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Calcul des surfaces. Atouts et limites des récepteurs GPS “grand public” Nicolas Nguyen The - Christophe Ginet - Adeline Giraud - Alain Bouvet Le calcul d’une surface est une difficulté récurrente en foresterie comme dans d’autres domaines. Classiquement, les forestiers utilisent topofil et boussole, ou encore théodolite dans certains cas. Avec le développement du GPS, une nouvelle gamme d’outils est à disposition des opérateurs de terrain. L’intérêt d’un récepteur GPS haut de gamme, dédié aux applications SIG (Système d’Information géographique), n’est plus aujourd’hui à démontrer (Leclerc, 1996 ; Forgues, 2001). Cependant, depuis l’arrêt du brouillage américain sur le signal GPS en 2000, pour un certain nombre d’ap- plications en forêt, l’utilisation de tels récepteurs peut être considérée comme de la sur-qualité par rapport à la précision réellement nécessaire. Ces récepteurs sont coûteux. Ils requièrent de la technicité, en particulier lors du traitement et de l’analyse des données au bureau. La complé- mentarité avec un SIG est quasiment obligatoire. Ils sont donc peu accessibles pour des non- spécialistes. Dans le même temps, la précision des récepteurs GPS de la gamme “grand public” (sans correc- tion différentielle (1) ) s’est considérablement accrue (Nguyen The et Ginet, 2001 ; Piedallu et Gégout, 2002), ce qui a provoqué un regain d’intérêt pour ce type d’appareil bon marché. Plusieurs d’entre eux proposent une option de calcul de surface permettant d’obtenir un résultat directement sur le terrain sans avoir recours à un SIG et un traitement de données. Oderwald et Boucher (2003) ont mis en évidence que leur utilisation pouvait être plus précise que la méthode traditionnelle (topofil et boussole) pour le calcul d’une surface forestière. L’objectif de cet article est d’apporter des éléments sur la précision en surface de ce type d’ap- pareils dans le cas d’une utilisation simple par un opérateur de terrain. MÉTHODOLOGIE Matériel utilisé et surface de référence Le récepteur grand public testé ici est le 12XL de la marque Garmin. Avec cet appareil, le calcul de surface est effectué à partir de l’enregistrement d’une “trace”. La trace représente un mode d’enregistrement d’un cheminement continu sous la forme d’une succession de points relevés par Rev. For. Fr. LVI - 6-2004 529 OUTILS ET MÉTHODES (1) La correction différentielle consiste à corriger les mesures d’un récepteur mobile avec celles d’un récepteur de contrôle, fixe, placé sur un point dont les coordonnées sont connues avec précision. La correction différentielle a pour but de corriger les erreurs liées au système GPS et d’améliorer la précision du récepteur. Jusqu’en mai 2000, le Département de la Défense de l’armée américaine dégradait les signaux émis par le système GPS. La correction différentielle permettait notamment d’annuler l’effet de ce brouillage. Depuis l’arrêt du brouillage, la correction différentielle permet de réduire d’autres types d’erreurs liées au système (erreurs d’horloges, d’orbites, de propagation dans les différentes couches de l’atmosphère). Elle n’a par contre aucun effet sur les erreurs induites par le multi-trajet et le bruit du récepteur.

Calcul Des Surfaces. Atouts Et Limites

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Calcul Des Surfaces. Atouts Et Limites

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Calcul des surfaces. Atouts et limitesdes récepteurs GPS “grand public”

Nicolas Nguyen The - Christophe Ginet - Adeline Giraud - Alain Bouvet

Le calcul d’une surface est une difficulté récurrente en foresterie comme dans d’autres domaines.Classiquement, les forestiers utilisent topofil et boussole, ou encore théodolite dans certains cas.Avec le développement du GPS, une nouvelle gamme d’outils est à disposition des opérateursde terrain.

L’intérêt d’un récepteur GPS haut de gamme, dédié aux applications SIG (Système d’Informationgéographique), n’est plus aujourd’hui à démontrer (Leclerc, 1996 ; Forgues, 2001). Cependant,depuis l’arrêt du brouillage américain sur le signal GPS en 2000, pour un certain nombre d’ap-plications en forêt, l’utilisation de tels récepteurs peut être considérée comme de la sur-qualitépar rapport à la précision réellement nécessaire. Ces récepteurs sont coûteux. Ils requièrent dela technicité, en particulier lors du traitement et de l’analyse des données au bureau. La complé-mentarité avec un SIG est quasiment obligatoire. Ils sont donc peu accessibles pour des non-spécialistes.

