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INFORMATIONS MÉDICALES Des résultats prometteurs d’une première administration chez l’homme d’anticorps monoclonaux dirigés contre la protéine Nogo-A ont été présentés lors du dernier congrès international consacré à la SLA par le Dr Pierre-François Pradat (hôpital de la Pitié- Salpêtrière, Paris). Bien qu’il ne s’agisse que d’un essai dont l’objectif était d’étudier la tolérance chez des patients souffrant de SLA (phase I/IIa), une tendance à une réduction du déclin des fonctions respiratoires et motrices a été rapportée. L’ESSAI thérapeutique fait suite aux travaux fondamentaux réali- sés par les équipes du Dr Pierre- François Pradat et du Dr Jean- Philippe Loeffler (INSERM U692, Strasbourg). « La protéine Nogo- A est le plus puissant inhibiteur de la croissance axonale connu à ce jour », explique au « Quoti- dien » le Dr Pierre-François Pra- dat. Cette protéine est exprimée à l’état normal dans le système nerveux. Les équipes ont montré que l’on retrouvait des taux anor- malement élevés de cette pro- téine Nogo-A dans les muscles de patients souffrant de SLA. L’excès de cette protéine, qui in- hibe la croissance axonale, pour- rait ainsi constituer un obstacle aux mécanismes naturels de ré- innervation visant à compenser la perte des axones moteurs. En effet, les motoneurones ne dégé- nèrent pas tous de façon équiva- lente et il demeure une popula- tion de motoneurones sains, non atteints. Ceux-ci peuvent en- voyer des prolongements pour recoloniser les fibres muscu- laires dénervées. En bloquant la protéine Nogo-A qui inhibe la croissance axonale, il serait ainsi possible de favoriser ce méca- nisme de ré-innervation et donc d’améliorer, ou au moins de ra- lentir, le déclin de la fonction motrice. Un anticorps monoclonal huma- nisé. Or les Laboratoires GSK ont mis au point un anticorps monoclo- nal humanisé. Il a fait l’objet d’une étude de phase I/IIa, dont l’objectif primaire n’était pas encore d’éva- luer l’efficacité thérapeutique, mais de déterminer s’il y existe un risque d’effets secondaires. Cet essai in- ternational, conduit sous la respon- sabilité du Pr Vincent Meininger (hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Pa- ris), a été réalisé en France au centre d’investigation clinique de l’institut Cerveau Moelle (CIC-9503, INSERM/APHP/ICM, hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris). « Cette structure de recherche clinique spécialisée en neurosciences, coor- donnée par le Dr Jean-Christophe Corvol, travaille en étroite collabo- ration avec les neurologues et les laboratoires de recherche fonda- mentale du site. Le projet présent était plus particulièrement suivi par le Dr Lenglet, neurologue, lui- même spécialisé dans la SLA », poursuit le Dr Pradat. L’étude a donc consisté à tester par voie intraveineuse des doses progressivement croissantes d’an- ticorps. Même aux doses les plus élevées, il n’a pas été observé d’ef- fets secondaires importants. Un résultat essentiel est que les pa- tients qui avaient reçu les doses les plus élevées semblaient pré- senter une évolution clinique plus lente, jugée sur plusieurs para- mètres : une échelle fonctionnelle de handicap moteur, l’évaluation de la force musculaire et la spiro- métrie respiratoire. Le nombre de patients qui avaient reçu cette dose était toutefois trop faible et la durée d’évaluation trop courte, pour permettre d’affirmer statisti- quement qu’il existe une efficacité réelle du traitement. Une biopsie musculaire avant et après. Toutes les données de l’essai n’étaient, d’autre part, pas disponibles. Certains patients ont ainsi pu bénéficier d’une biopsie musculaire avant et après traitement. Chez ces pa- tients, il sera possible de mesu- rer jusqu’à quel degré les anti- corps anti-Nogo-A se fixent bien sur leur cible présente à la sur- face des fibres musculaires. Et il sera possible de déterminer si le traitement améliore des para- mètres biologiques traduisant l’état d’innervation du muscle, notamment en mesurant les mo- difications d’expression d’un très grand nombre de gènes par une approche de transcripto- mique. Ce type de démarche no- vatrice, utilisant le domaine très en pointe des biomarqueurs, per- mettra d’optimiser au mieux l’es- sai international qui devrait être conduit en 2012. Il aura pour ob- jet d’évaluer l’efficacité du traite- ment. > Dr BÉATRICE VUAILLE Référence : Pradat PF, Corse A, Shefner J, Rothstein JD, Leigh PN et coll. A First-Time-in-Human study in ALS patients with the anti-Nogo-A monoclonal antibody GSK1223249. Preliminary results. Oral presentation. 22nd international symposium on ALS/MND. Sydney, Australia, 30 Nov-2 Dec 2011. Des Français obtiennent des résultats encourageants Des anticorps testés dans la sclérose latérale amyotrophique Des souris résistantes au CMV En association avec le CA19-9

