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agir ››››››››››› LE MAGAZINE DE L‘ENTRAIDE PROTESTANTE SUISSE | Nº 15 | 3 / AOÛT 2014 Passage de flambeau aux Philippines

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Passage de flambeau aux Philippines

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agir›››››››››››LE MAGAZINE DE L‘ENTRAIDE PROTESTANTE SUISSE | Nº 15 | 3 / AOÛT 2014

Passage de flambeau aux Philippines

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ÉDITORIAL2 SOMMAIRE

3 Aide humanitaire

Serbie

4 L‘invité

Eric Bornand, un pasteur au service

de la paix

5 Défense des droits en

Suisse

Cours pour les femmes de ménage

6 Transparence

Une boulangerie philippine

a encore du pain sur la planche

Quand l’EPER se retire d’un pays

10 Manifestation

La FEDEVACO fête ses 25 ans

11 Campagne DM-EPER

Interview d’Adrian Scherler,

responsable EPER du Cambodge

14 Arménie

Ecole d’agriculture

16 Actuel et agenda

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Couverture Photo : EPER / Beni BaslerBojet Madlon, producteur de bananes sur l‘île de Mindanao aux Philippines

IMPRESSUM AGIR N°15, AOÛT 2014ISSN 2235-0772Paraît 4 fois par an Editeur : Entraide Protestante Suisse (EPER)Responsable de la publication : Olivier GrazRédaction : Joëlle Herren LauferTraduction : Sandra Först Impression : Jordi, BelpTirage : 15 500 exemplairesAbonnement : CHF 10, déduits une fois par an de vos donsAdresse : Bd de Grancy 17 bis, case postale 536, 1001 LausanneTéléphone : 021 613 40 70Fax : 021 617 26 26Internet : www.eper.chE-mail : [email protected] pour les dons : 10-1390-5

Le succès, c’est aussi apprendre

« Ce qui est simple est toujours faux. Ce qui ne l’est pas est inutilisable ». Cet aphorisme de l’écrivain Paul Valéry résume parfaitement le défi auquel est confrontée une œuvre d’entraide : trouver des réponses applicables à des problèmes complexes. Entre les belles théories et les recettes simplistes, le chemin est étroit et risqué. Les résultats y sont d’autant plus encourageants et les échecs, dont l’EPER a décidé de rendre compte de façon transparente, source d’apprentissage.

Retenus pour la campagne DM-EPER de cet automne, les projets de l’EPER au Cambodge donnent un excellent exemple du défi. Dans ce pays, ce qui est simple est faux tant les facteurs à prendre en considération sont nombreux et variés. Il y a bien sûr d’abord les exigences d’un projet soutenant les communautés rurales : choix des bons partenaires locaux, des méthodes agronomiques adaptées et des publics pour lesquels notre projet peut faire la différence. S’ajoutent pourtant à ces difficultés celles de l’histoire cambodgienne récente : un pays profondément mar-qué par la terreur khmer rouge, qui a perdu près d’un quart de sa population sous Pol Pot, et dont le peuple est resté méfiant à l’égard des autorités. Pas de réponse pratique qui ne prenne en compte sérieusement les risques de conflit. Par ailleurs, le Cambodge éprouve fortement les conséquences du changement climatique. Pas de solution efficace qui n’intègre ces risques nouveaux dans le choix des semis ou des techniques de production.

Le risque d’une belle théorie pointe à l’horizon, qui intégrerait ces divers aspects agronomiques, historiques, démographiques ou écologiques dans une approche aussi holiste qu’impraticable. Les exemples de réalisation présentés montrent que l’EPER a pourtant su ici trouver un bon équilibre. Une explication possible à cette réussite ? Le choix fait par l’EPER de concentrer son activité dans des domaines bien définis, par exemple le soutien aux communautés rurales, et quelques pays priori-taires. Cette double concentration renforce notre savoir-faire et facilite la traduction de questions complexes en réponses utilisables en pratique.

Un spécialiste en communication recommanderait peut-être à l’EPER d’en rester là dans son magazine, convaincu que les « success stories » rassurent les donateurs. Vous découvrirez pourtant aussi dans les pages qui suivent comment un de nos projets aux Philippines échoue, pour l’instant, à atteindre ses objectifs. Il en va de la transparence que l’EPER doit à celles et ceux qui la soutiennent… et qui se doutent bien que les belles histoires, comme les belles théories, ne reflètent qu’une partie de la réalité.

Le paradoxe mis en évidence par Valéry suscitera peut-être chez certains un sentiment d’impuissance démotivant. Le travail de l’EPER sur le terrain montre que rien n’est pourtant joué avant d’avoir essayé. C’est là une motivation essentielle de notre engagement. Merci de votre précieux soutien et excellente lecture.

Philippe BoveySecrétaire romand

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AIDE HUMANITAIRE

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Inondations en SerbieAide d’urgence à la reconstruction de CHF 250 000

L’Entraide Protestante Suisse (EPER) à lancé avec son organisation partenaire locale, Ecumenical Humanitarian Organization (EHO), un projet d’aide à la reconstruction en faveur des victimes des inondations à l’ouest de la Serbie pour un montant de CHF 250 000. Au mois de mai, les tempêtes dévastatrices dans les Balkans ont touché quelque quatre millions de personnes.