Dans le même temps, la précision des récepteurs GPS de la gamme “grand public” (sans correc-tion différentielle (1) ) s’est considérablement accrue (Nguyen The et Ginet, 2001 ; Piedallu etGégout, 2002), ce qui a provoqué un regain d’intérêt pour ce type d’appareil bon marché.Plusieurs d’entre eux proposent une option de calcul de surface permettant d’obtenir un résultatdirectement sur le terrain sans avoir recours à un SIG et un traitement de données. Oderwald etBoucher (2003) ont mis en évidence que leur utilisation pouvait être plus précise que la méthodetraditionnelle (topofil et boussole) pour le calcul d’une surface forestière.

L’objectif de cet article est d’apporter des éléments sur la précision en surface de ce type d’ap-pareils dans le cas d’une utilisation simple par un opérateur de terrain.

MÉTHODOLOGIE

Matériel utilisé et surface de référence

Le récepteur grand public testé ici est le 12XL de la marque Garmin. Avec cet appareil, le calculde surface est effectué à partir de l’enregistrement d’une “trace”. La trace représente un moded’enregistrement d’un cheminement continu sous la forme d’une succession de points relevés par

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OU T I L S E T MÉ T H ODES

(1) La correction différentielle consiste à corriger les mesures d’un récepteur mobile avec celles d’un récepteur de contrôle, fixe, placésur un point dont les coordonnées sont connues avec précision. La correction différentielle a pour but de corriger les erreurs liées ausystème GPS et d’améliorer la précision du récepteur.Jusqu’en mai 2000, le Département de la Défense de l’armée américaine dégradait les signaux émis par le système GPS. La correctiondifférentielle permettait notamment d’annuler l’effet de ce brouillage. Depuis l’arrêt du brouillage, la correction différentielle permet deréduire d’autres types d’erreurs liées au système (erreurs d’horloges, d’orbites, de propagation dans les différentes couches del’atmosphère). Elle n’a par contre aucun effet sur les erreurs induites par le multi-trajet et le bruit du récepteur.

l’appareil selon une fréquence fixée par l’opérateur. L’opérateur suit le contour de la surface àdéterminer en activant la fonction “trace” puis, une fois celle-ci terminée, obtient la surfaceparcourue avec l’option calcul de surface.

Les surfaces obtenues par le Garmin sont comparées à des surfaces de référence (surfacestémoins appelées dans la suite SProXR). Celles-ci sont obtenues sous SIG en reliant les sommetsdes parcelles, ces sommets étant enregistrés sur le terrain par un récepteur ProXR (de la marqueTrimble) avec correction différentielle (station de base de Valabre distante d’environ 130 km).Une moyenne de 180 positions (3 minutes d’enregistrement, à raison d’un enregistrement parseconde) a été calculée pour chaque sommet. Ce procédé, associé à la précision de ce matériel,permet d’obtenir un calcul fiable de la surface de référence.

Toutes les mesures, y compris les mesures témoins au ProXR, sont effectuées avec la mêmeconfiguration satellitale caractérisée par un PDOP(2) inférieur à 5, un nombre de satellites supé-rieur à 6, et avec un masque d’élévation (3) de 20° représentant des paramètres standards. Lesplages de réception correspondantes sont établies avec le module Quickplan du logiciel Path-finder Office de Trimble.

Principes du test

Le test est conduit en trois étapes. D’abord pour quantifier la variabilité de la mesure sur unesurface définie et dans les meilleures conditions de réception, ensuite pour connaître l’influencede la taille des parcelles sur la précision et enfin pour connaître l’influence du couvert forestier.

• Mesure de la variabilité en terrain découvert

On considère une parcelle d’un ha délimitée sur un terrain nu correspondant à une zone defriche et de cultures agricoles, complètement dégagée et plate. Cette parcelle représente desconditions de réception optimales.

Cette surface d’un ha est mesurée plusieurs fois en considérant différents pas de temps :10 mesures successives pour connaître la variabilité instantanée ou répétabilité ; deux mesurespar jour (matin et après-midi) sur 7 jours pour connaître la variabilité à l’intérieur d’une journéeet entre journées, c’est-à-dire la reproductibilité. Les mesures ont été effectuées entre le 3 etle 22 juillet 2002.

