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Application de la spectroscopie optique de haute resolution a l'etude des moments quadrupolaires des isotopes pairs radioactifs Jean-Marie Gagne By means of high resolution optical spectroscopy, we can determine nuclear quadrupole moments of radioactive or stable nuclides with even atomic number in the heavy elements region. We discuss and summarize the main conditions applicable to the method. 1. Introduction Si l'on observe avec un spectromtre de haute resolution (106), les spectres 6mis par un 6l6ment ayant plusieurs isotopes, on constate que les raies des dif- f6rents isotopes sont generalement dplac6es les unes par rapport aux autres. A chacun des isotopes pairs ne correspond qu'une composante, et c'est l'6cart de ces composantes qu'on appelle d6placement isotopique. Dans le cas ouh le noyau possede un moment magnetique (isotopes impairs), on observe une structure hyperfine, et on d6finit le deplacement isotopique comme l'6cart entre le centre de gravit6 de cette structure et la com- posante correspondant a un isotope pair. II n'est malheureusement pas facile de dduire du deplacement isotopique observe dans une raie celui des deux niveaux entre lesquels s'effectue la transition. Nous allons voir comment les th6ories du d6placement isotopique permettent d'6valuer les diff6rentes causes de deplacements des niveaux spectraux, et dans quelles conditions nous pouvons utiliser le dplacement isotopique relatif pour mesurer les moments qua- drupolaires intrinseques des isotopes pairs. II. Deplacement isotopique des niveaux atomiques Un atome neutre de num6ro atomique Z est un systeme forme de matiere nucl6aire de charge Ze, et de Z 6lectrons qui lui sont lies. L'interpretation th6orique de ce systeme complexe est envisagde suivant plusieurs degr6s d'approximations. Dans une premiere approximation, nous considerons un atome fictif The author is with the cole Polytechnique, Montreal 26. Received 9 March 1967. Travail patronn6 conjointement par le CNR et CND du Canada. champ central oA le noyau est ponctuel, de masse infinie. Si nous supposons, de plus, que l'interaction spin-orbite est nulle, 'hamiltonien a la forme suivante z z z Ho = (h'/87rm) E A - E Ze'/rk + E e'/rki. k = 1 k = 1 k> j = 1 Ak est un op6rateur de la forme Ak = i/1a + j/ayk + kb/bzk; (1) (2) m est la masse de l'6lectron; r l'intervalle entre le noyau et le kieme electron; rkj l'intervalle entre les 6lectrons k etj; h la constante de Planck. Si 4'0 est la fonction propre de l'op6rateur Ho, nous avons alors Hoglo = Eoqo, o Eo est une valeur propre de l'6nergie du systeme atomique en premiere approxi- mation. E = 0 lorsque tous les 6lectrons sont libres avec une 6nergie cintique nulle. A. Effet normal de masse et effet specifique de masse Nous savons que le noyau et les 6lectrons sont en mouvement par rapport au centre de gravit du systame atomique. Pour en tenir compte, dans l'hamil- tonien (1) nous utilisons deux systemes de coordon- n6es: l'un par rapport au centre de gravit6 du systeme atomique et l'autre par rapport au centre du noyau. L'6nergie electrostatique depend seulement des co- ordonnees relatives au systeme lui-meme. Le mouve- ment du noyau et des electrons autour du centre de gravit6 produit une perturbation qui additionne Ho l'op6rateur G = (2A)-' pi (3) oA A est la masse nucl6aire et Pi le moment lin6aire du ieme 6lectron par rapport au centre de gravit du noyau. Nous pouvons decomposer cet op6rateur et l'ecrire sous la forme G = N + M ou October 1967 / Vol. 6, No. 10 / APPLIED OPTICS 1649

Application de la spectroscopie optique de haute résolution à l’étude des moments quadrupolaires des isotopes pairs radioactifs

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Application de la spectroscopie optique de hauteresolution a l'etude des moments quadrupolairesdes isotopes pairs radioactifs

Jean-Marie Gagne

By means of high resolution optical spectroscopy, we can determine nuclear quadrupole moments ofradioactive or stable nuclides with even atomic number in the heavy elements region. We discuss andsummarize the main conditions applicable to the method.