Quelques jours après les terribles inonda-tions qui ont touché les Balkans, l’EPER a concentré son soutien sur la réhabilita-

tion des maisons inondées dans des communautés rurales de l’ouest de la Serbie. Pour ce faire, des soutiens sont apportés aux villageois sous forme de moyens techniques, comme par exemple des déshumidificateurs, du matériel de construction et des conseils techniques pour la reconstruction. Les travaux de restauration sont en grande partie réali-sés par les habitants eux-mêmes et placés sous leur responsabilité. Les communautés roms qui habitent souvent à proximité des rivières ont été particulière-ment touchées ; elles bénéficieront également du projet de reconstruction. Depuis de nombreuses années, l’EPER s’emploie, avec l’aide de son organisation partenaire locale expérimentée dans la reconstruction, à améliorer l’habitat et l’existence des 500 000 Roms de Serbie qui vivent dans des conditions désastreuses dans quelque 600 localités. Par ailleurs, l’EPER dispose d’une grande expérience en matière d’aide d’urgence, domaine dans lequel elle est active depuis 1993.

L’EPER sur plusieurs fronts humanitaires Liban : bons alimentaires pour des réfugiés syriens dans le camp de réfugiés de Chatila à Beyrouth

Philippines : après la reconstruction et restauration de plus de 1700 maisons, l’EPER propose des activités génératrices de revenus et s’attelle à la prévention des catastrophes futures

Pakistan : après la reconstruction, acheminement en eau potable pour les victimes des inondations

Soudan du Sud : eau potable, articles d’hygiène et mousti-quaires d’urgence à 20 000 familles déplacées

Vous souhaitez soutenir les victimes des inondations dans les Balkans ? Dons sur le compte postal : 10-1390-5 mention « Inondations Europe de l’Est ». L’EPER est un partenaire accrédité de la Chaîne du Bonheur.

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4 L’INVITÉ

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Eric Bornand, un pasteur au service de la paix

JOËLLE HERREN LAUFER

Qu’est-ce qui vous a décidé à vous engager comme observateur de la paix en Israël/ Palestine ?Pasteur pendant 25 ans, j’aspirais à prendre un temps sabbatique pour m’engager sur le terrain des droits humains. Le souvenir d’un malade pales-tinien fouillé intégralement alors qu’il était couché sur un brancard pour aller se faire soigner en Israël m’avait autrefois interpellé, raison pour laquelle je n’ai pas hésité à m’engager comme observateur dans cette région.

Quel était votre rôle sur place ?Les observateurs des droits humains offrent une présence protectrice pour la population palesti-nienne menacée par l’armée ou les colons israéliens. Concrètement, nous accompagnions sur le chemin de l’école des enfants qui étaient parfois contraints à changer d’itinéraire. Nous documentions les abus commis contre la population palestinienne comme la démolition de maisons ou la destruction de champs d’oliviers. Et nous assurions une présence régulière au check point de Bethléem où près de 5000 travailleurs palestiniens traversent la frontière entre 4 h et 8 h du matin.

Est-ce un climat de guerre ?Il s’agit plutôt d’une situation d’occupation. Des abus sont commis tous les jours. Personne ne sait de quoi sera fait le lendemain et s’il ne subira pas une tracasserie ou une menace qui l’empêchera d’aller travailler. Mais ces pressions administratives sont difficiles à dénoncer. Et puis, tout n’est pas noir ou blanc. J’ai aussi vu des soldats aider des écoliers à traverser la route.

Dans ce contexte, comment ne pas devenir partisan ?Bien que j’aie, à deux reprises, été pris comme bouclier humain entre des jeunes Palestiniens qui jettaient des cailloux et des soldats qui lançaient du gaz lacrymogène, il faut s’en tenir à relever les actions illégales en regard des droits humains et éviter toute généralisation.

Comment avez-vous vécu Noël à Bethléem ?Paradoxalement, c’était le pire Noël de ma vie ! Im-possible d’avoir le cœur en joie dans ce Bethléem qui devient un ghetto. Ce jour-là, j’avais visité une famille vivant dans des conditions déplorables et dont le dernier né d’à peine dix jours était couché à même le sol dans une maison qui prenait l’eau. Cette famille était en procès car sa maison devait être démolie et elle avait reçu l’interdiction de la rénover et en plus l’injonction d’arrêter de faire des enfants !

Quelques lueurs d’espoir ?Ce qui m’impressionne, ce sont les gens qui conti-nuent à se comporter humainement malgré un par-cours terriblement difficile, les chrétiens palestiniens qui refusent de se considérer comme les ennemis d’Israël, ceux qui prient le long du mur et les paci-fistes, israéliens ou palestiniens.

La présence d’observateurs de la paix change-t-elle quelque chose ?C’est toujours difficile de dire ce qui est à l’origine d’un comportement plus clément ou d’un retour-nement de situation. Toujours est-il que les obser-vateurs de la paix, reconnaissables à leur gilet sans manche beige au sigle EAPPI, sont très bien accueillis par la population. Les gens nous reconnaissent et savent que notre présence pacifique est un soutien.

