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MISE AU POINT / UPDATE DOSSIER Apport de limagerie dans lévaluation des masses et métastases cardiaques The Role of Imaging in the Assessment of Cardiac Masses and Metastases S. Ederhy · L. Soulat-Dufour · E. Ileana · O. Mir · N. Haddour · F. Boccara · J.-C. Soria · A. Cohen Reçu le 28 novembre 2013 ; accepté le 2 avril 2014 © Springer-Verlag France 2014 Résumé Les tumeurs cardiaques bénignes et malignes sont rares. L imagerie en général et léchographie cardiaque en particulier ont une place centrale dans le diagnostic positif et différentiel, lévaluation du retentissement et la prise en charge dune masse ou tumeur cardiaque. Largement diffu- sée, non irradiante cette technique constitue la première étape dans la démarche diagnostique. L objectif de lécho- graphie cardiaque est de permettre une meilleure caractérisa- tion tissulaire, de décrire limplantation, lextension et le retentissement de la masse. Elle est complétée par une écho- graphie de contraste permettant de préciser le degré de vas- cularisation de la masse et par une échographie transœsopha- gienne couplée à une acquisition tridimensionnelle. L IRM cardiaque et le scanner cardiaque viennent compléter avan- tageusement cette démarche en fournissant de nombreuses informations notamment concernant la caractérisation tissu- laire. En pratique clinique, la principale difficulté reste de distinguer et dassurer le diagnostic différentiel et positif entre les pseudotumeurs (thrombus, végétation), les varian- tes anatomiques et tumeurs primitives et secondaires. Mots clés Tumeurs · Métastases · Échographie transthoracique · IRM cardiaque · Scanner cardiaque Abstract Primary tumors are a rare phenomenon, while car- diac metastasis is rather more frequent. Cardiac masses and metastasis are usually first detected by echocardiography, which allows to describe and detail the size, the insertion, the mobility, the relation with cardiac and non-cardiac struc- ture, and local invasion. Myocardial contrast echocardiogra- phy is able to improve tissue characterization of the masses. Transthoracic echocardiography evaluation is generally completed by cardiac magnetic resonance and computed tomography scanner, which give some important and addi- tional information on tissue characteristics and tissue pro- perty such as vascularity and fibrosis. Keywords Tumors · Metastasis · Transthoracic echocardiography · Cardiac magnetic resonance · CT-scan Introduction Les tumeurs cardiaques bénignes et malignes sont rares, et ont une prévalence estimée dans les séries autopsiques variant de 0,002 à 0,3 %. Elles sont constituées par les attein- tes primaires et secondaires [1]. Soixante-quinze pour cent des tumeurs cardiaques primi- tives sont bénignes, majoritairement représentées par les myxomes (50 à 60 %), les fibroélastomes (20 %), les lipo- mes (15 à 20 %) et les hémangiomes (5 %) [2]. Vingt-cinq pour cent des tumeurs cardiaques primitives sont malignes essentiellement représentées dans 95 % des cas par des sarcomes et dans 5 % des cas par des lymphomes ou mésothéliomes [3]. Les atteintes cardiaques secondaires métastatiques sont largement plus fréquentes et peuvent toucher le cœur et/ou le péricarde. Elles sont selon les séries autopsiques 20 à 40 fois plus fréquentes que les atteintes primitives [4]. La présentation clinique ou ECG nest que de peu daide et ne permet que rarement de porter un diagnostic de certitude. L imagerie en général et léchographie cardiaque en parti- culier ont une place centrale dans le diagnostic positif et S. Ederhy · L. Soulat-Dufour · N. Haddour · F. Boccara · A. Cohen (*) Service de cardiologie, hôpital Saint-Antoine, APHP, université Pierre-et-Marie-Curie (UPMC), Paris-Sorbonne, Paris, France e-mail : [email protected] E. Ileana · O. Mir · J.-C. Soria Drug Development Department (DITEP : Département dInnovations Thérapeutiques et Essais Précoces), Inserm Unit U981, Gustave Roussy Cancer Campus, Villejuif Faculté du Kremlin Bicêtre, Université Paris Sud, France Oncologie (2014) 16:233-238 DOI 10.1007/s10269-014-2394-y