1. Introduction

Si l'on observe avec un spectromtre de hauteresolution (106), les spectres 6mis par un 6l6ment ayantplusieurs isotopes, on constate que les raies des dif-f6rents isotopes sont generalement dplac6es les unespar rapport aux autres. A chacun des isotopes pairsne correspond qu'une composante, et c'est l'6cart deces composantes qu'on appelle d6placement isotopique.Dans le cas ouh le noyau possede un moment magnetique(isotopes impairs), on observe une structure hyperfine,et on d6finit le deplacement isotopique comme l'6cartentre le centre de gravit6 de cette structure et la com-posante correspondant a un isotope pair.

II n'est malheureusement pas facile de dduire dudeplacement isotopique observe dans une raie celuides deux niveaux entre lesquels s'effectue la transition.Nous allons voir comment les th6ories du d6placementisotopique permettent d'6valuer les diff6rentes causesde deplacements des niveaux spectraux, et dans quellesconditions nous pouvons utiliser le dplacementisotopique relatif pour mesurer les moments qua-drupolaires intrinseques des isotopes pairs.

II. Deplacement isotopique des niveauxatomiques

Un atome neutre de num6ro atomique Z est unsysteme forme de matiere nucl6aire de charge Ze,et de Z 6lectrons qui lui sont lies. L'interpretationth6orique de ce systeme complexe est envisagde suivantplusieurs degr6s d'approximations. Dans une premiereapproximation, nous considerons un atome fictif

The author is with the cole Polytechnique, Montreal 26.Received 9 March 1967.Travail patronn6 conjointement par le CNR et CND du

Canada.

champ central oA le noyau est ponctuel, de masseinfinie. Si nous supposons, de plus, que l'interactionspin-orbite est nulle, 'hamiltonien a la forme suivante

z z zHo = (h'/87rm) E A - E Ze'/rk + E e'/rki.

k = 1 k = 1 k> j = 1

Ak est un op6rateur de la forme

Ak = i/1a + j/ayk + kb/bzk;

(1)

(2)

m est la masse de l'6lectron; r l'intervalle entre lenoyau et le kieme electron; rkj l'intervalle entre les6lectrons k etj; h la constante de Planck.

Si 4'0 est la fonction propre de l'op6rateur Ho, nousavons alors Hoglo = Eoqo, o Eo est une valeur proprede l'6nergie du systeme atomique en premiere approxi-mation. E = 0 lorsque tous les 6lectrons sont libresavec une 6nergie cintique nulle.

A. Effet normal de masse et effet specifiquede masse

Nous savons que le noyau et les 6lectrons sont enmouvement par rapport au centre de gravit dusystame atomique. Pour en tenir compte, dans l'hamil-tonien (1) nous utilisons deux systemes de coordon-n6es: l'un par rapport au centre de gravit6 du systemeatomique et l'autre par rapport au centre du noyau.

L'6nergie electrostatique depend seulement des co-ordonnees relatives au systeme lui-meme. Le mouve-ment du noyau et des electrons autour du centre degravit6 produit une perturbation qui additionne Ho l'op6rateur

G = (2A)-' pi (3)

oA A est la masse nucl6aire et Pi le moment lin6aire duieme 6lectron par rapport au centre de gravit dunoyau.

Nous pouvons decomposer cet op6rateur et l'ecriresous la forme G = N + M ou

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z z zN = (2A)-' j2 ill = A-' E E PiPi, (4)

i= 1 i> jj= 1la limite de sommation est le nombre d'6lectrons dansl'atome; N est l'op6rateur de l'effet normal; M celuide l'effet sp6cifique.

Si nous nous limitons au cas o le centre de gravit6est au repos et oh le noyau est ponctuel, le d6placementdu niveau E0 est 6gal A ANE(A) + AE(A), oui AE(A)et AsE(A) repr6sentent respectivement les valeurscaract6ristiques des op6rateurs d'effet normal etd'effet sp6cifique.

L'6nergie du systeme atomique a la valeur

E(A) = Eo + ANE(A) + AsE(A). (5)

Les op6rateurs de l'effet de masse furent analys6sdans le couplage LS par Vintil et Gray 2 ; il suffit doncde rappeler l'essentiel de ces r6sultats.