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Le programme œcuménique d’accompagnement en Palestine et Israël (EAPPI) est géré par le Conseil Œcuménique des Eglises. En Suisse, l’EPER gère ce mandat sous le patronage de la Fédération des Eglises protestantes de Suisse et Peace Watch est responsable du travail opérationnel. www.eappi.org

A entendre : conférences d’Eric Bornand Faim et soif de justice à Bethléem : le quotidien à l’ombre du murLieux et dates dans l’agenda, page 16Vous souhaitez vous engager ? Peace Watch est toujours à la recherche de volontaires : www.peacewatch.ch

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DÉFENSE DES DROITS DES PERSONNES SOCIALEMENT DÉFAVORISÉES

Quel bonheur que d’avoir sa maison étincelante tous les vendredis ou de pouvoir confier ses enfants en toute quiétude à une nounou ! Mais on oublie souvent qu’en engageant du personnel à domicile, on devient un employeur à part entière. C’est pourquoi l’EPER, qui propose depuis bientôt dix ans les « chèques-emplois » sur le canton de Vaud, organise également des cours destinés aux employées de maison pour les informer de leurs droits et devoirs.JOËLLE HERREN LAUFER

Le b.a.-ba des droits d’une femme de ménage

E ntre 18 h 30 et 21 h 30. Une dizaine de femmes de ménage sont assises studieusement, derrière des tables alignées pour le cours

« Vos droits » de l’EPER. La formatrice, Isabelle Perrin, juriste à Chèques-emploi, décortique un à un tous les aspects ayant trait à la relation de travail. Malgré le sérieux du thème, l’ambiance est cha-leureuse. Les interventions des participantes fusent, presqu’autant que les sonneries de natel ! « J’ai subi une opération suite à une maladie, et je n’ai pas pu travailler pendant deux semaines. Certains de mes employeurs m’ont payée, d’autres pas, comme cet avocat qui doit pourtant connaître la loi ! » Le témoignage de Maria*, femme de mé-nage, n’est pas isolé. Ce qui est plutôt rare, ce sont les employeurs qui respectent la fameuse échelle bernoise du Code des obligations stipulant qu’un employeur est tenu de payer le salaire en cas de maladie à concurrence de trois semaines par an la première année, un mois la seconde, et ainsi de suite, selon le barème. « Ils sont par contre en droit d’exiger un certificat médical », précise la formatrice.

Changer la mentalité des employeurs

« Comme les femmes de ménage sont payées à l’heure, les patrons peinent à trouver normal de les payer en cas de maladie ou si le jour de travail tombe sur un jour férié, explique Isabelle Perrin. Quand ils nous appellent pour s’en offusquer, je leur de-mande si leurs employeurs les paient lorsqu’ils sont malades. » Il en va de même lorsqu’une patronne téléphone la veille du jour de travail en disant qu’il n’y a pas besoin de venir travailler demain car elle a

des invités ou que ses enfants sont malades. Quand une relation de travail est établie à intervalle régu-lier, elle devrait être respectée. Les cours gratuits de l’EPER destinés aux em-ployés de maison « Vos droits » et les nouveaux cours « Votre santé avant tout », qui ont trait à l’ergonomie dans le travail, font salle comble. Ils permettent de donner des informations fiables sur les rapports de travail et sur les assurances sociales. Fortes de ces informations, certaines femmes de ménage ont le courage d’aller revendiquer leurs droits face à leurs employeurs, telle Maria avec son avocat : « Il n’y a pas de raison que certains paient et d’autres pas ! » – « Ça ne marchera ja-mais ! », soupire l’une d’elle. Et Isabelle Perrin de confirmer que de venir du jour au lendemain avec tout un arriéré de revendications risque de faire fuir l’employeur. Il est donc important de connaître ses droits pour négocier avec tact et s’affirmer lors de nouveaux contrats. Ce n’est qu’avec le temps que l’on peut changer la mentalité des employeurs.

*prénom d’emprunt

Vous aussi, vous employez du personnel domestique ?Vous souhaitez adhérer à Chèques-emploi, avoir des réponses précises à vos questions ou connaître les dates des prochains cours : www.cheques-emploi.ch/vd/Permanence téléphonique : Lun, ma, mer 15 h – 17 h, jeudi 9 h – 12 h, [email protected]éléphone 021 613 40 84

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A Mindanao, la boulangerie a encore du pain sur la planche

Dans la région particulièrement déshéritée du lac Sebu aux Philippines, l’EPER et son partenaire local aident les populations indigènes à s’organiser en coopératives pour transformer les excédents de la production de bananes et les vendre sur le marché. Si l’idée est excellente, elle peine à être rentable.

SUSANNE STAHEL

communautaire qui a vu le jour est une boulangerie produisant des petits pains à base de farine de banane. Malheureusement, les affaires ne fonc-tionnent pas aussi bien que souhaité.

La boulangerie a un problème : la caisse est vide

Nous visitons la boulangerie. Alex Moto, le bou-langer, et son assistant Ruben nous accueillent tout sourire. Trois membres de la coopérative, Julietta, Teresita et Xenia, sont en train d’écraser, en riant, des bananes entières. Elles versent ensuite cette masse dans un récipient, puis le boulanger ajoute de la farine, du sucre, du beurre, de la poudre à lever et du sel, de même qu’un œuf, de l’huile et de l’eau. Il pétrit la pâte, la verse dans des moules ou

A ux Philippines, les indigènes comptent parmi les groupes de population les plus démunis. La région du lac Sebu où l’EPER

est active abrite deux communautés : les Tbolis et les Ubos. Ces anciens chasseurs cueilleurs ont hérité des terres de leurs ancêtres et y pratiquent aujourd’hui l’agriculture. Mais leur savoir-faire ne leur permet pas de produire des excédents à vendre sur le marché. Dans la région pousse une espèce de bananes particulièrement appréciée au Japon : le balangon. Depuis 2009, en collaboration avec l’EPER, l’organisation partenaire locale Allah Valley Development Foundation (ADVFI) initie les indigènes à la culture de ce fruit et les aide à s’organiser en coopératives. Avec le produit tiré de la vente des bananes, les communautés villageoises développent de petites affaires. Le premier projet

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ce qui empêche la livraison dans certaines zones. Parallèlement, le plus grand flou règne sur plusieurs questions : comment les petits pains sont distribués, qui contrôle ce qui advient des invendus, combien de petits pains sont vendus lors d’une tournée ou encore combien cela rapporte.