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INFORMATIONS

MÉDICALES

Des résultats prometteursd’une première administrationchez l’homme d’anticorpsmonoclonaux dirigés contre la protéine Nogo-A ont étéprésentés lors du derniercongrès internationalconsacré à la SLA par le Dr Pierre-François Pradat(hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris). Bien qu’ilne s’agisse que d’un essaidont l’objectif était d’étudierla tolérance chez des patientssouffrant de SLA (phaseI/IIa), une tendance à une réduction du déclin des fonctions respiratoires etmotrices a été rapportée.

L’ESSAI thérapeutique fait suiteaux travaux fondamentaux réali-sés par les équipes du Dr Pierre-François Pradat et du Dr Jean-Philippe Loeffler (INSERM U692,Strasbourg). « La protéine Nogo-A est le plus puissant inhibiteurde la croissance axonale connuà ce jour », explique au « Quoti-

dien » le Dr Pierre-François Pra-dat. Cette protéine est expriméeà l’état normal dans le systèmenerveux. Les équipes ont montréque l’on retrouvait des taux anor-malement élevés de cette pro-téine Nogo-A dans les musclesde patients souffrant de SLA.L’excès de cette protéine, qui in-hibe la croissance axonale, pour-rait ainsi constituer un obstacleaux mécanismes naturels de ré-innervation visant à compenserla perte des axones moteurs. Eneffet, les motoneurones ne dégé-nèrent pas tous de façon équiva-lente et il demeure une popula-tion de motoneurones sains, nonatteints. Ceux-ci peuvent en-voyer des prolongements pourrecoloniser les fibres muscu-laires dénervées. En bloquant laprotéine Nogo-A qui inhibe lacroissance axonale, il serait ainsipossible de favoriser ce méca-nisme de ré-innervation et doncd’améliorer, ou au moins de ra-lentir, le déclin de la fonctionmotrice.

Un anticorps monoclonal huma-nisé. Or les Laboratoires GSK ontmis au point un anticorps monoclo-nal humanisé. Il a fait l’objet d’uneétude de phase I/IIa, dont l’objectifprimaire n’était pas encore d’éva-luer l’efficacité thérapeutique, maisde déterminer s’il y existe un risqued’effets secondaires. Cet essai in-ternational, conduit sous la respon-sabilité du Pr Vincent Meininger(hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Pa-ris), a été réalisé en France aucentre d’investigation clinique del’institut Cerveau Moelle (CIC-9503,INSERM/APHP/ICM, hôpital de laPitié-Salpêtrière, Paris). « Cettestructure de recherche cliniquespécialisée en neurosciences, coor-donnée par le Dr Jean-ChristopheCorvol, travaille en étroite collabo-ration avec les neurologues et leslaboratoires de recherche fonda-mentale du site. Le projet présentétait plus particulièrement suivipar le Dr Lenglet, neurologue, lui-même spécialisé dans la SLA »,poursuit le Dr Pradat.L’étude a donc consisté à tester

par voie intraveineuse des dosesprogressivement croissantes d’an-ticorps. Même aux doses les plusélevées, il n’a pas été observé d’ef-fets secondaires importants. Unrésultat essentiel est que les pa-tients qui avaient reçu les dosesles plus élevées semblaient pré-senter une évolution clinique pluslente, jugée sur plusieurs para-mètres : une échelle fonctionnellede handicap moteur, l’évaluationde la force musculaire et la spiro-métrie respiratoire. Le nombre depatients qui avaient reçu cettedose était toutefois trop faible etla durée d’évaluation trop courte,pour permettre d’affirmer statisti-quement qu’il existe une efficacitéréelle du traitement.

