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Analyse Economique, Modélisation Prospective et ... · l'environnement, à la déstabilisation d’un système de croyance dominant vers la fin des ... trajectoire de la science

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Analyse Economique, Modélisation Prospective et Développement durable ou

Comment faire remonter des informations du futur?

il n’y a pas trois temps, le passé, le présent et le

futur, il n’y a que le présent : le passé dans le présent, le futur dans le présent

Saint-Augustin

Le terme de développement durable ne s’est imposé que vers la fin des années quatre-vingt,s mais cela fait plus d’un quart de siècle que la question de l’harmonisation entre environnement et développement est présente sur l’agenda international. Je voudrais essayer ici de mesurer le chemin parcouru en adoptant un point de vue spécifique, celui des débats autour des modèles quantitatifs convoqués à son service. Je ne partage certes pas l’illusion que ces outils guident les choix publics ; ceux-ci dépendent in fine des rapports de force qui traversent les institutions qui en ont la charge. En revanche, dans des sociétés non dictatoriales, il y a obligation de « rendre raison » de ses arguments, et réapparaît alors fatalement la triste obligation de quantifier et ce malgré le réflexe de méfiance à l’encontre des modèles numériques qui prévaut, en France plus qu’ailleurs, dans les milieux ouverts à la thématique du développement durable. En fait, soupçonner la modélisation de soutien systématique à des rhétoriques conservatrices, revient à oublier son rôle dans l’alerte sur les limites possibles de la croissance (Meadows, 1972), dans la mise en exergue des besoins fondamentaux des pays en développement (Herrera, 1977) ou dans la proposition de choix alternatifs au nucléaire avec les Soft Energy Paths d’A. Lovins (1977). En fait, dire que les ressources sont limitées ou qu’un environnement dégradé diminue le bien-être, c’est mettre le doigt dans l’engrenage de l’argumentation par le chiffre ou la courbe. C’est pourquoi, les grandes oppositions récurrentes entre le quantitatif (réducteur, limité, manipulatoire) et le qualitatif (subtil, riche et tellement plus sympathique) restent très scolastiques, au sens que Bourdieu (1997) donne à ce terme, à savoir un débat entre ceux qui disposent de σχολη, de temps libre dégagé des urgences du monde: terrain d’exercice dans la course à l’excellence universitaire, elles améliorent peu notre capacité à comprendre et agir. Ce texte part du fait que l’obligation de quantifier, va, volens nolens, formater les discours, légitimer les lignes de fracture, éclairer ou au contraire obscurcir l’entendement collectif des enjeux réels. Il propose une lecture rétrospective de la modélisation appliquée au développement durable pour révéler des structures intellectuelles fondamentales et des postures qui se cristallisent autour de ce chantier intellectuel et programmatique. J’utiliserai pour ce faire très souvent l’histoire de la prospective énergétique parce qu’elle constitue le domaine le plus développé de la modélisation prospective, ceci en raison de l’importance des intérêts économiques concernés par des enjeux comme le nucléaire, l’épuisement des ressources ou l’effet de serre.