Mettre de l’argent à la disposition de la coo-pérative est contreproductif

Face au manque de liquidités, ADVFI a fourni des financements et une aide supplémentaires pour tirer la coopérative du pétrin et a demandé à l’EPER de l’aide. « Ce type d’intervention part d’une bonne intention, mais s’avère contreproductif. En effet, la coopérative n’assume alors plus qu’indirectement la responsabilité financière de la boulangerie, et les membres de la coopérative ne sont alors pas mis en face de leurs responsabilités et les problèmes fon-damentaux persistent », explique Marc Zoss, res-ponsable des projets philippins à l’EPER. Si l’EPER soutient son organisation partenaire, c’est pour que celle-ci mette en place, en collaboration avec les bénéficiaires, une affaire rentable et durable. Pour régler ce problème, l’EPER a demandé à son organisation partenaire d’effectuer, avec l’aide d’un conseiller externe, une analyse détaillée de la situation et de prendre les mesures nécessaires pour permettre à la boulangerie d’être financière-ment autonome.

en fait des escargots. Tout va vite : les petits gâteaux sont enfournés puis, lorsqu’ils sont dorés à souhait, ils sont précautionneusement emballés. Pourtant, derrière les coulisses et malgré l’odeur alléchante, la boulangerie a un problème : la caisse est vide. Avec l’aide d’ADVFI, la coopérative a construit l’installation dans un endroit idyllique à proximité du lac Sebu. Les travaux ont pu être financés grâce à la vente de bananes et plusieurs « business plans » ont été conçus. Mais il semblerait qu’aucun d’entre eux n’ait été réaliste. Les paysans ont beau livrer des bananes et le boulanger produire des pe-tits pains, l’argent ne rentre pas. Et ce n’est pas faute d’engagement de la part des membres de la coopérative !

La distribution est, elle aussi, problématique

En analysant la situation de près, l’EPER a pu iden-tifier différents problèmes. L’un d’eux se situe au niveau de la gestion. Par manque d’expérience, toutes sortes d’approches ont été testées. Le salaire du boulanger par exemple. Basé d’abord sur le nombre de pains produits, il s’est aligné sur les kilos de farine utilisés puis sur le nombre d’heures de travail. Inutile de dire que le coût de ce poste important a beaucoup varié au fil du temps. La distribution est elle aussi problématique. Du-rant la saison des pluies, la boulangerie vend moins de petits pains parce que les routes sont boueuses,

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Organiser le retrait ensemble

Début 2012, l’EPER a informé qu’elle se retirerait progressivement d’ici fin 2015 d’Albanie, d’Erythrée, du Guatemala, des Philippines et d’Afrique du Sud afin de se concentrer, dès 2016, sur 16 régions et pays prioritaires. Peter Merz, responsable de la division Etranger, et Marc Zoss, chargé de programme pour les Philippines, expliquent les raisons et l’impact de cette décision à travers l’exemple des Philippines.SUSANNE STAHEL

d’utiliser les moyens qui lui sont confiés de manière à avoir le plus grand impact possible sur les per-sonnes et les communautés socialement défavori-sées. C’est la raison pour laquelle elle a décidé de travailler dans chacun de ses pays d’activité avec un volume minimal d’un million de francs.

Pourquoi un million ?PM : Il s’agit d’assurer un bon équilibre entre le suivi des projets, l’infrastructure et le monitoring d’une part, et les projets mis en œuvre par nos organisations partenaires d’autre part. Lorsque

Pourquoi l’EPER réduit-elle le nombre de ses pays prioritaires ?Peter Merz (PM) : Il s’agit de concentrer les moyens financiers destinés au travail de développement et de coopération et d’unir nos forces sur certains thèmes et pays. Cette focalisation est nécessaire pour pouvoir continuer à répondre aux exigences croissantes. Dans le domaine du développement et de la coopération, nous nous concentrons sur l’accès à la terre, le développement de chaînes de création de valeur, le renforcement de la société civile et la gestion des conflits. L’EPER a à cœur

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nous augmentons notre professionnalisme et le volume de nos programmes, nous améliorons l’impact de notre travail, ce qui profite directe-ment à nos bénéficiaires.

Et qu’en est-il pour les bénéficiaires ?Marc Zoss (MZ) : Les bénéficiaires sont au cœur de notre travail. Mais notre travail avec eux est toujours limité dans le temps. Aux Philippines par exemple, nous formons et conseillons des petits paysans sur l’île de Mindanao afin qu’ils puissent exploiter de manière autonome des arbres à caoutchouc et vivre de cette activité. Nous effectuons ce travail en collaboration avec notre organisation partenaire KRDFI, qui a développé un modèle d’exploitation du sol qui combine la culture d’arbres à caoutchouc et celle de denrées alimentaires de base. Le pro-blème avec les arbres à caoutchouc, c’est que les premières récoltes ne sont possibles qu’après cinq ans. Durant ce temps, les paysans n’ont aucun revenu. Le fait de combiner la culture d’arbres à caoutchouc et de denrées alimentaires permet de surmonter cet obstacle ; la subsistance des familles est ainsi assurée à court et long termes puisqu’à partir de la cinquième année, elles bénéficient d’un revenu stable pour les 25 années suivantes, ce alors que le soutien de l’EPER ne dure que trois ans ! Cet exemple montre bien que nos projets sont limi-tés dans le temps. J’en profite pour souligner que notre concept d’exploitation d’arbres à caoutchouc à Mindanao connaît un tel succès qu’il a été repris par plusieurs communes philippines dans le cadre du programme public de lutte contre la pauvreté.