Apport de l’imagerie dans l’évaluation des masses et métastases cardiaques; The role of imaging in the assessment of cardiac masses and metastases;

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MISE AU POINT / UPDATE DOSSIER

Apport de l’imagerie dans l’évaluation des masses et métastasescardiaques

The Role of Imaging in the Assessment of Cardiac Masses and Metastases

S. Ederhy · L. Soulat-Dufour · E. Ileana · O. Mir · N. Haddour · F. Boccara · J.-C. Soria · A. Cohen

Reçu le 28 novembre 2013 ; accepté le 2 avril 2014© Springer-Verlag France 2014

Résumé Les tumeurs cardiaques bénignes et malignes sontrares. L’imagerie en général et l’échographie cardiaque enparticulier ont une place centrale dans le diagnostic positifet différentiel, l’évaluation du retentissement et la prise encharge d’une masse ou tumeur cardiaque. Largement diffu-sée, non irradiante cette technique constitue la premièreétape dans la démarche diagnostique. L’objectif de l’écho-graphie cardiaque est de permettre une meilleure caractérisa-tion tissulaire, de décrire l’implantation, l’extension et leretentissement de la masse. Elle est complétée par une écho-graphie de contraste permettant de préciser le degré de vas-cularisation de la masse et par une échographie transœsopha-gienne couplée à une acquisition tridimensionnelle. L’IRMcardiaque et le scanner cardiaque viennent compléter avan-tageusement cette démarche en fournissant de nombreusesinformations notamment concernant la caractérisation tissu-laire. En pratique clinique, la principale difficulté reste dedistinguer et d’assurer le diagnostic différentiel et positifentre les pseudotumeurs (thrombus, végétation), les varian-tes anatomiques et tumeurs primitives et secondaires.

Mots clés Tumeurs · Métastases · Échographietransthoracique · IRM cardiaque · Scanner cardiaque

Abstract Primary tumors are a rare phenomenon, while car-diac metastasis is rather more frequent. Cardiac masses and

metastasis are usually first detected by echocardiography,which allows to describe and detail the size, the insertion,the mobility, the relation with cardiac and non-cardiac struc-ture, and local invasion. Myocardial contrast echocardiogra-phy is able to improve tissue characterization of the masses.Transthoracic echocardiography evaluation is generallycompleted by cardiac magnetic resonance and computedtomography scanner, which give some important and addi-tional information on tissue characteristics and tissue pro-perty such as vascularity and fibrosis.

Keywords Tumors · Metastasis · Transthoracicechocardiography · Cardiac magnetic resonance · CT-scan

Introduction

Les tumeurs cardiaques bénignes et malignes sont rares,et ont une prévalence estimée dans les séries autopsiquesvariant de 0,002 à 0,3 %. Elles sont constituées par les attein-tes primaires et secondaires [1].

Soixante-quinze pour cent des tumeurs cardiaques primi-tives sont bénignes, majoritairement représentées par lesmyxomes (50 à 60 %), les fibroélastomes (20 %), les lipo-mes (15 à 20 %) et les hémangiomes (5 %) [2].

Vingt-cinq pour cent des tumeurs cardiaques primitivessont malignes essentiellement représentées dans 95 % descas par des sarcomes et dans 5 % des cas par des lymphomesou mésothéliomes [3].

Les atteintes cardiaques secondaires métastatiques sontlargement plus fréquentes et peuvent toucher le cœur et/oule péricarde. Elles sont selon les séries autopsiques 20 à40 fois plus fréquentes que les atteintes primitives [4].

La présentation clinique ou ECG n’est que de peu d’aideet ne permet que rarement de porter un diagnostic decertitude.