La valeur ANE(A) pour le niveau E d'un atomecomplexe est

ANE(A) = -m/(m + A)Eo -Eo/(1836A). (6)

Nous voyons que cet effet int6resse tous les niveauxdu systeme atomique et peut s'6valuer si l'on connaltE0 .

L'6cart entre les niveaux similaires correspondanta deux isotopes de masse Al et A2 (A < A) sera

3NE2l = -E [(1836A2) - (1836A,) -J ], ou encore

aNE 2 1 = Eo3A2/(1836AA2), (7)

aA21 = A - Al. (8)

Le niveau correspondant a l'isotope A sera doncplus profond que celui correspondant a A,.

L'6nergie perturbatrice produite par l'effet sp6cifiquea la forme

AsE(A) = (2nR,/A )2T2h.k(nn'), (9)

o R, est la constante de Rydberg gale 109737cm-.

K(n,n') = fuk*(l)uj*(n)AiAkuj(n)uk(n')dTjdrk, (10)

ot n et n' sont les nombres quantiques des 6lectronsk, j; k(n) est la fonction d'onde du kieme electrondans l'approximation du champ central. On a demon-tr6 que K(n,n') est diff 6rent de z6ro seulement si

1' = 1 1z 1, Ml' = MI ou Ml' = mI A= 1, m' = m. (11)

Pour que l'interaction d'une paire d'6lectrons dansune meme configuration contribue a l'effet sp6cifiquede masse, il faut que leurs nombres quantiques ob6is-sent simultan6ment aux rgles de slection Al =

4 1, Am = 0 1, Am, = 0. L'ecart entre lesniveaux correspondant deux isotopes de masse A,et A2 (A, < A2) est

bsE21 = -2mR,(3A21/A2Aj) 2;j.,K(n,n'). (12)

B. Effetdevolume

Le noyau des 6l6ments lourds n'est pas assimilable aun point de charge Ze, qui cr6erait a toute distance rle potentiel coulombien; il s'agit d'un volume fini.Dans ce cas, il faut tenir compte du champ in-t6rieur du noyau. La perturbation des niveaux d'uneconfiguration due a l'existence de ce champ non cou-lombien, n'a pu etre calculee theoriquement jusqu'apr6sent que dans le cas o latome ne comporte qu'unseul lectron n. Nous rappellerons l'essentiel desdernieres theories de l'effet de volume analysees parBodmer' et Ionesco-Pallas.4

Nous nous limiterons aux lectrons ns et np car lesautres sont tres peu influence6s par le volume nucleaire.

L'energie perturbatrice pour un lectron ns, due aufait que le champ l'interieur du noyau n'est pascoulombien, est donnee par la relation

AvE(ns) = [N/4o-r'(2a)] a + (1 )K(Xo) Xo2oa + ( -)K(Xo) (13)

ouL N = (47rRV/Z)aH',bf,'2(0); R, est la constante deRydberg; aH = I2/me2 est le rayon de Bohr; o* = (1 -a , a = Z, a est la constante de structure fine6gale (1/137); Xo = 2ZR/aH est 6valu6 en un pointR pres du noyau o la densit6 de charge nucldaire estnulle; V/n,2(0) est la densite de charge de l'6lectron ns,dans le cas non relativiste, a l'endroit du noyau;P'(2f) est la fonction factorielle.

La theorie de l'effet de volume montre que les lec-trons sont d'autant moins li6s qu'on s'eloigne plusdu potentiel coulombien. I en rsulte que le sch6made niveau de l'isotope le plus lourd sera plus contract6que celui de l'isotope l6ger.

D'une fagon g6nerale, le d6placement isotopiqueassoci6 a un 6lectron ns est obtenu a l'aide de l'equation(13)

avE21(ns) = MAvE(ns) = [N/2r2(2a)] [abK(Xo)] /[a + ( -)

X K(Xo)] 2Xo',' (14)

Suivant les calculs de Bodmer,' cette derniere rela-tion peut s'exprimer sous la forme

svE,,(ns) = [iV/2r(2o-)] a + ( + )K(a) (2Z/aH)20R12,f16R2,a + (1 - )K(a) (Za)~,~6n

(15)

ou en premiere approximation

K(a) = -(2a/5)(1 + 0,106a0), (16)

ou R, est le rayon nucl6aire 6quivalent de l'isotope leplus l6ger. (Si p(r) est la densit6 r6elle de chargedans le noyau, le rayon 6quivalent est defini commesuit

R2 = (5)f p(r)r2d = () (r2); (17)

nous reviendrons sur cette d6finition.)aR21 = R - R, est la diff6rence des rayons qui-

valents des isotopes. Si nous ecrivons

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B = [N/2F2(2.r)] + ( + )K(a) (2Z/aH)'Oa + (1 - o-)K(a)

etC21 = R2,f-'021

nous avons la relation simplifi~e

avE21(ns) = BC21.