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1. Analyse économique et prospective: problème scientifique? question de croyance? ou de posture intellectuelle? Que la prospective soit un point de passage obligé pour l’étude du développement durable devrait être un truisme. Cependant, le mot prospective s’est heurté à un double problème de légitimité, celui de la validité scientifiques d’exercices numériques sur des horizons éloignés et celui du lien entre de prospective et analyse économique. Le premier réflexe des économistes professionnels a en effet été de s’inquiéter de la rigueur d’une première vague de modèles construits, sans respect des règles internes de l’édifice néo-classique, par des démographes, technologues ou transfuges de la cybernétique comme Forrester. Une bref retour sur la protohistoire du développement durable permet de mieux comprendre ce qui est en jeu ici. Les écrits des principaux acteurs intellectuels de ce qui devait déboucher sur la Conférence de Stockholm sur l’Environnement frappent par le caractère fort peu environnementaliste et très développementiste de leur phrasé, I. Sachs dira plus tard (1979) : « Cela n’avance à rien de tirer la sonnette d’alarme écologique sans mettre en évidence le rapport profond qui existe entre l’arrogance avec laquelle nous traitons la nature et l’idéologie de la croissance sauvage, sous-tendue par le réductionnisme économique, la poursuite de l’avantage immédiat, l’internalisation des profits et l’externalisation des coûts .... Avant que ne survienne le désastre écologique, nous risquons d’en connaître d’autres, tout aussi dangereux, créés de toute pièce par les hommes ..... l’effondrement de la mégamachine, la vulnérabilité des grands systèmes techniques étant la rançon de leur productivité très élevée ». Ceci est symptomatique d’un contexte où l’environnementalisme et la thématique de l’épuisement des ressources émergent comme une provocation intellectuelle au sein d’un mouvement de critique globale de la société de consommation et des trente glorieuses dans le monde occidental, des dérives des économies centralisées et de dénonciation de la persistance de écarts de richesse entre le Tiers et le Premier Monde. Des auteurs aussi divers que K.W. Kapp, E.J. Mishan, A. Gorz, R. Passet, et I. Sachs participent comme Habermas ou Ivan Illich à partir d’autres problématiques que l'environnement, à la déstabilisation d’un système de croyance dominant vers la fin des années soixante et dont le cœur est le système technique. Or ces interrogations percutent la trajectoire de la science économique moderne à un moment où la synthèse éclectique entre keynésianisme et axiomatique néo-classique a besoin de l’assimilation du changement technique au progrès et de l’hypothèse d’autonomie entre progrès technique et économie: l’axiomatique Arrow-Debreu, base théorique forte de la micro-économie, pourra se prévaloir de succès en matière de gestion des systèmes de réseau; grâce à Solow, le macroéconomiste avait l’espoir d’un réglage fin de la croissance puisque, en modulant l’intensité capitalistique des techniques, on évitait le pessimisme des conclusions du modèle Harrod-Domar où la croissance équilibrée relève du miracle permanent ou de l’art du planificateur éclairé(1); concernant le Tiers-Monde, la théorie des étapes de Rostow se trouvait renforcée par les thèses sur la percolation du développement par transfert des techniques. Dans cette période que Malinvaud (1987) résume joliment par l’expression « quand tout allait bien », rien ne s’oppose a priori à une liaison entre analyse économique et prospective ; on la trouve d’ailleurs postulée par Pierre Massé dans "Le Plan ou l’Anti-hasard" (1965). Les ingénieurs économistes savaient que la programmation de grands barrages ou l’évaluation

1 De ce strict point de vue Solow retrouve d’ailleurs une des conclusions formulées par Kalecki (1969) dans un espace théorique fort différent

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stratégique de programmes nucléaires ne pouvaient s’effectuer sans une vision du monde sur plusieurs décennieset, en macroéconomie, les progrès de l’économétrie et des moyens de calcul permettaient d’envisager le développement de modèles à long terme. C’est en ébranlant cet optimisme technologique que les dossiers du développement durable (pièges du transfert mimétique des techniques, marée noire, nucléaire, mort des forêts, ozone, déforestation, effet de serre) interdiront une liaison aisée entre prospective et analyse. L’économiste ne pourra en effet plus traiter la technique comme un paramètre exogène. Ce n’est d’ailleurs pas le caractère négatif de certains impacts de la technologie qui lui pose problème, car il dispose de la théorie de l’internalisation des effets externes, c’est la résultante de deux paramètres : - le décalage temporel entre une décision, ses effets attendus, le déploiement des externalités négatives et leur reconnaissance sociale, - les boucles dynamiques entre consommation, technologie, modes de consommation et institutions, grille heuristique à partir de laquelle I. Sachs organisait dès 1972, son programme de recherche sur les liens entre environnement et développement, si le choix d’une technologie à l’instant t n’est pas neutre vis-à-vis des modes de consommation ou de la localisation des activités, il y a un risque de boucle auto-renforçante conduisant à des bifurcations dans les modes de développement au-delà des mécanismes de « lock-in » par rendement croissants d’adoption systématisés par Arthur (1989). Cette combinaison d’incertitudes et d’effets de système ouvre la possibilité d’équilibres multiples ex-ante ; dans l’ambiance intellectuelle de l’époque, ceci venait déstabiliser l’état de l’art de l’économiste à trois niveaux: - les critères décisionnels: la tentative de l’économie publique, lutter autant que faire se peut contre « l’arbitraire illimité de l’administration » devient plus risquée dès lors que les états du monde contingents sont controversés et que l’analyse coût-bénéfice donne autant de résultats qu’il y a d’états du monde envisageables à un horizon considéré, - l’ambition prédictive: en plein progrès de l’économétrie, les économistes peuvent espérer que leur art accède enfin au statut de science au sens positiviste et fournisse les outils d’une ingénierie sociale. La mise en évidence des lois permettait de prédire puis d’optimiser les politiques. Or le très long terme rend très vite impossible le maniement de fonctions à élasticités constantes et l'extrapolation sans contrôle des fonctions exponentielles usuelles, - le traitement du progrès technique: négligeant les leçons du débat entre les deux Cambridge 1966-1971, les macro-économistes traiteront la technologie via la proxy de la fonction coût ; or ce ne sont pas des dollars, des yens ou des francs qui portent atteinte à l’environnement mais des modes de produire et de consommer qu’il faut bien expliciter. Il n’y a certes rien dans le cœur de l’axiomatique néo-classique qui interdise de penser les équilibres multiples comme on le verra avec les travaux sur les tâches solaires dans les années quatre-vingt; mais il y a une marge entre la théorie pure et la vulgate des hand-books et des experts. Symptomatique du divorce entre prospective et analyse économique, aucun des grands noms de la science économique, ne s’était réellement commis à des travaux de prospective jusqu’à la provocation du rapport du Club de Rome. L’usage d’outils numériques devint nécessaire et la réflexion sur le long terme ne cessa d’être systématiquement associée aux romans de science fiction ou à l’activité divinatoire. C’est dans ce contexte, aggravé par le choc pétrolier, que des rapports de prospective seront commandés à des économistes par les organisations internationales : Léontieff et Tinbergen par les Nations-Unies, Lesourne par l’OCDE.