• Influence de la taille de la parcelle

À partir de la parcelle de référence d’un ha, trois parcelles de taille croissante (2 ha, 4,5 ha et7,5 ha) ont été délimitées de manière emboîtée. Ces parcelles ont également été mesurées deuxfois par jour à 7 dates différentes entre le 3 et le 22 juillet 2002.

• Influence du couvert forestier

Trois autres parcelles de 0,5 ha, 1 ha et 1,5 ha ont été délimitées dans une plantation forestièrede Pin pignon (Pinus pinea) âgée d’environ 50 ans et présentant une surface terrière de 40 m2/ha.Le terrain est plat et situé à une dizaine de kilomètres du premier site d’étude. Chacune desparcelles a été mesurée 8 fois sur 5 journées différentes entre le 24 et le 31 juillet 2002, enrespectant toujours les plages de réception définies par Quickplan.

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(2) Position Dilution Of Precision : le PDOP est un indicateur numérique de la configuration des satellites dans l’espace. Plus il estfaible et plus la configuration est bonne, ce qui se traduit par une meilleure précision.(3) Les erreurs liées à la propagation du signal d’un satellite dans les différentes couches de l’atmosphère sont d’autant plus domma-geables que le satellite est bas sur l’horizon. Le masque d’élévation est la valeur d’un angle formé depuis l’horizon et en dessousduquel les signaux des satellites ne sont pas pris en compte pour le positionnement.

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Outils et méthodes

Calcul de l’erreur

Dans la perspective d’une mesure immédiate sur le terrain, sans traitement par SIG, c’est la diffé-rence de valeur entre la surface donnée par le récepteur (SGarmin) et la surface de référence(SProXR ) qui nous intéresse, indépendamment de l’exactitude du positionnement géographique.

Il s’agit ici de ll’’eerrrreeuurr ddee mmeessuurree ou erreur relative :

E. relative = 100 x (SGarmin – SProXR ) /SProXR

LL’’eerrrreeuurr ggééooggrraapphhiiqquuee, qui tient compte du positionnement géographique de la surface relevéepar le récepteur par rapport à la surface de référence (décalage éventuel), peut aussi êtrecalculée. Pour cela, l’aire d’intersection (Sinter) est utilisée (Forgues, 2001). Ce travail a été réaliséà l’aide d’un SIG (figure 1, ci-dessous).

E. géographique = 100 x (SProXR + SGarmin – 2Sinter ) /SProXR

FIGURE 1 AIRE D’INTERSECTION ENTRE LA SURFACE MESURÉE ET LA SURFACE DE RÉFÉRENCEd’après Forgues (2001)

Surfaced'intersection (Sinter)

Surfacemesurée (SGarmin)

Surfacede référence (SProXR)

TTAABBLLEEAAUU II CCaarraaccttéérriissttiiqquueess ddee ll’’eerrrreeuurr rreellaattiivvee eett ggééooggrraapphhiiqquueeeenn tteerrrraaiinn nnuu eett ssoouuss ccoouuvveerrtt.. SSuurrffaaccee mmeessuurrééee dd’’uunn hheeccttaarree

Terrain nu Sous couvert

Moy Min Max STD Moy Min Max STD

Erreur relative ................. 1,6% 0,3% 2,9% 0,8 4,1% –7,1% 18% 6,1

Erreur géographique ....... 7,3% 3,4% 11,8% 3,0 13,5% 3,6% 22,1% 4,3

RÉSULTATS

Erreur relative et géographique en terrain découvert

En terrain découvert, pour une surface d’un ha, l’erreur relative a varié entre 0,3 et 2,9 %(tableau I, ci-dessous). La mesure présente un biais puisque la moyenne sur 14 mesures (1,6 %)n’est pas centrée sur 0. Il y a donc eu une tendance du récepteur Garmin à surestimer la surfacede référence du ProXR. L’écart type des erreurs (STD = 0,8 %) nous donne une idée de la disper-sion des observations autour de la moyenne. Si l’on considère que cette dispersion suit une loinormale, l’imprécision de l’appareil (marge d’erreur) à 95 % peut être estimée par 1,96 x STD.Dans notre situation, l’erreur de mesure est comprise à 95 % de probabilité dans l’intervalle deconfiance de ± 1,6 %, soit l’intervalle [0 ; 3,2 %].