(18)

(19)

(20)

On voit que le dplacement isotopique d a l'effetde volume se met sous la forme d'un produit de fonc-tions. L'une B ne dpend que des proprietes elec-troniques, l'autre C21 ne dpend que des propri6t6snucleaires, en particulier du rayon quivalent del'isotope le plus l6ger et de sa variation en passantd'un isotope a l'autre. Nous avons donc la possi-bilite d'evaluer la fonction C, et par consequent, led6placement isotopique d a l'effet de volume.Ionesco-Pallas5 a obtenu une relation simple entreles 6nergies perturbatrices des 6lectrons ns et np

AvE(np) = [(1 - a)/(l + )] AvE(ns). (21)

En utilisant cette relation il est facile de dduire led6placement isotopique d'un niveau associ6 a un6lectronnp.

C. Effetd'6cran surl'effetdevolumeLe calcul du dplacement isotopique d'un niveau

associ a un lectron optique a ete effectu6 sans tenircompte des autres 6lectrons de la configuration. Si onconsidare les effets d'ecran produits par la presence deces 6lectrons (un second lectron ns, n, etc.), on estamen6 a 6crire 1'expression (20) sous une forme quifut discutee par Brix et Kopfermann,7 Blaise etGerstenkorn. 9

avE21 = 3BC21, (22)

oA ,B peut se determiner empiriquement s'il n'y a pasde mlanges de configurations qui perturbent lesd6placements isotopiques, ce qui est souvent le casdans les spectres complexes.

III. Dplacement isotopique des transitions

Le dplacement isotopique total d'un niveau est lasomme des dplacements isotopiques ds a l'effet demasse normal, 1'effet de masse sp6cifique et l'effetde volume

SE21 = NE21 + sE21 + 5VE2i. (23)

II est evident que l'importance relative des troiseffets consid6r6s variera suivant la position de l'61-ment dans la classification p6riodique.

II faudrait peut-etre 6galement consid6rer l'influencede la compressibilite de la matibre nucl6aire dformee,de la compressibilite de la matibre nucl6aire dans lecoeur, qui se traduirait par une variation du rayon6quivalent. Les calculs faits jusqu'a present par (Hill,' 0

Frandkin," et Yamada2) semblent indiquer que ceseffets sont discutables et jusqu'a nouvel ordre nous lesn6gligerons.

Si l'on considare une transition entre deux niveauxa et b, le dplacement isotopique observ6 dans une

raie optique sera la diff6rence des dplacements iso-topiques des niveaux.

Il s'exprime donc par la relation

30f21 = 5N,21 + SO.214+ VO-21, (24)

o01

8N021 = (NE2I)b - (NE21)a,

et des expressions analogues pour 3 SO21 et Sv¢21. A partirde la relation (7) on obtient

3NU21 = a3A2,/(1836AjA2), (25)

oh a = (Eo)b- (Eo)a, qui est de l'ordre de 20,000 K(K = Kayser 1 cm-') pour les spectres optiques.Dans le cas des 6l6ments lourds, A 140, A21 = 2,on a 6,o - mK ( mK = 10-3K - 10- cm-'); ceteffet est donc negligeable.

Pour l'effet specifique la relation (12) nous permetd'6crire

a2 = (2RyaA21)/(1836AiA2) [2a.2K(fln1') -2b2f -)].

(26)

D'une fagon g6nerale, on voit donc que le d6place-ment isotopique specifique variera avec le type detransition tudi6e. D'aprbs les rgles de selection ilaura la meme valeur pour toutes les transitions entredeux multiplets.