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Les économistes sortiront alors de leur réflexe académique qui est de ne pas se commettre sur des horizons mal maîtrisables; ils changeront de posture, parfois sans se l’avouer, vis-à-vis de la prospective et, confiants dans la pertinence de leur boîte à outils, ils vont longtemps sous-estimer les mutations intellectuelles exigées. 2. Modélisation des liens économie, changement technique, environnement: quelques leçons de trente ans d’efforts Ignacy Sachs a su très tôt expliquer pourquoi la technologie est un paramètre déterminant de l’harmonisation entre développement et environnement (graphique n°1) ; Le rôle des ingénieurs dans l’histoire de la modélisation de cet interface n’est dès lors pas surprenant. Par des modèles technico-économiques « bottom-up », ils vont d’abord ouvrir une hétérodoxie par rapport aux méthodes standard. Mais on assistera dans un deuxième temps à une remontée en puissance de modèles ancrés dans la théorie néo-classique, puis, ces dernières années, les modèles d’équilibre général calculables permettront d’envisager des progrès analytiques intéressants. Or cette trajectoire de débats apparemment techniques est révélatrice de l’évolution des vraies lignes de partage concernant la connaissance, la décision et l’action s’agissant du long terme.

T

PR

Y

M

P = populationT = techniquesR = ressources naturellesY = produitM = environnement (ou milieu)

