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Presses Universitaires du Mirail Pierre MONBEIG Author(s): Romain Gaignard Source: Caravelle (1988-), No. 50, 25 ANS D’AMERIQUE LATINE (1988), pp. 269-271 Published by: Presses Universitaires du Mirail Stable URL: http://www.jstor.org/stable/40853069 . Accessed: 16/06/2014 16:11 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Presses Universitaires du Mirail is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Caravelle (1988-). http://www.jstor.org This content downloaded from 195.78.108.51 on Mon, 16 Jun 2014 16:11:49 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

25 ANS D’AMERIQUE LATINE || Pierre MONBEIG

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Page 1: 25 ANS D’AMERIQUE LATINE || Pierre MONBEIG

Presses Universitaires du Mirail

Pierre MONBEIGAuthor(s): Romain GaignardSource: Caravelle (1988-), No. 50, 25 ANS D’AMERIQUE LATINE (1988), pp. 269-271Published by: Presses Universitaires du MirailStable URL: http://www.jstor.org/stable/40853069 .

Accessed: 16/06/2014 16:11

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CHRONIQUE 269

In Memoriam

Pierre MONBEIG

Pierre Monbeig aurait aimé, je crois, ce CARAVELLE N° 50. Il y manque son regard sur 25 années de recherches en sciences humaines. Le destin nous prive d'une vision que nul autre ne pouvait offrir aussi étendue et multiple, attentive, créative et chaleureuse.

Pierre Monbeig n'était pas seulement le géographe du Brésil; il était en France l'homme de l'Amérique Latine, celui qui la compre- nait et la faisait aimer dans ses richesses comme dans ses faiblesses, dans son immense et mouvante complexité. Sans doute parce que ce précurseur à l'esprit vif et libre, avait ouvert la géographie à tous les mouvements, à toutes les actions et sensations des hommes sur cette terre. C'est grâce à son intimité avec le Brésil des années trente et quarante que Pierre Monbeig se refusait à tout cloisonnement disciplinaire, à tout esprit de système. Ce continent - dont la géo- graphie se construisait sous ses yeux et où il avait contribué à créer la recherche géographique - bouscule dans sa dynamique les bar- rières et les catégories comme les belles constructions que trop d'usa- ges et de traditions universitaires érigent, en Sorbonne ou ailleurs.

Ailleurs ? Pierre Monbeig défricha, me semble-t-il, toujours ailleurs ou à côté. Le jeune agrégé d'histoire et de géographie part aussitôt à la Casa de Vélazquez, à 21 ans en 1929-1930, avant de rejoindre Lévi-Strauss, Braudel, Perroux, d'autres encore dans la mission mise à la disposition de la naissante université de São Paulo par le Quai d'Orsay en 1934. Aventure décisive, que la guerre prolonge pour lui jusqu'en 1947. De retour en France, il enseigne à Strasbourg de 1948 à 1952, puis au Conservatoire National des Arts et Métiers jusqu'en 1961. Est-il appelé en Sorbonne, qu'il la quitte presqu'aussitôt pour devenir en 1963 directeur-adjoint, puis directeur scientifique du CNRS, chargé des sciences humaines. Quittant cette direction en 1972, il reste directeur de recherches au CNRS jusqu'à sa retraite, en 1978.

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270 CM.H.L.B. Caravelle

Si ce Sorbonnard fit ainsi l'université buissonnière - pour décou- vrir d'autres mondes, d'autres élèves, d'autres chercheurs, pour créer, construire, organiser, impulser - il resta jusqu'au bout fidèle à sa passion, dirigeant pendant vingt ans de 1957 à 1977, l'Institut des Hautes Etudes de l'Amérique Latine de Paris.

Il l'avait bâti en un temps où dans l'Europe de la reconstruction, de la guerre froide et de la décolonisation, la mode n'était pas à l'Amérique Latine, comme elle le devint dix ans plus tard. Tous les lecteurs de CARAVELLE, créée précisément au moment où se modi- fiait cette perception, savent ce que doivent à Pierre Monbeig les Amériques Latines comme il se plaisait justement à les nommer dans ces années où se forgeait peu à peu l'unité du continent.