L'effet de volume d'une facon analogue peut se-mettre sous la forme

tV021 = C21[(OB)b - (B)a]. (27)

On peut montrer que /3B est le meme pour tous lesniveaux d'une meme configuration 6lectronique, sil'on neglige les interactions avec des niveaux d'autresconfigurations voisines. I en resulte que le ddplace-ment isotopique d a leffet de volume est caract6ris-tique d'un type de transition determin6e. Cette pro-priete interessante a Wtd largement utilise ces dernieresann6es pour classer les spectres atomiques des elementslourds.

IV. Deplacement isotopique relatif

Dans tout ce qui pr6cade nous n'avons 6tudi6 qu'uncouple d'isotopes. Si nous consid6rons maintenant un6l6ment ayant trois isotopes de masse Al, A2, et A3,le d6placement isotopique relatif (DIR) s'exprime parla formule

DIR = 3f21/a932 = [Ncr21 + tSSO21 + 6VO21I/

[5NO32 + so32 + vO32]- (28)

Quel que soit le type de transitions consider6es,les deplacements dus aux effets de masse sont pro-portionnels a 6A pour les deux couples d'isotopes, tandisque le d6placement d a l'effet de volume est pro-portionnel respectivement C21 et C32. Dans ungrand nombre d'6lements, ces constantes ne sont pasproportionnelles a 3A; il en resulte qu'en toute rigueur ondevra observer une variation du DIR d'une raie al'autre.

Cette variation a et6 mise en evidence r6cemment etStacey" a rsum6 les principales observations. Si

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elle avait pass6 inapercue jusqu'a l'observation deStriganov et Kulazhenkova,'4 c'est que dans la plupartdes l6ments, l'importance respective des dplace-ments dus a l'effet de masse et de volume sont nette-ment diff6rents.

Dans le cas des 6l6ments l6gers ou e 6v est n6gligeable,la formule du deplacement isotopique relatif se r6duit a

DIR = N021 + aSdr2l)/(5Na32 + tSa32)

= (A3 6A2,)/(AISA32), (29)

c'est-a-dire varie dans le rapport des masses extremeDans le cas des 6lements lourds, c'est l'effet

volume qui l'emporte, et la formule se r6duit a

DIR = v92,/3v32 = C/C32 = (R12ff-'SR21)/(R221 -'SR32),

qui est directement relie aux variations des rainucleaires. Nous aurions pu 6crire R31 la placSR32.

On congoit facilement que dans la rgion des made l'ordre de 130 150, oa les diff6rents effets sont cparables, qu'on puisse observer une variation duplacement isotopique suivant le type de transitetudi6es. Dans cette rgion, il est 6vident que ne pouvons pas utiliser directement la valeur du Ipour obtenir des informations nucleaires, soit la vation du rayon 6quivalent, soit le moment quadrupol

V. Dfinition d'une quantite independante dI'effet specifique

II est possible lorsqu'on poss~de quatre isotopesdeterminer par spectroscopie optique une quarqu'on peut rattacher directement la fonction nucleC, dfinie au paragraphe precedent, mme si l'(sp6cifique n'est pas n6gligeable.

La perturbation dans une raie produite par l'specifique pour les isotopes A et A, peut se prosesous la forme suivante

asoji = knii,ou1

k = (2Ry/1836)[2;2K(n,n') - 2bK(n,n')j;mii = Ml(A

En utilisant cette notation, le dplacement dansraie pour la paire d'isotopesj, i devient

Ba*i = kmi + viji.

II est facile d'appliquer cette relation au cas o iavons quatre isotopes A, < A2 < A3 < A 4

8(721 = k + Va21,8032 = km32 + V'132,80743 = k43 + BVM43.

De ces trois relations, nous dduisons

M325 2 1 - M2BO'32 = m32vc21- m213vo-32,M435032 - 32&043 = 438VO32 - 3,v43.

Evidemment nous pouvons avoir d'autres relatianalogues.