Graphique 1

2.1. L’optimisme technologique ou ..... l’ouverture des possibles

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Au cours des années soixante-dix, l’originalité des modèles technico-économiques réside dans une description fine des usages énergétiques et des équipements utilisateurs d’énergie, une explicitation des changements structurels par des modules macro-économiques et démographiques simples en amont, un usage non systématique de l’économétrie, ceci en raison du manque de séries temporelles longues pour certains paramètres clefs, de l’importance de données d’ingénieur et du peu de fiabilité de certaines spécifications. Ces modèles, dont le modèle Médée en France fût un des précurseurs (Château, Lapillonne, 1977) se sont avérés plus aptes à prévoir le découplage entre énergie et croissance que les modèles économétriques agrégés (top-down). Leur conclusion stratégique majeure découlait de l’existence de marges de manœuvre importantes du côté de la demande énergétique qui rendaient possible un report dans le temps les ambitieux programmes nucléaires envisagés à l’époque. Vers la fin des années quatre-vingt, cette caractéristique allait être utilisée pour justifier des stratégies ambitieuses de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) : à court terme, l’analyse des chaînes de conversion de l’énergie primaire à l’énergie utile fait apparaître un déficit d’efficacité, un « efficiency gap » entre les meilleures technologies disponibles et les techniques réellement utilisées; à long terme, des travaux comme le scénario LESS (Low Energy Sustainable Scenario) de Greenpeace et les scénarios Jérémie et Noé sur lesquels B. Dessus revient dans ce volume, suggèrent qu’il est possible de définir des systèmes énergétiques qui réduisent les émissions de GES à un niveau compatible avec les capacités d’auto-épuration naturelle sans recourir à l’énergie nucléaire et sans accroître les dépenses énergétiques. 2.2. Les questions de l’économiste: pessimisme ou lucidité? Le premier réflexe d’économistes sera d’injecter une bonne dose de pessimisme dans l’optimisme des ingénieurs en posant deux séries de questions, ce qui conduira à discuter le concept de stratégies « sans-regret » et à soulever la question du « timing » de l’action préventive. 2.2.2. Coûts de transaction et d’incitation: du tangible à l’intangible Ils contestent tout d’abord l’ampleur de potentiels à coûts négatifs sous l’argument que le marché aurait dû spontanément adopter les technologies concernées si elles étaient réellement supérieures. En se contentant de comparer les technologies selon le coût unitaire de desserte d’un service énergétique, les modèles bottom-up ignorent les coûts cachés de la technique (écart entre performance annoncée et performance réelle, coûts de maintenance), mais surtout la réalité des préférences des consommateurs. Les services énergétiques ne sont en effet pas le seul argument des fonctions d’utilité: le bas coût de déplacement métro ou RER sur la région parisienne n’empêche pas le recours à la voiture individuelle, perçue comme plus souple et moins pénible. Dès lors, «efficiency gap » n’est pas forcément révélateur d’imperfections de marché et l’argument « prouvez-moi que les marchés ne sont pas parfaits » va devenir d’une efficacité rhétorique réelle en raison même du caractère non tangible des paramètres invoqués. Même les économistes qui ne partagent pas une foi si absolue dans les vertus des marchés réels vont d'ailleurs faire valoir qu’il faut tenir compte du coût des compensations nécessaires pour désarmer l’opposition de ceux qui tirent profit des situations acquises. Si on considère enfin que la préférence des consommateurs est « mal formée », (culte de la voiture par exemple) il faut procéder à des campagnes d’information et d’incitation, mais la difficulté est alors de

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démontrer qu’on ne viole pas la souveraineté du consommateur par du « technological forcing ». On ne discutera à ce stade aucun de ces arguments, mais on fera remarquer que, en demandant d’intégrer les coûts de transaction, et d’incitation dans le calcul, les économistes pointent des obstacles réels mais orientent la discussion vers des paramètres difficilement chiffrables et largement intangibles. 2.2.3. Coûts d’incitation, impacts intersectoriels et effets d’éviction de sentiers d’innovation alternatifs Face aux ingénieurs qui s’accordent sur le fait que les marges de manoeuvre techniques sont potentiellement supérieures à long terme qu’à court terme, les économistes rappellent que la mise en place d’un système technique nouveau ne se réduit pas à une simple substitution entre procédés techniques et que son coût social, loin de se réduire à la somme des coûts technico-économiques directs doit intégrer: - les coûts d’incitation: le spectre des énergies nouvelles est très large, couvre des usages diversifiés et est traversé par vives controverses; ceci interdit de piloter l’innovation en ce domaine comme un programme centralisé en fonction d’un objectif bien défini comme le nucléaire ou Ariane. Elle doit être portée par un processus d’essai-erreur décentralisé soutenu par incitations économiques stables. - les impacts intersectoriels: des scénarios comme le LESS (Low Energy Sustainable Scenario) où 50% de l’énergie mondiale viendraient de la biomasse en l’an 2100, n’ont pas expertisé réellement les équilibres globaux à même de les sous-tendre et les compétitions possibles pour l’usage de l’espace entre production énergétique, production alimentaire, et protection de la biodiversité. Un tel effort se heurte à des problèmes d’intégration d’échelle évidents pour intégrer les leçons d'études de terrain issues du "Food-energy Nexus" par exemple (Sachs, 1990) et à la difficulté de simuler de façon conjointe les dynamiques des marchés fonciers, alimentaires et énergétiques, - les effets d’éviction: les formalisations récentes représentent le changement technique comme induit et endogène en intégrant les signaux-prix, la R&D et les économies d’apprentissage. Mais, conséquence immédiate, le progrès technique n’est plus une « manna from heaven » qu’un trend temporel autonome apporterait: le progrès technique sur les technologies propres se paye alors d’effets d’éviction sur les autres domaines. Il est évident que ces arguments ont une utilisation polémique dans un sens conservateur et on peut faire valoir à leur encontre que les modélisations top-down sont loin de fournir des réponses aux questions émises: représentation fruste des incitations tarifaires et non tarifaires, difficulté de chiffrer les effets d’éviction. En revanche, cette discussion a le mérite de souligner que, si l’innovation permet en effet de réduire les tensions entre croissance et environnement, la réorienter à un coût d’opportunité qui ne peut être réduit ou annulé que par des synergies avec d’autres domaines ou si les potentiels de développement des techniques alternatives sont supérieurs à ceux des autres techniques. Ce point est important car assimiler tout financement de la R&D à un «free lunch » serait s’empêcher de discuter de la légitimité des financements de R&D en fonction de leur utilité sociale : on ne peut poser des questions sur les recherches en armement ou en manipulations génétiques sans accepter les mêmes questions sur l’environnement.