Les organisations partenaires touchées par le retrait de l’EPER collaboraient souvent avec cette dernière depuis de nombreuses années. Comment leurs collaboratrices et collabora-teurs ont-ils réagi à l’annonce, par exemple aux Philippines ?MZ : Le retrait d’un pays est toujours un processus douloureux. Aux Philippines, cela faisait 25 ans que l’EPER était présente. Nos collègues de travail nous ont remerciés pour les années de soutien et de collaboration, et de les avoir informés suffisam-ment tôt. Car il faut savoir que les bailleurs de fonds et les partenaires n’informent pas tous aussi tôt ni de manière aussi transparente. Nous avons maintenant trois ans devant nous pour organi-ser le retrait ensemble et chercher de nouvelles solutions. Personnellement, cela m’a réjoui de constater avec quelle maturité nos organisations partenaires ont réagi. Cela atteste de leur pro-fessionnalisme et prouve que le travail que nous avons fourni pour développer ces organisations a porté ses fruits.

Les organisations partenaires sont-elles impli-quées dans le retrait ?PM : Il est important d’impliquer les organisations partenaires dès le début et d’élaborer un plan de

retrait commun. C’est précisément ce que nous avons fait. Nos partenaires ont compris pourquoi nous avons décidé de nous concentrer sur un nom-bre limité de pays et ils ont été informés des critères et réflexions à l’origine de cette décision. Durant la phase de retrait, nous mettons à leur disposition des moyens financiers et les conseillons. A ce stade-là, on ne commence rien de nouveau, l’objectif étant de bien terminer ce qui a été entrepris. En ce qui concerne les Philippines, nous nous retirons de ce pays car nos partenaires sont désormais en mesure de poursuivre sans nous leur travail en fa-veur des communautés rurales. C’est ainsi avec bonne conscience et satisfaction que nous mettons un terme à notre engagement dans ce pays.

Cela se passe-il toujours ainsi ?PM : Lorsque, fin 2012, nous nous sommes retirés d’Afrique du Sud, nos partenaires locaux ont réagi de manière très semblable : ils étaient contents que nous ayons été transparents et que nous les ayons informés suffisamment tôt. Lorsque l’on a encore deux ou trois ans devant soi, cela laisse suffisam-ment de temps pour élaborer ensemble un plan de retrait sérieux. Le fait est qu’à chaque début de phase de projet, on pense déjà à la fin : on fixe des objectifs et on évalue l’avancement du projet, puis le cas échéant on élabore une prochaine phase de concert avec les organisations partenaires. Le prin-cipe de nos projets d’amélioration de l’hygiène et de l’accès à l’eau par exemple, c’est que la popula-tion les mette en œuvre et les exploite elle-même. Nous construisons ensemble un puits ou des latrines, et parallèlement nous aidons la commu-nauté villageoise à mettre en place un comité de l’eau autonome qui gère les finances et prenne en charge les éventuelles réparations. D’une manière générale, je suis impressionné par l’engagement et le professionnalisme dont font preuve nos organisations partenaires et leur personnel à toutes les phases des projets, ce notamment dans les pays dont nous nous retirons.

30 ans au service des petits paysans philippinsIronie du sort, l’EPER a démarré et termine son engagement aux Philippines avec une aide d’urgence. En 1991, après la dic-tature Marcos, l’EPER était intervenue dans cet archipel suite à l’éruption du volcan Pinatubo qui avait détruit toute une région. Pendant les 30 ans qui ont suivi, l’EPER a conduit, en partenariat avec des organisations locales, des projets destinés à améliorer le sort des communautés rurales. Et alors que son retrait était déjà amorcé, le typhon Haiyan a tout détruit sur son passage. L’EPER a donc fourni une aide d’urgence à la reconstruction d’habitations sur l’île de Panay.

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PROCHE DES GENS

La FEDEVACO vous invite à la fête

G ratuites, les animations proposées par la Fédération vaudoise de coopération (FEDEVACO) emmèneront petits et grands

à la découverte du travail des personnes qui s’engagent pour un monde plus juste. Dès 13 h 00, le cirque Coquino ouvrira les feux avec un spectacle interactif. Un atelier permettra de s’essayer à la voltige. La compagnie de théâtre lesArts proposera au public de modifier ses sketches sur le commerce équitable, tandis que Textura fera parader les vête-ments qu’elle récolte. Les ados seront à la fête avec la troupe lausannoise de breakdance Nuncha Crew et Keumart, champion suisse de « Human Beat-box ». Entre deux représentations, objets insolites,

affiches BD et courts-métrages permettront de s’en mettre plein les mirettes. Des saveurs d’ici et d’ailleurs et un espace garderie complèteront ce programme. A l’affiche des concerts en soirée, le chanteur K emmènera le public dans son univers poétique. Lui succèderont le rythme des percussions du groupe sénégalais Nana Cissokho & The Baye Fall Family. Le DJ Soul Koffi terminera la soirée en beauté. La FEDEVACO regroupe une quarantaine d’associations actives dans la coopération au déve-loppement dont l’EPER. Elle se mobilise pour faire vivre des projets liés à l’eau, à l’éducation, aux droits humains ou à la santé.

Pour ses 25 ans, la FEDEVACO invite le public à faire la fête samedi 13 septembre à Morges. Cirque, BD, musique et théâtre donneront les couleurs du Sud aux halles CFF. Le chanteur K et le griot mandingue Nana Cissokho sont à l’affiche. En tant que membre, l’EPER sera présente avec un stand « Une chèvre contre la faim ».

