multiples et diversifiées

compte tenu de l’existence de plusieurs dimensions et facettes.

La première tentative de mesure s’est principalement basée sur une

batterie d’indicateurs et d’indices (simples ou synthétiques) qui

peuvent suivre le développement dans le temps.

La deuxième tentative récente a utilisé le concept du capital pour

mesurer le développement durable dans sa globalité en tant qu’une

richesse.

2.1 Mesure du développement durable à partir des indicateurs

Pour suivre et mesurer le progrès accompli au niveau du

développement durable dans le temps, la plupart des pays élabore

certains indicateurs pertinents compte tenu de leur stratégie.

Ils utilisent des indicateurs simples pour se renseigner sur l’évolution

et la tendance de certain aspect du phénomène ou des indicateurs et

des indices plus détaillés pour faire des études plus approfondies.

La méthode la plus utilisée consiste à sélectionner et recenser certains

indicateurs pour chaque dimension du développement durable à

5

savoir, économique, sociale et environnementale. Ces indicateurs

peuvent être résumés en des indicateurs fondamentaux dont leur

nombre est réduit.

L’OCDE propose la série suivante comme indicateurs fondamentaux :

Thème ou composante du DD Indicateurs

Actifs environnementaux

Qualité de l’air Indice d’émission de gaz à effets

de serre et émission de CO2

Ressources en eau Intensité de l’utilisation de l’eau

Ressources énergétiques Consommation des ressources

énergétiques

Biodiversité Superficie des zones protégées

Actifs économiques

Actifs produits Volume du stock de capital net

Actifs de R-D Taux de croissance de la

productivité multifactorielle

Actifs financiers Actifs étrangers nets et balance

des opérations courantes

Capital humain

Stock de capital humain Proportion de la population

diplômée du 2ème

cycle du

secondaire

Investissements dans le capital

humain

Dépenses d’éducation

Dépréciation du capital humain Taux et niveau de chômage

Consommation Dépenses de consommation finale

des ménages

Intensité de production de déchets

urbains

Distribution du revenu Coefficient de Gini

Santé Espérance de vie à la naissance

Qualité de l’air en ville

Statut professionnel/emploi Rapport emploi/population

Education Taux de scolarisation

Source : OCDE(2001).Développement durable. Les grandes

questions.

6

Au point de vue comptable, il est difficile de prendre en considération

simultanément les trois dimensions du développement durable.

La plupart des approches mises en place néglige les aspects d’ordre

environnemental et social compte tenu de non disponibilité des

données chiffrées en la matière.

Il en reste néanmoins que la dimension sociale s’avère difficilement

mesurable et se heurte à des problèmes d’ordre méthodologique,

théorique et pratique.

Certains indicateurs sont synthétiques ou composites comme le

Produit Intérieur Brut par tête corrigé de la dépréciation du capital

naturel (PIB vert), l’épargne nette ajustée ou épargne véritable

(épargne nette + les dépenses d’éducation – la consommation de

capital fixe et des dommages aux ressources naturelles), l’empreinte

écologique (surface nécessaire à la production des principales

ressources consommées par une population donnée et à l’absorption

des déchets), l’indice de développement humain(IDH) (niveau de vie,

niveau d’éducation et niveau de santé), l’indice de pauvreté humaine

(IPH), l’indicateur de progrès véritable (IPV) ( tient compte du coût de

l’épuisement des ressources, du coût du crime, du coût de la

destruction de la couche d’ozone, du coût des fractures familiales, du

coût des pollutions de l’air, de l’eau, sonore, etc.), l’ISEW ou Index of

Sustainable Economic Welfare ( indice monétaire corrigeant le PIB),

le GPI ou Genuine Progress Indicator (calculé depuis 1995 pour les

USA, c’est un dérivé de l’ISEW), le MDP ou Measure of Domestic

Progress (proche du GPI, version britannique), l’indicateur de bien-

être économique et social de Osberg et Sharpe (c’est une moyenne de

quatre indicateurs de base), le HWI ou Human Well-Being Index (

indicateur proposé par Prescott-Allen).

Pour le cas tunisien et d’après l’étude de Nouri Soussi (2009) de

l’Observatoire Tunisien de l’Environnement et du Développement

Durable (OTEDD), les indicateurs sont structurés selon le cadre

Pression (les causes des changements environnementaux)- Etat (les

effets et les impacts) – Réponse (les actions et les politiques à mettre

en place pour faire face aux changements induits) qui suit la logique,

cause - effet- réponse sociale. En effet, il y a des interactions

réciproques entre les trois compartiments : Pressions (l’activité

humaine en rapport avec le monde réel), Etats (la pression qui affecte

les ressources naturelles telles que l’eau, le sol, l’air, la biodiversité et

7

l’écosystème) et Réponses (de la société et des acteurs du

développement durable : administrations, ménages, entreprises,

ONGs).