L’imagerie en général et l’échographie cardiaque en parti-culier ont une place centrale dans le diagnostic positif et

S. Ederhy · L. Soulat-Dufour · N. Haddour · F. Boccara ·A. Cohen (*)Service de cardiologie, hôpital Saint-Antoine, AP–HP,université Pierre-et-Marie-Curie (UPMC), Paris-Sorbonne,Paris, Francee-mail : [email protected]

E. Ileana · O. Mir · J.-C. SoriaDrug Development Department (DITEP :Département d’Innovations Thérapeutiques et Essais Précoces),Inserm Unit U981, Gustave Roussy Cancer Campus, Villejuif

Faculté du Kremlin Bicêtre, Université Paris Sud, France

Oncologie (2014) 16:233-238DOI 10.1007/s10269-014-2394-y

différentiel, l’évaluation du retentissement et la prise encharge d’une masse ou tumeur cardiaque. Largement diffu-sée, non irradiante cette technique constitue la premièreétape dans la démarche diagnostique. L’objectif de l’écho-graphie cardiaque est de permettre une meilleure caractérisa-tion tissulaire, de décrire l’implantation, l’extension et leretentissement de la masse [5]. Elle est complétée par uneéchographie de contraste permettant de préciser le degré devascularisation de la masse et par une échographie transœ-sophagienne (ETO) couplée à une acquisition tridimension-nelle [5]. L’IRM cardiaque et le scanner cardiaque viennentcompléter avantageusement cette démarche en fournissantde nombreuses informations notamment concernant la carac-térisation tissulaire [6].

En pratique clinique, la principale difficulté reste de dis-tinguer et d’assurer le diagnostic différentiel et positif entreles pseudotumeurs (thrombus, végétation), les variantes ana-tomiques et les tumeurs primitives et secondaires.

Tumeurs cardiaques primitives malignes

Le Tableau 1 décrit la fréquence des tumeurs cardiaques pri-mitives en fonction de leur nature histologique.

La Figure 1 décrit la localisation des tumeurs primitives,secondaires et métastases.

Sarcomes

Les sarcomes primitifs cardiaques sont des tumeurs raresreprésentant, selon les séries considérées, 10 à 20 % destumeurs cardiaques primitives [5].

Les sarcomes sont plus fréquemment observés entre 30 et50 ans, et sont répartis de manière équivalente entre hommeset femmes [6]. Ils peuvent siéger dans l’une des quatre cavitéscardiaques mais sont plus fréquemment observés dans l’oreil-lette gauche [6,7]. Ils sont caractérisés par une infiltrationlocale, une obstruction intracavitaire ou des métastases quipeuvent être à l’origine des principales et parfois uniques

manifestations cliniques. On distingue en terme histologiqueet de fréquence, les angiosarcomes (37 à 40 %), les formesindifférenciées (24 %), les histiocytomes (11 à 24 %), lesléiomyosarcomes (8 à 9 %) et les ostéosarcomes (3 à 9 %) [7].

Angiosarcomes

Au plan histologique, les angiosarcomes sont les plus fré-quents des sarcomes, avec dans ce sous-type un ratiohomme/femme de 2 pour 1 [6]. À la différence des autressarcomes, ils sont localisés plus fréquemment dans l’oreil-lette droite et/ou le péricarde. Les métastases sont fréquentes,se développant dans 47 à 89 % des cas, essentiellement delocalisation pulmonaire, mais aussi cérébrale, osseuse oucolique [7]. La survie moyenne ne dépasse que rarementles six mois après le diagnostic [7].

Les manifestations cliniques, signes et symptômes sont engénéral aspécifiques et peuvent associer douleur thoracique,dyspnée, fièvre, signes d’insuffisance cardiaque droite,épanchement péricardique ou obstruction cave [5]. Lessignes ECG sont là aussi aspécifiques allant de la tachycar-die sinusale aux modifications de la repolarisation [5].

En échographie cardiaque cette atteinte est définie par laprésence d’une masse à base large aux limites irrégulières,localisée à proximité de la veine cave et de la valve tricus-pide. Une extension vers le ventricule droit et le péricarde estfréquemment observée [5].