Aussi mon propos sera-t-il plus personnel, on voudra bien me le pardonner. En effet, c'est en lisant Pionniers et planteurs de Sao Paulo, après La Méditerranée de Philippe II, qu'un jeune agrégé d'his- toire germanisant a souhaité découvrir, en géographe, ce nouveau Continent où l'histoire créait la géographie. Lorsqu'en 1959 mes maî- tres bordelais aujourd'hui disparus, Henri Enjalbert et Noël Salo- mon, me proposèrent de répondre à la demande de coopération d'une jeune université argentine, ils me recommandèrent tout aussitôt de rendre visite à Pierre Monbeig : son expérience de l'enseignement et de la recherche au sein même de l'université paulista faisait référence.

Ainsi s'engagea un dialogue de près de trente années, toujours fécond et créatif pour celui qui venait au fil des étapes de la vie rechercher un conseil ou une orientation, écouter une réflexion pétrie d'humour et d'interrogations, sur des choix de vie et de travail beau- coup plus que sur des méthodes ou techniques scientifiques. Je crois que pour ceux qui eurent la chance et la joie He compter pour lui, la « tutelle » de Pierre Monbeig fut toute d'interrogations et de con- fiance. C'était d'abord un maître de vie.

Il n'en était pas moins un maître de Sciences. L'ampleur des res- ponsabilités administratives qu'il exerça à la tête de la recherche en sciences humaines, ne doit pas masquer que Pierre Monbeig fut un novateur et un créateur dans la communauté scientifique. Il démon- tra, trente cinq ans avant la création de la « nouvelle thèse », qu'un livre court et rédigé d'une plume alerte pouvait rendre compte, sans grand appareil, d'une recherche étendue et complexe et ouvrir de nou- veaux chantiers de connaissance. Grâce à son dialogue avec les histo- riens, les économistes et les ethnologues qui se retrouvèrent avec lui dans le bouillonnement créateur de São Paulo, il enrichit prodigieuse- ment la perception du géographe. Il introduisit la notion de la conquê- te de l'espace dans l'analyse géographique : observer la dynamique des fronts pionniers et les mutations et recompositions de l'arrière con-

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CHRONIQUE 271

duit à prendre en compte toutes les dimensions de la vie humaine et de l'organisation sociale.

C'est ainsi que Pierre Monbeig entreprit au tournant des années soixante, par et pour l'Amérique Latine, une extraordinaire expérien- ce de pluridisciplinarité, une décennie avant qu'elle ne .devienne une mode... passagère exactement comme l'intérêt pour l'Amérique Latine en France. Deux fois précurseur, Pierre Monbeig eut raison trop tôt, mais l'esprit de son œuvre persiste dans toute une génération qu'il enthousiasma pour l'Amérique Latine. Quelle belle aventure, cepen- dant, que de faire converger à la fin des années cinquante, dans les modestes locaux de la rue Saint-Guillaume, tant d'illustres écono- mistes, sociologues, politistes, démographes, ethnologues, historiens ou géographes. Ceux de France, bien sûr, mais aussi tous ceux de ces pays d'Amérique qui vers 1960 ne se rencontraient qu'aux Etats-Unis... ou à Paris « chez Pierre Monbeig ». Le couronnement fut, sans doute, le Colloque International de 1964 dont le beau volume d'Actes con- serve aujourd'hui encore tout son intérêt scientifique.

Le provincial peut encore témoigner du soutien de Pierre Monbeig à toute entreprise de décentralisation et de fonctionnement « en réseau », reliant thèmes et lieux. C'est ainsi qu'il soutint au CNRS notre revue CARAVELLE, tout en créant cinq ans plus tard, en 1968, les CAHIERS aux visées différentes, et qu'il encouragea de nombreu- ses façons le développement d'un centre d'enseignement et de recher- che pluridisciplinaire à Toulouse.

Enseignant, chercheur, coopérant, bâtisseur, administrateur, Pierre Monbeig a tout fait au cours de sa longue et belle vie : toujours un peu sur le côté, observant et incitant, mettant en relations et inter- rogeant, aux frontières des disciplines, des genres, des écoles, des institutions. Cet homme savait accueillir, prendre le temps d'écouter et de dialoguer avec un fin sourire, carré dans son fauteuil avec sa pipe, dans cette ambiance chaleureuse qu'entretenaient Mme Monbeig et leur belle et dense famille. Ils avaient su ensemble tisser un réseau d'intense amitié entre les deux rives de l'Atlantique.

Ce lien précieux qu'il nous a légué, sachons le préserver et le nour- rir à notre tour de confiance, de rigueur et de générosité.

Romain Gaignard.

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