Selon le même auteur, la Tunisie a pris comme base les indicateurs

des Nations Unies (134) et les indicateurs de la Commission

Méditerranéenne de Développement Durable (130) pour arriver à 120

indicateurs pertinents de développement durable pour le cas tunisien

et ce après la réalisation d’un test national de pertinence. Les 120

indicateurs sont ventilés en indicateurs pertinents prioritaires de

développement durable (45), indicateurs régionaux d’amélioration des

conditions de vies (50) et indicatrices sectoriels (25).

Pour l’élaboration des indicateurs du développement durable,

l’OTEDD dispose d’une base de données nommée GIED.

Les indicateurs du transport durables à titre d’exemple se présentent

comme suit :

Dimension Indicateurs

Economique Part du transport collectif dans le transport urbain

de passagers

Part du transport ferroviaire dans le transport urbain

de passagers

Part du transport collectif dans le transport

interurbain de passagers

Part du transport ferroviaire dans le transport

interurbain de passagers

Taux des études d’opportunité de projets

d’infrastructure ayant intégré le coût des

externalités

Taux des entreprises publiques ayant une rentabilité

financière positive

Part du transport ferroviaire de marchandises

Part des opérateurs logistique dans la VA du secteur

transport/logistique

Taux de conteneurs transportés par voie ferrée

Taux de réalisation des projets d’infrastructures de

transport

Taux des opérateurs de transport intérieur adhérents

au programme de mise à niveau

8

Valeur des investissements approuvés dans le cadre

du programme de mise à niveau

Environnement Part de la consommation énergétique finale du

transport routier

Part des énergies alternatives dans la consommation

du secteur

Taux de mortalité totale directement liée aux

émissions du trafic routier taux des émissions de

CO2 dues au transport en tonne/hab./an

Part de la population surexposée au bruit

Taux de renouvellement du parc de véhicules

Part des véhicules en diesel dans les nouvelles

immatriculations

Part du transport de marchandises pour compte

d’autrui

Taux de retour à vide des camions

Part du transport des carburants par pipe

Taux d’occupation des voitures

Social Nombre de km de zones piétonnes dans les villes

Dispositif d’incitation des entreprises à recourir au

télétravail

Taux de croissance du nombre de tués sur les routes

Taux de mortalité sur les routes par million d’hab.

Taux de mortalité sur les routes par millier de

véhicules

Taux de mortalité sur les routes par millier de

permis de conduire

Source : OTEDD, 2013

2.2 Mesure du développement durable selon l’approche par

capitaux

Traditionnellement, le capital constitue un facteur de production de

biens et services échangés sur le marché. Pour mesurer le

développement durable qui englobe des dimensions sociale et

environnementale, il est opportun d’élargir la signification du capital

pour atteindre les biens et services non échangeables sur les marchés.

Selon l’approche par capitaux, le capital est un ensemble d’actifs qui

se renouvelle continuellement en se projetant dans le futur. Elle est

9

donc une richesse qui améliore sans cesse le bien-être social sur une

longue période (durabilité).

On mesure la richesse à un moment donné par un stock du capital et le

mouvement (accroissement ou diminution) par le flux entre deux

instants.

La richesse dans sa globalité a pour finalité le bien-être social qui est

un concept pluridimensionnel et insaisissable voire impossible de le

mesurer que partiellement (estimation de certains aspects tangibles).

Les éléments constitutifs du bien-être sont :

. les conditions de vie matérielles ;

. la santé ;

. l’éducation ;

. les activités personnelles dont le travail ;

. la participation à la vie politique et à la gouvernance ;

. les liens et rapports sociaux ;

. l’environnement ;

. l’insécurité.

Les fondements théoriques de cette approche proviennent de plusieurs

théories telles que :

- La théorie de la croissance économique représentée par le

modèle de Solow ;

- La théorie du bien-être ;

- La théorie du capital humain de Gary Becker ;

- La théorie des ressources naturelle et de l’environnement

- Les travaux du groupe WGSSD (Working Group on Statistics

for Sustainable Development) et TFSD (Task Force for

Measuring Sustainable Development).

Cette approche de mesure du développement durable se base sur la

définition de cinq types de capitaux (certains auteurs les résument en

trois seulement : capital environnement, capital économie et capital

société) à savoir :

1. Le capital humain : il est constitué des connaissances et du savoir

pratique et théorique sous forme de qualifications, de compétences et

d’expériences, des habiletés et de l’état de santé de la population.

Ce capital contribue à influencer le bien-être et la capacité de produire

des individus. Exemple : espérance de vie à la naissance.