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2.3. Retour de la macro-économie: quand des économistes sont porteurs d’optimisme

Le retour de la macro-économie dans un débat initialement centré sur les techniques va s’effectuer dès lors qu’on s’accordera sur la nécessité de signaux de politique publique pour infléchir les comportements actuels. Il y a un accord général des économistes pour rétablir la « vérité des coûts » des activités polluantes et, dans le cas de l’effet de serre, l’idée d’une taxe carbone va vite venir en discussion. Mais il deviendra alors évident que les signaux nécessaires pour modifier sensiblement les tendances dégageront des fonds hors de proportion avec les besoins de financement des seules technologies propres. La question du recyclage du produit des écotaxes va alors émerger et induire un débat sur le double-dividende de réformes fiscales : en taxant les « bads » et détaxant les « goods » via une baisse des autres prélèvements obligatoires (charges sociales par exemple) on pourrait améliorer à la fois l’environnement et l’emploi. Avocats du pessimisme sur la question du changement technique, les économistes, ou du moins certains d’entre eux, vont donc montrer que des coûts accrus pour le système énergétique pourront conduire à un bilan macro-économique positif. Certes, cette thèse va susciter des débats d’autant plus vifs que les intérêts impliqués sont importants, et que la proposition européenne de taxe mixte carbone-énergie, mal préparée, soutenue par une expertise trop ad-hoc et aisément déstabilisable, va introduire beaucoup de confusion. Au plan strictement analytique cependant les conclusions sont simples, voire triviales: il y a double-dividende si les effets distorsifs des écotaxes sont inférieurs aux effets distorsifs des taxes auxquelles elles se substituent et s’il y a réellement stabilité des prélèvements obligatoires. Concrètement, il n’y a pas de double-dividende possible si on juge que les pouvoirs publics profiterons des écotaxes pour augmenter les prélèvements et si on considère soit que les charges sociales ne jouent pas sur le niveau global de chômage soit, à l’autre extrême, qu’on doit réduire à minima l’Etat-Providence et maximiser la flexibilité du travail. Dans le cas en effet de fiscalité optimale et de marché du travail sans friction une écotaxe de peut que rajouter des distorsions. Les débats sont ici obscurcis par leur technicité mais on remarquera qu’ils renvoient à d’autres débats largement non résolus qui, in fine, relèvent de visions du monde voire de projets politiques différents. 2.4. Stratégies sans regret: question de théorie, de faits scientifiques, ou de jugement sur l’état du monde? Les baisses d’émissions "à coûts négatifs", les effets externes de l'innovation, le double-dividende d’écotaxes constituent, avec la synergie entre baisse des émissions de GES et réduction de coûts d'environnement locaux, les composantes de politiques "sans regret". Cette catégorie de sans-regret surgit historiquement (Hourcade et alii, 1989) comme traduction pratique du principe de précaution adopté à Rio en 1992 (Hourcade, 1997) dans une situation où les risques environnementaux sont fortement controversés. Une mesure sans-regret est une mesure qu’on ne regrettera pas si ultérieurement, ces risques ne se vérifient pas. Nous voudrions synthétiser ici ce qui ce joue autour des débats sur l’existence de ces potentiels. Soit une frontière de production F(Q, E) où Q est un agrégat des biens et services et E le degré de qualité de l'environnement(cf. graphique n°2). Si l’économie réelle se situe sur cette frontière, il est facile de voir que toute augmentation de E se paye d'une baisse de Q. Ce n’est que si l'économie est située sur un point O à l'intérieur du quadrant dessiné par la fonction E:

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qu’il devient possible de se déplacer de O vers tout point de l'arc AB en augmentant simultanément la qualité de l'environnement et la production. Mais O traduit une situation où l’économie est sous-efficace que ce soit à court terme ou à long terme. Or nous venons de voir que les écarts d’évaluation dans les résultats des modèles viennent moins de différences techniques que de jugements exogènes sur le degré de sub-optimalité des économies et sur les coûts de transaction à payer pour transformer le jeu d'intérêts acquis qui bloque tout mouvement de réforme. Il ne faut donc pas se méprendre sur l’importance des oppositions méthodologiques: la majorité des modèles keynésiens conclue à l’existence de double-dividendes d’écotaxes et les modèles d’équilibre général calculables sont plus pessimistes ; mais un modèle keynésien simulant une économie avec une fiscalité optimale et un marché du travail flexible conclura à des coûts macroéconomiques importants des écotaxes alors qu’un modèle d’équilibre général partant d’un scénario de base avec chômage structurel générera un double-dividende. Le point central est de savoir si l’on peut et si l’on veut, expliciter comment telle hypothèse, telle liaison fonctionnelle ou tel paramétrage traduisent en fait une vision du monde ou une conjecture spécifique.

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Graphique 2 - Variations autour du concept de sans-regret

O

Q

B

D

A

E

0Baisses desEmissions

F (Q, E)

C

D'

C'

O'

L’absence d’une telle clarification facilite un jeu rhétorique lors et de la communication publique des résultats. Si l'économie est suboptimale en effet, tout point de F correspond à une pondération différente entre précaution environnementale et bien-être économique ; on pourrait donc choisir de se déplacer de O à D et maximiser la production matérielle au prix d’émissions accrues. Profiter de la suboptimalité actuelle de l’économie pour baisser les émissions sans diminuer la richesse permet donc des arbitrages moins tendus mais ne constituerait donc pas stricto sensu une action "sans regret" puisqu'en définitive on pourra toujours regretter ex post de ne pas avoir maximisé la production. On peut donc, à partir des mêmes chiffres présenter un bilan économique net positif ou négatif d’une politique de développement durable: dans notre graphique, O’C’ traduit un double dividende, mais si admet qu’il serait possible de passer de O à D, D’C’ représente le coût d’opportunité de la précaution. Ceci revient à dire: réformez d’abord l’économie pour la placer sur la frontière de production et mesurez ensuite le coût des politiques environnementales. Une telle rhétorique a le mérite d’éviter la confusion entre sans-regret et free lunch; améliorer simultanément bien-être collectif et l’environnement, passe en effet par un arbitrage en faveur de l’environnement et par la décision d’affronter les perdants d’un progrès collectif. Mais elle introduit en pratique une asymétrie d’argument puisqu’on évalue en fait rarement les politiques de

Produit économique

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développement durable par rapport à des réformes non environnementalistes dont on intégrerait aussi les coûts de transaction et les limites d’acceptabilité politiques.

3. L’harmonisation environnement/développement: temps de la connaissance, et temps de l’action

J’espère avoir fait ressortir de ce qui précède que les divergences dans les résultats des travaux modélisés reflètent principalement que divers jeux de croyance, conjectures et jugements sur les états du monde présent et futurs et qu’il faut se garder des grandes oppositions méthodologiques qui font ici un effet de masque. C’est pourquoi le rapport de l'IPCC a pris le risque de relativiser fortement les querelles d’école. Je parle ici de risque car l’existence de grands clivages récurrents sécurise; doctement présentés, ils peuvent séduire le jeune chercheur et surtout faciliter des stratégies de publication parallèles qui, en fait, ne se réfutent jamais. Or, si on refuse ces facilités, on se rend compte de ce fait tout simple, à savoir que l’effort de modélisation, mené en toute rigueur scientifique, est un détour fort utile pour dégager les lignes de fracture réelles derrière les affrontements apparents A ce niveau, le premier enseignement des trois dernières décennies est la présence de deux formes concurrentes d’optimisme par rapport à l’idée de limitation des ressources ou des capacités d'absorption de l’environnement. Les tenants de l’inaction s’appuient sur des données scientifiques montrant des réserves importantes de ressources fossiles ou des tendances très lentes du réchauffement climatique pour conclure que les trends actuels de progrès technique (efficacité énergétique, technologies de forage, nucléaire intrinsèquement sûr) suffiront pour éviter des problèmes majeurs. Les tenants de l’action s’appuient bien évidemment sur l’autre branche des fourchettes disponibles, sur la possibilité de surprises (non linéarités dans réponses du climat) et introduisent un scepticisme profond sur la sûreté du cycle nucléaire. Mais ils complètent ce diagnostic par un grand optimisme sur les énergies renouvelables et le découplage entre énergie et croissance économique. En d’autres termes, ce n’est pas la possibilité de solutions techniques ou d’inflexion dans les modes de consommation qui est en débat, c’est le choix entre utopies concurrentes alors même qu’aucune preuve définitive des risques futurs ne permet aujourd’hui de les départager. Dès lors les oppositions entre soutenabilité faible ou forte cristallisées autour de D. Pearce d’un côté et les tenants de l’Ecological Economics de l’autre sont décalées par rapport à la réalité de la prospective et induisent un débat largement anachronique: le déficit de légitimité des politiques de développement durable vient de ce qu’il y a controverses non pas sur l’existence de limites dans l’absolu, mais à un horizon suffisamment proche pour qu’on s’en inquiète aujourd’hui. Le vrai problème vient de ce que, faute de signaux convaincants, nous risquons de prendre des décisions trop tardives en raison de l’inertie des systèmes techniques et institutionnels et des systèmes naturels et de ce qu’un tel décalage entre le temps de la connaissance et le temps de l’action permet une utilisation stratégique des informations. Dans une telle configurations, il y a un problèmes de décision sous controverses (O. Godard), qui comporte trois issues possibles (Hourcade et alii, 1992): - la préemption du futur par le présent: dans l’attente de certitudes plus convaincantes, on prolonge les comportements actuels, - la capture du présent par le futur au nom d’une image arbitraire des dangers ou du devenir de tel ou tel projet technique,

