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Abécédaire sélectif. Voir en ligne la bande-annonce de l’adaptation de Dom Juan faite par Marcel Bluwal en 1965. C comme cheval. Le cheval, même s’il n’a jamais été mentionné par Molière joue un rôle très important dans le téléfilm : Dom Juan se déplace constamment à cheval. La symbolique de cet animal peut prendre plusieurs sens : Symbole de la force et de la vitalité. Symbole sexuel. Pour l’Église, le cheval a des défauts : orgueilleux, bestial, il ne contrôle pas ses pulsions (pas besoin de rappeler certaines expressions qui renvoient à l’acte sexuel). Il corrobore le caractère de Dom Juan ; c’est un homme plein d’orgueil qui ose défier Dieu et qui recherche les plaisirs sensuels. Son cheval de couleur noire rappelle l’âme damnée de son maître. Souvent, quand il est question d’une femme dans la pièce, le thème du cheval apparaît : il témoigne de l’impétuosité du libertin. Symbole de supériorité sociale (comme l’épée). Les guerriers nobles combattaient à cheval et le peuple à pied. C’est pourquoi le réalisateur joue de façon comique sur l’opposition sociale entre Dom Juan et Sganarelle : le premier se déplace à cheval et le second à bidet, comme Don Quichotte et son valet Sancho Pancha. De plus, quand Dom Juan rencontre le pauvre, va-nu-pieds, cette supériorité sociale est d’autant plus forte, sensible à l’image : le pauvre est filmé en plongée (la caméra est au-dessus de lui, comme si elle l’écrasait) et Dom juan est en contre-plongée (la caméra est à ses pieds, Dom Juan semble nous dominer). Symbole de voyage, de quête désespérée, de sa chevauchée folle vers la mort. Le cheval met en valeur l’errance de Dom Juan : il s’interroge sur le sens de la vie. Lorsque, vers la fin, Dom Juan se sépare de son cheval avant d’entrer dans le tombeau du Commandeur, il marche vers la mort. C COMME COSTUMES. Marcel Bluwal a choisi volontairement de ne pas donner à ses comédiens les costumes comme à l’époque de Molière car il ne les aime pas (les costumes). Il est difficile de déterminer à quelle époque les costumes du téléfilm font référence. Le jabot semble faire référence au XVIIIème siècle (donc à la décadence), le pantalon et la veste en cuir font penser au XXème siècle. Le réalisateur a demandé à sa costumière de faire des vêtements atemporels ; pour montrer que le cas de dom Juan existe depuis la nuit des temps et existera toujours : son mythe est universel. A relier avec la leçon donnée par Mesguich sur « l’heure qu’il est au théâtre ». C COMME COULEURS. Le noir et le blanc. Dans Dom Juan, Marcel Bluwal effectue un travail de recherche sur les deux couleurs antithétiques du noir et du blanc, avec leurs nuances de tons et de lumières. Ces oppositions picturales sont symboliques. Exemple symbolique du contraste noir/blanc.

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Le blanc peut représenter l’innocence du paradis originel. Or Done Elvire, pourtant promise à Dieu, l’a perdue en se donnant à Dom Juan. Elle est salie par le péché : c’est pourquoi elle est habillée de noir, lors de la première apparition (I, 3). Se rendant compte de son erreur, elle se retire au couvent et retrouve son état de religieuse. Ce n’est plus une passion charnelle pour Dom Juan qui l’habite mais une autre, spirituelle et mystique, destinée seulement à Dieu : elle s’est purifiée et retrouve l’innocence du paradis originel (IV, 6). Elle est vêtue d’un voile blanc, sans tache qui marquerait la preuve d’un péché. Son âme est sauvée. Elvire représente aussi la foi véritable par opposition à la conversion -hypocrite- de Dom Juan. Elvire, sincère, est vêtue de blanc, contrairement à Dom Juan, habillé de noir lors de sa fausse conversion. Exemple symbolique du noir. Le noir des vêtements de Dom Juan peut représenter l’âme damnée et cynique de libertin : il est athée, sans scrupules et sans remords. Ce personnage renie tout ce qui fonde la société du XVIIè siècle : il est contre la religion, le Ciel, les voeux sacrés du mariage, les valeurs familiales et nobiliaires, etc. il ne respecte pas non plus la plupart des commandements de Dieu : 1er : “Tu croiras en Dieu” : Dom Juan cherche la preuve de son existence, il n’y croit donc pas. 4ème : “Tu honoreras tes parents” : il souhaite la mort de son père (IV, 5). 