Si la valeur 3Aj,1 est constante, le rapport des tions prdcedentes nous donne un invariant par rap]a l'effet sp6cifique de masse

S.

de

(30)

yonse de

ssesom-de-

ionsnousDIRtrla-c1I W

I = [a2 - (A/A,)0a,321/[(A2/A 4 )Bf32 - 8043]

= [SVa2l - (A/A,)6v32]/[(A2/A 4)6v0a32 - bva43]. (35)

Comme l'effet de volume dans une raie est gal auproduit de deux fonctions (20), dont la premiere B ned6pend que des configurations consid6rdes, et la secondeC ne dpend que du noyau, la substitution de cetterelation dans la formule (35) nous permet d'6crire

I = [C2, - (A/A1)C32]/[(A2/A4)C32 - C431]. (36)

Il est vident que cette quantit6 est invariante avecles configurations, et elle peut tre utilisee pour cara-cteriser certaines propri6tes nucleaires. Gerstenkornet al.1" ont fait des mesures int6ressantes sur cettequantitM en utilisant cinq isotopes du neodyme.

Les mesures de I par voie optique permettent deverifier si cette grandeur est invariante avec les con-figurations. Il serait int6ressant de pouvoir calculercette grandeur en utilisant uniquement des donneesnucleaires; nous aurions donc une autre possibilit decomparer quantitativement les theories nucl6aires l'exp6rience.

VI. Rayon nucl6aire quivalent et momentquadrupolaire intrinseque

-- > La diffusion 6lastique des 6lectrons, par les noyauxe lourds, donne des informations int6ressantes sur la

dimension du rayon nucl6aire quivalent. Plusieursauteurs (Hahn et al.,'6 Elton,17) ont dmontre que

de cette mthode d'analyse est probablement la plustite precise pour dfinir le rayon nucleaire. L'6tude des-are rayons X mis par les atomes m6siques, donne deseffet informations identiques a la m6thode de la diffusion

e lastique des 6lectrons. La structure fine des rayonseffet X est une autre source d'informations sur le volumenter nucl6aire; il semble que la difficult6 fondamentale pour

relier le rayon nucleaire la structure fine est(31) d'ordre theorique, car les effets du volume seraient du

mame ordre que les effets lectrodynamiques quan-tiques. La formule empirique des masses peut donner

A 0. des informations sur la compressibilit6 nucleaire, quiinfluence le rayon (Yamada").

une Dans une premiere approximation de l'etude th6o-rique de la diffusion 6lastique des electrons, on suppose

32) que la densit6 de charge a l'int6rieur du novau a une(32) distribution sym6trie sph6rique. De plus, oI suppose

Ious que les effets des moments magn6tiques et lectriquessont ngligeables et que les corrections 6lectrodyna-miques quantiques ne sont pas importantes. Suivant

(33) ces hypotheses, on dmontre que la diffusion deselectrons dtermine approximativement le rayonquadratique moyen <r2> de la distribution des charges.

(r) = f p(r)rdT,(34)

ions

Iua-port

(37)

ou p(r) est la densite des charges nucl6aires; dr est unelement de volume nucl6aire.

II existe une relation simple entre <r2> et le rayond'une sphere uniform6ment chargee qu'on appellesphere quivalente, et qui produit le m~me ph6nionmede diffusion 61astique des 6lectrons

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(r2) = 3R2/5, (38)

of R est le rayon equivalent.Cette derniere relation est tres importante pour

relier les informations obtenues a l'aide de la diffusion6lastique des electrons avec les effets du volume nucle-aire sur le dplacement isotopique. Ds que nousconnaissons la distribution de charges nucl6aires p(r),nous pouvons determiner la forme analytique du rayonnucleaire 6quivalent, correspondant a cette distribution.Nous aurons autant de formules pour R qu'il y a dedistributions pouvant expliquer le ph6nomene dediffusion lastique des electrons. Plusieurs distri-butions de charges ont et6 analys6es; l'une des pre-mieres est due a Rosenthal et Breit,' qui ont suppos6qu'elle etait uniforme dans le volume nucl6aire. Hahnet al. 6 utiliserent une densit6 de charges trap6zoidale.