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CAMPAGNE DM-EPER

Si on semait du riz bio résistant ?

Active depuis 1979 au Cambodge, l’EPER focalise son action sur la sécurité alimentaire, les impacts des changements climatiques, mais aussi la transformation des conflits. Cette année, les projets de l’EPER au Cambodge illustrent la campagne DM-EPER « Si on semait ». Adrian Scherler, 33 ans, est responsable des projets en Inde, au Cambodge et au Vietnam à l’EPER. Ce jeune anthropologue basé en Suisse décrit quelques-uns des enjeux de son travail au Cambodge.

JOËLLE HERREN LAUFER

Cela fait un an que vous êtes responsable des projets EPER au Cambodge. Qu’est-ce qui vous a le plus frappé lors de votre première visite sur le terrain ?L’approche holistique des projets m’a tout de suite séduit. Les projets vont plus loin que la simple amélioration de la production de riz. Il y a une très grande proximité avec nos partenaires locaux qui procèdent à une analyse complète des besoins. Pour empêcher la migration, ils ont par exemple lancé une formation de jeunes entrepreneurs.

En quoi consistent les projets de l’EPER au Cambodge ?Au Cambodge, le programme de l’EPER soutient le développement rural dans six provinces. Des organisations locales renforcent la sécurité alimen-taire, le développement rural ainsi que la formation des plus démunis. Nous utilisons la méthode de l’intensification des cultures de riz, de fruits et de légumes grâce à des semences et des techniques plus résistantes au climat.

Quelles sont les particularités du Cambodge ?Le traumatisme du règne des Khmers rouges est encore bien présent. Une étude réalisée pour l’EPER

dans deux provinces sur la sensibilité au conflit montre qu’il y a encore beaucoup de méfiance face aux autorités et à l’idée de les faire participer au développement communautaire.

Est-ce que l’EPER travaille aussi sur la réconci-liation ?Nous avons lancé un projet pilote sur six mois avec ACT, une ONG spécialisée dans la transformation des conflits. Il s’agit de renforcer la capacité de gérer les conflits de manière durable, mais aussi de s’attaquer à des conflits toujours plus com-plexes ayant trait à la confiscation de terres pour le compte d’entreprises multinationales qui affluent au Cambodge. Des personnes relais sont formées pour aider les petits paysans à obtenir des titres de propriété et à résister aux expropriations. Le travail de conscientisation sera long avant d’en arriver au niveau de l’Inde, où des ONG revendiquent la terre depuis plus de 20 ans.

Quelles sont les principales difficultés rencon-trées dans les zones rurales ?Le Cambodge souffre d’un double manque. L’élimination de près d’un quart de la population sous Pol Pot – environ 60% de la population a aujourd’hui moins de 30 ans – à laquelle s’ajoute un exode rural parmi les plus graves au monde. Comme les revenus sont insuffisants dans les villages, les gens affluent dans les zones industrielles des grandes villes ou suivent des filières pour travailler illégalement en Thaïlande ou migrer en Corée du Sud. Résultat : les forces de travail manquent cruel-lement dans les campagnes. C’est un vrai problème car la méthode que nous utilisons pour intensifier les récoltes de riz demande un travail soutenu dans les rizières. Sans compter que les gens ont de la peine à unir leurs forces pour travailler conjointement dans des rizières.

Et les changements climatiques ?C’est un autre enjeu ! Il y a des inondations tous les deux ans alors qu’avant, c’était tous les 10-12

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CAMPAGNE DM-EPER

Les paysans optimisent une quarantaine de sortes de riz. Les semences sont multipliées, testées puis vendues.

ans. En collaboration avec l’Université de Berne et WOCAT (World Overview of Conservation Ap-proaches and Technologies), nous identifions les savoir-faire ancestraux de conservation de la terre contre l’érosion pour éviter l’emploi de produits et d’engrais chimiques. C’est également un projet pilote.

Qui sont vos partenaires sur place ?Nous en avons deux. Le premier, SOFDEC, est géré par un grand spécialiste en agriculture intégrée, Dr Hak, qui a développé un centre de recherche appliquée à Kampung Chhnang. C’est là que sont développés des types de riz plus résistants aux inon-dations, de même que des piments, des pastèques et des courges. SACRED est notre second parte-naire. Un de ses points forts est de sensibiliser les futurs migrants aux abus qu’ils pourraient subir, tant dans l’industrie textile que dans le business du sexe.

Pourquoi faut-il soutenir le Cambodge ?C’est le deuxième pays d’Asie du Sud-Est le plus pauvre après la Birmanie. Il existe un énorme po-tentiel d’amélioration de la production et de lutte contre la pauvreté des petits paysans actuellement démunis.

« Grâce aux canards, ma production de riz a pris l’ascenseur »

J’ai découvert l’agriculture intégrée en 2012. Il s’agit d’élever des canards en parallèle de la culture de riz. J’ai reçu 20 can-netons, 3 kg de nourriture, des médicaments et des vaccins. Je me suis bien occupé des canards, surtout lorsqu’ils étaient bébés. Trente jours après la plantation du riz, je les ai lâchés dans la rizière afin qu’ils mangent les mauvaises herbes et les insectes. Je n’avais jamais entendu parler de cette technique avant. J’ai aussi appliqué les principes de riziculture intensive. J’ai pris soin de nourrir les canards avec des ressources locales : du son de riz, du riz, de l’amarante, des restes. En plus de réduire les parasites, les canards pondent environ dix œufs par jour et sont également une source de viande pour la famille. Sans compter que ma production de riz a pris l’ascenseur ! Le revenu de ma famille est passé de 83 000 riels (CHF 19) à 132 000 riels (CHF 30) par mois !