D’après Laurent C. (2010), ‘’ le terme du capital humain trouve son

origine dans les travaux des économistes Scultz (1961) et Becker

10

(1964) qui désignaient par ce terme l’ensemble des aptitudes,

physiques comme intellectuelles, de la main d’œuvre favorables à la

production économique.

Selon Keeley B. (2008), ‘’le capital humain se rapporte aux

connaissances, aux compétences et aux caractéristiques propres à

chaque personne.

La mesure du capital humain se heurte à des difficultés d’ordre

méthodologique et de fiabilité quant aux mesures relatives à des

concepts parfois abstraits et non tangibles.

Les méthodologies actuelles utilisées pour mesurer le capital humain

utilisent soit des indicateurs (le plus souvent trop synthétiques et de

type financier) soit des comptes (Balance Scorecard manquant de

rigueur et de pertinence).

Certains auteurs utilisent des modèles socio-économiques pour

mesurer le capital humain afin de pallier les insuffisances des

méthodes classiques.

L’approche par capitaux est une démarche globale pour mesurer la

richesse (en stock et en flux) d’une nation en examinant toutes les

dimensions des capitaux ( produit, financier, humain, social et naturel)

tant matériels qu’immatériels, tangibles et intangibles, renouvelables

et non renouvelables.

Cette richesse nous renseigne sur le potentiel de durabilité sans

connaitre comment les générations futures tireront profit. L’essentiel

dans le présent est de conserver et de protéger cette denrée rare et ne

pas être égoïste en gaspillant le futur.

Cette approche rencontre des difficultés pour mesurer le développent

durable :

- l’agrégation des résultats : les capitaux en questions sont très

hétérogènes pour faire une sommation pure et simple ;

- l’évaluation monétaire est quasi difficile et c’est le cas du capital

social ;

- la substuabilité impossible de certains capitaux et c’est le cas des

formes indispensables.

2. Le capital social : il est composé de normes, d’attitudes, de la

culture et toutes les valeurs partagées par une communauté sociale qui

contribuent à la cohésion et à la coopération entre les personnes et les

entités. Exemple : la répartition de la richesse.

11

On distingue selon Javier M. (2003) cinq éléments qui composent le

capital social d’une collectivité à savoir :

- Les relations sociales (les attitudes et comportements de voisinage) ;

- Les réseaux sociaux (les liaisons de connaissance et d’amitié) ;

- Les normes et les valeurs sociales (le respect mutuel entre

les personnes) ;

- La confiance (situation de tranquillité avec autrui) ;

- Les ressources (le partage des gains et du bonheur).

Pour la collectivité, l’auteur en question suppose que le concept du

capital social se divise en trois dimensions :

- L’adhérence (l’appartenance au groupe) ;

- Le rapprochement (mesure du lien entre les collectivités) ;

- Les relations (liens entre les collectivités et les institutions).

L’auteur suggère un outil pour mesurer le capital social, c’est

l’enquête par questionnaire (99 questions). Les questions sur une

échelle de type Likert portent sur les dimensions du capital social et

administrées au moyen des rencontres face à face.

Les travaux de John F. H. et Sylvain C., (2002) montrent que le

capital social a des conséquences sur la croissance et le

développement :

- la composante confiance semble contribuer à la croissance

économique mais d’une manière non concluante à cause de l’absence

d’une vérification empirique ;

- il semble exister une forte complémentarité entre capital social et

capital humain ;

- le cadre institutionnel a un effet positif sur le capital social ;

- le capital social a une importante incidence sur le bien-être humain ;

- le capital social a un effet positif sur la qualité de la vie, la santé et le

bien- être psychologique ;

- le capital social semble faciliter l’intégration et la recherche

d’emploi.

Pour ces auteurs le capital social est composé de trois piliers :

- les réseaux (l’association entre entités) ;

- les normes (les règles formelles et informelles qui guident le

comportement) ;

- les sanctions (pour que les règles soient respectées).

12

3. Le capital physique ou produit : c’est l’ensemble des actifs

matériels et immatériels qui sont utilisés dans le processus de

production. Exemple : machines, logiciels, bijoux,….

Le capital physique ou produit est composé d’actifs fixes et qui sont

utilisés dans le processus de production pendant une durée qui dépasse

l’année.

4. Le capital financier : c’est l’ensemble des moyens de paiement

et réserves de valeurs comme la monnaie, les dépôts bancaires, les

actions et les obligations, les fonds de pension,…..

Le capital financier qui n’est pas directement productif, se transforme

en capital produit et physique.