L’IRM retrouve comme en échographie cardiaque unemasse localisée dans l’oreillette droite, à base d’implantationlarge, hétérogène associée à un envahissement des structuresadjacentes et notamment le péricarde [6]. La caractérisationtissulaire en IRM en combinant les différentes phases T1 etT2 et l’injection de gadolinium permet de décrire un aspectcaractéristique de nécrose centrale associée à une hyperin-tensité périphérique [6].

Sarcomes indifférenciés et autres typeshistologiques

Les sarcomes indifférenciés peuvent représenter jusqu’à24 % des sarcomes. L’âge moyen à la présentation est de44 ans, sans prédilection pour l’homme ou la femme (sex-ratio = 1), l’aspect de la tumeur est en général lobulé, avecune base sessile ou pédiculée, pouvant atteindre un diamètrede 10 cm [8]. Il s’agit en général d’une masse infiltrativelocalisée dans l’oreillette gauche dans 80 % des cas [8].

Les autres sous-types histologiques sont très raresincluant les fibrosarcomes, les ostéosarcomes, les léimyosar-comes et les liposarcomes [7].

Tableau 1 Incidence des différentes tumeurs cardiaques primi-

tives en fonction du type histologique, modifié d’après Patel

et Sheppard [1].

Angiosarcome 9 %

Rhabdomyosarcome 6 %

Mésothéliome 4 %

Fibrosarcome 8 %

Fibrosarcome 3 %

Lymphome 2 %

Autre sarcome 3 %

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Lymphome cardiaque

Il convient de distinguer le lymphome cardiaque primitif,entité rare de l’extension cardiaque d’un lymphome extracar-diaque. Vingt-cinq pour cent des patients atteints de lym-phome peuvent présenter une atteinte cardiaque [9].

Lymphome cardiaque primaire

Il s’agit d’une entité rare. Son incidence varie dans les sériesautopsiques de 0,05 à 0,5 %.

Dans la série de Petrich colligeant près de 200 cas, l’âgemoyen lors de la découverte de la tumeur est de 63 ans et lesex-ratio homme/femme de 1,94 [10].

La dyspnée représente la principale manifestationclinique relevée chez près de 65 % des patients. L’insuffi-sance cardiaque est notée dans 47 % des cas, et les douleursthoraciques dans 27 % [10].

La fibrillation atriale (23 %) et les troubles conductifs dehaut degré (22 %) sont les anomalies ECG les plus fréquem-ment décrites dans ce contexte. En échographie, les lym-phomes primaires se traduisent par des aspects infiltratifstouchant essentiellement l’oreillette droite ou le ventri-cule droit dans près de 92 % des cas (Fig. 2) [10]. L’atteintedes cavités gauches n’est notée que dans 8 % des cas,du septum interauriculaire dans 41 % des cas et de laveine cave supérieure (VCS) dans 25 % des cas [10].

Extension d’un lymphome cardiaque

L’incidence des atteintes cardiaques au cours d’un lym-phome est en augmentation essentiellement dans les popula-tions séropositives et chez les patients transplantés.

Il s’agit d’une atteinte du sujet jeune, en moyenne diag-nostiquée entre 35 et 40 ans avec une légère prédominancemasculine [11].

Au plan symptomatique, fibrillation atriale, insuffisancecardiaque globale, insuffisance cardiaque droite, tamponnade,

Fig. 2 Échographie transthoracique voie sous costale : masse

intracardiaque en regard du ventricule droit compatible avec un lym-

phome cardiaque

Fig. 1 Localisation des différentes masses et tumeurs cardiaques

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peuvent faire partie du cortège de manifestations associées àl’envahissement cardiaque [11]. L’atteinte est en général auplan échocardiographique à prédominance droite mais peuttoucher toutes les cavités [11].

Tumeurs cardiaques primitives bénignes

Le Tableau 2 décrit les différentes entités appartenant à cegroupe ainsi que leur incidence.