5ème : “Tu ne tueras point” : il a tué le Commandeur (I, 2). 6ème : “Tu ne commettras point d’adultère” : no comment ! 9ème : “Tu ne porteras pas de témoignage mensonger contre ton prochain” : il ment à Elvire (I, 3), aux frères d’Elvire, à son propre père (IV, 1), et ne pas oublier le discours sur l’hypocrisie. 10ème : “Tu ne convoiteras pas la femme d’autrui” : il désire une jeune femme promise à une autre (I, 2). En ne respectant pas au moins six commandements de Dieu sur dix, il est voué à une mort prochaine et s’expose au châtiment divin. Dom Juan évolue souvent dans un décor obscur : cette obscurité est le symbole de l’éloignement de Dieu puisque ce dernier est Celui qui apporte la lumière de la Vérité. C’est pourquoi Dom Juan, quand il meurt, tombe dans un gouffre noir et sans fond, dans le monde souterrain de l’au-delà, au lieu de monter vers la lumière en passant par un tunnel. E COMME ERRANCE. Fuite. Fuite en avant. G COMME GENERIQUE DE DEBUT. Le film s’ouvre sur un œil placé dans un triangle, entouré d’une couronne de rayons ; il s’agit d’un symbole maçonnique, qui représente l’œil de Dieu tout-puissant qui voit tout et qui est capable de percer tous les secrets. Cette première image peut avoir deux significations : - Le symbole maçonnique la franc-maçonnerie était une association en partie secrète (apparue au XVIIIème siècle dans laquelle les adeptes, qui se cooptent, réfléchissent sur les idées républicaines et rationalistes : exemple, les Droits de l’Homme), mal perçue par l’Eglise, met en évidence l’hérésie de dom Juan qui causera sa perte. - Le téléspectateur pressent l’omniprésence du Ciel pendant toute la pièce et aussi la fin inévitable du libertin, puni par le Ciel.

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L COMME LIEUX. Le palais : salles immenses, sensation de vide : comme la vie de Dom Juan ? La chambre de Dom Juan. Les écuries. La plage. L’église (Saint-Sulpice) est vide, comme si le réalisateur voulait montrer l'absence de Dieu dans un haut lieu du catholicisme Le tombeau du Commandeur : situé dans les salines d’Arc-et-Sénans, l’architecture est un peu irréelle et menaçante à cause de ses formes inhabituelles et de sa taille impressionnante : le spectateur sent que la menace pèse lourdement sur Dom Juan. (cf. la séquence sur l’utopie). Bâtiment construit par un architecte utopiste, voulant créer une cité idéale (Nicolas Ledoux, 1714) : Bluwal a peut-être voulu montrer le caractère révolutionnaire de Molière -et de Dom Juan. LA MORT ET LES MESSAGERS DU CIEL. Le fil conducteur de la pièce est la marche vers la mort d’un homme. Plusieurs signes avant-coureurs ponctuent la pièce, comme des signes du destin, des avertissements. Dom Juan ne se rend pas compte que, sur son chemin, il ne cesse de faire des rencontres importantes, comme si les personnes rencontrées étaient des messagers envoyés vers le Ciel. Il n’a pas écouté les différentes voix du bon sens : Sganarelle : la sagesse populaire, la bonne conscience de Dom Juan. Elvire, l’archétype de la femme séduite, mariée, trompée et abandonnée. Dom Louis : la famille, le sang, l’autorité du père. Dom Carlos et Dom Alonse, les valeurs morales de la noblesse, l’un réactionnaire, l’autre moderne. Le pauvre. Le spectre : la Mort, les lois du Ciel. La statue : la justice divine, Dieu. Presque tous ces personnages ont évoqué le Ciel et ont prévenu Dom Juan du danger qu’il courait. Il reste sourd à leurs cris. Même les apparitions non humaines (la Statue et le Spectre) ne l’effraient pas, ni le font changer d’avis. Dom Juan s’obstine dans sa théorie, la raison est plus forte que la religion. C’est un matérialiste, il cherche à comprendre, à expliquer ces étranges phénomènes. SPECRE/TEMPS. Sur le chemin vers le tombeau du commandeur, Dom Juan rencontre un spectre dont il croit reconnaître la voix. Laquelle ? Il s’agit d’une femme inconnue. Qui est-elle ? Qui représente-t-elle ? Elle peut représenter toutes les femmes que Dom Juan a bafouées. Comme Dom Juan refuse d’entendre cette dernière menace de Ciel, le spectre “change de figure et représente le temps avec sa faux à la main”. C’est le symbole du temps qui s’écoule impitoyablement : le temps montre à Dom Juan que sa vie touche à sa fin. Il faudra être capable d’évoquer les deux adaptations et expliquer les choix des deux metteurs en scène.