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Atelier 06 - Protection de la nature et de la biodiversite dans vingt ans President: Luc Hoffmann - Animateurs : Jean-Pierre Raffin, Jean-Marc Michel et Jean-Claude Lefeuvre Au travers des dlfferentes communications entendues et dlscutees, trois points se degagent : 1. des connalssances Les trois niveaux de la dlverslte blologlque (genetlque, taxonomlque et ecologlque) sont Inegalement couverts par Ie champ des connalssances. II y a donc risque de voir Ie terme -blodlverslte- utilise plus comme un slogan que comme un mot dont Ie sens est commun au pius grand nombre. En effet : a) Ie mot est perc;u dlfferemment selon les Interlo• cuteurs, b) la demonstration de 1'- utlllte • de la dlverslte blolo• glque est recente et peu accessible a I'oplnlon pUbllque, c) la connalssance de la dlverslte blologlque est tres Imparfalte. Connait-on 5% ou 50 % des especes vlvantes de la planete ? d) I'argumentalre pour conserver la dlverslte blolo• glque fait appel a des ressorts divers: ethlques, esthe• tlques, utllltalres ( c'est a dire fondes sur la cralnte de voir dlsparaitre une ressource pour les generations futures), etc. e) la volonte de conserver des espaces ou des especes - sauvages • n'est-elle pas la traduction d'un deslr de lutter contre la mort, de retour au paradis perdu? 2. Tendance, perspectives et propositions L:hlstolre montre que pour conserver cette dlverslte blologlque (quelles qU'alent ete les motivations) I'homme a d'abord voulu creer des sanctualres de nature - extraordlnalre '. Du point de vue operatlonnel, c'est une pratique necessalre mals Insufflsante. Ces - morceaux " de nature ne peuvent assurer la conserva• tion de la dlverslte blologlque s'lls ne sont pas relies entre eux d'ou I'obllgatlon de developper des polltlques et strategies de reseaux, de corridors assurant la fonc• tlonnallte a long terme des ecosystemes. Dans les pays ou les ecosystemes orlglnels ont ete profondement modifies, on constate que lorsque les modifications se sont effectuees lentement, II s'est malntenu une dlver• site blologlque forte dont I'homme a pu Mre un facteur posltlf. lis constituent des espaces perc;us auJourd'hul comme - naturels '. Leur perennlte est souvent llee a la plurallte des usages et des representations. Gerer la dlverslte blologlque demande donc son Integration dans la realite economlque et soclale, c'est-a-dlre en definitive, dans un developpement soutenable. Du point de vue operatlonnel cela conslste non seulement a Integrer les concepts de conservation dans I'amenagement du terrltolre (ecologle du paysage, Infrastructures naturelles, lutte contre la frag• mentation, malntlen de la connectlvlte, etc.), mals egalement a se preoccuper de I'exploltatlon de la - nature ordlnalre ". Malntenlr un malllage vivant (bocage par exemple) est une bonne chose, mals cela n'exclue pas que I'on se deslnteresse des pratlques concernant les espaces contenus par les mallles. Dans la perspective d'un changement cllmatlque, II faut eviter I'enkystement des zones refuges sans posslbilite de diffusion sl la matrlce agrlcole est trop pregnante. II faut noter la perplexlte des economlstes pour attrl• buer une valeur a la dlverslte blologlque et sl tel est Ie cas, sur les modalltes d'evaluatlon. II semble que la dlverslte blologlque fasse recette dans les conventions et strategies Internatlonales. Cependant, I'exemple de la convention sur la dlverslte blologlque signee a Rio de Janeiro en 1992 montre Ie gllssement des preoccupations vers les seules biotech• nologies et la dlsparltlon de la notion de patrimolne mondlal. Cette notion est remplacee par celie de - patrlmolnes locaux " places sous la responsablllte quasi exclusive des etats sans obligations de resultats. Ces obligations constituent pourtant un element stra• teglque fort (d. Convention C02 ), 51 I'on salt que nombre d'etats ne se donnent pas les moyens d'y satlsfalre. 3. De la II est apparu a I'ateller qU'un bonne part des blocages socletaux par rapport a la conservation de la dlverslte blologlque resultalt d'un deficit de mediation, L:exemple des perlpeties la mise en ceuvre, en France, du reseau Natura 2000 en application de la directive europeenne - Habitats " Ie montre. On peut conslderer qU'au dela de I'exacerbatlon demagoglque, a des fins polltlques, d'un sentiments antl-europeen par certains groupes de pression, II ya eu un manque reel de mediation. II est dO aussl bien au manque de moyens du mlnlstere de I'Envlronnement qU'au manque de conviction d'autres departements mlnlste• riels notamment pour des raisons culturelles. La gestion de la dlverslte blologlque ne peut done rester une affaire de speclallstes dans la mesure ou elle depend de I'utlllsation de terrltolres exploltes et des cholx de developpement qUi y sont faits. Un effort de communication dolt done deve• loppe au plus pres des communautes locales pour rechercher leur engagement dans la conservation dt:! leur patrlmolne. NSS. 1998, vol. 6. 2. 87-90

Atelier 06 — Protection de la nature et de la biodiversité dans vingt ans: Président : Luc Hoffmann — Animateurs : Jean-Pierre Raffin, Jean-Marc Michel et Jean-Claude Lefeuvre

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Atelier 06 - Protection de la natureet de la biodiversite dans vingt ansPresident: Luc Hoffmann - Animateurs : Jean-Pierre Raffin,Jean-Marc Michel et Jean-Claude Lefeuvre

Au travers des dlfferentes communications entendueset dlscutees, trois points se degagent :

1. ~tat des connalssances

Les trois niveaux de la dlverslte blologlque (genetlque,taxonomlque et ecologlque) sont Inegalementcouverts par Ie champ des connalssances. II y a doncrisque de voir Ie terme -blodlverslte- utilise pluscomme un slogan que comme un mot dont Ie sens estcommun au pius grand nombre.