Le myxome est une tumeur cardiaque généralement soli-taire, se développant dans 75 % des cas dans l’oreillette gau-che et 25 % des cas dans l’oreillette droite, plus rarementdans le ventricule droit ou le ventricule gauche (Fig. 3)[12]. Il s’agit de la plus fréquente des tumeurs cardiaquesprimitives bénignes [12].

Il s’agit d’une tumeur, insérée sur le septum interauricu-laire, à proximité de la fosse ovale. Elle est plus fréquenteentre 30 et 60 ans avec une prédominance féminine. Il s’agiten général d’une atteinte sporadique, mais dans 7 à 10 % descas, elle peut s’intégrer dans une forme familiale d’atteinte àtransmission autosomale dominante. Elle est alors associée àdes lésions cutanées et à une tumeur endocrine (Complex deCarney) [13].

Les manifestations cliniques dépendent de sa localisation,de sa taille, de sa mobilité et de son retentissement hémo-dynamique. Ses dimensions peuvent varier de 1 à 15 cm.

Certaines formes de myxome peuvent donc être asympto-matiques, d’autres se manifester par des signes témoignantd’une migration (embolie pulmonaire pour un myxome loca-lisé dans l’oreillette droite), accident vasculaire cérébral(pour un myxome localisé dans l’oreillette gauche). En casd’obstruction valvulaire, syncope, dyspnée peuvent être lesprincipaux symptômes en sus de signes généraux [14].

L’échographie cardiaque transthoracique couplée à uneinjection d’un produit de contraste (Sonovue®) permet depréciser la localisation, le type d’insertion, de mesurer lamasse, d’en évaluer le retentissement hémodynamique.L’injection d’un agent de contraste par voie intraveineuse amontré son intérêt en permettant de faire la distinction entreun thrombus, une tumeur primitive et le myxome caracté-risé par un rehaussement partiel [15].

L’ETO est en général nécessaire et réalisée dans le cadredu bilan préopératoire.

Le scanner cardiaque et surtout l’IRM cardiaque avecinjection de gadolinium confirment le diagnostic initiale-ment suspect en échographie transthoracique (ETT) en mon-trant une masse hétérogène après injection de gadolinium,iso-intense en T1 et hyperintense en T2 [6].

Fibroélastome papillaire

Le fibroélastome papillaire appartient au groupe des tumeursbénignes. Il s’agit d’une masse de siège valvulaire, en géné-ral solitaire, et de petite taille, inférieure à 10 mm. Sa fré-quence est estimée à 10 % et est probablement sous-estimée,car il est le plus souvent asymptomatique [16].

Généralement identifiée entre 40 et 80 ans, près de lamoitié de ces tumeurs sont identifiées lors d’examen systé-matique ou lors d’une évaluation à la recherche d’une sourcecardiaque d’embolie [17].

En échocardiographie, l’aspect caractéristique est celuid’une masse pédiculée, mobile, insérée sur le versant atrialdes valves auriculovalvulaires et artériel des valves ventricu-laires.

L’excellente résolution spatiale et temporelle de l’ETOpermet de préciser l’insertion [18,19].

Les limitations techniques liées à la moins bonne résolu-tion temporelle de l’IRM cardiaque et spatiale du scannercardiaque rendent ces techniques peu pertinentes dans cetteindication [6].

Métastases cardiaques

Les processus métastatiques avec localisations cardia-ques sont bien plus fréquents que les tumeurs cardiaques

Tableau 2 Incidence des différentes tumeurs cardiaques pri-

maires bénignes, modifié d’après Patel et Sheppard [1].

Myxome 30 %

Lipome 10 %

Fibroélastome 10 %

Rhabdomyome 8 %

Fibrome 4 %

Hémangiome 3 %

Tératome 3 %

Fig. 3 Échographie transœsophagienne : masse intra OD insérée

sur le septum intra auriculaire évoquant un myxome cardiaque

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primitives malignes et peuvent atteindre jusqu’à 20 % despatients pour un cancer donné [4].

Les tumeurs malignes à l’origine de métastases cardiaquesainsi que la fréquence des métastases cardiaques en fonctionde la tumeur primitive sont décrites dans le Tableau 3.