Une biopsie musculaire avantet après. Toutes les données del’essai n’étaient, d’autre part, pasdisponibles. Certains patientsont ainsi pu bénéficier d’unebiopsie musculaire avant etaprès traitement. Chez ces pa-tients, il sera possible de mesu-

rer jusqu’à quel degré les anti-corps anti-Nogo-A se fixent biensur leur cible présente à la sur-face des fibres musculaires. Et ilsera possible de déterminer si letraitement améliore des para-mètres biologiques traduisantl’état d’innervation du muscle,notamment en mesurant les mo-difications d’expression d’untrès grand nombre de gènes parune approche de transcripto-mique. Ce type de démarche no-vatrice, utilisant le domaine trèsen pointe des biomarqueurs, per-mettra d’optimiser au mieux l’es-sai international qui devrait êtreconduit en 2012. Il aura pour ob-jet d’évaluer l’efficacité du traite-ment.

> Dr BÉATRICE VUAILLE

Référence : Pradat PF, Corse A, Shefner J,Rothstein JD, Leigh PN et coll. A First-Time-in-Human study in ALS patients with the anti-Nogo-Amonoclonal antibody GSK1223249.Preliminary results. Oral presentation.22nd international symposium onALS/MND. Sydney, Australia, 30 Nov-2Dec 2011.

Des chercheurs français ontidentifié chez la souris ungène qui, muté, permet destimuler les défensesimmunitaires.

ALORS QUE ce gène étaitconnu pour activer les cellulesNatural Killers (NK), son inacti-vation rend paradoxalement cescellules NK hypersensibles auxsignaux d’alerte envoyés par lescellules malades.Retour sur les travaux de re-cherche des équipes d’Éric Vi-vier et Sophie Ugolin du centred’immunologie de Marseille-Lu-miny (INSERM/CNRS/Univer-sité Aix Marseille).Les chercheurs rappellent qu’ilsont identifié une lignée de sou-ris dont les cellules NK étaienthyperréactives. Ces souris ontété élevées afin d’en obtenir unstock homozygote. Le phéno-type murin obtenu a été appeléNoé ; il est apparu qu’il résultaitd’une seule mutation autoso-male récessive. La réponse ex-cessive de leurs NK a été confir-mée in vitro. Puis les cher-cheurs ont infecté des sourisNoé et des souris sauvages par lecytomégalovirus. Résultat : alorsque les deux groupes de sourissurvivent à de faibles doses devirus, seules les souris Noé survi-vent à des doses moyennes ; et side fortes doses sont léthalespour les deux groupes de sou-ris, les souris Noé survivent pluslongtemps. Cette résistance estapparue liée aux cellules NK.Les souris Noé avaient, quatrejours après l’infection, demoindres taux de CMV dans larate et le foie (respectivement4/5e et 5/6e).Les chercheurs ont ensuite cher-

ché à identifier la mutation ré-cessive responsable de la résis-tance des cellules NK des sourisNoé. Ils ont donc séquencé le gé-nome entier d’une souris Noé etd’une souris sauvage. Ils se sontalors focalisés sur une mutation(W32R) du gène Ncr1, présentechez toutes les souris Noé. Cegène code le récepteur NKp46des cellules NK, lequel estconservé chez tous les mammi-fères et est exprimé dans toutesles cellules NK matures. NKp46est connu depuis des annéescomme activant les NK.

Greffe de moelle, chimiothé-rapie. Les chercheurs n’ont pasréussi à retrouver ce récepteurNKp46 à la surface des NK dessouris Noé. Pour tester le poten-tiel thérapeutique de leur décou-verte, les chercheurs ont bloquéle récepteur NKp46 à l’aide d’unanticorps monoclonal. Résultat :cet anticorps rend les cellulesNK beaucoup plus efficaces.« Désormais, notre objectif estd’explorer plus avant les méca-nismes biologiques sous-jacentset de travailler en collaborationavec l’industrie biopharmaceu-tique et l’hôpital pour évaluer lepotentiel médical de ce nouveautype de traitement, notammentpour les patients dont le sys-tème immunitaire est déjà trèsaffaibli comme les malades at-teints d’un déficit immunitaireet les patients ayant subi unegreffe de moelle ou une chimio-thérapie anticancéreuse », in-dique Éric Vivier.