La distribution utilisee par Elton' 7 (ou distributionde Fermi) est probablement plus pres de la raliteet donne des relations int6ressantes entre le rayon de lasphere 6quivalente uniformement chargee et les para-metres de la distribution. Elton a montre que lerayon equivalent a la forme suivante

R = pAI + (57r2a2/6p)A - -(7.- 4a 4/24p)A' X ... , (39)

ou A est la masse atomique; p = 1,123 X 10-3 cm;a, = 0,575 X 10-"3 cm, ce qui nous permet d'ecrire

R = 1,123A i + 2,352A - -2,070A -' + . . . (40)

Ionesco-Pallas 4 a d6velopp6 la theorie d'Elton pourtenir compte de la deformation nucleaire. La sur-face nucleaire, dont la densit6 de charge est constante,est decrite par la relation suivante: Ra [1 + a(3 COS20-

2)] = constante, oft a est le coefficient de deformationdu noyau par rapport a la sphere; 0 est l'angle par rap-port a l'axe de symetrie et Ra est approximativementle rayon au point d'inflexion de la distribution de chargenucleaire.

Suivant Ionesco-Pallas, 4 le rayon de la sphere equi-valente pour une distribution de charge dissymetriqueestR = pA 1I [1 + 5r2(a2/6p2)A -+ a2 [1-13r2(a82/6p2)A- + .* * + . * } (41)

Nous avons donc avec les relations (40) et (41) lapossibilite d'6valuer le rayon 6quivalent soit dans lecas d'un noyau sph6rique, soit pour les noyaux d6-formes. Nous pouvons egalement utiliser ces deuxformules pour calculer la variation du rayon nucleaire6quivalent lors du passage d'un isotope a un autre.

Dans les conditions les plus favorables, la precisionsur la mesure du rayon R ne d6passe pas 1%; pour lesnoyaux fortement d6formes (U, Au, W, Sm, Ta), leserreurs sont considerables (Hofstadter' 9 ). La diffusiondes electrons donne tres peu d'informations sur ladensit6 des charges dans le noyau, car une variation de207 de la densit6 au centre ne modifie pratiquementpas le phenomene de diffusion 6lastique. Par suitenous sommes libres de choisir une distribution quel-conque, Elton, trapezoidale, etc....

La m6thode de diffusion 6lectronique n'est pas suf-fisamment sensible pour 6tudier la variation du rayon

nucleaire en fonction du nombre de neutrons, ni d'-observer le changement du rayon d'un noyau suivantses etats d'excitation ou de deformation, ni d'analyserle ph6nomene odd-even staggering.

II est tres important de souligner que la diffusionelastique des 6lectrons ne mesure pas la distribution dela masse nucleaire neutre. Le rayon de la massenucl6aire et celui de la distribution de charges nucl6airespeuvent tre diffhrents pour les raisons suivantes:(1) La rpulsion coulombienne de la masse nucleairechargee peut produire une difference de densit6 parrapport la distribution de la masse neutre (l'effetJohnson-Teller). (2) Le principe d'exclusion peutmodifier la densite de la masse nucl6aire neutre, etavoir une densit6 diffrente de la masse chargee.(3) Le rayon du potentiel nucl6aire peut tre dif-ferent du rayon de la matiere nucleaire, car les forcesnucleaires ont une port6e.

Suivant ces remarques, il faut tre prudent en com-parant les valeurs expdrimentales obtenues par voiepurement nucl~aire, et les valeurs d6duites des inter-actions electromagnetiques (Gagn6&0).

On peut exprimer le moment quadrupolaire intrin-saque nucl6aire

Qo = (r(3 cosO - 1)) (42)

en utilisant le coefficient de deformation a et les para-metres d'Elton. Suivant Ionesco-Pallas on a en selimitant aux premiers termes de la deformation

Qo - (W)aZpA i[ + ,.(a2/3p)A- I- .. .] X 10-24 cm.2(43)

On dmontre facilement que le rayon equivalentpeut s'6crire sous la forme

R Alp [1 + 25QPo2A -/(72Z2p4)]. (44)

Cette derniere relation est tr~s utile pour tudier leDIR qui peut se mesurer avec une grande pr6cisionpour les 6lements lourds (Gagn6 et al.2 1

).

Vll. Dplacement isotopique relatif et momentsquadrupolaires intrinsqeues des isotopes pairs

Nous allons analyser les conditions o les momentsquadrupolaires intrinseques des isotopes pairs peuventse mesurer en utilisant la valeur du dplacementisotopique relatif (DIR).