Dans les mêmes conditions, l’erreur géographique a varié entre 3,4 et 11,8 %. Le biais est plusimportant puisque la moyenne des mesures est de 7,3 %. De même, la dispersion des écartsautour de la moyenne est plus importante (STD = 3 %) ; 95 % des mesures sont comprises dansun intervalle de confiance de ± 5,9 %, soit l’intervalle [1,4 ; 13,2 %]. Cette erreur géographiquesur la surface correspond à un écart en distance des tracés du récepteur GPS par rapport à lasurface de référence compris entre 0 et 5 m (figure 2, ci-dessous).

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FIGURE 2TERRAIN DÉCOUVERT,

SURFACE D’UN HATracés successifs

du récepteur Garmin (en noir)par rapport à la surface de référence

(en rouge)

Les cercles en bleuont un diamètre de 10 m

FIGURE 3INFLUENCE DE LA TAILLE

DE LA PARCELLESUR L’ERREUR RELATIVE

(terrain découvert)

Influence de la taille de la parcelle et du couvert forestier

La date et le moment de la journée (mesure le matin ou le soir) n’ont pas eu d’influence signi-ficative sur l’erreur relative. De même, la répétition successive de la mesure dans une journée acouvert la même amplitude d’erreur que la répétition de mesures sur des jours différents.

En revanche, la taille de la parcelle a eu une influence significative sur l’erreur de mesure : plusla parcelle est grande et plus l’erreur diminue. La marge d’erreur passe respectivement à ± 0,9 %

Surface de la parcelle (ha)

Erre

ur rel

ativ

e (%

)

0 2 4 6 8

3,0

2,0

1,0

0,0

-1,0

et ± 0,7 % sur les parcelles de 4,5 ha et de 7,5 ha. On remarquera également que le biais dispa-raît à partir de la surface de 4,5 ha (figure 3, p. 532).

Le couvert forestier enfin a eu une influence très significative sur l’erreur de mesure (tableau I,p. 531). Sous couvert, lors des mesures sur une parcellede un ha, l’erreur relative a varié entre – 7,1 et 18,0 %.Un biais plus important (moyenne de 4,1 %) et une disper-sion plus forte des écarts (STD = 6,1) ont été observés.L’erreur de mesure est comprise à 95 % de probabilitédans un intervalle de confiance de ± 12 %, soit l’intervalle[– 7,9 ; 16,1 %] (figure 4, ci-contre).

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Outils et méthodes

FIGURE 4INFLUENCE DU COUVERT FORESTIER SUR L’ERREUR RELATIVEET L’ERREUR GÉOGRAPHIQUE (surface d’un ha)

Dans les mêmes conditions, l’erreur géographique a varié entre 3,6 et 22,1 %. Le biais est encoreplus fort puisque la moyenne des mesures est de 13,5 %. La marge d’erreur est donnée par l’in-tervalle de ± 8,4 %, c’est-à-dire que 95 % des erreurs sont comprises dans l’intervalle[5,1 ; 21,9 %]. Cette imprécision se traduit par des écarts en distance entre le tracé du récepteurGPS et le tracé de référence compris entre 0 et 12 m (figure 5, ci-dessous).

Tracés successifs du récepteur Garmin (en noir)par rapport à la surface de référence (en rouge).Les cercles en bleu ont un diamètre de 20 m.

E. relative

E. géographique

Erre

ur (%

)

E. relative - découvert

E. géographique - découvert

E. relative - couvert

E. géographique - couvert

25

20

15

10

5

0

-5

-10

FIGURE 5TERRAIN COUVERT, SURFACES EMBOÎTÉES DE 0,5 HA, 1 HA ET 1,5 HA

DISCUSSION ET CONCLUSIONS

Dans les conditions optimales de réception, c’est-à-dire en terrain découvert, la fonction surfacedu Garmin a une marge d’erreur relativement faible de ± 1,6 %. Le couvert forestier a uneinfluence significative allant dans le sens d’une dégradation nette de la précision. Les résultatsde ± 12 % ont été ici obtenus sous un couvert de Pin pignon. Dans d’autres situations, dans unpeuplement plus dense, présentant par exemple une plus grande surface terrière, les chiffrespourraient sans doute être très différents. Ils n’ont qu’une valeur d’exemple permettant dedonner une idée de la précision de l’appareil dans une situation forestière somme toute plutôtfavorable (terrain plat). Il faut plutôt s’attendre dans des conditions de terrain habituelles à desprécisions moins bonnes.