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- la paralysie de l’action collective entraînée par la multiplication de ce que Ph. Roqueplo appelle des « perceptions de risques inversés » où ce n’est plus l’enjeu environnemental qui est perçu comme risque mais sa manipulation stratégique, d’où un regressum ad infinitum de controverses qui gèle l’action. C’est pourquoi un consensus croissant se fait pour un cadrage de la décision en termes de timing, d’assurance et de « hedging » qu’on peut résumer ainsi : a) le développement durable suppose l’harmonisation des dynamiques des systèmes naturels, de la technologie et des modes de consommation avec les rythmes de la connaissance, et de la prise de conscience du long terme, b) en contexte d’incertitudes radicale la question n’est pas celle des réponses optimales à très long terme mais un processus de décision séquentielle qui engage des actions à forte valeur d’option incorporée pour ralentir le rythme auquel nous nous rapprochons de risques controversés, élargit la gamme des options techniques disponibles en privilégiant la flexibilité des choix, c) l’étude des trajectoires montre qu’il n’est nul besoin de trancher prématurément aujourd’hui certaines controverses (par exemple le choix entre nucléaire et solaire face à l’effet de serre) mais que certaines bifurcations peu lisibles aujourd’hui (par exemple dans le domaine des transports) sont prises « en passant » alors qu’elles sont porteuses de risques environnementaux, d) dans un tel processus séquentiel, l’ampleur des divergences sur le futur importe moins que l’accord sur une règle de gestion du principe de précaution (Lave, Dowlatabadi, 1993). CONCLUSION : La prospective : problème de discipline intellectuelle d’institutions ou de volonté ? Un des initiateurs de l’application du calcul micro-économique à EDF insistait dès 1948 dans un apologue célèbre, sur le fait que « c’est une reconstruction fallacieuse a posteriori » ... de considérer le coût marginal comme une « donnée abstraite préexistante » et qu’il fallait bien une prospective des états du monde pour pouvoir calculer (G. Dessus, 1971). On avait oublié largement cette mise en garde dans les années soixante. Ce qui a changé depuis lors, ce sont les horizons temporels envisagés et la radicalité des incertitudes ; on trouvera de nos jours moins de modélisateurs pour considérer que « l’avenir est relativement libre de surprises » (Hafele, 1981), et beaucoup plus qui mettent l’accent sur la pluralité des équilibres et l’incertitude. Mais le changement majeur par rapport à l’immédiat après-guerre vient du fait qu’on cherche aujourd'hui un appui scientifique, non plus pour un commandement centralisé à haute compétence technique, mais pour une négociation entre cet entrelacs de sentiments d’appartenance, d’espoirs collectifs et d’intérêts privés que sont des pays et leurs représentants. Pour que les modèles numériques puissent effectivement servir de langage de négociation dans un tel contexte, bien des obstacles méthodologiques subsistent qui constituent pour le chercheur un agenda au long cours très chargé. Nous avons en effet progressé dans l’étude