Lorsque 1'effet de volume est beaucoup plus im-portant que les effets de masse

v,21 >> N721 + tS2(,

il est raisonnable d'6crire que le DIR a la valeur

DIR = R21/,.oR31 = (R2 - Ri)(R3 - R),

(45)

(46)

oft RI, R2, et R3 sont les rayons equivalents des isotopesA1, A2, et A3. Avec les relations (44) et (46) nousavons

DIR- =2(A2 - Al",) + 25/(36Z2p4)[Qo2'/A2 -Qo2/Al]

2(A3i - All) + 25/(36Z2p4)[Qo32/A3 -Qo2/A1]1(47)

ou Qoi, Q2, et Qo3 sont les moments quadrupolairesintrinseques des isotopes 1, 2, 3.

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Page 6: Application de la spectroscopie optique de haute résolution à l’étude des moments quadrupolaires des isotopes pairs radioactifs

Si deux des isotopes, soit Al et A2, sont des isotopeimpairs et si nous connaissons leurs moments qua-drupolaires mesurds soit par spectroscopie des radio-fr6quences, soit par spectroscopie optique, nous pouvonscalculer le moment quadrupolaire du troisibme isotopelorsque la valeur du DIR est mesurde. Cette m6thodefut appliqu6e dernibrement par Gagn620 pour calculerles moments quadrupolaires intrinsbques des isotopespairs 28U et 2"6U en utilisant les moments des isotopes235 et 233.

Ford2" a remarqu6 qu'il existe un cart importantentre les moments quadrupolaires mesurds par desm6thodes nucldaires et ceux obtenus par voie spectro-scopique. On a observe qu'il y a des carts allantjusqu'A 50%. Les theories ont chou6 jusqu'a prdsentdans l'interpr6tation de cette diff6rence. Pour cesraisons, il ne serait pas prudent d'utiliser les valeursdes moments quadrupolaires obtenus par voie nucl6airepour substituer dans la formule du DIR.

Un cas qui serait int6ressant A tudier est celui oftl'isotope Al aurait le nombre magique 126, c'est-A-dire que Qoj serait gal A z6ro. Dans cette condition,il suffit de connattre un des deux moments quadru-polaires pour dterminer l'autre avec un maximum depr6cision.

Il est prudent avant de supposer que le DIR estprobablement reli6 directement aux parametres nu-cl6aires par l'6quation (30), de verifier, pour deuxgroupes distincts de raies, si le DIR est independantdes configurations mises en jeu lors des transitions.Nous pouvons choisir le premier groupe de raies avecun dplacement isotopique positif, c'est-a-dire que lafrdquence de la raie correspondant a l'isotope le pluslourd est la plus grande; le second groupe presente und6placement isotopique n6gatif.

Vill. ConclusionParmi les problbmes de spectroscopie optique de

haute rsolution qui suscitent le plus d'int6r~t, figurentla dtermination de moments nucl6aires, c'est-h-diredes spins, des moments magn6tiques et des momentsquadrupolaires des 6l6ments radioactifs dont la demi-vie peut varier de quelques heures quelques anndes.Comme nous venons de le voir, la spectroscopie optiquede haute rsolution nous permet de dterminer lesmoments quadrupolaires intrinseques des isotopes pairs,ce que la spectroscopie des radiofrdquences ne permetpas. GrAce A un ensemble de recherches sur les spec-

trombtres Fabry-Perot poursuivies par P. Jacquinotet ses collaborateurs a Bellevue, nous pouvons raliserdes mesures de dplacement isotopique avec une tresgrande prdcision.

Par contre, les problkmes de ralisation des sourceslumineuses opdrant avec de faibles quantites de sub-stances (10-6 g) radioactives, de demi-vie courte, nesont pas tous r6solus. Nous concentrons pr6sentementnos efforts sur la fabrication des lampes A rsonanceet sur l'am6lioration des lampes cathode creuse op6rantavec des 6lments radioactifs pouvant tre produitssoit par des rdacteurs, soit par des acc6ldrateurs.

J'exprime toute ma gratitude lonsieur J. Blaise,directeur de recherches au Conseil National de laRecherche Scientifique Frangaise, qui a port6 un int6r~tconstant a mon travail sur le DIR. Je remercie egale-ment le CNR et le CND du Canada pour leur aidefinanciere dans mes travaux.

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Have you read the Russian laser papersin Optics and Spectroscopy?-see page 1663

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