Keo Saran, 35 ansVillage de Makak, commune de Thom Ta Ordistrict de Samrong Tong, Kampong Speu

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« J’ai quasiment doublé ma récolte de riz »

Avec neuf autres paysans, nous avons suivi un atelier de trois jours sur les systèmes de riziculture intensive, dispensé par l’organisation villageoise soutenue par SOFDEC. Grâce aux connaissances acquises, j’ai pu améliorer mes techniques de préparation de la terre, réduire l’utilisation de fertilisants chi-miques et la quantité de semences nécessaire, avoir accès à de l’eau de qualité et combattre les parasites. J’utilise désormais dix fois moins de semences (25 kg par hectare, contre 250 kg par le passé). Mes récoltes de riz ont presque doublé, passant de 3,5 à 6,2 tonnes/hectare. Quant aux fertilisants, j’ai baissé leur utilisation de 200 kg/hectare. J’ai vu que d’autres paysans de la région appliquaient eux aussi le système de riziculture intensive et ça me réjouit beaucoup.

Chuob Ky, 43 ansVillage de Kien Tama, commune de Kampong Odistrict de Chulkiri, province de Kampong Chhnang

Vous voulez soutenir la campagne DM-EPER ?

– Créez un événement paroissial avec une intervention d’un spécialiste sur l’action concrète de l’EPER en faveur du Cambodge➢– DVD « Cambodge : semer l’espoir au pays de la mousson » à disposition– Flyer à distribuer– Fleur pour une animationInfos et commandes : Nicole Pignolet-Poschung, 021 613 40 83 ou [email protected]

Campagne dans les paroisses protestantesmenée conjointement avecDM-Echange et mission

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14 DÉVELOPPEMENT DES COMMUNAUTÉS RURALES

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A ram et Marine Hakobyan sont tous deux penchés au-dessus d’un drap posé à même le sol, devant leur maison. Ils y ont déposé

leur récolte d’abricots qu’ils font sécher au soleil pour mieux la conserver. Plus loin, derrière le bâti-ment, s’étend leur potager. Il y a des haricots, des pommes de terre, des tomates, différentes sortes de baies, de l’ail, des oignons, des pêchers et des abricotiers. A côté, se trouve un champ de céréales dont la récolte sèche également au soleil.

Petite entreprise familiale

Le couple est fier : depuis deux ans, il gère une pépinière ! Comme six autres agriculteurs bénéfi-ciaires de l’EPER, Aram cultive des plants d’arbres fruitiers qu’il vend aux fermes avoisinantes : pom-miers, poiriers, abricotiers, pêchers, amandiers et noyers. Au total, Aram et Marine gèrent 7000 plants répartis dans deux champs. Lorsqu’ils ont trop de travail, leurs deux fils, étudiants à Erewan,

ArménieLa pépinière qui a changé leur vie

Aram Hakobyan et sa femme Marine vivent dans le village de Getap, au sud-ouest de l’Arménie, dans une région montagneuse faiblement peuplée du nom de Wajoz Dsor. Autrefois, ils habitaient avec leurs deux fils dans une hutte minuscule et avaient à peine de quoi se nourrir. Aujourd’hui, grâce au soutien de l’EPER et de son organisation partenaire Syunik, Aram et Marine gèrent leur propre pépinière. Ils se sont construit une nouvelle maison et leurs fils étudient.

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Agenouillé par terre, Aram Hakobyan montre comment tailler les arbustes afin qu’ils ne poussent pas trop vite et développent des racines solides. Ses plants sont réputés pour leur qualité.

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viennent leur prêter main forte. Les arbustes font entre 20 cm et 1 m de haut. « Il faut bien les tailler dès le départ pour pouvoir développer des racines solides lors de la vente », explique Aram. Sous l’ère soviétique, Aram était employé dans une pépinière, tout comme son père. Mais avec la chute du Mur, il a perdu son emploi. Ses tentatives d’ouvrir sa propre pépinière ont échoué. Il ne pou-vait s’acheter le matériel nécessaire et personne n’avait les moyens de lui acheter des plants. La famille d’Aram a donc vécu durant de nombreuses années dans la pauvreté dans une maison rudi-mentaire, avec pour seules bases de subsistance un potager et des petits jobs occasionnels sur des chantiers.