L’erreur géographique est toujours plus élevée que l’erreur relative. Cela traduit globalement unebonne conservation des surfaces mais une moins bonne localisation géographique.

Par ailleurs, les tests réalisés ont montré l’existence d’un biais. L’appareil surestime les surfacesde référence (obtenues à l’aide d’un ProXR avec correction différentielle). Le même constat a étéfait au cours d’autres tests similaires réalisés indépendamment, avec des surfaces de référenceétablies à l’aide d’un ProXR et d’un topofil (Ginet, non publié). L’existence de ce biais, si elle estconfirmée, pose bien évidemment un problème supplémentaire puisqu’il ajoute une incertitude àl’imprécision de l’appareil.

Plusieurs moyens permettent de minimiser cette imprécision :D’abord, en se limitant à la mesure de grandes surfaces puisque l’imprécision diminue avec lataille de la parcelle. Les résultats indiquent qu’en terrain découvert, la précision s’améliore signi-ficativement à partir de 4 ha. Ce seuil minimal sera vraisemblablement plus élevé en terraincouvert.Ensuite, en effectuant une moyenne sur plusieurs mesures. À noter que les résultats obtenussuggèrent que plusieurs mesures successives au même moment sont équivalentes en précision àplusieurs mesures étalées sur des jours différents. Dans le cas du couvert de Pin pignon, comptetenu de la variabilité de la mesure, il faudrait par exemple un minimum de 6 répétitions pourobtenir une moyenne fiable à 5 %. À noter que cette pratique ne permet pas pour autant des’affranchir du biais.Enfin, en se limitant à des configurations satellitales plus strictes, permettant de se placer dansles meilleures conditions de réception mais avec l’inconvénient de limiter encore les plages detemps disponibles.

Pour un opérateur disposant d’un SIG, il reste aussi la possibilité de calculer la surface en nesaisissant que les sommets de la zone et en reliant ces sommets dans un SIG. Cette méthodedoit permettre d’obtenir une meilleure précision mais elle suppose un temps de traitementbeaucoup plus long, avec un résultat différé dans le temps. Elle requiert surtout une compétencetechnique et un investissement matériel qui sont d’une tout autre nature que celle d’un récep-teur grand public utilisé seul.

Un récepteur GPS grand public peut-il être considéré sérieusement comme un appareil de mesurede surface et recommandé comme tel ? La réponse dépend du besoin de l’utilisateur, du contextedans lequel il travaille et de l’imprécision tolérée.

Bien souvent, les opérateurs ne disposent sur le terrain que d’une estimation très approximativedes surfaces. Les surfaces cadastrales ne sont pas toujours précises et ne peuvent être utiliséesque dans la mesure où l’on se situe dans le cas de travaux ou de peuplements qui suivent deslimites parcellaires. Dans les autres cas, le recours au topofil se révèle assez précis tant que les

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Outils et méthodes

surfaces sont petites et que le terrain est praticable mais les difficultés viennent avec les grandessurfaces dans des terrains salis. Il faut aussi considérer le temps nécessaire aux relevés ainsiqu’à leur traitement avant d’obtenir le résultat. Dans ce contexte, le récepteur GPS grand public,malgré sa sensibilité au couvert forestier et son biais, représente un outil simple et peu onéreux,donnant une information rapide et finalement relativement fiable.