En effet :a) Ie mot est perc;u dlfferemment selon les Interlo•cuteurs,b) la demonstration de 1'- utlllte • de la dlverslte blolo•glque est recente et peu accessible a I'oplnlonpUbllque,c) la connalssance de la dlverslte blologlque est tresImparfalte. Connait-on 5 % ou 50 % des especesvlvantes de la planete ?d) I'argumentalre pour conserver la dlverslte blolo•glque fait appel a des ressorts divers: ethlques, esthe•tlques, utllltalres ( c'est a dire fondes sur la cralnte devoir dlsparaitre une ressource pour les generationsfutures), etc.e) la volonte de conserver des espaces ou des especes- sauvages • n'est-elle pas la traduction d'un deslr delutter contre la mort, de retour au paradis perdu?

2. Tendance, perspectives et propositions

L:hlstolre montre que pour conserver cette dlverslteblologlque (quelles qU'alent ete les motivations)I'homme a d'abord voulu creer des sanctualres denature - extraordlnalre '. Du point de vue operatlonnel,c'est une pratique necessalre mals Insufflsante. Ces- morceaux " de nature ne peuvent assurer la conserva•tion de la dlverslte blologlque s'lls ne sont pas reliesentre eux d'ou I'obllgatlon de developper des polltlqueset strategies de reseaux, de corridors assurant la fonc•tlonnallte a long terme des ecosystemes. Dans les paysou les ecosystemes orlglnels ont ete profondementmodifies, on constate que lorsque les modifications sesont effectuees lentement, II s'est malntenu une dlver•site blologlque forte dont I'homme a pu Mre un facteurposltlf. lis constituent des espaces perc;us auJourd'hulcomme - naturels '. Leur perennlte est souvent llee a laplurallte des usages et des representations.

Gerer la dlverslte blologlque demande donc sonIntegration dans la realite economlque et soclale,c'est-a-dlre en definitive, dans un developpementsoutenable.

Du point de vue operatlonnel cela conslste nonseulement a Integrer les concepts de conservationdans I'amenagement du terrltolre (ecologle dupaysage, Infrastructures naturelles, lutte contre la frag•mentation, malntlen de la connectlvlte, etc.), malsegalement a se preoccuper de I'exploltatlon de la- nature ordlnalre ". Malntenlr un malllage vivant(bocage par exemple) est une bonne chose, mals celan'exclue pas que I'on se deslnteresse des pratlquesconcernant les espaces contenus par les mallles. Dansla perspective d'un changement cllmatlque, II fauteviter I'enkystement des zones refuges sans posslbilitede diffusion sl la matrlce agrlcole est trop pregnante.

II faut noter la perplexlte des economlstes pour attrl•buer une valeur a la dlverslte blologlque et sl tel est Iecas, sur les modalltes d'evaluatlon.

II semble que la dlverslte blologlque fasse recettedans les conventions et strategies Internatlonales.Cependant, I'exemple de la convention sur la dlverslteblologlque signee a Rio de Janeiro en 1992 montre Iegllssement des preoccupations vers les seules biotech•nologies et la dlsparltlon de la notion de patrimolnemondlal. Cette notion est remplacee par celie de- patrlmolnes locaux " places sous la responsabllltequasi exclusive des etats sans obligations de resultats.Ces obligations constituent pourtant un element stra•teglque fort (d. Convention C02 ), m~me 51 I'on saltque nombre d'etats ne se donnent pas les moyens d'ysatlsfalre.

3. De la m~dlatlon

II est apparu a I'ateller qU'un bonne part des blocagessocletaux par rapport a la conservation de la dlverslteblologlque resultalt d'un deficit de mediation,L:exemple des perlpeties d~ la mise en ceuvre, enFrance, du reseau Natura 2000 en application de ladirective europeenne - Habitats " Ie montre. On peutconslderer qU'au dela de I'exacerbatlon demagoglque,a des fins polltlques, d'un sentiments antl-europeenpar certains groupes de pression, II y a eu un manquereel de mediation. II est dO aussl bien au manque demoyens du mlnlstere de I'Envlronnement qU'aumanque de conviction d'autres departements mlnlste•riels notamment pour des raisons culturelles.

La gestion de la dlverslte blologlque ne peut donerester une affaire de speclallstes dans la mesure ouelle depend de I'utlllsation de terrltolres exploltes etdes cholx de developpement qUi y sont faits.

Un effort de communication dolt done ~tre deve•loppe au plus pres des communautes locales pourrechercher leur engagement dans la conservation dt:!leur patrlmolne.

NSS. 1998, vol. 6. n° 2. 87-90