Il est admis que le mélanome est la néoplasie ayant la plusgrande propension à donner des métastases cardiaques [4].Près de 50 % des patients présentant un mélanome peuventprésenter une métastase cardiaque (Tableau 4).

Quatre grandes voies de dissémination sont identifiées etpermettent d’expliquer la formation de métastases à partird’une tumeur primitive. Ainsi, les tumeurs primitives peu-vent atteindre le cœur par voie lymphatique, hématogène,par la veine cave ou par contiguïté. Les extensions par laveine cave inférieure sont essentiellement le fait de tumeurrénale, des tumeurs hépatiques et des léiyomyosarcome uté-rins. Les tumeurs du sein ou du poumon atteignent le massifcardiaque par voie lymphatique ou par contiguïté [20].

Les métastases peuvent avoir plusieurs localisations auniveau cardiaque. L’atteinte myocardique est la plus fré-quente (42 %), suivie par les atteintes épicardiques (30 %),péricardiques (19 %) et endocardiques (6 %) [11] (Fig. 4).

Stratégie d’évaluation d’une masse cardiaque

Le diagnostic de tumeur ou de masse cardiaque reste diffi-cile, et ce quelle que soit la technique d’imagerie utilisée.

L’échocardiographie permet face à une tumeur ou à unemasse cardiaque de préciser la localisation (cavitaire, valvu-laire, myocardique), la forme, la taille, la mobilité et le sited’insertion. En outre, elle permet d’évaluer le retentissementhémodynamique (doppler continu, pulsé) éventuel [21].

Par une analyse précise de l’ensemble des paramètresdécrits précédemment, l’ETT et l’ETO permettent de distin-guer trois diagnostics principaux : végétation, thrombus ettumeur. L’ETT est le plus souvent l’examen de premièreintention lors de l’analyse d’une tumeur ou d’une masse car-diaque. Ses principaux avantages, outre son excellente défi-nition spatiale et temporelle, sont sa disponibilité, la possi-bilité de réaliser l’examen au lit du malade et de permettreune évaluation globale (morphologique et hémodynamique)du massif cardiaque.

La réalisation quasi systématique d’une ETO dans cecontexte et l’introduction de nouveaux outils comme l’écho-cardiographie de contraste, l’échocardiographie en troisdimensions et le doppler tissulaire permettent d’augmenterla précision diagnostique de l’ETT [21]. Ces éléments per-mettent en outre de contourner les principales limites del’ETT comme le défaut d’échogénicité, la génération d’arte-fact et le manque de définition.

L’imagerie en coupe (IRM et scanner cardiaque) complètesouvent avantageusement l’échographie. L’IRM cardiaqueautorise une analyse complète du massif cardiaque avec uneexcellente résolution en signal. Elle est en général réaliséeaprès une échographie cardiaque autorisant après injectionde gadolinium une meilleure caractérisation tissulaire demasse cardiaque [6].

Tableau 3 Origines et fréquences des tumeurs métastatiques

cardiaques en fonction de la tumeur d’après Butany et al. [8].

Origine des tumeurs métastatiques cardiaques Fréquence

(%)

Poumon 27

Lymphome 10

Sein 10

Leucémie 10

Estomac 4

Mélanome 4

Foie 1

Colon 3

Tableau 4 Mode de diffusion des métastases cardiaques

en fonction de l’étiologie, modifié d’après Butany et al. [8].

Secondaire

Contigüité

Cancer du sein, du poumon, de l’œsophage, tumeur

médiastinale

Diffusion hématogène

Mélanome, poumon, sein, digestive, urogénitale

Diffusion veineuse

Rein, surrénale, thyroïde, poumon, foie

Diffusion lymphatique

Lymphome, leucémie

Fig. 4 Échographie cardiaque transthoracique : masse intracar-

diaque localisée dans le ventricule gauche évocatrice d’une méta-

stase cardiaque

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Conflit d’intérêt : les auteurs déclarent ne pas avoir deconflit d’intérêt.

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