5. le capital naturel : il est constitué des ressources naturelles

(matières premières), des terres et des écosystèmes (climat,

environnement). Il se divise en capital renouvelable et non

renouvelable. Le capital naturel non renouvelable est constitué des

ressources souterraines comme le gaz naturel et le pétrole alors que le

capital naturel renouvelable est contenu dans l’écosystème (air), les

forets (bois), etc.

Le capital naturel se divise en trois dimensions : les ressources

naturelles, les terres et les écosystèmes. Les ressources naturelles

forment ce qu’on appelle les matières premières (zinc, fer,

phosphates,…), et constituent alors une source d’énergie. Les terres

constituent un espace pour rentabiliser l’activité humaine (habitat,

culture,…). Les écosystèmes conditionnent comme le climat la vie

humaine.

Les services fournies par le capital naturel sont :

SERVICES D’APPROVISIONNEMENT

Nourriture : cultures, élevage, pêche, aquaculture, chasse et cueillette.

Fibres : bois d’œuvre, coton, chanvre, soie, bois de chauffage.

Ressources génétiques

Constituants biochimiques, médicaments, remèdes, médicaments

naturels.

Eau douce

SERVICES DE REGULATION

Régulation de la qualité de l’air et de l’eau

Régulation des eaux

Régulation de l’érosion

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Purification de l’eau et traitement des déchets

Régulation des maladies

Régulation des parasites

Pollinisation

Régulation des catastrophes naturelles

SERVICES CULTURELS

Valeurs spirituelles et religieuses

Valeurs esthétiques

Loisir et écotourisme

Source : Olivier T., (2006), Capital naturel et croissance pro-pauvres,

septembre.

Pour Olivier T.(2006), ‘’ le capital naturel est l’une des quatre formes

de capital de l’économie, les trois autres formes étant : le capital

physique (ensemble des infrastructures de l’économie : usines,

machines, routes,…), le capital social (l’ensemble des règles, des

normes, des lois, des conventions ) et le capital humain (force de

travail, savoir faire,…)’’

L’équipe de Kirk Hamilton a calculé pour différentes ressources la

somme des revenus actualisés générés pat l’utilisation de ces

ressources, cite Olivier T. (2006).

La grande difficulté quant à l’évaluation du capital naturel réside en

l’évaluation des ressources qualitatives.

CONCLUSION

Il va sans dire que l’approche par capitaux est plus complexe que

celle des indicateurs pour mesurer les différentes dimensions du

développement durable. En effet, chaque dimension et en particulier la

dimension sociale nécessite un effort théorique, conceptuel et

empirique pour arriver à des résultats pertinents et viables.

Quelques pays seulement comme la Suisse, le Norvège et le Canada

utilisent cette approche pour mesurer le développement durable de

leur richesse nationale.

Il en reste quelques problèmes d’ordre méthodologique et théorique

vu la diversité et l’hétérogénéité des capitaux que la recherche

14

fondamentale trouverait certainement des solutions adéquates pour

bientôt.

Cette méthode nécessite entre autre un appareil statistique fiable et

robuste car elle a un grand appétit pour les données et les

informations surtout d’ordre qualitatif et contextuel.

Les avantages de l’approche par capitaux, d’après Sophie B. (2011) ,

‘’résident dans l’utilisation d’un cadre conceptuel cohérent ,qui

permet de structurer les éléments qui sont nécessaires à la mesure du

développement durable’’.

L’auteur en question ajoute ‘le but ultime de l’approche par capitaux

consisterait à produire un indicateur de développement durable

unique, la richesse totale, en agrégeant les valeurs (monétaires) de

chaque capital.

L’approche par capitaux ne rend pas assez explicitement compte de la

répartition des richesses, les changements climatiques, les effets de la

mondialisation.

Et c’est pour cette raison que la Task Force propose d’enrichir le cadre

conceptuel en créant une ‘’ approche conceptuelle’’ composée de trois

concepts à la fois :

- Le bien-être (les générations actuelles) ;

- Les capitaux (bien-être des générations futures) ;

- La dimension internationale.

Vu leur facilité relative au niveau de l’élaboration et de

l’interprétation, la plupart des pays mesure leur développement

durable en utilisant exclusivement des indicateurs simples et parfois

synthétiques comme le cas de la Tunisie.

Mais comme, la durabilité de la richesse nationale est une notion très

importante pour les générations futures compte tenu des dangers qui

guettent notre planète et rendent la vie de plus en plus difficile et

insupportable à cause de l’utilisation massive des ressources naturelles

ou autres.

Les instances internationales à travers une sensibilité accrue depuis

les années 80 du siècle passé et surtout à partir de la conférence de Rio

récoltent maintenant certains fruits malgré la réticence de quelques

pays occidentaux.

15

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(http://www.unece.org/stats/archive/03..3f.e.htm)