Considérons maintenant le contexte des aides aux investissements forestiers. Le guide des procé-dures établi par le ministère chargé de l’Agriculture (2003) fournit aux acteurs intervenant dansla mise en œuvre et le suivi des dossiers d’aide en matière forestière les informations détailléeset pratiques dont ils ont besoin pour exécuter leur travail. Les mesures visées par ce manuel desprocédures sont notamment celles concernant le boisement des terres agricoles et les investis-sements dans les forêts dans un but d’amélioration (travaux de conversion, dépressage, recons-titution après catastrophe naturelle…). Le manuel précise des seuils de tolérance sur l’erreur decalcul des surfaces. Ces seuils dépendent du type de travaux et de la surface considérée. Parexemple, dans le cas du boisement de terres agricoles avec une pente inférieure à 10 % et sil’on utilise le GPS ou un topofil, la tolérance est de 5 % pour les surfaces inférieures ou égalesà 4 ha. Au-delà de 4 ha, elle est de 3 % si un récepteur GPS est utilisé. Comme il s’agit a prioride terrains à découvert, un récepteur grand public permettra de calculer les surfaces avec unemarge d’erreur inférieure au seuil de tolérance.

Inversement, dans le cas de reboisement ou de travaux d’amélioration, la tolérance est fixée à8 % pour les surfaces inférieures ou égales à 4 ha et à 5 % au-delà, si un récepteur GPS estutilisé. Dans la mesure où l’on travaille dans un contexte forestier avec une influence potentielledu couvert, on voit dans ce cas que cette exigence est certainement trop sévère pour qu’unappareil grand public puisse y répondre, du moins en mesure directe et sans utiliser un SIG.

Nicolas NGUYEN THE - Adeline GIRAUDAFOCEL Sud

Domaine de St-ClémentF-34980 SAINT-CLÉMENT-DE-RIVIÈRE

([email protected])

Alain BOUVETAFOCEL

Domaine de l’ÉtançonF-77370 NANGIS

([email protected])

Christophe GINET AFOCEL Nord-Est

Route de BonnencontreF-21170 CHARREY-SUR-SAÔNE([email protected])

BIBLIOGRAPHIE

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CALCUL DES SURFACES. ATOUTS ET LIMITES DES RÉCEPTEURS GPS “GRAND PUBLIC” (Résumé)

Les récepteurs GPS grand public connaissent un intérêt croissant du fait de leur faible prix et de leur facilitéd’emploi. Certains offrent la possibilité de calculer des surfaces directement sur le terrain, ce qui est unavantage important pour de nombreux opérateurs forestiers. Une expérimentation a été menée pour déter-miner les limites d’utilisation de ce type d’appareil pour le calcul direct de surface.

En conditions dégagées, sur une surface d’un ha, la surface réelle est surestimée en moyenne de 1,6 %, avecune marge d’erreur de ± 1,6 %. La surface réelle est donc comprise (au seuil de probabilité de 5 %) dansl’intervalle [– 3,2 % ; 0 %] autour de la valeur mesurée. L’imprécision et le biais s’améliorent avec la taillede la surface mesurée. En revanche, un couvert forestier provoque une augmentation du biais et une dégra-dation de la précision : sur une surface d’un ha, celle-ci est surestimée en moyenne de 4,1 % avec unemarge d’erreur de ± 12 %. La surface réelle est donc comprise (au seuil de probabilité de 5 %) dans l’in-tervalle [– 7,9 % ; + 16,10 %] autour de la valeur mesurée. L’acceptabilité de cette marge d’erreur estdiscutée.

COMPUTING SURFACE AREAS – PROs AND CONs OF GENERAL PURPOSE GPS RECEIVERS (Abstract)

General-purpose GPS receivers are becoming increasingly popular as a result of their low cost and ease ofuse. Some offer a function for computing surface areas directly in the field, a major benefit for many fores-ters. Experiments have been conducted to assess the limitations of these devices for the purpose of directsurface area calculations.

In open landscapes, the mean over-estimation of one hectare is 1.6 % with an error margin of ± 1.6 %. Theactual surface area therefore lies (for a probability threshold of 5 %) within an interval [– 3.2 %, 0 %] fromthe measured value. Accuracy improves and bias decreases the larger the surface area measured. On theother hand, a forest canopy increases the bias and adversely affects accuracy : on a surface area of onehectare, the over-estimation is 4.1% on average with an error margin of ± 12 %. The actual surface areatherefore lies within (for a probability threshold of 5 %) an interval [– 7.9 %, + 16.10 %] from the measuredvalue. The acceptability of this error margin is discussed.

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NICOLAS NGUYEN THE - CHRISTOPHE GINET - ADELINE GIRAUD - ALAIN BOUVET

MINISTÈRE DE L’AGRICULTURE. — Manuel de procédure pour les aides aux investissements forestiers. —Tomes I et III, 2003.

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