> Dr EMMANUEL DE VIEL

Narni-Mancinelli E, Jaeger BN,Bernat C et coll. Science du 19 janvier 2011.

Des Français obtiennent des résultats encourageantsDes anticorps testés dans la sclérose latérale amyotrophique

Des souris résistantes au CMV Une nouvelle voie pourlutter contre les infections

Un nouveau biomarqueur a ététesté dans le dépistage ducancer du pancréas. Il pourraitdétecter pratiquement deuxtiers des patients au stade 1,dans le cas de l’adénocarcinomeductal. Ce qui fait préfigurerd’une avancée importante,quand on sait que le cancer du pancréas est extrêmementdifficile à détecter aux stadesprécoces.

EN COMBINANT ce nouveau mar-queur, qui est la protéine PAM4, aubiomarqueur déjà en usage pourmonitorer la progression de la ma-ladie et qui est le CA19-9, on a pudépister 85 % des patients souffrantde cancer du pancréas dans saforme d’adénocarcinome ductal(90 % des cancers du pancréas).David Gold et son équipe (NewYork) ont préalablement établiqu’un test immunoenzymatique,employant l’anticorps monoclonalPAM4 pour tester le sérum des ma-lades, est capable d’identifier 82 %des patients souffrant d’un adéno-carcinome ductal du pancréas(ACDP). Le test avait identifié13 patients parmi 21 qui présen-taient un ACDP à un stade I (62 %)dans une étude qu’ils avaient anté-rieurement publiée.

Soixante-quatre pour cent deceux au stade 1. Dans le travail queces auteurs ont présenté au « Gas-trointestinal Cancers Symposium »(États-Unis), ont été inclus 602 indi-vidus, partagés en 4 groupes : despatients ayant un cancer du pan-créas, comportant des ACDP etd’autres formes : ceux ayant descancers d’organes voisins ; des pa-tients avec une maladie pancréa-

tique bénigne, telle qu’une pancréa-tite ; des adultes en bonne santé.Le nouveau test fondé sur PAM4 adétecté 76 % des individus porteursd’un ACDP et 85 % de ces cas lors-qu’il était combiné avec le testCA19-9. Parmi ces patients, le test adépisté avec précision 64 % de ceuxau stade 1 de la maladie et 85 % desindividus avec une maladie avan-cée, lorsqu’il est combiné avec letest CA19-9.Dans les cancers des organes avoi-sinants, les investigateurs onttrouvé qu’environ la moitié des pa-tients avec une localisation biliaireextrahépatique et périampullaired’un adénocarcinome étaient posi-tifs pour la protéine PAM4.Par comparaison, 19 % des patientsavec une maladie pancréatique bé-nigne et 23 % avec une pancréatitechronique sont positifs pour la pro-téine PAM4.

« Ces résultats montrent que la ré-activité à l’anticorps PAM4 est forte-ment restreinte à l’ACDP, le biomar-queur étant présent à un stade pré-coce de l’évolution de la maladie, aremarqué Gold. Pour autant quenous le sachions, il n’y a pas de bio-marqueur ou d’antigènes cibles quis’expriment à une fréquence aussiimportante et à une concentrationappréciable dans l’ACDP, ce, avecune telle spécificité. »Les chercheurs ont d’ores et déjàprévu d’utiliser le test de dépistagechez des patients à haut risque decancer du pancréas : les sujetsayant une pancréatite chronique,les cas de diabète d’installation bru-tale et les personnes ayant des an-técédents familiaux d’ACDP. On vatenter de dépister la survenue d’unACDP à un stade précoce de lacroissance tumorale.

> Dr BÉATRICE VUAILLE

En association avec le CA19-9Un biomarqueur détecte précocementdes cancers pancréatiques

L’association de PAM4 et du CA19-9 a détecté 85 % des patients avec une maladie avancée

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4 - LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN - N° 9070 - LUNDI 23 JANVIER 2012 - www.lequotidiendumedecin.fr

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