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d’images alternatives du futur en articulant une représentation des techniques et des besoins avec des équilibres économiques et des jeux de prix relatifs, ce qui permet de tester les effets d’équilibre général à long terme des politiques. Mais nous restons très frustes pour l’étude des transitions: les résultats de modèles d’optimisation dynamique à chaque point du temps ne sont que des artefacts de calcul et ne peuvent être interprétés comme des descriptions réalistes des transitions. Nous avons pour avancer besoin d’une théorie de la croissance qui intègre le progrès technique et les institutions, elle viendra peut-être des efforts de l’école française de la régulation ou des théories de la croissance endogène. Mais nous avons aussi besoin de travaux sur les comportements: ni les nombreuses monographies sur les innovations, ni la théorie des incitations n’ont encore débouché sur des informations et des modèles explicatifs aisément intégrables dans une structure prospective qui éclaire les liens entre structures incitatives et changement technique. Les économistes de l’environnement ont d’ailleurs ici une responsabilité: en faisant de leur champs une spécialité, ils se sont enfermés dans des débats internes et ne se sont pas assez intéressés, paradoxalement, aux liens entre économie et technique. Mais l’obstacle essentiel n’est pas ici, il est dans la vision même de la prospective et de la délibération autour du long terme. Ce sont les « décideurs » en effet qui demandent des réponses en termes de politique optimale, de réduction des marges d’incertitudes ; or nous ne pouvons leur fournir que les images de conjectures multiples, des avis sur les conséquences ultimes des décisions et, in fine, des questions reformulées. Or, il n’est pas si évident d’admettre qu’inclure le long terme dans les décisions, ce n’est pas décider du long terme, ce qui reviendrait à l’absurde prétention de clore l’Histoire, mais discuter rationnellement de ce que la raison ne peut trancher à temps, à savoir des projets, des éthiques, des énigmes scientifiques non résolues.

Il y a une tendance positiviste dans la prospective qui est une forme de l’impatience humaine : découvrir le fini avant d’en atteindre les limites ». Cette posture n’est pas absente de certains discours sur le développement durable qui semblent ignorer que le problème majeur de la durabilité vient du fait que les sciences sont hors d’état de nous fixer à temps ces limites. Contrairement à la futurologie nous scrutons le présent et le futur de la prospective « est une sorte d’observatoire d’où elle peut jeter ses regards sur des chemins qui conduisent les hommes, les sociétés jusqu’à lui » (Durand, J., 1975). C’est cela construire une économie humaine, montrer les conditions d’exercice de nos libertés. Le concept de sans regret est ici symptomatique puisqu’il revient à utiliser les interrogations sur la réalité des coûts environnementaux pour montrer qu’une gestion simplement plus intelligente de la société suffirait déjà à prévenir certains problèmes majeurs. Mais encore faut-il que les sociétés entendent de tels signaux qui viennent du futur. Or, dans la façon dont elle filtre les informations et sélectionne les problèmes qui viennent sur l’agenda de ses délibérations, toute société réagit en fonction de codes. Ces codes résultent de l’accumulation historique des conventions implicites passées entre ses membres pour stabiliser leurs controverses et constituent typiquement un investissement irréversible, dont Arrow (1974) faisait l’exemple même l’irréversibilité absolue, dans la mesure où « il est prisonnier de l’esprit de celui qui l’a fait ». C’est probablement une de nos tâches que de faire démentir ce pessimisme implicite en permettant le déplacement de ces codes et en ouvrant la discussion sur les implications non voulues de nos décisions d'aujourd'hui, mission que Karl Popper assignait aux sciences sociales.

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Mais, pour ce faire, il faut résoudre le problème du cordon ombilical entre la "commande" et la recherche scientifique ; comme il est vain de prétendre couper un tel lien, sauf à accepter l’isolement dans un temps scolastique, il faut créer, des lieux où les scientifiques sont mis dans l’obligation d’une expression conjointe de leurs accords et désaccords, de leurs savoirs et de leurs ignorance, et ce sous le contrôle de leurs pairs et non via le marché médiatique. Il faut que soient créées, et le Giec constitue ici une expérience novatrice, des scènes intermédiaires où des traductions adéquates puissent éviter limiter les glissements sémantiques entre concepts théoriques, variables des modèles numériques et langage de la politique économique. Références bibliographiques Arrow, K.J., Fisher, A.C. (1974), "Environmental preservation, uncertainty and

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