La clé du succès

Il y a trois ans, Aram a été contacté par Syunik, une organisation partenaire de l’EPER qui avait déjà installé des systèmes d’irrigation dans la région. Elle lui a proposé de suivre une formation avec d’autres agriculteurs en vue d’ouvrir sa propre pépinière. Il a également reçu du matériel pour débuter la pro-duction de plants. Aujourd’hui, il transmet les con-naissances qu’il a acquises à ses clients. Car, pour obtenir de bonnes récoltes, il est essentiel de savoir comment tailler et entretenir ses arbres. Son succès, il le doit en grande partie à son épouse, Marine, qui l’a convaincu de participer à ce projet. Le couple gère une véritable entreprise. Aram a appris à effectuer des études de marché et à faire de la publicité pour ses arbres, notam-ment sur Internet. De sorte que sa clientèle s’est étoffée. « Aujourd’hui, je suis un entrepreneur et je suis fier de notre travail », se réjouit-il. Il a pu réaliser le rêve familial de construire une nouvelle maison, d’acheter une machine à laver et d’envoyer ses fils étudier. Actuellement, le couple épargne pour acheter un nouveau terrain et augmenter ainsi sa production. Il faut dire que les études des fils coûtent cher, même si le cadet a eu la chance – rare – d’obtenir une bourse de l’Etat. Au Sud-Caucase (Arménie, Géorgie et Azer-baïdjan), l’EPER collabore avec 19 organisations partenaires locales. Elle participe aussi à plusieurs réseaux internationaux. Situé dans la capitale géor-gienne de Tbilissi, son bureau de coordination pour le Sud-Caucase soutient ses organisations partenaires en termes de planification, de mise en œuvre et de suivi des projets. L’œuvre d’entraide dispose également de bureaux supplémentaires en Kakhétie (Géorgie) et à Agjabedi (Azerbaïdjan) afin de réaliser un mandat pour la DDC. Le programme de l’EPER dans le Sud-Caucase vise à améliorer les conditions de vie des populations rurales et dé-favorisées, en favorisant notamment les activités génératrices de revenu.

L’Arménie a accédé à l’indépendance le 21 septembre 1991. Aujourd’hui, c’est une république présidentielle qui compte environ 3,2 millions d’habitants. L’Eglise apostolique d’Arménie est la plus ancienne Eglise étatique au monde : le christianisme a en effet été déclaré religion de l’Etat en l’an 301. En Arménie, 47% de la population vit de l’agriculture. L’EPER est présente dans le pays depuis 1988, année où la ré-gion de Lori, au nord de la République soviétique d’Arménie, a été touchée par un grave séisme. L’EPER avait alors fourni une aide d’urgence et avait contribué à la reconstruction.

Parmi les tâches à effectuer dans une pépinière, il y a l’arrachage des mauvaises herbes. Marine, la femme d’Aram, n’hésite pas à mettre elle aussi la main à la pâte.

Devant leur maison, Aram et Marine Hakobyan trient les abricots qu’ils ont fait sécher au soleil.

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Petits moyens, grands effets.

Mariage, baptême, fêteL’occasion de faire un geste

Partagez les moments forts de votre vie ! A chaque événement réjouissant de votre vie, vous avez la possibilité de décupler votre joie en soutenant l’un des projets de l’EPER en faveur des plus démunis, ici ou dans le monde. Une petite brochure est à votre disposition pour vous donner des idées de projets à soutenir, comme amener de l’eau potable dans des villages zimbabwéens pour les ren-dre plus autonomes ou soutenir les Nouveaux Jardins pour permettre aux réfugiés de s’intégrer. Mais il est aussi possible de choisir une cause ou un pays qui vous tient particulière-ment à cœur. Grâce à votre solidarité et à l’action concrète de nos parte-naires sur le terrain, de nombreuses personnes peuvent accéder à une vie digne et autonome.

Commande et infos : Nicole Pignolet : 021 613 40 83

Ateliers didactiquesDes chèvres multicolores

Dans le cadre de la journée « Mille couleurs pour notre terre » de l’Eglise évangélique réformée vaudoises, l’EPER a géré six ateliers auprès d’une centaine d’enfants de 6 à 10 ans. Il s’agissait de les sensibiliser à la pau-vreté des régions rurales à travers le monde. Et d’illustrer un type d’action qui consiste à fournir une aide de départ sous forme de chèvre. Un cycle facile à comprendre pour mon-trer l’impact d’une aide durable. Une femme qui reçoit une chèvre dispose de lait pour ses enfants, d’engrais, grâce au crottin, pour améliorer ses récoltes qui peuvent être vendues et générer un petit revenu. Par la suite, quand les chèvres ont des petits, les dix premiers servent à rembourser ce don, les suivants permettent de créer un capital et d’acquérir une autono-mie. Chaque enfant a ensuite décoré une chèvre, symbole du don aux effets multiplicateurs. Ainsi, poilues, tachetées ou multicolores, les chèvres bricolées et ramenées à domicile illustraient la devise de l’EPER : petits moyens, grands effets !

Actuel Agenda

Campagne DM-EPER 2014 « Si on semait »Soirées de lancement 1er septembre à Bulle (FR), maison de paroisse, 19 h 302 septembre à Martigny (VS), salle de paroisse, 19 h 304 septembre à Neuchâtel (NE), salle de paroisse de la maladière, 19 h 8 septembre à Genève (GE), centre paroissial de la Jonction, 18 h 3011 septembre à Tramelan (BE-JU), maison de paroisse, 19 h12 septembre à Lausanne (VD), Crêt-Bérard, 17 h 30Informations : Nicole Pignolet, 021 613 40 83, [email protected]

Faim et soif de justiceà Bethléem : le quotidien à l’ombre du murConférences d’Eric Bornand, de retour d’Israël/Palestine comme observateur de la paix31 août, Centre paroissial à Chavannes-Renens, 13 h 309 septembre, Paroisse de St-Jean à Lausanne, 20 h11 septembre, Centre de Crêt-Bérard à Puidoux28 septembre, Chapelle de Bel-Air à Cheseaux, 17 h2 octobre, Foyer paroissial de Chardonne, 14 h 3023 octobre, Grande salle de Puidoux, 14 hInfos : 021 331 57 01, angesabethleem.wordpress.com

2 novembre 2014Culte à l’Eglise française de BerneCulte d’offrande en faveur du projet de soutien aux paysannes et paysans du Rutshuru et du Masisi en République démocratique du Congo, soutenus activement par la paroisse. Informations : Thierry Dominicié, Commission TerreNouvelle, 078 715 46 52

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